UN TRAITÉ D’ALLIANCE
AU XIVe SIÈCLE
PAR CH. LE FORT
L’excellent Répertoire, que M. de Segesser a joint à la seconde édition du tome premier des anciens recès fédéraux, mentionne, sous le No 233, un traité conclu pour le terme de dix ans, le 25 janvier 1350, entre l’évêque de Lausanne, les comtes de Savoie et de Genevois et les dames de Vaud d’une part, les villes de Berne et de Fribourg d’autre part. L’original de ce document, encore inédit, est indiqué, par M. de Segesser, comme étant conservé dans les archives de Berne 1 .
Ce traité avait été également signalé, mais d’une façon très sommaire, par quelques historiens 2 . /256/
Nous avions été immédiatement frappé de l’importance d’un acte révélant, au milieu du XIVe siècle, d’étroites relations entre les deux principales cités fondées par les Zähringen et les princes dont les possessions s’étendaient sur les deux rives du Léman.
Grâce à l’extrême obligeance de M. le secrétaire d’Etat de Stürler et au concours bienveillant de M. Théophile Dufour, directeur des archives de Genève, nous avons pu effectuer la transcription du texte original. Sa lecture ayant confirmé l’intérêt qu’il nous avait paru devoir offrir, nous n’avons point hésité à le livrer à l’impression, en l’accompagnant de quelques observations préliminaires qui pourront en faciliter l’étude.
I
En comparant avec les conventions de droit public des XIIIe et XIVe siècles le traité que nous publions, on reconnaît qu’il ne s’agit dans ce traité, ni de deux cités contractant une alliance, ni d’une ville recevant un dynaste dans sa combourgeoisie, ni de seigneurs s’unissant entre eux : ce sont deux séries d’unités politiques dont l’une contracte collectivement avec l’autre. La première de ces séries comprend un prince ecclésiastique, l’évêque de Lausanne, et trois seigneurs laïques : le comte de Savoie, le comte de Genevois, les titulaires de la baronnie de Vaud; la seconde de ces séries se compose de deux communautés urbaines, Berne et Fribourg. /257/
Recherchons quelle était, dans les premiers jours de 1350, la situation de ces diverses souverainetés et dans quelques circonstances elles ont conclu cette alliance.
Devenue ville impériale à l’extinction de la dynastie des Zähringen, Berne avait, dans le cours du XIIIe siècle, momentanément accepté le prolectorat des princes de Savoie, dans le but essentiel d’échapper à l’ambition des seigneurs plus rapprochés, notamment des comtes de Kybourg et de Habsbourg, et de mieux maintenir ses droits et ses libertés. Elle avait contracté des alliances avec d’autres cités, Fribourg, Bienne, Morat, Soleure, etc., aussi bien qu’avec des prélats et des communautés rurales, et noué avec divers seigneurs des traités de combourgeoisie. Elle avait conquis ou acquis des territoires, établi sa prépondérance sur tout l’Oberland, triomphé à deux reprises, les armes à la main (à Dornbühl en 1298 et à Laupen en 1339), des seigneurs coalisés contre elle. Depuis l’issue heureuse pour elle de la guerre de Laupen, Berne était parvenue à un degré éminent de puissance politique : elle imposait sa médiation aux villes et aux seigneurs. Elle avait renouvelé ses alliances et en avait établi de nouvelles. Elle devait, quelques années plus tard, en contracter une féconde en conséquences, l’alliance perpétuelle avec les trois Waldstatten.
Fribourg était déjà l’alliée de Berne, dès l’époque de la commune domination des Zähringen. Consignée par écrit, en 1243, cette alliance fut renouvelée à plusieurs reprises dans le cours des XIIIe et XIVe siècles. Mais la position politique des deux villes était différente. Fribourg avait passé sous la domination des Kybourg, puis sous celle des ducs d’Autriche, Aussi l’alliance fut-elle souvent ébranlée /258/ ou momentanément suspendue, et à l’amitié succéda, plus d’une fois, une hostilité déclarée.
A plusieurs reprises, à Dornbühl, et tout récemment encore à Laupen, les deux villes avaient combattu l’une contre l’autre. Dans cette dernière guerre, Fribourg se rattachait à une coalition embrassant l’empire, la maison d’Autriche, les dynastes de Neuchâtel et de Gruyère, et généralement la haute noblesse des pays burgondes, tandis que Berne n’avait trouvé d’appui qu’auprès de Soleure et des hommes d’Uri, Schwytz et Unterwald. Berne avait triomphé de ses adversaires, et à la suite d’une trêve ménagée, en 1340, par la reine Agnès, l’alliance avec Fribourg avait été solennellement renouvelée, le 6 juin 1341.
Huit ans après le renouvellement de l’alliance, Fribourg s’en prévalut pour appeler Berne à son aide contre divers seigneurs des environs. Mais les souvenirs de l’hostilité antérieure n’ayant pas encore entièrement disparu, elle pria son alliée de ne point faire flotter dans son contingent les bannières conquises à Laupen. Bientôt, la communauté des armes, les succès promptement remportés, firent cesser toute défiance : les deux cités sœurs soutinrent, les armes à la main ou dans des tractations diplomatiques, la même cause, celle de l’indépendance des communes vis-à-vis de la noblesse et de la sécurité de leurs ressortissants.
