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Mémoires et documents de la Société d’histoire de la Suisse romande

Edition numérique

Frédéric BARBEY

Louis de Chalon, prince d’Orange
seigneur d’Orbe, Échallens, Grandson
1390-1463

Dans MDR, Seconde série, 1926, tome XIII, pp. 4-372

© 2025 Société d’histoire de la Suisse romande

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LOUIS DE CHALON

PRINCE D’ORANGE

SEIGNEUR D’ORBE, ÉCHALLENS, GRANDSON

1390-1463

PAR

FRÉDÉRIC BARBEY

 

Louis de Chalon
Louis de Chalon
d’après une statue au château d’Arguel


 

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INTRODUCTION

Entre la rivière de l’Ain et la frontière franco-suisse s’étend une région accidentée, couverte presque partout de noires forêts de sapins. C’est un pays de montagne, avec des pâturages, de pauvres champs de culture, pays au climat rude, aux hivers longs et rigoureux.

Il y a cinq siècles, une vie intense régnait dans cette partie du Jura. La petite ville de Nozeroy, dominant le riant vallon de Mièges, était le centre de cette animation. Les voyageurs se rendant à Besançon, à Dôle ou à Pontarlier ne manquaient pas de s’y arrêter, attirés par la masse de l’énorme château qui flanquait la colline et par la cité ceinturée de remparts et de tours, avec ses portes monumentales. Aujourd’hui, le tableau est bien changé. L’activité d’autrefois a fait place à la solitude. Les environs de Nozeroy ne sont plus égayés par les cris des chasseurs, par les longs convois de mules et de chevaux passant au pied de la forteresse, par les brillantes escortes des seigneurs. Un calme absolu règne aux alentours du bourg délaissé par routes et chemin de fer.

Pourquoi ce changement, cette transformation au cours des siècles ? La disparition d’une famille riche, puissante, honorée, en est la cause. Durant trois siècles, /6/ les sires de Chalon-Arlay 1 ont dominé en véritables souverains cette partie du Haut-Jura; ils y ont laissé un souvenir inoubliable de grandeur. Parmi eux, le second représentant de la maison de Chalon-Orange, Louis, qu’on surnomma le Bon, y exerça une influence extraordinaire. En même temps qu’il prenait une part importante à la politique du royaume de France, à la lutte impitoyable des Armagnacs et des Bourguignons, à la vie de la cour ducale de Bourgogne, il s’occupait activement de ses domaines et de ses châteaux.

C’est à ce personnage que cette étude est consacrée. Sa qualité de premier vassal du duc de Bourgogne, ses rapports directs avec le roi de France, le rôle éminent qu’il joua dans l’histoire de Franche-Comté, de Bourgogne et du pays de Vaud pendant la plus grande partie du XVe siècle, nous ont paru dignes d’être examinés avec soin. Les documents, dont un grand nombre inédits, abondaient. Cette abondance nous a plus d’une fois jeté dans l’embarras, car dans la complexité des faits que présente l’histoire politique de la France au XVe siècle et de la guerre de Cent ans, il est indispensable de faire un choix. Jusqu’au traité d’Arras, mêlé à presque tous les événements du Royaume, en relations avec l’empereur Sigismond de Luxembourg, avec le duc de Savoie, Louis de Chalon a frappé les contemporains et les chroniqueurs.

La maison de Chalon-Orange n’a pas eu d’historien, /7/ du moins dans le sens que nous donnons à ce mot aujourd’hui. En effet, le Tableau de l’histoire des princes d’Orange, que publia Joseph de La Pise, à la Haye, en 1639, est moins une histoire des princes d’Orange qu’un panégyrique destiné à flatter l’amour-propre des souverains d’Orange-Nassau et à s’attirer leurs faveurs. Les inexactitudes fourmillent dans cet ouvrage et en ce qui concerne Louis de Chalon, nous y avons eu rarement recours. Seule l’histoire même de la ville d’Orange présente quelques garanties, car La Pise a pu consulter les registres de délibérations des syndics qui existent encore aux Archives municipales.

Edouard Clerc, dans le tome II de son Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, a mentionné à plusieurs reprises le rôle que joua le prince d’Orange dans l’entourage du duc de Bourgogne et dans la Comté. Nous avons maintes fois puisé dans ce consciencieux travail, où malheureusement les références laissent à désirer. Enfin, le baron de Gingins-La Sarraz a publié une étude sur les possessions des sires de Chalon au pays de Vaud, en utilisant l’ouvrage précédent et en y ajoutant les renseignements trop peu nombreux qu’ont pu lui fournir les archives du canton de Vaud.

Pour suivre avec un certain détail les destinées des princes d’Orange, l’historien est obligé de porter ses recherches non seulement en France, mais dans les pays voisins.

Ce sont cependant les archives départementales du Doubs qui nous ont procuré les éléments essentiels de notre étude. La série B ou Trésor des Chartes renferme un fonds important pour la maison de Chalon-Arlay. /8/ Les comptes de cette même maison qui se trouvent dans la série E nous ont fourni quantité de renseignements précieux sur la vie intime du prince d’Orange, sur l’administration de ses domaines et nous ont permis surtout de préciser les grandes dates de son existence aventureuse. Nous mentionnerons aussi ces registres d’enquêtes, composés au cours des nombreux procès qu’eurent les sires d’Arlay et qui sont une des sources les plus curieuses pour l’histoire de la maison de Chalon. Grâce à eux, une foule de détails nous ont été conservés, qui jettent un singulier jour sur la conduite de Louis de Chalon.

Aux Archives de l’Isère, la série B contient une partie du fonds de la principauté d’Orange, dont le reste se trouve aux Archives de Vaucluse. Il est regrettable que ce fonds ait été ainsi partagé. Nous avons trouvé à Grenoble plusieurs documents concernant les entreprises de Louis en Dauphiné et principalement sa tentative d’Anthon. A Avignon, nos recherches n’ont pas été très fructueuses.

Par contre, les Archives municipales d’Orange sont riches en précieux renseignements sur les sires de Chalon-Orange. Elles possèdent plusieurs lettres missives des princes et une série de délibérations communales presque complètes pour le XVe et le XVIe siècle. Dans les Archives de la Côte-d’Or, peu de textes à signaler, malgré le rôle important joué par le prince d’Orange à la cour du duc de Bourgogne; il faut se contenter de dépouiller les comptes des receveurs ducaux qui donnent quelques détails sur les opérations militaires de cette époque. /9/

A Paris, les Archives Nationales ne nous ont, pour ainsi dire, rien fourni, mais la collection Moreau, à la Bibliothèque Nationale, renferme de nombreuses copies faites dans les dépôts de Franche-Comté.

Quant à l’étranger, les Archives Impériales d’Autriche, à Vienne, présentent un très grand intérêt pour l’histoire de Bourgogne à la fin du moyen âge et elles mériteraient une exploration méthodique. Les registres des diplômes de l’empereur Sigismond nous ont permis d’examiner les rapports de ce souverain avec Louis de Chalon, qu’il avait créé son vicaire en Bourgogne.

En Suisse, l’important dépôt des Archives de Bâle est une mine inépuisable pour l’histoire politique de l’Europe à partir du XVe siècle. Les recherches y sont rendues faciles grâce à un classement fort bien compris. Nous avons trouvé là quelques documents curieux sur l’expédition du sire de Chalon de 1424. Enfin, les archives de Neuchâtel, de Lausanne et celles de la ville d’Orbe ont été utilement consultées.

Les sources narratives sont pauvres pour l’histoire des princes d’Orange. Seule, la chronique de Georges Chastellain, rédigée dans l’entourage du duc de Bourgogne, mérite d’être citée. Quant à Gollut, l’historien franc-comtois, ses renseignements sont sujets à caution et le plus souvent en contradiction avec les documents d’archives.

Telles sont les sources que nous avons utilisées pour ce travail, qui fut présenté comme thèse à l’Ecole des Chartes.

Ayant conscience de ses imperfections, ce n’est pas sans hésitation que nous le publions sous les auspices /10/ de l’une des doyennes des sociétés d’histoire de la Suisse. Mais, séduit par la riche collection de documents inédits du XVe siècle des archives du Doubs, comme l’eût été un Frédéric de Gingins s’il les avait connus, nous nous sommes décidé à en signaler l’intérêt au public. Nous avons présumé qu’ils seraient peut-être appréciés de ceux qu’attire l’histoire des rapports vaudois et franc-comtois, dans les temps qui précédèrent la conquête du pays de Vaud par Berne. Les Archives du Doubs, on l’a dit, constituèrent en quelque sorte le trésor qui nous permit d’écrire cette étude. Leur conservateur d’alors était l’archiviste Jules Gauthier, savant passionnément et minutieusement instruit de l’histoire de Franche-Comté. A vingt-cinq ans de distance, nous gardons un souvenir ému des heures passées en sa compagnie à Besançon, mettant à contribution sa science tandis que nous étions sous le charme de ses pittoresques propos.

Nous sommes profondément reconnaissant à M. Ernest Cornaz, membre du Comité de la Société d’histoire de la Suisse Romande, du précieux concours qu’il nous a prêté en surveillant cette publication et en nous communiquant ses observations, ainsi qu’à M. Albert Naef, archéologue cantonal, qui a répondu avec tant d’obligeance à nos questions, et à M. le Dr Huber, directeur des Archives de Bâle. A la « Romande » enfin, qui rendit possible cette publication va notre vive gratitude.

Paris 1900 - Bruxelles 1925.

Frédéric Barbey.


 

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INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
DES OUVRAGES CITÉS ET UTILISÉS

 

  • Altmann. (Dr Wilhelm) Die Urkunden Kaiser Sigmunds. 1410-1437. Collect. des Regesta Imperii, de Böhmer, t. XI. Innsbruck, 1896-1900. 2 vol. in-4o.

  • Barbey (Frédéric). Orbe sous les sires de Montbéliard et de Chalon, d’après les comptes inédits de la ville. Extrait de la Revue historique vaudoise. Lausanne, 1911, in-8o.

  • Bazin (J. Louis). La Bourgogne de la mort du duc Philippe-le-Hardi au traité d’Arras. 1404-1435. Extrait des Mémoires de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Beaune, 1897. Beaune, 1898. In-8o.

  • Berry. Chronique de Gilles le Bouvier, dit Berry, dans Denis Godefroy, Histoire de Charles VI. Paris 1653 pp. 411-444 et Histoire de Charles VII, Paris 1661 p. 380.

  • Besse. Recueil de Pièces servant à l’histoire de Charles VI. Paris 1660. In-8o.

  • Boyve (J.). Annales historiques du comté de Neuchâtel et Valangin depuis Jules César jusqu’en 1722. Berne, 1854-59, 5 vol. in-8o.

  • Canat de Chizy (Marcel). Documents inédits pour servir à l’histoire de Bourgogne, t. I (le seul paru). Chalon-sur-Saône, 1863. In-8o. /12/

  • Chastellain (Georges). Oeuvres. Ed. Kervyn de Lettenhove. Bruxelles, 1863-1866. 8 vol. in-8o.

  • Chevalier (l’Abbé C. V. J.). Choix de documents historiques inédits sur le Dauphiné. Bulletin de la Société de statistique du département de l’Isère. Tome VI, 3e série. Montbéliard et Lyon, 1874. In-4o.

  • Clerc (Edouard). Essai sur l’histoire de Franche-Comté. Besançon 1870, 2e édition, 2 vol. in-8o.

  • Cousin (Gilbert, de Nozeroy). Brevis ac dilucida Burgundie superioris quae Comitatus nomine censetur descriptio. Bâle 1552. In-12. La Franche-Comté au milieu du XVIe siècle. Traduction nouvelle par Emile Monot. Publications de la Société d’émulation du Jura. Lons-le-Saunier. 1907. In-8o.

  • Dognon (P.). Les Armagnacs et les Bourguignons, le comte de Foix et le Dauphin en Languedoc. 1416-1420, dans les Annales du Midi, t. I. 1889, pp. 433-509.

  • Duvernoy (C.). Mouvance du Comté de Bourgogne envers l’empire germanique depuis le XIe siècle. Preuves. Besançon, 1849, in-8o.

  • Febvre (Lucien). Histoire de Franche-Comté. Paris [1922.] In-12.

  • Fournier (Paul). Le royaume d’Arles et de Vienne (1138-1378). Paris 1891. In-8o.

  • Flourac (L.). Jean Ier, comte de Foix, vicomte souverain de Béarn, lieutenant du roi en Languedoc. Paris, 1884. In-8o.

  • Freminville (J. de). Les Ecorcheurs en Bourgogne, 1435-1445. Dans Mém. de l’Acad. des Sciences de Dijon, tome X, 1888.

  • Gingins-la Sarraz (F. de). Recherches historiques sur les acquisitions des sires de Montfaucon et de la maison de Chalons dans le pays de Vaud. Mémoires et documents publiés par la Société d’histoire de la Suisse romande, tome XIV. Lausanne, 1857. In-8o. /13/

  • Gollut (Louis). Les mémoires historiques de la république séquanaise et des princes de la Franche-Comté de Bourgogne. Nouv. édit. Ch. Duvernoy. Arbois et Besançon, 1846. In-4o.

  • Kerler (Dietrich). Reichstagsakten unter Kaiser Sigmund, dans : Deutsche Reichstagsakten, t. VII-XI. Gotha, 1883. 5 vol. in-4o.

  • Le Fèvre de Saint Rémy (Jean). Chronique, publiée par François Morand. Société de l’histoire de France, 1881.

  • Leroux (Alfred). Nouvelles recherches critiques sur les relations politiques de la France avec l’Allemagne, de 1378 à 1461. Paris 1892. In-8o.

  • Monstrelet (Enguerrand de). Chronique, publiée par Douët d’Arcq. Société de l’histoire de France. 1857-1862. 6 vol. in-8o.

  • Morosini (Antonio). Chronique. Edition Lefèvre-Pontalis et Dorez. Société de l’Histoire de France. Paris, 1898-1901, 4 vol. in-8o.

  • Olivier de la Marche. Mémoires. Edition Beaune et d’Arbaumont. Société de l’histoire de France. Paris 1883-1888. 4 vol. in-8o.

  • Petit (Ernest). Le Tonnerrois sous Charles VI et la Bourgogne sous Jean-sans-Peur. Auxerre, 1892. In-8o. Extrait du Bulletin de la Société des Sciences de l’Yonne, 1891.

  • Plancher (Dom). Histoire générale et particulière de Bourgogne. Dijon, 1739-1781.4 vol. in-fol. (Le 4e volume est de D. Salazard.)

  • Prost (B.) et Bougenot (S.). Cartulaire de Hugues de Chalon (1220-1319). Lons-le-Saunier, 1904. In-8o.

  • Quicherat (J.). Rodrigue de Villandrando. Paris 1879. In-8o.

  • Rousset (A.). Dictionnaire géographique, historique et statistique des communes de la Franche-Comté. Département du Jura. Besançon, 1853-58. 6 vol. in-8o. /14/

  • Samaran (Charles). La maison d’Armagnac au XVe siècle. Paris 1908. In-8o.

  • Schreiber (Dr Heinrich). Urkundenbuch der Stadt Freiburg. Fribourg-en-Brisgau, 1828. 2 vol. in-8o.

  • Stouff (Louis). Les origines de l’annexion de la Haute-Alsace à la Bourgogne en 1469. Revue Bourguignonne de l’enseignement supérieur, t. X, 1900.

  • Tuetey (A.). Les Ecorcheurs sous Charles VII. Paris 1874. 2 vol. in-8o.

  • Vaissete (Dom) et Devic (Dom.) Histoire générale de Languedoc. Nouv. édition. Toulouse, 1872-92, t. IX et X.

  • Wackernagel (Rudolf). Geschichte der Stadt Basel, t. I. Basel, 1907, In-8o.


 

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CHAPITRE I

LA MAISON DE CHALON-ARLAY

Sommaire : Jean de Chalon l’Antique fonde la puissance des comtes de Chalon. — Il échange ses comtés de Chalon et d’Auxerre contre d’importants domaines en Franche-Comté. — Son activité. — Sa nombreuse descendance. — Jean de Chalon, baron d’Arlay. — Sa conduite avec Rodolphe de Habsbourg. — Les premiers sires d’Arlay.

Branche cadette de la maison ducale de Bourgogne, la famille des comtes de Chalon, dont les représentants jouèrent un rôle si important dans l’histoire de Bourgogne du XIIIe au XVIe siècle, ne commence à faire parler d’elle qu’à la fin du XIIe siècle en la personne de Jean de Chalon dit l’Antique. Celui-ci, que d’aucuns ont appelé le Sage, peut être regardé comme le véritable fondateur de la puissance des comtes de Chalon en Bourgogne et en Franche-Comté. Né vers 1190, Jean l’Antique sut habilement profiter des guerres et des luttes tragiques qui ensanglantèrent l’est du Royaume au commencement du XIIIe siècle, luttes provoquées par l’antagonisme du duc de Méranie, Othon II, avec le représentant de la branche cadette de Bourgogne, Etienne comte d’Auxerre. A la faveur de ces querelles, Jean de Chalon ne tarda pas à s’établir fortement dans la /16/ Comté 1, en s’attirant l’amitié des seigneurs du pays et en soutenant les nobles contre les empereurs étrangers. Il sut si bien manœuvrer qu’Othon II, lassé de la résistance qu’il rencontrait, consentit à marier sa fille Alix à Hugues de Chalon, fils aîné de Jean. Dès lors, ce dernier, durant cinquante années, devint le véritable souverain des pays comtois. Sans difficulté, à la mort d’Othon III, héritier d’Othon II qui périt empoisonné, Jean de Chalon s’empara du gouvernement, qui nominalement revenait à son fils Hugues.

A de nombreux achats de terre, dans tout le Haut-Jura, Jean de Chalon ajouta une acquisition importante. En 1237 2, il céda le comté d’Auxerre et celui de Chalon à Hugues IV duc de Bourgogne, et reçut en échange la baronnie de Salins, le val de Mièges, les seigneuries d’Ornans et de Vuillafans, les châteaux de Montrivel, Châteauvilain, Bracon, etc. Cet acte devait avoir de graves conséquences sur les destinées de la maison de Chalon 3. Désormais, tout en gardant leur titre de comtes de Chalon, les descendants de Jean devenaient seigneurs de terres bien éloignées de la Saône.

Au lieu d’y perdre, leur puissance s’affermissait /17/ par ce changement de domaines. Au reste, rarement seigneur eut autant d’énergie et d’esprit de suite que Jean de Chalon l’Antique. Protecteur des églises, fondateur de communes 1, vaillant soldat, Jean déploya jusqu’à sa mort une incroyable activité. Nombre de villes reçurent de lui leurs chartes d’affranchissement; ses fondations pieuses ne se comptent plus. Enfin, presque chaque année, de nouvelles seigneuries vinrent augmenter ses domaines. Il épousa successivement Mahaut, fille du duc de Bourgogne Hugues III, Isabelle de Courtenay et Laure de Commercy. Ces trois unions furent fécondes et lui apportèrent en outre un surcroît de puissance et de richesses. Après une longue carrière, il s’éteignit en 1267, laissant dans toute la Comté et fort loin au dehors un renom de courage et d’intelligence supérieure. Jean de Chalon le Sage fut le type du grand seigneur féodal, énergique, parfois brutal. De ses trois mariages, il n’avait pas eu moins de quinze enfants. A sa mort, sa succession semblait devoir se disloquer par suite des partages dont elle allait être l’objet. Mais cette éventualité ne se réalisa pas entièrement. Deux nouvelles branches se formèrent, celle de Chalon-Rochefort ou Chalon-Tonnerre, fruit du second mariage de Jean, et celle de Chalon-Arlay, descendant de son union avec Laure de Commercy. Grâce à diverses circonstances et à la difficulté qu’eurent constamment les empereurs allemands d’établir leur autorité dans la Comté, Jean de Chalon-Arlay, fils /18/ de Jean l’Antique fut appelé lui aussi à jouer un rôle prépondérant en Franche-Comté. Il soutint de ses armes l’empereur Rodolphe de Habsbourg, qui en récompense lui remit la vicomté et la mairie de Besançon. Puis, quand Othon IV, perdu de dettes, eut cédé son comté à la couronne de France et que Philippe-le-Bel s’en fut emparé au nom de son fils, ce fut encore le baron d’Arlay qui recueillit les faveurs royales; il se fit nommer gouverneur du pays. Son héritage s’accrut dans de telles proportions qu’à sa mort il laissait une succession presque aussi importante que celle de son père. Beau-frère par sa femme de l’empereur Rodolphe de Habsbourg, il avait reçu de lui en 1289 l’investiture du Comté de Neuchâtel 1.

L’histoire des premiers barons d’Arlay est à écrire ainsi que celle de leurs rapports avec les comtes-ducs de Bourgogne. Durant le XIVe siècle, les sires d’Arlay et ceux de Chalon-Auxerre prirent une part active aux événements politiques et militaires du Royaume. Aucune grande bataille de la guerre de Cent-ans ne se livra sans qu’un de leurs représentants y figurât. Aussi, à la fin du XIVe siècle, jouissaient-ils dans la Comté d’une réputation établie de courage. C’étaient de grands seigneurs, possesseurs de domaines étendus. De Besançon au Jura et aux terres de St-Claude, ils comptaient d’immenses propriétés, une sorte de petit royaume dominant le Haut-Jura et gardé par de nombreux châteaux. /19/

Jean de Chalon III, père de Louis, dont nous étudions la vie, était déjà un puissant personnage. Par son ambition, par ses calculs, il sut contribuer à l’accroissement de sa maison et en lui comme en son fils on put reconnaître beaucoup des qualités de Jean l’Antique.

Etabli à Nozeroy, il réussit à épouser l’unique héritière de l’antique famille des Baux, Marie, fille de Raymond V, prince d’Orange. Ce mariage éleva au premier rang la famille d’Arlay parmi la noblesse de Bourgogne.

 


 

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CHAPITRE II

LES ANNEES DE JEUNESSE
(1390-1417)

Sommaire : Nozeroy, demeure des princes d’Orange. — Naissance de Louis de Chalon. — Fiançailles précoces. — Jean de Chalon aux armées du duc de Bourgogne. — Sa brillante conduite à Saint-Denis. — Le sire d’Arguel l’accompagne en 1413. — Ses succès dans la campagne de 1414. — Séjour à la cour du duc de Bourgogne. — Voyage au Saint-Sépulcre. — Prompt retour à Nozeroy. — Nouvelle campagne de Flandre en 1417. — Mort de Marie des Baux, princesse d’Orange.

Dans sa description de la Franche-Comté, éditée à Bâle en 1552, Gilbert Cousin, originaire de Nozeroy, écrit 1 :

Vue de Nozeroy, d’après gilbert Cousin
Vue de Nozeroy, d’après Gilbert Cousin
(Prise du Nord, du Val de Mièges)

« Puisque je mentionne Nozeroy, permets-moi d’en faire une courte description et de placer la localité sous tes yeux. Car rien ne m’est plus doux et plus cher que ma patrie. Tu as rarement vu de situation plus agréable que celle de cette ville. Posée sur une colline élevée, elle paraît le centre de la Bourgogne supérieure; et le plateau que forme la colline à son /21/ sommet s’abaisse en vallées de tous les côtés. Autrefois avant d’être entourée de murailles, on l’appelait Nucille, à cause de l’abondance de ses noisetiers. Nozeroy, tel est son nom actuel, est si remarquable par ses constructions, que tu prendrais la ville pour l’habitation de riches seigneurs et non pour celle de simples particuliers. Les maisons sont de pierre et construites sur le même alignement. A l’ouest de la ville se trouve le château du prince, demeure immense et luxueuse; construite entièrement en pierres de taille, reliée à la ville par une muraille et fortifiée de huit tours; la plus grande, magnifique et élégante, couverte de plomb, a reçu le nom de Tour de Plomb. Par sa situation agréable, par sa salubrité et l’abondance du gibier, ce château est devenu la résidence favorite des princes d’Orange. »

Vue de Nozeroy, d’après gilbert Cousin
Nozeroy, Vue du Sud, d’après Gilbert Cousin

C’est dans cette forteresse de Nozeroy, bientôt l’un des châteaux les plus riches de Franche-Comté, que naquit probablement Louis de Chalon, vers l’année 1390 1.

Les temps étaient durs alors pour la noblesse franc-comtoise, et cette année-là devait marquer d’une manière toute spéciale dans les annales de la maison de Chalon. Lassés des prétentions du duc Philippe-le-Hardi qui, pour affermir son autorité dans la Comté, ne cessait d’envoyer de ses officiers dans les terres des barons, les seigneurs puissants du pays /22/ se réunirent pour lui résister; c’étaient le comte de Montbéliard, sire de Montfaucon, Thibaut VII, sire de Neuchâtel, Jean de Chatelbelin et Jean de Chalon-Arlay, le père de Louis. Jean de Chalon eut l’imprudence de faire ou plutôt de laisser assassiner le plus odieux de ces agents, un certain Guillemin Faguier. C’était le 23 avril 1390. Le châtiment ne se fit pas attendre. Les châteaux du sire de Chalon, Chalamont et Chatelguyon furent emportés par les troupes du duc de Bourgogne, mais les autres forteresses tinrent bon contre toutes les attaques. Jean de Chalon fut arrêté dans l’été de 1391 et conduit sous bonne escorte dans un des châteaux du duc. Sa jeune épouse, Marie des Baux, à force d’habileté et d’énergie parvint à obtenir sa liberté et la restitution de ses forteresses. Jean de Chalon put rentrer à Nozeroy au commencement de 1392 1.

C’est dans cette époque troublée que vint au monde l’héritier des sires de Chalon-Arlay. Sa naissance réjouit la noblesse franc-comtoise, assurée de trouver cette fois encore dans cette famille de puissants défenseurs contre les ducs de Bourgogne.

A peine la naissance de Louis fut-elle connue, que son père envoya en hâte l’un de ses serviteurs, Alexandre de Nozeroy, annoncer l’heureuse nouvelle au pape Clément VII, qui occupait alors le siège d’Avignon et qui était l’oncle de Marie des Baux 2. Ce prélat /23/ avait déjà maintes fois montré l’intérêt qu’il portait à sa nièce et aux seigneurs d’Arlay. Aussi, dans sa joie, récompensa-t-il dignement le messager, en le gratifiant d’une forte somme d’argent.

On a peu de détails sur l’enfance de Louis de Chalon; elle s’écoula probablement tout entière à Nozeroy, où s’était retiré son père après sa terrible mésaventure. En 1393, par la mort de son beau-père Raymond V, prince d’Orange 1, Jean de Chalon devenait possesseur de cette belle principauté d’Orange, qui, pendant un siècle, allait rester dans sa maison; à tous ses titres, il ajoutera désormais celui de prince d’Orange, le plus glorieux pour lui.

Désireux d’augmenter l’éclat de sa maison, il voulut préparer à son fils un mariage digne de lui, et, comme l’antique famille de Montbéliard, par la mort d’Henri de Montfaucon, comte de Montbéliard, qui s’était fait tuer bravement dans les champs de Nicopolis (1396) venait de s’éteindre, le choix de Jean de Chalon se porta sur la seconde des filles qu’il avait laissées 2. /24/ Jeanne de Montbéliard apportait à son mari une part importante de la succession de son père et de son grand-père, la forteresse de Montfaucon et de nombreuses seigneuries dans les environs 1. Le contrat de mariage fut signé à Besançon le 22 novembre 1397 et l’année suivante, le pape Benoit XIII accordait une dispense de parenté aux époux qui n’avaient pas encore sept ans et qui étaient cousins au troisième degré 2.

En attendant que leur mariage pût se célébrer, le sire de Chalon avait repris sa place dans l’entourage du duc Philippe-le-Hardi. La guerre avec les Anglais menaçait de se rallumer, et avec elle la rivalité des deux maisons d’Orléans et de Bourgogne. Cependant, par sa prudence, Philippe-le-Hardi était parvenu à maintenir la paix malgré les défis du duc d’Orléans, /25/ qui avait même provoqué Henry de Lancastre dans un duel cent contre cent (7 août 1402). La fortune semblait enfin sourire à Philippe quand, le 16 avril 1404, il tomba malade à Bruxelles; onze jours après, il expirait à Hal, où il était venu demander sa guérison à Notre-Dame 1. Une ère nouvelle s’ouvrait pour la maison de Bourgogne; temps de violences et d’excès qui devaient aboutir à deux meurtres retentissants.

Un des premiers actes du nouveau duc Jean-sans-Peur fut de marcher sur Paris, où il espérait reprendre une place prépondérante dans le gouvernement que détenaient si indignement la reine Isabelle et le duc d’Orléans. Il y réussit, fait son entrée à Paris accompagné d’une nombreuse suite où brille au premier rang Jean de Chalon-Arlay. Une demi réconciliation s’opère entre les deux ducs, mais, sourdement, leur haine réciproque augmente. On cherche à les séparer, et comme la guerre avec l’Angleterre a recommencé, Jean-sans-Peur est envoyé au Nord avec mission de reprendre Calais. Le sire de Chalon est toujours auprès de lui, mais leur entreprise échoue et ils sont obligés de se retirer. En Guyenne, le duc d’Orléans n’est pas plus heureux; il rentre à Paris, fort déconfit, à la fin de l’année 1406.

Tout en s’occupant du gouvernement du Royaume, le duc de Bourgogne ne négligeait pas ses affaires. La mort de sa mère Marguerite de Flandre, qui gouvernait la Comté de Bourgogne, survenue en mars 1405, /26/ le rendit héritier de cette province, et pour la deuxième fois, le Duché et la Comté se trouvèrent réunis 1. Les sires de Chalon devinrent donc vassaux directs du Duc. Ils suivirent de loin les terribles événements que préparait la rivalité des deux ducs et qui allaient déchaîner la guerre civile sur le Royaume pendant trois quarts de siècle. C’est le 23 novembre 1407, au soir, l’assassinat du duc d’Orléans à Paris dans la rue Barbette, puis l’aveu de Jean-sans-Peur et sa honteuse justification par le maître en théologie Jean Petit. Deux fragiles accords, celui de Chartres (9 mars 1409) et celui de Bicêtre (2 novembre 1410) ne font que retarder l’ouverture des hostilités qui éclatèrent en 1411.

Jean de Chalon accompagna son seigneur dans sa tentative sur Paris, mais, laissé seul avec onze chevaliers dans la place de Saint-Denis, il se trouva assiégé par toute l’armée du duc d’Orléans. Il résista valeureusement à plusieurs assauts, puis, pressé par la famine, il obtint, le 11 octobre 1411, une capitulation honorable 2. Sa défense avait fait l’admiration des moines de l’Abbaye et le Religieux de Saint-Denis /27/ en parle dans sa chronique en termes élogieux 1. Les mois suivants furent employés à courir sus au comte de Tonnerre, Louis de Chalon, qui, révolté depuis quatre ans contre son suzerain, cherchait à lui nuire par tous les moyens possibles 2. Là aussi, /28/ la fortune de Jean de Chalon rencontra plein succès, et après un long siège, il s’empara de Tonnerre. Il rentra enfin dans ses terres de Franche-Comté, lorsque la paix se conclut à Arras entre les deux maisons rivales (août 1412). En raison de ses nombreuses absences pour le service du Duc, Jean de Chalon n’avait pu consacrer que peu de temps aux siens et à l’éducation de son fils. Ses devoirs féodaux l’avaient appelé presque chaque année dans une des armées du nouveau duc; il ne faisait que de courtes apparitions à Nozeroy; mais la renommée de ses succès y parvenait, et sa glorieuse défense de Saint-Denis dut faire impression sur son fils qui avait vingt ans passés.

Peu de mois auparavant, le prince d’Orange, pressé de faire entrer dans sa maison un nouveau lot de belles seigneuries, avait fait célébrer le mariage de son fils, du sire d’Arguel comme on l’appelait alors 1. Celui-ci était marié en avril 1411, car, à cette date, on le voit prendre part à une transaction avec son épouse Jeanne de Montbéliard 2. Désormais, il pouvait s’intituler /29/ seigneur d’Arguel et de Montfaucon. Possesseur de domaines importants, il prit résolument en main leur administration. Dans ses mandements à ses châtelains, dont quelques-uns nous ont été conservés, on reconnaît déjà l’homme attentif qui, pendant cinquante années, surveillera méticuleusement chacune de ses terres 1.

Jusqu’alors son éducation a été toute militaire; dans les loisirs que lui laisse l’exercice des armes, il parcourt à la chasse les sombres forêts du Jura qui entourent Nozeroy et les autres châteaux de son père. Son humeur aventureuse le pousse déjà sur les grands chemins; il aime les longues chevauchées. Aussi son père l’envoie-t-il en son nom contrôler les comptes de ses receveurs du pays de Vaud et s’assurer de leur bonne administration 2. Car Jean de Chalon paraît toujours moins dans la Comté ou, s’il s’y trouve, il est chargé de si importantes missions, qu’il n’a guère le temps de visiter les siens.

Après les journées cabochiennes d’avril et mai 1413 /30/ qui ont rallumé la guerre civile, le duc Jean-sans-Peur, sentant sa présence indispensable à Paris, a confié à son vassal, le sire de Chalon, la lieutenance générale des Deux-Bourgognes 1. La charge est lourde, dispendieuse, mais le prince d’Orange est en mesure de la remplir. Pour la première fois, semble-t-il, le seigneur d’Arguel est autorisé à accompagner son père. Il a vingt-trois ans environ et il est temps pour lui de commencer son apprentissage de chevalier.

Il quitta Nozeroy dans les derniers jours de février 1413, se préparant à rejoindre son père en Charolais 2. On guerroyait alors sur toute la frontière de Bourgogne. C’étaient chaque jour des surprises de châteaux, des alertes, des marches nocturnes. Outre les Armagnacs, l’on avait fort à faire à se garder contre Louis, comte de Tonnerre, qui menaçait de nouveau le pays. La duchesse de Bourgogne envoyait chaque jour des messagers dans toutes les directions demandant du secours à ses vassaux 3. /31/ L’on craignait fort une entreprise sur le château de Tonnerre, que Louis cherchait à reprendre.

Mais la campagne ne donna lieu à aucun fait de guerre important. Grâce à l’activité du prince d’Orange et du sire de Saint-Georges, sans cesse sur les chemins, les tentatives du comte de Tonnerre échouèrent. Dès le 18 juillet, le sire d’Arguel rentra à Nozeroy 1. Cependant, la guerre continuait, car la duchesse de Bourgogne, toujours sur le qui-vive, écrivait encore le 23 novembre 1413 au bailli d’Aval et au sire d’Arlay de faire guet et garde, de jour et de nuit, principalement dans les châteaux confisqués sur le comte de Tonnerre 2. Aussi est-il probable que le jeune sire d’Arguel ne revit guère son père pendant tout l’hiver de 1413-1414.

Ce dernier était fort occupé. Les événements de janvier 1414, la marche du duc Jean sur Paris, son échec, sa retraite faisaient prévoir des temps difficiles pour la maison de Bourgogne. Le Roi, qui s’était ressaisi, fit déclarer le duc Jean rebelle et banni et s’apprêta à marcher contre lui avec toute sa noblesse. Il alla prendre, le jour des Rameaux, l’oriflamme à Saint-Denis.

Aussitôt, on convoque le ban et l’arrière-ban des deux Bourgognes.

Depuis longtemps, le pays ne s’était trouvé pareillement menacé. Le prince d’Orange, qui occupait une place d’honneur dans le Conseil ducal, chercha à réunir le plus grand nombre /32/ de vassaux 1; son fils fut un des premiers désignés 2.

Pendant plusieurs jours, Jean de Neuchâtel-Montaigu passa en revue à Chatillon-sur-Seine les « montres » qui ne cessaient d’arriver pour le service du Duc. Celle de Louis de Chalon était brillante et faisait honneur à la maison d’Orange 3. Louis amenait au Duc, 12 chevaliers bannerets, 7 bacheliers et 175 écuyers. Il avait laissé à Nozeroy sa jeune femme, Jeanne de Montbéliard, pour surveiller ses domaines pendant son absence. Il se réunit à Chatillon à toute la noblesse des deux Bourgognes. Puis on se dirigea sur Arras. Là, l’armée du Duc se vit bientôt cernée par celle du roi de France qui espérait rapidement /33/ enlever la ville avec ses nombreux contingents. Mais le siège fut long et la résistance des Bourguignons admirable. Pendant deux mois, ils se défendirent vaillamment, attaquant même les Armagnacs par d’heureuses surprises. Le sire d’Arguel était au premier rang; il déployait dans les combats ces qualités d’intrépidité qui le signalèrent d’emblée, mais qui, doublées de trop d’impétuosité et d’imprudence, lui attirèrent plus tard une terrible leçon.

Les négociations qui précédèrent la paix d’Arras, signée le 23 février 1415, terminèrent le siège. Avant de rentrer dans leurs foyers, les nobles de Bourgogne accompagnèrent encore le Duc dans son expédition contre Louis de Tonnerre. Ce turbulent vassal n’avait cessé d’inquiéter les armées du Duc durant tout le siège d’Arras, et Jean-sans-Peur voulait lui infliger un châtiment exemplaire. Sur son ordre, l’on attaqua une fois de plus la cité de Tonnerre qui fut prise, pillée et rasée au commencement de novembre 1. Puis le duc Jean partit pour la Bourgogne y séjourner une partie de l’hiver, au milieu de ses sujets qui l’avaient si fidèlement servi.

Louis de Chalon, de son côté, regagna Nozeroy. /34/ Il avait à son actif une glorieuse campagne, d’heureux débuts, présages d’un avenir brillant. Durant l’année écoulée, une grande partie de la châtellenie d’Orbe, au pays de Vaud, avait été ajoutée à ses domaines, comme héritage de Jeanne de Montbéliard sa femme 1. Il avait des droits sur la terre d’Echallens et possédait en commun avec Agnès de Montbéliard, sœur de Jeanne, les châteaux de Montagny et de Bottens situés aussi dans le pays de Vaud. Mais la guerre avait éprouvé le jeune seigneur. Il avait perdu dans les plaines d’Arras une bonne partie de ses ressources. Le 14 décembre 1414, il adressait à ses châtelains du pays de Vaud un pressant appel, les priant de lui envoyer au plus vite quelques bons écus « pour ce que nouvellement fumes venuz de France et là avons emploier tout notre argent 2 ».

Après avoir passé les rudes mois d’hiver dans un de ses châteaux du Jura, Louis de Chalon se remit en route dans les premiers jours d’avril 1415. Il désirait refaire connaissance avec la cour du Duc, et comme son père se trouvait depuis quelque temps déjà au /35/ concile de Constance où le Duc l’avait envoyé avec d’autres seigneurs pour soutenir vigoureusement ses intérêts, il est probable que le sire d’Arguel occupa auprès de Jean-sans-Peur la place laissée vide 1. Ce dernier, tout en simulant alors l’inaction la plus complète, menait d’actives négociations avec la cour d’Angleterre. Se voyant repoussé par le roi de France, il concluait en secret avec le jeune roi Henri V un partage du domaine royal. Une convention préliminaire, réglée le 23 mai à Leicester, fut suivie d’un traité signé le 7 août suivant à Ypres.

A la cour du duc de Bourgogne, les fêtes se succédaient sans interruption. Louis de Chalon y figurait au premier rang. Il faut croire que ses finances s’étaient /36/ singulièrement améliorées puisqu’un beau jour, à Bruges, il n’hésita pas à donner 600 couronnes d’or à un marchand de Lucques pour un tissu de Chypre, resplendissant d’or 1. C’est alors peut-être qu’il conçut l’idée de visiter ces pays d’Orient, qui envoyaient en Europe de si riches produits, de refaire à son tour le voyage du Saint-Sépulcre comme tant de valeureux chevaliers, de contempler de près ces infidèles qui avaient si malmené la noblesse bourguignonne en la journée de Nicopolis. D’ailleurs, la vie de cour commençait à le lasser.

Avant son départ, désireux de s’assurer la protection de l’Eglise pendant son voyage et son séjour en Terre-Sainte, il s’adressa à l’archevêque de Besançon pour obtenir une sorte de sauf-conduit, le siège pontifical étant alors vacant. Ce fut l’archevêque Thiébaud qui, le 18 juin 1415, accorda au jeune écuyer et à ses compagnons la permission d’entreprendre leur voyage, munis de la bénédiction de l’Eglise, qu’ils avaient réclamée selon un antique usage 2. Licence leur était donnée de converser avec les infidèles, de s’instruire avec eux des mœurs d’Orient, tout en respectant l’honneur de la religion chrétienne. La petite troupe pouvait se choisir un confesseur, et l’archevêque déclarait que ceux qui la composaient étaient ses diocésains, qu’aucune sentence d’excommunication ou d’interdit ne les frappait.

Pourvu de cette sauvegarde, Louis de Chalon fit /37/ ses préparatifs de départ sous la surveillance de son père, lequel n’entendait rien négliger pour la réussite de l’entreprise. Il lui donna pour l’accompagner un de ses meilleurs serviteurs, Ferlin, son châtelain d’Orbe 1. Des provisions étaient préparées sur la route que devait suivre le jeune seigneur au travers des terres du pays de Vaud. Dans les premiers jours du mois d’août, on vit sortir de Nozeroy la petite troupe qui s’avança rapidement vers le sud en s’enfonçant dans les forêts du Jura. Elle atteignait Orbe le 5 août au soir, où elle arriva pour dîner 2. Le receveur du prince d’Orange, Jean Bernart, la reçut de son mieux. Le voyage se poursuivit à travers le pays de Vaud, la Savoie et l’Italie. Il est probable que Louis de Chalon et ses compagnons s’embarquèrent à Venise 3. Mais, sur leur voyage et sur leur séjour en Palestine, les renseignements manquent. Tout ce que l’on sait, c’est qu’ils hâtèrent leur retour, car le 20 décembre suivant, ils repassaient par la même ville d’Orbe, revenant du Saint-Sépulcre. Le lendemain, ils regagnaient Nozeroy, après avoir dîné à Jougne  4. /38/

D’alarmantes nouvelles leur étaient parvenues durant leur voyage. L’ennemi venait d’envahir une fois de plus le sol français. Après la prise d’Harfleur le 22 septembre, le roi d’Angleterre Henri V marchant sur Calais, avait rencontré les troupes du roi de France à Azincourt et leur avait infligé la plus sanglante des défaites en leur tuant sept mille hommes. La cause du roi de France semblait perdue. Seul le duc Jean-sans-Peur, tenu prudemment à l’écart, contemplait les événements. La plupart de ses ennemis, les princes du sang, étaient tués ou prisonniers. Sa puissance semblait renaître. On comprend que le sire d’Arguel à cette nouvelle, ait hâté son retour. Son père d’ailleurs avait besoin de lui et la guerre qui recommençait le rappelait à l’armée.

Jean de Chalon l’attendait dans un de ses châteaux du Jura. Il avait quitté momentanément le service du duc Jean pour se remettre des fatigues de ses voyages continuels soit à Constance auprès du concile, soit à l’armée du Duc.

Le sire d’Arguel et ses compagnons étaient impatients d’avoir des détails sur la triste journée d’Azincourt. Quel fut leur étonnement en apprenant la mystérieuse conduite du duc de Bourgogne. Non seulement il n’avait pas quitté sa retraite bien que ses deux frères fussent demeurés sur le champ de bataille, mais il avait interdit à ses vassaux de rejoindre l’armée royale.

L’attitude de son suzerain devait embarrasser Louis de Chalon dont l’esprit chevaleresque, tout imprégné des devoirs du vassal loyal, se refusait à admettre pareils agissements. Mais l’exemple de son /39/ père, restant malgré tout attaché au Duc, ne devait pas tarder à l’entraîner.

L’année 1416 le laissa cependant en repos dans ses terres. Jean-sans-Peur était en train de négocier avec le roi d’Angleterre et l’empereur Sigismond, qui venait de parcourir la France et de traverser Paris. Des conventions furent conclues à Calais 1 en octobre 1416, auxquelles le Duc prit une certaine part sans s’engager trop avant. Ce qu’il désirait d’abord, c’était la paix avec l’Angleterre qui lui permettrait de recommencer la lutte contre les Armagnacs et de s’emparer du Royaume.

Le sire d’Arguel se remit à son passe-temps favori, la chasse. Il s’y livrait avec ses frères, grands amateurs comme lui. Entre temps, il surveillait ses propres domaines et ceux de son père. La belle principauté d’Orange l’intéressait surtout. Il s’y était rendu plusieurs fois, accompagnant probablement sa mère Marie des Baux, qui avait conservé une vive affection pour ses sujets. En 1413, à la veille de partir pour l’Artois, il avait dépêché aux syndics d’Orange son écuyer Guillaume Bouton, pour lui rapporter quelques ressources indispensables 2; ce dernier réussit dans sa mission, et dès lors, le sire d’Arguel entretint des rapports fréquents avec la principauté 3. /40/

Il était à Nozeroy le 3 juillet 1416, quand on célébra avec pompe le mariage de sa sœur Marie avec Jean de Fribourg, fils unique du comte de Neuchâtel. Selon son habitude, le vieux prince d’Orange avait présidé avec soin aux conventions du mariage et il avait obtenu pour son gendre la riche seigneurie de Cerlier, au bord du lac de Bienne, qui relevait alors du comte de Savoie 1.

Tout en consacrant ses loisirs aux distractions, Louis de Chalon ne négligeait pas ses intérêts. Déjà des tiraillements avaient surgi avec les officiers du duc de Bourgogne et des réclamations s’étaient produites. Le sire d’Arguel et son épouse refusaient de reconnaître un mandement ducal qui leur défendait de délivrer des lettres « de garde et de debitis 2 ». Jaloux de son autorité et de sa position, il adressa une requête à son suzerain qui l’ajourna à son parlement de Dôle 3. Obtint-il gain de cause ? On l’ignore, la sentence du parlement n’étant pas connue. Mais on peut le supposer car Jean-sans-Peur avait alors tout intérêt à ménager ses vassaux. Une nouvelle campagne s’annonçait; il avait besoin de toutes les forces des deux Bourgognes. Il préparait en effet sa marche sur Paris; le moment lui paraissait indiqué pour s’emparer du gouvernement du Royaume et, de Picardie et de Champagne, il concertait ses plans, en voyant réunie autour de lui une imposante armée. /41/

Tandis que son père plaidait au concile de Constance la cause du Duc et dépeignait l’état déplorable du royaume de France, Louis de Chalon quitta la Franche-Comté dans les premiers jours de juillet 1417 1. Sa suite était encore plus nombreuse que lors de la campagne d’Artois. Se dirigeant vers le nord, il se joignit en route à d’autres seigneurs franc-comtois, aux sires de Neuchâtel, de Montaigu, de Châteauvilain, de Toulongeon, etc. Leur troupe devint bientôt une petite armée. Après avoir passé au sud de Paris, ils eurent l’audace de pousser une pointe sur la ville de Nogent-le-Roi, que tenaient au nom des Armagnacs, Guyon-Aubert et Etienne de Solaiges 2. Ils l’assiégèrent et le 18 juillet, la place, manquant de vivres, capitula. Les seigneurs bourguignons la firent évacuer et y entrèrent quelques jours après. On y laissa une garnison, puis l’on se hâta de continuer sur la Flandre avec l’espoir de devancer le Duc dans son attaque sur Paris. Peut-être allait-on arriver trop tard. Mais non, le zèle de l’armée bourguignonne fut récompensé. Elle parvint à temps à Beauvais. Le 31 août, on en passa la revue 3. La compagnie de Louis de Chalon était brillante; c’était l’une des plus belles et des plus nobles. Elle se composait de près de 400 hommes, tant archers que chevaliers et écuyers. Elle faisait bonne figure au milieu des seigneurs bourguignons, qui avaient répondu nombreux à l’appel du Duc. Ce dernier s’éloigna de Beauvais le 2 septembre. /42/ Il se dirigea sur Pontoise, Chatillon-lèz-Paris, Montlhéry, Corbeil, et gagna en route plusieurs villes de Champagne et de Brie. Le 20 octobre, il paraissait devant Corbeil qu’il se mit à assiéger, puis allant chercher la reine Isabeau à Troyes, il la ramena à Chartres. Son entrée à Paris lui semblait assurée. Mais il échoua une fois de plus 1. Son armée lui devenait inutile, la campagne étant momentanément arrêtée. Confiant en la reine, il s’établit avec elle à Troyes. Isabelle forma dans cette ville un nouveau gouvernement opposé à celui du connétable Bernard d’Armagnac et du Dauphin à Paris. Son plus intime conseiller était Jean-sans-Peur, qui, peu à peu, réalisait ses desseins.

Tandis que Louis de Chalon suivait le Duc dans ses divers mouvements, son père, le prince d’Orange, accourait en hâte en Bourgogne, où sa femme, Marie des Baux, était sur le point d’expirer. Il arriva à temps pour recueillir son dernier soupir. La princesse d’Orange mourut à Lons-le-Saunier dans la première quinzaine d’octobre 2. Avec elle s’éteignait cette puissante famille des Baux, qui, pendant des siècles, avait dominé la Provence.

C’était une véritable perte pour les habitants d’Orange, qui avaient toujours trouvé en elle aide et compassion. La nouvelle de sa mort parvint dans cette ville le 14 octobre. Aussitôt l’on convoqua le conseil, qui décida d’envoyer trois délégués en Bourgogne /43/ auprès du Prince pour lui exprimer la sympathie de sa bonne ville d’Orange 1.

L’année précédente, la princesse avait fait son testament daté de Nozeroy, du 22 mai 1416 2. A l’exception de deux petites places au Midi 3 qu’elle laissait à ses fils Jean et Huguenin, elle instituait son mari héritier de toutes ses terres d’Orange, et à son décès, son fils Louis de Chalon, auquel elle léguait aussi ses prétentions sur le comté de Genève.

C’est probablement à Troyes que le sire d’Arguel apprit la mort de sa mère. Il passa à la cour de la reine Isabelle les derniers mois de l’année 1417, attendant le moment où de nouvelles fonctions lui seraient confiées, fonctions qui lui donneraient pour un temps l’importance de prince du sang.

 


 

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CHAPITRE III

LA CAMPAGNE DE LANGUEDOC
(1418-1419)

Sommaire : Le gouvernement de la reine Isabeau à Troyes. — La situation dans le Midi. — Louis de Chalon est nommé par la reine lieutenant général et commissaire en Languedoc. — Son départ. — Premiers succès. — Séjour à Montpellier. — Popularité des commissaires bourguignons. — Soumission de Castelnaudary, d’Albi et de Toulouse. — Réunion des trois Etats à Carcassonne. — Louis occupé au siège de Villeneuve-lèz-Avignon apprend la mort de son père. — Opérations contre l’archevêque de Reims. — Intrigues du comte de Foix. — Il supplante Louis dans sa charge. — Louis quitte le Languedoc. — Retour à Nozeroy.

Depuis son exil de la cour, la reine Isabeau s’est installée à Troyes où elle a établi un gouvernement avec l’aide du duc de Bourgogne. Elle prétend avoir reçu du Roi « par octroy irrévocable, le gouvernement et administration du royaume 1 » et dès le mois de janvier 1418, elle lance proclamation sur proclamation pour justifier sa conduite.

Elle met toute sa confiance dans le duc de Bourgogne qu’elle déclare le seul prince capable de prendre /45/ en main la direction du Royaume; elle lui donne tous pouvoirs à cet effet et abolit, dès le 1er octobre 1417, tous les aides, subsides, quatrièmes, vingtièmes, impositions, qui avaient cours alors, excepté la gabelle 1. Le moyen était habile pour se concilier la faveur populaire 2.

Jamais en effet la misère n’avait été plus grande. Une invasion anglaise se préparait, et pour y résister, l’on s’apprêtait à frapper le peuple de nouvelles charges. Aussi les lettres patentes de la Reine étaient-elles accueillies partout avec joie. Elles lui procuraient force partisans. Les provinces du Midi en particulier avaient eu cruellement à souffrir pendant les dernières années. Le duc de Berry, qui avait exercé la charge de lieutenant général en Languedoc et Guyenne, avait indisposé ses sujets par sa mauvaise administration. Une première fois, grâce aux efforts du parti bourguignon en octobre 1411, il dut quitter sa charge, mais pour l’occuper une seconde fois un peu plus tard. Le 15 juin 1416, il mourait; on ne lui donna pas immédiatement de successeur 3. /46/

Avant de faire un choix, les trois Etats de la province se réunirent à Pézenas, le 10 décembre 1417. Il est probable que le duc de Bourgogne se tenait au courant de la situation du Midi; il y avait sans doute envoyé des émissaires, qui travaillèrent pour lui. Le moment lui parut propice pour tenter une intervention. Le 30 janvier 1418, la reine Isabeau, sur l’avis du Duc, nomma des commissaires chargés d’aller en Languedoc et de réduire ces provinces à son parti et gouvernement 1. Son choix se porta sur Louis de Chalon, dont le duc de Bourgogne lui avait vanté la fidélité. Le prince d’Orange, son père, n’avait cessé de prouver son attachement à son puissant cousin le Duc depuis le meurtre du sergent Faguier, et l’on ne pouvait trouver vassal plus sûr que le jeune comte de Genève 2 qui avait déjà fait ses preuves l’année précédente.