C’était bien, en effet, une cause de ce genre qui était en jeu. Ainsi que le fait remarquer le plus récent historien de Berne 1 , l’origine de la guerre de 1349 rappelle les plus mauvais temps du brigandage féodal. Mermette de /259/ Maggenberg, épouse de l’avoyer de Fribourg, revenant d’une noce à Lutry, traversait les possessions d’Othon d’Everdes; elle fut attaquée par l’ordre de ce seigneur et dépouillée de ses ornements : les bijoux qui lui furent enlevés avaient à eux seuls une valeur de plus de 500 fl. Les demandes de réparation formulées par Fribourg avaient été repoussées par le seigneur d’Everdes, dont les prétentions se trouvaient soutenues par les seigneurs de Corbières et de Vuippens, ainsi que par Pierre, comte de Gruyère, et son frère, Jean de Montsalvens.
C’est pour avoir raison de ces seigneurs que Fribourg avait fait appel à Berne, et que leurs contingents réunis s’avancèrent du côté de la Gruyère. Quoique le seigneur d’Everdes, à leur approche, se fût hâté de faire sa soumission, déjà les volontaires, précédant l’armée, avaient détruit son château. Celui de Vuippens subit le même sort.
Les troupes des deux cités agirent dès lors séparément. Les Fribourgeois occupèrent le château de Corbières, tandis que la petite ville de ce nom capitula, en se soumettant aux conditions qui seraient fixées par des députés de Berne, Morat et Payerne 1 . Les Bernois, après des combats très vifs, s’emparent de la tour de Trême, appartenant au comte de Gruyère, et, plus tard, dans les derniers jours de décembre, ils dirigent une attaque contre ce même comte en remontant le Simmenthal.
Mais déjà des démarches amiables avaient été entamées pour amener une suspension d’armes et régler pacifiquement les points en litige. L’initiative de ces démarches /260/ appartint probablement aux dames de Vaud dont les possessions confinaient au territoire dévasté par la guerre. Déjà, le 7 décembre 1349, elles étaient intervenues entre le sire de Vuippens, leur homme lige, et la ville de Fribourg 1 . Leurs députés, joints à ceux du comte de Savoie et de l’évêque de Lausanne, réunis à Morat dans les premiers jours de l’année suivante, parvinrent, le 11 janvier 1350, à ménager entre les belligérants une trêve d’un mois 2 , durant laquelle des négociations pour une paix définitive devaient, sous leur médiation, s’ouvrir à Payerne, le 23 janvier. Ces négociations aboutirent à un traité de paix, signé le 25 janvier, et qui, outre les questions immédiatement soulevées par la guerre (libération des prisonniers, indemnités, etc.), statuait, en les soumettant à des arbitres, sur d’anciennes contestations entre le comte de Gruyère et des magistrats notables de Berne, Jean de Bubenberg et Jean de Krambourg 3 .
C’est précisément le même jour, dans la même ville de Payerne et dans la même maison, que fut conclu 4 entre /261/ François (de Montfaucon), évêque de Lausanne, Amédée, comte de Savoie, Amédée, comte de Genevois, Ysabelle de Châlons et Catherine de Savoie, dames de Vaud, d’une part, et les avoyers, conseils et communautés de Berne et de Fribourg d’autre part, le traité d’alliance qui forme l’objet de notre étude. Les médiateurs, après avoir mis fin à la guerre entre les seigneurs féodaux et les deux villes, s’unissent à ces dernières pour étendre sur un territoire plus étendu les bienfaits de la paix et prévenir les conflits qui auraient pu survenir entre eux.
L’évêque de Lausanne, François de Montfaucon, qui, probablement en raison de sa dignité ecclésiastique, figure en tête du traité, appartenait à une noble famille du Bugey et siégeait dans le conseil du comte de Savoie. Il occupait depuis 1347 le siège de Lausanne. Son épiscopat fut marqué par divers actes relatifs à ses domaines temporels, notamment par deux transactions avec le comte de Savoie, conclues à la Tour, près de Vevey, le 30 janvier 1348, d’après les conseils du baron de Vaud et du comte de Genevois 1 .
Le comte de Savoie, Amédée VI, connu plus tard sous le nom de Comte Vert, ayant, en 1343, succédé à son père, à l’âge de neuf ans, avait été placé sous la tutelle du comte de Genevois et du baron de Vaud. Il devait, durant un règne de près de quarante ans, déployer d’éminentes qualités politiques et militaires, et agrandir territorialement la Savoie; il acquit, en effet, par voie d’échange, le Faucigny et le pays de Gex (1355), et par achat (1359) la baronnie de Vaud qui avait été détachée, en 1286, de l’ensemble des possessions de Savoie, en faveur de Louis, frère du comte Amédée V. /262/
Le comte de Genevois qui prend part au traité, à côté de celui de Savoie, sans avoir figuré comme médiateur, était Amédée IV, qui régna de 1320 à 1367. L’hostilité héréditaire entre sa maison et celle de Savoie avait, sous son règne, presque entièrement disparu. Parrain d’Amédée VI, il avait été, nous venons de le voir, désigné comme un de ses tuteurs, et ne cessa point de soutenir avec lui des relations bienveillantes.