Dans la commission qu’elle lui remit, la Reine, se fondant sur la désolation qui pesait alors sur le Royaume, sur la misère qui opprimait le peuple, lui confia pleins pouvoirs pour réduire en l’obéissance du Roi, les régions où elle l’envoyait 3. /47/ Le duc de Bourgogne, disait-elle, ne pouvant se rendre partout et désirant assurer au Roi, dont l’autorité est méconnue, la conservation de ses provinces, a fait nommer et désigner des commissaires qui le remplaceront. Les lettres de la Reine adjoignaient au sire d’Arguel trois autres commissaires qui, ensemble, eurent l’autorité d’un capitaine général. C’étaient deux maîtres des requêtes de l’hôtel du duc de Bourgogne, Guillaume de Saulieu et Jean Terrant, et l’un de ses chambellans, Regnaut, vicomte de Murat. La Reine les établissait « ses procureurs généraux, messagers et ambassadeurs spéciaux ès parties de Languedoc, d’Auvergne et duché de Guyenne ». Elle leur donna mission de réduire toutes les villes et châteaux de ces provinces en l’obéissance du Roi et de son gouvernement, de destituer les officiers rebelles, d’assembler les communes des bonnes villes et de « faire et mener toute guerre mortelle de sang et de feu » contre les adversaires du Roi, de la Reine et du Duc.

Au conseil où ces lettres furent lues, assistait, avec les seigneurs bourguignons, le prince d’Orange qui voyait partir sans doute avec joie son fils pour une glorieuse mission.

De plus, pour renforcer l’effet de leur commission, la Reine, par d’autres lettres datées du même jour, accordait pleine licence à ses envoyés d’abolir tous les aides et subsides qui pesaient alors sur les provinces du Midi, sauf la gabelle. Elle attaquait /48/ violemment l’administration des ennemis du Roi et du duc de Bourgogne, les accusant d’avoir pillé les revenus du pays destinés à repousser l’Anglais, et de se les être appropriés. Elle faisait encore dans ses lettres l’apologie du duc de Bourgogne et de sa conduite.

Munis de ces pouvoirs, les quatre commissaires, dont le chef véritable était le comte de Genève, se préparèrent à partir pour le Midi. Comme il était à prévoir que l’on rencontrerait de la résistance, Louis de Chalon s’occupa de réunir une armée. La chose n’était point trop difficile. Une expédition au Midi offrait de l’attrait et des perspectives de gain.

Aussi le comte de Genève eut-il bientôt autour de lui une armée de quatre cents chevaliers, qui fut passée en revue le 17 mars à Mâcon 1. Rien ne s’opposait à son départ. Il prit congé de son vieux père, le prince d’Orange, qu’il ne devait plus revoir. Le Prince s’en retourna dans l’un de ses châteaux du Jura auprès de sa belle-fille. Les quatre commissaires quittèrent la cour de la Reine dans les derniers jours de mars 1418, se dirigeant vers le sud à travers le Lyonnais et le pays de Viennois 2. Ils longèrent le /49/ Rhône et pénétrèrent en Languedoc par le Pont-Saint-Esprit dans les premiers jours d’avril 1.

Au même moment, les délégués des Etats réunis à Pézenas se présentaient devant la Reine pour s’entendre avec elle 2; mais celle-ci les avait devancés puisque ses commissaires étaient en route. Malgré leurs dires, les provinces du Midi étaient loin d’être toutes sympathiques au parti bourguignon; plusieurs villes importantes hésitaient encore à se donner au parti du Duc. Le 2 avril, Louis de Chalon parut devant le Pont-Saint-Esprit. Les habitants lui ouvrirent sans résistance les portes de la ville ainsi que ceux d’autres petites places aux environs. Le voyage avait été pénible pour le comte de Genève et pour son armée. Les chemins étaient encore détrempés, et la perte de plusieurs de ses chevaux lui avait causé de grands dommages. A peine entré en Languedoc, il se souvint que sa bonne ville d’Orange était toute voisine et, le 1er avril, jour de son arrivée, il y expédia deux de ses écuyers Bertrand Geoffroy et Ferry de Fallerans. Ces envoyés se présentèrent devant le conseil de la ville le 3 avril et représentèrent les besoins du comte. Ils demandèrent au conseil de bien vouloir leur remettre une somme de cinq cents francs, mais ils n’en obtinrent que deux cents 3.

C’était d’ailleurs avec de grandes promesses que /50/ les commissaires faisaient leur entrée en Languedoc. Dans une lettre qu’ils adressèrent, le 5 avril, aux autorités de la ville d’Albi, pour leur annoncer leur arrivée, ils manifestaient de grands espoirs. « Plaise vous savoir, leur disaient-ils, que la Royne de France… nous a comis au gouvernement de Languedoc, Auvergne et duchié de Guyenne pour iceulx réduire à la bonne obéissance du Roy et de la Royne, et de faire aucunes choses plaisant à Dieu et prouffitables au Roy… lesquelles nous vous expouserons à plain bien brief et dont vous devez estre très joyeulx… car nous avons belle et notable compagnie de gens d’armes et de trayt, et le plus brief que nous porrons, nous trayrons devers vous pour vous donner ayde et confort, contre les adversaires du Roy et de la Royne et vostres, en manière que, si Dieu plait, vous en soyez contens et tenus en paix et en bonne amour, et vous prions, tant que nous pouvons, que vous n’ayez déplaisance en nostre demeure, car nous avancerons le plus que nous pourrons, et si Dieu plaît, viendrons du tout à vostre bonne entention » 1.

Les commissaires ne prolongèrent pas leur séjour au Pont-Saint-Esprit, ils avaient hâte d’atteindre des places plus importantes. Continuant à longer le Rhône, ils se trouvèrent bientôt sous les murs de Beaucaire. La place refusa de les recevoir. Les habitants désiraient rester fidèles au Dauphin et ils se préparèrent à soutenir un siège 2. Mais les commissaires /51/ redoutèrent une perte de temps trop considérable. Ils s’éloignèrent de Beaucaire qui demeura toujours attachée au Dauphin.

Nîmes n’était pas loin. Le comte de Genève et ses compagnons y furent reçus et accueillis. La ville se donna à eux et avec elle plusieurs des vigueries environnantes, Uzès, Bagnols, Sommières 1, en sorte que si l’on avait pu s’emparer de Beaucaire une grosse partie du Languedoc aurait été gagné au parti du Duc. Mais Beaucaire, avec les provinces du Vivarais, du Velay et une partie du Gévaudan, ne voulut entendre parler d’aucun accommodement. Et comme la reine Isabelle avait donné à ses envoyés pleins pouvoirs pour nommer de nouveaux officiers, Lancelot de Layrieu, établi sénéchal de Beaucaire par les commissaires, fut contraint de venir résider à Nîmes, tandis que le sénéchal de cette ville gardant le parti du Dauphin allait s’établir à Beaucaire.

Afin de pouvoir s’entendre sur les dispositions à prendre, les représentants des villes se mirent en route pour rejoindre les commissaires. Ils les trouvèrent à Montpellier où le comte de Genève était entré le dimanche 11 avril 2. Il y avait été aussi bien reçu /52/ qu’à Nîmes. Des bruits favorables précédaient partout son passage. Ses troupes ne se signalèrent par aucun excès grave, du moins dans la première partie de son expédition.

Pendant une quinzaine environ, les représentants des villes tinrent une sorte de conseil destiné à sauvegarder les intérêts du pays 1. Après la mauvaise administration du duc de Berry, les promesses qu’apportaient avec eux les représentants de la Reine et du duc de Bourgogne faisaient prévoir des temps moins durs. L’on savait aussi qu’ils avaient pleins pouvoirs pour réprimer certains abus, et ce fait contribua certainement beaucoup à leur assurer la fidélité de la plupart des villes. L’influence du Dauphin était à peu près nulle dans le Midi. Le parti armagnac occupait Paris et s’y livrait à tous les excès. Aussi, les populations du Languedoc étaient-elles peu disposées à suivre un parti qu’elles ne connaissaient plus. Il leur semblait plus profitable de s’en remettre au duc de Bourgogne.

Ces sentiments se manifestèrent avec d’autant plus de force que, pendant leur séjour à Montpellier, les commissaires bourguignons firent réunir un jour le peuple de la ville sur la place, devant le bâtiment où siégeait le conseil, et que là, publiquement, ils abolirent toutes les impositions et aides qui avaient été établies ces dernières années, sauf la gabelle du sel, en vertu des pouvoirs qui leur avaient été donnés /53/ par la reine Isabelle 1. Leur popularité ne devait que gagner à cet acte public. Le 30 avril, ils donnèrent des lettres semblables aux habitants de Narbonne, qui s’étaient joints à eux dès leur arrivée en Provence et avaient prouvé leur bon vouloir pour le parti de la Reine 2. Ils s’étaient engagés à ne favoriser en aucune manière « le dampnable party du comte d’Armagnac » et sur leur requête, en récompense de leurs services, ils obtinrent cette importante faveur.

Confirmant ses lettres de l’année précédente, la reine Isabelle en avait publié de nouvelles le 3 avril, dans lesquelles elle revenait en termes plus violents encore sur la détresse du Royaume, la faiblesse du Roi, l’insolence et l’influence funeste du comte d’Armagnac et de ses partisans 3. Elle y prononçait l’abolition des aides et par d’autres lettres du même jour, elle accordait semblable octroy plus particulièrement aux trois villes de Toulouse, Carcassonne et Béziers 4. Il est probable que ces dernières lettres étaient le résultat des pressantes démarches qu’avaient faites auprès de la Reine les députés de ces villes, au moment du départ du comte de Genève.

Pressés de poursuivre leur marche, les commissaires renoncèrent à se rendre eux-mêmes dans les comtés de Rodez et d’Armagnac. Ils y envoyèrent de Montpellier un délégué, messire Pons de Châtillon, /54/ chambellan du duc de Bourgogne, avec des pouvoirs identiques aux leurs 1. Leurs conférences avec les représentants des villes prirent fin le 11 mai 2. L’on avait sans doute agité la question de la réunion des trois Etats, but principal des démarches des délégués, réunion attendue avec impatience par chacun. En même temps qu’ils avaient obtenu de la Reine la suppression des aides, ses envoyés étaient parvenus aussi à se faire donner pleine licence de réunir les trois Etats quand la nécessité s’en ferait sentir. Et l’on tardait de les voir enfin s’assembler avec la permission des commissaires bourguignons.

Mais d’autres villes restaient encore à soumettre, et non des moins puissantes, comme Toulouse et Carcassonne. C’est vers cette dernière que se dirigèrent Louis de Chalon et ses collègues. Ils y arrivèrent vers le 18 mai, mais on leur refusa l’entrée de la place. Durant deux jours, ils furent contraints de tenir leurs assises dans le Bourg 3. Ce contre-temps n’était pas fait pour les décourager. Ils sentaient bien que sous peu Carcassonne leur ouvrirait ses portes tout comme les autres cités, et qu’elle ne tarderait plus longtemps à se donner au parti bourguignon.

A Castelnaudary, où les commissaires se rendirent ensuite, les sympathies étaient d’emblée favorables aux Bourguignons. Ayant appris leur marche sur Toulouse, les autorités d’Albi se hâtèrent de montrer /55/ leur bon vouloir aux envoyés du Duc, et le 18 mai, deux émissaires furent envoyés à Carcassonne « faire au nom de la ville la révérence aux seigneurs » 1. Ils ne les y trouvèrent plus et ne les rejoignirent qu’à Castelnaudary. Là le viguier d’Albi les présenta aux commissaires. Après les avoir salués, ils leur exposèrent le but de leur mission. On redoutait à Albi de voir arriver une garnison bourguignonne et l’on suppliait le comte de Genève de renoncer à en envoyer une. Leurs demandes furent-elles écoutées ? Probablement en partie, mais dans la réponse que Louis de Chalon envoya à Albi le 21 mai, les consuls de la ville étaient priés de faire garder aux frais de l’évêque le château épiscopal la Brebie, qui dominait la ville, et d’y mettre des gens d’armes en nombre suffisant 2.

Deux jours après, les commissaires partirent pour Toulouse, et pendant leur séjour dans cette ville, ils rédigèrent plusieurs lettres de grave conséquence. Pensant qu’en nommant un sénéchal à Carcassonne, la cité se remettrait plus vite en leurs mains, ils instituèrent Charles de Clermont dans cet office 3. /56/ Mais ce dernier ne put entrer dans la ville avant plusieurs semaines 1. Le 26 mai, parurent enfin les lettres qui ordonnaient la convocation des trois Etats de Languedoc au Bourg de Carcassonne pour le prochain jour de la Madelaine 2 (22 juillet). Dans ces lettres, le sire d’Arguel, agissant au nom de la Reine, donnait pleins pouvoirs aux représentants des Etats de s’assembler avant la date fixée, pour leur permettre de délibérer préalablement, pourvu que ce fût en présence des sénéchaux ou de leurs lieutenants. C’était de leur propre autorité que les commissaires avaient introduit cette clause dans leurs lettres. L’ordonnance de la Reine du 3 avril n’en faisait pas mention, et l’on verra dans la suite le retard et les complications qui en résultèrent.

Les destitutions d’officiers, ordonnées par les commissaires se succédaient de jour en jour ainsi que de nouvelles nominations. Certains de ces choix ne furent pas accueillis favorablement. Le vicomte de Caraman, qui avait été établi sénéchal de Toulouse, tomba entre les mains du comte de Foix, qui le retint prisonnier et ne le relâcha que sur les instances du comte de Genève 3.

L’on en était là, quand, dans les premiers jours de juin, parvinrent du Royaume d’alarmantes et terribles nouvelles, qui devaient changer profondément la situation du Midi. Le 29 mai, dans la nuit, /57/ grâce à la trahison de Perrinet Leclerc, les Bourguignons étaient rentrés à Paris pour venger les massacres commis par les Armagnacs. Paris ne connaissait que trop les fureurs bourguignonnes. Les arrestations se firent en masse, précédant la terrible boucherie qui commença le 12 juin et qui débuta par l’assassinat du connétable d’Armagnac. Ce fut une tuerie. Le duc de Bourgogne s’était gardé d’assister à ces événements. Il s’était retiré dans son duché pour recevoir à la fin de mai l’empereur Sigismond, à Montbéliard 1, puis, avant de revenir à Paris, il s’était fait précéder de deux représentants, chargés d’arrêter la violence du peuple. Le 14 juillet, Jean-sans-Peur fit son entrée à Paris avec la reine Isabeau, comme un libérateur et aux cris de « Noël Noël » de la foule. Les massacres n’en continuèrent pas moins, jusqu’à ce que, révolté, le Duc se décidât à sévir.

Sur ces entrefaites, un nouveau personnage parut dans le Midi. C’était Jean Ier, comte de Foix, qui avait occupé quelques années auparavant la charge de capitaine général en Languedoc et Guyenne 2. Après avoir paru se désintéresser pendant un temps des affaires du Midi, il vint s’établir, vers le mois de mai 1418, à Mazères, d’où il surveilla la marche des événements, sans prendre encore parti pour le Dauphin ou pour le duc de Bourgogne. Sa conduite à l’égard du comte de Genève fut singulière pendant ces premiers mois. Il avait arrêté l’un de ses officiers, mais il s’était empressé de le relâcher, dès qu’il en /58/ avait été requis. A Mazères, il reçut dans le courant de juin une ambassade des villes du Midi qui le priaient de prendre en main la défense du pays 1. Le comte de Genève n’ignora sûrement pas cette démarche; s’il l’avait voulu, il s’y serait facilement opposé. Donc, à ce moment, aucune hostilité ouverte ne paraissait exister entre les deux seigneurs.

Forts de l’autorisation du sire d’Arguel, les trois Etats se réunirent à Carcassonne le 21 juillet. Mais la situation avait changé, et il n’était plus dans les plans du comte de Genève de laisser discuter l’assemblée hors de sa présence. Il obtint de la Reine de nouvelles lettres, datées du 3 juin, qui interdisaient à l’assemblée de délibérer et de rien décider sans l’assentiment des commissaires 2. Ces lettres ne parvinrent au sire d’Arguel que le 15 juillet. Il assiégeait alors le château de Nîmes, où il s’était rendu en quitttant Toulouse 3. Les villes furent informées immédiatement du contenu des lettres royales et de la décision qu’avait prise le comte de Genève de suspendre la réunion des Etats et de la renvoyer au 8 septembre 4. Mais elles n’en tinrent nul compte et commencèrent leurs délibérations au jour fixé.

En l’apprenant, l’anxiété du sire d’Arguel redoubla. Le château de Nîmes tenait encore. Il dépêcha à /59/ Carcassonne son collègue le vicomte de Murat, puis, dans les derniers jours de juillet, ayant pris le château, il se hâta d’accourir en personne auprès de l’assemblée. Le 3 août, il passait à Narbonne 1 et le 4 il arrivait à Carcassonne 2. C’était avec déplaisir et avec crainte qu’il avait vu les Etats se réunir sans lui. Aussi s’empressa-t-il de leur formuler des demandes de secours qui n’obtinrent aucun succès 3. Pendant plusieurs jours, il chercha à lutter contre les décisions de l’assemblée, mais toujours en vain. Il semblait que la faveur populaire lui échappait, que sa présence était regardée avec moins de plaisir et qu’une autre influence minait la sienne.

Il ne tarda pas à en comprendre la cause et, pour y résister, il obtint le 29 août de nouvelles lettres du roi Charles VI qui lui confirmaient en termes expressifs sa nomination, enjoignant à tous les sujets du Royaume de reconnaître le comte de Genève comme son commissaire royal 4. C’était peine perdue. Le comte de Foix conduisait d’actives négociations avec /60/ le Dauphin, vers lequel il se tournait ouvertement et qui, le 17 août, le nomma son lieutenant et capitaine général en Languedoc 1. Jean de Foix obtenait les mêmes pouvoirs que les commissaires bourguignons, mais il allait s’employer de toutes ses forces au service du Dauphin. Ce dernier trouvant l’entreprise trop lourde pour une seule tête lui donna comme auxiliaire Régnault de Chartres, archevêque de Reims 2. Ces deux personnages devaient exercer des pouvoirs militaires et civils dans le Midi destinés à miner l’influence bourguignonne.

Cependant l’archevêque de Reims commença seul la lutte contre le comte de Genève. Le comte de Foix ne semble pas l’avoir suivi dans les entreprises qu’il mena dans le Bas-Languedoc et dans le Gévaudan. Dans un accord que cherchèrent à établir les cardinaux administrateurs d’Avignon entre les deux partis, pour les engager à réunir leurs armes et à chasser l’Anglais, le nom du comte de Foix n’est pas mentionné 3. C’est que ce dernier ne renonçait pas à négocier avec le duc de Bourgogne; tout en montrant ses sympathies pour le Dauphin, il désirait se gagner la faveur du puissant feudataire et il y réussit bientôt. Sur ces entrefaites, le sire d’Arguel, qui continuait avec courage à travailler pour l’influence bourguignonne, vint mettre le siège devant Villeneuve-lez-Avignon. Il y était le 9 septembre, quand une nouvelle inattendue /61/ l’y atteignit 1. Son père Jean de Chalon qui avait accompagné Jean-sans-Peur à Paris 2, avait été frappé par une terrible épidémie de peste qui ravageait alors la capitale. Ses serviteurs l’avaient transporté dans un hôtel voisin de l’Eglise de Sainte-Catherine du Val-des-Ecoliers, l’Hôtel des Vervelles. Et c’est là que le fidèle vassal du Duc avait expiré le 2 septembre, loin des siens et victime de son dévouement à son seigneur 3.

C’était une perte immense pour Jean-sans-Peur qui voyait disparaître un compagnon fidèle de ses dernières années. Dans toutes ses campagnes, dans les armées qu’il avait réunies, le brillant prince d’Orange était accouru toujours au premier rang, ne ménageant ni son influence, ni son or pour le service de son maître 4. /62/ Dans cinq campagnes où il servit le Duc, Jean de Chalon avait amené avec lui cinq à six cents lances équipées à ses frais 1. La perte n’était pas moins grande pour le comte de Genève, qui se trouvait privé soudainement de son père, alors que de pressantes besognes l’occupaient dans le Midi, l’empêchant d’assister à ses derniers moments. Des étrangers avaient accompagné la dépouille du Prince à l’église de Sainte-Catherine, où ses entrailles furent déposées, en attendant que des temps moins troublés permissent à Louis de Chalon de faire à son père des obsèques convenables 2. Dans l’entourage du Duc, l’on conserva un excellent souvenir du vieux vassal. On aimait à se rappeler sa /63/ douceur, sa courtoisie, sa fidélité. Ses serviteurs surtout vantaient son affection et, parmi ses enfants, nul plus que son fils Louis n’était à même de rappeler son inlassable sollicitude pour les siens 1. Aussi comprend-on la tristesse qui s’empara du nouveau prince d’Orange à ces funèbres nouvelles 2. Le service du Duc l’empêchait de rentrer immédiatement en Bourgogne. Il se trouvait placé à la tête de seigneuries importantes, qui auraient exigé sa présence en Franche-Comté, mais, désireux de poursuivre sa mission jusqu’au bout, il renonça à quitter le Midi momentanément. Prenant des vêtements de deuil, il reçut les jours suivants les condoléances des habitants de sa ville d’Orange, dont deux députés lui étaient envoyés pour lui exprimer leur sympathie et saluer en même temps leur jeune maître. Louis se montra fort touché de leurs démarches et les accueillit avec beaucoup de bonne grâce 3. /64/

Le roi Charles VI, pour prouver tout l’attachement qu’il vouait à la maison de Chalon, confirma, le 9 septembre, le nouveau prince d’Orange dans sa charge de capitaine général 1. Dans ses lettres, le Roi faisait défense expresse à tous ses vassaux de servir sous d’autre bannière que sous celle de son commissaire. Il semblait ainsi que l’autorité de Louis de Chalon s’accroissait dans le Midi, appuyée à la fois par le Roi et par Jean-sans-Peur. Or, il en était tout autrement. Le comte de Foix ne cessait ses sourdes menées. En août, il obtenait du Roi un présent de 10 000 florins, que devaient suivre, quelques mois plus tard, des avantages plus sérieux 2.

A cette époque probablement, la cité de Carcassonne se rendit enfin au parti du Roi. Jusqu’ici le Bourg seul avait ouvert ses portes aux commissaires. Pour la remercier, Charles VI adressa, le 11 septembre, une lettre aux habitants de la ville où il leur témoignait son contentement et les engageait à sévir toujours plus fidèlement contre tous ses ennemis, tant Anglais qu’Armagnacs 3. C’était un succès pour la cause du prince d’Orange, mais il en profita peu. /65/

De tous côtés, l’horizon lui apparaissait singulièrement obscurci. Du nord l’on recevait d’alarmants messages. L’invasion anglaise avait pénétré dans toute la Normandie. Rouen était investi et subissait les horreurs d’un siège de plusieurs mois. Du duc de Bourgogne, peu ou point de nouvelles. Sa conduite continuait à être des plus louches et il est probable qu’à ce moment déjà, Louis de Chalon commençait à éprouver des soupçons à son égard. Enfin, ses châteaux et ses terres de Franche-Comté et de Vaud étaient sans maître. Encore obtint-il dans le courant d’octobre des lettres de délai du Roi pour l’hommage qu’il avait à lui rendre pour ses terres de Dauphiné, terres qui venaient de lui échoir dans l’héritage de son père 1. Mais tout le poussait à quitter le Midi. Il s’y serait sans doute préparé, si des dangers pressants, non seulement pour sa cause mais pour lui-même surtout, ne l’avaient alors assailli.

L’archevêque de Reims, dont on a mentionné le nom, s’apprêtait à descendre le Rhône pour venir attaquer directement le prince d’Orange, engagé dans des opérations militaires. Il faisait ses préparatifs dans le Dauphiné, sous la protection des officiers du Dauphin. Sans tarder, dès qu’il en eut reçu la nouvelle, Louis de Chalon écrivit à sa bonne ville d’Orange, la suppliant de faire bonne garde et l’avertissant des /66/ tentatives de l’archevêque de Reims. Il recommanda aux habitants de conduire dans la ville leurs bestiaux, pendant une dizaine de jours, tant qu’on ignorerait les intentions de l’envahisseur 1. Puis, les jours suivants, semblables lettres furent dépêchées aux habitants de trois cités où l’archevêque pouvait trouver aide et secours. C’étaient les villes de Nyons, de Mirebel et de Tullins 2. Le prince d’Orange, se réclamant des pouvoirs qui lui avaient été conférés et confirmés à plusieurs reprises, mettait en garde les habitants de ces villes contre les menées des ennemis du Roi. Tout en les engageant à servir la bonne cause, il semblait vouloir justifier sa conduite. Il s’excusait de ne pas être sur les frontières du Royaume à repousser l’invasion étrangère et alléguait les pressantes occupations qui le retenaient dans le Midi. Bref, le prince d’Orange sentait que le terrain allait lui être chaudement disputé. Il faisait tous ses efforts pour retenir à lui les populations. Refusant une tentative d’accord que les cardinaux, gouverneurs d’Avignon, avaient cherché à amener entre lui et Régnault de Chartres, il reprit de plus belle la lutte en novembre 3. De Montpellier, /67/ le 29 du mois, il adressait avec ses collègues aux populations du Languedoc une pressante invitation à la guerre sans merci « pour destruire et extirper les ennemis infracteurs de la paix 1 ». Ses soldats qui, jusqu’ici, ne s’étaient signalés par aucun des terribles excès fréquents dans les luttes civiles de cette époque, commençaient à provoquer des réclamations. L’argent manquait sans doute pour les payer. Ils firent, vers la fin de l’année 1418, quelques descentes en Camargue, pour s’emparer du bétail qui paissait dans les riches prairies. Aussitôt, les habitants d’Arles, auxquels ces bestiaux appartenaient, s’émurent et les consuls de la ville qui craignaient de s’adresser directement au Prince, supplièrent leurs voisins d’Orange de s’entremettre auprès de leur maître pour obtenir réparation des dommages subis 2. L’on ignore s’ils obtinrent gain de cause.

Pendant ce temps, la ville de Toulouse était travaillée par des officiers du comte de Foix. Ce dernier s’allia, le 16 novembre 1418, aux comtes d’Armagnac et d’Astarac, dans le but de chasser les Bourguignons du pays et de se protéger réciproquement 3. Pour cela, il fallait tout d’abord reprendre Toulouse, où les Bourguignons s’étaient trop facilement installés. Durant le mois de janvier, les capitouls louvoyèrent /68/ et hésitèrent dans leurs décisions. La présence des commissaires bourguignons, qui se trouvèrent à plusieurs reprises dans leurs murs, les empêchait de répondre d’une manière affirmative au comte de Foix. Après avoir été sur le point de se donner à lui, sur le bruit d’une prochaine arrivée du Dauphin, ils reculèrent de nouveau quelques jours après, déclarant vouloir obéir aux lettres du Roi qui confiait au prince d’Orange seul le gouvernement de Languedoc. Malheureusement pour eux, leur décision arrivait trop tard. Un retour subit s’était produit dans les intentions du Roi, influencé avec force par le duc de Bourgogne; Le prince d’Orange, qui semblait pouvoir compter sur de grandes récompenses pour ses services, était tout à coup disgracié et remplacé par le comte de Foix. Ainsi, les intrigues de ce dernier produisaient leur résultat. Non content d’avoir recueilli la faveur du Dauphin, il parvenait à capter celle du duc de Bourgogne au détriment du prince d’Orange. Le 20 janvier 1419, le Roi nommait le comte de Foix lieutenant en Languedoc et déchargeait en même temps le prince d’Orange et ses collègues de la commission qu’il leur avait confiée l’année précédente 1.

Ces lettres ne parvinrent dans le Midi que plusieurs mois plus tard. On devine la surprise et la colère du Prince en les lisant et en se voyant joué par le duc de Bourgogne et par le comte de Foix. Il pouvait accuser à juste titre le premier d’ingratitude, et il s’expliquait avec peine la conduite du Roi, qui, peu de temps auparavant, venait encore de lui donner des preuves /69/ de sa faveur. Or, d’après une lettre citée par Clerc, mais dont on n’a pu retrouver le texte intégral, Charles VI, à ce moment-là, ne pensait point à se séparer complètement du Prince. Il semblait songer à une sorte d’entente de pouvoirs entre ce dernier et le comte de Foix, puisqu’il chargeait Louis de Chalon, le 2 février, de recevoir le serment de Jean de Foix, au cas où celui-ci accepterait la charge qui lui était offerte 1.

Après que les Etats se furent séparés au commencement de février, Louis se hâta de rentrer à Toulouse, où on le voit assister aux délibérations de la ville dès le 11 février 2. Les consuls sont fort anxieux. Le comte de Foix les presse, les harcèle chaque jour. D’autre part, le prince d’Orange est là, au milieu d’eux, portant avec lui toutes les menaces. Il est bien arrivé avec des paroles de paix. Il a déclaré partout qu’il ne désirait que le repos du Royaume et qu’il était prêt à se soumettre à toute décision juste. Mais les faits ont démenti ces assurances. /70/

L’assemblée, de plus en plus inquiète, fait alors tous ses efforts pour amener un rapprochement entre le Prince et le comte de Foix. C’est là, lui semble-t-il, son seul moyen de salut. Elle y parviendrait si, du côté du Prince, elle trouvait un peu plus d’empressement. Mais Louis de Chalon, blessé au vif, redoutait cet accommodement. Par deux fois, par sa faute, les tentatives échouèrent, et quand il dut quitter Toulouse, à la fin de février, il laissa dans la ville deux de ses collègues chargés d’observer la même politique.

A Montpellier, où il se rendit, il avait convoqué à nouveau l’assemblée des Etats pour le 26 du mois de mars. Il avait besoin d’eux pour maintenir son autorité et il savait qu’une grande partie des villes répondrait à son appel, par force et par nécessité. Les routiers du Prince désolaient en effet le pays et l’on avait tout à craindre de leurs déprédations. Pour s’en débarrasser et pour éloigner la guerre, les Etats étaient prêts à toutes les concessions.

Au jour fixé, le vicaire de l’évêque de Maguelonne dit une messe solennelle dans la maison de l’évêque, où devait se réunir l’assemblée. Il avait devant lui des représentants des villes de Toulouse, Carcassonne, Béziers, Narbonne, capitouls ou leurs lieutenants, une grande quantité de nobles et de gens d’Eglise accourus nombreux à l’appel du prince d’Orange 1.

Toute cette brillante assemblée, la messe terminée, parcourut les rues de Montpellier en une procession générale. Puis, les délibérations commencèrent. /71/ Leur résultat ne nous est pas parvenu. Si la plupart des cités du Bas-Languedoc avaient répondu à l’appel de Louis de Chalon, les grandes villes du Haut-Languedoc 1 ne s’étaient pas fait représenter à l’assemblée. Au contraire, peu de temps après, le prince d’Orange vit se détacher de lui plusieurs de ces villes; les États ne lui furent plus d’une grande utilité. Désormais il ne devait compter que sur ses armes.

On était à la fin d’avril quand le comte de Foix se décida à accepter la lieutenance que lui confiaient les lettres du Roi du 20 janvier. Il avait attendu longtemps, mais il était parvenu à obtenir sa charge à la fois du Roi et du Dauphin. Pendant plusieurs jours, le vicomte de Murat parcourut la route de Pamiers à Montpellier. Il était chargé de la marche des négociations avec le comte de Foix 2. Or, comme il avait été, les mois précédents, le compagnon du prince d’Orange, que rien ne nous apprend qu’ils se fussent séparés en mauvais termes, il est permis de supposer que Louis ce Chalon connaissait ces négociations. Il les vit sans doute bien à contre-cœur, mais il comprit, dès le 27 avril, qu’il n’avait plus qu’à se retirer devant son rival. Loin de recommencer la lutte par les armes, comme on l’a prétendu, il se prépara à quitter le Midi, en laissant seulement des garnisons dans quelques places qui lui restaient encore.

Toulouse, qui lui avait été si dévouée, profita de son départ pour ouvrir ses portes au comte de Foix 3. /72/ Au commencement de mai, Carcassonne suivit son exemple, puis Montpellier où Jean de Foix se trouvait à la fin de ce même mois. C’est de cette ville qu’il reçut la soumission des villes de Sommières et de Nîmes, lesquelles s’étaient engagées à lui livrer le prince d’Orange 1. Ce dernier, quittant définitivement le Languedoc, s’en vint au Pont-Saint-Esprit à la fin de mai, d’où il passa le Rhône pour regagner le Dauphiné, puis la Franche-Comté 2. Quatorze mois auparavant, il avait franchi ce même Rhône à la tête d’une ardente troupe, riche d’espoirs. Maintenant l’ingratitude de son souverain le chassait de cette province où il avait eu tant de succès.

Cependant, bien des événements le rappelaient dans ses foyers. Il avait hâte de regagner ses châteaux si longtemps délaissés. Il avait souvent entendu parler des richesses qu’avait accumulées son père, et, tout en guerroyant au Midi, le souvenir d’un certain trésor qu’on disait enfoui dans une des tours de Nozeroy hantait son imagination 3. Les seigneuries que son père lui avait léguées étaient sans maître depuis le décès du prince Jean. Il fallait pourvoir au plus vite à leur administration. En outre, Jeanne de Montbéliard portait, seule, une lourde responsabilité.

Les populations des bords du Rhône qui virent /73/ s’éloigner le prince d’Orange dans les derniers jours de mai, constatèrent que ce dernier ne quittait pas le Languedoc les mains vides 1. Il avait mis à profit son séjour et repartait pour le Jura avec un convoi d’une quinzaine de mules toutes pesamment chargées de deniers, de vaisselle d’or et d’argent, de figues, d’oranges 2, etc. L’une de ces mules portait un buffet, en trois parties, rempli de vaisselle dorée, une autre, une grande croix d’argent, garnie de pierres précieuses, probablement la dépouille de quelque abbaye, saccagée par les routiers du Prince. Cette croix était si lourde qu’un homme avait de la peine à la soulever. En la voyant, Jeanne de Montbéliard fut émerveillée, et comme une de ses suivantes était mourante, on plaça cette croix sur la malade dans l’espoir d’un miracle. Hélas ! la dame en trépassa. Le tout pouvait s’élever à la valeur de deux cent mille écus d’or, sans compter ce que chacun des écuyers du Prince ramenait pour son /74/ compte, car sa troupe se trouvait aussi forte à son retour qu’au départ. Aussi, dans la suite, répétait-on souvent que le Prince était revenu de Languedoc « bien fourni ».

A Nozeroy où il se rendit en premier lieu, Louis reçut un chaud accueil. L’on était heureux de voir revenir le jeune seigneur. On reporterait sans nul doute sur le fils toute l’estime qu’on avait eue pour le vieux sire de Chalon dont la tombe était à peine fermée.

Dans le Royaume, les haines se calmaient pour un temps. Le 8 juillet, une paix fut conclue à Pouilli, près de Melun, entre le Dauphin et Jean-sans-Peur 1. Les deux adversaires se réconcilièrent publiquement. Mais l’on savait trop à quoi s’en tenir avec le duc de Bourgogne. Il était incorrigible et se préparait de nouveau à négocier avec l’Angleterre. Dans tous les cas, sa popularité en Franche-Comté avait fait peu de progrès durant ces derniers événements et le retour de Louis de Chalon ne devait pas l’augmenter.

Quant au Midi, le comte de Foix eut bientôt fait de le reconquérir avec presque autant de rapidité que le prince d’Orange s’en était emparé. En juillet, il rentrait à Toulouse et dépêchait au Dauphin deux de ses vassaux pour lui annoncer le succès de son entreprise.

 


 

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CHAPITRE IV

LA LUTTE CONTRE LES ARMAGNACS ET L’EXPEDITION DE BÂLE
(1419-1425)

Sommaire : Jeanne de Montbéliard à Lons-le-Saunier. — Le Prince, appelé par la duchesse, repart en campagne contre les Armagnacs. — Il est nommé gouverneur de Maçonnais. — Refus de prêter serment à Henri V. — Retour dans le Jura. — Démêlés avec le duc de Bourgogne au sujet de Jougne. — Funérailles de Jean de Chalon. — Le tournoi de Gevry et les succès de Louis. — Prétentions à la succession du comté de Genevois. — Longue rivalité avec le duc de Savoie. — Voyage du Prince en Allemagne. — Son échec. — Traité de Morges. — Conduite de Louis devant Meaux. — Réception du duc de Bourgogne à Nozeroy. — Alliance avec le marquis de Bade et conflit avec Bâle. — Insuccès de l’expédition.

Le prince d’Orange ne goûta pas un long repos dans ses châteaux du Jura. L’éternelle lutte entre les deux maisons rivales de France reprenait plus intense que jamais. Après ses déboires au Midi, Louis de Chalon allait-il garder rancune au duc de Bourgogne de son ingratitude ? Il en aurait eu le droit. Pour le moment, il ne s’occupa que de mettre à profit son retour dans ses châteaux.

Durant les mois qui suivirent, il séjourna presque constamment dans son château de Lons-le-Saunier, /76/ où s’était rendue sa femme depuis le décès du prince Jean. Jeanne y avait entrepris plusieurs réparations urgentes. Elle y avait fait apporter des meubles pour la somme de 18 florins 11 gros et demi, suivant des instructions spéciales reçues probablement de son mari 1. C’est aussi sur l’ordre de ce dernier que, sitôt la mort du prince Jean connue, elle s’était transportée au château de Saint-Laurent de la Roche. Elle n’y trouva que peu d’argent et s’en vint alors à Lons-le-Saunier, où Louis de Chalon supposait que son père avait laissé une partie de son fameux trésor. Dans la suite de la princesse, l’on parlait déjà de ces trésors du sire d’Arlay, les langues allaient leur train, et Jeanne, qui redoutait des indiscrétions, attendit quelques jours avant de s’assurer par elle-même de ce qui en était 2. Un certain soir, laissant ses demoiselles d’honneur dans une des salles du château, elle gravit seule l’escalier qui conduisait à une des pièces du feu prince. Son absence dura environ trois heures, employées probablement à chercher le fameux trésor. Quand elle rejoignit ses compagnes, « Madame Louise de Salins et aultres dames et damoiselles qui dansoient la veirent qu’elle façoit très bonne et joyeuse chière et ly dirent les aucunes d’elles les semblables paroles : En effet, hé madame vous avez bien cause de fère bonne chière. A quoy leur répondit ce qui s’ensuit : En effet, taisezvous foles, n’avez-vous pas bien dansé, et plus ne parlèrent dudit trésor. » /77/

Jeanne avait-elle découvert les richesses accumulées par le Prince, dont parlait la rumeur publique ? Ses recherches à Lons-le-Saunier ne furent peut-être pas vaines, mais ce n’était pas là que devait se retrouver le trésor du prince Jean et ce merveilleux coffre rempli de pierreries que cinq chevaliers ne pouvaient soulever 1. Louis, qui l’avait souvent vu, se mit activement à sa recherche et finit par le découvrir à Nozeroy dans un caveau situé sous la chambre du Prince.

Désireux de conserver pour ses seigneuries les serviteurs qui avaient été fidèles à son père, Louis maintint la plupart dans leurs charges. Le 4 juillet, il confirmait Guillaume d’Ornans dans sa place de châtelain d’Orbe, au pays de Vaud 2. Il est probable qu’en agissant ainsi, Louis se souvenait de l’autorité qu’avait toujours exercée son père sur ses domaines, autorité qui s’étendait aux moindres détails et qui était de tradition dans la maison de Chalon. Car, du vivant de son père, Louis n’aurait osé nommer aucun châtelain, même dans ses propres terres, sans l’assentiment paternel.

Le 7 août 1419, l’on célébra à Lons-le-Saunier le mariage d’une des demoiselles d’honneur de Jeanne de Montbéliard, Renaudine de Salins 3. Le Prince et la Princesse assistèrent à la cérémonie et lui donnèrent /78/ un éclat tout particulier. Cette fête était le prélude des nombreuses et brillantes réceptions que devait offrir Louis de Chalon dans l’avenir.

Mais il lui fallut bientôt quitter ses châteaux pour endosser son armure, et, malgré les mauvais souvenirs qu’il gardait de ses relations avec le duc de Bourgogne, il n’hésita pas à répondre à l’appel que lui adressa en septembre la Duchesse. Celle-ci, qui avait à défendre les deux Bourgognes en l’absence du Duc, s’apprêtait à résister, par tous les moyens, aux troupes du Dauphin. L’ennemi était signalé de plusieurs côtés à la fois, menaçant les frontières du Charolais et du Mâconnais. Pour l’aider, la Duchesse avait à ses côtés le prince d’Orange et Jean de Cottebrune, maréchal de Bourgogne. Le premier se rendit à Châtillon-sur-Seine, le 3 octobre, avec une troupe de 350 chevaliers et écuyers 1. En peu de temps, il vit accourir à lui 500 hommes bien armés et équipés. Les jours suivants, cette armée délogea l’ennemi qui assiégeait la place de Marcigny-les-Nonains, mais, sur la nouvelle que le Dauphin approchait, le prince d’Orange fut envoyé en Charolais où il resta un certain temps, occupé à guerroyer énergiquement.

C’est alors que parvint dans les deux Bourgognes la foudroyante nouvelle de l’assassinat de Jean-sans-Peur, tué le 7 septembre au pont de Montereau. La consternation fut générale chez les partisans et les sujets du Duc, l’on était atterré de l’audace des Armagnacs. Puis l’on se ressaisit, et l’on jura une /79/ vengeance terrible. L’Anglais était là tout prêt. C’est à lui qu’on irait pour obtenir satisfaction. La Duchesse resta en Bourgogne pour faire face au Dauphin, tandis que le nouveau duc Philippe s’alliait aux Anglais dans le nord et assiégeait avec eux plusieurs places de Picardie 1. Pour récompenser le prince d’Orange de son appui, la Duchesse le nomma, le 22 janvier 1420, « gouverneur de Sens, de Saint-Pierre-le-Moutiers, Mâconnais et marches à l’environ 2 ». C’était sur lui qu’elle pouvait compter désormais. Quelques semaines auparavant, le Prince lui avait avancé deux cents francs, destinés à payer l’enrôlement d’un certain capitaine lombard, Jacques de Hupperan. Ce dernier s’était vu détroussé par les Armagnacs à Tournus; on lui avait volé ses chevaux et ses harnais et il avait accepté l’offre du Prince d’entrer au service de la Duchesse 3. Avec le maréchal de Bourgogne, Louis réussit à déloger les Armagnacs de ces pays et leur coupa la retraite sur la Loire. Cependant, en février et mars, il séjournait encore avec ses troupes dans les mêmes régions. Ce n’était pas contre le Dauphin en personne qu’il guerroyait, mais contre ses partisans. Charles, après le meurtre de Jean-sans-Peur, s’était transporté dans le Midi avec une forte armée, dans le /80/ dessein de conquérir les quelques places qui tenaient pour les Bourguignons. La résistance se concentra autour du Pont-Saint-Esprit. Le Dauphin vint mettre le siège devant cette place, mais il la trouva bien fortifiée et défendue par les gens du prince d’Orange 1. Pour en venir à bout, il dut faire chercher à Avignon et en Provence, des bombardes et des engins de guerre. Il s’en empara cependant, ainsi que de plusieurs autres forteresses aux environs. Il y plaça de fortes garnisons.

Ainsi disparurent les derniers restes de l’influence du Prince d’Orange dans le Midi. Après l’échec que ses armes avaient reçu du Dauphin, Louis de Chalon apprit que ses terres de Dauphiné lui avaient été confisquées pour défaut d’hommage. Le Dauphin les avait données à un seigneur de Laigle 2. Les événements tournaient décidément mal pour lui. Son attitude hostile à l’égard du Dauphin menaçait de lui causer de plus graves dommages encore. Dès ce moment, tout en restant fidèle au duc de Bourgogne, il chercha à ménager le Dauphin. L’occasion se présenta bientôt de se concilier la faveur de certains de ses anciens ennemis.

Pressé de venger la mort de son père, le duc Philippe-le-Bon s’était jeté dans les bras des Anglais, repoussant toute tentative de conciliation avec le Dauphin. Après des pourparlers à Arras, il fit conclure, le 20 mai 1420, le traité de Troyes entre Henri V et Charles VI, traité qui ouvrait la France aux Anglais et qui /81/ provoqua l’indignation générale dans une grande partie du Royaume. Dans la comté de Bourgogne, bien que l’on restât fidèle au Duc, c’est avec tristesse que l’on apprit cette alliance avec l’étranger. Le traité conclu, Henri V et Philippe s’empressèrent d’aller mettre le siège devant Melun, et c’est devant cette ville que le prince d’Orange rejoignit l’armée du Duc. A la nouvelle de son arrivée, Henri V lui fit demander de prêter le serment de fidélité et d’observer le traité de Troyes. Louis répondit avec fermeté qu’il lui était impossible de placer le Royaume dans les mains de ses anciens ennemis et il s’éloigna fièrement 1. Y eut-il dans cette attitude autant de noblesse que plusieurs historiens se sont plu à en découvrir ? On en doute, car Louis avait trop d’intérêt à ne pas s’aliéner complètement le Dauphin à ce moment pour se donner tout entier aux Anglais. Mais il est hors de doute qu’il lui répugnait, comme à la plupart des Francs-Comtois, de voir leur adversaire d’autrefois s’emparer du Royaume. Placé par la nécessité dans cette alternative, il sacrifia assez courageusement la faveur momentanée qu’il aurait pu trouver auprès d’Henri V.

Cependant, au dire de Chastellain, il assista le 2 juin au mariage d’Henri V et de Catherine de France 2. /82/ Au milieu du somptueux cortège qui suivit les époux, l’on remarqua le jeune Duc, tout habillé de noir, et derrière lui le prince d’Orange. Puis, ce dernier se hâta de quitter la cour des deux souverains où il ne se sentait plus à l’aise, pour regagner Bletterans, l’un de ses châteaux. Il y passa le mois de juillet, probablement avec sa femme 1. Ses démêlés avec le duc de Savoie au sujet du comté de Genève, l’occupèrent activement pendant ces mois. On y reviendra plus loin. Dans l’automne, il entreprit une tournée dans ses terres du Haut-Jura, qu’il n’avait pas visitées depuis longtemps 2. A Jougne, son receveur, Pierre de Jougne lui apporta du poisson 3, dont il se montrait fort friand, car il s’en était fait envoyer les jours précédents à Nozeroy 4.

La ville de Jougne était une place importante commandant l’entrée du pays de Vaud, la « cluse » en langage local. Louis, se fondant sur une concession impériale octroyée à ses prédécesseurs, venait d’y /83/ installer des foires franches et d’y battre monnaie. La duchesse de Bourgogne, en apprenant ces faits, se crut lésée dans ses droits. Elle n’admettait pas qu’un de ses vassaux, en plein comté de Bourgogne, lui enlevât une de ses plus importantes prérogatives. Aussi, dans le courant de mars 1420, ordonna-t-elle à l’un des conseillers de son fils, Girard Basan, d’informer sur les prétentions du Prince à Jougne 1. De son côté, l’évêque de Lausanne s’émut et lança des lettres d’excommunication contre le Prince, qui se permettait de faire circuler sa monnaie dans ses terres au pays de Vaud. Louis se hâta d’en appeler de cette sentence 2, mais il n’en continua pas moins ses agissements à Jougne. Il était tenu fidèlement au courant par son châtelain Pierre de Jougne, avec lequel il correspondait presque tous les jours. Peu avant la fête de Noël qu’il comptait célébrer à Bletterans, il lui mandait de lui expédier des brochets, des anguilles et des truites, afin de passer joyeusement cette journée 3.

Sur ces entrefaites, le Dauphin, qui avait probablement appris la conduite du Prince devant Melun, /84/ lui fit rendre ses terres de Dauphiné confisquées pour défaut d’hommage 1. Louis dut être sensible à cet acte; il rentrait en possession de bonnes et grandes seigneuries, dont les revenus lui étaient fort utiles.

Profitant des loisirs que lui laissaient les affaires du Royaume, le prince d’Orange put enfin réaliser, dans le courant de février, un projet qui lui était cher. Son père était mort à Paris, seul, sans les siens, sans obsèques convenables. En pieux fils, Louis désirait voir reposer son corps dans l’antique abbaye du Mont-Sainte-Marie, au milieu des noirs sapins du Jura, à côté des seigneurs de la maison de Chalon, qui y avaient été enterrés 2. Accompagné d’une nombreuse suite de chevaliers, de barons, de prélats, Louis ramena /85/ de Paris le corps du prince Jean et, en grande pompe, par monts et par vaux, s’en vint le déposer dans la vieille abbaye. Il n’épargna rien pour donner à cette cérémonie tout l’éclat qui convenait à la gloire du Prince. Longtemps l’on parla de ces funérailles somptueuses dans la Comté 1. Pour subvenir aux frais énormes qu’elles entraînèrent, Louis fut obligé d’emprunter 2000 florins à Paris 2. Mais rien ne lui parut trop coûteux pour honorer la mémoire de son père et il eut la satisfaction de placer les restes de ce dernier auprès de ceux de sa vénérée mère, Marie des Baux, sous les mêmes voûtes.

Son goût pour le faste se montrait en toute occasion. Ebloui par la cour du duc de Bourgogne, Louis rêva de la dépasser. A Nozeroy, il avait découvert dans la Tour de Plomb le fameux trésor, où il pouvait puiser librement. Par ses soins méticuleux, les revenus de ses seigneuries venaient à intervalles réguliers se vider dans ses coffres. Dès qu’un de ses receveurs manquait d’exactitude, il était sévèrement tancé et /86/ mis en demeure de s’exécuter 1. Aussi est-ce avec un éclat particulier qu’il se présenta aux fêtes de Gevry, où le maréchal de Bourgogne, Jean de Cottebrune, donnait alors un tournoi 2. Louis fit son entrée dans l’arène vêtu d’une longue robe de velours cramoisi, relevée d’orfèvrerie. Derrière lui, ses trois hérauts, Orange, Arlay et Charollais conduisaient vingt chevaux de parade. Aux côtés du Prince, chevauchaient ses deux frères, encore en bas âge, Jean et Huguenin. Il devait se mesurer avec Jean de Toulongeon, un des plus valeureux barons de Franche-Comté. Au moment de la rencontre, la lance de ce dernier pénétra au défaut de l’écu du Prince et s’enfonça dans sa hanche, si bien que le sang coula. Mais, loin de s’arrêter, Louis déclara qu’il était prêt à continuer et il ne sortit du tournoi qu’après en avoir remporté les honneurs.

Sa vaillance fut vivement remarquée par les assistants, mais on jugeait exagérés son luxe et son ostentation. Les familiers de la cour ducale conçurent une vive jalousie à son endroit. On estima outrées les prétentions de la maison de Chalon. Les récents agissements du Prince à Jougne, ses rapports avec l’empereur Sigismond indisposèrent peu à peu le Duc et la Duchesse. Les relations plus étroites qu’il ne tarda pas à nouer avec l’Empereur firent éclater le mécontentement.

Par sa mère Marie des Baux, Louis se trouvait /87/ être l’arrière petit-fils d’Amédée III, comte de Genevois, dont la race venait de s’éteindre à la mort de Robert de Genève, élu pape sous le nom de Clément VII 1. Jean de Chalon n’avait cessé de réclamer la succession du comté de Genevois, au nom de sa femme. Quand cet héritage eut été vendu au duc de Savoie, Amédée VIII, c’est avec ce dernier que Jean fut en compétition. Loin de s’effrayer de la puissance de son rival, Jean ne renonça nullement à ses prétentions, et comme Amédée VIII redoutait de voir la maison de Chalon prendre de l’influence dans des pays qui touchaient de près aux siens, la lutte se prolongea très vive entre les deux rivaux. Par une convention du 23 août 1406, Amédée avait cédé à Jean de Chalon la riche seigneurie de Cerlier 2, et quelques mois plus tard il lui donna une rente annuelle de 200 florins d’or 3. Ces concessions ne mirent point fin aux réclamations de Jean de Chalon, qui persista à demander le comté de Genève. Aussi, par la mort de Marie des Baux, /88/ puis par celle de son père, Louis se vit-il appelé à succéder aux droits que ses parents prétendaient avoir sur le dit comté. Dès qu’il fut de retour de Languedoc, il entreprit activement la poursuite de ses droits, qu’il avait portés devant le tribunal d’Empire. Mais un incident faillit amener de graves complications. Un inconnu alla raconter au duc de Savoie que Louis lui avait remis du poison pour empoisonner les fontaines de la ville de Genève où le Duc résidait alors 1. Il se nommait Jean Cholet, dit Huguenin. L’accusation était de pure invention. Aussi Louis, indigné à la nouvelle de cette prétendue révélation, s’empressa de se disculper auprès du Duc, qui ne tarda pas à reconnaître sa bonne foi. D’ailleurs, le criminel, se voyant condamné, avait rétracté sa déposition 2. Cet incident ne parvint pas à rompre les rapports courtois qui ne cessèrent de régner entre les deux princes, malgré leur rivalité.

Profitant d’un voyage qu’il fit en avril 1421 à Nuremberg auprès de l’empereur Sigismond, Louis défendit avec force ses prétentions au comté de Genève 3. Il avait affaire à forte partie, car le duc /89/ de Savoie n’épargnait rien pour soutenir ses droits.