La baronnie de Vaud était représentée dans le traité d’alliance, comme elle l’avait été dans les actes diplomatiques relatifs à la guerre d’Everdes, par Isabelle de Châlons et Catherine de Savoie, c’est-à-dire par la veuve et la fille de Louis II, baron de Vaud, qui, en 1302, avait succédé à son père, le premier baron de Vaud. Durant un règne de près d’un demi-siècle, Louis II avait joué dans le Pays de Vaud et la Savoie un rôle important et avait également été mêlé aux événements politiques et militaires de France et d’Italie. Son fils Jean ayant été tué à Laupen, en 1339, sa fille Catherine était appelée à lui succéder, et il en avait fait reconnaître les droits par les Etats de Vaud, en 1340 1 .
Isabelle de Châlons avait déjà, du vivant de son mari, fréquemment absent du pays, pris part à l’administration de la baronnie et son nom figure seul en tête de divers actes politiques : après la mort du baron Louis II, survenue probablement dans les derniers mois de 1348 ou les premiers jours de 1349 2 , elle continua, conjointement avec /263/ sa fille Catherine, à jouer un rôle actif dans le gouvernement intérieur et extérieur du pays; l’une et l’autre sont qualifiées de dames de Vaud.
Ce n’est pas la première fois que les deux cités des Zæhringen entraient en rapport avec les seigneurs et les prélats de l’Helvétie occidentale.
Le protectorat des princes de Savoie vis-à-vis de Berne avait cessé dans le cours du XIIIe siècle, mais le comte Aymon avait été reçu dans la combourgeoisie de Berne, en 1330; son frère Edouard avait précédemment contracté /264/ avec Fribourg une relation du même genre. Le premier baron de Vaud, Louis Ier, avait été combourgeois de Berne en 1297; le second, après avoir soutenu une guerre contre Fribourg, fut reçu dans la combourgeoisie de cette ville en 1310, combourgeoisie renouvelée en 1326 et 1334. Il avait, en cette qualité, soutenu Fribourg contre Berne dans la guerre dite de Gümminen et dans celle de Laupen, et nous ne rencontrons aucun acte témoignant qu’il ait conclu la paix avec les Bernois.
Berne et Fribourg étaient soumis spirituellement à l’évêque de Lausanne. Fribourg avait conclu une alliance avec lui, comme prince temporel, en 1343.
Ce qui caractérise le traité du 25 janvier 1350, c’est que l’alliance se conclut à la fois entre les deux villes et quatre seigneuries. Cette commune entente ne pouvait naître que de circonstances exceptionnelles; si, à cette époque, l’amitié entre les deux villes avait succédé à des périodes fréquentes d’hostilité, c’est aussi peut-être, dans le cours entier du XIVe siècle, le moment où l’évêque de Lausanne et les principaux princes laïques de la contrée se trouvent le plus étroitement unis. Ils pouvaient se joindre collectivement, sans arrière-pensée, aux efforts poursuivis par les deux cités burgondes pour la consolidation de la paix et la garantie des droits publics et privés. D’autre part, suivant la remarque de l’historien du diocèse de Lausanne, la faiblesse du gouvernement féminin de Vaud et la jeunesse d’Amédée VI devaient engager la baronnie de Vaud et la Savoie à chercher un appui auprès de ces vaillantes communautés de l’Uechtland. /265/
II
L’évêque, les seigneurs et les villes énoncent que, dans le but de maintenir les bonnes relations qui avaient existé entre leurs prédécesseurs et d’étouffer entre eux les germes de division, ils forment, pour le terme de dix ans, des « confédérations, alliances et conventions ». En réalité, ce traité renferme la substance de ce qui était désigné dans l’empire sous le nom de Landfriede, c’est-à-dire d’une charte de paix publique. Indépendamment des promesses de secours mutuels, il établit des prescriptions et des garanties qui appartiennent au droit international en matière pénale et civile.
On peut reconnaître cinq chefs de stipulations, qui s’annoncent, en général, par les mots sacramentels : Nos … promittimus, … Item promittimus, etc.
I. PROMESSES DE SECOURS RÉCIPROQUES. — La promesse de secours est formulée de la part de l’évêque, des comtes et des dames de Vaud, vis-à-vis des Bernois et des Fribourgeois; de la part de ces derniers vis-à - vis du prélat et des seigneurs.
Mais les conditions de secours sont, d’ailleurs, les mêmes dans ces deux positions.
Sur la demande d’un allié, le secours a lieu durant quinze jours, depuis celui où les troupes des comtes entrent à Fribourg, les troupes des deux villes à Lausanne; mais il n’a lieu aux frais de celui qui l’accorde que dans des limites déterminées. Ces limites partent de la cluse de Gex et de l’Arve, près de Genève, se dirigent jusqu’à la Reuss, au point de son confluent avec l’Aar, puis remontent /266/ l’Aar jusqu’à Olten, atteignent le château de Frobourg, et, de là, en suivant la chaîne des montagnes, soit alpes, rejoignent le point de départ. En dehors de ces limites, le secours est purement volontaire et aux frais de celui qui l’invoque.
La ligne directe entre le confluent de l’Arve et du Rhône et celui de la Reuss et de l’Aar passe en deçà de Fribourg, de telle sorte que le circuit ne paraît guère coïncider, au moins de ce côté, avec des circonscriptions géographiques. Le trait le plus intéressant de cette délimitation, c’est qu’elle suit exactement la crête des montagnes depuis Frobourg à l’extrémité du Jura, marquant ainsi, à quelques égards, la limite de la Suisse actuelle. Ce circuit a, d’ailleurs, une importance moins grande que celui qui est prévu dans le traité de 1318 entre cinq villes, et dans celui de Zurich avec les Waldstætten.
Les promesses de secours sont faites contra omnes, à quelques exceptions près, exceptions importantes à relever. Les princes réservent l’empire et le pape, leurs vassaux et sujets; Berne réserve l’empire, les ducs d’Autriche, ses combourgeois, vassaux et sujets; tandis que Fribourg s’exprime en ces termes : nos seigneurs les ducs d’Autriche et de Styrie, nos combourgeois, vassaux et sujets.
II. GARANTIE DE LA JURISDICTION TERRITORIALE. - Le second chef de stipulations prévoit les cas dans lesquels un ou plusieurs des sujets de l’un des contractants, domicilié dans le territoire d’un autre (penes cujus districtum vel resortum moram contraheret), refuserait de comparaître devant les tribunaux de ce dernier et serait ainsi désobéissant et rebelle vis-à-vis de lui. Dans ce cas, la /267/ jurisdiction, fondée sur le domicile, est strictement consacrée pour les délits et les contrats; elle l’emporte notamment sur le lien féodal qui rattache le rebellis au seigneur ou à la ville dont il dépendait originairement. Les alliés promettent de garantir par leur aide et conseils cette jurisdiction.
III. GARANTIE DE LA LIBERTÉ INDIVIDUELLE ET DE LA PROPRIÉTÉ. – Toutes les fois que le ressortissant d’un allié est injustement arrêté ou détenu, ou que ses biens sont saisis et enlevés, la seigneurie ou la cité sur le territoire de laquelle ces faits se sont produits est tenue de procurer la mise en liberté de la personne et la restitution intégrale des valeurs enlevées. Tous les alliés doivent, pour obtenir ce résultat, prêter main-forte, même en dehors de l’ensemble de leurs juridictions, au seigneur de celui qui est arrêté ou dépouillé.
IV. RESTRICTIONS A LA SAISIE. — Le traité interdit aux vassaux et aux sujets des contractants de saisir à titre de gage les biens des ressortissants d’un autre allié, si ce n’est en raison de dettes reconnues ou de délits : ces derniers sont jugés par le juge du lieu où ils sont commis. Les dettes non reconnues doivent être poursuivies devant le juge du domicile, mais le seigneur et les juges devant lesquels la demande est portée doivent faire en sorte que justice soit rendue dans un délai de quatorze jours.
On sait que des prescriptions de ce genre figurent presque constamment dans les traités d’alliance.
V. PROCÉDURE ARBITRALE POUR RÉGLER LES CONTESTATIONS ENTRE LES CONTRACTANTS ET LEURS SUJETS. – Ce dernier chef comprend les prescriptions les plus /268/ détaillées; elles sont en effet formulées séparément pour chacune des deux villes, et distinguent, dans la série seigneuriale, probablement en raison de la situation géographique, deux groupes, dont l’un est formé des comtes de Savoie et de Genevois, le second de l’évêque de Lausanne et des dames de Vaud.
On obtient ainsi quatre alternatives, que le traité examine l’une après l’autre :
1o Les comtes de Savoie et de Genevois, vis-à-vis de Berne.
2o Les mêmes, vis-à-vis de Fribourg.
3o L’évêque et les dames de Vaud vis-à-vis de Berne.
4o Les mêmes, vis-à-vis de Fribourg.
Dans chacune de ces alternatives, trois points sont successivement traités, généralement dans des termes identiques :
A. La composition du tribunal arbitral.
B. Le lieu de réunion de ce tribunal.
C. Les règles de droit, d’après lesquelles il est appelé à juger.
A. Composition du tribunal. — Le tribunal est constamment composé de trois personnes dont deux représentent les deux parties en cause, tandis que la troisième, remplissant les fonctions de sur-arbitre, doit, par son mode de nomination, offrir des caractères de neutralité et d’impartialité.
Le point de vue qui domine dans la désignation du premier élément, est de confier, à l’avance, le rôle d’arbitre à un représentant officiel du prince ou de la communauté. /269/
S’agit-il des comtes ? c’est le bailli de Saint-Maurice soit du Chablais qui est appelé à remplir ce rôle, le comte de Genevois est pour ainsi dire absorbé par celui de Savoie; s’agit-il de l’évêque ? c’est le bailli de Lausanne; s’agit-il enfin des dames de Vaud ? c’est le bailli de Vaud. Berne et Fribourg, d’autre part, sont représentés par leur avoyer.
Telle est la règle suivie dans les trois premières alternatives. Mais dans la quatrième (les dames ou l’évêque vis-à-vis de Fribourg) les deux arbitres sont purement et simplement désignés par les deux parties en cause.