A plusieurs reprises, Louis envoya auprès de l’Empereur des ambassades. Tour à tour ses conseillers Jean Prévôt, Pierre de Merlia, Jean de Champagnole, Huguenin de Vauclens se rendirent à la cour impériale 1 avec une brillante suite. Louis employa toutes ses ressources pour équiper ses ambassades. Il y dépensa plus de dix mille francs. Mais la politique de Sigismond consista à ajourner la décision le plus longtemps possible. Cependant, dès le 25 août 1422, il semble qu’il ait attribué le comté au duc de Savoie, moyennant /90/ une forte somme d’argent 1. Dès que le prince d’Orange l’apprit, il redoubla ses efforts, et c’est alors, probablement, qu’il se décida à accomplir en personne le voyage d’Allemagne. Il quitta la Franche-Comté, accompagné de nombreux chevaliers et écuyers. Cent-vingt chevaux portaient son escorte 2. Il arriva à Nuremberg, mais l’Empereur en était parti et Louis en fut réduit à exposer ses prétentions aux électeurs de l’Empire et aux hauts seigneurs d’Allemagne. Il revint dans ses châteaux, après avoir dépensé quatre à cinq cents francs dans cette inutile ambassade. Mais il laissa à Nuremberg deux de ses conseillers, Gauthier de Fallerans et Guillaume de Saulieu qui y demeurèrent neuf semaines, occupés à défendre activement les droits de leur maître 3. Leurs efforts ne furent pas sans effet, puisque Sigismond, par un /91/ diplôme du 11 janvier 1423, concédait à Louis de Chalon le comté de Genève et ses appartenances, et par un autre diplôme du même jour, chargeait ses conseillers Albert de Colditz, Nicolas Czeiselmeister et Conrad de Gingelfingen de mettre Louis en la possession de ce comté 1. Que se passa-t-il ensuite ? On l’ignore. Mais, ce qui est certain, c’est que les deux diplômes ne furent point expédiés et que la concession qu’ils contenaient n’eut aucun effet. A la suite de circonstances restées obscures, Sigismond se ravisa, et bien que Louis fût alors son vicaire impérial en Bourgogne, il refusa de faire droit à ses prétentions 2. L’année suivante, le 29 mai 1424, l’Empereur accordait définitivement le comté de Genève à Amédée VIII, duc de Savoie, et défendait au prince d’Orange de prendre le titre de comte de Genève et d’en porter les armes 3. Le coup dut être rude pour Louis de Chalon. Il éprouva une vive déception 4. Mais l’affaire n’en resta pas là. Amédée VIII, comprenant la légitimité des prétentions /92/ de Louis, s’empressa de lui proposer un accord qui compenserait en quelque sorte la perte qu’il venait d’éprouver. Dans le courant de mai de la même année, les deux princes convenaient de s’en remettre à l’arbitrage de l’archevêque de Tarentaise et de l’évêque de Lausanne 1. Ces arbitres leur ménagèrent une entrevue qui eut lieu les 24 et 25 juin à Morges, au bord du lac Léman. Le doyen de Besançon, Jean de Vauldrey et le sire de l’Aubespin accompagnaient Louis de Chalon. Cette conférence aboutit à un traité en date du 24 juin 1424 qui termina enfin ce long procès. En compensation du comté de Genève que le prince d’Orange abandonnait définitivement à Amédée VIII, il recevait la tierce partie appartenant au Duc des châtellenies d’Echallens, de Montagny-le-Corbe et d’Orbe, au pays de Vaud, la terre et le château de Grandson au bord du lac de Neuchâtel, avec 12 000 florins de rente, sans préjudice de ses anciens droits sur Cerlier 2. Louis voyait ainsi s’agrandir ses possessions au pays de Vaud. Il acquérait une riche seigneurie, celle de Grandson, il devenait seul possesseur d’Echallens, de Montagny et d’Orbe. Les deux princes renouaient des relations amicales, qui ne devaient cesser qu’à la mort d’Amédée VIII.

La poursuite du comté de Genève n’avait pas empêché le prince d’Orange de servir le duc de Bourgogne, son suzerain.

Au commencement de 1421, il le rejoignit dans le /93/ nord de la France avec le sire de St-Georges et un grand nombre de seigneurs francs-comtois 1. Malgré les soupçons que le Duc commençait à nourrir contre son vassal, récemment favorisé par l’Empereur, il l’accueillit à sa suite, et quand il entra solennellement à Dijon le 29 février, Louis marchait au premier rang derrière lui. Avant d’arriver à Dijon, Philippe s’était arrêté à Meaux, assiégée par l’armée anglaise. Le Duc voulut saluer le roi d’Angleterre, à son passage. En apprenant son intention « le Prince d’Orange prist congé de luy et s’en alla loger avec bon nombre de seigneurs de Bourgogne sur le pays tirant vers Troyes pour attendre là sa venue de Meaux. Et la cause pourquoy ce fit, estoit que il ne vouloit point se trouver devers le roy d’Angleterre, afin de non estre requis de par luy ni des siens de faire le serment aux Anglais » 2. Ainsi, Louis continuait à se tenir sur la réserve vis-à-vis de l’étranger. Il savait que sa conduite serait remarquée et que l’écho en parviendrait peut-être aux oreilles du Dauphin. Au reste, le duc de Bourgogne ne parut guère surpris. Il respecta l’attitude de son vassal « car ne l’eust voulu presser ny contraindre d’une si grand chose contre son gré », dit Chastellain.

Peu de temps après, le Dauphin, ou plutôt le roi de Bourges comme on le désignait, appelait à son conseil son ancien adversaire, le Prince 3. C’était le prélude d’une réconciliation avec le futur roi que Louis devait /94/ toujours rechercher dans la suite et qu’il finit par obtenir définitivement, mais après de rudes déboires.

Laissant le duc Philippe partir pour la cour de Savoie où une entrevue avec Amédée VIII lui était préparée, Louis rentra à Nozeroy. Il y était depuis quelques jours, quand il apprit à sa grande surprise que son suzerain se disposait à passer chez lui, de retour de Genève, où de brillantes fêtes l’avaient accueilli 1. Ainsi, loin de laisser percer le moindre mécontentement, le Duc allait honorer de sa présence la demeure de son ambitieux vassal.

Sans tarder, des messagers furent expédiés au pays de Vaud, chargés de réunir d’abondantes victuailles 2. Richard Ferlin, l’écuyer et l’homme de confiance du prince, parcourut les terres d’Orbe, de Grandson et d’Echallens, en quête de gibier et de poisson. Pendant cinq jours, il s’établit sur les bords du « lac de Lousanne » à la recherche de truites, tandis que son valet rapportait de Neuchâtel du poisson en abondance. Le 5 avril, le Duc arriva à Jougne, où le Prince était venu l’attendre. Le lendemain, les deux seigneurs se /95/ mirent en route pour Nozeroy. Louis déploya dans sa réception le plus grand luxe et ne ménagea pas ses deniers. Aussi, en le quittant, le Duc put-il constater que la maison d’Orange soutenait brillamment son renom de largesses. En souvenir de son passage à Nozeroy, Philippe fit don à Louis d’une maison à Dijon, la maison du cheval, qui avait appartenu à un certain Philippe Jossequin, convaincu d’avoir participé à l’assassinat du duc Jean 1.

Il semblait donc à ce moment que les rapports de Louis avec son suzerain n’étaient troublés par aucun désaccord. Il n’en était rien cependant, et Philippe, tout en montrant bon visage au Prince, n’avait pu lui pardonner sa conduite à Jougne et ses tractations avec l’Empereur. Le 3 septembre, il ordonnait à l’un de ses sergents d’ajourner le Prince, lui disant et pourtant vicaire de l’Empereur, ainsi que Guillaume de Boujailles, Anthoine d’Arnay et Jaquot Lambercier, juges impériaux, pour le 2 février par devant le parlement de Dôle 2. Ils devaient y répondre de leur conduite à Jougne où ils s’étaient permis d’établir une cour impériale au mépris des droits du Duc. La sentence d’ajournement parvint bien à la connaissance du prince d’Orange, mais il fallait une puissance plus forte pour le faire céder. Pendant des mois, il allait défendre énergiquement ses droits, qu’il avait reçus de l’empereur Sigismond en personne. D’ailleurs, il ne s’en émut pas outre mesure, se sentant fortement protégé. A la fin de décembre, c’est encore lui que le /96/ Duc choisit pour négocier avec d’autres seigneurs le mariage d’Agnès, sœur de Philippe avec le régent du royaume, le duc de Bedford 1. Triste besogne, qui semblait livrer toujours plus la France à l’étranger et qui faisait peu honneur à la politique du duc de Bourgogne.

En moins de trois mois, deux souverains étaient morts, laissant le Royaume exposé à tous les périls. Le 31 août, c’était Henri V, le 21 octobre Charles VI qui expirait à Senlis.

Les rapports de Louis avec sa principauté d’Orange avaient été peu fréquents depuis son retour du Midi. Trop d’événements l’avaient absorbé pour qu’il pût donner grande attention à ce qui se passait dans sa ville d’Orange. Cependant, dans le courant du mois de mai, il avait dû ressentir un certain mécontentement contre ses sujets du Midi. Les consuls, prétextant les grandes charges qui pesaient actuellement sur la ville, avaient refusé de fournir les gens d’armes nécessaires pour la garde du château du Prince 2. Aussi celui-ci prit-il le parti en novembre de leur envoyer l’un de ses conseillers, Guillaume de Saulieu, qui l’avait accompagné dans toute sa campagne de Languedoc.

Le 18 novembre, Louis écrivit une lettre aux syndics d’Orange leur annonçant l’arrivée de son envoyé et /97/ leur recommandant de bien le recevoir 1. Guillaume avait pour mission de contrôler le gouvernement de la cité et de rétablir la paix et l’ordre s’il y avait lieu.

Les événements du Royaume de l’année 1423 laissèrent le prince d’Orange tranquille dans ses châteaux du Jura. D’ailleurs, il se trouvait engagé dans son procès pour le comté de Genève. Il ne put suivre l’armée bourguignonne quand celle-ci se remit en campagne, au milieu de l’été, pour se joindre à l’armée anglaise. Le 31 juillet, se livra la bataille de Cravant, où les troupes de Charles VII, qui essayaient de gagner la Champagne, furent complètement défaites. Philippe-le-Bon ne put contenir sa joie en apprenant la réussite de ses armes et il se hâta d’en faire part au duc de Savoie et aux villes des deux Bourgognes. Le succès de la victoire revenait en grande partie à l’habileté du maréchal Jean de Toulongeon 2. Mais le hasard de la guerre voulut qu’un mois plus tard, ce dernier se laissât prendre au château de la Bussière, près de Mâcon, par Humbert de Grolée, seigneur bressan. C’était une grosse perte pour le Duc et une très bonne prise pour Charles VII, qui s’empressa de faire conduire le maréchal à Lyon où on le traita très durement. Sans tarder, Philippe-le-Bon s’occupa de son rachat, et le 3 février 1424, il chargeait le prince d’Orange et les deux frères du maréchal, Adrien et Antoine de Toulongeon, de /98/ convenir de la rançon du prisonnier 1. On pensait échanger ce dernier contre le connétable d’Ecosse, qu’un seigneur franc-comtois, Guillaume de Rye, tenait prisonnier. Mais les choses traînèrent en longueur et ce ne fut qu’en juillet 1425 que le maréchal put recouvrer sa liberté, en payant une énorme rançon. Le Duc dut y contribuer pour 7000 écus d’or, « mais pour un tel serviteur, écrivait-il à ses gens des comptes à Dijon, pour une si grande cause et à un tel besoin que de le préserver de mort, ne voudrions pour rien faillir » 2.

Quelques années auparavant, en 1421, Louis de Chalon avait conclu une alliance avec Bernard, marquis de Bade-Hochberg 3. Ce seigneur des bords du Rhin était fort guerroyeur; constamment en lutte avec ses voisins et en particulier avec les villes de Bâle et de Fribourg-en-Brisgau, il estima prudent de rechercher l’amitié d’un grand seigneur franc-comtois, dont les possessions touchaient presque aux siennes. Des liens de parenté l’unissaient d’ailleurs au prince d’Orange.

Au commencement du mois de juin 1424, ce dernier apprit que la ville de Fribourg-en-Brisgau, en guerre avec le marquis de Bade, s’apprêtait à demander du secours à la ville de Bâle. Louis se trouvait alors à Lons-le-Saunier, sur le point de se rendre au pays de Vaud pour régler son différend avec Amédée VIII. Il adressa le 1er juin une lettre assez impérieuse /99/ aux bourgeois de Bâle, dans laquelle il leur défendait de porter secours à Fribourg, les menaçant de sa colère, dans le cas où ils lui désobéiraient 1. Le procédé était peu courtois, car jusqu’ici, Louis n’avait pas eu à se plaindre des habitants de Bâle. Au contraire, ceux-ci, quelques années auparavant, lui avaient accordé le libre passage alors que le Prince s’en allait à Nuremberg avec une nombreuse suite 2. Et si Louis semblait maintenant si désireux de leur chercher querelle, c’est qu’il comptait probablement sur une entreprise fructueuse à tenter dans ces régions. La perspective d’ajouter quelques seigneuries et châteaux à ses possessions lui souriait. Vers le milieu de juin, il fit ses préparatifs. Il désirait se mettre en campagne avec une troupe éprouvée. A cet effet, il requit l’aide de plusieurs seigneurs franc-comtois, parmi lesquels le sire de Neuchâtel 3.

Mais les villes de Suisse étaient sur leurs gardes, et très vite, l’on eut vent des préparatifs du prince d’Orange. La ville de Berne, qu’un traité d’alliance et de combourgeoisie avait jadis unie à Bâle, s’empressa d’avertir son ancienne alliée, dès qu’elle eut connaissance des projets de son turbulent voisin. Le 18 juin, elle lui envoyait en hâte un messager porteur de la nouvelle que Louis de Chalon avait convoqué ses /100/ vassaux pour le 29 du mois 1. Le but de cette convocation, on l’ignorait. Mais ce que l’on savait, c’est qu’il s’agissait d’une expédition en pays allemand. L’on ne tarda pas à connaître les projets du prince d’Orange. Non seulement ce dernier marchait au secours de son allié, le marquis de Bade, mais il avait l’intention de commencer ses opérations en s’emparant des places de Belfort et de Delle 1bis. Or, ces forteresses étaient la propriété de Catherine de Bourgogne, fille du duc Philippe-le-Hardi et fidèle alliée de la ville de Bâle 2. Ces bruits menaçants arrivèrent dans cette ville dans la journée du 22 juin par une lettre d’Arnold de Ratperg, bailli d’Altkirch. Ce dernier informait les Bâlois qu’il apprenait de source certaine que le comte de Chalon, avec plusieurs seigneurs bourguignons marchait sur Belfort 3. Le bailli, au nom de sa souveraine, conjurait la cité de venir à son secours, lui montrant les conséquences /101/ funestes qui résulteraient de la perte de ces places. Grâce à ces avertissements, les Bâlois ne surent que trop à quoi s’en tenir sur les dispositions du Prince à leur égard. Tandis qu’ils envoyaient messagers sur messagers auprès de ce dernier, ils se hâtaient d’informer leurs voisins de Fribourg-en-Brisgau de ce qu’ils avaient appris 1. Les jours suivants, des lettres furent expédiées à Zurich, à Soleure et à Berne, pour demander du secours à ces anciens alliés et les implorer dans les cruelles inquiétudes où l’on se trouvait alors. De leur côté, les bourgmestres de Fribourg avaient dépêché des messagers à ces mêmes villes pour leur exposer les dangers qui menaçaient Bâle et pour les engager à se joindre à eux et à lui porter secours 2. La réponse de Zurich ne se fit pas attendre. La ville se déclarait prête à envoyer le secours réclamé et assurait Bâle de sa fidèle amitié 3. Quant à Soleure et Berne, les deux villes exprimaient leur regret de ne pouvoir répondre favorablement aux demandes de secours qu’on leur adressait, mais elles-mêmes avaient actuellement des difficultés avec le /102/ prince d’Orange qui les empêchaient de venir en aide à leur alliée 1.

Sur ces entrefaites, Bâle reçut du Prince une réponse aux lettres qu’elle lui avait fait parvenir, réponse singulièrement brève et ambiguë 2. Le messager qui la rapportait, Guillaume, chevaucheur, était cependant muni d’un sauf-conduit en bonne forme, signé de la main de Louis de Chalon 3. Ce dernier écrivait, du prieuré de Marault 4, qu’il avait bien reçu la missive des Bâlois, mais qu’il lui était impossible de leur donner réponse actuellement. En effet, il ne désirait pas dévoiler ses projets car il allait se mettre en route pour Belfort. Il arriva devant la place les jours suivants. En hâte 5, un certain Walther von Andlo, chevalier, et le bailli d’Einsisheim en informèrent les habitants de Brisach, les suppliant avec les autres villes du Brisgau de venir au secours /103/ de Madame d’Autriche. D’après eux, le prince d’Orange campait devant Belfort avec 400 chevaliers et 600 fantassins. Le même jour, le 8 juillet, les Bâlois, avertis de ces événements, engageaient les habitants de Fribourg à les attendre à Altkirch pour marcher contre le Prince 1. Trois jours après, une petite armée sortait des murs de Bâle dans la direction d’Hirsingen; en route, elle fut rejointe par des contingents du Brisgau 2.

On était au 12 juillet, quand dans sa marche, l’armée bâloise apprit que le prince d’Orange s’était subitement arrêté et qu’il était en pleine retraite 3. Quelle était la cause de cette volte-face ? On l’ignore. Peut-être craignait-il une rencontre avec les contingents allemands et les suites d’une attaque des possessions de Catherine d’Autriche.

Quoi qu’il en soit, dès le 10 juillet, il avait abandonné la partie et se repliait sur Montbéliard. C’est du moins ce qu’il résulte d’un billet adressé de Delle, ce même jour, au conseil de Bâle, par Hans Bernhard, seigneur d’Hasenburg 4. /104/

Tel fut le résultat insignifiant de cette expédition. Les troupes bâloises rentrèrent le 13 juillet dans leurs foyers. Louis de Chalon, de son côté, regagna ses châteaux. Il y revenait sans honneur. Fort peu honorables aussi étaient les motifs qui l’avaient poussé à se mettre en campagne.

Un mois plus tard survenait la nouvelle de la bataille de Verneuil (17 août), désastreuse pour les armes de Charles VII. L’on s’y était battu avec courage de part et d’autre, mais la noblesse franc-comtoise ne s’y trouva pour ainsi dire point représentée, et le malheureux comte de Tonnerre, Louis de Chalon, qui passa longtemps pour s’y être fait tuer, n’eut pas même le mérite de cette fin gloireuse 1.

 


 

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CHAPITRE V

LOUIS DE CHALON
VICAIRE IMPERIAL EN BOURGOGNE
(1421-1429)

Sommaire : Premières relations des sires de Chalon-Arlay avec les Empereurs.— L’empereur Sigismond et les ducs de Bourgogne. — Voyage de Louis à Nuremberg et concessions impériales reçues à cette occasion. — Il est nommé vicaire impérial en Bourgogne. — Charte d’investiture de la Comté. — Mécontentement du duc de Bourgogne. — Révolte des Bisontins. — Louis dans la guerre de Hainaut. — Renonciation au vicariat.

A plusieurs reprises, on a fait allusion aux relations qui unissaient la maison de Chalon-Arlay aux souverains du Saint-Empire Romain. Ces relations, particulièrement actives du temps de Louis, dataient d’une époque fort reculée dans les annales de la maison de Chalon. A partir de Jean de Chalon l’Antique, vers 1267, les Empereurs, dans leurs efforts continuels pour rétablir le royaume d’Arles et ressaisir le pouvoir dans les pays qui constituaient l’ancienne Lotharingie, semblent avoir choisi les sires d’Arlay pour leurs représentants en ces régions 1. Très vite, des faveurs /106/ leur furent accordées. A Jean Ier, Rodolphe de Habsbourg, dans les dernières années de son règne, concéda plusieurs privilèges importants, en 1288, le droit de percevoir à Jougne un péage sur les marchandises qui y passaient 1, en 1291, l’avouerie de l’abbaye de St-Oyan de Joux et le droit de battre monnaie à Jougne 2. Ces privilèges furent confirmés par les successeurs de Rodolphe, sur la demande instante des intéressés. Tour à tour, Albert, roi des Romains, Adolphe de Nassau, Othon IV, maintinrent les sires d’Arlay dans leurs prérogatives. Mais les Empereurs tenaient à retirer profit de ces faveurs et à trouver aide et secours auprès de ceux qui en étaient l’objet. C’est ainsi qu’en 1295, Adolphe de Nassau, cherchant à reprendre la politique impériale en Italie, députa en Toscane Jean, sire d’Arlay. La mission de ce dernier n’eut d’ailleurs pas de résultat. Les Guelfes avaient pris leurs précautions et, moyennant une forte somme d’argent, ils avaient acheté l’inaction du baron d’Arlay. Cependant, à cette époque, ce dernier portait déjà le titre de vicaire impérial. Dans une lettre de 1296, le pape Boniface VIII constate que l’on a obtenu que le sire d’Arlay ne se servirait pas de son titre de vicaire « ne noxias induceret novitates 3 » (pour entreprendre de dangereuses initiatives).

Enfin, pour augmenter sa puissance, Jean reçut d’Othon IV la garde et la mairie de Besançon, source /107/ de luttes perpétuelles avec l’archevêque de cette ville 1. Durant le XIVe siècle, les sires d’Arlay paraissent avoir joui paisiblement de leurs privilèges. Les ducs de Bourgogne, absorbés ailleurs, ne les inquiétèrent pas. Mais au XVe siècle, leur attitude changea. Jaloux de l’influence que prenaient leurs vassaux dans la Comté, les Ducs décidaient de la combattre.

L’avènement de Sigismond au trône impérial 2 ouvrit l’ère des difficultés. Sa politique équivoque vis-à-vis de la France et de l’Angleterre eut pour but constant de réconcilier ces deux adversaires et de faire triompher les décisions du concile de Constance. Quant à ses rapports avec les ducs de Bourgogne, ils furent nettement hostiles dans le début de son règne. Le traité de Trino (25 juin 1414) qu’il signa avec le roi de France, Charles VI, était dirigé contre Jean-sans-Peur. Puis quand Sigismond, renonçant à réconcilier les deux ennemis, se fut jeté par le traité de Cantorbéry (13 août 1416) dans l’alliance anglaise, il n’osa, malgré son envie, attaquer le duc de Bourgogne qui était l’allié d’Henri V 3. Enfin, en dépit des invitations pressantes du roi d’Angleterre, la crainte de voir le Duc pris à revers par Charles VI, l’empêcha de marcher contre le roi de France.

Profitant de ces atermoiements, le prince d’Orange, Jean de Chalon, s’était hâté, dès l’année 1415, de réclamer /108/ à l’Empereur la confirmation des privilèges accordés à sa maison. Son procureur, Jean de Vienne, seigneur de Ruffey, l’obtint par diplôme impérial du 20 avril 1415 1.

Après sa mort, Louis, inspiré par le souvenir des faveurs impériales accordées à ses ancêtres, résolut de resserrer ses rapports avec l’Empereur. Il y voyait une puissante protection pour sa maison et un moyen d’augmenter son influence dans la comté de Bourgogne. Peut-être aussi, le secret ressentiment qu’il nourrissait contre le Duc depuis sa disgrâce du Midi, le portait-il à rechercher l’aide d’un seigneur influent. Il s’était déjà rendu compte que des difficultés allaient naître entre lui et le Duc. La duchesse Marguerite, au nom de son mari, n’avait-elle pas pris ombrage de sa conduite à Jougne, où Louis continuait à faire battre monnaie, en vertu de ses privilèges impériaux 2. La mort de Jean-sans-Peur suspendit pour un temps ces menaces, mais elles allaient réapparaître avec le jeune duc Philippe.

L’on a vu comment Louis de Chalon, engagé dans son long procès avec le duc de Savoie au sujet du comté de Genève, avait porté cette affaire devant le tribunal d’Empire. Au mois d’avril 1421, il entreprit un voyage à Nuremberg auprès de l’Empereur. Deux motifs l’y engagèrent. Il désirait obtenir une confirmation catégorique des privilèges concédés à ses ancêtres, peut-être de nouveaux aussi, et il tenait /109/ à plaider en personne sa cause devant l’Empereur. Le résultat de ses démarches dépassa son attente. Les faveurs impériales lui furent si généreusement accordées, que quelques mois après son retour dans la Comté, il se voyait concéder coup sur coup plusieurs privilèges, par lesquels Sigismond lui témoignait sa faveur. Des motifs politiques inspiraient certainement l’Empereur, entre autres le désir de restaurer l’autorité impériale en Bourgogne et dans l’ancien royaume d’Arles.

Le 13 juin, Sigismond confirmait Louis dans tous les droits, privilèges et concessions que lui et ses ancêtres avaient reçus des empereurs romains 1. Le jour suivant, l’Empereur, prétextant l’étendue de ses possessions et les inconvénients de son absence, nommait le prince d’Orange son vicaire impérial en Bourgogne, Dauphiné, Viennois, Valentinois et Provence 2. Il lui donnait les pouvoirs les plus étendus, licence de traiter en son nom avec les princes et les seigneurs, de révoquer au besoin les officiers, de confisquer les terres des vassaux rebelles, de lever des impositions, en un mot de le remplacer en tout. Jusqu’ici, cette charge de vicaire de l’empire avait été plutôt honorifique, sans attributions bien définies; /110/ elle avait fait l’objet de concessions temporaires, au gré des Empereurs. Cependant, environ un siècle auparavant, celle qu’Edouard III, roi d’Angleterre reçut de 1337-1339, devait avoir une réelle importance politique 1. Dirigée contre Philippe VI de Valois et contre le pape Benoît XII, la remise du vicariat avait été entourée d’un apparat solennel 2. Mais c’était là une exception et le vicariat d’empire en Bourgogne, qui, avant d’être confié à Louis de Chalon, se trouvait entre les mains d’Henri Beyer, seigneur de Boppart, n’avait eu aucune portée 3. Dès lors, par les termes mêmes de la concession, Louis se voyait revêtu d’une grande autorité, trop grande peut-être. En effet, de quels pouvoirs pratiques l’investissait l’Empereur pour remplir sa charge et la faire respecter ? D’aucun. Et contre le duc de Bourgogne, un diplôme impérial, malgré son authenticité, était sans grande valeur.

L’obtention du vicariat n’avait pas été sans sacrifice de la part de Louis. Il est probable que son séjour auprès de l’Empereur avait été mis à profit par ce dernier. Sigismond, en effet, se trouvait engagé à fond dans sa guerre contre les Infidèles et les Hussites. Il y avait déjà dépensé de fortes sommes d’argent et pour poursuivre la lutte, de nouvelles ressources /111/ lui étaient nécessaires. La renommée publique lui ayant appris les richesses du prince d’Orange, le luxe qu’il déployait, il n’hésita pas à s’adresser à lui. Il obtint du Prince le prêt d’une somme considérable. Mais dans l’impossibilité de la rembourser, il l’autorisa de percevoir les revenus du vicariat qu’il venait de lui conférer, jusqu’à concurrence du prêt. Si ces revenus ne suffisaient pas, l’Empereur promettait de restituer l’argent avancé 1. Le 15 juin, un autre diplôme accordait à Louis le château de Jougne, comme fief dépendant de l’Empire, avec condition d’en faire l’hommage à Henri Beyer de Boppart pour l’Empereur 2. Le Prince tenait tout particulièrement à cette reconnaissance de ses droits sur Jougne, où il s’était déjà établi. Cette ville, d’importance capitale par sa situation, était à chaque instant un sujet de complications avec le duc de Bourgogne. La concession impériale ne devait pas y mettre fin, surtout quand Louis recommença à y frapper monnaie. Par lettres du même jour en effet, l’Empereur l’autorisait à battre à Jougne de la monnaie d’or, semblable à celle du roi de France et des princes voisins 3. Il ajouta la /112/ clause que sur cette monnaie figurerait sur l’avers et le revers l’effigie de l’Empire, l’aigle impérial, afin que l’on reconnût sa provenance 1. Muni de ces diverses concessions, le prince d’Orange se hâta d’en profiter. Il ouvrit à Jougne une cour impériale, à laquelle il attacha plusieurs de ses châtelains et de ses officiers en qualité de juges impériaux 2. Puis, il se mit à rendre des arrêts et à citer les délinquants à sa cour. Une amende de 100 marcs d’or frappait ceux qui refusaient de répondre à son appel.

Ainsi, en moins de quelques mois, le duc Philippe de Bourgogne voyait se dresser devant lui, une puissance étrangère qui menaçait de porter atteinte à ses plus hauts droits. Une nouvelle cour, créée sans son /113/ autorité, dans un lieu dont il revendiquait la souveraineté, prétendait faire concurrence à son parlement de Dôle, objet de sa sollicitude et de ses faveurs.

A peine Louis commençait-il de se prévaloir de ses nouvelles prérogatives, que le Duc, qu’il venait pourtant d’accueillir princièrement 1, s’alarma, donna l’ordre à son procureur de citer le Prince à Dôle et de s’opposer sans délai à ses prétentions 2. L’Empereur, informé de ces faits, jugea bon d’intervenir et de protéger son vicaire. Ses mauvaises dispositions à l’égard du duc Philippe s’accentuèrent en apprenant la résistance qu’il opposait à son représentant. Le 10 novembre 1422, il accordait à Louis de Chalon les droits de marches et de succession des bâtards dans la comté de Bourgogne 3; puis, le 3 décembre, dans des lettres écrites à Presbourg, il laissait percer tout son ressentiment contre le Duc. Il reprochait à son prédécesseur Philippe-le-Hardi d’avoir osé s’emparer traîtreusement de la garde de Besançon, au mépris de l’Empereur 4. Afin de réparer cette usurpation, /114/ il confiait à son vicaire Louis de Chalon la garde et la protection de la ville.

Enfin, le même jour, il octroyait à celui-ci une concession fort importante quoique ambiguë dans sa teneur. Faisant allusion à la mort du duc Philippe, probablement Philippe-le-Hardi 1, il déléguait à Louis plein pouvoir pour occuper et recouvrer le comté de Bourgogne, au nom de l’Empereur. C’était tout simplement une charte d’investiture de la Comté. Il y eut certes une grande imprudence de la part du prince d’Orange à recevoir et à accepter pareille concession. Il comprit d’ailleurs fort vite quelles foudres il attirait sur lui et, par précaution, ce fut son conseiller Jean Prévost de Sancey 2 qui, occupé à défendre ses droits pour le comté de Genève devant l’Empereur, lui apporta ces lettres dans le courant de l’année 1422. Mais le bruit en avait vite transpiré, accru par la jalousie que suscitait dans bien des esprits la puissance des Chalon. Le Duc ne tarda pas à en être informé. On devine sa colère à la nouvelle de pareil forfait. Il se contint cependant. L’appui /115/ de Louis lui était indispensable pour la conduite de ses armées. D’ailleurs, ce dernier s’efforçait de dissiper le mauvais effet que pouvaient produire autour de lui les concessions de l’Empereur. Il se rendit bientôt compte de l’impossibilité qu’il y aurait à entrer en possession de la charte d’investiture de la Comté. Il résolut d’y renoncer. L’année suivante, Sigismond, étonné de son inaction, le requérait assez vivement d’accomplir son mandat 1. C’était peine perdue. Redoutant un geste du Duc, qui pouvait en un clin d’œil lui enlever sa ville de Jougne, Louis n’hésita pas à désobéir à l’Empereur.

Pourtant, celui-ci continuait à lui prodiguer ses faveurs. Le 11 janvier 1423, il lui concédait le comté de Valentinois et chargeait son conseiller Albert de Colditz de recevoir son serment de fidélité 2. La ville de Besançon, qui refusait d’admettre son vicaire, ne tarda pas à subir l’effet de sa colère. Non seulement on contestait, dans la cité, les droits de garde du prince d’Orange, dont avait joui sa maison de tout temps, mais on refusait de lui livrer deux citoyens, Jacques Mouchet et Jean Michel, qui étaient cités à sa cour de Jougne. Sigismond, perdant patience et furieux de voir le peu de respect que l’on avait pour son vicaire, en vint alors à une mesure violente. La cité fut mise au ban de l’Empire, ses franchises et ses libertés furent révoquées, une amende de 40.000 écus d’or lui fut imposée et l’archevêque Thiébaud /116/ de Rougemont, inspirateur de la résistance, perdit tous ses droits régaliens 1. A ces nouvelles, les Bisontins furent terrifiés. Ils décidèrent d’implorer la merci du souverain. Au printemps de 1425, une ambassade conduite par Thiébaud de Rougemont s’en vint en Hongrie auprès de l’Empereur en campagne contre les Hussites. Impressionné par les prières et par l’humble attitude des Bisontins, Sigismond se laissa fléchir. Il consentit à révoquer sa sentence, mais il maintint l’amende. La guerre où il était engagé avait épuisé toutes ses ressources. L’on respira à Besançon au retour des envoyés, mais on se le tint aussi pour dit, et si la tranquillité fit encore maintes fois défaut dans la cité, cependant on prit garde de ne pas s’attirer à nouveau la colère de l’Empereur. Quant à Louis de Chalon, cause directe de tous ces fâcheux démêlés, il n’en continuait pas moins à faire acte de présence dans l’entourage du duc de Bourgogne. Ce vassal, à demi révolté, méprisant ses devoirs envers son suzerain, l’assistait pourtant de ses conseils et de ses troupes !

Le 21 janvier 1425, on le vit entrer à Mâcon, à la suite du duc de Bourgogne, qui venait conférer dans cette ville avec le duc de Savoie 2. Aux seigneurs bourguignons, les échevins firent présent de six bottes de vin; ils en donnèrent deux au prince d’Orange, tandis que le duc de Savoie auquel on offrait le même cadeau, le refusa. Le Prince était accouru en hâte à l’appel du Duc; il faisait une tournée /117/ dans ses châteaux du pays de Vaud où des réparations urgentes l’appelaient 1. Les conférences de Mâcon terminées, il revint probablement à Nozeroy pour y séjourner plusieurs mois. Le duc de Bourgogne avait hérité des possessions de son oncle Jean de Bavière et assemblé ses vassaux pour pénétrer en Hollande. Au mois d’avril, il se trouvait à Lille, en compagnie de Louis. Comme on prévoyait une nouvelle campagne, ce dernier s’empressa de mettre à réquisition l’un de ses châtelains, afin qu’il lui envoyât trente écus, « pour plusieurs affaires, lui écrivait-il, qui tous les jours nous surviennent et en especial pour le gaige de bataille en quoy monseigneur le duc de Bourgogne est de présent, par quoy il nous faut plus largement payé et despendre 2 ». La campagne n’eut pas lieu grâce à l’intervention du pape Martin V et les barons de Bourgogne rentrèrent chez eux. Retiré à Nozeroy, Louis s’adonnait activement à l’administration de ses domaines. Ses fonctions de vicaire l’occupaient peu. Cependant, il intervint sur l’ordre de l’Empereur, dans un démêlé entre les bourgeois de Valence et leur évêque Jean de Poitiers qu’ils accusaient d’avoir violé leurs libertés. Il s’ensuivit un procès interminable dans lequel Louis comme vicaire fut chargé de faire exécuter les /118/ sentences impériales 1. Sigismond, après avoir enlevé pour un temps son office à l’évêque, le rétablit dans ses fonctions, et ce fut encore le prince d’Orange qu’il choisit à cet effet 2.

Mais à mesure que les mois s’écoulaient, Louis semblait se rendre compte de la fragilité de cette malheureuse concession. Il lui en était résulté une foule d’ennuis et la cause première de sa querelle avec le duc Philippe. Il résolut donc de garder une sage réserve et de faire oublier au Duc cet octroi imprudent. Cette décision s’affirma à la suite d’un séjour qu’il fit à Jougne à la fin de l’année 1425. La perte de cette ville le hantait. Il désirait par-dessus tout la conserver 3. Aussi, l’année suivante, quand Philippe reprit sa campagne contre le Hainaut et la Hollande, défendue par Jacqueline de Bavière, Louis fut un des premiers vassaux à le suivre avec sa bannière 4. Jacqueline /119/ alla s’enfermer à Mons, mais les bourgeois de la ville, inquiets de sa présence, la livrèrent au Duc. On la fit conduire à Gand sous l’escorte du prince d’Orange 1. Quelques mois après, la vaillante princesse s’enfuyait de sa prison sous un déguisement d’homme. Elle recommença la lutte contre le Duc. Une nouvelle campagne s’ensuivit, où le Prince se trouva engagé et qui se termina enfin par le triomphe de Philippe-le-Bon. Il devint maître de la Hollande, de la Zélande et de la Frise 2.

Au lieu de répondre à l’Empereur qui réclamait son aide contre les Hussites 3, Louis avait fidèlement suivi le duc de Bourgogne pendant plus d’une année. Par les longs et loyaux services qu’il lui avait rendus, le Prince pensait avoir regagné sa confiance. Mais il eut encore à subir l’effet de la mauvaise volonté du Duc. Le 11 février 1429, Philippe faisait saisir /120/ ses terres d’Orbe et de Jougne pour défaut d’hommage 1. Son conseiller et bailli d’Aval, Henry Val de Fontevry, accompagné de dix-neuf personnes, se rendit à Orbe, le 17 février, pour exécuter cet ordre. A Jougne, il est arrêté par Louis de Chalon en personne qui proteste contre l’exploit du Duc, mais se décide à laisser le bailli continuer sa route sur Orbe. Arrivé à la croix de pierre placée à la sortie d’Orbe, au carrefour des routes de Jougne et d’Yverdon, la troupe est arrêtée par Pierre de Jougne et les gens du prince d’Orange. On parlemente, le bailli d’Aval réussit à passer, mais un peu plus loin, avant d’atteindre la porte de la ville, il est contraint de mettre pied à terre et de se courber sous la barrière dressée pour l’arrêter. Il veut pénétrer en ville, les gouverneurs lui refusent l’entrée; il menace, c’est en vain. Il est obligé de rebrousser chemin et de rentrer à Jougne où le prince d’Orange proteste derechef de sa soumission au Duc, mais proteste également contre la saisie de ses terres d’Orbe et de Jougne. Finalement, il congédia l’envoyé du duc de Bourgogne en lui déclarant qu’il en appelait du tout au parlement de Dôle 2. En même temps, il adressa au Duc une réclamation très énergique pour défendre ses droits et protester contre la mainmise prononcée /121/ sur ses terres. Sa demande fut agréée et le 25 novembre de cette même année, Louis renonçait enfin à son vicariat. C’est du moins ce que l’on peut inférer de l’acte que Philippe lui expédiait ce même jour de Bruges, en réponse à ses plaintes 1. Il révoquait sa sentence de confiscation « pour les grans et notables services que nous a fait ledit suppliant le temps passé, à grans frais et missions, parmy ce toutes voyes, ajoutaient les lettres, que ledit suppliant a promis par devant nous que jamais ne usera de ladicte vicairie impérial en noz pays et seignories, mais y a renuncié expressément en nostre présence ». Du reste, le procès restait pendant devant la cour du Duc et il y resta de longues années, car en 1443, Louis y plaidait encore. Mais sa décision était définitive. Il avait renoncé solennellement à son vicariat. Le souvenir de cette charge allait disparaître ainsi que les lettres de l’Empereur. Cependant, neuf années plus tard, le vicariat d’Empire fut évoqué à nouveau. Le fameux Jean Prévost conseiller du Prince, avait été jeté en prison sur l’ordre du Duc, au château de Tallant. Philippe l’accusait d’avoir transmis à son maître des lettres d’investiture de la comté de Bourgogne. Pour obtenir son élargissement, Louis dut procéder entre les mains du Duc à une nouvelle renonciation en termes aussi expressifs que la première 2. Seulement cette fois, il chercha une excuse. Pour atténuer sa responsabilité, il déclara que ces fameuses lettres avaient été obtenues /122/ à son insu de l’Empereur, qu’elles s’étaient trouvées mêlées aux papiers que son conseiller lui avait rapportés, touchant le procès du comté de Genève et que dès qu’il les avait aperçues, il les avait fait brûler en sa présence. L’explication était habile, mais sujette à caution. Le duc de Bourgogne l’accepta et, tranquillisé, cessa d’y faire allusion.

Ainsi se termina l’affaire du vicariat d’Empire. Malgré l’étendue de sa concession, l’Empereur n’en retira aucun résultat pratique. Au contraire, elle fut un sujet interminable de querelle entre deux vassaux que d’autres conflits dressaient déjà l’un contre l’autre.

 


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CHAPITRE VI

LOUIS DE CHALON EN DAUPHINÉ
ET LE DÉSASTRE D’ANTHON

Sommaire : Première tentative de Louis en Dauphiné en 1428. — Traité du 15 août 1428 avec Matthieu de Comminges. — Violences commises par les gens du Prince. — Mariage du duc de Bourgogne. — Louis projette d’envahir le Dauphiné. — Ses préparatifs. — Alliance avec le duc de Savoie. — Arrivée de Rodrigue de Villandrando au secours des Dauphinois. — Il s’empare d’Auberive. — Louis arrive à Anthon. — La bataille. — Déroute complète des Orangistes. — Leurs pertes. — Impression dans le Royaume et à l’étranger. — Prise d’Orange par Rodrigue et de Gaucourt. — Conduite de Louis en Bourgogne. — Violences à l’égard des habitants de Vaux et de Chantegrue. — Louis III, roi de Sicile, reçoit Orange.

Après la bataille de Verneuil (17 août 1424) qui avait été un désastre pour les armes de Charles VII, les opérations militaires languirent dans le Royaume jusqu’en 1428. La cause en était les troubles qui éclatèrent à Londres à l’occasion d’une dispute entre Gloucester et son oncle l’évêque de Winchester et qui forcèrent le régent de Bedford à quitter la France pendant plus d’une année. D’un autre côté, Charles VII et le duc de Bourgogne, liés par une trêve, restaient en repos l’un et l’autre. Si pendant plusieurs /124/ mois, les défenseurs du Mont-Saint-Michel, assiégés par les Anglais, résistèrent à toutes les attaques, cependant, dans le Maine, l’invasion anglaise faisait des progrès.

C’est ce moment que choisit le prince d’Orange pour mettre à exécution un projet qu’il méditait depuis longtemps. Après son retour des armées du Duc, il était demeuré dans ses châteaux, allant de l’un à l’autre et surveillant ses domaines. Tout en les parcourant, il songeait avec regret à ses belles possessions du Dauphiné, qui lui avaient été enlevées par le Dauphin. Il en déplorait chaque jour la perte. En les recouvrant, il aurait réuni ses terres du Midi et de Franche-Comté, il aurait été seigneur d’Orange au Jura. Quelle puissance son ambition lui laissait entrevoir ! Son ambition seule en effet et sa soif de richesse expliquent la tentative qu’il fit dans le courant de l’année 1428, à un moment où Charles VII, fort occupé de son côté, était dans l’impossibilité de le gêner.

De son château de Bletterans, il prépara son coup de main au printemps de 1428. Une troupe de 150 hommes environ, formée de Bourguignons et de Savoyards, quittait le Jura dans les derniers jours d’avril. Elle était conduite par un chevalier du nom de Jean Grant et par deux écuyers, les frères Antoine et Jacques Ferrière, sorte d’aventuriers qui s’étaient fait chasser du Royaume pour trahison envers Charles VII 1. /125/ Louis, trop prudent, s’était gardé de se jeter lui-même dans l’entreprise. Le 1er mai, après avoir traversé le Rhône, ils arrivèrent devant Colombier, petite place à l’est de Lyon. Ils y pénétrèrent sans difficulté, y fourragèrent leurs chevaux, puis quittèrent les lieux sitôt après. Le soir, le capitaine du château en vit revenir au nombre de 10 à 12, et comme il se méfiait de leurs intentions, il leur refusa l’entrée 1. Il ne tarda pas à s’en repentir, car le lendemain toute la troupe surgissait et prenait d’assaut la place, en commettant mainte violence. Les jours suivants, ils firent de même à Anthon et Saint-Romain.

Ces terres avaient appartenu au sire Bertrand de Saluces et, à sa mort 2, le Dauphin s’en était emparé. Sans en tenir compte, la veuve de Bertrand, Agnès de la Chambre, se considérant l’héritière de ces domaines, s’empressa de les vendre à Louis de Chalon et celui-ci les acquit dans le courant de 1428. La vente se fit-elle après la surprise de ces places par les gens du Prince ? Nous l’ignorons. Quoi qu’il en soit, ceux-ci après les avoir occupées par la force, firent rentrer Louis dans la possession de ses autres terres comme Theys, Domène, Pierre, Auberive.

Surpris par cette incursion à la fois si audacieuse et si inattendue, les dauphinois furent fort embarrassés. Ils étaient dans une situation délicate, périlleuse même. Charles VII, à qui ils en firent part, leur répondit qu’il ne pouvait les aider et qu’ils avaient /126/ à agir au mieux pour apaiser le Prince. Privés de l’aide des seigneurs et des nobles, dont les plus vaillants s’étaient fait tuer à Cravant et à Verneuil et dont le reste combattait les Anglais, les gens du Conseil delphinal, craignant une attaque générale du Dauphiné, décidèrent de traiter avec le Prince, qui disoit d’ailleurs qu’il ne lacheroit point son armée jusques ledit accort fut fait 1. Entre temps, Louis prenait ses dispositions afin de s’établir solidement dans les places que ses gens avaient surprises. A St-Romain, à Anthon, à Colombier, on amena de l’artillerie avec de bonnes garnisons de Savoyards et de Bourguignons pourvus de vivres et de munitions en abondance, Louis eut des châtelains, un juge, un procureur pour ses terres de Dauphiné 2. Mais ses gens se conduisirent bientôt /127/ de telle façon que partout des réclamations surgirent. Ils parcouraient la campagne, rançonnant les habitants et enlevant leur bétail. Ils allèrent même jusqu’à arrêter et à retenir prisonniers, Jean, sire de Miribel, Jean de Valenciennes, garde des monnaies delphinales, Antoine de Chapponay et Pierre Pascal, notaire 1. Informé de ces violences, le prince d’Orange n’en poursuivit pas moins son plan. Il avait de secrètes ambitions sur le Dauphiné. Le 30 juin, il adressa à son capitaine d’Anthon, Antoine Ferrière, une lettre où il lui mandait de chercher à s’emparer de la place de Pusignan, dont le château situé à une faible distance de Colombier, aurait été de bonne prise 2. S’il y réussissait, ainsi qu’à Falavier, il devait réunir toute l’artillerie possible. Ferrière parvint à se faire ouvrir les portes de Pusignan par la dame du lieu, Alice de Varax, qui paya cher sa trahison.

Tout faisait donc prévoir aux Dauphinois une entreprise du prince d’Orange sur leur pays. Dans ces circonstances, Imbert, sire de Grolée, qui occupait la charge de maréchal du Dauphiné 3, fit fortifier les places environnantes. Puis, avec Matthieu de Foix, comte de Comminges, gouverneur du Dauphiné et /128/ avec le Conseil delphinal, il décida d’accepter les conditions du Prince, puisque tout secours du dehors leur était refusé. Le 15 août, ils conclurent un traité avec Guillaume de Saulieu et le sire de l’Aubespin, représentants de Louis, traité qui excita l’indignation des patriotes dauphinois 1. Le Conseil delphinal reconnaissait au Prince la possession des terres qu’il avait auparavant, c’est-à-dire Theys, Pierre, Domène et Falavier, avec leurs dépendances, à charge d’en rendre hommage au Dauphin avant la Saint-Jean-Baptiste prochaine. Quant à Anthon, Colombier et Saint-Romain, Louis autoriserait l’entrée des gens du Dauphin qui y replaceraient ses bannières; il s’engageait à en retirer ses soldats pour n’y laisser qu’un châtelain agréé par le Dauphin. Pusignan et Saint-Alban seraient restitués immédiatement, ainsi que les citoyens retenus prisonniers par les Bourguignons.

Telles furent les clauses qu’approuva ce même jour Louis de son château de Lons-le-Saunier, clauses qui lui étaient singulièrement favorables et qu’on lui avait d’ailleurs accordées « en esperance des services notables que pourra faire ledit prince audit royaume. » C’est avec ce même espoir que, les mois suivants, Charles VII lui adressait de Chinon des lettres d’abolition pour tout ce qu’il pouvait avoir commis en s’emparant des places d’Anthon et Colombier 2. Le Royaume /129/ traversait alors des temps difficiles. Les Anglais, conduits par Salisbury, marchaient sur Orléans pour l’assiéger. La situation était trop grave pour permettre à Charles VII d’arrêter son audacieux vassal et de s’occuper à loisir des affaires du Dauphiné. D’ailleurs, il espérait le gagner par cet acte de bienveillance, « puisque, disait-il, plusieurs notables personnes nous ont rapporté que ledit prince a grant volonté et entencion de soy employer en nostre service et qu’il ne vouldroit faire ne pourchacer chose qui fust à nostre dommaige ou desplaisance. » Les événements des années suivantes devaient dissiper ses illusions.

Retiré en Bourgogne où sa querelle avec Philippe-le-Bon pour le vicariat d’Empire l’absorbait, Louis de Chalon ne perdait pas de vue le Dauphiné. La bonne foi et l’honneur lui commandaient d’enlever d’Anthon et des autres places ses gens comme il s’y était engagé. Il n’en fit rien, et qui plus est, il y laissa comme châtelains les deux Ferrière « qui publiquement avoient favorisé et favorisoient les ennemis du Roy daulphin et à cause de ce, estoient bannis du pays d’Auvergne d’où ils estoient et du Royaume et n’estoient pas sans grant suspicion envers le Roy, mais avoient envers lui et le Daulphin mauvaiz et dampnables propos 1 ». De plus, Louis, sire de Saluces, se prétendant héritier de Bertrand, intentait un procès à Agnès de la Chambre au sujet de ces possessions. /130/ Louis en les acquérant, tomba d’accord avec le sire de Saluces pour s’en remettre à l’arbitrage du duc de Savoie. Mais craignant de voir le procès mal tourner pour lui, il fit tous ses efforts pour en entraver la marche. Le 16 août 1429, il priait le Duc de tenir la cause en suspens, « jusques à tant que l’on voie quel branle et quelle conclusion prendront les affaires du Royaulme 1 ». Il prétextait bien, pour excuser sa demande, « les trobles et divisions qui à présent sont survenuz et mesmement que mon seigneur m’a mandé estre par devers luy en armes ». Mais sa pensée se révélait bien dans les lignes précédentes. Quand il jugerait le moment favorable, c’est-à-dire quand le Royaume serait trop affaibli pour que l’on pût s’occuper de lui, il saurait s’affranchir de toute voie légale et accomplir par la force les projets dus à son insatiable ambition. Au mépris du traité juré par lui l’année précédente, il refusait d’évacuer Pusignan et donnait au contraire l’ordre à Antoine Ferrière d’y placer comme capitaines Othenin de Montagny et Claude de Montermont 2.

Il lui annonçait aussi l’arrivée du bâtard Rondelin avec des arbalétriers. Tout faisait donc prévoir une nouvelle entreprise de la part du prince d’Orange. S’il attendit quelque temps avant de passer à l’exécution, c’est que les événements du Royaume venaient de changer soudainement d’aspect. Orléans était assiégée depuis des mois et l’on s’attendait à la voir succomber d’un jour à l’autre quand, le 8 mai 1429, /131/ arriva la nouvelle de sa délivrance presque miraculeuse par la vaillance de Jeanne d’Arc. Les partisans de Charles VII reprennent courage; Jeanne entraîne son souverain dans la direction de Reims. Le duc de Bourgogne se trouve alors dans un grand embarras. Ses sympathies pour l’Angleterre se sont visiblement refroidies, mais il tient quand même à repousser les Armagnacs s’ils se présentent devant ses frontières. Antoine de Toulongeon est chargé de rassembler les vassaux des deux Bourgognes et de barrer la route à l’ennemi. Peine perdue. Les troupes de Charles VII se dirigent par Troyes sur Reims, où le sacre a lieu le 17 juillet.

Sur ces entrefaites, en Bourgogne, le duc Philippe perdait sa seconde femme. Il désira contracter une nouvelle alliance. Son choix se porta sur une princesse de Portugal, Isabelle, fille du roi Jean Ier. Il la fit demander en mariage par André de Toulongeon et celui-ci ramena la princesse en Flandre à la fin de 1429 1, après une périlleuse traversée. Philippe voulut donner à la cérémonie un éclat tout particulier. A cet effet, il fit conduire à Bruges une quantité de bijoux, de vaisselle d’or et d’argent et comme la route était encore peu sûre, son chancelier s’assura, déjà dans les premiers jours d’octobre de l’année précédente, de la protection du prince d’Orange et du maréchal de Bourgogne 2. Sous leur direction, les trésors du Duc /132/ s’acheminèrent vers la Flandre. Le mariage eut lieu à Bruges, le 10 janvier, au milieu de pompes extraordinaires qui coûtèrent au Duc 600 000 saluts d’or. Depuis six mois, les ouvriers travaillaient à décorer les murs de la ville. Les plus grands seigneurs avec leurs femmes avaient tenu à assister aux fêtes. Philippe profita de cette affluence pour nommer ses chevaliers de la Toison d’or, ordre qu’il venait d’instituer. Parmi les vingt-quatre chevaliers qu’il créa, plusieurs comptaient de brillants états de services. C’étaient naturellement des favoris du Duc, tels que Guillaume de Vienne, sire de St-Georges, Régnier Pot, Antoine de Vergy, Hue de Lannoy, Antoine de Toulongeon 1, etc. Or, l’un de ceux qui semblaient devoir occuper une des premières places dans cette promotion, le prince d’Orange, n’y figurait point. Malgré leur récente réconciliation, le Duc s’était gardé d’admettre dans l’ordre son puissant vassal. Et, dans le cortège ducal, chacun put remarquer le prince d’Orange seul à ne point porter le collier d’or et le manteau écarlate traînant jusqu’à terre.

Pour apaiser le ressentiment de Louis, après un affront presque public, le Duc, par son habileté, sut engager le prince dans la plus malheureuse des aventures. Louis était rentré dans ses châteaux. Pendant son séjour à la cour, il avait sans doute entretenu /133/ le Duc de ses affaires en Dauphiné, peut-être même lui avait-il fait part de ses desseins sur ce pays. Quoi qu’il en soit, il est hors de doute que Philippe-le-Bon, loin de le décourager et de lui représenter les risques d’une telle entreprise, l’y engagea au contraire. Les armes de Louis pouvaient lui rendre service à lui aussi. Qui sait s’il ne trouverait pas lui-même quelque profit dans un succès de son vassal ?