La position de neutralité exigée du sur-arbitre pouvait résulter de deux modes de nomination : ou bien celle-ci était confiée à une communauté, en dehors des deux adversaires; ou bien, ces adversaires eux-mêmes concouraient l’un et l’autre, dans une certaine mesure, à cette désignation.
Le premier système est suivi dans les contestations entre les comtes et Berne; le sur-arbitre est nommé, en effet, par le conseil de Morat.
Le second procédé est admis dans les autres cas, mais son exposé exige l’indication de diverses hypothèses.
Les comtes sont en présence de la ville de Fribourg. – Si le demandeur est ressortissant des comtes, il désignera le sur-arbitre parmi les membres du conseil de Fribourg. Si le demandeur est Fribourgeois, il devra appeler au rôle de sur-arbitre un des châtelains ou des conseillers des comtes.
L’évêque et les dames de Vaud vis-à-vis de Berne. – Le sur-arbitre est nommé par le demandeur dans le conseil de Fribourg. /270/
L’évêque et les dames vis-à-vis de Fribourg. - Le demandeur ressortissant de l’évêque nomme un des membres du conseil de Fribourg; s’il appartient à Fribourg il désignera un conseiller ou châtelain de l’évêque.
Dans tous ces cas le tribunal doit juger dans un délai de sept semaines.
B. Le lieu où se réunit le tribunal-arbitral est indiqué pour chaque alternative, et en outre, lorsque la contestation concerne les comtes ou leurs ressortissants, ce lieu varie suivant la situation géographique de l’affaire, et c’est Morges qui constitue la limite.
Les contestations entre les comtes et Berne se rapportant à des affaires en deçà de Morges sont jugées à Morat; au delà, elles le sont à Payerne. Les différends entre les comtes et Fribourg prenant naissance en deçà de Morges sont réglés à Payerne; au delà de Morges, à Moudon; de telle sorte que Payerne est tantôt la marche la plus occidentale, tantôt la marche la plus orientale.
Entre les dames ou l’évêque et les villes, le tribunal siège constamment à Peyroules; entre ces mêmes princes et Fribourg, il siège à Chénens 1 .
C. Règles de droit servant de base à la décision des arbitres. — Ce troisième point est le seul qui soit fixé de la même manière pour les quatre alternatives. /271/
Quatre fois la même formule est répétée. On doit juger, pour les délits, d’après la coutume du lieu où le délit a été commis; pour les immeubles, suivant la coutume du lieu où ces immeubles sont situés.
Le traité est terminé par des prescriptions sur le remplacement éventuel d’un arbitre, mort ou tombé malade, et par les serments des parties contractantes.
En août 1350 une convention spéciale et supplémentaire intervient entre les dames de Vaud et les deux villes et fait allusion au récent traité de confédération (durante termino Confederationis inter nos de novo facte). Des tribunaux mixtes sont institués pour juger les crimes (homicides exceptés) commis sur le territoire des contractants 1 .
III
Quelle a été la portée pratique de ce traité du 25 janvier 1350 ? Des secours ont-ils été accordés par les maisons de Savoie et de Genevois à Berne et Fribourg et par ces villes aux princes de ces deux maisons ? Des tribunaux arbitraux ont-ils été constitués d’après ces prescriptions minutieuses ? Il est difficile de le déterminer. Toutefois il paraît qu’un contingent de Berne a pris part aux guerres du comte de Savoie contre le Dauphiné en 1353 et 1354.
En outre, le régime légal, établi pour dix ans, s’est maintenu bien au delà de ce terme. Le traité conclu le 16 février 1364 entre les deux villes et le comte de Savoie, reproduit, à une seule exception près, toutes les stipulations que nous venons d’étudier et les consacre /272/ dans des termes presque identiques, et des conventions ultérieures peuvent encore être signalées 1 .
En tout cas, le fait de ce premier traité de 1350, n’est point sans intérêt pour l’histoire de la Suisse et pour celle du droit public fédéral.
Au moment où Berne, par son accession à l’alliance des Waldstetten, allait donner une nouvelle force au faisceau des ligues, appelé à devenir la Confédération suisse, il n’est pas indifférent de voir cette ville établir des rapports intimes avec les seigneurs des territoires sur lesquels, beaucoup plus tard, cette confédération devait s’étendre. Il importe de constater, que les principes servant de base aux alliances suisses, tels que la réciprocité des secours, le respect de la liberté individuelle, la restriction des saisies, la procédure d’arbitrage, etc., étaient consacrés jusqu’au Jura et même sur les deux rives du Léman.
L’étude approfondie des alliances de l’Helvétie occidentale servira, nous n’en doutons point, à constater dans le développement du droit public fédéral, plus d’homogénéité qu’on ne le présume à l’ordinaire et à établir un lien entre les premières et les dernières périodes de l’histoire de la Suisse. Si l’accès à la ligue des Waldstetten n’a eu lieu que progressivement de l’est à l’ouest, le système des alliances, les institutions fondant la paix sur le respect des droits et la procédure arbitrale avaient /273/ déjà pris pied à l’ouest de l’Aar et préparé le terrain sur lequel s’est élevée la Confédération. Il est donc nécessaire de recueillir avec soin tous les documents sur lesquels cette étude devra s’appuyer, et c’est dans ce but que nous avons tenu à mettre au jour le traité du 25 janvier 1350.
/274/
TRAITÉ D’ALLIANCE
conclu pour dix ans entre François, évêque de Lausanne, Amédée, comte de Savoie, Amédée, comte de Genevois, Isabelle de Châlons et Catherine de Savoie, dames de Vaud, d’une part, et les villes de Berne et de Fribourg, d’autre part 1 .
Payerne, 25 janvier 1350.
Nos Franciscus, Dei gratia episcopus Lausannensis, Amedeus Sabaudie et Mauranie comes duxque Chablesii et Auguste ac in Ytalia marchio, Amedeus comes gebenensis, Ysabella de Cabellione et Katherina de Sabaudia, ex una parte, et nos advocati, consules et communitates de Berno et de Friburgo, Lausannensis dyocesis, ex altera, notum facimus universis, quod nos attendentes statuum nostrorum decere regimini, ut intuitu zeli, sinceritas que inter nos et nostros predecessores extitit veterata, felicis unitatis continuacione laudabiliter solidetur, et affectantes oppere summo zizanie seminibus que inter nostros subditos hostis quietis inpatiens spargere satagit atque studet tranquillique statu[s], Deo propitio, providere ex certa nostra scientia, ultro unanimes et concordes confederaciones, /275/ alligantias et pactiones fecimus, ordinavimus et pro nobis nostrisque subditis sequacibus et valitoribus nostris universis et singulis concessimus, per decennium hodie inchoatum, firmiter et inviolabiliter duraturas, juxta modos et formas qui et prout inferius declarantur.
Primo quod nos prenominati Episcopus, comites et domine contra omnes, exceptis summis sacrisque Romanis Pontifice et Imperio ac omnibus nostris dominis subditis et fassallis juratisque, nunc usque de tempore preterito tenebimur bona fide, et per juramenta nostra, pro nobis nostrisque successoribus, promittimus juvare, prout decet honorem nostrum cujuslibet, dictos Bernenses et Friburgenses ad eorum requestam, nostris expensis propriis, per quindecim dies integros inchoandos exclusive in die qua gentes quas destinabimus in eorum subsidium villam Friburgensem ingressi fuerint supradictam, vel prope. Et hoc intra limites infra scriptos, videlicet a clusa dicta Gez et a fluvio dicta (sic) Arva, prope Gebennensem civitatem, usque ad aquam dictam Rüsa, prout deorsum defluit ad aquam Ararim et aquam Ararim sursum usque in locum dictum Olten, et ab inde usque ad castrum dictum Vroburg, et exinde per montes seu alpes usque ad clusam de Gez et aquam dictam Arvam predictas, prout nives de montibus seu de alpibus intra defluunt ad loca inclusa ex latere utroque, et ultra omnes predictos terminos et limites omnes et singulos, eorum tamen sumptibus et expensis juvabimus, si nostre fuerit voluntatis. Nos vero, vice versa, Bernenses et Friburgenses predicti tenebimur bona fide et per juramenta nostra, pro nobis et nostris successoribus, promittimus dictos dominos episcopum, comites et dominas Waudi et eorum quemlibet ad eorum instanciam et requestam, /276/ seu alterius eorumdem, prout congruit statui et honori nostris et nostrum cujuslibet juvare, nostris expensis propriis, per quindecim dies integros inchoandos inclusive in die qua gentes quas destinabimus in eorum subsidium vel alterius eorum ingressi fuerint Lausannensem civitatem, vel prope, et hoc quodlibet intra limites intra quos et usque ad quos nos juvare convenerunt, prout supra, et ultra omnes predictos terminos et limites ipsos omnes et singulos, eorum tamen sumptibus et expensis juvabimus, si nostre fuerit voluntatis, videlicet contra omnes, exceptis, pro parte nostra Bernensium, sacro sancto Romano imperio, dominis ducibus Austrie, dominis conburgensibus et conjuratis nostris de tempore preterito usque nunc, nostris subditis et vassalis. Et exceptis, ex parte nostra Friburgensium, dominis nostris Austrie et Styrie ducibus, conburgensibus et conjuratis nostris de tempore preterito usque nunc, nostris subditis et vassallis.
Item promittimus per modum predictum, nos Episcopus, Comites, domine Waudi, Bernenses et Friburgenses predicti quod si fortasse contingeret, infra dictum terminum, aliquem vel aliquos ex subditis nostrum predictorum aliquo casu erga dominum, penes cujus districtum vel resortum moram contraheret, esse rebellem et nolentem facere et capere jus in curia dicti domini, penes quem larem foveret, seu de cujus jurisdictione et districtu esset et ad quem spectaret, super hiis que ibidem commisisse posset contraxisse, vel de et super quibus inpeteretur seu conveniretur, quod nos omnes alii supradicti et alie supradicte dominum talem juvabimus, ad requisicionem ipsius, ad faciendum et recipiendum jus per dictum inobedientem, de et super predictis, in curia domini sui predicti./277/
Item promittimus ut supra nos predicti et predicte quod si, infra dictos decem annos, contingat aliquem vel aliquos ex subditis alicujus vel aliquorum nostrum in terra alterius capi vel personaliter detineri injuste, aut bona ipsius vel ipsorum capi, rapi vel quomodolibet detineri, quod ille nostrum in cujus jurisdictione et terra predicta facta contra expeditionem et liberacionem dicti talis capti cum suorum restitucione capitalium et bonorum integra facere realiter teneatur. Et ad hoc faciendum, nos omnes predicti et predicte debemus dare auxilium, consilium et favorem. Et si forte predicta fieri contingant extra terram, jurisdictionem et resortum omnium nostrum predictorum et predictarum, ad facienda omnia predicta, que in presenti articulo continentur, juvabimus omnes predicti dominum dicti carcerati, vel bonis suis spoliati, ad relaxacionem ipsius detenti et restitucionem bonorum et emendam injurie et dampnorum suorum eidem faciendam, ad requisicionem talis domini, bona fide et sine fraude quacumque.