Considérant l’état du Royaume, la position si mal assurée encore de Charles VII, Louis, de retour dans ses terres, n’eut plus qu’une idée : envahir le Dauphiné par un hardi coup de main, s’en approprier une grande partie et relier ainsi par de bonnes possessions sa ville d’Orange à ses terres du Jura. Il se trompait cependant en croyant surprendre les Dauphinois. Ceux-ci savaient à quoi s’en tenir, sur ses intentions. La mauvaise foi du Prince, qui avait violé ses promesses, la conduite odieuse de ses gens, leurs exactions, tout contribuait à les mettre sur leurs gardes. Dans leur inquiétude, ils écrivirent à Charles VII pour lui faire part de leurs soupçons. Le Roi leur répondit de Sully, le 19 mars, qu’il ne croyait pas à une entreprise du Prince, attendu ses paroles de soumission et ses protestations d’amitié, mais il les engageait cependant à être vigilants 1. Le conseil était facile, sans risque pour son auteur.

Le 5 mars, Louis, si l’on s’en rapporte à sa parole, reçut du duc de Bourgogne le conseil ou presque l’ordre de se mettre en campagne 2. En même temps, /134/ on lui promettait pour l’aider un certain nombre de gens d’armes. Sa résolution fut alors prise. La saison n’étant pas encore assez avancée, plusieurs semaines lui restaient pour ses préparatifs 1. Faisant venir à Nozeroy Jacques Ferrière, qui lui apportait des nouvelles de ses places, il l’envoya dans le duché de Savoie à la recherche de gens d’armes et d’artillerie 2. Puis il expédia de tous cotés des lettres dans lesquelles il engageait les seigneurs à se joindre à lui, se représentant comme lésé dans ses droits. Dès qu’il en eut connaissance, le Conseil delphinal fit déclarer ces lettres diffamatoires et mensongères. Tour à tour, Anthon, Colombier, St-Romain et les autres garnisons /135/ furent fortifiées et largement approvisionnées de bombardes, canons, balistes, arcs, flèches, poudre, etc. Des vivres y furent apportés en abondance, tels que farine, blé, sel, viandes salées, en prévision d’une longue résistance. Durant le mois d’avril, Antoine Ferrière, capitaine d’Anthon, qui était l’homme de confiance du Prince, reçut lettres sur lettres, lui prescrivant de recruter des gens d’armes, de faire des prisonniers, de s’emparer des places environnantes, comme Ornacieux, la Bâtie. La plus grande prudence lui était recommandée : « soignez tous jours que nous ne volons point de guerre et faites tous jours obeyssance la plus grant que vous pourrez ez gens du Conseil du Daulphin affin qu’ilz ne se appercoivent de riens » 1. Son frère Jacques, de retour de Savoie, était chargé d’une entreprise secrète. Il s’agissait probablement de surprendre le château d’Azieu, ce qu’il fit avec succès.

De son côté, Louis mettait tout en œuvre pour la réussite de son projet. Le duc de Bourgogne lui avait promis plusieurs de ses vassaux, parmi lesquels messire Hugues de Vaudrey, Jean Grant, Baudet Tabour. Bien plus, il osait espérer sur le concours efficace d’Amédée VIII. Il parvint à avoir une entrevue avec ce dernier à Saint-Claude du Jura. Là, Louis fit valoir les avantages de son entreprise. Il promit à Amédée VIII tout le Haut Dauphiné et Grenoble; lui-même comptait garder le Viennois et le reste du pays jusqu’à Orange 2. En échange, Amédée lui /136/ donna la permission de lever dans ses Etats autant de gens d’armes qu’il en désirerait 1. Peu de temps auparavant, le Duc avait reçu des Dauphinois un message que lui apportait un certain Bernard Régent, écuyer. Raoul de Gaucourt, nommé récemment gouverneur du Dauphiné, en récompense de ses brillants services, suppliait le duc de Savoie de ne pas favoriser les projets du prince d’Orange, « vous prians et vous supplians que vous plaise de avoir toujours pour recommandé ledit pais et les habitants de selli, comme vous aviés fait jusque yci ». Il lui demandait de ne pas laisser la route libre aux gens du Prince qui passeraient par ses Etats pour attaquer le Dauphiné. Peine perdue. Gaucourt arrivait trop tard. Soit à Thonon, soit à Genève, où Bernard Régent se rendit par deux fois, il n’obtint que des réponses évasives, quelque vague assurance d’amitié dont le sens se laissait facilement deviner 2.

Sans relâche, Louis pressait son capitaine d’Anthon dans ses préparatifs trop lents, à son gré. Lui-même se déclarait être prêt avec deux cents hommes d’armes 3. Dès le 1er mai, ses gens entraient hardiment /137/ en campagne dans la vallée du Rhône, se saisissant des sujets du Dauphin, de leur bétail, de leurs meubles. Bientôt, les forteresses bourguignonnes regorgèrent de prisonniers. Le Prince, tenu au courant des événements par son chevaucheur Faux-Visage, approuvait toutes ces violences, se bornant à faire cette recommandation, au sujet d’un sire de Vagny, que l’on avait saisi : « Tené le toujours prisonnier sans le faire morir, jusques à tant que l’on voye comment les besoignies se pourteront. »

Devant la gravité de cette situation, Raoul de Gaucourt n’hésita plus. Désespérant de recevoir du secours, il convoqua pour le 20 mai les Etats à la Côte St-André. Puis secrètement, sans armes, il franchit le Rhône avec le sénéchal de Lyon. A défaut d’armée, il avait résolu d’acheter les services d’un capitaine de routiers, espagnol, le fameux Rodrigue de Villandrando, qui se trouvait pour lors à Annonay 1. Rodrigue, flairant un bon coup, accepta l’offre, ainsi que son second, Valette. Remontant le Rhône avec leurs troupes, les deux capitaines franchirent le pont de Vienne dans la nuit du 26 mai 1430. Après avoir marché toute la nuit, ils arrivèrent au point du jour devant Auberive, petite place située non loin du Rhône. Un fort château la défendait, et c’était précisément une des possessions du prince d’Orange. Il est probable que de Gaucourt en avait suggéré la prise à Rodrigue comme rendue facile par son éloignement des autres terres bourguignonnes. Sans tarder, les /138/ routiers attaquèrent la ville, dont ils s’emparèrent facilement. Puis Rodrigue, que de Gaucourt et le sénéchal avaient rejoint, tenta un assaut contre le château que protégeaient plusieurs cours, et où s’était enfermée la garnison orangiste. Avant midi, les routiers avaient occupé les deux premières cours. Rodrigue laissa alors ses troupes prendre quelque repos. Dans l’après-midi, la cour au milieu de laquelle s’élevait la grosse tour, la « brache » comme on l’appelait, fut l’objet d’une nouvelle attaque qui réussit comme les précédentes. Un seul homme de Rodrigue y fut tué, malgré la pluie de flèches et de pierres que lançaient les défenseurs du donjon. Ceux-ci ayant obtenu une trêve, furent laissés en repos jusqu’au lendemain. Puis, voyant que l’on s’apprêtait à miner et à faire sauter leur retraite, ils se rendirent à merci à Raoul de Gaucourt 1. Le gouverneur, s’il avait écouté les avis qu’on lui donnait, les aurait promptement fait périr. Mais c’était un homme prudent, et comme il n’avait pas renoncé à fléchir le duc de Savoie et qu’une bonne partie de la garnison d’Auberive se composait de Savoyards, il les renvoya dans leur pays par égard pour leur maître. Les Bourguignons furent également libérés, mais dépouillés de leurs armes et d’une partie de leurs vêtements 2. Dans le donjon d’Auberive, on découvrit une trentaine de malheureux habitants /139/ du pays, qui, trop pauvres pour payer leur rançon, attendaient depuis plusieurs semaines, le bon plaisir du prince d’Orange.

Ces succès de Rodrigue produisirent un excellent effet et ranimèrent le courage des Dauphinois. Sur ces entrefaites, les Etats, réunis à la Côte Saint-André, votèrent un subside de 50.000 florins d’or, pour la défense du pays. On décida de refaire une tentative auprès du duc de Savoie. Le sire de la Palud et Louis Portier, docteur en lois, partirent pour Chambéry. Ils y arrivèrent le 10 juin et renouvelèrent au Duc leurs instantes demandes de secours. Jean de Beaufort, chevalier du Duc, qui se trouvait avec lui, leur répondit que les nobles du duché de Savoie étaient libres de sortir de leur patrie et de s’allier avec qui ils voulaient, que le Duc ne pouvait les en empêcher. « Et si, vous autres Dauphinois, ajouta-t-il, vous n’avez pas pris la peine de vous assurer les nobles de monseigneur le Duc, c’est bien votre faute. Car le prince d’Orange les a requis affectueusement et leur a envoyé de l’or et de l’argent. » Louis Portier répliqua que la mauvaise volonté du Duc amènerait la guerre entre les deux pays. Mais, sans l’écouter, Jean de Beaufort les congédia peu gracieusement, se bornant à leur dire : « Vous avez entendu ce que je vous ai répondu de la part de Monseigneur le duc. » Les deux envoyés comprirent l’inutilité de leurs efforts, et en sortant de l’audience, Portier s’écriait : « En nom de Dieu, si les nostres Dauphiniens sont envay et injuriés par les vestres, l’en y congnoistra les mieulx norris, et Dieu vueilliet aidier à ceulx qui ont bon droit ». /140/

Sur son chemin, il rencontra un seigneur qui lui proposa de rester jusqu’au lendemain, lui annonçant qu’il allait lui apprendre bien étranges nouvelles du prince d’Orange.

La prise d’Auberive décontenança Louis de Chalon, qui se voyait devancé, malgré toutes ses précautions. Il fallait se mettre en marche sans retard. Depuis une quinzaine environ, il avait rassemblé le ban et l’arrière-ban de ses terres. Son châtelain de Jougne, Yvonet Fellin, avait reçu l’ordre d’appeler aux armes trente arbalétriers « et des meilleurs et plus abiles » dans chacune des châtellenies du pays de Vaud, à Orbe, à Echallens, à Grandson 1. Ils devaient se réunir à Gigny le 25 mai. Pour justifier son ordre, le Prince prétextait une attaque de ses terres par les Dauphinois. « Le gouverneur de Dauphiné, écrivait-il, a mis le siège devant Anthon, et pour lever icellui nous convient avoir grosse puissance de gens d’armes et de trait ». Puis il ajoutait : « faictes diligence que nous cognoissions quarre ( ?) de noz servir, car la chouse touche grandement nostre honour. » En même temps, il expédiait des gens à Grenoble, à la Côte Saint-André, à Romans, chargés d’espionner les mouvements de l’ennemi et de surveiller ces régions 2.

Fidèle à sa promesse, le duc de Bourgogne lui envoya un fort détachement sous la conduite de plusieurs seigneurs, Jean de Vienne, sire de Bussy, Girard de Belvoir, Pesmes, Etrabonne et Jean de Montaigu-Neufchâtel, le nouvel élu de la Toison d’Or. /141/ C’étaient tous des gentilshommes éprouvés, amenant des troupes richement équipées. Enfin, le duc Amédée VIII avait laissé sortir de ses Etats trois cents hommes d’armes qui rejoignirent le prince d’Orange dans sa marche.

Il avait raison de se hâter, car les routiers ne perdaient pas leur temps. Avant de s’éloigner d’Auberive, ils avaient démoli la tour du château afin de perpétuer le souvenir de la trahison du prince d’Orange 1. Puis, marchant vers le nord, ils surprirent Pusignan, le mercredi 7 juin et le lendemain Azieu, juste punition de la mauvaise foi du Prince. Les garnisons de ces deux places furent épargnées comme les autres.

Le 9 juin, l’armée dauphinoise s’ébranla dans la direction de Colombier, à une faible distance d’Anthon, au sud. Comme le château était bien fortifié et qu’une pluie diluvienne tombait depuis plusieurs heures, on remit l’assaut au lendemain.

Il était temps que le prince d’Orange arrivât. Il venait de franchir le Rhône ce même jour et était entré à Anthon pour s’y reposer et faire ses préparatifs. Plein d’espoir, il s’installa pompeusement dans son château, y ouvrit une cour plénière, en prenant même le titre de dauphin de Viennois 2. Il se voyait /142/ déjà maître du Dauphiné. Avec son armée, il lui semblait impossible de ne pas venir facilement à bout du ramassis d’aventuriers qu’allait lui opposer Gaucourt. Varambon, envoyé auprès de ce dernier avec des propositions, ne lui avait-il pas conseillé dédaigneusement de faire aiguiser les éperons de ses gens, afin de pouvoir fuir plus vite ? Il est vrai que de Gaucourt lui avait répondu : « Je l’ay desja fait fère et bien l’apercevrez à la chasse que à vous et à vestre maistre et ses gens donnerons bien briefment 1. »

Louis méprisa l’avertissement. Dans son assurance sur l’issue de l’entreprise, il avait amené de Bourgogne, au dire de son écuyer Héracle Ferrière, sept mules chargées de maillets de plomb; avec ces maillets, les orangistes devaient frapper les armures des Dauphinois et les assommer sous leurs coups 2.

Tout entier à ces beaux projets, Louis apprit trop tard que la garnison de Colombier était vivement pressée et sur le point de se rendre. Il envoya à son secours une petite troupe, mais il n’était plus temps. Un certain Georges Boys de Milan, au service des /143/ Dauphinois, vint à sa rencontre et força les gens du Prince à se replier en désordre sur Anthon. Colombier se rendit peu après avec sa garnison, qui alla rejoindre dans les forteresses dauphinoises les prisonniers des jours précédents. La chance favorisait Rodrigue et Gaucourt. Ils décidèrent de ne pas perdre de temps et d’attaquer le lendemain, dimanche 11 juin, l’armée orangiste qu’on savait à Anthon. L’ordre de bataille fut ensuite réglé. Sur la demande instante de Rodrigue et en sa qualité d’étranger, on lui donna la place d’honneur. Il forma l’avant-garde avec ses routiers. A droite et à gauche, ses seconds, Valette et Churre, avec les deux capitaines milanais Georges Boys et Borno de Caquerau devaient le soutenir. Le gros de l’armée, que conduisait Imbert de Grolée avec Gaucourt, venait ensuite.

Anthon, situé au bord du Rhône, à la jonction de ce fleuve avec l’Ain, était séparé de Colombier par un bois épais, bois composé de basses futaies et de broussailles difficiles à percer. Un seul chemin conduisait à Colombier. Il traversait le bois dans sa plus grande largeur. Louis, qui s’attendait à surprendre l’ennemi dans la plaine de Colombier, s’engagea fort tranquillement sur ce chemin, tandis que ses troupes s’avançaient à travers les taillis pour déboucher dans la plaine.

Le bois d’Anthon
Le bois d’Anthon

Mais il ne s’était pas rendu compte que la lisière du bois était déjà garnie 1. Il se heurta à l’ennemi beaucoup plus vite qu’il ne l’avait pensé 2. « Le Prince, dit Quicherat, allait lui et les /144/ siens déboucher dans la plaine, lorsque des traits volant de droite et de gauche l’avertirent que les fourrés entre lesquels on marchait, n’étaient plus ceux d’une forêt déserte. Le trouble commença à se mettre dans les rangs par le fait des chevaux qui se cabraient quand ils étaient touchés. Rodrigue se présenta alors avec ses hommes d’armes, la lance en arrêt. Le voilà poussant cette cavalerie qui se trouvait massée dans un chemin montant, entre deux rangées d’arbres qui valaient autant que des murailles. La position n’était pas tenable. Les orangistes rétrogradèrent pêle-mêle, pour aller chercher d’autres issues, et c’est à la débandade qu’ils arrivèrent sur le champ de bataille occupé déjà par l’ennemi ».

Alors, en un clin d’œil, ils furent enveloppés par les Dauphinois qui les attendaient et les chargèrent vigoureusement. Par petites troupes, on voyait les premiers fondre sur leurs adversaires déjà désunis et les disperser dans toutes les directions. Le Prince, ne pouvant croire à pareille audace, s’obstinait dans sa marche comme s’il ne se fût agi que d’une simple escarmouche. Mal lui en prit. En peu de temps la débandade fut générale. Un groupe de nobles Bourguignons, qui voulurent arrêter l’ennemi, se fit tailler en pièces. Les trois corps dauphinois réunis s’avançaient maintenant au pas de course balayant tout sur leur passage.

« A peine y avait-il une heure que l’action était engagée et l’on assistait à une chasse plutôt qu’à un combat. Des cavaliers laissaient là cheval et armures. Les fantassins en faisaient autant de leurs arbalètes, /145/ de leur épée et de leurs maillets. Ce n’étaient que gens éperdus courant dans tous les sens, ceux-ci pour gagner le Rhône, ceux-là pour se cacher dans les blés et dans les bois » 1.

Les Orangistes, serrés de près, furent massacrés ou pris. Il y en eut plus de quatre cents qui périrent, parmi lesquels Jean de Bauffremont, sire de Mirebel, Antoine de Vergy, bailli de Troyes, Jacques de Moullens, Claude Guy Basset, Louis de la Chapelle. Deux cents fuyards se noyèrent dans le Rhône. Beaucoup de nobles, de la valeur desquels on attendait mieux, tournèrent bride, affolés 2. Le comte de Montagu-Neufchâtel en était. Quand on apprit sa conduite en Bourgogne, il fut dégradé de l’ordre de la Toison d’Or et il alla mourir de chagrin en Terre-Sainte. Le nombre des prisonniers fut énorme. C’était pour la plupart de riches seigneurs. Aussi les Dauphinois en profitèrent-ils pour exiger d’eux d’énormes rançons. François de la Palud, qu’on appelait communément Varambon, et qui eut le nez emporté d’une taillade, dut emprunter 8000 florins d’or, en plus de ce qu’il fut obligé de livrer sur le champ de bataille. Quant à Guillaume de Vienne, sire de Bussy, on exigea de lui une telle somme, que sa famille dut quêter à droite et à gauche pour le racheter. Il était tombé entre les /146/ mains de Rodrigue qui tenait à pareille prise. Un certain Sanbertier, qui tenait l’étendard du prince d’Orange, étendard rouge et noir, sur lequel Louis, pour l’occasion, avait fait appliquer un grand soleil d’or, fut pris lui et sa bannière. Celle-ci fut déposée en signe de triomphe et de reconnaissance dans l’église de Saint-André, à Grenoble. L’autre bannière de Louis, portant ses armes, fut également saisie avec son écuyer, Jean de Chaveyriat. On la donna à Rodrigue de Villandrando, qui l’envoya comme trophée à l’église de Valladolid 1. Enfin, l’église Notre-Dame à Grenoble reçut l’étendard rouge et blanc du sire de Saleneuve, qui comptait au nombre des prisonniers.

Quant à Louis de Chalon, il avait fait bonne figure dans le combat et s’était laissé entraîner au plus fort de la mêlée. Il y reçut maints coups d’estoc et de lance, mais à la vue de la débandade, il s’enfuit à son tour comme ses compagnons. Dans l’après-midi, la garnison d’Anthon voyait arriver à bride abattue un cavalier, couvert de poussière, ruisselant de sang et le visage défiguré. On ne reconnut le prince d’Orange qu’à son cheval, qui lui aussi portait plusieurs blessures 2. En hâte, il pénétra dans le château, /147/ tremblant encore de sa chevauchée éperdue. Quel contraste avec son départ du même château le matin même ! Il y rentrait rempli de honte, ayant perdu plus de cinq cents des siens. Son capitaine Antoine Ferrière en apprenant le désastre, refusa de rester dans la place. Il voulait s’éloigner à tout prix, craignant l’arrivée des Dauphinois.

Alors Louis se vit perdu. Tous les siens l’abandonnaient. Il passa le Rhône, à cheval, à la nage disent les uns, sur un bac, à minuit avec quelques seigneurs, suivant les autres. La Pise, en glorificateur attitré des princes d’Orange, affirme que son cheval le porta tout armé au travers des flots et qu’en abordant l’autre rive, Louis baisa en pleurant la tête de son noble coursier. Malgré la beauté du tableau, nous penchons pour la second version. Le Rhône est fort large en cet endroit, par suite de sa jonction avec l’Ain. De plus, l’on était en juin, en pleine fonte des neiges, époque où les eaux du fleuve doublent de volume. Enfin, le héraut Berry, d’accord avec l’auteur de la relation contemporaine de la bataille, nous dit que « le prince se sauva sur un bon coursier et passa le Rosne au bac d’Anthon ».

Le Rhône à Anthon
Le Rhône à Anthon

Quoi qu’il en soit, Louis sans s’arrêter à Meximieux où il avait fait halte, se hâta de regagner ses châteaux du Jura pour y cacher sa confusion. De Nozeroy, il envoyait, à la fin de juin, son écuyer Ferry de Falerans lui acheter une « haquenée », probablement pour /148/ remplacer l’une de celles perdues dans la défaite, et n’en trouvant point à Genève, il requérait Pierre de Jougne de lui en fournir une 1. La nouvelle du désastre d’Anthon ne tarda pas à se propager dans tout le Royaume, où cependant d’autres événements, non moins importants, occupaient les esprits. Devant Compiègne assiégée par le duc de Bourgogne, Jeanne d’Arc venait d’être faite prisonnière et son arrestation, qui laissait indifférents Charles VII et sa cour, alarmait le peuple de France, puisque jusque dans le Dauphiné, l’on fit des prières publiques pour que Dieu permît la délivrance de la Pucelle. Le lendemain déjà de la bataille d’Anthon, le bailli de Chalon envoyait aux nouvelles à Bourg en Bresse l’un de ses sergents « pour savoir la certainté de Monsr le prince d’Oranges que l’on disoit estre prins et ceulx de sa compaignie rué jus ou Dauphiné 2 ». Le 13, après avoir été instruit de l’événement, le bailli en faisait part au chancelier du Duc à Châtillon-sur-Seine, ainsi qu’au Conseil ducal à Dijon 3. La déception de Philippe dut être forte en apprenant la défaite de son vassal. Il ressentit une vive colère à la nouvelle que plusieurs de ses Bourguignons étaient restés sur le champ de bataille, et cela au moment où il était /149/ obligé de lever le siège de Compiègne et d’y laisser argent, soldats et artillerie 1.

A l’étranger, la déroute d’Anthon ne passa pas non plus inaperçue. Charles VII en fit porter la nouvelle à Venise, où elle arriva le 25 juin, nous dit Morosini 2. Pour plaider sa cause auprès du doge et lui montrer le Royaume sous un jour favorable, il lui annonçait que le prince d’Orange avait perdu trois mille chevaux et qu’il se trouvait assiégé dans son château d’Anthon où sa perte était certaine. D’ailleurs, ajoutait-il, « la demoiselle reste saine et gaillarde, illuminée par la grâce de Dieu, suivant heureusement sa voie. » Or, Jeanne était depuis un mois prisonnière des Anglo-Bourguignons.

En perdant la bataille, le prince d’Orange ne subit pas seulement une des plus grandes humiliations de sa vie, mais il en éprouva de terribles conséquences. Deux jours après la déroute, Rodrigue et Gaucourt se présentèrent devant Anthon. Ils avaient attendu jusqu’à ce moment, craignant un retour du Prince. Ils trouvèrent le château désert, car Ferrière et ses gens avaient déguerpi, abandonnant aux mains des Dauphinois des provisions en abondance, des munitions et des armes suffisantes pour soutenir un siège de deux ans 3. Gilles Richart, sire de Saint-Priest, fut chargé de la garde du château, tandis que Falavier tombait à son tour entre les mains de Gaucourt. /150/ L’écuyer du prince d’Orange, Pierre de Vorges y avait tenu bon, bien que son compagnon Jean Grant l’eût abandonné à la première nouvelle de la défaite. Mais, devant le nombre, il rendit son château aux Dauphinois 1.

Si ceux-ci gardaient encore quelque doute sur les intentions du prince d’Orange et sur la préméditation avec laquelle il avait préparé son coup, ces doutes s’évanouirent complètement dans les jours qui suivirent. Parmi le butin abandonné au château d’Anthon, les soldats de Gaucourt découvrirent au milieu des papiers d’Antoine Ferrière, les missives que ce dernier avait reçues de son maître les deux années précédentes. Il avait négligé de les brûler comme l’ordre lui en avait été donné. Aussi, à leur lecture, Gaucourt et ses compagnons comprirent les dangers auxquels ils venaient d’échapper et ils purent se féliciter de leurs succès. Pour les compléter, ils s’emparèrent sans peine de toutes les autres possessions de Louis en Dauphiné. Puis, la principauté d’Orange n’étant pas éloignée, l’armée dauphinoise, confiante dans les talents de Rodrigue, auquel étaient venus se joindre le marquis de Saluces, le vicomte de Tallard, le seigneur de Grignan, s’ébranla dans la direction du Midi. En agissant ainsi, les Dauphinois atteignaient au cœur le prince d’Orange, qui avait souvent répété que, si on lui enlevait Anthon. sa principauté d’Orange était perdue pour lui 2. Ce qu’il redoutait /151/ par-dessus tout s’accomplit. Orange fut cerné par Rodrigue et ses compagnons; sur plusieurs points à la fois, à Saint-Eutrope, à Saint-Pierre, aux Arènes, ils attaquèrent la ville. Très rapidement, le bourg de Saint-Florentin tomba entre leurs mains. Effrayés, les habitants renoncèrent à lutter contre tant de seigneurs réunis et, le 3 juillet, ils capitulèrent 1. Etienne Geoffroy, gouverneur pour Louis, fut remplacé par Guillaume, bâtard de Valence. Les charges de la ville furent confiées à d’autres. En même temps, les places environnantes, Courthezon, Gigondas, Jonquières étaient livrées à Gaucourt 2.

Tel fut le résultat des rêves grandioses de Louis. En deux mois, il avait perdu tout ce qu’il possédait dans le Midi, sans compter la ruine de ses gens, la disparition de ses bagages et d’une partie de son trésor. En effet, l’un de ses serviteurs, Jacques de Montmorioux, chargé des fonds pour la dépense de l’hôtel de la Princesse, profita des malheurs de son maître pour lui voler deux mille écus florins et des joyaux et s’enfuit à Lausanne 3 puis à Saint-Maurice. Pareil /152/ désastre aurait découragé tout autre que le prince d’Orange. Il se ressaisit. S’il regarda Anthon comme la journée la plus néfaste de sa vie, du moins n’en laissa-t-il rien voir, et ceux qui s’imaginèrent que sa puissance était, sinon abattue, du moins compromise, furent vite détrompés. Aux gens d’un de ses voisins, qui l’avait courroucé, il répondait quelques années plus tard : « Ces gens-là cuident-ils que je n’aie plus de puissance et que j’aie distribué et despendu tout le mien pour le fait de la journée d’Anthon 1 ».

Au reste, à peine rentré dans ses châteaux, il s’employa activement à effacer le souvenir de cette journée. Bien que ses richesses accumulées à Nozeroy eussent suffi amplement à réparer les pertes subies, il préféra les laisser intactes et faire retomber toute la charge sur ses sujets 2. En cette occasion, comme en tant d’autres, Louis cédait à ce penchant inné chez lui et qui devait aller en augmentant avec les années, à cette soif de luxe, à cette avarice qui inspira tant de ses actions et lui fit commettre de lourdes injustices.

Sa conduite envers les habitants de Vaux-et-Chantegrue, pauvre village des vallées du Jura qui dépendait du prieuré clunisien de Romainmôtier au pays de Vaud, en fournit un exemple. /153/ Au mépris de leurs droits, Louis, à son retour d’Anthon, avait imposé à ce village, qui comptait 19 feux seulement, une redevance extraordinaire de 83 écus d’or, qu’il devait lui apporter à Nozeroy sous peine de 10 livres d’amende. Dans l’impossibilité d’acquitter cette somme, une délégation des habitants se rendit auprès du Prince, pour lui représenter l’arbitraire de sa demande. On refusa de les recevoir, et pendant leur absence, des sergents de Louis envahirent leurs terres et s’emparèrent de onze juments. Les paysans en ayant appelé au parlement de Dôle, quittèrent Nozeroy, et en chemin, rencontrèrent le butin qu’on venait de leur enlever. Malgré leurs vives plaintes, ils durent céder devant les menaces des sergents bourguignons 1. Mais le secours leur vint des religieux de Romainmôtier, qui, indignés de la conduite du prince d’Orange, exposèrent l’affaire au duc de Bourgogne. Celui-ci somma Louis de restituer les bêtes volées 2. Fut-il obéi ? On l’ignore, mais près d’un an après, en février 1432, le Duc était obligé de renouveler ses sommations 3. /154/

Ainsi, l’échec subi par Louis n’avait pas diminué son audace. Il apprit dans les premiers jours de septembre que sa ville d’Orange s’était soulevée contre les Dauphinois, qu’elle avait chassé le nouveau gouverneur et ses gens, et réoccupé le château 1. Il est vrai que quelques mois plus tard, Louis III, roi de Sicile, qui avait des droits sur la cité, y rentra sous prétexte de la prendre sous sa protection. Il conclut un arrangement avec Gaucourt, en vertu duquel il conservait encore deux ans la garde d’Orange. Si ensuite Louis de Chalon en obtenait la restitution la ville lui serait rendue, sinon elle reviendrait au gouverneur du Dauphiné 2.

A cette nouvelle, le prince d’Orange reprit espoir. Il ne lui semblait pas impossible de recouvrer sous peu une de ses plus précieuses possessions.

 


 

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CHAPITRE VII

LOUIS DE CHALON
AUX ARMÉES DU DUC DE BOURGOGNE
ET OPÉRATIONS MILITAIRES JUSQU’AU TRAITÉ D’ARRAS
(1430-1435)

Sommaire : Nouvelles guerres en Maçonnais et Charolais. — Louis et les habitants de Mâcon. — Siège de Sanceney. — Campagne de Barrois. — Bataille de Bulgnéville. — Louis et son péage de Jougne. — Ses vexations. Révolte des habitants de Jougne contre le duc de Bourgogne. — Louis délégué aux conférences d’Auxerre. — Paix avec Charles VII et traité de Loches. — Siège de Grancey par les troupes ducales. — La duchesse de Bourgogne à Nozeroy. — Réception du duc. — Traité d’Arras.

Si la capture de Jeanne d’Arc découragea pour un temps les partisans de Charles VII, la nouvelle de la victoire d’Anthon ranima leur espoir et la Trémoille en particulier, qui depuis quelque temps était le véritable chef du Royaume, apprit avec joie la défaite du prince d’Orange, défaite qui allait, d’après lui, affaiblir le duc de Bourgogne.

La guerre civile reprit avec intensité et ce furent surtout les frontières de Bourgogne, le Charolais, le Mâconnais qui devinrent le théâtre des opérations. /156/ Pendant quatre années, une véritable guerre de partisans se livre en ces régions, guerre d’escarmouches, de pillage et de surprises qui achève de ruiner les malheureuses populations, déjà accablées. Le duc de Bourgogne est absent du Comté. Il en a confié la défense au maréchal de Toulongeon. Il évite d’assister aux horreurs qui se commettent des deux côtés et qu’il lui est impossible d’arrêter, d’écouter les plaintes qui affluent à lui de toutes parts. Aux Armagnacs s’est joint son beau-frère, le comte de Clermont. Sur son ordre, l’incendie et le pillage sont portés en Charolais.

Telle est la situation deux mois après le retour de Louis de Chalon en Franche-Comté. Il vient de parcourir ses châteaux de Vuillafans, de la Rivière, de Nozeroy, afin de s’y reposer et de s’y remettre de ses émotions 1. Il se prépare à y séjourner pour un certain temps quand, dès le mois d’août, des messagers lui sont expédiés de la part du maréchal de Bourgogne.

Les nouvelles étaient graves. Subitement, le comte de Clermont avait fait irruption en Charolais et pris les places de Mazille et de Bois-Sainte-Marie. Il menaçait Paray-le-Monial et Cluny. Le maréchal suppliait le Prince de se joindre à lui pour repousser l’ennemi. Aussitôt Louis quitta ses châteaux. Il réussit en peu de temps à rassembler une petite armée de quatre à cinq cents lances 2. Son désir de secourir /157/ le Duc s’affermit encore quand il apprit que parmi les ennemis se trouvait Rodrigue de Villandrando. L’occasion n’allait-elle pas s’offrir à lui de prendre sa revanche ? Varambon, complètement ruiné par sa rançon, vint avec joie se mettre sous ses ordres. Lui aussi brûlait de se venger 1.

Leur armée vint s’établir dans les environs de Tournus. Pendant quelques semaines, elle tint en respect l’ennemi. A Tournus, Louis reçut des habitants de Mâcon une délégation, le suppliant de leur permettre de traiter momentanément avec les routiers. Leur pays était ravagé, à demi-ruiné; l’on était dans la saison des vendanges et des labours, et la guerre les empêchait d’aller faire leurs récoltes 2. En réponse à leur demande, Louis leur envoya Varambon avec 50 hommes d’armes, mais quelques jours après, une nouvelle délégation lui arrivait, le priant de retirer son vassal, dont la présence au lieu d’être utile aux Mâconnais leur était néfaste « car, disaient-ils, ces gens ne servent que de piller et rober /158/ le pays 1 ». Il est probable que Louis fit droit à leurs demandes et leur enleva Varambon.

Les derniers mois de l’année 1430 procurèrent un calme relatif au prince d’Orange, qui en profita pour faire de fréquents séjours à Nozeroy. En effet, le maréchal de Bourgogne était parti pour la Champagne, où Barbazan, un des meilleurs généraux de Charles VII, assiégeait la ville de Chappes, défendue par les Bourguignons. Toulongeon leur offrit la bataille, mais le 13 décembre, il subissait un échec qui livrait Chappes à l’ennemi 2. Le duc de Bourgogne y perdit une nombreuse artillerie.

En même temps, Rodrigue se remettait en campagne. L’hiver n’était pas terminé qu’il recommençait ses incursions en Mâconnais, si bien que le prince d’Orange fut mandé en hâte, par le chancelier de Bourgogne, à Dôle. Rodrigue, qui occupait toujours Mazilles, venait de s’emparer de Château et de Pierre-Clos, deux forteresses aux environs de Mâcon. Aussitôt des messagers partirent dans toutes les directions pour rassembler les nobles à Chalon. On écrivit aux sires de Dinteville, de Luyrieu, à Antoine et à Jean de Vergy, aux sires de Couches, de Vitteaux etc. En même temps, des espions étaient envoyés dans les régions occupées par l’ennemi pour renseigner le prince d’Orange, qui avait établi ses quartiers à Mont-Saint-Vincent 3.

C’est là qu’il prépara ses projets de campagne. /159/ Au nord-ouest de Chalon se trouve une petite place Sancenay, dont le château, occupé par les Armagnacs, couvrait toute la région avoisinante.

Louis en avait saisi l’importance et il se décida à en faire le siège. A cet effet, il fit réunir dans la première quinzaine de mars tous les engins nécessaires pour l’entreprise. Par ses soins minutieux, l’on prit les mesures pour établir un siège dans toutes les règles de l’art. De l’artillerie était surtout indispensable. Tandis que, sur son ordre, l’on construisait à Chalon des supports, des roues, des abris pour les bombardes et qu’on amenait celles-ci devant Sancenay, des charretiers allèrent quérir dans les châteaux du Prince quelques-unes de ses plus grosses pièces d’artillerie, dont il se montrait si fier 1. L’une de ces bombardes était si lourde qu’il fallut faire venir de Dijon un charriot du duc de Bourgogne qui vint la prendre à Lons-le-Saunier pour la conduire à Tournus; 8 chevaux la traînaient. Là, on /160/ l’embarqua sur la Saône pour la diriger sur Chalon. De Dijon, le Duc avait envoyé une autre de ses bombardes, celle que l’on appelait « Prusse ». Pour la transporter, on utilisa aussi la voie d’eau et on l’amena à Saint-Jean-de-Losne, d’où elle mit neuf jours pour atteindre Chalon. Des ouvriers préparaient en abondance des pièces de bois, des échelles, des outils de toute sorte, et deux maçons de Chalon furent occupés pendant dix jours à tailler des pierres pour les bombardes et les veuglaires. Les comptes de ce siège qui nous ont été conservés, nous renseignent en détail sur tous les préparatifs qui furent faits 1. Le prince d’Orange, qui se tenait dans les environs, à Oyé, à Montcenis, les surveillait attentivement. D’autre part, les bords de la Saône, plus au sud, étaient gardés nuit et jour, car Rodrigue, qui occupait les environs de Mâcon, pouvait franchir le fleuve et prendre les Bourguignons à revers. Louis, par mesure de prudence, y envoya des gens d’armes sous la conduite des seigneurs de Chastellux, de Pradelles, de Fontaine-Française, de la Guiche, qu’il venait d’engager sur l’ordre du Duc pour le prix de deux cents livres 2. Ses hérauts d’armes, Saint-Pol et Orange, allèrent requérir un certain Perrenet Gressart, maçon de son état, mais que les nécessités du temps avaient fait un habile chef de bandes. Plusieurs gentilhommes de bonne volonté s’offrirent pour espionner l’ennemi aux environs de Lyon, à Anse et Villefranche. Enfin, quand le prince d’Orange se crut prêt, /161/ il attaqua Sancenay. C’était dans la dernière semaine de mars. Devant l’investissement complet préparé par le Prince, la place ne put résister bien longtemps. En trois jours, Louis en vint à bout et s’en empara. Le prieur qui avait dirigé la défense de la forteresse tomba entre ses mains et pour lui faire expier son crime, on le brûla 1. Dans cette suite de surprises, de razzias, d’incendies, les atrocités commises des deux côtés ne se comptaient plus. Les archives de la Côte d’Or nous ont conservé la liste de l’artillerie et des armes qui furent perdues ou endommagées durant ce siège de trois jours 2. Au bâtard d’Oyé chez lequel Louis avait logé et auquel on avait emprunté divers objets, on rendit deux grosses arbalètes et une centaine de « dondaines 3 ». Pendant les trois jours du siège, on lança sur la place six pierres de grosse bombarde, quarante-trois de pièces plus petites, qu’on appelait des veuglaires, et 15 livres de plomb pour les couleuvrines. L’inventaire mentionne aussi les pics, les pelles, les « panais » 4 endommagés ou perdus. Sancenay rendu, le prince d’Orange s’empressa de communiquer cette heureuse nouvelle au chancelier de Bourgogne qui se trouvait à Autun. Puis, continuant ses opérations, il se dirigea au Nord vers l’Auxois. Sur sa route, il dispersa les Armagnacs et parvint à Semur. Plusieurs petites places ennemies furent enlevées sans coup férir, car le Prince s’avançait /162/ avec son artillerie. Sa grosse bombarde l’avait suivi à Semur, traînée par neuf chevaux, tandis que six autres amenaient les munitions, pierre et poudre 1.

Estimant avoir rempli sa tâche, il se hâta de rentrer dans son Jura, où de sérieuses affaires le rappelaient. De nouveaux incidents avaient surgi entre ses gens et les officiers du Duc 2. Sa présence était nécessaire. Mais on ne l’y laissa pas longtemps. Le 22 avril, une lettre du bailli de Chalon lui communiquait de menaçantes nouvelles. Varambon, que Louis avait expédié au sud, annonçait que le 12 avril, Marcigny-les-Nonains avait été pris et que l’ennemi assiégeait Semur-en-Brionnais. Varambon, débordé, se retirait à Paray-le-Monial. Il fallait le secourir sans retard. Louis se remit en route, tout en envoyant demander des ordres au chancelier qui se trouvait à Dôle 3. Mais il n’eut pas à aller bien loin. Quelques jours après, on apprenait la retraite des Armagnacs.

Les hostilités, loin de se calmer, semblaient au /163/ contraire redoubler de violence mais sur un autre théâtre. Charles II, duc de Lorraine, mort le 25 janvier de l’année présente, avait laissé son duché à son gendre René d’Anjou. Profitant d’une absence de ce dernier, Antoine de Vaudémont, neveu de Charles II, prétendit faire valoir ses droits sur le duché, et il se prépara à l’attaquer 1. Cette guerre entre deux seigneurs rivaux tourna très vite en une lutte nationale, où partisans de Charles VII et Bourguignons offrirent leurs services à chacun des deux adversaires. Philippe-le-Bon prit le parti du comte de Vaudémont, et dès le mois de mai, il rassemblait ses vassaux. Le prince d’Orange fut naturellement un des premiers appelés. N’était-il pas l’homme de la situation, puisque ses gens portant son étendard, guerroyaient jusque sous les murs de Rouen 2. Cependant, il ne montra pas beaucoup d’empressement. Dans une lettre adressée le 13 mai de Lons-le-Saunier au chancelier de Bourgogne, il l’informe qu’il fera tous ses efforts pour amener ses troupes sur la rivière d’Amance, mais qu’en raison de l’arriéré de solde qui leur est dû, il aura de la peine à les faire /164/ marcher 1. Outre les ennuis que lui causaient journellement les officiers du Duc, Louis avait à se plaindre aussi du Conseil ducal qui retenait deux de ses serviteurs prisonniers. Il les réclama énergiquement, de Cuiseaux le 25 mai 2.

Malgré tout, quand à la fin de juin, le maréchal de Toulongeon sortit de Bourgogne pour marcher sur le Barrois, il avait une armée considérable conduite par Louis de Chalon, le duc de Savoie, le comte de Fribourg, les sires de Meximieux, de la Palud, etc. L’objectif de Toulongeon était de dégager la place de Vaudémont qu’assiégeait René d’Anjou avec Barbazan. En apprenant sa marche, René quitta le siège et s’avança avec toute la noblesse lorraine au devant des Bourguignons. La rencontre eut lieu le 2 juillet dans la plaine de Bulgnéville. Toulongeon, dont les forces étaient inférieures à celles des Lorrains, avait formé un véritable camp retranché, avec ses chariots et ses bagages. En avant était son artillerie, soutenue par les Bourguignons qu’il avait décidés à descendre de leurs chevaux. Barbazan conseilla à René d’affamer le camp, mais les jeunes nobles se moquèrent de sa prudence. Ils engagèrent la bataille. Bientôt, embarrassés dans les chariots, ils furent écrasés sous la pluie de projectiles que lançaient l’artillerie et l’infanterie bourguignonnes. Une terrible débandade s’ensuivit. Le vieux Barbazan périt, en voulant se faire jour au travers des chariots. René d’Anjou lui-même, blessé à la lèvre, /165/ fut pris par le comte de Vaudémont. Enfin, 3000 Lorrains jonchaient le champ de bataille. Cette victoire, due surtout à l’habileté de Toulongeon, eut un grand retentissement en Bourgogne et dans tout le Royaume. Le malheureux René fut conduit d’abord à Dijon, puis au château de Bracon, près de Salins où on lui fit subir la plus longue et la plus dure des captivités.

Ce fut là la dernière entreprise de Louis contre Charles VII et ses partisans. C’était parce qu’il y était forcé qu’il avait suivi l’armée ducale en Barrois. Mais le souvenir de ses terres de Dauphiné, de sa principauté d’Orange perdue, lui revenait sans cesse à l’esprit. D’ailleurs le besoin d’une paix générale se faisait partout sentir. L’on avait soif de repos après ces années de carnage et de violences, engendrées par la guerre civile. Une trêve entre Charles VII et Philippe-le-Bon semblait imminente.

Une première fois, au mois de juin, à Chinon, Jaucourt et la Trémoille, délégués par le duc de Bourgogne auprès de Charles VII, échouèrent dans leurs tentatives. Six mois après, en octobre 1431, ils renouvelèrent leurs démarches qui cette fois aboutirent à une trêve de six ans. Les vœux des habitants des deux Bourgognes étaient entendus. Cette suspension d’armes fut annoncée dans tous les bailliages et y causa la plus grande joie 1.

Sur ces entrefaites, de nouveaux conflits surgirent dans la Comté entre le duc Philippe et Louis de Chalon, cette fois encore au sujet de Jougne, clé du Jura. /166/ Dix ans auparavant, l’empereur Sigismond, qui la regardait comme un fief direct de l’Empire, en avait remis la garde et la possession au prince d’Orange, son vicaire. Depuis deux siècles déjà, les sires de Chalon-Arlay y avaient établi un péage, en vertu de concessions impériales qu’ils s’étaient fait confirmer à diverses reprises. Ce péage s’exerçait sur toutes les marchandises qui passaient à Jougne et dans les chemins environnants. Quand Louis se vit créé vicaire de l’Empire, il voulut augmenter les revenus que lui procurait son péage et, à cet effet, ses officiers reçurent l’ordre d’obliger tous les marchands qui se rendaient des foires de Genève en Bourgogne de passer par Jougne. Au cas où ils prendraient une autre route, leurs marchandises seraient confisquées et ils payeraient une forte amende pour les recouvrer. Les prétentions de Louis étaient si étendues qu’il soutenait posséder des droits de péage de Jougne à Vienne en Dauphiné ! Or, à cette époque, un trafic important se faisait avec les foires de Genève. C’est à Genève que venaient s’approvisionner une bonne partie des marchands de Bourgogne, soit en draps, en « livrées », soit en épices, mercerie, harnais, clous, etc. On y venait même de Verdun et de Seurre. Le passage le plus fréquenté pour se rendre à Chalon, à Salins, et plus loin, était le défilé de St-Claude. C’est là que Louis prétendit percevoir un droit, en vertu de son péage de Jougne. Ses gens, de concert avec les religieux de l’abbaye de St-Claude, arrêtèrent, dès l’année 1421, plusieurs marchands qui revenaient de Genève. Un voiturier, Nicolas Lièvre /167/ et 6 marchands qui se rendaient à Chalon avec 30 bêtes chargées de denrées se virent appréhendés à Cressia, sur la route de St-Claude à Louhans. Leurs marchandises furent confisquées et transportées au château de St-Laurent de la Roche, d’où on ne les laissa partir qu’en leur extorquant une centaine de francs 1.

Une autre fois, ce sont deux marchands de Chalon, qui s’en retournant de la foire de Saint-Pierre et Saint-Paul, à Genève, arrivent à Moirans, après avoir passé Saint-Claude. Là on les arrête, on décharge leurs marchandises, sous prétexte qu’ils ont contrevenu aux ordres du prince d’Orange, en ne passant point à Jougne. Indignés, ils s’en vont à Bellevesvre, trouver le Prince qui assistait aux noces d’une demoiselle de Couches. Celui-ci écoute leurs réclamations, les emmène à Bletterans et, pour la somme de vingt écus d’or, leur rend leurs marchandises. Les exemples sont nombreux de ces vexations causées par Louis. Quand on refuse de céder, le Prince menace de garder les marchandises confisquées et « il disoit que des draps qu’ils y estoient, il feroit faire ses robes de livrée ! 2 »

Enfin, la nouvelle de ces abus parvint aux oreilles du Duc. Il ordonna une enquête 3. De nombreux témoins, marchands et voituriers, furent entendus; tous s’accordaient dans leurs dépositions : jusqu’en 1421, ils avaient toujours passé librement par /168/ Saint-Claude tant du vivant de feu monseigneur Jean de Chalon que durant la jeunesse du prince actuel. Depuis qu’ils avaient été inquiétés et vexés, ils préféraient faire un détour par les terres du duc de Savoie 1. A la suite de cette enquête, Louis renonça probablement à ses prétentions exagérées, car dans la suite on n’entendra plus parler de son fameux péage.

Au contraire, sa cité de Jougne allait lui procurer encore de lourdes inquiétudes. On était au plus fort de l’hiver 1431-1432, quand le châtelain du Duc à Montmorot ayant à faire exécuter un mandement ducal, y envoya trois de ses sergents. Le prince d’Orange avait alors comme représentant à Jougne, un certain Yvonet Ferlin, appartenant à une famille qui lui était entièrement dévouée. Sur son conseil, les habitants de Jougne, en apercevant les sergents ducaux dans leurs murs, vinrent à leur rencontre pour les chasser de la ville. Devant leur résistance, ils allèrent jusqu’à mettre les mains sur eux et à les traîner au travers des rues dans la direction de la porte de Savoie 2. Toute la petite cité fut en un instant /169/ en grand émoi. Une foule d’habitants, de femmes surtout, poussait hors de la ville les malheureux envoyés du Duc, à coups de bâton et avec ces cris : « Traîtres bourguignons, la queue, la queue », l’injure classique que l’on adressait aux Anglais 1. D’autres leur disaient : « Alez, alez, de par le dyable, vous ne y cy avez que faire, nous ne sumes de riens subgez à monseigneur de Bourgoingne, nous sumes de l’Empire ». Après maintes chutes dans la neige et force horions reçus, les sergents parvinrent à gagner la porte de la ville et s’empressèrent de s’éclipser. Le duc de Bourgogne fut aussitôt instruit de l’aventure. Il en conçut une vive colère. Les habitants de Jougne allaient expier leur trop grande fidélité à l’Empire. Il prescrivit une enquête au sujet de la révolte de Jougne. Ainsi la désignait l’opinion publique. L’enquête fournit les noms de quatre principaux fauteurs, et comme le Duc avait à ce moment besoin des services du prince d’Orange et que celui-ci désirait éviter tout nouveau dissentiment avec son seigneur, il fut obligé de lui remettre les quatre délinquants 2. A cette condition seule, le Duc consentit à le laisser jouir de ses droits à Jougne. De plus, probablement sur la requête de Louis, il fit grâce aux meneurs de la révolte, les obligeant seulement à reconnaître publiquement leurs torts. Une première fois, nu-tête et sans ceinture, ils durent entendre à genoux la /170/ lecture de l’arrêt de grâce et témoigner leur repentir. La même cérémonie se répéta à Jougne, à l’heure de la messe, devant chacune des deux portes de la ville, puis une troisième fois à Pontarlier, devant le bailli d’Aval. Enfin, le Duc exigea que l’on fit un tableau en souvenir de l’événement 1, sur lequel on les représenterait implorant leur grâce, avec cette inscription au bas : « C’est tableau a esté fait afin de perpétuelle mémoire, en signe de l’amende des excès et offences faictes et dictes audit lieu de Joigne par plusieurs des habitants de Joigne es chastellain et officiers de Monseigneur de Montmorot ». Tel fut l’épilogue de cette affaire où la fidélité des habitants de Jougne pour leur prince et leurs sympathies ne reçurent guère de récompense. C’est que les nécessités d’une politique prudente le forçaient à louvoyer entre le Duc et ses sujets.

Après la trêve conclue avec Charles VII, Philippele-Bon, qui avait séjourné en Flandre durant ces derniers mois, se décida à revoir ses pays de Bourgogne 2. Il y revint en février 1432. Mais dans quel état retrouvait-il ses sujets ! Partout la désolation et la ruine avaient passé. Partout des mains tendues s’élevaient vers lui, le suppliant d’adoucir les maux qu’une guerre sans merci avait causés. A la vue de tant de misères, le Duc désira plus vivement encore la paix. Malgré la mauvaise foi de son beau-frère, le comte de Clermont, qui, au mépris de la trêve jurée, avait recommencé les hostilités, il fit tous ses efforts pour arriver à une entente. De son côté, le pape /171/ Eugène IV, qui aspirait à réconcilier les adversaires, avait envoyé en France son légat, le cardinal de Sainte-Croix. Grâce aux efforts de ce dernier, on réussit à ménager une réunion des représentants de Charles VII, du roi d’Angleterre et du duc de Bourgogne pour le 8 juillet à Auxerre. Les ambassadeurs de Charles VII étaient Georges de la Trémoille, l’archevêque de Reims et Christophe d’Harcourt. Depuis le mois de février déjà, Louis de Chalon se trouvait à Dijon auprès du Duc 1. Il avait repris sa place accoutumée à son conseil. Quand on fut assuré de l’arrivée des ambassadeurs, Louis reçut l’ordre de se rendre avec plusieurs gentilshommes sur les marches de l’Auxois et du Nivernais pour s’informer si certaines bandes ne se rassemblaient pas, « pour courir sus » aux envoyés du Roi 2. Puis, le 9 avril, accompagné de cent hommes d’armes, il vint attendre leur arrivée à Nevers. Son séjour se prolongea dans cette ville pendant plus d’un mois. Les trois délégués du Roi parurent enfin. Louis les escorta jusqu’à Dijon 3. Là, tandis qu’ils poursuivaient leur route vers Auxerre, Louis reçut avec l’évêque de Nevers, le chancelier messire Nicolas Rolin, le maréchal de Bourgogne, des instructions du Duc pour le représenter aux conférences d’Auxerre 4. Il jouissait encore de toute la confiance de Philippe-le-Bon, puisque celui-ci /172/ l’avait choisi comme son représentant dans une mission de haute importance. Malheureusement, par suite de la maladie du cardinal de Sainte-Croix et de diverses circonstances, les conférences ne purent commencer que le 1er novembre. Pendant quatre mois, on les avait renvoyées d’une date à l’autre, sous mille prétextes. Elles durèrent jusqu’au 5 décembre pour aboutir à un échec. Les représentants de Charles VII refusaient d’accepter les propositions des parties adverses 1.

Un personnage cependant avait retiré quelque profit de ces entrevues. C’était Louis de Chalon. En escortant les envoyés du Duc à Dijon, le vassal de Philippe-le-Bon n’avait pas oublié ses intérêts. Il profita de l’occasion qui lui était offerte d’entrer en relations indirectes avec Charles VII. Tout en faisant route avec la Trémoille, Louis se lia étroitement avec le favori du Roi. Ils se firent leurs confidences. Louis lui raconta ses déboires en Dauphiné, la perte de ses seigneuries et par-dessus tout celle de sa belle principauté d’Orange que détenait le roi de Sicile. Il sut si bien plaider sa cause, il exprima avec tant de persuasion à la Trémoille son désir de se rapprocher de Charles VII, que celui-ci lui promit de servir ses intérêts et de s’employer de tout son pouvoir à ce rapprochement désiré. Il y réussit et au delà des espérances de Louis.

Dans le courant de juin, tandis que l’on renvoyait jour après jour les conférences d’Auxerre, Louis dépêchait à Loches, auprès de Charles VII, ses envoyés. /173/ Ils étaient chargés de préparer le terrain. Lui-même se mit en route à la fin du mois. A la cour, il trouva en la Trémoille un conseiller influent. Louis était résolu de faire à tout prix sa paix avec Charles VII, même en abandonnant le duc de Bourgogne et les Anglais. Ses sympathies, toujours bien faibles pour ces derniers, avaient définitivement disparu à la suite des dernières campagnes. De son côté, Charles VII voyait venir à lui avec satisfaction un des plus riches seigneurs de la Comté, un des plus puissants vassaux de son adversaire. Dans ces heureuses dispositions, l’on parvint à s’entendre assez vite, et, le 22 juin, l’on signait ce traité de Loches qui attachait définitivement le prince d’Orange à la cause de Charles VII 1. Louis s’engageait désormais à servir le roi de France contre les Anglais, avec trois cents hommes d’armes et trois cents hommes de trait, pendant trois mois entiers, en supportant la charge de cette troupe et en entrant en campagne six semaines après qu’il en aurait été requis. Il promettait de défendre les possessions du Roi en Dauphiné, si elles étaient attaquées, même au besoin contre le duc de Bourgogne. Enfin, il ferait tous ses efforts pour amener une entente entre le Roi et le Duc et les décider à la paix. En récompense de ses services, Charles VII lui restituait ses terres de Dauphiné perdues depuis le désastre d’Anthon, à condition d’en /174/ recevoir l’hommage immédiatement et en personne. Quant à Anthon, Colombier et St-Romain, dont la possession faisait toujours l’objet d’un procès entre Louis et le sire de Saluces, Louis poursuivrait sa cause devant la cour de Dauphiné, en obtenant toutes les garanties désirables. Le Roi absolvait les actes hostiles commis par le Prince dans les années précédentes. Enfin, il écrirait au roi de Sicile et à son gouverneur de Provence pour faire restituer au Prince sa principauté d’Orange.

En somme, ce traité favorisait en tous points les intérêts de Louis et constituait un indéniable succès. De toute probabilité la paix ne tarderait pas à se conclure dans le Royaume et Louis rentrait en possession de ces terres de Dauphiné si ardemment regrettées. Tandis que, ce même jour, le Roi écrivait au gouverneur du Dauphiné pour lui notifier l’appointement conclu et lui mander de remettre au Prince 852 florins de rente à prendre sur ses terres, comme reste d’une assiette de 2000 livres tournois en laquelle il était engagé, ainsi que le voulaient les conventions 1, Louis reconnaissait solennellement les clauses du traité et promettait sous la foi du serment de les observer fidèlement 2.

Un mois plus tard, Louis rentrait à Nozeroy, fier et heureux. Désormais, le temps des campagnes et des guerres était passé pour lui. Il allait enfin pouvoir jouir tranquillement de ses biens, au milieu des siens et de ses sujets. Il employa l’automne de 1432 à faire /175/ une tournée dans ses châtellenies du pays de Vaud, à Orbe, à Echallens, où il assista probablement aux vendanges qui se faisaient alors 1. Puis il revint dans la Comté où il passa paisiblement toute l’année suivante. Les noces de Louis, fils aîné du duc de Savoie, Amédée VIII avec Anne de Lusignan, fille du roi de Chypre, qui se célébrèrent à Chambéry, au mois de février 1434, firent sortir Louis de sa retraite. Désireux de témoigner son attachement au duc de Savoie, avec lequel il n’avait cessé d’entretenir d’amicales relations, depuis le traité de Morges, il se rendit à Chambéry où il se joignit à toute la noblesse qui s’y était donné rendez-vous. Le duc de Bourgogne avait tenu à assister en personne aux fêtes. Il y vint, accompagné du malheureux René d’Anjou, pour un temps hors de ses fers, mais qui allait rentrer en prison quelques mois plus tard  2. Les comtes de Nevers, de Fribourg, de Clèves étaient aussi présents. A son retour de Chambéry, Louis, au lieu de regagner ses châteaux, accompagna le Duc à Dijon 3. Ce dernier, sans vouloir troubler la trêve avec Charles VII, se proposait d’attaquer la forteresse de Grancey, dans le Langrois, appartenant au sire de Châteauvilain. Dans sa haine pour de Vergy, Châteauvilain n’avait cessé de ravager une partie des frontières, violant la trêve jurée, et Philippe-le-Bon se proposait de punir sévèrement ce vassal rebelle 4. Il fit /176/ d’immenses préparatifs en vue de cette campagne et confia le commandement de son armée à Jean de Vergy. Au mois de juillet on commença vigoureusement le siège de la place. Le Duc entraîna-t-il Louis à se joindre à son armée ? Il est peu probable. Le Prince ne se souciait guère de refaire campagne. Pendant le temps que dura le siège, sa présence est presque constamment signalée à Nozeroy. Cependant, la duchesse de Bourgogne tenait fort à cœur l’entreprise, car son mari était alors en Flandre. Elle n’épargna rien pour la réussite du siège, y engagea même sa vaisselle d’or et d’argent. En même temps, elle envoyait des vins en abondance à Jean de Vergy. Le 4 août, elle écrivit au prince d’Orange, le priant de sortir de ses châteaux pour venir se joindre aux assiégeants. Mais cette fois, Louis ne jugea pas à propos d’acquiescer à sa demande. Toutefois, afin de ne pas mécontenter sa souveraine, il offrit de lui avancer une certaine somme pour subvenir aux dépenses du siège. Sa proposition fut acceptée et Louis prêta 4000 francs à la duchesse, qu’il lui fit remettre par des marchands de Dijon 1. Une fois de plus, l’on pouvait se convaincre que la richesse légendaire des Chalon n’était point un mythe, mais qu’au plus profond du Jura le prince d’Orange conservait précieusement un trésor sans cesse augmenté. D’ailleurs, l’année suivante, le receveur ducal Jean de Viseu rendait au Prince la somme prêtée. Le 15 août, après plusieurs semaines d’investissement, Grancey se rendit à Jean de Vergy. Pour faire un exemple, le Duc /177/ ordonna de démolir la place et de la raser. Afin de subvenir à ces nouveaux frais, la duchesse, dans son zèle, livra encore ses joyaux.

Dès la fin d’août, elle fit part au prince d’Orange de son désir d’aller le voir et de visiter Nozeroy 1. En vue de son arrivée, le maître d’hôtel du Prince, Vaucher de Sirod, réunit au pays de Vaud des provisions de poisson, anguilles, palées et ombles. Mais la Duchesse se fit longtemps attendre et c’est seulement deux mois après qu’elle réalisa son projet. Le 18 octobre, elle arriva à Nozeroy où elle reçut du Prince une hospitalité digne des Chalon. On la festoya princièrement. Pendant huit jours, la duchesse resta l’hôte de son vassal 2. Elle quitta Nozeroy le mercredi suivant.

Sur ces entrefaites, au commencement de l’année 1435, le Duc manifesta une fois de plus son intention de conclure la paix. Le 13 janvier, il convoquait le duc de Bourbon et le comte de Richemont à une entrevue qui eut lieu à Nevers dans le courant du mois. Ce fut le prélude d’un accommodement définitif, prélude bienfaisant et qui eut les plus heureuses conséquences. Le duc de Bourbon et le duc de Bourgogne /178/ se réconcilièrent et l’on convint de s’assembler à Arras, le 1er juillet, pour y traiter définitivement de la paix du Royaume 1. Avec le duc Philippe, s’était rendu à Nevers Louis de Chalon qui n’avait cessé de lui recommander la modération. Personne plus que lui ne désirait un rapprochement entre Charles VII et le Duc. Sa joie dut être grande en voyant l’heureuse tournure des conférences. Comme Philippele-Bon en quittant Nevers, s’apprêtait avant de partir pour la Flandre, à aller faire un pèlerinage à Saint-Claude, Louis le décida à passer à Nozeroy et à accepter son hospitalité. En même temps, il avertissait ses serviteurs de préparer en hâte des provisions pour la réception attendue. Comme toujours, l’on eut recours aux terres du pays de Vaud. A Grandson, Richard Ferlin, le receveur du Prince, reçut l’ordre de Vaucher de Sirod et d’Henri de Doubs, maîtres d’hôtel de la princesse d’Orange, de faire d’énormes provisions de poisson de toute espèce, et de les tenir prêtes à être envoyées à Nozeroy 2.

Le Duc fut reçu fastueusement, selon les habitudes de Louis. Quand on se sépara, Philippe reprit le chemin du Nord en passant par Paris où il fit une entrée triomphale avec la duchesse Isabelle. De partout on était venu contempler le prince sur qui reposait l’espoir de la paix.

Quant à Louis, il avait entrepris une tournée au pays de Vaud pour surveiller l’état de ses châteaux, sujet constant de ses préoccupations 3. A son retour /179/ dans la Comté, il apprit l’heureuse tournure que prenaient les affaires du Royaume et la prochaine réunion des conférences d’Arras. Dès le mois de juillet, un brillant cortège de seigneurs laïques et ecclésiastiques s’acheminait vers cette ville. Les cardinaux de Sainte-Croix et d’Arles, légats du Souverain-Pontife, y arrivèrent les premiers, puis successivement les ambassadeurs de presque tous les Etats d’Europe, les députés de l’Université de Paris. Le 30 juillet, Philippe-le-Bon faisait son entrée dans la ville suivi comme toujours d’une escorte resplendissante. L’on est étonné cependant de ne pas voir le prince d’Orange figurer à ses côtés. Mais Louis préféra rester dans ses châteaux et envoya à Arras son fils, Guillaume, le seul enfant que lui eut donné sa femme Jeanne de Montbéliard et qui pouvait représenter dignement le Prince au milieu de la noblesse bourguignonne 1.

De nouvelles querelles avaient éclaté entre les citoyens de Besançon et leur archevêque, Jean de la Rochetaillée. Elles devinrent si vives que l’empereur Sigismond se décida à intervenir. De son côté, le concile de Bâle s’occupa de rétablir la paix entre l’archevêque et ses diocésains, et comme Louis, par son ancienne charge de vicaire dans la cité, avait été appelé à aplanir le différend, on le désigna pour régler avec les gouverneurs de la ville et l’archevêque les bases d’un accord. Le 10 juin fut enfin signé un traité qui précisait définitivement les droits du prélat sur la ville; on l’appelle /180/ communément le traité de Rouen 1. Désormais les Bisontins allaient vivre d’une existence plus calme et s’abstenir des perpétuelles émeutes qu’ils avaient soulevées les années précédentes.

Peu de temps après, Louis apprenait l’heureuse marche des conférences d’Arras. Grâce à l’habileté du légat apostolique, le duc Philippe s’était laissé persuader de renoncer à toute vengeance pour le meurtre de son père, et à oublier l’attentat. Les délégués anglais, furieux de voir la bonne entente s’établir entre le Duc et Charles VII, avaient quitté Arras, le 6 septembre. Quinze jours après, les cloches de Bourgogne sonnaient à toute volée, apprenant aux populations la conclusion de la paix. Le 21 septembre, les lettres furent signées et lues dans l’église de Saint-Wast d’Arras. Le 24, Philippe-le-Bon annonçait à ses sujets de Bourgogne qu’il avait fait la paix avec Charles VII. Et l’avantage lui restait en définitive. Pour prix de son amitié et de son oubli des événements passés, on lui concédait le comté de Mâcon, le comté d’Auxerre, la châtellenie de Bar-sur-Seine, les châteaux de Péronne, de Montdidier et de Roye, et ces fameuses villes de la Somme que le Roi se réservait seulement de racheter moyennant quatre cent mille écus d’or vieux. Il devenait maître absolu en Bourgogne et dans les domaines cédés, tant durant sa vie que durant celle de Charles VII qui le dispensait de toute foi ou hommage.

C’est à de telles conditions, que plusieurs /181/ personnages armagnacs jugèrent excessives, que la guerre civile prenait fin, après avoir dévoré des milliers d’existences, répandu la misère et la famine sur les trois quarts du Royaume. Mais c’était la paix, la paix tant désirée. Un ennemi commun restait encore, l’Angleterre, qui, devant les efforts des partis réunis, n’allait pas tarder à demander elle aussi une trêve.

 


 

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CHAPITRE VIII

LOUIS DE CHALON QUITTE LA VIE POLITIQUE
(1435-1445)

Sommaire : Apparition des Ecorcheurs en Bourgogne. — Louis dans ses terres. — Triste union d’Alix de Vienne. — Jeanne de Montbéliard. — Fondation d’un couvent de Clarisses à Orbe. — Louis recouvre Orange. — Fiançailles de Guillaume de Chalon et de Catherine de Bretagne. — Lettres du pape Eugène IV. — Entrée de Frédéric III à Besançon. — Mariage du sire d’Arguel et réception du duc et de la duchesse de Bourgogne à Nozeroy. — Mort de Jeanne de Montbéliard.

La paix d’Arras signée, les populations du Royaume et particulièrement celles de Bourgogne purent s’attendre à une ère prolongée de tranquillité. Bien que la guerre se poursuivît encore intense contre les Anglais, dans le nord et autour de l’Ile de France, du moins en Bourgogne espérait-on en avoir fini avec les irruptions des gens de guerre et leurs ravages. Hélas ! cet espoir ne tarda pas à être déçu. L’année 1435 n’était pas écoulée que des bandes de soudards faisaient apparition dans le Mâconnais, dans le Charolais, que tant de fois déjà ils avaient ravagé. Ce n’était pas que la trêve conclue eût été violée. Mais /183/ un fait nouveau était intervenu. Les compagnies de gens de guerre, levées pendant ces dernières années et dont le pillage et la maraude avaient été les principaux moyens d’existence, voyaient leurs entreprises arrêtées à la suite du traité récemment signé. Leurs chefs, qui, au métier des armes, avaient acquis une certaine célébrité, refusèrent de s’accommoder du nouvel état de choses, et bientôt, la paix conclue, ils décidèrent de recommencer la guerre pour leur compte, dans les régions souvent parcourues et que désignaient à leurs convoitises les richesses naturelles du sol. De là, durant dix années, des temps de terreur et de désolation pour les deux Bourgognes, peut-être pires que les luttes précédentes, car avec les routiers aucune merci n’est à espérer 1. Leur nom d’écorcheurs est significatif. Partout où ils passent, ils dépouillent le malheureux habitant jusqu’à la chemise, pillent ses champs, coupent ses vignes et le blé en herbe, brisent les charrues et les meubles, démolissent ou brûlent les maisons. Leurs exploits, leurs courses néfastes à travers la Bourgogne se reconnaissent aux traces de leurs atrocités. Chaque ville tremble pour sa sûreté dès que vient la nuit.

Retiré au fond du Jura, le prince d’Orange se voit de temps à autre appelé par le chancelier ducal ou par le conseil à venir au secours des populations terrifiées par les pillards. Souvent c’est une fausse alerte et un contre-ordre succède à l’appel. /184/ Louis, depuis le traité d’Arras, s’est enfermé dans ses châteaux. Désormais, la vie politique du Royaume ne l’intéressera plus, ou du moins, s’il suit de loin la marche des événements, il n’y prendra plus aucune part. Après l’existence agitée qu’il a menée depuis sa jeunesse, malgré sa qualité de premier vassal du duc de Bourgogne, le service du Duc ne l’attirera plus à son armée et rarement à sa cour. Sa vie va s’écouler désormais dans ses terres du Jura, auprès des siens, dans ses nombreux châteaux, abandonnés et souvent détériorés. La plupart sont en ruine et l’une des grandes occupations de Louis va être de les relever et d’en construire de nouveaux. En même temps, il va pouvoir enfin jouir de ses trésors, les évaluer et chercher par tous les moyens possibles à les augmenter. Son amour pour l’or se développera encore et le prince d’Orange en arrivera à être un des plus riches seigneurs du Royaume.

Cependant, dès son retour à Nozeroy, de graves soucis l’ont assailli, des dissentiments de famille ont occupé le meilleur de son temps. Faisant contraste avec l’union heureuse de sa sœur Marie et du comte de Neuchâtel, celle de sa seconde sœur Alix offre un spectacle lamentable. Le sire de Saint-Georges, Guillaume de Vienne, s’est ruiné en prodigalités, dépensant non seulement sa fortune, mais celle de sa femme. Il a abandonné son épouse et l’a laissée dans un tel état de pauvreté qu’elle en est réduite à mendier l’assistance des siens. Quel contraste avec les temps d’autrefois, où les demoiselles de Chalon, richement entretenues par le prince /185/ d’Orange, leur père, étaient renommées pour leur luxe. L’on se rappelait encore dans le Jura les fameuses noces du sire de Saint-Georges, à Nozeroy, au milieu d’une grande affluence de seigneurs, et où l’épouse avait paru, plus richement parée encore que d’habitude, en vêtements de soie 1. Il avait fallu abandonner ce train de vie. Quand Louis, à son retour d’Anthon, eut connaissance du triste état où en était réduit sa sœur, il prit pitié d’elle. Pareil abandon était indigne de la famille de Chalon. Aussi lui offrit-il de la recevoir chez lui. Alix ne demandait pas mieux d’accepter, mais que dirait le public en apprenant sa cruelle nécessité. Elle se trouvait alors à Dôle avec quelques-unes de ses suivantes. Prétextant un pèlerinage à Notre-Dame de Chagny, elle se rendit en cet endroit avec quelques-unes de ses compagnes. Y ayant rencontré messire Jean de Vergy, qui était venu la quérir de la part du Prince, elle le suivit à Nozeroy 2. Ce ne fut que bien loin des remparts de Chagny qu’elle se décida à avertir ses suivantes de sa résolution. On la reçut à Nozeroy avec de grandes /186/ prévenances 1. La garde-robe de la malheureuse princesse était si dénudée que son frère dut pourvoir complètement à son entretien, et pendant des années, Madame de Saint-Georges vécut auprès du Prince et de sa belle-sœur Jeanne de Montbéliard, entièrement à leurs dépens 2. Mais bientôt son esprit inquiet et chagrin la porta à se plaindre de l’existence, pourtant facile, qui était la sienne. Quoique entourée de luxe, elle prétendait que ses intérêts étaient sacrifiés, et soutenait qu’on la privait du nécessaire. En 1438, lors d’une absence du Prince qui s’en allait à Orange, Alix refusa de l’accompagner. Elle demandait qu’on lui laissât le château de Nozeroy pour demeure. Louis ne put acquiescer à sa demande, mais il lui offrit son château de Vers. La princesse refusa et se retira à Jougne, furieuse de n’avoir pas vu ses désirs satisfaits. Elle y demeura quelque temps puis retourna en Bresse, emportant avec elle une /187/ douzaine de robes et de fourrures que lui avait prêtées son frère. Enfin, dernière ingratitude, sitôt hors du Jura, elle lui intenta un procès, affirmant qu’elle avait été lésée dans la succession de son père 1. De là, de nouveaux tracas pour Louis qui dut singulièrement se repentir de sa bonté.

En même temps qu’il était témoin de ces tristes dissentiments, dans son propre intérieur la paix ne régnait pas toujours. Sa femme Jeanne de Montbéliard aurait eu droit à tous les honneurs dus à son rang et à supposition. Au contraire, le Prince en était venu à la traiter sans ménagements, la surveillant dans ses dépenses, lui refusant même, disait-on, le nécessaire 2. On ne la consultait plus dans les décisions à prendre, elle qui, pendant si longtemps, avait administré les terres du Prince durant ses continuelles absences. Louis oubliait ce que lui avait apporté sa femme en fait de biens et de terres. N’avait-il pas gagné plus de vingt mille francs par son mariage, et son trésor ne s’était-il pas enrichi de joyaux et de pierreries ? Mais, mécontent de la conduite du seul fils qu’elle lui avait donné, Louis en voulait à sa mère et l’accusait de favoriser les folles dépenses de Guillaume de Chalon. Malheureuse à son foyer, Jeanne reporta son activité et ses intérêts /188/ sur les établissements religieux. Dans ses nombreux voyages au pays de Vaud et en particulier à Orbe, où elle avait toujours été fort bien reçue, elle avait remarqué l’absence d’un monastère de femmes. Elle décida d’en fonder un et d’y établir un couvent de Clarisses 1. Dès 1426, le pape Martin V approuvait sa fondation, et si l’établissement du monastère fut retardé de quelques années encore, c’est que des difficultés avaient surgi entre Louis de Chalon et ses beaux-frères. Mais l’on s’était mis aussitôt à sa construction 2 et quatre années après, en 1430, le monastère s’élevait dans le Bourg-neuf, au centre de la ville d’Orbe 3. Autour de la chapelle, richement dotée par la princesse, se trouvaient deux bâtiments, l’un réservé aux religieuses et l’autre aux Cordeliers que l’on avait fait venir de Nozeroy pour desservir la chapelle. Dès lors, la sollicitude de la princesse d’Orange s’attacha tout particulièrement à cette fondation. Chaque année, ses aumônes venaient s’ajouter à celles que les Clarisses d’Orbe ne tardèrent pas à recevoir en abondance pour leur entretien des deux côtés du Jura. Louis aussi, à ses différents passages à Orbe, manqua rarement de leur faire une offrande. C’étaient quelques muids de froment, du /189/ vin, de la cire 1. D’ailleurs, il s’intéressait spécialement à la ville d’Orbe. Quelques années auparavant, il avait contribué par un don à l’entreprise d’un humble ermite, frère Girard Borellier, la construction d’un pont de pierre sur les gorges profondes de l’Orbe, au sud de la ville. Le pont fut achevé en 1424. Il subsiste encore aujourd’hui.

Tout en surveillant ses domaines du Jura, Louis ne cessait de revendiquer ses droits, en Dauphiné, où malgré son traité avec Charles VII, le Conseil refusait de le laisser rentrer en possession de ses terres. Il fallut à plusieurs reprises l’intervention énergique du Roi pour que Louis pût recouvrer ses possessions 2. D’ailleurs, son procès au sujet d’Anthon, Colombier et St-Romain était toujours en suspens devant le parlement de Grenoble. En dépit des efforts du Roi pour presser l’affaire à son conseil, Louis plaida jusqu’à la fin de sa vie 3.

Quant à sa principauté d’Orange, il avait pu y rentrer sans trop de difficulté, tout en rendant foi et hommage au roi de Sicile, Louis III. A la mort de ce dernier, une circonstance fortuite lui restitua ses droits entiers sur la principauté. On se rappelle que le malheureux René d’Anjou se trouvait toujours plongé dans la plus dure captivité, ne parvenant pas à se procurer la rançon énorme qu’exigeait de lui /190/ Philippe-le-Bon. En 1436 cependant, il se décida à recourir aux richesses du prince d’Orange et obtint de lui un prêt de 15.000 livres pour l’aider à recouvrer sa liberté 1. En retour, il hypothéquait à Louis sa souveraineté sur Orange jusqu’à l’entier paiement de cette somme 2. Et ce paiement se fit attendre si longtemps que Louis resta en possession de sa principauté jusqu’à la fin de ses jours. Enfin, le 7 mai 1438, pour établir encore plus solidement son autorité dans le Midi et à Orange, Louis concluait avec le cardinal Pierre de Foix, son voisin et légat à Avignon, un traité d’alliance qui les attachait étroitement l’un à l’autre. Ils se promettaient aide et secours en cas d’attaque 3.

Ainsi, de ce côté, ses affaires prospéraient. Au reste, le Prince atteignait peu à peu à une telle puissance, par son influence et par ses richesses, qu’il prenait rang parmi les premiers seigneurs du Royaume. L’on s’en rendit bien compte quand, en 1437, on vit s’éloigner de Nozeroy une troupe importante de cavaliers qui se dirigeait vers l’ouest. Cette troupe traversa toute la France et s’en vint en Bretagne, auprès de Richard de Bretagne, comte d’Etampes 4. Les ambassadeurs du prince d’Orange avaient pour mission de demander au comte la main de sa fille Catherine, pour Guillaume de Chalon, sire d’Arguel. Elle était /191/ fille de Marguerite d’Orléans et la nièce de l’illustre connétable de Richemont. C’était un brillant parti. Louis, en la demandant pour son fils, n’avait pas redouté sa fortune élevée. Son désir se réalisa sans trop de peine. Il se rendit lui-même à Troyes pour s’entendre avec le connétable de France 1. Quelques mois plus tard, Richard de Bretagne étant mort, son frère le duc Jean V envoyait à Nozeroy ses ambassadeurs pour régler le contrat de mariage 2. On les reçut naturellement avec grands honneurs 3 et /192/ l’on convint que la jeune princesse viendrait immédiatement en Bourgogne, où elle habiterait avant de se marier. Les officiers du prince d’Orange allèrent la chercher à Moulins et ils l’amenèrent à Nozeroy au mois d’octobre 1438. On la combla de prévenances et de cadeaux 1. Bientôt Catherine de Bretagne s’acclimatait à ce nouveau pays plus rude, à l’aspect plus sombre que le sien.

La vie d’ailleurs n’était point monotone dans les châteaux du prince d’Orange. A côté de la chasse qui animait les forêts des alentours, de nombreux étrangers venaient souvent rendre visite au Prince et contempler sa luxueuse demeure. Fréquemment, des messagers arrivaient avec des nouvelles de Suisse, d’Alsace, du Midi et du Royaume. C’est ainsi que dans le courant de juillet 1439, un courrier d’Italie apporta à Nozeroy des lettres du Souverain Pontife 2. Le pape Eugène IV, après avoir échoué à Bâle et à Ferrare dans ses tentatives de provoquer une réunion des Eglises grecque et latine, venait enfin de parvenir /193/ à son but dans un nouveau concile qu’il avait ouvert à Florence. Là, il avait reçu pendant des semaines, avec grands honneurs, l’empereur grec Jean Paléologue et le patriarche de Constantinople, suivis d’une nombreuse escorte. L’Empereur paraissait tout disposé à l’union, peut-être par motif politique et comptant sur l’appui des princes d’Occident plus que par conviction religieuse. Après avoir discuté pendant des semaines sur les différents points de foi et de dogme qui séparaient les deux Eglises, l’union avait été proclamée solennellement dans la cathédrale de Florence, le 6 juillet. C’était là ce que narrait le pape au prince d’Orange. En même temps, il lui faisait part de l’arrivée à Florence de délégués arméniens venus, eux aussi, pour une entente. En reconnaissance de ces heureux événements, le pape sollicitait instamment le Prince de faire dire des prières publiques dans toutes ses terres et de faire faire des processions solennelles pour remercier le Très-Haut de sa protection. De ce résultat inespéré, Eugène IV pouvait s’en prévaloir contre ses adversaires du concile de Bâle.

Cependant, les Ecorcheurs poursuivaient leurs entreprises et à plusieurs reprises, les nouvelles de leurs déprédations parvinrent à Nozeroy. Le 6 mars 1441, Louis était mandé à Dijon auprès du Conseil ducal, ainsi que Jean de Vergy, le sire de Neuchâtel et le sire de Couches, pour s’entendre sur les mesures à prendre au sujet de leurs brigandages. Les routiers, après avoir guerroyé dans le bassin de la Loire, se dirigeaient encore une fois sur la Bourgogne pour /194/ la piller. Aussitôt toute la noblesse du pays fut convoquée 1. Mais en même temps les Ecorcheurs envahissaient l’Autunois, le Charolais, le Mâconnais. L’on était débordé. Le 8 décembre, on apprit la prise de Mussy-l’Evêque 2, puis peu de jours après, les compagnies s’éclipsaient pour quelques mois. Ce n’était qu’un répit. Du nord où elles avaient disparu momentanément, les bandes redescendirent au mois de mars vers le sud, menaçant le Lyonnais et la Bresse. Le duc de Bourgogne était enfin arrivé pour diriger la résistance. Le 11 novembre 1442, il mandait au prince d’Orange et aux autres nobles de : « s’apprester et mettre sus en armes à tout le plus grand nombre de gens d’armes qu’ils pourront et se tinssent en leurs hostels tout prêts, jusques à ce que Monseigneur les manderoit pour résister à l’encontre des Ecorcheurs estans en Lyonnois 3 ». Quelques semaines plus tard, sur d’alarmantes nouvelles, le Duc convoquait ses vassaux à Cuisery. Louis s’apprêtait à quitter Nozeroy pour répondre à l’appel, quand le 27 mai, un contre-ordre lui parvenait. L’on respirait pour quelque temps 4.

Profitant de ce répit, le duc Philippe-le-Bon se décida, pour affermir sa réconciliation avec l’Empereur, à recevoir à Besançon le nouvel élu de la maison /195/ de Habsbourg, Frédéric III, qui venait de se faire couronner à Aix-la-Chapelle. Philippe, depuis ses longues querelles avec Sigismond, tenait à renouer, du moins extérieurement, de bonnes relations avec ses voisins d’outre-Rhin, qui ne le menaçaient plus en Bourgogne. N’avait-il pas obtenu, quatre ans auparavant, une dernière renonciation de son vassal, le prince d’Orange, cause principale de ses soucis ? Louis s’était engagé à faire disparaître toute trace de son malheureux vicariat et le Duc à oublier complètement sa conduite 1. Aussi, puisque le nouvel empereur se préparait à venir à Besançon, convenait-il que le prince d’Orange fût là pour l’accueillir avec son seigneur. Accompagné de son fils Guillaume, Louis quitta Nozeroy dans le courant d’octobre 1442, pour s’en venir coucher à Arguel, dans un château qu’il venait d’embellir et qui se trouvait aux portes de Besançon.

Le château d’Arguel
Le château d’Arguel

De là, Guillaume s’en alla attendre Frédéric à Tarcenay, tandis que son père et le duc Philippe s’arrêtaient à la Vèze. L’Empereur fit une entrée triomphale à Besançon; pendant une quinzaine, on le festoya avec de grands honneurs. La duchesse de Bourgogne, présente avec sa suite, fut très courtoisement saluée par l’Empereur. Grâce à l’habileté de Philippe et du chancelier Rolin, Frédéric oublia qu’il se trouvait presque en terre impériale ou du moins qu’il avait des droits de suzeraineté sur la ville. Quand il partit, le 10 novembre, il avait été si enchanté de son séjour qu’il avait renoncé à revendiquer ses droits 2. /196/

Un des objets de la venue du prince d’Orange à Besançon, avait été d’inviter le Duc et la Duchesse à se rendre à Nozeroy, pour honorer de leur présence les noces du sire d’Arguel avec Catherine de Bretagne. Le mariage allait enfin se célébrer après cinq années de fiançailles et Louis se préparait depuis plusieurs mois à lui donner un éclat inaccoutumé. La présence d’hôtes illustres sous son toit l’engageait à se surpasser. Durant les mois qui précédèrent la cérémonie, d’immenses provisions de gibier, de poisson, de vin furent amassées dans les seigneuries du Prince. D’Orbe, de Grandson et d’Echallens l’on envoya à Nozeroy des chars remplis de volailles et de gibier vivant, afin que ces victuailles fussent toutes fraîches au moment de leur emploi. Des chasseurs avaient été dépêchés dans toutes les châtellenies pour réunir en abondance perdrix et faisans 1. Quand le duc et la duchesse de Bretagne arrivèrent à Nozeroy, ils furent émerveillés des splendeurs qui s’offraient à eux. La demeure du Prince venait d’être embellie. Des tentures de prix ornaient chaque pièce et celle qui abrita le Duc était tapissée d’or. Nombre de seigneurs des environs et de Bretagne avaient tenu à assister aux réjouissances. Au milieu de cette affluence, la jeune épouse attirait tous les regards par sa beauté et sa prestance. « C’était, dit Olivier de la Marche, la renommée et le bruit de tout le pays, en cas de beauté, de sens et de vertuz; elle était josne, belle et de grant bien venue et fust depuis dame fort renommée 2 ». /197/ Mais cette précoce célébrité ne devait pas procurer à la dame d’Arguel un bonheur durable. Epouse d’un mari libertin et dépensier, elle subit les tristes conséquences de sa prodigalité.

Les fêtes terminées, le Duc et la Duchesse, avant de quitter la Comté, s’en allèrent en pèlerinage à l’abbaye de Saint-Oyand de Joux (Saint-Claude), où le Duc était venu déjà et qu’il affectionnait. En chevauchant le long des chemins du Jura à travers les forêts de noirs sapins, ils songeaient encore aux splendeurs de Nozeroy, splendeurs dignes des cours orientales mais inattendues dans ces solitudes.

C’est peut-être pour ressusciter lui aussi ce luxe des temps passés que le Duc, au commencement de l’été 1443, annonça en Bourgogne et dans tout le Royaume un tournoi solennel. Ce fut une des dernières fêtes chevaleresques du moyen âge, et le Pas d’armes de l’Arbre d’Or ou de Charlemagne, par sa magnificence, resta gravé dans les annales bourguignonnes 1. Il se donna entre Nuits et Dijon.

L’on y vit toute la noblesse du pays. Le Duc y vint accompagné du duc de Savoie et Louis de Chalon ne manqua pas cette occasion d’étaler à tous les regards son luxe et ses richesses. Pierre de Beauffremont présidait la fête. Pendant deux mois, il tint table ouverte à tout venant.

Mais au milieu de ces réjouissances, la tranquillité était loin de régner en Bourgogne. Les Ecorcheurs continuaient à répandre la terreur. La fameuse expédition que, dans le courant de l’année 1444, le /198/ dauphin Louis entreprit contre Bâle, ne se composait que de routiers. A Saint-Jacques (25 août 1444) ils se mesurèrent aux Suisses et malgré leur victoire, décimés et découragés, ils battirent en retraite, se jetant sur la Franche-Comté qu’ils ravagèrent, l’année suivante. Thiébaud de Neuchâtel fut impuissant à les contenir. Montbéliard, au milieu de ces désordres, fut occupée par les comtes de Wurtemberg, et une fois de plus, le prince d’Orange fut appelé à intervenir entre eux et le maréchal de Bourgogne, qui leur réclamait une forte indemnité. Louis paraît avoir donné raison aux seigneurs de Wurtemberg 1.

Durant les quelques mois de répit que lui laissèrent les routiers, Louis entreprit un voyage au pays de Vaud au printemps de 1445 2. Il se trouvait encore à Echallens au commencement du mois de mai, quand on le rappela en toute hâte dans la Comté. Sa femme venait de tomber sérieusement malade à Nozeroy et l’on redoutait une issue fatale.

La princesse d’Orange expira le 14 mai à Nozeroy; son époux se trouvait probablement auprès d’elle. Les dernières années de la vie de la Princesse avaient été toujours moins heureuses. Aussi, dans son chagrin, s’était-elle de plus en plus tournée vers la religion et elle avait voué tous ses soins à ses nombreuses fondations pieuses. Au commencement de l’année précédente, elle venait encore de doter une chapelle dans l’église de Saint-Oyand de Joux, chapelle qu’elle avait pourvue de livres, d’ornements sacrés et de /199/ verrières et à laquelle elle consacra une rente annuelle de 20 francs; chaque semaine trois messes devaient y être célébrées 1.

Ce n’est pas au Mont-Sainte-Marie, mais dans l’église des Cordeliers, à Lons-le-Saunier, que Louis prépara une sépulture à son épouse. Il lui fit élever un tombeau de marbre blanc que l’on voyait encore au XVIIIe siècle, dans l’endroit que l’on appelait : « La crypte de Montbéliard 2 ».

Tombeau de Jeanne de Montbéliard, à Lons-le-Saunier
Tombeau de Jeanne de Montbéliard, à Lons-le-Saunier
D’après un relevé au décalque. Bibl. Nationale. Ms. franç. 27135 (pièce 202)

Mais, en 1793, pour combler une excavation dans la ville, on jeta le mausolée à bas et avec lui disparurent les restes de la princesse d’Orange 3.

Le Prince ne se considérait pas comme destiné à un veuvage prolongé, on le verra tout à l’heure. Seules, les humbles Clarisses d’Orbe conservèrent précieusement le souvenir aimé de leur bienfaitrice.

 


 

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CHAPITRE IX

LES DERNIERES ANNÉES
LA SUCCESSION DU COMTE DE NEUCHÂTEL
MORT DE LOUIS DE CHALON
(1445-1463)

Sommaire : Mariage du Prince d’Orange avec Eléonore d’Armagnac. — Expédition de Guillaume de Chalon en Milanais. — Son insuccès. — Passage du duc de Bourgogne à Nozeroy. — Séjours du Dauphin à Vers. — Mort d’Eléonore d’Armagnac. — Prétentions de Louis au Comté de Neuchâtel. — Ses efforts pour recueillir la succession du Comté. — Son échec. — Départ d’Huguenin de Chalon pour la cour du comte de Charolais. — Le prince d’Orange tombe malade à Nozeroy. — Transport de ses trésors au pays de Vaud. — Mort du Prince. — Son testament.

Une année ne s’était pas écoulée depuis la mort de Jeanne de Montbéliard que le Prince, qui était retourné au pays de Vaud 1 surveiller les réparations que l’on faisait dans ses châteaux, songeait déjà à /201/ contracter une nouvelle union. Aspirant à toujours plus de puissance, il porta les yeux sur une princesse de la maison d’Armagnac, la petite-fille du fameux connétable. Ainsi en s’alliant à une des premières familles du Royaume, Louis jugeait son autorité et ses richesses suffisantes pour l’égaler aux grands feudataires et pour se mesurer avec eux. Eléonore d’Armagnac était fille du comte Jean IV et en même temps nièce du ci-devant duc de Savoie Amédée VIII, alors l’antipape Félix V 1. Cette dernière circonstance avait fortement influé sur les desseins de Louis, qui ne manquait aucune occasion de resserrer ses liens d’amitié avec le Duc. Pour exécuter son projet, le Prince choisit un de ses plus fidèles conseillers, Gauthier de Fallerans, qu’il avait fait gouverneur d’Orange 2. Celui-ci avec un certain Jean Maire se rendit à Genève au printemps de 1446, et là, au couvent des Franciscains de Rive, le contrat de mariage fut dressé. Eléonore apportait à son époux 60 000 livres de rente 3.

Aussitôt l’affaire conclue, Louis s’occupa des préparatifs de ses noces. Un grand nombre de seigneurs annonçaient leur venue. Mettant à contribution ses terres du pays de Vaud, il commanda à ses châtelains de lui apporter à Nozeroy des provisions en abondance 4. /202/ Le mariage, fixé d’abord au 1er juillet, fut renvoyé au 26 septembre. Il se célébra à Nozeroy 1. Le prince d’Orange témoigna de particuliers égards au duc de Savoie 2. Il le festoya magnifiquement, ainsi que la duchesse et quand tous deux s’éloignèrent, ils trouvèrent des provisions préparées sur leur route 3. Les années qui suivirent s’écoulèrent désormais tranquilles /203/ à Nozeroy. La Bourgogne jouissait enfin d’une ère de repos. Le duc Philippe faisait tous ses efforts pour maintenir la paix. Louis, mettant à profit ces temps de calme, augmentait ses revenus 1, et, chaque année, ajoutait une nouvelle seigneurie à ses possessions. Le 12 janvier 1448, il achetait du duc de Savoie le château et la terre de Belmont au pays de Vaud. A la même époque, il acquérait du cardinal de Foix la baronnie de Caromb dans le midi, pour le prix de 12 000 florins 2.

Voyageant constamment dans ses terres, il s’occupait des moindres détails et surveillait avec soin l’administration de ses châtellenies 3.

Devenu père de plusieurs enfants, par son nouveau mariage, le prince d’Orange reporta sur eux tout son espoir, tandis que son fils aîné Guillaume, sire d’Arguel, devenait chaque jour davantage l’objet de son ressentiment. Il faut dire que ce fils prodigue faisait tout pour s’aliéner l’esprit d’un père dont la soif d’argent allait jusqu’à l’avarice 4. La malheureuse aventure où il s’engagea, lui enleva toute chance de rentrer en grâce auprès de son père. /204/

A la mort du dernier représentant des Visconti qui gouvernait le duché de Milan, Charles d’Orléans, prétendant avoir des droits sur sa succession, tenta une expédition en Italie, malgré la pauvreté de ses ressources. Par quelle suite de circonstances Guillaume de Chalon se vit-il entraîné dans cette campagne ? On l’ignore. Quoi qu’il en soit, le sire d’Arguel en quête d’aventures, impatient de quitter la Comté, se jeta en aveugle dans cette déplorable entreprise. L’argent lui manquant pour s’équiper convenablement et n’osant demander de l’appui à son père, qui avait formellement désapprouvé ses projets, Guillaume eut l’audace d’aliener une partie de ses biens. Il vendit au duc de Savoie, qui depuis son abdication avait pris le titre de cardinal légat, évêque de Sabine, pour le compte du duc Louis, la troisième partie des seigneuries d’Orbe, d’Echallens, de Bottens et de Montagny-le-Corbe, au pays de Vaud 1. Un peu plus tard, il agit de même avec la moitié de ses seigneuries de Mirebel-en-Montagne, de Maillot, de Montfort au diocèse de Besançon. On comprend alors la prudence de son père qui jusqu’ici l’avait privé de toute libertés le faisant vivre auprès de lui avec Madame d’Arguel et refusant de l’émanciper malgré son âge.

Avant de partir pour l’Italie, Guillaume fit une nouvelle tentative auprès de son père pour obtenir son émancipation. Un jour, il lui envoya un certain Louis Moncaul, châtelain d’Orgelet, pour le fléchir. Mais Louis demeurait inflexible; il connaissait trop les folies de son fils. D’ailleurs ne lui avait-il pas donné déjà /205/ licence d’acheter le comté de Tonnerre ? On conçoit sa colère en apprenant la conduite de Guillaume à l’égard de ses terres du pays de Vaud 1. Sans retard, il entreprit de réparer ses fautes. Moins d’un an après, il parvenait à racheter du duc de Savoie, les domaines si légèrement cédés par son fils 2. L’expédition du Milanais échoua complètement et ruina le sire d’Arguel. Il avait tout perdu dans les plaines du Piémont et il redoutait de rentrer au Jura où il pressentait l’accueil qui l’attendait. Aussi, se décida-t-il, pour gagner son pardon, à tenter le voyage de Terre-Sainte, que lui avait d’ailleurs conseillé son père 3. Son voyage et son séjour en Palestine durèrent une année. A son retour en Franche-Comté, une nouvelle inattendue vint frapper tous les esprits et jeter la consternation /206/ chez tous les chrétiens d’Occident, la prise de Constantinople par les Turcs. En novembre 1453, après un siège terrible, les Infidèles s’étaient emparés de la glorieuse cité et l’avaient livrée au plus effroyable pillage. Le pape qui en donnait avis au duc Philippe, l’invitait discrètement à quitter sa cour luxueuse pour marcher contre les envahisseurs. L’appel du pape fut entendu. Philippe, ému du récit des horreurs commises par les Musulmans, décida une croisade contre eux et se prépara à partir pour l’Allemagne, pour conférer avec l’Empereur. En même temps, il ordonna dans ses Etats la levée d’une aide extraordinaire pour les frais de la campagne; chacun de ses vassaux dut en faire de même et pour sa part, le prince d’Orange établit un impôt de deux francs par feu 1. L’idée d’une croisade contre les Infidèles provoqua un grand enthousiasme en Bourgogne. De toutes parts, affluèrent les offres de service et d’engagement. La noblesse était impatiente de repartir pour de nouveaux exploits, le souvenir de Nicopolis oppressait encore les cœurs et l’on brûlait de se venger. Un des plus ardents était Guillaume de Chalon. Apprenant l’expédition, il se hâta d’y participer; lui aussi désirait faire oublier ses récents revers.

L’historien Clerc déclare qu’une des causes du voyage du Duc en Allemagne ne fut pas tant le fait de la croisade mais son désir de persuader l’Empereur /207/ d’approuver la concession de la régalie de Besançon que lui avait accordée le prélat de cette ville 1. Quoi qu’il en soit, l’un et l’autre de ces projets échouèrent. Philippe se mit en route au mois de mars 1454; traversant la Franche-Comté, il alla voir son vassal le prince d’Orange à Nozeroy, où son arrivée était annoncée depuis un mois 2, et où le sire d’Arguel l’attendait avec impatience pour se mettre à sa suite. Louis de Chalon avait renoncé à faire le voyage d’Allemagne. Il était âgé, il redoutait les longues chevauchées et les entreprises lointaines. D’ailleurs, il était trop attaché à ses châteaux et à ses richesses. La crainte de les perdre le hantait. Il n’en reçut pas moins le Duc et sa suite avec de grands honneurs; comme toujours sa réception et son hospitalité furent grandioses. Quand il vit les voyageurs s’enfoncer dans les forêts du Jura pour gagner Pontarlier, Berne et l’Allemagne, il présagea sans doute l’insuccès qui attendait le bouillant Duc. Aussi dut-il être peu surpris quand, trois mois plus tard, on vint lui annoncer que le Duc, de retour de Ratisbonne, rentrait tristement dans ses Etats, sans avoir atteint l’Empereur et sans avoir rien conclu. Pour se consoler, Philippe avant de regagner la Bourgogne, venait retrouver son vieux vassal à Nozeroy. Comme à son départ, brillante réception lui fut de nouveau offerte.

Les habitants de la petite ville, juchée sur un des /208/ contreforts du Jura, commençaient à s’habituer à ces visites princières 1. Pendant le séjour que Philippe fit chez le Prince, une délégation des citoyens de Besançon vint le trouver. Malgré le traité de Rouen, l’on redoutait de nouveaux troubles dans la ville et l’on suppliait le Duc de ne pas favoriser les ambitions de l’archevêque qui était capable de tout 2. Sans leur donner aucune promesse, le Duc se contenta d’assurer les Bisontins de son affection, les engageant à ne point s’effrayer. /209/

Puis il regagna la Bourgogne, en demandant aux nobles et aux Etats la levée extraordinaire dont on a parlé plus haut. Philippe fut sur le point de s’attirer une révolte générale des barons et des villes. Mais grâce à la prudence du prince d’Orange qui conseillait la soumission, l’on céda, tout en n’accordant au Duc qu’une faible partie de ses exigences. Le fier sire de Grandson qui avait refusé de se soumettre, paya de sa tête sa désobéissance. Il périt étouffé entre deux matelas, dans son cachot.

Plus le prince d’Orange avançait en âge et plus on sentait le besoin de venir à lui dans toutes les questions qui concernaient la Comté. Sa fortune immense qui s’accroissait d’année en année lui donnait de puissants moyens d’action. Philippe-le-Bon y recourut plusieurs fois. Certaine année du temps jadis, où le Duc était à bout de ressources par suite de la guerre, il avait fait quérir à Nozeroy de bons deniers comptants et l’écuyer du Prince, Pierre du Pin se se souvenait alors d’avoir vu son maître pénétrer dans la fameuse Tour de plomb et en ressortir en tenant un sac qui contenait 6000 écus 1; cette somme, avec une grande quantité de vaisselle, avait été remise au Duc.

Et lorsque les Gantois révoltés forcèrent Philippe /210/ à entreprendre contre eux de sanglantes représailles, ce fut encore le sire de Chalon qui lui prêta 8000 francs 1. Nombre de seigneurs du Royaume étaient ses obligés. Du roi René, il attendait toujours le remboursement de son prêt 2; son beau-frère Charles d’Armagnac lui devait quatre cents écus 3.

Cependant, des soucis l’assaillaient à chaque instant. Ses terres de Dauphiné lui causaient mille tracas. A Theys, à Domène, à la Pierre et à Falavier, où il croyait ses droits bien établis, on les lui contestait malgré ses vives réclamations et toutes les lettres patentes du Roi en sa faveur. Un grave incident qui souleva grand bruit dans le Royaume, donna l’occasion au prince d’Orange d’attirer sur lui l’attention du Dauphin Louis, alors seigneur du Dauphiné. Depuis 1447 où le Dauphin avait quitté la cour de son père, irrité contre celui-ci et contre ses conseillers, jurant de se venger, il avait résidé en Dauphiné, où il prit en main l’administration du pays, pendant les dix années qui suivirent. Son gouvernement fut rude et autoritaire. Il enleva la majeure partie de leurs attributions au Conseil delphinal et au gouverneur, qui, jusque là, avaient dirigé la conduite des affaires. Il intervint dans tous les domaines, cherchant à briser l’influence du clergé et à réduire les nobles. Puis, avide d’acquérir de nouvelles possessions, il intrigua activement au dehors pour contrecarrer chacun des projets de son /211/ père. Mais, en même temps, son esprit chagrin et soupçonneux lui faisaient voir des dangers partout. Il avait conçu une peur sauvage de son père, si bien qu’en 1456, en plein été, ayant appris que Charles VII venait séjourner en Bourbonnais, Louis se figura qu’on avait des desseins sur lui et qu’on en voulait à sa vie. Le 30 août, prétextant une partie de chasse, il s’enfuit secrètement du Dauphiné avec quelques compagnons, et dans une chevauchée éperdue, s’en vint à Saint-Claude du Jura, d’où il adressa un court billet à son père, lui annonçant qu’il allait auprès du duc de Bourgogne. Puis il s’enfonça dans le Jura pour aller implorer l’hospitalité du prince d’Orange. Celui-ci s’attendait fort peu à être l’objet de la faveur du Dauphin 1. La vigueur avec laquelle le prince d’Orange et le maréchal de Bourgogne, après la bataille de Saint-Jacques, avaient repousssé les Ecorcheurs, que le Dauphin conduisait, n’autorisait guère le Prince à croire à l’amitié du Dauphin. Quelle ne dut pas être la surprise de Louis de Chalon en voyant arriver un soir à Vers-en-Montagne, où il résidait, le fugitif avec quelques cavaliers, tout tremblants encore de la terrible randonnée, qu’ils venaient d’accomplir. Comme dit Chastellain : « Durement se /212/ trouva esbahy ledit prince en pensant dont cette aventure lui venoit que de descendre le fils du roy de France aisné en sa maison et si soudain 1 ». Mais revenu bien vite de son émotion, il ne songea plus qu’à donner à son hôte une hospitalité digne de son rang. Son château de Vers 2, qui était richement meublé, lui permit de recevoir le Dauphin avec sa pompe habituelle et il n’épargna rien pour lui rendre son séjour agréable et lui faire oublier le mauvais souvenir de sa fuite. Des chasses furent organisées autour du château, avec plusieurs nobles des environs. Mais entre temps, le prince d’Orange, rendu prudent par l’âge, se hâtait d’avertir le duc de Bourgogne de son aventure, lui faisant savoir que son hôte avait l’intention de venir chercher un refuge à la cour ducale à Bruxelles 3. Le 19 septembre, Philippe qui se trouvait dans son camp de Welp devant Deventer, faisait part au Roi des nouvelles reçues du Dauphin 4. Louis ne put qu’encourager son hôte à se confier au Duc; on discuta pour savoir par quelle route l’on se rendrait en Brabant et à qui l’on se confierait pour atteindre la cour ducale. Louis réussit à persuader /213/ le Dauphin d’accepter pour guide le maréchal de Bourgogne, car disait-il, « ne savoit homme qui plus fust propre pour le faire que luy, car il avoit gens et places pour le mener d’une nuit à l’autre, là où il seroit asseur et s’y savoit le passage et les lieux et estoit chevalier de grant labeur 1 ». Thiébaud de Neufchâtel, averti, consentit à diriger l’expédition. Il se rendit à Vers; l’on arrêta la route à suivre. Puis le Dauphin prit congé du Prince qui l’avait si gracieusement reçu « ainsi que des haultes nobles dames de céans », et suivi d’une trentaine de chevaux, outre sa propre escorte, il gagna le Brabant en passant par Besançon et par le duché de Lorraine. En les voyant s’éloigner, Louis était loin de soupçonner les malheurs que son hôte attirerait sur sa maison et sur son propre fils.

Tout en accueillant le Dauphin avec force honneurs et jouissances, Louis, en prince avisé, n’avait pas oublié l’état précaire de ses terres de Dauphiné. Pendant les quelques jours que le futur Louis XI passa à Vers, le Prince le mit au courant de ses ennuis dans le Midi et de la mauvaise marche de ses affaires. Il sut si bien plaider sa cause, que le Dauphin, avant de quitter Vers, adressa à son gouverneur de Dauphiné un mandement pressant, lui enjoignant de restituer au prince d’Orange ses terres de Theys, Domène et Falavier, pour lesquelles ce dernier venait de lui rendre hommage 2. Louis recouvra temporairement ces seigneuries, car on l’en remit positivement /214/ en possession 1, mais malgré ces démarches, quelques années plus tard, le Dauphin était obligé de renouveler son ordre.

D’autres préoccupations vinrent encore assaillir l’esprit du Prince. A peine était-il rentré à Nozeroy, que sa femme Eléonore d’Armagnac tomba malade et s’alita pour ne plus se relever. La Princesse testa le 6 décembre 1457 2, entourée de tous les siens; elle succomba quelques jours après. Le 11, on l’ensevelissait au Mont-Sainte-Marie 3. Sa mort dut vivement affecter le Prince 4. Elle lui avait donné deux fils, Louis et Hugues, sa joie et sa fierté, et deux filles Jeanne et Philippine. Louis procura à ses fils une éducation toute militaire, voulant en faire deux preux chevaliers.