Item est actum et conventum inter nos partes predictas quod gentes nostre seu subditi dictorum episcopi, comitum, dominarum, Bernensium et Friburgensium non debent, nec eis liceat, mutuo pignorare, seu vadiare, gentes vel subditos nostrum omnium predictorum, bonave barrare vel barari facere, nisi tantum pro debito per litteram vel confessionem legitimam recognito vel confesso, vel propter maleficium commissum, quod secundum consuetudinem loci ubi committeretur judicetur et puniatur ibidem in persona et in rebus delinquentis inventis et detentis in loco ubi esset malificium perpetratum vel commissum, set pro debitis et promissionibus sicut premittitur non recognitis, teneantur actores seu petitores utriusque partis recipere /278/ complementum justicie coram judice penes quem reus seu rei a quo vel a quibus talia debita seu possessiones peterentur personaliter residerent, ita quod ad hoc per suos dominos seu judices compellantur; hic tamen quod ipsi domini vel judices coram quibus peticio seu causa hujusmodi verterentur facient et procurent quod actor seu petens quicumque habeat et obtineat complementum justicie quam cicius fieri poterit, cessante penitus omni fraude et dolo, infra quatuordecim dies.
Volentes insuper nos partes predicte quod si forte inter nos gentes nostras predictas seu subditos infra dictum terminum racione pignerationum, vel alio quovis modo, aliqua discordia oriretur, quod dicta discordia concordari valeat, debeat et sedari per modum inferius designatum, videlicet illa discordia que nos dictos dominos comites, gentes nostras seu subditos ex una parte et nos advocatum, consules et communitatem de Berno nostrasque gentes et subditos ex altera tangeret, per dominum balivum Aganensem seu Chablesii ac advocatum Bernensem, qui pro tempore fuerint, ad hoc per nos dictas partes electos, ita quod illi de Moreto possint et debeant, tanquam a nobis super hoc potestatem habentes, eligere unam alteram terciam personam ydoneam quamcumque voluerint, que cum aliis duobus balivo et advocato se ad sedandam dictam discordiam obtemperet; qui tres, dominus balivus, advocatus et per dictos Muretenses electus debent jus dicere secundum consuetudinem loci in quo injuria vel maleficium essent commissa, si super maleficiis et injuriis ageretur; et si super possessionibus et rebus immobilibus et hujusmodi similibus ageretur, debent jus dicere secundum consuetudinem loci ubi res immobiles et /279/ possessiones jacerent, quam cicius poterunt sine fraude infra septem septimanas continuas postquam electi fuerint ut supra. Et est sciendum quod super causis a villa Morgie a parte dictarum villarum citra subortis in villa de Moreto et super causis a dicta villa Morgie a parte comitatus Sabaudie in villa de Paterniaco placitare debetur et quicquid per dictos tres sic electos aut per majorem partem ipsorum super dictis causis et discordiis, dictum, arbitratum seu pronuntiatum fuerit, ratum et firmum debet a partibus et litigantibus attendi et inviolabiliter observari. – Discordia autem, que nos dictos comites, gentes nostras seu subditos ex una parte et nos advocatum, consules et communitatem de Friburgo nostrasque gentes et subditos ex altera tangeret, sedari et concordari debet per hunc modum, videlicet quod actor seu petens a parte nostra dictorum comitum tenetur eligere una cum balivo nostro Chablesii et advocato Friburgi qui pro tempore fuerint ad hoc per nos dictos comites electos unum quemcunque voluerit de consulibus dictorum Friburgensium; qui tres balivus, advocatus et unus dictorum consulum sic electi debent et tenentur jus dicere super dictis causis et discordiis secundum consuetudinem loci in quo maleficium seu injuria essent commissa, si super maleficiis et injuriis ageretur; et si super aliis rebus inmobilibus et possessionibus aut similibus ageretur, debent jus dicere secundum consuetudinem loci ubi dicte res inmobiles et possessiones jacerent, quam citius poterunt, sine fraude, infra septem septimana [s] ut supra. Actor autem seu petens a parte nostra dictorum Friburgensium tenetur et debet eligere una cum balivo Chablesi et advocato Friburgi qui pro tempore fuerint ad hoc per nos dictos Friburgenses electos unum quemcumque /280/ voluerit de consulibus seu de castellanis dictorum dominorum comitum; qui tres balivus, advocatus friburgensis, unusque dictorum consulum seu castellanorum dictorum dominorum comitum, sic electi, debent et tenentur jus dicere super dictis causis seu discordiis, per modum superius designatum. Et est sciendum quod super causis a villa Morgie a parte dictarum villarum citra subortis in villa de Paterniaco et super causis a dicta villa Morgie ex parte comitatus