Les années passaient et Louis, que la vieillesse loin /215/ d’appesantir rendait toujours plus alerte, ne cessait de parcourir ses terres, faisant de fréquents voyages au pays de Vaud. De graves démêlés avec les officiers de son beau-frère le comte de Neuchâtel, au sujet des limites de leurs domaines l’appelèrent à plusieurs reprises dans sa seigneurie de Grandson. Il avait entrepris de grandes restaurations au château et il aimait ce séjour. Une question épineuse, soulevée aux débuts de l’année 1458, hâta son arrivée habituelle au pays de Vaud. Il s’agissait de la succession du comté de Neuchâtel, que la mort du comte Jean de Fribourg, survenue le 9 février 1458, venait d’ouvrir. Ce dernier, qui avait épousé Marie de Chalon, sœur de Louis, mourait sans enfants. En prévision de cet événement, le prince d’Orange, qui était sur ses gardes et qui visait au Comté, avait obligé son beau-frère, quelques années auparavant, à venir renouveler entre ses mains l’hommage que Conrad de Fribourg avait autrefois prêté à Jean de Chalon, premier prince d’Orange. Le 9 octobre 1453, dans la grande salle du château de Grandson, nouvellement restaurée, en présence de leurs vassaux et serviteurs, de messires François de Villarzel, abbé de l’île Saint-Jean, de Guillaume Verne, prieur de Morteau, du marquis Robert de Hochberg, de Louis de Vienne, sire de Ruffey, de messire Guillaume de Valengin, du Bon de Blye, le maître d’hôtel du prince d’Orange, de son fidèle Pierre de Jougne, Jean comte de Fribourg, tenant ses deux mains jointes entre les mains de Louis de Chalon, avait rendu hommage à Louis de Chalon « de bouche et de mains » et repris en fief /216/ son comté de Neuchâtel, en prononçant la formule consacrée : « Sire, je deviens vostre homme et vous promets féauté et loiauté de ce jour en avant 1 ».

Aussi, dès que la nouvelle de la mort du comte de Fribourg lui parvint, Louis s’empressa de prononcer la mainmise du comté comme fief faisant retour à son domaine. Il n’ignorait pas que Jean de Fribourg avait choisi pour lui succéder Rodolphe de Hochberg, fils du margrave Guillaume, son cousin germain par alliance, mais il se croyait assez sûr de ses droits pour les faire valoir aussitôt. En conséquence, le 4 mars 1458, son châtelain de Nozeroy, Pierre de Chauvirey, son fidèle serviteur Pierre de Jougne et son fils, suivis d’un notaire et de quelques autres délégués, quittèrent Grandson de bon matin, pour s’en aller, en qualité de commissaires du Prince, signifier à Neuchâtel la décision de leur maître 2. Arrivés devant la petite ville de Boudry, où coule l’Areuse, ils trouvèrent les portes fermées et gardées; force leur fut de chercher un autre passage sur la rivière. Ce premier incident ne leur faisait rien présager de bon. Après avoir chevauché toute la matinée, ils étaient arrivés près de Neuchâtel, quand ils rencontrèrent un personnage qui venait, effaré, au devant d’eux. C’était Guillaume Jaquemet, notaire impérial, que le prince d’Orange avait dépêché par avance à Neuchâtel, pour y notifier ses droits. Le malheureux notaire raconta qu’en pénétrant dans la ville, il avait trouvé le marquis de Rotelin, lequel l’avait fort mal reçu, lui et ses gens, /217/ et lui avait défendu d’instrumenter 1. Poursuivant leur route, les commissaires atteignirent les portes de Neuchâtel, qui elles aussi se trouvaient fermées. Le maire de la ville, Richard de Senevey, se tenait sur le pont-levis avec une troupe de gens armés. Il n’accorda l’entrée qu’aux envoyés du prince d’Orange, et comme le notaire impérial s’apprêtait à suivre ses compagnons, on le repoussa rudement dehors en le prenant par le bras. Admis dans la ville, les délégués, après qu’on les eut convenablement reçus, se trouvèrent en présence de Rodolphe de Hochberg, de Marie de Chalon, la veuve du défunt comte Jean, et de plusieurs personnages nobles et ecclésiastiques. Ils leur signifièrent leur mission et Pierre de Jougne, prenant la parole, exposa les revendications de son maître. Mais à toutes ses offres de remettre au marquis la cédule du Prince, Rodolphe opposa un refus formel. D’ailleurs sa réponse fut évasive; il priait le sire de Chalon de s’abstenir de toute tentative jusqu’à ce que l’on eut ouvert le testament du comte. Puis il congédia les envoyés en leur interdisant d’instrumenter ou d’afficher en ville des copies de la déclaration du Prince. Comme ceux-ci s’apprêtaient à se rendre à leur auberge avant de repartir, ils se virent entourés d’une foule menaçante qui les insulta. On les menaçait de les jeter au lac, s’ils s’obstinaient à vouloir exécuter l’ordre de leur maître 2. Cédant à la force, Pierre de /218/ Jougne et ses collègues sortirent de Neuchâtel pour s’acheminer vers Grandson. A Boudry où ils repassèrent, le châtelain les prit sous sa protection pour les défendre contre une troupe de citoyens armés qui s’apprêtaient à leur faire un mauvais parti et ils purent traverser en sécurité la ville. Meilleur accueil leur était réservé à Vaumarcus, un château des environs de Grandson, où le sire Jean leur permit d’afficher copie du mandement du prince d’Orange. Puis les commissaires rentrèrent à Grandson et le lendemain Pierre de Chauvirey s’empressait de narrer à son maître les détails de leur voyage et de leur réception. Le 24 mars, le testament fut ouvert à Besançon devant l’official, qui le fit publier, reconnaissant ainsi les droits du marquis de Hochberg. Le prince d’Orange éprouva un violent ressentiment en apprenant le traitement qu’avaient subi ses envoyés et la conduite de l’official de Besançon. Aux propositions de conciliation et à l’offre d’hommage que vinrent lui faire le 5 avril Antoine et Huguenin de Vuillafans, écuyers, pour le marquis de Hochberg, alors que Louis se trouvait à Echallens, il ne répondit que ces paroles : « Mon nepveux le marquis a bien sceu et scet que j’ay mis et reduyt en ma main le comté de Neufchastel et ay offert de bailler la declaracion de mes tiltres audit marquis et que depuis luy ont esté baillées au lieu /219/ de Besançon par les gens de mon conseil et du sien ou aultres gens notaibles ayans cognoissance et encores sui constants qui soit veuz par monseigneur de Bourgogne ou par monsr de Savoye, esquelles offertes ledit marquis n’a fait aucune responce raisonnable, ains a envers moy tenus aultres termes que faire ne devoit et pour ce je m’en raporte au droit et raison 1 ».

Puis, après les avoir congédiés, sans se décourager et sans reculer devant la poursuite de ses droits, quelque longue qu’elle dût être, Louis mit tout en œuvre pour arriver à ses fins. Un des premiers appuis à obtenir était l’aide de la république de Berne, puissante alliée et voisine du comté, de Neuchâtel. Dès le printemps, une ambassade, composée de Pierre de Chauvirey et de Pierre de Jougne, se transporta à Berne, où on refusa de leur donner réponse en prétextant l’absence de l’avoyer et des autorités de la ville. Pendant ce temps, Louis offrait au marquis de Hochberg de s’en remettre à l’arbitrage du duc de Bourgogne, sur lequel il croyait pouvoir compter. Mais Rodolphe, éludant la proposition, parvint, dès le 7 avril, à se faire reconnaître par les Bernois, avec lesquels il renouvela un traité de combourgeoisie. Aussi, quand le 25 novembre une nouvelle ambassade du Prince, à laquelle s’était joint un conseiller du duc de Bourgogne, Henri Bouchet, se présenta à Berne, elle se heurta une seconde fois à une fin de non recevoir; on promettait aux ambassadeurs une prompte réponse, pour le moment, on ne pouvait /220/ délibérer, vu la récente épidémie de peste qui s’était abattue sur la ville 1 La vraie raison de ce refus était que les Bernois se souciaient peu de voir la maison de Chalon, déjà si puissante au pays de Vaud par ses terres d’Orbe, d’Echallens et de Grandson, s’établir à Neuchâtel et qu’ils redoutaient un voisinage dangereux.

Louis se voyant joué, résolut de faire valoir ses revendications par la force et il exécuta de grands préparatifs à Grandson; son châtelain Pierre de Jougne reçut l’ordre d’abattre des bois pour construire quatre galères, qui devaient attaquer Neuchâtel par eau. Mais, songeant à son âge avancé, le Prince recula devant l’entreprise et il préféra s’en remettre à la voie de la justice. Il en avait appelé à Rome au pape Pie II de la sentence de l’official de Besançon 2. De plus, il avait aussi soumis l’affaire à l’assemblée des Etats de la comté de Bourgogne à Salins, et il se rendit en personne devant eux pour défendre ses droits 3. Malgré tous ses efforts, l’habileté du marquis de Hochberg l’emporta. /221/

Engagé dans ce procès et dans plusieurs autres suscités par sa soif de richesses, le prince d’Orange continuait cependant à s’intéresser à la vie du Royaume et aux événements dont le bruit public lui apportait l’écho. C’est ainsi qu’il apprit en 1461 la triste fin de Charles VII et l’entrée du nouveau roi Louis XI à Paris, suivi du duc de Bourgogne. En octobre, un visiteur princier vint le trouver à Lons-le-Saunier; c’était le comte de Charolais, le futur Charles-le-Téméraire, fils du duc Philippe. Après avoir accompagné son père à Paris, il s’en était venu à St-Claude, en pèlerinage et de là il avait poussé jusque chez le prince d’Orange qu’il lui tardait de connaître. Louis le reçut avec empressement, heureux de lui présenter ses deux fils, dont il était fier 1. L’aîné, Louis, qui n’avait pas treize ans, plut tellement au comte de Charolais, qu’il obtint de son père la promesse qu’on le lui enverrait l’année suivante en Flandre. Et en effet, le sire de Chalon partait quelques mois plus tard pour la cour du Prince, qui s’éprit d’une vive amitié pour lui. Le sire d’Arguel, lui, continuait à mener sa folle vie de dissipations, se rendant toujours plus odieux à son père et à tout son entourage. On en était venu à le détester à Nozeroy. Le maître d’hôtel du Prince, Bon de Blye, en particulier, lui avait voué une haine mortelle, car, disait-il, « Le mary et la femme m’ont courroucé, mais par le sang-Dieu ilz y perdront cent mille escuz; et s’ilz n’auront de monsr le prince que ce qu’il ne leur pourra hoster 2 ». /222/

Peut-être témoigna-t-il trop haut son ressentiment, car peu de temps après, le bruit courut que le sire d’Arguel avait cherché à tuer le favori de son père et qu’il était venu implorer son pardon à Nozeroy 1 ?

En revanche, Madame d’Arguel, depuis la mort de la princesse d’Orange, avait remplacé à Nozeroy le vide causé par le départ de celle-ci. Elle tenait une grande place auprès du Prince, qu’elle savait entourer de prévenances et de soins. Aussi Louis la traitait-il à l’égal de ses propres filles. Vers la fin de l’année 1462, on s’occupa à Nozeroy des préparatifs de départ du jeune sire Louis, qui venait de recevoir le titre de vicomte de Besançon et de sire de Chatelguyon. Le Prince l’expédiait en Flandre, avec un fidèle serviteur Aymé de Villiers 2. Rien ne fut négligé pour que l’équipement du voyageur fut complet et comme le Prince, que l’avarice rongeait /223/ toujours plus avec les années, redoutait de puiser dans ses propres ressources pour subvenir aux dépenses de son fils, l’on expédia à Orbe Bon de Blye pour demander aux habitants de contribuer aux frais de route du chevalier 1. Dans le courant de janvier, Louis de Châtelguyon quittait Nozeroy et son vieux père pour rejoindre la cour du futur Charles-le-Téméraire; il allait y faire comme jeune noble ses débuts de page. Quelques mois avant son départ, Louis de Chalon avait rédigé son testament à Nozeroy; il se sentait vieillir et il voulait régler ses dernières volontés, se berçant de l’espoir qu’en agissant ainsi, il éviterait toute contestation entre les siens. Or, la riche succession qu’il leur laissait était trop tentante et trop inégalement partagée pour que ses héritiers l’acceptassent ainsi. Louis, voulant favoriser ses deux derniers fils au détriment de leur aîné, ne laissait à ce dernier que ce qu’il était tenu de lui donner, sa terre d’Arlay et sa principauté d’Orange. A Hugues, il légua ses seigneuries au pays de Vaud et la plus grande partie de son immense trésor. Quelques années auparavant, en effet, se trouvant avec son fils sur /224/ la tour du Meix, qui domine l’Ain au sud de Lons-le-Saunier et qui appartenait à l’abbé de Saint-Claude, celui-ci avait entendu dire au Prince en s’adressant au jeune homme qui contemplait les champs et les forêts : « En effet, mon filz, je ne vous laisse point tant de terres ni de seigneuries que à vos frères, mes je vous laisseray si bien fourni d’argent que vous en aurez assez pour en acquérir et avoir tant que l’un des autres 1 ». Puis, une dernière fois, il s’était rendu au pays de Vaud, à Echallens, pour s’assurer du bon état de ses châteaux et surveiller ses châtelains. Malgré son âge avancé, ses velléités guerrières étaient loin de s’affaiblir; il tenait à augmenter, année après année, son artillerie; de nombreuses bombardes garnissaient ses places et il en faisait construire constamment de nouvelles 2. C’est qu’il n’avait pas perdu l’espoir de recouvrer le comté de Neuchâtel, soit par la force, soit par son or. Au sire de Charny qui l’interrogeait à ce sujet, il avait répondu « qu’il avait ung million d’or monnoié sans le trésor de son père qu’il mettrait et despendrait avant qu’il n’eut ledit comté 3 ». Mais le Prince eut beau dépenser ses deniers, il n’arriva pas à ses fins. Le 1er août 1463, il recevait de Frédéric III une lettre où /225/ l’Empereur lui annonçait que son procès avec Rodolphe de Hochberg avait été déféré par le pape à son tribunal et défendait au Prince de rien entreprendre sur le comté tant que le jugement impérial ne serait pas rendu 1.

Or, quelques semaines plus tard, la maladie venait surprendre le Prince à Nozeroy. Affaibli par l’âge, il s’alita, souhaitant de revoir son fils Louis. Sur sa demande pressante, Charles-le-Téméraire se décida à lui renvoyer son jeune page, recommandant à Bon de Blye de ne pas le garder trop longtemps, « car, lui écrivait-il, pour ce que ledit seigneur de Chastelguyon, nostre cousin, avons trouvé si bien adressé et si plein de bonnes et louables vertus que l’avons en singulier amour et affection, et desja désirons son retour par deçà et vous prions très acertes que tenez la main à ce que le beau cousin, son père, nous le renvoye le plus brief que faire se pourra 2 ». En même temps, le duc Charles remerciait le prince d’Orange de lui avoir confié son fils et l’assurait que « quand il plaira à Dieu de me donner le povoir, je l’y monstreray l’amour et bonne affection que j’ai à ly 3 ». Protestations que l’avenir allait singulièrement démentir. Quand Louis de Chastelguyon parvint à Nozeroy, le Prince languissait déjà depuis des semaines; dans sa chambre se tenaient constamment ses serviteurs et ses familiers, devisant /226/ entre eux ou avec leur maître. C’étaient les deux frères de Fallerans, Claude d’Arnex, Lombard Perrod, le secrétaire du Prince, son barbier Pierre Berchet, son médecin Guillaume de Fère, et surtout son fidèle écuyer Pierre de Jougne, qui ne le quittait plus, le veillant à ses derniers jours avec la même affection qu’autrefois. A chaque instant, il fallait calmer les inquiétudes du Prince, que le souvenir de son trésor hantait dans ses nuits. Il tremblait continuellement, se figurant qu’on le lui avait dérobé. A ceux qui l’entouraient, il racontait que certain jour, n’y tenant plus, il avait fait sortir les coffres mystérieux de la Tour de Plomb et les avait fait transporter tout près de la chambre du Bon de Blye et de la chapelle, dans une petite tour où il sentait ses richesses plus près de lui. Quelques jours après, le fond d’un coffre s’était détaché sous le poids, à la terreur du Prince, qui s’était aussitôt figuré qu’on le lui avait volé 1. La clef de ses trésors ne le quittait jamais, et quand Louis dut s’aliter, il avait fait placer devant lui, dans un buffet, la gibecière, « l’alouhière », qui la renfermait. Son esprit inquiet en vint à lui faire soupçonner tous ceux qui l’approchaient; on n’osait /227/ plus deviser à voix basse dans la chambre du malade sans qu’il en prît ombrage 1. Aussi ses familiers, pour éviter d’être accusés de détournement, lui firent-ils rédiger une cédule par laquelle il déclarait la valeur de son trésor et les en déchargeait. Son confesseur, messire Claude, qui dirigeait sa chapelle, la lui fit signer de sa propre main, « mes il l’avoit déjà si faible qu’il l’escripoit tout de travers du papier et à peine savait l’on lire 2 ».

A toutes ses craintes s’ajoutait celle de voir réapparaître le sire d’Arguel. Ce dernier, dès qu’il avait appris la maladie de son père, s’était empressé d’accourir à Nozeroy pour y défendre ses droits; mais, malgré ses efforts, il ne parvint jamais à pénétrer dans la chambre du malade; on le voyait aller et venir, s’approcher plusieurs fois par jour de la porte, mais toujours en vain 3. Le temps passait, et les anxiétés du moribond redoublaient. Alors Pierre de Jougne résolut de mettre à l’abri le fameux trésor, à l’insu du sire d’Arguel, dont on redoutait quelque mauvais coup. Prenant sur lui toute la responsabilité /228/ de l’entreprise, l’écuyer convint avec le Prince de charger Hugues de Chalon du transport des coffres au pays de Vaud, où ils seraient plus en sûreté que dans le Jura. Aussitôt, l’on se mit à l’œuvre pour préparer le départ du jeune seigneur. Il fallait agir avec précaution, car Guillaume rôdait partout. Un soir de décembre, le jeudi premier du mois, les coffrets furent amenés et ficelés dans l’étable du château 1. On les plaça sur un mulet, tandis que Pierre de Jougne faisait répandre le bruit que Monseigneur Hugues s’en allait en pèlerinage à Saint-Claude et qu’il l’accompagnait. On montra même à un certain Jean Basset, de Nozeroy, un « pot d’argent » que les voyageurs devaient offrir à l’abbé de Saint-Claude pour obtenir la guérison du Prince. De bon matin, le vendredi 2 décembre, alors que la neige blanchissait déjà les /229/ campagnes, une petite caravane s’éloignait en hâte de Nozeroy.

En tête marchait Pierre de Jougne, monté sur un fort cheval gris pommelé; à l’arçon de la selle, on avait attaché deux sortes de boîtes, « ainsi que marchans les portent ». L’écuyer, de peur d’être reconnu, avait tiré son chapeau sur ses yeux. Derrière lui, son serviteur conduisait un mulet, pesamment chargé de quatre coffrets. Hugues venait ensuite sur un petit cheval noir; enfin, à une certaine distance, un second serviteur fermait la marche 1. Les voyageurs prirent la direction du sud-ouest, car leur intention était de gagner Orbe pour y déposer leur trésor. Après avoir fait une courte halte à Foncine 2, ils parvinrent dans la soirée à l’abbaye de Grandvaux. Leur troupe s’était augmentée en route, car les religieux qui les virent arriver affirment qu’ils étaient une dizaine. Cependant, au monastère, l’on ne se montra point trop surpris de les voir; on les attendait même; en effet, le prudent Pierre de Jougne avait fait aviser l’abbé de Saint-Claude, dont dépendait Grandvaux, du passage de monseigneur Hugues. L’abbé avait ordonné aux religieux d’offrir chaude hospitalité aux voyageurs, annonçant même son arrivée pour ce /230/ jour-là, s’il le pouvait 1. Les moines s’empressèrent de conduire le jeune seigneur dans la chambre du prélat; ils remarquèrent son air soucieux et pensif. Hugues restait assis au bout d’un banc, plongé dans de sombres réflexions et parlant peu. On lui servit en silence son repas, que son propre cuisinier lui avait préparé, puis on le laissa seul avec Pierre de Jougne, tous deux prétextant des lettres à écrire. Pendant ce temps, les chevaux étaient déchargés dans la cour; il en était temps. La malheureuse bête qui avait porté les coffrets avait subi une charge si lourde que son dos était couvert de blessures. Un serviteur dut la ramener 2 à Nozeroy, où son retour excita l’étonnement des commères de l’endroit. Tout en aidant les valets à décharger les bagages, les religieux apprirent que les voyageurs s’en allaient en pèlerinage à Notre-Dame du Puy, en Auvergne. Ce renseignement leur suffit et apaisa leur curiosité. Le lendemain, après avoir entendu la messe, Hugues et son écuyer, « le comte de Jougne », comme on l’appelait familièrement, quittèrent Grandvaux. Ils s’apprêtaient à franchir le défilé de Saint-Claude pour entrer au pays de Vaud 3. /231/ Un marchand, qui s’en revenait des foires de Genève, les rencontra entre Septmoncel et Mijoux. Il les questionna, mais sans obtenir de réponse; seul le serviteur qui marchait en queue lui cria qu’ils se rendaient auprès du duc de Savoie. Enfin, après une longue chevauchée, la caravane arriva aux portes d’Orbe, non sans avoir croisé de nombreux passants, qui la regardaient d’un air surpris 1. A Orbe, le receveur du Prince, Pierre Mauparlant, les accueillit et fit placer en lieu sûr, dans le couvent des Cordeliers, leur précieux fardeau. Le bruit courut plus tard que monseigneur Hugues en avait distribué une partie, quinze à vingt mille écus, à des gentilshommes de Savoie et du Royaume 2. En tout cas, quelques jours après, il partit pour Lyon où il dépensa ses deniers /232/ en de nombreux achats; il y vendit une grande quantité de vaisselle d’or et d’argent, à l’ébahissement des marchands de la ville, qui voyaient avec stupéfaction un jeune seigneur si bien fourni 1.

Pendant ce temps, à Nozeroy, le vieux prince d’Orange trépassait doucement. Il avait fait venir auprès de lui trois médecins, Guillaume de Salins, Philippe de Dôle et Anselme de Dijon, mais toute leur science réunie ne parvint pas à ranimer le corps affaibli du Prince, et, le samedi 3 décembre, Louis expirait, entouré de ses serviteurs et de son seul fils Louis. Il avait soixante-dix ans.

Il venait à peine de rendre le dernier soupir, que le sire d’Arguel pénétrait à Nozeroy, prêt à enlever son héritage comme le loup sa proie. Mais il se heurta à la résistance de son frère qui, lui, tenait à faire avant tout des obsèques convenables à son père. Pour les célébrer, Louis de Chatelguyon demanda à son frère de prélever sur le trésor de Nozeroy une somme de 600 livres d’or 2. Les barons des environs, fidèles compagnons du Prince, appelés en hâte, accoururent /233/ les jours suivants au château; on y vit Jean de Vergy, le sire de Ruffey, celui de Montaigu et beaucoup d’autres 1. Tous, par une froide journée de décembre, suivirent la dépouille mortelle de Louis au Mont-Sainte-Marie, où étaient inhumés déjà tant d’autres Chalon-Arlay. C’est là que le Prince avait désiré reposer 2, et qu’il s’était fait préparer son tombeau. La Révolution s’acharna sur l’antique abbaye, n’en laissa pas pierre sur pierre; à l’endroit où s’élevaient les superbes monuments des princes d’Orange, dans la chapelle qui leur était consacrée, l’on voit aujourd’hui de vertes prairies, où paissent en automne les quelques vaches du hameau de Grange-Sainte-Marie, dont le nom seul conserve le souvenir du monastère.

Outre ses trois fils, mentionnés dans les pages précédentes, le prince d’Orange laissait deux filles. La première, Jeanne, épousa Louis, comte de la Chambre et vicomte de Maurienne. Quant à la seconde, Philippine, héritière des pieux goûts de Jeanne de Montbéliard, elle alla s’enfermer au couvent des Clarisses d’Orbe, où elle mourut en 1507.

De très vives discussions ne tardèrent pas à éclater entre les enfants du défunt prince, discussions dans le détail desquelles l’on ne saurait entrer, car elles durèrent plus de cinq années. Elles avaient pour objet le testament de Louis, dont Guillaume d’Arguel /234/ prétendait contester la valeur. Les clauses en étaient nombreuses et fort importantes. Louis, confirmant l’établissement de sa chapelle de musiciens, qu’il avait instituée à Nozeroy et qui se composait de deux ténors, de deux contre et de quatre clercs, la dota d’une rente annuelle de cinq cents francs, à la condition que l’on y dirait chaque jour trois messes avec accompagnement de musique. Il fit un présent annuel de douze mesures de bon vin aux Cordeliers de l’église de Nozeroy, « parce que, disait-il, ils sont logiez ès pays de montaigne hors et bien loing de vignoble ». Son bâtard Jacques reçut une rente de quatre cents francs à prendre sur la saunerie de Salins. Au sire d’Arguel, Louis donna sa principauté d’Orange avec de nombreuses seigneuries aux environs, sa terre d’Arlay, ses droits sur le comté de Tonnerre, cinquante écus d’or et sa maison à Avignon. Louis, sire de Chatelguyon, resta en possession de la seigneurie de ce nom et conserva presque toutes les terres du prince d’Orange au Jura, de Besançon à Lons-le-Saunier. A Hugues, revinrent les domaines du pays de Vaud et de Dauphiné, avec une rente annuelle de 1000 francs. Les deux filles du prince, Jeanne et Philippine, furent dotées d’une somme d’argent, la première de quinze mille francs, la seconde de dix mille francs. Enfin, Louis était nommé héritier universel du prince d’Orange, et Girard de Plaine, président du parlement ducal, son exécuteur testamentaire.

Telles étaient les principales dispositions qu’avait prises le sire d’Arlay, quelques mois avant sa mort. /235/

Malgré ses précautions pour empêcher la dispersion de ce que cinquante années de travail avaient amassé, dix ans ne s’étaient pas écoulés que cet édifice s’écroulait et que le dicton : « Richesse de Chalon … » ne rappelait plus que le souvenir déjà effacé de la grandeur des princes d’Orange.

 


 

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CHAPITRE X

LE SEIGNEUR FÉODAL

Sommaire : Possessions de Louis de Chalon. — Ses revenus. — Son trésor. — Approvisionnement de sa table. — Il transforme ses châteaux : Nozeroy, Orbe, Echallens, Grandson, Montagny-le-Corbe. — Largesses aux églises et couvents, aux Clarisses d’Orbe, à l’abbaye de Mont-Sainte-Marie. — Ses fonctionnaires. — Pierre de Jougne. — Ses officiers de justice. — Ses goûts artistiques et intellectuels. — Appréciation générale de sa politique.

Louis de Chalon, on l’a vu, se préoccupa toute sa vie, non seulement d’entretenir ses seigneuries en leur faisant « rendre » leur maximum, mais aussi d’en acquérir sans cesse de nouvelles. Il fut en outre un « bâtisseur » infatigable.

L’énumération de ses domaines, échelonnés d’Orange en Franche-Comté, serait fastidieuse. On en trouvera la liste dans son testament. Citons seulement quelques-unes de ses terres. Au midi, Orange avec son territoire fertile, dont la perte momentanée lui fut un coup sensible, et autour, de riches villages et bourgs comme Courthezon, Gigondas, Jonquières, Caromb provenant de la succession de Marie des Baux ou acquis par achat. En Dauphiné, il possédait autour de Vienne, Auberive, Colombier, Saint-Romain, Fallavier, près de Grenoble Thys, Domène, la Pierre, /237/ au bord du Rhône la baronnie d’Anthon, de fâcheuse mémoire. Il eut de continuels démêlés avec le Dauphin au sujet de ces terres, d’un si grand prix pour lui puisqu’elles reliaient ses seigneuries du Midi à celles du comté de Bourgogne.

Au Comté, les possessions de Louis de Chalon étaient innombrables. Leur énumération complète entraînerait trop loin. Dans la région de Lons-le-Saulnier, le prince était seigneur de Bletterans et de son château, de Saint-Laurent de la Roche, de Gevingey, de Sellières, de Mirebel. Plus à l’est, c’était Nozeroy et son château princier, Chatelneuf, Vers-en-Montagne, et près de Besançon, Arguel, Montfaucon, Montmahoux, Sainte-Anne, Jougne commandant le défilé qui conduisait en Savoie, ainsi que le château de Franchatel gardant le col de Sainte-Croix, à l’intersection des chemins de Pontarlier et du Val-de-Travers.

Descendant sur le plateau vaudois, entre les lacs Léman et de Neuchâtel, on trouvait, appartenant au prince d’Orange, Orbe, Echallens, Bottens, Montagny, Belmont et la fameuse terre de Grandson, cédée en 1424 par le duc de Savoie. Louis avait acquis en 1423 du chapitre de Saint-Benigne de Dijon une maison dans cette ville, et une autre à Dôle, cédée par le duc de Bourgogne en 1432.

Les revenus de ses terres de Savoie, du Jura, de Bourgogne et du Midi étaient considérables, mais leur évaluation, même approximative, est incertaine. A vrai dire, la renommée attribuait au prince une fortune légendaire. Certain témoin des procédures de /238/ 1464 parlait d’un revenu annuel de 20 000 francs d’alors pour la seule principauté d’Orange, chiffre probablement exagéré et incontrôlable. Aux dires d’Alix de Chalon, son frère jouissait de revenus s’élevant à quatre à cinq cent mille francs, valeur du milieu du XIXe siècle. Il fallait y ajouter d’autres sommes, tel cet impôt extraordinaire levé en 1453 par Louis sur tous ses sujets pour aller combattre les Infidèles. Le projet fut abandonné, on l’a vu. L’argent rassemblé, qu’un témoin évaluait à dix ou douze mille francs, soit cent cinquante mille francs au siècle dernier, s’entassa dans les coffres de Nozeroy 1. L’expédition de Languedoc avait rapporté au Prince, dit-on, deux cent mille écus d’or.

Quant à son trésor de pierres précieuses, d’or et d’argent, on a raconté comment, quelques jours avant le décès du Prince, des serviteurs dévoués en mirent une partie en lieu sûr. Louis l’avait fait placer dans la grosse tour du château de Nozeroy appelée la Tour de plomb à cause de sa couverture. Son serviteur Nicolas Floret déposa en 1464 que certain jour, vingt-six ans auparavant, c’est-à-dire en 1438, portant une torche allumée, il escorta le Prince, accompagné de ses deux héraults, Orange et Charolois et pénétra avec eux dans la tour de Plomb. Là, il vit son maître ouvrir une arche de 8 pieds de long et de 2 ½ pieds de large et en retirer une lettre relative au prêt de 15 000 saluts qu’il avait consenti au roi de Sicile. Floret, quoique tenu à distance, aperçut au fond du coffre plusieurs rubis et diamants, ainsi que des anneaux /239/ d’or, des perles. Quand Guillaume de Chalon et son frère Louis prirent possession de ce trésor au lendemain du décès de leur père, ils comptèrent un coffret et plusieurs sacs remplis de milliers de pièces d’or et d’argent, lions des Flandres, ducats, écus de Savoie, florins de Rhin, saluts, un petit lingot d’or, des coffrets avec des reliques, ceintures, colliers de rubis, perles et diamants, un fermail d’or 1. Sept semaines avant sa mort, Louis appela son barbier et lui dit en désignant un coffret de chêne devant son lit : « Ouvre-moi cette arche et m’apporte le sac qui est noué et n’en apporte point d’autre ». Le barbier remit le sac au Prince, qui était assis sur son lit. Le vieillard plongea la main dans le sac, en retira d’abord un millier de pièces d’or qu’il mit de côté, puis compta cent livres qu’il confia à son barbier en disant : « Bien garde cela ». Quelque précaution que prit le Prince, l’existence de ce trésor n’avait pas tardé à s’ébruiter dans tout le pays. La rumeur populaire enflait exagérément ses richesses.

Les réceptions fastueuses avec lesquelles le Prince accueillait à Nozeroy les hôtes princiers qui y passaient, le duc de Bourgogne, le duc de Savoie, le Dauphin, etc., la suite brillante qu’il emmenait dans ses tournées de châteaux, dans ses voyages et ses expéditions, portèrent au loin sa réputation d’opulence. La richesse du prince d’Orange frappait d’autant plus les esprits qu’une grande partie de la noblesse du Royaume, /240/ en ce XVe siècle, était ruinée par la guerre de Cent ans.

Pourtant, Louis, tout en dépensant largement, se montrait administrateur prudent et habile. L’un de ses familiers, Philippe d’Arlay, s’étant déclaré surpris de ses dépenses, il lui révéla le secret de ses accroissements incessants. « Ha, si tu savais bien mon fait et ma conduite, lui dit-il, tu ne dirais pas ainsi. Quoi que je maisonne, je n’en débourse rien, mais paie mes ouvriers de ce qui me vient de extraordinaire tant d’eschoite (échute, succession), de mainmorte, sceaux de lettres, lot de choses vendues par mes hommes que autrement. » Un jour, il disait à son écuyer Perrot Faulquier « qu’un homme qui avait si grande chevance (possession) que lui n’était point de bon gouvernement s’il n’épargnait dix mille francs par an 1 ».

Aux foires de Genève surtout, prospères et célèbres alors, le Prince se fournissait de draps pour ses vêtements et pour ceux de sa suite, sa livrée. Le 27 juin 1434, il faisait compter 433 florins de Rhin à l’un de ses gens pour acheter des draps de Flandre à Genève 2. Ses comptes renferment des ordres impérieux à ses châtelains de délivrer les sommes nécessaires à ces achats. « Si vous y faisiez faute, mandait le Prince, il nous viendrait à un très grand dommage 3 ».

La fourniture de sa table constituait une dépense considérable. Ses châtelains du pays de Vaud, recevaient de fréquents ordres d’expédier à Nozeroy des /241/ provisions abondantes, blé, vin, cire, gelines (volailles) poisson. Le 6 juin 1425, Jeanne de Montbéliard mande à Pierre de Jougne, receveur d’Echallens, de faire préparer chez les « bonnes gens » de ses terres de Vaud tous les chapons qu’il pourra réunir 1. Le 24 décembre 1434, Pierre de Jougne fait porter à Nozeroy 191 chapons, dont il meurt une vingtaine en route, par suite du froid probablement. Quarante-cinq livres de cire sont jointes à l’envoi 2. Aussi le 17 septembre 1435, quand il s’agit de faire venir des perdrix de Savoie, le Prince recommande de les tuer quatre ou six heures avant de les charger sur le char et de les emballer soigneusement dans de grands paniers, « car si vous les faisiez tuer et puis les chargiez incontinent après, vous les gâteriez et elles ne vaudraient rien 3 ». En 1446,pour son mariage avec Eléonore d’Armagnac, la seule terre de Grandson fournit 200 poussins et 100 chapons, et ses terres de Suisse un cheval chargé de perdrix et de cailles pour les fêtes nuptiales 4. La princesse étant tombée malade, son époux ordonnait à Pierre de Jougne de lui expédier 40 chapons incontinent.

Les lacs et rivières du pays de Vaud étaient mis sans cesse à contribution, le poisson constituant une partie essentielle de l’alimentation à cette époque. « Que Girard (un serviteur) n’y fasse point de faute (d’envoyer des brochets, truites et palées), car déjà, /242/ par sa faute et à sa seureté nous sommes demeurés sans poisson cette semaine passée », mandait le Prince, non sans reproche, à son châtelain de Grandson le 26 novembre 1446 1. Sans répit, il commandait qu’on lui expédiât des brochets, des anguilles, le plus souvent « de grosses anguilles », des truites, des palées, des brochets et des poissons appelés lux et boillasses. En 1421, pour la venue du duc de Bourgogne, il réclama 400 palées 2, en septembre 1446, à plusieurs reprises, d’importantes provisions de grosses anguilles, grosses truites, grands lux pour le duc et la duchesse de Savoie. « Faites que Monseigneur soit bien fourni de bon poisson, du meilleur que vous pourrez finer (trouver) quoi qu’il coûte 3 ». Une autre fois, il s’agit de régaler de poisson plusieurs étrangers attendus à Nozeroy pour la Toussaint 4. Dans des circonstances importantes, le Prince dépêchait sur les lieux son maître d’hôtel Bernard de Gères ou le Bon de Blye, et ses serviteurs rivalisaient entre eux pour déférer à ses désirs.

Après le poisson, le gibier. En automne, Orbe, Echallens, Grandson voyaient arriver les veneurs du Prince, Thomas, le plus connu, Louis, ou bien son fauconnier Anguerant, accompagnés de leurs chiens et de faucons, conduits par des valets. Ils chassaient surtout la perdrix 5, plus rarement le sanglier. En 1442, Louis le veneur demeura quinze jours à Echallens /243/ sans trouver un sanglier et se transporta à Montagny, espérant y être plus heureux 1. Souvent aussi, le prince apparaissait en personne dans ses terres de Vaud pour s’y livrer à la chasse. Un compte du 29 novembre 1457 nous apprend que durant son séjour à Orbe, il consomma lui, sa suite et ses chiens, 400 miches de pain, 40 chanes de vin, 1 bœuf, 3 moutons, 6 volailles, pour 4 deniers de moutarde, pour 6 deniers de lard, pour 10 deniers de sel, 20 livres de cire. Trois volailles furent données aux faucons. D’Orbe on se transporta à Penthéréaz et à Grandson. Le châtelain d’Orbe eut à préparer des torches 2.

A l’époque des vendanges, nouvelles instructions du Prince à ses lieutenants. Ils auront à défrayer ses envoyés Guiot Berdrilliet ou Yvonet Ferlin et Jean Guillemet, châtelain et receveur de Jougne, ou Pierre de Jougne ou le Bon de Blye, qui viennent vendanger à Orbe un vin déjà réputé. Le 3 novembre 1440, Pierre de Jougne reçoit l’ordre de vendre incontinent tous les vins d’Orbe, de Montagny et de Grandson, à l’exception d’un muid du meilleur de chacun d’eux, réservé pour « les allées et venues » du Prince 3. Le produit de la vente devra être transmis non moins rapidement à Bletterans. Le 3 décembre 1456, une partie de la récolte est expédiée par eau à Yverdon et de là à Grandson, pour y être placée dans le grand cellier du château 4.

Pour se procurer ses approvisionnements, Louis de /244/ Chalon n’avait qu’à puiser dans les revenus de ses terres. De ce chef, ses dépenses étaient largement couvertes. Mais dès que le service du duc de Bourgogne lui accorda quelques loisirs, après qu’il eut renoncé aux expéditions risquées, il entreprit dans plusieurs de ses châteaux de la Comté et du Jura, Chatillon, Vers-en-Montagne, Bletterans, Saint-Laurent, Arlay, Lons-le-Saulnier 1, ainsi que du pays de Vaud d’immenses travaux qui l’entraînèrent à de lourdes dépenses. Il lui fallut adapter les antiques constructions des premiers sires d’Arlay, forteresses des XIIIe et XIVe siècles, aux nécessités de la défense des places et aux progrès de la vie sociale. Cette défense a été bouleversée au XVe siècle par l’invention de la poudre à canon et par l’emploi de l’artillerie et des armes à feu. L’introduction, dans ce même XVe siècle, d’un confort beaucoup plus exigeant que l’existence frugale et exclusivement guerrière des nobles du XIIIe siècle, les progrès dans le vêtement, dans le mobilier, le relèvement de la condition de la femme révolutionnent à leur tour la vie sociale et la demeure seigneuriale. Louis ne releva pas seulement les murs croulants de ses châteaux, il en transforma la plupart, en améliorant leur défense, en agrandissant leurs meurtrières pour le canon, en renforçant leurs galeries circulaires, en construisant de nouvelles tours, en élargissant portes et pont-levis, en ajoutant au fruste mobilier de ses pères des bahuts, des boiseries moins austères, en achetant en Flandre et en Italie des tapisseries pour rendre les vastes salles de pierre /245/ moins froides, en constituant une bibliothèque. Partout il eut à réédifier le « maisonnement » de ses châteaux, c’est-à-dire la charpente du bâtiment, les travaux d’intérieur, poutraisons, lucarnes, escaliers, boiseries.

C’est à Nozeroy, sa résidence habituelle, que le Prince voua d’abord tous ses soins. Au témoignage de son écuyer, Gauthier de Fallerans, il y aurait dépensé cent mille francs, valeur du temps 1. A l’exception de deux tours, il aurait entièrement reconstruit cette forteresse princière, dont l’enceinte crénelée, flanquée de huit tours, dominait le vallon de Mièges, les plateaux boisés ou dénudés s’étendant à perte de vue. Nozeroy, sous Louis de Chalon — on l’a dit au commencement de cette étude — était un bourg florissant, gardé par un château formidable, célèbre dans toute la Comté et même dans les duchés de Bourgogne et de Savoie. Alors que les comptes de la maison de Chalon fournissent le détail des réparations effectuées dans les châteaux du pays de Vaud, ceux relatifs aux châteaux du Jura, en particulier à Nozeroy, ont disparu. La perte est irréparable, quand on songe que Louis de Chalon pour embellir sa demeure, fit venir du dehors de grands artistes comme le sculpteur Jean de la Huerta et des ouvriers de Lombardie 2. L’historien Clerc a néanmoins donné une description de Nozeroy qui semble basée sur des documents d’archives et qu’il faut citer 3. « L’entrée du château était au nord; au devant, une grande place fermée par des murs /246/ autour de laquelle étaient construits les écuries, les granges, la maréchalerie et la halle. La première porte franchie, on pénétrait par une voûte profonde dans la cour intérieure, ornée d’une belle fontaine et dont les tours, bâties à chaque angle, renfermaient les viorbes ou escaliers à cent marches. Au rez-de-chaussée, à gauche, régnait la longue salle à manger qu’annonçaient des trophées de cornes de cerf attachés aux murs. La chambre du Prince avait un lit, surmonté d’un pavillon d’armes vert, bleu et blanc, avec franges, de même couleur. A l’extrémité de la grande salle, s’ouvrait la chapelle richement ornée, à côté un escalier tournant fait avec un art prodigieux conduisait à une tour carrée, au-dessus de laquelle était attachée la cloche. Louis avait placé dans ces étages supérieurs les salles de réception, la chambre d’Arras, qu’aux grands jours on tendait de soie et d’or, la chambre verte, la chambre blanche et nombre d’autres, enrichies de tapis somptueux, dont l’un, estimé six-mille écus, représentait l’histoire de l’ancien et du nouveau testament. Au fond de la cour, un beau porche ouvrait, par un escalier profond, sur les jardins, sur les vergers, la lice pour la course, les ruchers, les viviers ». Aux dires de son valet de chambre Nicolas Floret, il y avait à Nozeroy 33 lits garnis, dix chambres tendues de toile blanche, une vaisselle d’argent et d’argent doré, entre autres un cabas ou panier à fruits d’argent, 2 bassins d’argent pour se laver les mains, 4 chandeliers d’argent, 2 grands flacons à vin en argent, garnis de leur chaîne. Au lendemain de la mort de Louis de Chalon, ses fils inventoriaient à Nozeroy une /247/ riche vaisselle d’or et d’argent, tasses, brocs, pots, aiguières, salières, drageoirs, des cuillères en nacre, des hanaps, des plats de serpentine. Dans la chapelle, Nicolas Floret se souvenait d’avoir vu sur l’autel une croix d’or d’un pied et demi de hauteur, garnie de pierres et de perles, une autre d’argent, plusieurs parements d’autel de draps d’or. L’un d’eux portait un crucifix brodé de velours noir et or, un autre une annonciation, tous deux avec les armes du prince d’Orange et de Catherine de Bretagne. Il s’y trouvait aussi des vêtements de soie pour les diacres 1.

Grâce àun inventaire dressé en 1443 2, on connaît le nombre de lits et de couchettes, le détail des rideaux, coussins et courtepointes ou couvertures de parade qui les garnissaient, des châteaux de Bletterans, de la Rivière et d’Arguel, ainsi que les tentures, courtines, linges et draps, le mobilier de la cuisine, chaudières, pelles et pots de cuivre, plats et écuelles d’étain aux armes du Prince. Dans chaque château, une chambre était réservée au sire d’Arguel, le fils aîné du Prince, qui lui causa tant de déplaisir. D’après Gauthier de Fallerans, à Bletterans seulement, Louis dépensa quatre-vingts mille francs.

Quand il avait franchi le défilé de Jougne puis la gorge des Clées, le robuste donjon circulaire construit par Amédée III, sire de Montfaucon vers 1255 révélait à Louis de Chalon l’approche de sa seigneurie d’Orbe, l’antique cité romaine et rodolphienne. Après en avoir acquis une partie par son mariage avec Jeanne de /248/ Montbéliard en 1414, Louis était devenu le maître absolu d’Orbe en 1428, mais il n’attendit pas cette époque pour entreprendre la restauration du château. A en juger par ses fréquents passages et séjours — on se souvient de celui de 1415 alors qu’il allait en Terre-Sainte — Orbe constituait une de ses résidences préférées après Nozeroy. Aussi, dès 1422, le voit-on, grâce aux précieux comptes de l’époque — conservés ceux-ci — réparer le pont-levis du château, le treuil et l’« engin » qui le faisait fonctionner, réédifier la porte d’entrée, placer dans les chambres des bois de lit qu’on garnit de paille, des buffets dans la grande salle. Le 23 juin 1425, de passage à Orbe, il fait encore consolider le pont-levis, renouveler les cordes, construire des barbacanes sur les murs, réparer la toiture où l’on cloue 1000 bardeaux neufs et où l’on emploie 3000 clous. Car à Orbe, les bâtiments compris dans l’intérieur de la muraille, du donjon cylindrique et des trois tours rectangulaires, c’est-à-dire certaines chambres d’habitation, reliées par des galeries de bois, écuries, bûchers, communs, tout ce qui constituait le maisonnement, représentait un ensemble important, sujet à de constantes dégradations, parce que construit en bois et qu’en ce pays les hivers sont rudes. Là, comme à Grandson, l’effort de Louis se porta presque uniquement, pendant quarante années, sur les réparations plutôt que sur les constructions. La seule construction à notre connaissance fut en 1435 la cheminée de la cuisine du château et en 1440 la réfection de plusieurs autres cheminées. On y employa cent quartiers de pierre de Montcherand 1. En 1445 deux nouvelles /249/ cheminées de plâtre furent édifiées. Sinon, tout l’argent dépensé à Orbe est employé à boucher des gouttières sur le toit de la grande salle, sur le toit de la « vieille chambre », à placer des lames de fer blanc sur la tour carrée 1. En 1440, en 1454, on refait à grands frais toute la charpente des toits, on la recouvre de tuiles, on restaure la poutraison de la grande salle, on réquisitionne les habitants de la ville pour aller chercher le bois en forêt, la pierre à Agiez ou à Montcherand. Parfois, comme en 1444, à la suite d’une tempête qui endommage la toiture, ces mêmes habitants font présent à leur prince du bois nécessaire aux travaux et le Prince les en remercie par ses officiers Pierre de Jougne et Jacques d’Arnex. Louis a fait établir au bas de la tour carrée, près de la cuisine, un moulin à bras, indispensable en cas de siège 2. Les comptes mentionnent encore un colombier et un bouteillier, car un vignoble réputé existe à Orbe, que surplombent par endroit les murailles du château. Enfin, celui-ci a sa chapelle, desservie probablement par un des prêtres de l’Eglise Notre-Dame ou par un des cordeliers de la ville.

Aujourd’hui, de cet ensemble imposant de tours et de murailles, campées fièrement sur ce premier contrefort du Jura et dominant la plaine de l’Orbe jusqu’à Yverdon, il ne subsiste que le donjon, découronné de ses /250/ galeries, partiellement brûlé par les Bernois en 1475, une tour carrée également mutilée et quelques pans de murs formant terrasse.

Franchissant la dépression marécageuse qui s’étendait entre la vallée de la Venoge et le lac d’Yverdon, le prince d’Orange, en quelques heures de cheval, atteignait sa terre d’Echallens. Le château avait des proportions plus modestes que celui d’Orbe, et pourtant, Louis eut à le réparer continuellement. Une tour circulaire, dont il reste un fragment, flanquait en son milieu la muraille de défense au nord, dans la direction d’Orbe. Une autre tour, aujourd’hui disparue, défendait l’entrée du château vers le bourg. Une troisième tour, celle-là carrée, complétait la défense. Comme à Orbe, les communs comprenaient des écuries, des galeries de bois, un moulin, qui tombaient en ruine quand Louis en prit possession. Ses premiers soins furent consacrés à la réfection de la charpente du toit, à la construction de lucarnes, de cheminées en plâtre et en tuf. En 1444, il n’eut pas moins de 9 lucarnes à établir auxquelles travaillèrent 133 de ses sujets d’Echallens. Il refit alors aussi plusieurs planchers, sous lesquels on plaçait du foin pour se défendre contre le froid. Au mois d’octobre 1445, une terrible tempête s’abattait sur Echallens et renversa une partie de la tour ronde. Louis accourut constater le dommage, et dès lors, pendant les années suivantes, non seulement il rebâtit la tour, mais il procéda de 1455 à 1460 à d’importants travaux, mise en état de sa « chambre vieille », de la cuisine, des greniers, construction de deux escaliers ou viorbes, dont l’un au /251/ bout de la salle de la chapelle, réfection de la porte, du pont-levis, de la charpente des deux grandes salles du château. Comme les habitants d’Orbe, ceux d’Echallens témoignèrent en 1445 leur loyauté au Prince par un don de 80 livres, monnaie de Savoie. Enfin, réparation au puits sur lequel on place une poutraison et un treuil neuf. Les comptes mentionnent un oratoire à côté de la chapelle. Quand il jugea les travaux assez avancés, Louis envoya son fidèle Pierre de Jougne à Fribourg demander au maître de l’artillerie un ouvrier expert en bombarde. Puis, une année avant sa mort, il fit transporter des meubles de son château de Vers dans le Jura à Echallens, projetant d’aménager sa chambre et celle de ses enfants en plaçant aux murs des tentures. Eut-il encore la force de venir dans cette terre lointaine ? On l’ignore 1.

Pour en avoir âprement disputé la possession au duc de Savoie, Grandson représentait pour le Prince une terre de grand prix. Le château dont il prit possession en 1424 était une puissante forteresse du XIIIe siècle. L’une des façades, flanquée de 3 tours circulaires, baignait dans le lac. L’autre, défendue par 2 tours semicirculaires, regardait le Jura et se trouvait séparée de la ville par un fossé. Dès sa prise de possession, Louis se mit à consolider murs et toitures. La plus grande pièce du château, la « salle » ou la grande salle se trouve probablement au nord-est, au premier étage surplombant le lac éclairée par trois grandes baies. Les poutres du plafond, reposent sur 15 robustes corbeaux de pierre qui sont l’œuvre de Louis de Chalon. Car, dès /252/ 1426, les comptes relatent la réfection de la charpente et de la poutraison. Les travaux se poursuivirent l’année suivante. On construit un échafaudage pour soulever la charpente. 289 hommes de la terre apportent le sable « par courtoisie » de la porte du château dans la salle. En 1428, on édifie ou répare les cheminées, la pierre vient de la carrière de Sauges près de Vaumarcus, tandis que celle employée pour les murs est de la molasse d’Yvonand. De 1434 à 1435 nouveaux travaux dans la salle, travaux qui doivent avoir été importants car on bâtit un « engin » (échafaudage). Les comptes mentionnent les civières pour porter la pierre réfractaire d’Yvonand destinée aux cheminées, les cordes, paniers, « sellions » à mortier, tinettes pour l’eau, les centaines de tuiles amenées de Montcherand et d’Orbe par eau. De Montcherand provient aussi la pierre employée à poncer les fenêtres de la salle en 1437, auxquelles on travaille encore en 1439, et cette fois en se servant de pierre réfractaire d’Yvonand. C’est en cette même année que peut avoir été renouvelée la poutraison de la grande salle pour laquelle 100 hommes de corvée allèrent quérir du bois dans la montagne à Bullet. Des pierres et des débris étant tombés dans le lac en compromettant probablement la défense du château, 26 hommes de corvée les enlevèrent. On voit encore dans cette partie voisine du lac une charmante tourelle, la « tornalette ». Elle baignait dans l’eau et était reliée au château par un mur crénelé. Si Louis ne la construisit pas entièrement, il la réédifia certainement vers 1446. Partout s’exerçait son activité fiévreuse. Tour à tour les toitures de la /253/ chapelle, de la « bouteillerie », de la petite salle, de la salle de l’artillerie, les lucarnes du toit sur la grande salle, les bancs de celle-ci, le plancher et le plafond de la chambre du Prince furent refaits en totalité ou en partie. Des gouttières furent placées pour empêcher l’eau de pluie de détériorer les hautes murailles. Les marches des deux portes d’entrée, usées par les siècles, furent renouvelées. Le mobilier, bois de lit, tables, bancs, fut complété. En 1444, 48 plats et 12 pots d’étain sont apportés d’Orbe. Dans la chambre du Prince, les comptes relatifs à un travail de plâtrage mentionnent du parchemin mêlé au plâtre ainsi que de la mousse et de la terre placée dans les intervalles du plancher. Les tours sont soigneusement consolidées, les meurtrières sont agrandies, et sur le sommet de l’une d’elles, d’où la vue s’étend grandiose sur la nappe du lac de Neuchâtel, sur les doux paysages du Vully, sur le sombre Jura qui ferme l’horizon au nord, d’où par temps clair on aperçoit les tours d’Estavayer, le Prince, en 1439 a fait placer une flèche et une banderolle de fer blanc qui porte fièrement au loin ses armes et qui brille au soleil. Les tempêtes de 1444 et 1445 qui ont occasionné de grands dégâts à Echallens et à Orbe n’épargnent pas Grandson où le toit de la grande salle s’écroule en partie au mois de mai 1445. Et, comme à Orbe, on creuse un puits, on édifie un moulin à bras. En 1458, quand il s’agit d’en imposer au comte de Neuchâtel, le prince d’Orange fait construire à Grandson quatre galbes par des ouvriers lombards, ainsi qu’une enceinte palissadée sur le lac en guise de port. La chapelle contenait un vitrail aux armes de /254/ Jeanne de Montbéliard. Le vent le brisa et c’est Germain le verrier d’Orbe, qui le répara en 1460 1. Bref, à la mort du Prince, Grandson est une forteresse redoutable qui fera ses preuves seize ans plus tard lorsque Charles-le-Téméraire sera aux prises avec les Confédérés.

A mi-chemin environ entre Orbe et Grandson, Louis de Chalon possédait un château, Montagny-le-Corbe, moins puissant que Grandson mais dont la possession lui tenait à cœur. Dominant la rivière de la Brinaz, le château se composait d’une enceinte flanquée de plusieurs tours, dont l’une à cinq pans avait des assises formidables. Il n’en reste que des ruines, les Suisses l’ayant brûlé en 1475. La vue de la terrasse s’étend sur la plaine de l’Orbe, le gros de Vaud et les Alpes. Au débouché des défilés de Jougne et de Sainte-Croix, Montagny constituait un point d’appui sérieux. Aussi Louis y dépensa-t-il, d’après une des enquêtes déjà mentionnées, 500 francs valeur du temps, pour sa mise en état. En 1425, il s’informait auprès du châtelain du nombre d’arbalètes et de caisses à flèches se trouvant au château, pour en envoyer au besoin. En 1442 et 1453, il fit construire ou réparer deux cheminées, deux fenêtres à croisillons, et comme ailleurs, il fallut avant tout remplacer les bardeaux de la toiture sur la grande salle, ceux de la galerie de défense, renouveler les poutres de la charpente, celles du pont-levis, les carreaux de terre cuite de la chambre dite la « grand poêle » 2. /255/

Louis de Chalon profitait de chacune de ses visites dans ses châtellenies vaudoises pour inspecter minutieusement ses résidences. A Orbe, le monastère des Clarisses fondé par Jeanne de Montbéliard était également l’objet de ses soins. Les « dames cordelières », le père confesseur, les « reclus », frère Aubin et l’ermite des gorges recevaient du froment, du vin, de la cire, quelques sols en aumône 1. Jeanne de Montbéliard possédait dans l’abbaye sa chapelle, dont elle assurait l’entretien. En outre, elle supportait la charge annuelle de 50 livres de Savoie pour la messe anniversaire de Jean de Montfaucon célébrée à la cathédrale de Lausanne 2. Elle et son époux rivalisaient de charités envers la religion. Ils reconstruisirent l’église collégiale de Nozeroy, ils enrichirent le trésor de l’abbaye de Saint-Claude de calices et de lampes d’argent massif, d’une chasuble de drap d’or et de velours rouge à leurs armes, dans l’église ils munirent l’autel de Chalon de draps de toile 3, ils entretinrent l’église de la Rivière 4, ils octroyèrent une pièce de terre à la confrérie du Saint-Esprit à Jougne 5. Pour mériter son pardon d’avoir saccagé dans une de ses expéditions, un couvent de frères mineurs, Louis bâtit un couvent /256/ de cet ordre à Nozeroy en 1461 1. Tandis que Jeanne faisait acheter à Lausanne des fourrures de marte, elle chargeait son receveur d’Orbe de lui acquérir à la foire de Genève une croix d’or, la plus belle qu’il pût trouver, pour la léguer probablement à son couvent préféré 2.

Mais c’était à l’abbaye cistercienne du Mont-Sainte-Marie, construite dans un frais vallon entre les lacs de Saint-Point, et de Remoray, qu’allaient surtout les largesses des sires de Chalon. Une vaste église, avec de hautes voûtes en croisées d’ogives, venait d’y être achevée. Un cloître de 32 colonnes s’y adossait. Ouvrant sur le transept de l’église, une chapelle, consacrée le 6 juin 1429, renfermait les tombeaux de 11 princes et princesses de la maison de Chalon. Déjà, lors des obsèques de son père, Louis avait gratifié les religieux de l’abbaye de 6 muids de vin 3. Il y vint à plusieurs reprises, en particulier en 1443 et 1444, pour y surveiller la construction du tombeau commandé au sculpteur aragonnais Jean de la Huerta. Le monument se composait en fait de trois tombeaux à deux gisants chacun. Des lions et des petits chiens ornaient leurs pieds. Deux anges tenaient une palme sur leurs têtes. Celles-ci reposaient sur des coussins. Au-dessus, dans les entrecolonnements du socle, de la Huerta avait sculpté seize pleurants, semblables aux admirables statuettes des tombeaux des ducs de Bourgogne à Dijon 4. Pour payer les maçons, le Prince faisait vendre /257/ 5 muids de froment d’Echallens, un demi-muid de vin 1. Quand mourut Eléonore d’Armagnac, il fit bâtir un autel et fonda une messe quotidienne à sa mémoire 2. En 1460, il ordonnait de transporter d’Echallens au Mont-Sainte-Marie dans un char bien « empaillassié » des tuiles cornières pour sa chapelle. La Révolution a détruit ces riches monuments, jeté bas église et cloître. Il n’en reste que des ruines informes envahies par l’herbe 3.

Un domaine féodal aussi étendu était comparable, toutes proportions gardées, à celui d’un des grands feudataires du Royaume, duchés de Bretagne, de Bourgogne, de Lorraine. Son administration exigeait un personnel considérable. Louis de Chalon le recruta avec soin, le tint en haleine par des déplacements continuels. Témoins de l’activité débordante de leur maître, baillis et châtelains, gens d’armes et serviteurs devaient rivaliser entre eux d’émulation. « Prenez une très bonne diligence, en ce ne faites faute, ne doutez encourir notre indignation », écrivait souvent le Prince à ses officiers, après leur avoir donné ses ordres. Ce n’était point là seulement une formule scripturaire mais un appel significatif.

Le personnel comprenait d’une part les agents en résidence à Nozeroy, de l’autre ceux qui administraient les diverses terres dans la Comté, le pays de Vaud, en Dauphiné et au Midi.

Le personnage important à Nozeroy est le trésorier, /258/ aidé de ses clercs, les « gens de nos comptes », dit Louis. Ils encaissent les revenus en numéraire et en nature apportés chaque année par les receveurs des châtellenies, revisent les comptes, en donnent décharge. Parfois ils se rendent sur place et procèdent à une inspection inopinée 1. Pour sa maison, Louis de Chalon a un garde « des deniers de la défense de son hôtel ». En 1445, c’était le prêtre Pierre Artaulx 2. Au pays de Vaud, Louis est représenté par un commissaire et par un procureur général. Le second est juge d’appel pour les châtellenies 3. Peut-être fonctionne-t-il comme président de la cour qui siège à Echallens 4.

Le personnel de la « cour de Nozeroy », qu’on a dit calquée sur celle des ducs de Bourgogne, se compose en outre d’écuyers, d’un secrétaire, d’un échanson, d’un écuyer tranchant, d’un receveur de la cire, d’un ou plusieurs hérauts d’armes, chargés des proclamations et messages et de régler les fêtes de chevalerie — en 1426 il se nommait Orange — de dames et demoiselles d’honneur, de pages, de médecins, de secrétaires, d’un capitaine général des châteaux, d’un gruyer général, de chevaucheurs, de sergents, d’arbalétriers, d’archers — en 1435 un Ecossais — de panetiers ou fornachons, d’un fruitier, d’un maréchal, d’un barbier /259/ et de valets attachés à la personne du Prince, des princesses et des enfants 1. Le maître d’hôtel, le Bon de Blye fut le serviteur dévoué de Louis. Il lui confia des missions délicates. Pour s’être opposé aux agissements et aux prodigalités de Guillaume de Chalon, le Bon disparut tragiquement, assassiné peut-être sur l’ordre de l’irascible sire d’Arguel 2.

A la tête de ses domaines, le prince d’Orange avait des baillis, des châtelains et des receveurs 3. Le châtelain était avant tout le commandant du château. Le bailli 4 rendait la justice, encaissait les revenus, recevait ses maîtres à leur passage, ainsi que les /260/ voyageurs de marque. Le 24 novembre 1442, le châtelain d’Echallens, Pierre de Jougne, l’un des serviteurs préférés du Prince, accueillait le pape Félix V à son retour de Bâle, accompagné d’une suite de 73 chevaux et dépensait pour lui 86 pains, 118 pots de vin, 4 fromages, 6 douzaines d’œufs 1. Quatre ans plus tard, en plein hiver, dans le même bourg, Pierre livrait à son maître et à sa suite rentrant de Genève 2 muids et 10 coupes de froment, 8 muids et 10 coupes d’avoine, 71 chapons et lui remettait une somme de 24 livres 7 sols en avance sur ses comptes 2. Fils d’un ancien serviteur de la maison de Chalon, Pierre de Jougne, le « comte de Jougne » comme on l’appelait, avait d’abord rempli les fonctions d’échanson à Nozeroy. Dès 1429 et pendant plus de quarante ans, il géra la seigneurie d’Echallens et par intervalles celles d’Orbe et de Grandson, où il devait capituler en 1475, vaincu par les Suisses. Marié à Provence, demoiselle d’honneur d’Eléonore d’Armagnac, il fut l’exécuteur diligent et infatigable des volontés de son maître. Qu’il s’agît d’apporter à Nozeroy des revenus dont l’arrivée était attendue avec impatience, de faire des achats d’armes et de vêtements à Fribourg et à Genève, d’escorter dans cette ville le beau-frère de son maître, Charles d’Armagnac, pour toucher les intérêts d’une obligation, d’accompagner à Nozeroy au plus fort de l’hiver, en affrontant les rigueurs d’un voyage en traîneau, le représentant du duc de Savoie, le procureur de Vaud, d’aller défendre à Neuchâtel et en Savoie les /261/ droits du Prince, d’aller plaider devant le bailli de Vaud à Moudon, de partir en mission pour Thonon auprès du prince de Piémont, Pierre de Jougne était désigné de préférence à tout autre 1. Il s’acquittait avec zèle et succès de ses missions. Ses gages de deux ans se montaient à 80 livres, plus 6 muids de froment, 12 muids d’avoine et peut-être une part sur les dîmes et amendes. Comme ses collègues, il avait, au cours de l’année, à encaisser pour son maître les revenus de la mestralie (justice inférieure et perception), des péages, des tailles et censes d’argent, des corvées de charrois, de labours, de fauchages, de pavements, rachetables en argent, des ventes et dîmes de froment, d’avoine, de cire, de vin, de la ferme des fours et moulins 2.

Aux responsabilités de l’administrateur s’ajoutaient celles du justicier. Le bailli, le châtelain et parfois le métral jugeaient séparément ou constitués en tribunal les causes peu importantes. Pour les cas requérant une science juridique plus considérable, le Prince déléguait son procureur. Georges Lancremant, ancien bouteillier du Prince, fut jugé, mis à la question et exécuté à Orbe par le bourreau de Nozeroy en 1452 en présence du Bon de Blye et de Pierre de Jougne 3. Du 13 au 17 août 1456, fut jugé à Grandson devant un tribunal composé du procureur et d’un commissaire /262/ (juge d’instruction) du Prince, du bailli d’Orbe, des châtelains des autres terres vaudoises, de bourgeois d’Orbe et d’Yverdon au nombre de 17 personnes, le nommé Henri Saffy, voleur et meurtrier. Il fut exécuté le 21 août 1. En 1428 on appréhendait au bourg de Bletterans dans le Jura un homme qui avoua avoir empoisonné les puits et fontaines de plusieurs localités. La procédure n’a malheureusement pas été retrouvée, mais le châtelain de Montagny vit arriver certain jour d’avril le chevaucheur du Prince, Guillaume Reclus pour vider le puits et les fontaines du château et les réparer 2.

La venue dans les terres du Prince de l’inquisiteur de la Foi de Lausanne pour les cas d’hérésie et surtout de sorcellerie devint de plus en plus fréquente au cours du XVe siècle. En 1447 et 1448, le redoutable enquêteur accompagné du vicaire de l’évêque de Lausanne, du procureur de la Foi et de leurs clercs séjournent successivement à Orbe, à Echallens, à Grandson et poussent même jusqu’à Nozeroy pour juger des hérétiques 3. Le procès de Guillaume Guichat de Bonvillars jugé à Grandson les 19 et 20 janvier 1456 attira dans cette ville l’inquisiteur dominicain Raymond de Rue 4, le procureur de Georges de Saluces, évêque de Lausanne, et leur suite au nombre de cinq personnes. Après /263/ une captivité au château qui dura huit semaines et quatre jours, l’hérétique fut exécuté par le bourreau de Lausanne le 18 février 1. En 1459, Nycel Viret alias Aubertier, d’Orbe, était brûlé pour hérésie. Pierre de Jougne et Jean Bonnart, procureur du Prince, procédaient à l’inventaire de ses biens le jour de la Saint-Silvestre 2. Moins d’un siècle plus tard, l’établissement de la Réforme mettra fin au redoutable tribunal.

Les relations de Louis de Chalon avec ses sujets, entre autres avec ceux du pays de Vaud furent cordiales en général et même empreintes de ce caractère patriarcal fréquent alors, même entre grand seigneur et vilain. Louis acceptait de servir de parrain à l’enfant d’un habitant d’Echallens 3. En retour, en cas de nécessité pressante, il faisait appel à la fidélité de ses vassaux, envoyant par exemple son maître d’hôtel le Bon de Blye à Orbe le 6 septembre 1462, prier les gouverneurs et habitants de l’aider à subvenir au voyage de son fils Louis de Châtel-Guyon auprès du futur duc Charles-le-Téméraire en Flandre 4. La nourrice d’une de ses filles était une femme d’Orbe que l’on payait avec quelques mesures de froment, et quand lui naquit son fils Jean, c’est encore le receveur d’Orbe que Jeanne de Montbéliard chargea d’aller porter une offrande de cire à Notre-Dame de Lausanne pour l’enfant 5.

La vie d’un homme de guerre et même, celle d’un /264/ grand seigneur féodal au XVe siècle donnait-elle quelque place aux récréations intellectuelles et artistiques ? En ce qui concerne ces dernières, on a vu que Louis de Chalon, en confiant à un sculpteur renommé la construction de son tombeau, était sensible à l’art. L’activité intellectuelle, le goût de la lecture ne lui furent pas étrangers non plus. Il y avait à Nozeroy, dans la chambre du Prince, une bibliothèque, modeste si on la compare aux nôtres, mais non négligeable en ces années qui précédèrent l’invention de l’imprimerie. On y trouvait des Bibles, dont une en français, les romans de Lancelot du Lac et de Jean de Mandeville, des livres d’astrologie, dont ceux de Haly Habernagel, le livre de fauconnerie de Jean de Francières. Louis de Chalon était membre de la Cour amoureuse du roi Charles VII, fondée à Paris le 14 février 1401 par quelques grands seigneurs et faite pour honorer le sexe féminin et cultiver la poésie 1.

 
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Au moment de clore cette étude, essayons d’en dégager les traits généraux.

Louis de Chalon était entré à vingt-trois ans déjà dans la vie politique. Le traité d’Arras de 1435 qui mit fin pour un temps à la lutte impitoyable du duc de Bourgogne contre le roi de France modifia entièrement le cours de cette longue existence de soixante-treize années. On a vu comment le prince d’Orange louvoya longtemps, entre l’un et l’autre parti. Ce n’est qu’après /265/ deux cruelles leçons, l’expédition d’Anthon et l’affaire du vicariat d’Empire, qu’il adopta une attitude plus ferme et plus conforme à ses véritables intérêts. Dès lors, le Prince se consacra avec persévérance et bonheur à l’administration de ses terres et accrut d’année en année sa fortune et sa puissance. La France se remettait lentement des épreuves sanglantes de la guerre de cent ans. Lentement aussi elle se relevait des désastres de la lutte entre Armagnacs et Bourguignons. Le redressement admirable dû à Jeanne d’Arc portait ses fruits. Ayant fait sa paix avec Charles VII, puis avec le duc de Bourgogne, Louis de Chalon connut une vieillesse relativement paisible.

De cette marche de Franche-Comté qui ne veut lier son sort ni à l’Empire ni à la France, il est le digne représentant par sa ténacité, son labeur immense, la sérénité qu’il oppose aux pires revers, mais il est aussi le dernier « grand Chalon », le dernier rejeton de l’illustre famille qui depuis Jean l’Antique ne cesse de gagner en puissance. Après lui, commence la décadence. Douze ans plus tard, ses fils perdront les précieuses terres de Vaud, acquises au prix d’un si rude labeur et dont s’empareront Bernois et Fribourgeois.

Quand il meurt, la féodalité est à son crépuscule. Louis de Chalon sera un des derniers grands féodaux qui parlent d’égal à égal avec le roi de France et l’Empereur. Le soin qu’il prend à faire sa paix avec Charles VII témoigne de son sens politique. Le pouvoir du roi de France se fortifie d’année en année. Le roi a réussi à créer une armée permanente sur laquelle il peut s’appuyer. Louis XI triomphera définitivement /266/ de la noblesse. Le duc de Bourgogne avait été longtemps le véritable chef de la féodalité. Bientôt il s’inclinera à son tour pour disparaître avec Charles-le-Téméraire dans l’étang glacé de Nancy.

Les hauts et solitaires plateaux du Jura où s’est retiré le prince d’Orange, qu’il a parcourus en tous sens, où il a fait défricher forêts et taillis, dont il a partagé la rude vie, les hivers de six mois, vont aussi connaître la décadence après lui. Les Jurassiens, ayant perdu contact avec leurs voisins de la plaine vaudoise, rentreront dans leur isolement.

Quant aux anciens sujets vaudois de Louis de Chalon, une ère nouvelle s’ouvrira incessamment pour eux. L’expulsion du duc de Savoie du pays de Vaud sous la poussée des Suisses va commencer et se poursuivre, continue, par étapes, pendant un demi siècle, pour aboutir en 1536 à la conquête complète du pays par les Confédérés. Et cette conquête aura été si habilement préparée et effectuée que le souvenir des Bourguignons, des Francs-Comtois et des Savoyards disparaîtra du pays de Vaud avec une rapidité qui surprend l’historien.

 


 

Tableau généalogique de la Maison de Chalon, branche d’Arlay

Tableau généalogique
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PIÈCES JUSTIFICATIVES

 


 

I

Pont-de-Sorge, 10 janvier, 1398. — Dispense de parenté accordée à Louis de Chalon et à Jeanne de Montbéliard par le pape Benoît XIII pour leur mariage.

Benedictus episcopus, servus servorum Dei, dilecto filio nobili viro Ludovico de Cabilone, domicello, et dilecte in Christo filie, nobili mulieri Johanne de Montebelgardo, domicelle, Bisuntinensis diocesis, salutem et apostolicam benedictionem. Sedis apostolice benignitas graciosa indulta sibi desuper plenitudine potestatis, quam non ab homine obtinet sed a Deo, erga personas presertim generis nobilitate conspicuas, Deo et Sedi eidem devotas, interdum utitur prout personarum locorum et temporum qualitate pensata id conspicit salubriter expedire. Hinc est quod nos, supplicationibus pro parte parentum consanguineorum et amicorum nostrorum communium, nobis in hac parte porrectis inclinati, certis ex causis ad hoc nos racionabiliter inducentibus vobiscum ut vos qui nondum septennes existitis quique de baronum ac comitum genere traxistis originem, impedimento quod ex tercio consanguinitatis gradu, quo simul juncti esse noscimini provenit nonobstante, cum ad etatem legitimam perveneritis matrimonium invicem contrahere et in eo postquam contractum fuerit, remanere libere et licite valeatis apostolica auctoritate de specialis dono gracie dispensamus prolem ex hujusmodi matrimonio suscipiendam legitimam nunciantes. Nulli ergo omnino hominum liceat hanc paginam nostre dispensationis infringere vel ei ausu temerario contraire. Si quis autem hoc /268/ attemptare presumpserit indignationem omnipotentis Dei et beatorum Petri et Pauli apostolorum eius se noverit incursurum.

Datum apud Pontemsorgie Avinionensis diocesis iiij idus januarii, pontificatus nostri anno quarto.

Au bas : Jo[hannes] de Neapoli.
Sur le repli : R[egistrata]. Grat[is].
Hu[go] de Dompnapia.
Au haut, à droite : P. Matisco.
Original, parchemin. (Les lacs de soie et la bulle manquent.) Archives du Doubs, E 1333.

 

II

Orbe 5 août, 1415. — Certificat de Louis de Chalon, pour dépenses faites à Orbe en partant pour la Terre-Sainte.

Nous, Loys de Chalon, seigneur d’Arguel et de Montfacon, facons savoir à touz que nous veinmes à Orbe a disner, le Ve jour d’aoust, asanble nostre compaignie en alant au Saint voiage en Jerusalem. Sy nous a fait a avoir Jehan Bernay, receveur du dit lieux, tant pain, vin, chers, pouille, saul et autres choses, bourcherie et forge, la somme de trenz frans, cinqs deniers, laquelle nous li promectons de faire passer en ces premiers comptes qu’il feray a monseigneur ouz a sez gens.

Donné à Orbe le Ve jour du moy d’aoust courant mil IIIIc et quinze.

Original, papier, scellé en placard d’un sceau rond (même que pièce No III).
Fonds Chalon. E 1238. Arch. du Doubs.

 

III

Orbe, 20 décembre 1415. — Certificat de Louis de Chalon pour dépenses faites à Jougne et à Orbe, en revenant de la Terre-Sainte.

Nous, Loys de Chalon, segneur d’Arguel et de Montfacon, /269/ facon savoir a tous, que nous veinmes a geite à Orbe, le vanredi XXe jour de decembre, a retourner du Saint Sepeure. Se nous fit avoir Jehan Bernay, receveur du dit lieux, pour vin : ung setier demi et deulx pot, et a sourplux en argent pour tout le demorant, tant pain, poisson, pour le diner à Jung[ne] comme pour provision de poisson pour le lendemain, et pour atache de chevalx, et pour torche et belle chere et atre chosse, quatre escuz, nuef gros, quatre denier.

Donné soubz nostre seel, à dit lieux, le vanredi dessus dit courant mil IIIIc et quinze.

Laquelle somme dessus dite, nous li promectons faire passer en sez premier compte qu’il feray a monseigneur ouz a sez gens.

Item, ait encor fait avoir le dit receveur pour le couhier d’un chevalx pour Guillaume Michelat, qui s’en alit devant à Orbe, pour ce, demi frans.

Donné comme dessus.

Signé : Homegrey.

Original, papier, scellé en placard d’un sceau rond sur cire rouge de 38 mm. Une bande entre deux grénetis. Dans le champ un écu écartelé Chalon et Oranges (un cor enguiché) soutenu par deux lions assis; timbre : un buste d’homme sauvage.
Lég. : S. LOYS. DE. CHALON SEIGNEUR D’ARGUEL. ET. D : MONTFAUCON.
Fonds Chalon E 1238. Arch. du Doubs.

 

IV

Dijon, 1er mars 1420. [n. st.]. — Mandement de Marguerite, duchesse de Bourgogne à son conseiller Girard Basan, de procéder à urne enquête au sujet de la conduite du prince d’Orange à Jougne.

Marguerite, duchesse de Bourgougne, comtesse de Flandres, d’Artois et de Bourgoingne, palatine, dame de Salins et de Malines, à nostre ami maistre Girart Basan, conseillier de nous et de nostre très chier et très amé filz, le duc de /270/ Bourgoingne, salut. Il est venu à nostre congneissance que nostre cousin le prince d’Oranges, seigneur d’Arlay, a par concession impérial fait forgier et ancorres fait de jour en jour monnoye à Joingne et aussi cryer et publier foires franches au dit Joingne, pareillement que à Genèves, en entreprenant contre les drois, souverainetez et noblesses de nostre dit filz ou prejudice de lui et en la diminucion de ses dis drois, souverainetez et noblesses, attendu que le dit lieu de Joingne est nuement assis en son pais du conté de Bourgoingne qui sont choses qui ne se doivent aucunement tollerer ou passer soubz dissimulacion quelconque; pourquoy nous, ces choses considerées, vous mandons et commectons pas ces présentes, tant en nostre nom comme nous faisant force de nostre dit, que vous vous informez diligemment et secretement des choses dessus dicte par toutes les meilleurs voyes et manieres que vous pourrez et l’informacion que vous en ferez, nous rapportez feablement pour y faire ce qu’il appartiendra. De ce faire vous donnons povoir, mandons et commandons à tous les justiciers, officiers et subgez de nous et de nostre dit filz que a vous en ce faisant obeissent et entendent diligemment. Donné à Diion, le premier jour de Mars, l’an de grâce mil quatre cens dix neuf.

Au bas : Par madame la duchesse, Glebois.
Original, parchemin, scellé sur simple queue (le sceau manque).
Archives du Doubs. B. 458.

 

V

Presbourg, 13 juin 1421. — Diplôme de Sigismond, roi des Romains, confirmant à Louis de Chalon tous les privilèges concédés à lui ou à ses aïeux par les empereurs ou rois des Romains.

Sigismundus, Dei gratia, Romanorum rex semper augustus ac Hungarie, Bœmie, Dalmacie, Croacie etc. Notum facimus, tenore presentium, universis : ad hoc /271/ summi dispensatione presidii imperialis monarchie obtinuimus principatum, ad hoc sacri romani imperii suscepimus diadema, ut, si ad alia extrinseca continua sollicitudo nos provocet : ad ea tamen, que statum felicem et quietum incrementumque jurium, gratiarum et libertatum nostrorum et imperii sacri principum fidelium promovent, tanto intendamus liberius, quanto nostrum, pre ceteris mundi principibus, solium magnificentius erexit celestis providentia creatoris. Sane, pro parte illustris Ludovici de Cabilone, principis Aurayce, comitis Gebennensis et domini de Arlato, consanguinei nostri carissimi, oblata celsitudini nostre supplex petitio continebat quatinus, de solite nostre benignitatis clementia, sibi universa et singula privilegia, libertates, gratias, emunitates, dignitates, indulta, donationes, concessiones, jurisdictiones et jura suis progenitoribus ac eciam sibi a divis Romanorum imperatoribus sive regibus ac etiam a nobis datas et concessas, seu data et concessa, ratificare, approbare, innovare et confirmare gratiosius dignaremur.

Nos igitur, qui nostrorum et imperii sacri principum utilitates, honores et profectus promovere desideramus, assidue predictis supplicationibus ut pote rationabilibus atque iustis favorabiliter inclinati, prefato Ludovico universa et singula privilegia, litteras, gratias, immunitates, libertates, dignitates, indulta, donationes, concessiones, jurisdictiones et jura prefatis suis genitoribus et sibi a romanorum imperatoribus sive regibus ac etiam a nobis datas seu concessas et data seu concessa in omnibus suis tenoribus, punctis, clausulis, articulis, sententiis, et expressionibus in quantum rite et rationabiliter processerunt, ratificavimus, approbavimus, innovavimus et confirmavimus, ratificamus, approbamus, innovamus et auctoritate romana regia virtute presentium gratiosius confirmamus, decernentes et volentes expresse ea omnia et eorum quodlibet, perpetuis temporibus inviolabilis firmitatis robur obtinere et perinde valere ac si de verbo ad verbum eorum et cuiuslibet ipsorum tenores presentibus forent inserti supplentes nichilominus omnem defectum, si quis in premissis ratione solempnitatis obmisse dubia interpretatione /272/ sententiarum aut verborum seu alio quovismodo compertus fuerit de prefate romane regie plenitudine potestatis, nostris tamen et imperii sacri ac aliorum quorumlibet juribus semper salvis. Presentium sub nostri sigilli appensione testimonio litterarum.

Datum Posonii anno domini millesimo quadringentesimo vigesimo primo xiii die Junii, regnorum nostrorum anno Hungarie etc. trigesimo quinto, Romanorum vero undecimo et Bœmie primo.

Sur le repli : Ad mandatum domini regis Franciscus prepositus Boleslaviensis.
Original, parchemin, scellé sur bande soie verte. (Le sceau manque.)
Trésor des Chartes. B 36. Arch. du Doubs.

 

VI

Presbourg, 14 juin 1421. — Diplôme de Sigismond, roi des Romains, nommant Louis de Chalon vicaire impérial en Bourgogne, en Dauphiné et dans le comté de Provence.

Sigismundus, etc. Notum facimus etc. Incumbentibus nobis assidue varietatibus negociorum innumeris dum pro felici statu rei publice mens nostra diversi modi distrahitur, dignum estimamus fore et necessarium arbitramur, ut, qui tot regionibus celitus nobis commissis pro inde gubernandis personaliter adesse non possumus, viros fide et circumspectione probatos in partem nostre sollicitudinis statuamus. Ne itaque partes imperii nobis absentibus fructu necessarie nostre providencie careant, ecce quod de immota fidei legalitatis et devocionis constancia, probitate morum, virtute et magne circumspectionis industria illustris Ludowici de Cabilone, principis Aurayce, comitis Gebennensis et domini de Arlato, consanguinei nostri carissimi plenam et indubitatam fiduciam obtinentes ipsum in parte nostra sollicitudinis evocatum, animo deliberato, maturo principum, procerum, comitum et nobilium nostrorum et imperii sacri fidelium communicato consilio, ex certa nostra sciencia, /273/ de plenitudine nostre romane regie potestatis, fecimus, creavimus, constituimus et ordinavimus, facimus, creamus, constituimus atque meliori modo potestate et forma quibus melius possumus, ordinamus nostrum et imperii sacri vicarium generalem, actorem, factorem negociorum nostrorum gestorum, vice, auctoritate, atque nomine nostris et imperii sacri, in omnibus et per omnia universaliter universis et singulariter in singulis terris Burgundie, Delphinatu, Viennensi, Valentinensi, Avignionensi et comitatu Provincie, territoriis, civitatibus, communitatibus, districtibus, dominiis atque terris, tam in terris, aquis, quam in mari constitutis, quibuscumque specialibus titulis vel nominibus nominentur aut limitibus seu terminis designentur, nichil penitus excepto ad nos et sacrum romanum imperium quomodolibet, pertinentes, dantes, tribuentes, committentes et firmantes, virtute presencium, ex certa sciencia de prefate romane regie plenitudine potestatis, dicto vicario nostro, ymmo in eum transferentes expressam et liberam ac plenissimam facultatem, licenciam et jurisdiccionem omnimodam nostram et imperii in omnibus et singulis locis predictis cum principibus, prelatis, ducibus, comitibus, vicecomitibus, magnatibus, nobilibus, civitatibus, communitatibus ac partibus, personis ecclesiasticis et secularibus cujuscumque preeminencie, dignitatis, excellencie, status, gradus seu condicionis extiterint, tractandi et agendi ac eciam a potestatibus, rectoratibus, judicatibus, officiis, dignitatibus, statu ac titulis quibuslibet, si hoc ipsum causa seu necessitas deposcerit perpetuo vel ad tempus revocandi, privandi, destituendi et effectualiter deponendi, potestates, rectoratus, judicatus, officia, dignitates, feoda, terras et bona mobilia et immobilia quecumque et qualiacumque confiscandi, levandi, percipiendi et in usus nostros et imperii sicut expedire videbitur convertendi necnon eosdem alium vel alios iterum in vicem, dignitatem et officium atque locum perpetuo vel ad tempus cum relaxacione et in integrum restitucione omnimoda et perfecta instituendi, locandi, de novo ponendi, statuendi et eciam realiter conservandi et insuper quoslibet comites, nobiles, potestates, judices, /274/ rectores seu locum tenentes, civitates, communitates, officiatos, milites, clientes et singulares quascumque personas, nullo penitus excepto ad nos et sacrum imperium pertinentes, qualiacumque dominia, terras, territoria, loca, bona, beneficia ecclesiastica vel secularia, redditus, proventus, emolimenta seu res in feodum, commendam, pignus, pensionem seu quovis alio titulo tenentes, habentes aut possidentes de novo conferendi, infeodandi, investiendi, dandi, commendandi, impignerandi, pensionandi, providendi vel assignandi, vasallos quoque et cujuslibet generis feodotarios constituendi, ordinandi, instituendi, disponendi et investiendi et ab omnibus et singulis premissis nostro et imperii sacri nomine fidelitatis et homagii et cujuslibet alterius generis licitum et necessarium juramentum ac promissum corporaliter vel in scriptis recipiendi, prout et quociens sibi videbitur oportunum, et insuper cum predicta plenitudine potestatis dicto vicario nostro de certa nostra sciencia, vigore presentis nostri mandati plenissimi damus, concedimus, firmamus et in eum expresse transferimus jure plenario omnimodam generalem et specialem licenciam et potestatem expressam, voluntariam et contenciosam in et circa premissa et quodlibet premissorum et eciam signanter atque specifice quascumque pecuniarum summas, bona spolia, res, emolimenta et quoscumque proventus ubicumque locorum et a quibuscumque principibus, prelatis, ducibus, nobilibus, communitatibus aut personis, ut premittitur ea gubernantes, habentes, servantes vel quomodo libet detinentes, si et in quantum ad nos et imperium devoluta sunt aut pertinent ex debito testato, ab intestato, consuetudine vel de jure necnon collectas, dacias, thelonea, pedagia, angarias, parangarias, multas, portenagia et onera realia, personalia sive mixta et alia onera, obventiones et jura nobis et imperio sacro ubicumque, quomodocumque et a quocumque debita in universis et singulis dominiis, territoriis et terminis supradictis ad nos et imperium, quovis pretextu, titulo, consuetudine vel de jure quomodolibet spectancia confiscandi, exigendi, levandi, percipiendi et in usus nostros beneplacitos libere assignandi et signanter in dictum /275/ vicarium nostrum, in dictis partibus, terminis atque locis sicut premittitur, omnem et plenissimam de certa nostra sciencia, virtute presencium, transferimus nostram et imperii sacri sicuti melius possumus expresse, pure, mere et simpliciter potestatem, auctoritatem et eciam licenciam specialem et generaliter eciam omnia et singula tractandi, faciendi, ordinandi, disponendi, conferendi, commendandi, investiendi in possessionem et tenutam ponendi, instituendi, destituendi, privandi et movendi, deponendi et in integrum restituendi, habilitandi ad honorem, statum, famam, feoda, res et bona auctorizandi, roborandi, firmandi, restituendi et concludendi et cum pleno, mero, mixto et libero ac soluto imperio exercendi, percipiendi, faciendi et realiter disponendi in universis et singulis partibus, locis et terminis supradictis et eorum quolibet, que nos ipsi auctoritate romana regia et imperii sacri ordinare, tractare, facere, precipere, disponere, concludere, firmare et roborare possemus, si illic corporali nostra presencia adessemus eciam si talia forent in toto vel in parte, que de jure scripto, statuto seu consuetudine aut observancia regionum, provinciarum, districtuum, civitatum, comunitatum seu locorum exigerent speciale. Que omnia et singula facta, gesta, inita, ordinata, disposita, concessa, mandata, conclusa quomodolibet firmata vel acta, promittimus, stipulamus et volumus firmiter attendere et pro nobis et imperio sacro inconcussa et inviolabiliter observare et facere observari non obstantibus quibuscumque juris canonici vel civilis aminiculis ac scriptis vel non scriptis legibus, statutis, etc. presentibus ad nostre dumtaxat voluntatis beneplacitum duraturis. Presencium etc. majestate … Datum Posonii, xiiij die junii.

Archives impériales d’Autriche, à Vienne. R. R. G., fol. 92.
(Registres de l’empereur Sigismond.) /276/

 

VII

Presbourg, 15 juin 1421. — Diplôme de Sigismond, roi des Romains, concédant sur sa requête à Louis de Chalon le château de Jougne, avec ses appartenances.

Sigismundus, Dei gratia, Romanorum rex, semper augustus ac Hungarie, Boemie, Dalmacie, Croacie, etc. rex. Notum facimus tenore presentium universis quod, cum pro parte illustris Ludovici de Cabilone. principis Aurayce, comitis Gebennensis et domini de Arlato, consanguinei nostri carissimi, nostre maiestati extitit humiliter et cum instancia supplicatum quatinus, sibi castrum Joygne, quod a nobis et sacro romano imperio dependet, in feudum cum omnibus et singulis juribus, redditibus, censibus, proventibus, judicibus, utilitatibus, pedagiis et pertinentiis universis ad ipsum castrum spectantibus, in quibuscumque etiam consistant, de innata nobis clementia, auctoritate romana regia in feudum conferre et concedere graciosius dignaremur. Nos, igitur, redictis supplicationibus ut pote rationabilibus atque iustis benignius annuentes, pensantes nichilominus et attendentes prompta et grata fidelitatis obsequia nobis et imperio sacro, per prefatum Ludowicum exhibita et in antea ferventius exhibenda, recepto etiam ab eodem Ludovico in manus nobilis Henrici Beyer de Poparten, nostri et imperii sacri fidelis dilecti, fidelitatis et homagii nobis faciendo debito juramento, videlicet quod nobis erit obediens et fidelis, bonum nostrum promovebit et malum nostrum cavebit pro posse suo et erga nos, tamquam Romanorum regem, faciet que fidelis vasallus debitus est facere suo domino naturali et ordinario de consuetudine vel de jure, sic eum Deus adiuvet et sancta Dei evangelia, animo deliberato, sanoque nostrorum et imperii sacri fidelium accedente consilio, et de certa nostra scientia, auctoritate romana regia, prefato Ludowico predictum castrum Joygne cum omnibus et singulis juribus, redditibus, censibus, proventibus, judicibus, utilitatibus, pedagiis et pertinentiis suis universis in quibuscumque consistant in feudum concessimus et contulimus, concedimus et /277/ conferimus, virtute presentium gratiose, per ipsum et heredes suos a nobis et imperio sacro habendum, tenendum, utifruendum et in feudum hereditarie possidendum, nostris tamen et imperii sacri ac quorumlibet aliorum juribus semper salvis; presentium, sub nostri regalis sigilli nostri appensione, testimonio litterarum. Datum Posonii, anno domini, millesimo quadringentesimo vigesimo primo, xv die Junii, regnorum nostrorum anno Hungarie etc. trigesimo quinto, Romanorum vero undecimo et Bœmie primo.

Sur le repli : Ad mandatum domini regis Franciscus prepositus Boleslaviensis.
Au dos : [Registrata] Henricus Fiie.
Orignal, papier, scellé, sur double queue de parchemin (le sceau manque).
Archives du Doubs. B. 458.

 

VIII

Presbourg, 15 juin 1421. — Diplôme de Sigismond, roi des Romains, accordant à Louis de Chalon le droit de battre monnaie à Jougne.

Sigismundus, Dei gratia, Romanorum rex, semper Augustus ac Hungarie, Boemie, Dalmacie, Croacie etc. rex. Notum facimus, tenore presencium universis, regie dignitatis sublimitas in hoc cernitur gloriosa, dum sue pietatis laxat funiculos in subiectos ut, ex graciarum donis, subiectorum amor crescat amplius in suum dominum principalem quociens benivolencie fructibus fuerint in suis desideriis sociati nec frustra sue magnificencie thesauros fundit in subditos, per hoc enim sacrum romanum imperium favore laudis erigitur et feudorum et obsequiorum numerus cumulatur. Sane, illustris Ludovici de Cabilone, principis Aurayce, comitis Gebennensis, consanguinei nostri carissimi, nobis porrecta supplicatio continebat quatinus, sibi et heredibus suis, de gracia singulari, concedere vellemus licenciam et aliorum principum sacri Romani imperii usualem. Nos legitimam potestatem cudendi monetam auream ad instar /278/ igitur, attendentes grata et fidelia servicia nobis et imperio sacro per eundem Ludovicum hactenus exhibita et in futurum fervencius exhibenda, non per errorem aut improvide sed animo deliberato, sanoque principum et nobilium ac sacri Romani imperii procerum accedente cousilio, eidem Ludovico et heredibus suis monetam cudendi auream in feudum concedimus et donamus auctoritate romana regia, dantes sibi quo ad hoc licenciam et omnimodam, tenore presencium, facultatem hujusmodi monetam auream, gradu, pondere et valore, ad instar monete auree regis Francie et aliorum principum vicinorum et quod habeat cursum in toto imperio, in loco Joygne, sic quod ab utraque parte, aquila imperialis tipario imprimatur ut sciri valeat huiusmodi monetam a sacro romano imperio descendisse, provisurus taliter quod, circa hujusmodi monetam in valore et gradu talem modum teneat quod exinde crescat honor imperii et ipsius Ludovici et heredum suorum fama non suscipiat detractionis augmenta; mandantes igitur universis et singulis principibus, ecclesiasticis et secularibus, comitibus, baronibus, nobilibus, militibus, clientibus, capitaneis, officialibus, magistris civium et comunitatibus nostris et imperii sacri fidelibus dilectis quatinus, dictum Ludovicum aut suos heredes incusione dicte monete auree non impediant quoquomodo prout nostram et imperii sacri indignationi gravissimam voluerint evitare; presencium sub nostre majestatis sigillo appensione testimonio litterarum. Datum Posonii, anno domini, millesimo quadringentesimo vigesimo primo, die decima quinta Junii, regnorum nostrorum anno Hungarie tricesimo quinto, Romanorum undecimo, Boemie vero primo.

Sur le repli : Ad mandatum domini regis Franciscus prepositus Boleslaviensis.
Au dos : R[egistrata] Henricus Fiie.
Original, parchemin, scellé sur lacs de soie verte. (Le sceau manque.)
Archives du Doubs. B. 468.
(Analysée par C. D[uvernoy] de Montbéliard : Mouvance du comté de Bourgogne envers l’empire germanique depuis le XIe s. Preuves. Besançon, 1849, p. 126. No CCIX. /279/

 

IX

Vienne, 10 novembre 1422. — Diplôme de Sigismond, roi des Romains, concédant à Louis de Chalon et à ses descendants les droits de marche et les successions des bâtards dans le comté de Bourgogne.

Sigismundus, Dei gratia Romanorum rex, semper Augustus ac Hungarie, Boemie, Dalmacie, Croacie rex. Notum facimus, tenore presentium, universis quod, cum dudum illustris Ludovicus de Cabilone, princeps Aurayce, consanguineus noster carissimus et imperii sacri vicarius generalis, ab antique, una cum progenitoribus suis, jure debito, habuerint, tenuerint ac pacifice et quiete non vi, non clam nec precario sed bono et justo titulo possideriut jura marchiarum et successiones bastardorum in omnibus terris suis et districtibus et signanter in comitatu Burgundie ad ipsos que pertinuerint et spectare noscantur tenaciter in inconcusse palam publice et notorie, est nobis pro parte dicti Ludovici principis Aurayce, cum instancia supplicatum quatinus, sibi heredibus et successoribus suis hujusmodi marchias et successiones bastardorum innovare approbare et de novo si et inquantum opus est concedere gratiosius dignaremur. Nos igitur, inspectis fidelibus et indefessis obsequiis quibus prefatus Ludovicus veluti fidelis princeps et vasallus imperii nos et sacrum romanum veneratur imperium ymmo firmata constantia fidei a nobis et sacro romano imperio nulla temporis qualitate commota avertitur, ymmo quanto fluctus, temptationis exurgunt eo immobilior perseverat, non per errorem aut improvide sed animo deliberato sano sacri romani imperii procedente et fidelium accedente consilio, dicti Ludovici rationabilibus petitionibus annuentes, presertim cum iuste petentibus non sit denegandus assensus sibi heredibus et successoribus suis jura marchiarum et successiones bastardorum in omnibus terris suis et districtibus et signanter in comitatu Burgundie, in quo ipse et progenitores sui ea hactenus inconcusse et inviolabiliter habuerunt, tenuerunt et possiderunt, pacifice et quiete innovavimus, /280/ approbavimus et confirmavimus, innovamus, approbamus et de certa nostra scientia confirmamus, non obstante quocunque temporis lapsu super hoc, prefatum Ludovicum pro se et dictis suis heredibus et successoribus ex certa nostra scientia et de gracia speciali relevantes, ac ipsis easdem marchias et successiones bastardorum, auctoritate romana regia de novo concedimus et donamus habendas, tenendas et a nobis et sacro romano imperio in feudum perpetue possidendas, nostris tamen et aliorum quorumcunque juribus semper salvis, presentium sub nostre maiestatis sigillo testimonio litterarum.

Datum Wienne, anno domini millesimo quadringentesimo vigesimo secundo, die x mensis Novembris, regnorum nostrorum anno Hungarie etc. trigesimo sexto, Romanorum tridecimo et Boemie tertio.

Sur le repli : Ad mandatum domini regis det Pat[aviensis] canc[ellario] referen[te] Franciscus prepositus Strigoniensis.
Original, parchemin, scellé sur lacs de soie verte. (Le sceau manque.)
Trésor des Chartes. B. 36. Archives du Doubs.

 

X

Presbourg, 3 décembre 1422. — Diplôme de Sigismond, roi des Romains, nommant Louis de Chalon son procureur pour prendre possession du comté de Bourgogne.

Sigismundus etc. Illustri Ludovico de Cabilone, principi Aurayce, consanguineo nostro carissimo, graciam regiam etc. Et si quadam aspectione natali plurimum inclinemur intendere ad ea que sacri Romani imperii prospiciunt commodum et profectum nichilominus in hiis nostra sollers versatur intencio, ut jura sacri Romani imperii nullatenus negligamus. Sane, cum noviter illustris Philippus, quondam comes Burgundie, diem extremum clauserit, occasione cujus, ipse comitatus Burgundie cum castris, civitatibus, municionibus et aliis pertinenciis universis, in quibuscumque consistant, necnon aliis certis dominiis, que a nobis et sacro /281/ Romano imperio tenebat in feudum ad nos et sacrum Romanum imperium noscantur legittime devoluta. Id circo de tua fidelitate, legalitate et circumspectionis industria gerentes fiduciam confidencie specialis, te non per errorem aut improvide sed animo deliberato, sano principum, procerum et fidelium nostrorum accedente consilio, nostrum et imperii sacri ordinavimus, disposuimus, fecimus et constituimus, disponimus, facimus et constituimus procuratorem, actorem, negociorum gestorem et nuntium specialem cum potestate unum vel plures procuratores substituendum in causis imperialibus, in judicio vel extra et illum vel illos revocandum, dantes et concedentes tibi, auctoritate Romana regia, et nostro nomine, plenariam et omnimodam potestatem, facultatem et licenciam specialem dictum comitatum Burgundie cum suis castris, civitatibus, municionibus et pertinenciis universis ac eciam alia dominia, cuiuscumque condicionis et potestatis existant, que dictus Philippus, comes Burgundie pridem possederat, ad nos et sacrum Romanum imperium devoluta vendicandum, repetendum, te intromittendum, nostro nomine possidendum et recuperandum et ad manus nostras et sacri Romani imperii tenendas, fructusque et redditus ac omnia alia jura et emolumenta dicti comitatus levandum, exigendum, habendum, percipiendum et recipiendum ac eciam faciendum, instituendum, ponendum et ordinandum ballivos, judices, capitaneos, castellanos, et alios quoscumque officiarios ad regimen et administrationem terrarum et jurium dicti comitatus necnon deponendum et removendum quos tibi videbitur esse removendos, destituendos et deponendos cum plenissima potestate inobedientes, rebelles, contracdictores et omnes et singulos quos compererit sacrorum jurium imperialium qualitercumque et quomodocumque fuisse et esse turbatores et usurpatores, aut ad hoc consilium, auxilium et juvamen dantes capiendum, arrestandum, incarcerandum, puniendum et corrigendum juxta casus, exigenciam et eorum demerita eciam cuiuscumque preminencie, condicionis vel status existant et si necesse fuerit illos sub fida custodia ad serenitatem nostram imperialem /282/ remittendum et adhuc tibi commisimus ac specialiter et expresse committimus per presentes, impedimentis non obstantibus quibuscumque usque ad nostre beneplacitum voluntatis ratum et gratum habentes et habere volentes quidquid per te actum, factum, gestum et in premissis et circa premissa nostro nomine fuerit ordinatum decernentes et volentes singula per te facta, gesta et ordinata, obtinere inviolabiliter roboris firmitate ac si hujusmodi per nos ipsos acta gesta fuissent et in repeticione et recuperacione eorumdem personaliter adessemus, dolo et fraude quibuscumque proculmotis, mandantes et districtissime injungentes tibi eciam sub pena privacionis feudi et in omnibus et singulis premissis cum diligencia solerti, intendere non postponas et ea facere debeas omni occasione postposita et compleas cum effectu. Datum Posonii, terna die decembris.

Archives impériales d’Autriche, à Vienne. R. R. G. fol. 167vo.

 

XI

Presbourg, 11 janvier 1423. — Diplôme de Sigismond, roi des Romains, concédant à Louis de Chalon et à ses héritiers le comté de Genève et ses appartenances.

Sigismundus, Dei gracia, Romanorum rex, semper Augustus ac Hungarie, Bœmie, Dalmacie, Croacie, etc., rex. Notum facimus, tenore presencium, universis; immensa divine maiestatis clemencia, que celestia simul ac terrestria moderatur, nos sua clemencia ab alto prospiciens erexit ad apicem Romane regie dignitatis, ut rei publice et populo fideli nedum prelacione, verum in amministratione pacis et justicie, sollicicius preessemus et hoc precipue ordine servato debito adimplere confidimus, dum principibus in suis meritis fulgentibus, que sua sunt, libenter concedimus ac etiam nostri favoris et gracie benivolenciam de propriis exhibemus, quos fidei constancia, virtutum excellencia et morum insignitas supra ceteros erigit, quique ab experto probati nos et imperium sacrum Romanum gratorum operum fidelitate ferventer honorant. Sane, ad /283/ illustris Ludovici de Cabilone, principis Auraice, consanguinei nostri carissimi et nostri et sacri Romani imperii, per Galliam vicarii generalis, benivolenciam et laboris exercicio, quibus se in dicto vicariatu perhibuit se (sic) sedulum, ultroneum et fidelem, et merito ad exaltacionem sui status et honoris fastigium animemur, idcirco, non per errorem aut improvide, sed animo deliberato, sano fidelium nostrorum accedente consilio, et de certa nostra sciencia, prefato Ludovico, comitatum Gebennensem ad ipsum et heredes suos ex successonie progenitorum suorum legittime pertinentem, in feudum contulimus et conferimus per presentes omneque jus nostrum, quod nobis veluti Romanorum regi in dicto comitatu Gebennensi et pertinentiis suis hactenus potuisset competere, seu in antea, sive per sentencias fisci nostri seu alia occasione quacumque posset competere, quomodo libet in futurum in ipsum Ludovicum et heredes suos transferimus, ipsis, auctoritate Romana regia tenore presencium damus in feodum, concedimus, conferimus et donamus habendum, tenendum et jure feodi legittime possidendum. Volumus tamen quod ipse Ludovicus, in manus nobilis Alberti de Colditz, capitanei Svidnicensis 1, Jawriensis 2, magistri camere et fidelis nostri dilecti, nostro nomine, prestet solitum juramentum, videlicet quod nobis, veluti Romanorum regi, sit fidelis, obediens et subjectus, nostrumque malum avertat, bonumque promoveat, omniaque erga nos et sacrum Romanum imperium fideliter faciat et perficiat que fidelis vasallus imperii tenetur facere erga suum dominum naturalem de consuetudine vel de jure sicut eum Deus adjuvet et sancta Dei evangelia, dolo et fraude quibuslibet procul motis, presencium sub nostre majestatis sigillo appensione, testimonio litterarum.

Datum Posonii, anno domini millesimo quadringentesimo vigesimo tercio, undecima die Januarii, regnorum nostrorum anno Hungarie etc. tricesimo sexto, Romanorum tredecimo. Bœmie vero tercio. /284/

Sur le repli : Ad mandatum domini regis, d[ominus] G.e[piscopus] Pat[aviensis] Can[cellario] ref[erente] Franciscus prepositus Strigoniensis.
Au dos : R[egistrata]. Henricus Fiie.
Original parchemin, scellé sur lacs de soie.
Archives du royaume de Bohême. Prague. Arch. s. Venceslai. 426/228.

 

XII

Sully, 19 mars [1430]. — Lettres closes du roi Charles VII aux gens de son conseil de Dauphiné leur recommandant de surveiller les menées du prince d’Orange.

De par le Roy daulphin.
A noz amez et feaulx les gens de nostre Conseil, en nostre pais du Dalphiné.

Noz amez et feaulx, nous avons receu voz lectres par le pourteur des présentes, faisans mencion entre autres choses des manières puiz aucun temps tenues par le prince d’Orenge, et d’aucunes menaces dont par ses lettres et autrement il a usé. Pour quoy faictes de grans dobtes qu’il doie grever nostre pais de par dela, se par nous n’y est pourveu, ce que n’est pas vraissamblable, attendu que freschement a escript et envoyé par deca en signiffiant que son entencion n’est pas de procéder par voye de fait, mais demande par manière de supplicacion, provision de justice sur certain appoinctement fait par delà à son preiudice comme il dist. Et toutesvoies ne sera que bien fait de vous tenir toutjours sur vostre garde, affin de contrester à la voye de fait s’il prennoit ce chemin. Au surplus de voz dictes lettres contenant le … 1 des apoinctement de pluseurs noz officiers de par de la, par les importunes requestes qui sur ce nous sont souvent faictes, dont sourdent de grandes clamours et esclandres comme nous escripvez, nous sommes bien contens que vous gardiez quant ad ce noz anciennes ordonnances, selon que verrez affaire pour le bien de nous et de /285/ nostre dit pais, en tenant la main à ce que soubz umbre de telles legieres impretations nos officiers que bien et loyaument nous auront servi ne soient sans cause raisonnable ainssi desappoinctez de leurs estas et offices. Et quant à ce que nous ecripvez, touchant le fait de noz monnoyes de par dela et aussi de gens illec beneficiez qui sont parens de ceulx qui tiennent nostre party contraire, nous aurons sur tout nostre advis et briefment vous en ferons response.