Sabaudie in villa de Melduno placitare debetur. Et quicquid per dictos tres sic electos, aut per majorem partem ipsorum, super dictis causis seu discordiis dictum, arbitratum seu pronunciatum fuerit, debet a partibus et litigantibus attendi et inviolabiliter observari. – Illa vero discordia, que nos predictos episcopum, dominas Waudi, gentes nostras seu subditos ex una parte et nos dictos Bernenses nostrasque gentes ac subditos ex altera tangeret, per balivum Lausannensem, ubi questio esset de subditis et gentibus ecclesie Lausannensis, et per balivum Waudi ubi questio esset de gentibus et subditis dominarum predictarum ac advocatum de Berno qui pro tempore fuerint ad hoc per nos dictos episcopum et dominas et Bernenses electos, ita quod actor possit eligere quemcumque sibi placuerit de consulibus Friburgi qui cum aliis duobus balivo et advocato se ad sedandam dictam discordiam obtemperet; qui tres balivus, advocatus et dictus electus debent jus dicere in villa de Pyroules secundum consuetudinem loci in quo injuria vel maleficium essent commissa, si super maleficiis vel injuriis ageretur, et si super possessionibus vel rebus inmobilibus ageretur debet jus dicere secundum consuetudinem loci ubi dicte possessiones seu res inmobiles jacerent, quam cicius poterunt, sine fraude, infra /281/ septem septimanas continuas, postquam electi fuerint ut supra; et quicquid per dictos tres sic electos, aut per majorem partem ipsorum, super dictis causis seu discordiis dictum, arbitratum seu pronunciatum fuerit, debet ratum atque firmum a partibus et litigantibus attendi et inviolabiliter observari. — Illa autem discordia, que nos dictum episcopum, dominas Waudi, gentes nostras seu subditos ex una parte et nos Friburgenses nostrasque gentes et subditos ex altera tangeret, sedari debet per hunc modum, videlicet quod quelibet pars unum eligat arbitrum, ita quod actor seu petens a parte nostra dicti episcopi et dictarum dominarum Waudy tenetur et debet eligere unum de consulibus Friburgi quemcumque voluerit; qui tres sic electi debent et tenentur jus dicere in villa de Chenens per modum superius designatum. Et quicquid per dictos tres sic electos, aut per majorem partem ipsorum, super dictis causis seu discordiis, dictum, arbitratum seu pronunciatum fuerit, ratum atque firmum debet a partibus et litigantibus attendi et inviolabiliter observari. Actor autem seu petens a parte nostra dictorum Friburgensium tenetur et debet eligere, una cum dictis duobus sic electis, quemcumque voluerit de consulibus seu castellanis dicti domini episcopi et dictarum dominarum Waudi : qui tres sic electi debent et tenentur jus dicere in dicta villa de Chenens, modo et forma superius declaratis; et quicquid per dictos tres sic electos, aut majorem partem ipsorum, super dictis causis seu discordiis dictum, arbitratum seu pronunciatum fuerit, ratum atque firmum a partibus et litigantibus debet attendi et inviolabiliter observari.
Ad que attendenda per dominos et superiores, qui ad hec sunt astricti, necessario compellantur litigantes et medius /282/ electus jus dicere et questionem terminare intra tempus predictum. Ubi vero ante questionem sopitam alterum trium predictorum absentari, mori vel infirmitate detineri contingeret, possit alius loco ejus substitui et eligi per eum vel eos qui absentem, defunctum vel infirmum elegerat vel elegerant, qui ipso mortuo, infirmo vel absenti obtineat potestatem. Nos autem episcopus, comites, domine, Bernenses, et Friburgenses predicti, nostro et nomine nostrorum, omnia et singula prescripta et predicta attendere, exequi et adimplere per juramenta nostra, ad sancta Dei ewangelia corporaliter prestita, tam per nos episcopum, comites, dominas, advocatum, consules et communitates de Berno et Friburgo predictos, promittimus, ad sancta Dei ewangelia, et juramus insuper, promittentes per juramenta premissa corporaliter tacta, contra premissa vel aliquod de premissis, per nos vel per alium, tacite vel occulte, durante decennio predicto, nullatenus contra facere vel venire modo nec venire volenti, aliquo consentire. In cujus rei robur et testimonium nos episcopus, comites, domine, communitates Bernensium et Friburgensium predictorum sigilla nostra et nostrum singulorum et universorum presentibus duximus appendenda. Datum et actum Paterniaci in domo habitacionis Perreti Maleti, dicti loci hospitis, die vicesima quinta mensis Januari[i] anno Domini a nativitate ejusdem sumpto Mo CCCo Lo, ab incarnacione vero sumpto anno Mo CCCo XL nono.
(Original sur parchemin appartenant aux archives d’Etat de Berne. — Sept sceaux y avaient été appendus sur double queue de parchemin : il n’en reste que six.)