Donné à Suly, le XIX jour de mars.

Charles.

Au bas : Picart.
Copie, papier du temps.
Archives de l’Isère. B. 3290.

 

XIII

Cuiseaux, 16 mai [1430]. — Lettre du prince d’Orange à Yvonet Ferlin, son châtelain de Jougne, lui ordonnant de lever des gens d’armes dans ses châtellenies.

Le prince d’Oranges.

Chiers et bien amé, le gouverneur de Dauphiné a mis le siège devant Anton, et pour lever icellui nous convient avier grosse puissance de gens d’armes et de trait. Si mandons es habitans de Joigne, Roche Jehan, d’Orbe, Eschallain, Gransson et Montaignie, que un chacun de ceulx lieu nous envoie jusques au nombre de trente arbelestriers des meilleurs et plus abiles que seront en un chascun de nos dis lieu, pour nous servir en ceste presente armée, qui soient à l’entour de Gignex, près de Cuisel, le XXVe jour de ce moy de may, et se assez estoit qu’il ne puissions finer iceulx arbalestriers, nous leurs mandons qu’ilz nous vuillent secorer à ce besoing un chacun d’iceulx lieu, en leurs parlant de part nous que es chouses dessus dites ne nous vuillent faillir, et il faictes telle diligence que nous cognoissions voulenté quarre de noz servir, cart la chouse touche grandement nostre honour, et nous en rescripvons à vostre frère, qui soit avec vous, pour faire les chouses dessusdites et en oultre /286/ que incontinent vous faictes giste en la terre de Joigne les dis cent livres, pour icelles bailler incontinent à vostre frère, pour les enploier lay où nous ly mandons, car la chouse est très hactivez, et sur le tout faictes telle diligence que nous ayons cause d’en estre tenu à vous à tout jour mais, car jamais plus grant plaisir ne nous sauré faire. Nous avons traictier avec Christofle de Cayme, lyquel doit amener au lieu d’Orbe, jusques au nombre de trente arbalestriers trayant de colovres que de carnons, lesquelx seront audit Orbe de venredy en huit jours que nous doievent servir en ceste presente armée. S’il faictes que iceulx soient payez, c’est assavoir un chacun par mois VII florins IIc gros viez, lequel paiement vous panré sur les aultres villes et le demorant vous nous enverroit ou apporteroit au lieu de Cusel le XXVe jour de cest pesent moys, pour faire paiement admectres, et en ce ne faictes faulte sur tous le plaisir que jamais nous vuildroit faire à une fois pour toutes. Chier et bien amé, Dieux soit garde de vous. Escript. à Cusel, le XVIe jour de may; et en oultre faictes faire commandement à tous les gentis hommes de par delay que incontinent se mectens sus pour estre monstré et armez à l’entour de Gignier, le XXVe jour de ce mois.

Faictens incontinent mestre la main en tous les biens de gentishommes du païs de Vault ou cas que ne partirons incontinent pour venir audit mandement, car la guerre est desja encommencée.

Au dos : A nostre chier et bien amé escuier, Yvonet Fellin, nostre chastellain de Joigne et de Roche Jehan.
Original, papier. Archives du Doubs. E. 1233. /287/

 

XIV

14 novembre 1431. — Mandement du duc de Bourgogne à ses conseillers Girard Vyon et Guillaume Borrelier d’ouvrir une enquête sur le péage établi par le prince d’Orange à Saint-Claude.

De par le duc de Bourgoingne, de Brabant et de Lembourg, conte de Flandres, d’Artois, de Bourgoingne et de Namur.

Tres chiers et bien amez, pour ce que avons entendu que nostre très chier et féal cousin le prince d’Orenges et seigneur d’Arlay, extend son peage qu’il pretend avoir à Joingne jusques vers Saint Oyans et ailleurs plus avant qu’il ne doit et aussi que le fait souvent lever sur noz subgez, qui en sont et doivent estre frans et exemps, nous voulons et espressement vous mandons et à chascun de vous que diligemment et secretement vous informez de ce que dit est et comment nostre dit cousin fait lever son dit peage et sur qui et en quelz mectes et jusques où il l’extend, et ce que fait et trouvé en aurez, rapportez ou renvoyez feablement cloz et scellé par devers nostre amé et féal chancellier ou en son absence par devers noz amez et feaulx, les gens de nostre conseil résidens à Dijon, pour y estre au seurplus ordonné comme verrons que à faire sera. Et n’y faictes aucune faulte. Treschiers et bien amez. Nostre Seigneur soit garde de vous.

Escript le XIIIIe jour de novembre l’an mil CCCC trente et ung.

Signé : Bouessan.

Au dos : A noz amez et feaulx, maistres Girart Vyon, nostre Conseillier et Guillaume Borrelier, nostre secretaire et procureur et à chascun d’eulx.
Original, papier. Archives du Doubs. B. 459. /288/

 

XV

Extrait d’une enquête faite le 29 novembre 1431 par Guillaume Borrelier, procureur du duc de Bourgogne, au sujet de la prétention de Louis de Chalon d’étendre son droit de péage de Jougne aux défilés de Saint-Claude.

Nicolet Lieure, voicturier, filz de Emonet Lieure de Geay, en eaige d’environ XXX ans [ … … ] depose par son serement que sont environ quatorze ans qu’il a frequenté les foires de Genève et esdites foires a mener, conduit et voicturer depuis le dit temps plusieurs denrées et marchandises de plusieurs marchans des duchié et conté de Bourgoingne tant de Dijon, Chalon, Salins, Poligny, Seure et Verdun que autres et aussi d’icelles foires a ramener et voicturer esdis pais dessus declaires plusieurs denrées et marchandises pour plusieurs marchans des dites villes lequex de présent il ne saurait nommé et pour declairer les chemins qu’il avoit accoustumé de tenir et qu’il a tenu depuis le dis XIIII ans ença en venant et retournant des dites foires et villes dessus declairées ou des dites villes esdites foires au partir du dit Genève pour tirier audit Salins il a accoustumé de passer et venir par Saint-Claude d’illec en Grant-Vaulx en Morillon, à Champagnoille et dudit lieu à Salins et pour aler du dit Genène au dit Poligny il a accoustumé d’aler et passer dors le dit Genève à Saint-Claude, Clerevaulx en Montaigne et du dit lieu à Poligny et pour aler du dit Genève à Seure et à Verdun a accoustumé d’aler et passer dors le dit Genève à Saint-Claude, à Orgelet, à Lons le Saulnier, à Blecterens, à Belleveure et d’illec à Seure ou à Verdun et pour aler du dit Genève à Chalon, a accoustumé d’aler et passer du dit Genève à Saint-Claude, à Moraut, à Orgelet, à Crissya, à Cuissya, à Louans et d’illec au dit Chalon et les chemins dessus declairés sont les drois chemins par lesquelx tous marchans et voicturiers ont accoustumé d’aler venir et passer eulx et leurs denrées en alant des dites villes es dites foires ou des dites foires es dites villes et par lesquelx chemins lui qui parle depuis /289/ les dis XIIII ans ença a mener et ramener plusieurs denrées et marchandises des dites foires pour plusieurs marchans des pays de Bourgoingne sans ce qu’il veist oncques requerir demander ne paier par tous les chemins dessus declairés aucun peaige à cause de Joigne et aussi il a veu aler venir et passer en alant ou retournant des dites foires plusieurs marchans et voicturiers ensemble leurs denrées et marchandises sans leur rens demander ne mectre empeschement à l’occasion du dit peaige, excepté depuis six ans ença que les gens et officiers de Monseigneur le prince d’Orenges ont arresté plusieurs marchans et voicturiers ensemble les denrées et marchandises qu’ilz menoient et mesmement sont environ les dis six ans que lui qui parle en venant des dites foires de Genève à Chalon par le droit chemin dessus declairé fut arresté et prins par les gens de mon dit seigneur le prince d’Orenges, à plus près de Crissya, ensemble douze mules chargées de denrées et fut mener prisonnier et aussi les dites mules et denrées à Saint Laurent de la Roiche et aussi le jour qu’il fut pris duquel il n’est racors feurent aussi pris et amener au dit Saint Laurent de la Roiche les bestes et denrées que voicturoyent et menoient au dit Chalon, Pierre Rigault, Jehan Rigault, Jehan Chavet, Pierre Chavet, Estinain Tissot et Estinain Pierdet et estoient en nombre de environ XXX bestes toutes chargées de denrées et marchandises [ … … ] et disoient les gens et officiers du dit monseigneur le prince que tout estoit confisqué au dit monseigneur le prince et que le corps du dit qui parle estoit à la volenté du dit monseigneur pour ce qu’il n’estoit aler passer et peaigié au lieu de Joigne lequel lieu de Joigne est lointain du droit chemin venant du dit Genève au dit Chalon de environ dix huit lieues et seroit chouse molt dommaige aux dis marchans et voicturiets s’il convenoit qu’ilz alassent passer au dit Joigne [ … … ] et les dis officiers de monseigneur ne vouloirent délivrer, lui qui parle des dites prisons ne lui bailler ses dites bestes jusques à ce qu’il acheta icelles le pris et somme de quatre vins francs et lui cousta en despence et autres missions /290/ environ vint frans qu’ilz sont en somme cent frans [ … … ]

André du Pin, marchant, demourant à Chalon, en aige d’environ XLIII ans [ … … ] dit et dépose par son serement que sont XX ans passés qu’il a fréquenté les foires de Genève tant pour le fait de recourer les paiemens qu’il estoient dehuz et marchans de Franches qui avoyent venduz les draps et autres marchandises et marchands des pays de Savoye et de ailleurs comme pour le fait de mener et faire mener par plusieurs marchans et ramener du dit Genève à Chalon plusieurs marchandises tant de draps, doux, assier, mercerie, espicerie, arnoiz et autres sans ce que lui ne ses voicturiers paiassent aucune chose du peaige de Joigne [ … … ] jusqu’à ce que en l’an mil IIIIc XXI que le dit qui parle, Perrenin Passeaul et Jehan Regnault de Chalon achetèrent en la dicte ville de Genève en la foire de la Saint-Pierre et Saint-Paul certaine quantité de draps de pluseurs villes et aussi certaine quantité d’assier lesquelles marchandises ilz baillèrent amener à certains voicturiers de Saint-Monceaul lesquels en admenèrent une partie jusques à Moraut et incontinent qu’elles furent déchargiées au dit lieu les gens et officiers du dit monseigneur le prince les prindrent et arresterent en disant qu’elles estoient confisquées au dit monseigneur le prince pour l’infraction qu’il disoit estre faicte du dit peaige de Joigne et semblablement toutes les denrées qui estoient au dit Saint Claude feurent arrestez par les dis gens et officiers et disant à monseigneur l’abbé de Saint Claude qu’il n’en laissast partir nulles sans licence du dit monseigneur le prince; et quand ces choses vindrent à la notisse du dit déposant, lui, feu Georges Nicolas et ledit Jehan Regnault s’en alèrent à Belleveure auquel lieu mon dit seigneur le prince estoit à certaines nopces qui là estoient de la fille de madame de Coulches et lui feirent leur supplicacion [ … … ] lequel monseigneur le prince respondit que iceulx supplians veinssent avec lui à Blecterans et il leur feroit tant qu’ilz seroient contens, et s’en alèrent après lui au dit lieu de Blecterans et quand ilz furent illec ilz lui requirent l’expedicion de leurs dites marchandises et lors leur deist que toutes celles qu’ilz estoient à Moraut estoient siennes /291/ comme commises et confisquées pour l’infraction du dit peaige et convint accorder avec lui des dites marchandises qui estoient à Moraut et de celles qui estoient à Saint Claude pour le dit qui parle et ses compagnons à la somme de vint escus d’or qu’ilz paierent content le landemain du dit accord en la ville du dit Lons le Saulnier et trois moutons d’or au chastellain de Miseray que les dites marchandises avait prinses et arrestez et disoit que le dit monseigneur le prince lui avoit donné le disme de toutes les marchandises et denrees qu’il pourroit prandre venant et alant de Genève à Chalon pour le dit chemin de Saint Claude et en faisant le dit accort le dit monseigneur le prince disoit que son dit peaige de Joingue duroit depuis le dit Joigne jusques à Vienne comme pour tiltres anciens qu’il se disoit avoir, pouroit opperir et lesquelx il avoit fait confirmé par l’empereur lequel les lui confirma si comme il disoit et mesmement disoit qu’il avoit fait son vicaire [ … … ].

Original, papier. Archives du Doubs. B. 459.

 

XVI

Dijon, 26 février 1432 [n. st]. — Philippe, duc de Bourgogne déclare que Louis de Chalon ayant consenti à lui livrer les principaux meneurs de la révolte de Jougne, aucun préjudice ne sera porté aux droits du prince dans cette ville.

Philippe, par la grâce de Dieu duc de Bourgoingne, de Lotharingie, de Brabant et de Lembourg, conte de Flandres, d’Artois, de Bourgoingne, palatin et de Namur, marquis du Saint Empire, seigneur de Salins et de Malines, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront salut. Savoir faisons que comme nostre très chier et feal cousin messire Loys de Chalon, prince d’Orenges, seigneur d’Arlay, nous ait exposé que touchant certain procès meu et pendant en nostre présent parlement de Dôle entre nostre procureur d’une part et icellui nostre cousin d’autre à cause de certains excez faiz, commis et perpetrez comme dit nostre dit procureur par aucuns des gens et habitans du lieu de Joigne /292/ appartenant à nostre dit cousin, noz amez et feaulx conseilliers les gens tenans nostre dit présent parlement de Dôle ont commandé au dit nostre cousin en la personne de son procureur sur peine de cent marcs d’or à appliquer à nous que dedens samedi prouchain premier jour du mois de mars il baille, délivre et mecte réalment et de fait es mains de nostre bailli d’aval en nostre dit conté de Bourgoingne ses delinquens telz que par iceulx de nostre parlement seront nommez pour en faire ce qui sera de faire de raison et de justice, laquelle chose nostre dit cousin nous a dit qu’il est prest de faire selon la forme du dit appoinctement et commandement requérant que l’obeissance qu’il nous veult faire de bailler les diz délinquens es mains de noz officiers selon la teneur du dit appoinctement ne lui tourne cv après à aucun préjudice. Nous ce considéré, voulons et sommes contens que la dicte obéissance et le bail et délivrance que nostre dit cousin le prince d’Orenges fera des diz delinquens selon le dit appoinctement ne soit ou tourne aucunement cy après ou préjudice de lui ne des drois qu’il prétend avoir à cause du dit lieu de Joigne ne aussi ou préjudice de nous et de noz drois, seignourie, ressort et souveraineté que disons avoir en icellui lieu de Joigne mais que nostre droit et le sien y soient gardez si avant qu’il se devra faire par raison. En tesmoinz de ce nous avons fait mectre nostre seel à ces présentes.

Donné en nostre ville de Dijon le XXVIe jour de février, l’an de grâce mil CCCC trente et ung.

Sur le repli: Par monseigneur le duc : Blamandre.
Original, parchemin, scellé sur double queue (fragment du sceau équestre du duc de Bourgogne.)
Archives du Doubs. B. 459. /293/

 

XVII

20 mars 1432 [n. st.]. — Enquête faite par Guy Gelenier et Jean de Terrant, conseillers du duc de Bourgogne, au sujet de la révolte des habitants de Jougne contre le duc.

Le vanredi XXe jour de mars, mil IIIIc XXXI par messires maistres Guy Gelenier et Jehan de Terrans, conseillers de monseigneur, a esté interrogié par serement Jehan Perrot de (de) Joigne, prisonniers de monseigneur, pour occasion de l’offense faicte à certains sergens de monseigneur de ceulx qui ly criaient : « traître bourguignon et, la quehuee, la quehuee », dit par son serement qu’il ne scet cellui que fist le dit cris de bourguignon et la quehue et ne l’oyt point, bien est il vray que en prenant les dis sergens et en les boutant hors de la ville de Joigne y qui depose deist ausdis sergens : « Alez, alez, de part le dyable, que venez vous cy querre, vous ne y cy avez que faire, nous ne sumes de riens subgez à monseigneur de Bourgoingne mais sumes de l’empire », et que la l’on ne feroit pas pour eulx ne pour monseigneur de Bourgoingne leur maistre ung bouton. Interrogié si se vuelt aider de la grâce de monseigneur dit que oy. Requis des présens a geter les sergens de monseigneur dit : Estevenin Boqual, Thomas Bourgeois, Guillaume Poncet, Guillemot Boycelet, Guillaume Richart, Alexandre Merchandet de Noseroy demourant à Joigne et Angnelet, femme Jehan Richart que portoit une eschive de bois ou ung baston, Jaquete femme Alexandre Meuchaudet, la fille à Pugin, Jaquete femme Jehannet Bonnelye et plusieurs autres femmes dont il n’est racors qui corroient après eulx disans : « Avant, avant, boutez les dehors, que viennent ilz cy querre »; et eulx moquant des dis sergens ne scet quelles parolles elles disoient car y ne prist pas garde. Interrogié par quelle ordonnance ilz firent les choses dessus dites ne qui leur commanda dit par son serement, nulle personne mais les firent mesmes y qui parle de sa propre volenté et mouvement. /294/

Estevenon Buchemal, interrogié sur les dis cas dit par son serement que à jour que furent pris et geter hors les dis sergens de la ville de Joigne il estoit eu cheux soy duquel il partit pour le crix et brut qu’il oyt en la dicte ville et lors ung nommé Jehan Landry sergent de monseigneur le prince ly bailla ung espie pour le pointer après les autres qui menoient le dis sergens hors la ville, le menassa très bien pour ce qu’il ne portoit ung baston et ce fait ala après le dit sergent qui estoit gelez par force de froit et le redressa de sur la gace où il estoit cheoir et en ce faisant estoit sur les murs Hugon Busechet qui crioit : la quehuee, la quehue, et ung autre qui estoit en la ville duquel il n’est racors qui deist par plusieurs fois : « Deffuez, deffuez, traitres bourguignon, que venez vous cy querre, vous ne si avez que faire ». Interrogié des présens à gecter hors ledis sergens et à dire les parolles dessusdites dit, Jehan Richart, Guillemin Richart, Estevenin Boqual, Alexandre Marchandet de Noseroy, demorant à Joigne, Guillaume Borcelet, Jehan Laudry sergent du dit lieu, Guillaume Poncet, Humbert Pugin, Jehan Maire, Thomas Bourgeois, sa femme, Angnelet, femme Jehan Richart qui portoit une eschive de boys, la femme Rolet Jehannet, la femme Jehan Braillart, la femme Jehan Landry, et plusieurs autres hommes et femmes des noms desquelx y n’est racors pour le grant nombre de gens qui y estoient.

Henryot Milet de Joigne, prisonnier de monseigneur, interrogié sur le dit cas dit par son serement que à l’eur que furent pris les dis sergens il estoit en l’ostel du moton, dors lequel il oyt grant effroy auquel il ala et vit Jehan Perrol qui tenoit les dis III sergens par leur manteal les menait devant lui aval la ville contre la porte de Savoye auquel qui parle le dit Perrol deist que ly vint aider à les bouter hors la ville que ainsi le fist et quant ilz furent hors de la ville y qui depose l’emferma la porte avec lui Bouchemal qui postoit ung espie et en les menant hors le dit Perrol et lui qui parle disoient ausdis sergens qui venoient la querre : « Deffuez, deffuez ». Interrogié qui fut cellui qui crioit dors sur les murs : « La quehuee, La quehue », et et aussi qui deist : « traître Bourguignon » dit par son /295/ dampnement qu’il ne scet ne en oyt onques parler. Requis des présens à les gecter dehors dit plusieurs personnes, hommes et femmes dont il n’est racors; dit en oultre que paravant de ce il oyt dire à Vienot Ferlin, chastellain de Joigne qui deist et ordonna ausdis de Joigne que s’ilz venoit aucuns des sergens de monseigneur de Bourgongne au dit Joigne que l’on ne les y laissast pas entrer mais que l’on leur feist gracieuse repunce dors dehors les murs.

Original, papier. Archives du Doubs. B. 459.

 

XVIII

1432. — Amende honorable qu’auront à faire les habitants de Jougne devant les envoyés du duc de Bourgogne contre lequel ils s’étaient révoltés.

Les quatre de Joigne, esquelx monseigneur a fait grâce seront sur ung bans ou parquet durant le temps que l’on dira les arrestz, sans chappon et tous dessains, et apres que le dit arrest sera dit ilz se mecteront à genoulx les mains joinctes et diront que les chouses contenues en leur grace ilz ont faictes et dictes mauvaisement ung chacun en tant qu’il lui touche et s’en repentent; et remercient à mon tres redoubté seigneur, monseigneur de Bourgoigne de la grace qu’il luy a pleu à leur en faire.

Item à Joigne, le diemanche apres l’asencion prouchain, à heure de la messe, devant la porte de Joigne qu’est devers Pontarlie, seront devant le chastellain de Montmorot et aultres que la court y envoyera seront en l’estat que dessuz en disans les paroles que dessus chacun tenant une torche ardant en leurs mains et pesant deux livres de cyre chacune.

Item et parillement feront à l’autre porte dudit Joigne.

Item et parillement seront devant le bailli d’aval à la première assise de Pontarlie et y sera pourtée la copie de la grace et là sera leue(e) publiquement devant tous.

Item sera fait ung tableaul ouquel sera l’ymaige de monseigneur et devant lui seront les dessusditz en l’estat que dessus et devant eux sera escript ce que dessus ou dit tablea ce qui s’ensuit : Cest tableau a esté fait afin de /296/ perpetuelle memoire en signe de l’amende des excès et offences faictes et dictes au dit lieu de Joigne par plusieurs des habitans de Joigne ès chastellain et officiers de monseigneur au lieu de Montmorot.

Archives du Doubs. B. 459.

 

XIX

Loches, 22 juin 1432. — Traité conclu entre le roi Charles VII et le prince d’Orange par lequel ce dernier rentre au service du roi et recouvre ses terres de Dauphiné.

Loys de Chalon, prince d’Orenge et seigneur d’Arlay, à tous ceuls qui ces presentes lettres verront. Comme, puis certain temps en ça, nous ayons envoyé par devers tres hault et tres excellent prince, monseigneur Charles roi de France, daulphin de Viennoiz, nostre tres redoubté seigneur, noz ambaxeurs et especiaulx messagés et apres y soions venus en personne pour lui requerir et demander la restitucion et deliurance de noz terres, fiefz et seigneuries estans en son pays du Daulphiné que, par avant aucunes choses nagaires advenues par nous entreprinses et faictes contre lui et son dit pais du Daulphiné, nous tenions et possidions en icellui pais, lesquelles pour cause et à l’occasion d’icelles choses advenues, le roy daulphin nostre dit seigneur tient et sont en sa main, disant icelles estre à lui confisquées et acquises, en lui humblement suppliant et requerant que nos dictes terres et seigneuries lui pleust nous rendre et restituer pour en joir comme par avant et abolir les dictes choses advenues, lui offrant faire les services foy et hommaige et serement de fidelité des dictes terres et fiefz et autres choses contenues et declairées en certains articles, desquielx la teneur s’ensuit, articles faiz accordez et passez entre le roy d’une part et monseigneur Loys de Chalon, prince d’Orenge d’autre part, sur certaines supplicacions et requestes faictes et baillées au roy daulphin par les ambaxeurs du dit monseigneur Loys et par lui après en sa personne.

Premièrement, afin que le roy soit plus enclin de faire /297/ délivrance au dit monseigneur Loys des Chasteaulx, villes, terres et seigneuries, rentes et revenues et autres choses par ses dis ambaxeurs et apres par lui demandées, icellui monseigneur Loys se determinera pour le roy et le servira contre les Anglois au nombre de trois cens hommes d’armes et de trois cens hommes de trait, à ses despens et souldes, par trois mois entiers et seront au lieu et au temps ou terme pour entrer ou dit service, a six sepmaines de semonce ou sommacion et commencera le dit service au jour qu’il aura fait ses monstres dehors le duchié de Bourgongne ou du pais du Daulphiné, au lieu plus prouchain du dit duchié ou du dit pais du Daulphiné et plus convenable pour le roy sans preiudice des fidelitez, foy et hommaige qu’il doit à monseigneur de Bourgongne. Item et avecques ce, se emploiera le dit monseigneur Loys de sa puissance bien et loyaument et fera son loyal devoir devers ses parens, amis et aliez, qui s’emploieront semblablement, feablement, sans fraude et mal engin au bien du traictié de la paix et acord, au plaisir Dieu, entre le roy et mondit seigneur de Bourgongne. Item, pour clerement monstrer au dit monseigneur Loys le bon vouloir que le roy a tousiours eu et encores a de lui faire plaisir et de le atraire à son service, icellui monseigneur Loys fera présentement foy et hommaige lige et serement de fidelité au roy Daulphin des dictes terres et fiefz, selon la nature d’iceuls fiefz, en la maniere que les ont faiz ses predecesseurs et semblablement de toutes autres qu’il tient ou que elles soient des appartenances des diz fiefz et toutes les dictes terres, fiefz, villes, chasteaulx et seigneuries et la revenue d’icelles, estans en la main du roy, lui seront rendues, les aura en sa main et en joira comme par avant les choses advenues.

Et au gouvernement et à la garde d’icelles, mectra gens agreables au roy. Item, le dit monseigneur Loys baillera son scelle au roy par lequel il promectra jurera et se obligera de soy determiner pour le roy et qu’il le servira contre les Angloiz au nombre de gens et pour tant de temps sans preiudice des fidelité foy et hommaige qu’il doit à monseigneur de Bourgongne, ainsi et en la maniere qu’il est contenu ou premier article, et que desdictes terres, villes, /298/ chasteaulx ne seigneuries ne sera fait ou porté mal ou dommaige au roy ne a son dit pais du Daulphiné. Item, le dit monseigneur Loys, quelque delivrance que le roy lui face des diz chasteaulx, terres et seigneuries, s’il advenoit que entre le roy et monseigneur de Bourgongne ne se trouvast bonne paix et que icelluy monseigneur de Bourgongne feist guerre au roy daulphin en son Daulphiné, icellui monseigneur Loys s’emploiera de fait à la deffense du dit pais de Daulphiné ou rendra et baillera au roy daulphin ou a son gouverneur du dit Daulphiné ou à ses autres officiers icellui Daulphiné, toutes les dictes villes, chasteaulx, terres et seigneuries et en prendra et levera le roy les revenues à son prouffit et se entend seullement durant ceste presente guerre qui est entre le roy et mondit seigneur de Bourgongne et en tous autres cas s’emploiera à la deffense dudit pais et servira le roy selon la nature des diz fiefz et, se il faisoit guerre ou servoit qui que ce feust contre icellui pais du Daulphiné, il confisquera les diz fiefz et seigneuries. Item au regard de l’assiecte de huit cens cinquante et deux florins daulphinaulx de rente que demande le dit monseigneur Loys lui estre faicte, le roy mandera presentement à son gouverneur de son dit Daulphiné que la dicte assiecte se face, se faicte n’avoit esté le temps passé ou autre cause n’y auroit que pour les dictes choses advenues. Item, les diz fidelitez et hommaige faiz et le dit scelle baillé, le dit monseigneur Loys, ses adhérens et qui ont tenu son parti, en abolissant toutes les choses faictes et advenues ou temps passé, demourront quictes envers le roy et en sa bonne grace et bienveillance, et leur seront restituez leurs biens immeubles en l’estat qu’ilz sont et demourront seurement et paisiblement, ainsi qu’ilz faisoient par avant, ou pais du Daulphiné et autres pais du roy et par tout ailleurs ou bon leur semblera, sans ce que pour les choses advenues et passées faictes par le dit monseigneur Loys et ses adherens à l’encontre du roy, on leur en puisse aucune chose demander et aussi le dit monseigneur Loys ne pourra aucune chose demander a ceuls qui ont esté pour le roy en ceste partie, soient du royaume ou d’ailleurs, non comprins en ce ceuls qui ont esté ou sont prisonniers en la guerre d’icellui /299/ monseigneur Loys au regard de leurs rançons ou finances. Item, et pour ce que le dit monseigneur Loys se plaint du jugement qui a esté assiz contre lui pour les terres d’Anton, Coulombier et Saint Romain, disant que on lui a fait tort au regard du marquis de Saluces, il poursuivra son fait par supplicacion en forme de droit et, se il a aucun suspecon raisonnable ou qui de droit soit à recevoir sur aucun ou aucuns du conseil du Daulphiné, iceuls seront mis hors du jugement et lui seront donnez en lieu d’eulx autres commissaires non suspectz de parlement ou autres lesquelz, joints avecques ceuls du dit conseil du Daulphiné, lui feront justice et durant le procès demourront les dictes places et seront gouvernées soulz la main du roy. Item, le roy escrira et priera en toute faveur au roy de Secille, à son gouverneur et conseil de Provence, de faire rendre au dit monseigneur Loys la cité d’Orenge et ses appartenances estans en la main du dit roy Loys, au temps que le roy lui rendra ses autre places et terres, tant celles qui sont de son fief que autres.

Savoir faisons que nous, les diz articles ayans aggreables et tout leur contenu, iceuls louons, greons, approuvons, ratiffions et confirmons, promectans et jurans par la foy et serement de nostre corps et sur nostre honneur et en parole de prince, les tenir, faire et acomplir, faire tenir et acomplir de point en point de nostre part en la fourme et maniere et avecques effect que cy dessus sont escripz et de non faire aler ne venir à l’encontre ne au contraire de ces presentes et tout sans fraude, barat ou mal engin. En tesmoing de vérité nous avons signées ces lettres de nostre main et à icelles fait mectre le sceel de noz armes.

Fait et donné à Loches le XXIIe jour de juing l’an mil CCCC trente et deux.

Signé : Loys de Chalon.

Original, parchemin, scellé sur double queue du sceau de Chalon.
Lég. : S. Loys de Chalon prince d’Orenge et s. d’Arlay.
Archives Nationales. I. 251. /300/

 

XX

Tours, 21 janvier 1436 (n. st.). — Mandement du roi Charles VII au gouverneur de Dauphiné lui enjoignant de remettre Louis de Chalon en possession des terres qui lui ont été enlevées précédemment.

Charles par la grâce de Dieu Roy de France, daulphin de Viennois, à noz amez et feaulx gouverneur ou son lieutenant, gens de nostre conseil et de noz comptes, trésorier, procureur et autres justiciers et officiers de nostre Daulphiné, salut et dilection. Nostre très chier et féal cousin Loys de Chalon, prince d’Orenge nous a fait remonstrer que par le plaisir de Nostre-Seigneur il est bonne paix entre nous et nostre très chier et très amé frère et cousin le duc de Bourgogne et que icelle paix nostre dit frère et cousin a faite avecques nous pour lui, ses feaulx, vassaulx, subgez et adherens. Et à ceste cause ledit exposant lequel est feal vassal et subget de nostre dit frere et cousin de sa conté de Bourgogne est et doit estre comprins en la dicte paix et doit joir du benefice d’icelle et par le traicté de ladicte paix chascun d’une part et d’autre doit recouvrer ses biens immeubles et héritages pour en joir comme par avant la guerre et divisions de nostre royaume et est faicte abolition à tous de chacune des parties de tous cas advenus à l’occasion des dictes guerre et division et n’en peut ne doit aucune chose estre imputée ou demandée par quelque voye que ce soit excepté au regard d’aucuns qui ne sont point comprins audit traictié, ainsi que ces choses et autres sont en icellui contenues et declairées, requerant ledit exposant que comme il soit tout notoire qu’il est vassal et subget de nostre dit frere et cousin, comme dit est, et lui a adheré et que il a juré ladicte paix il nous plaise le faire joir du benefice d’icelle et pareillement ses gens et tous autres qui l’ont servi en guerres et en autres affaires en nostre Daulphiné et lui faire rendre les chasteaulx, terres et seigneuries qui lui appartiennent en nostre dit Daulphiné pour en joir comme par avant les dictes divisions et du surplus dudit /301/ traictié de paix et ses gens, serviteurs et adherens en tant que à chascun d’eulx peut toucher. Pourquoy, nous les choses dessusdites considerées et en vertu de ladicte paix laquelle nous voulons tenir et faire tenir, observer et garder de nostre part, vous mandons, commandons et estroictement enjoingnons et à chacun de vous si comme à lui appartendra que les chasteaulx, terres et seigneuries appartenans audit exposant estans en nostre dit Daulphiné empeschées et mises en nostre main pour cause ou occasion de la guerre et divisions dessus dites et que par avant icelles il tenoit, vous lui rendez, restituez et délivrez ou faictes rendre restituer et delivrer ou à ses gens et commis pour lui et l’en souffrez et lessés joir à plain et ses dictes gens, serviteurs et adhérens des leurs sauames ( ?) en y ont de la dicte abolition et de tout ledit traicté de paix en tant que à eulx peut toucher, en levant et ostant nostre dicte main et tout empeschement de par nous es diz chasteaulx, terres et seigneuries dudit exposant et de ses diz gens, serviteurs et adherens, sans prejudice du traicté et accord fait entre nous et nostre dit cousin en l’an mil iiijc xxxij, lequel nous voulons estre entériné et accompli de point en point d’une part et d’autre. Car ainsi nous plaist et voulons estre fait, non obstant quelzconques proclamacions, banissemens et procès, dons ou transpors par nous faiz de quelconque des dictes terres, chasteaulx et seigneuries et letres impetrées ou à impetrer à ce contraires. Donné à Tours le xxjme jour de janvier l’an de grâce mil quatre cens trente et cinq, et de nostre règne le xiiije.

Au bas : Par le Roy daulphin en son grant conseil, Mallieix.

Original, parchemin. (Le bas est déchiré.) Archives de Vaucluse. E 20. /302/

 

XXI

Nozeroy, 20 octobre, [1437]. — Lettre de Louis de Chalon à Pierre de Jougne, son châtelain d’Echallens, lui mandant de se rendre auprès d’Humbert, le Bâtard de Savoie, pour soutenir une réclamation en faveur des gens de Vuitebœuf.

Le prince d’Oranges, etc.

Chier et bien amé, nostre chastellain de Gransson nous a fait scavoir que les gens de monsr le duc de Savoie ont fait gaigier noz gens de Vuitebuef en nostre terre de Gransson pour certain subcide que mondit sr de Savoie a fait nagueres en son pais, dont nous nous donnons grant merveille, cart, comme vous savez, noz gens ne sont tenus de paier aulcun subside fuez que à nous, mesmement actendu que la terre que mond. sr de Savoie nous a baillé par de la, il la nous a baillé franchement et quictement deschargée de tous services quelconques, excepté de fiedz, et pour obvier ad ce fait, nous en escripvons à monsr le prince de Pyemont et à messire Humbert le Bastard de Savoie, pour quoy incontinent ces presentes vehues, vous vuilliez trayre par devers eulx et leurs presentez noz lettres affin de obtenir provision sur ce et presentés vos lectres premièrement audit messire Humbert en luy remostrant tres bien nostre fait et se l’on puet avoir provision par le moyen dudit messire Humbert se ne presentez ja noz lettres à mondit sr le prince de Pyemont et incontinent qu’aurez besoigniez, si nous laissez savoir ce qu’il aurez besoignées ensamble des aultres chouses que vous escripvons et sur le tout faictes in continent Une très bonne diligence. Chier et bien amé, Nostre S. soit garde de vous. Escript à Nozeroy le XXe jour d’octobre (1437)

Loys de Ch.

Original, papier. Archives du Doubs. E. 1232.
Au dos : A nostre chier et bien amé escuier Pierre de Joigne nostre chastellain et receveur d’Eschallain. /303/

 

XXII

30 octobre 1438. — Déclaration donnée par Louis de Chalon au duc de Bourgogne touchant certaine charte d’investiture du comté de Bourgogne jadis octroyée au comte de Chalon par feu l’empereur Sigismond.

Loys de Chalon, prince d’Oranges et seigneur d’Arlay, savoir façons a tous que ces presentes verront que, comme messire Jehan Prévost de Sancey, docteur en loys, fut détenuz prinsonnier es prinsons fermes de nostre tresredoubté seigneur, monseigneur le duc, conte de Bourgogne et en son chastel de Talent, pour certaines lectres que maintenoit le procureur de nostre dit et tres redoubté seigneur havoir estez impetrees par le dit messire Jehan Prevost et pour nous, de feu Sigismond empereur, touchant la seignoirie du conté de Bourgogne de nostre dit et tres redoubté seigneur, et en especiaul, vues lectres par le contenuz desquelles, maintenoit le dit procureur nous avoir estez commis par le dit feu Sigismond au gouvernement et administracion du dit conté de Bourgogne, appartenant à nostre dit et tres reboubté seigneur, et aussi vues aultres lectres par le contenu desquelles disoit et maintenoit le dit procureur de nostre dit très redoubté seigneur, nous avoir estez donner et transpourter la dite conté de Bourgogne. Et aprez le dit messire Jehan Prevost, prinsonnier de nostre dit très redoubté seigneur pour les causes dessus dites, ayt estez elargier des prinsons de nostre dit tres redoubté seigneur et par lectres patentes, donees et ouctroiees en ceste partie et soubz certaines modificacions, contenues en icelles, que sont de la date du douzieme jour de janvier l’an de grace mil IIIIc et trante sept, et mesmement que nous renuncerions à l’effet des dictes lectres dessus désignées et consentirions toutes révocations et anullacions d’icelles, et aussi au bail d’icelles et des dites révocatoires, qui sur ce seroient obtenues de Sigismond, empereur, et que icelles revocatoires et lectres dessus dites soient mises es mains de nostre dit tres redoubté seigneur ou de ses commis, /304/ le contenu esquelles lectres d’appointement et de largissement du dit messire Jehan Prevost nous ont aultrefois estees monstrees et, icelles vehues bien a long et heu advis et délibéracion sur ce, havons desclairres et desclairons, comme autrefois havons fait, et comme vray est, que oncques les dites lectres, que l’on dit avoir estez impetrées du dit feu Sigismond, oncques ne furent obtenues ne impetrees par nostre ordonnance, sceu, vouloir, ne consentement ne que oncques ne fumes certifiiez que icelles ne aulcunes d’icelles fuissent données ou ouctroyées, se non aprèz de ce que nous heumes recovrez de la main des Alemans qu’ilz avoient prins et destenuz le dit messire Jehan Prevost, certain procès desmenez par devant le dit feu Sigismond à l’encontre de monseigneur le duc de Savoye de la conté de Geneve, ouquel procès furent par nous [bien] trouvées certaines lectres par lesquelles nous estions commis au gouvernement du dit conté et pour la grant desplaisance que nous heumes en l’ouctroit des dictes lectres, nous icelles botames ou feuz incontinent sans en retenir aulcung enseignement par copie ne aultrement et lesquelles furent brulées, consumées et mises à néant en nostre présence et que oncques aultres lectres de dont, transport ne aultres ne cheurent en nostre puissance ne aulcunes n’en havons par devers nous ne aussi vouldrions havoir. Et ce nous certiffions veritablement, comme autreffois avons fait par nostre serement et sur nostre honeur, et avec ce, de nostre bon grez, certaine science, et pour ce que riens ne vouldrions entreprendre ne estre entrepris contre les drois de nostre dit très redoubté seigneur et prince havons renunciez et renuncons par ces présentes à tout l’effet et contenu des dites lectres dessus désignées et d’une chacune dicelles, se obtenues ou ouctroiees out estez en tout temps ou l’on les trouveroit en estre; et avec ce nous consentons que icelles soyent revoquées, irritées et adnullées du tout en tout et nous consentons expressément que toutes lectres de révocacion et adnullacions d’icelles et aussi icelles et les dites révocatoires, toutes et quantefois qu’elles seront trouvées en estre, soient mises es mains de nostre dit tres redoubté seigneur ou de ses commis. Et avons permis et permectons par ces présentes, /305/ par nostre serement et sur nostre honeur, de n’en jamais user ne aydier d’icelles en quelque manière se icelles se trouvoient ouctroies que ne croyons et ce pour nous noz héritiers et qu’ilz de nous auront cause. En tesmoignaige desquelles chouses, nous avons fait mectre nostre seel pendant en ces présentes lectres, que furent faictes et données le darnier jour du mois d’octobre l’an de grâce mil CCCC trent et huit.

Signé (sur le repli). Par mon dit seigneur le Prince :
Jo. Vignem.
Original, parchemin, scellé sur double queue 1 (sceau de Chalon).
Trésor des Chartes. B 36. Arch. du Doubs.
(Partiellement publiée par Ed. Clerc : Essai sur l’histoire de la Franche Comté, Tome II, p. 454.)

 

XXIII

Nozeroy, 11 avril [1446]. — Lettre de Louis de Chalon à Pierre Jeanneret, son receveur de Grandson, lui mandant de lui apporter le 14 avril à Echallens, où il se trouvera avec le comte d’Armagnac, 30 livres d’argent et du poisson.

A nostre chier et bien amé Pierre Jehanneret,
Nostre receveur de Gransson.

Le prince d’Orenges, etc.

Chier et bien amé, nous serons jeudi prouchain au souper à Escharlain et pour ce qu’avons bien affaire d’argent nous vous mandons que vous soyez devers nous au dit Escharlain le dit jeudi au souper et nous apportez les trente livres que /306/ nous devez de reste des quatre vins livres que savez et en ce ne faites faulte sur tant que doubtez encourir nostre indignacion et sur peine de perdre tous les offices que avez de nous. Chier et bien amé Dieu soit garde de vous. Escript à Noseroy le XIe jour d’avril après pasques. Item nous appourtez sur l’argent des dites trente livres deux bonnes anguilles quatre grans baiches et trois ou quatre XIInes de palées deux XIInes de boillesses car nostre frere Charles d’Armignac sera avecques nous et gardez bien comme qu’il soit que n’y faites faulte, car il nous tourneroit à grant deshonneur que ne pouriez reparrer.

(Signé) Loys de Chalon.
Original papier. Archives du Doubs. E 1247.

 

XXIV

Echallens, 30 novembre 1447. — Lettre de Louis de Chalon autorisant Guillemin de la Forge de racheter de la taille, moyennant une cense annuelle, un mex de la terre d’Echallens.

Loys de Chalon, prince d’Oranges et seigneur d’Arlay. Savoir façons à tous comme il soit ainsi que Vauchier Cinquensolz d’Escharlain, nostre homme tailliable, ait donné en mariage à Guillemyn de la Forge une sienne fille appellée Perusson, en esperant que ledit Guillemyn de la Forge vient ou mex dudit Vauchier et qui gouvernast ledit mex et qui administrast audit Vauchier ses necessites pour ce que dit Vauchier est anciens et débilité de son corps, et pour cause que ledit mex est sert et tailliables ledit Guillemyn est reffusant de il venir demorel, à laquelle cause ledit mex pouroit venir en ruine et demorel vacquant, lequel Guillemyn nous a suplier et requis humblement que nous pleust consentir que ledit mex feust afranchi de la servitute et que la taillie qui doit feust remisse en cense, nous, inclinans à la suplicacion et requeste dudit Guillemyn et aussi heu regart que ledit Vauchier est ancien et débilité de sont corps et que ledit mex pouroit venir /307/ en ruyne, avuons consentir et par cest presentes consentons audit Guillemyn de la Forge et à ses hoirs et les ayans de lui cause que ladite taillie qu’est dehue chascun an à cause dudit mex soit remise en cense et que le dit mex que est sert soit désormais censeable et frant parmiey que ledit Guillemyn et ses dis hoirs nous paierons chascun an de cense ou à noz hoirs seigneurs dudit Escharlain le jour de feste de Saint Martin divers perpetuelement la somme de vint et deux solx bonne monnoye de Savoye, deux coppes de froment de cense, messure d’Escharlain et les thoises de sa maison et parmy aussi la somme de douze livres, bonne monoye dessusdite que dudit Guillemyn en avuons heu et receuz par une fois et dompt nous sommes comptans et le quictons et ses dis hoirs. Promectons en bonne fois pour nous et noz hoirs ce present consentement et tout le contenuz en ces présentes lui avoir, tenir et garder fermement sans jamais venir ne faire venir par nous ou les nostres à l’encontre et mandons par cest présentes à tous nous justiciers et officiers dudit Escharlain présent et advenir que ledit (Guillaumyn) et ses dis hoirs laissent joir, user de nostredit present octroy. En tesmoiny de ce nous [avons fait] sceller cest presentes lettres de nostre seel. Données en nostre chastel d’Escharlain le darenier jour de novembre l’an mil quatre cens quarante et sept. Et parmy demorant nostre homme en toute justice censeable pareillement que sont ceulx dudit Escharlain, Donné comme dessus.

Arch. du Doubs. E Chalon, supplément.

 

XXV

Nozeroy, 28 janvier [1448]. — Lettre de Louis de Chalon à Pierre de Jougne, son châtelain d’Echallens, de se rendre en ambassade à Bâle au sujet de Fribourg.

A nostre tres chier et bien ame escuier Pierre de Joigne, nostre chastellain d’Escharlain.

Très chier et bien amé, Vuillez savoir que nous avons receu lectres de par pape Félix et les gens du conseil de /308/ mons. le duc de Savoye par lesquelles ilz nous escripvent que vuillions envoier ambaxade de par nous au lieu de Basle avec la leur à la journée qu’il sil doit tenir touchant le fait de Fribourg. Et avons délibérer d’envoier à la dite ambaxade audit Basle nostre cousin Pierre de Chavirey et vous. Pour quoy vuillez vous disposer, toutes autres choses arrières mises, d’aler avec nostredit cousin en ladite ambaxade et soyez tout prest au lieu de Neufchastel, ce mercredi prouchain, auquel lieu nostredit cousin vous puisse trouver toust prest pour partir, lequel il sera. Et au fait de vostre despense nous vous envoions ung mandement adressant à nostre receveur de Belmont que il vous baille incontinent la somme de vint livres bonne monnoye de Savoye. Et ou cas que il ne les avoit présentement, si veuillez trouver moyen de vous de les avoir et puis les recouvrez sur le dit receveur, et aussi pour fournir vostre dite despense avons baillié à nostredit cousin Pierre de Chavirey vint salus d’or, si vous vuillez emploies en ce fait. Et y faictes aussi comme en vous en avons fiance et tellement que nostre honneur y soit garder et ny vuillez faillir sur tant que nous amés. Très chier et bien amé Nostre Seigneur vous ait en sa sainte garde.

Escript à Noseroy le XXVIIIe jour de janvier [1448]. Gardez bien que pour quelque raison ne cause qu’il vous puisse venir que ne faictes point defaulte d’estre ledit mercredi prochain audit Neufchastel auquel lieu trouverés ledit jour sans point de faulte ledit Pierre de Chavirey prest pour aler outre.

Loys de Chalon.

Orig. papier,
(au dos). N’obliez pas de nous envoier les siex botequins de motarde de Valoys que vous ordonnasmes avant hier à Lausanne de nous acheter et ne faictes faulte de les nous envoier incontinent.
Arch. du Doubs (Fonds Chalon supplément.) /309/

 

XXVI

Nozeroy, 28 février 1448 [n. st.]. — Lettre de Louis de Chalon à Pierre de Jougne, son châtelain d’Echallens, au sujet de l’exécution d’un Vaudois.

Le prince d’Orenges, etc.

Tres chier et bien amé, il a pardeça certains Vadoys que convient bruler, pourquoy incontinent cestes veues, traiez vous à Lozanne et parlez au borreau pour venir par deça, lequel y faictes incontinent venir avecques Guillaume Lorer chevaucheur que envoyons par de là pour ceste cause et baillez argent audit borreau pour ses despens de venir par deca, et en nous rendant cestes certifficacion de ce que lui baillerez, nous le vous rendrons, mais gardez comme qu’il soit que ne faictes nulle faulte de le nous envoyer incontinent. Très chier et bien amé, Dieu soit garde de vous. Escript à Noseroy le dernier jour de février mil IIIIc XLVII.

Loys de Chalon.

Archives du Doubs. E supplément.
orig. papier.

 

XXVII

Grandson, 9 octobre 1453. — Reprise de fief du comté de Neuchâtel par Jean, comte de Friboug, des mains de Louis de Chalon.

En nom de Nostre Seigneur, Amen. Par ce présent publique instrument à tous apparisse evidamment que, en l’an d’icellui courrant mil quatre cens cinquante et trois, le nuefe jours du mois d’octobre, heure environ prime dudict jour, en l’indicion première du pontiffiement de Nostre très saint Père le pappe Nycolas cinquiesme, l’an d’icellui septieme, au lieu de Gransson ou dyocèse de Losanne, ou chastel dudit lieu, en la grant saule d’icellui chastel, en présence de nous, notaires publiques subsequens /310/ et des tesmoings cy après nommés personelment constituez et estaubliz et ad ce especialment venans, hault, noble et puissant seigneur messire Loys de Chalon, prince d’Oranges, et seigneur d’Arlay d’une part et noble et puissant seigneur messire Jehan, conte de Fribourg et de Nuefchastel d’aultrepart, ledit messire Jehan, conte de Fribourg et de Nuefchastel estant devant la personne de mondit sr le prince et tenant ses deux mains jointes entre les mains d’icellui monsr le prince, a reprins de luy en fied liege son conté de Nuefchastel, ses appartenances ensamble des autres seignories, lesquelles avec ledit conte ses predecesseurs comme disoit et confessoit, avoient autreffois reprins en fied de mondit sr le prince et de messires ses predecesseurs et dont il sera tenuz de bailler sa déclaration deans terme dehu, et luy a fait d’iceulx les devoirs et fieds et homaige de main et de bouche en tel cas accostumez, donné et presté serement de feaulté, le tout par la forme et manière que ont fait messires ses prédécesseurs et selon la nature et condicion dudit fied. A quoy mondit sr le prince l’a receu par la forme et manière que il et ses prédécesseurs ont receu les prédécesseurs de mondit sr le conte, jaidis contes de Nuefchastel, et ouctroyez à icellui de luy entretenir et observer ce que entre leursdis prédécesseurs a esté accomodez en faisant ledit fied et selon la forme des reprinses par cy devant faictes dudit fied, saul le droit d’icellui monsr le prince et l’autruy, desquelles choses dessus dites toutes et singulières ledit monsr le prince a demandé et requis à nous les dis notaires à luy estre fait instrument publique, ung ou plusieurs d’une mesme substance et teneur, que luy avons ouctroyez et ouctroyons en ceste forme soubz nos saings accostumez. Ce fut fait les an, jour, lieu, heure, indicion et pontiffiement dessus dit, presens ad ce faire Reverend Père en Dieu messire François de Villerzel, abbé de l’Ile Saint Jehan, religieuse personne messire Guillaume Verne, prieur de Morteau, nobles seigneurs messire Robert marquis de Hosperch, seigneur de Routelin, Loys de Vienne, seigneur de Ruffey et de Chevreal, messire Guillaume de Valengin, messire Jehan de Thoraise, seigneur de Torpes et de l’Ost, messire François de Menthon, messire Jehan /311/ de Nuefchastel, seigneur de Vaulmarcux, messire Jehan de Chavirey, seigneur du dit lieu, messire Jehan de Chissey, seigneur de Saugey, chevaliers Pierre de Chavirey, seigneur de Chastelvillain, Gauthier de Falerens, seigneur de Frontenay, Bernart de Geres, seigneur de Montagu, Hugues de Vuillafens, seigneur d’Estay, Outhenin de Claron, Symon d’Oussans, le Bon de Blief, Botherin de Nozeroy, Girard Loyte, Jehan de Chantrans, Pierre de Joigne, le grant Jaiques de Vaultravers escuiers, honorables hommes et saiges maistres Guillaume Gauthier, official de Besençon, Jehan Moiroz et Henry Bouchet, licencié en lois et plusieurs autres tesmoins ad ce appelez et requis.

Original parchemin. Archives du Doubs. B 539.

 

XXVIII

Relation d’une ambassade envoyée par le prince d’Orange, le 4 mars 1458, à Neuchâtel, auprès du margrave Rodolphe de Hochberg, pour lui faire connaître ses droits au comté.

Nobilissimo, magnifico, potenti et nostro metuendissimo domino, Lodvico de Cabilione, principi Auraice et domino de Arlato, Petrus de Chauvirey, domicellus, dominus Castri Vallani et vester castellanus Nosereti Johannes Veteris clericus, licenciatus in legibus vestri consiliarii et commissarii a vobis in hac parte honorem et quamlibet humilem obedienciam. Noster metuendissime domine placeat vobis scire quod, vigore et auctoritate vestrarum patencium litterarum et mandati sigillati vestro sigillo imperi cui presens nostra rescriptio et certificatio de hiis que fecimus vigore dicti mandati est annexa, quod nos, sabbati quarta die Martii, millesimo quadringentesimo quinquagesimo septimo, summo mane, dicta die exivimus de vestra villa et castro Grandissonis pro divertendo et nos transfferendo in comitatu terra villa et dominio Novicastri pro faciendo notificationem et alia de quibus est facta mentio in vestro dicto mandato et propterea post diligentem inquisicionem et informacionem per nos factam scivimus et percepimus /312/ per plures quod tenebantur clause et firmate porte burgi et castri de Boudri, prima villa clausa dicti comitatus, versus dictum Grandissonem et que est infra dictum comitatum a dicta parte circa duos leucas absque permittendo intrare transeuntes prout solitum erat ante obitum domini Johannis comitis Friburgi et dicti Novicastri nuper defuncti transsivimus per unum passum stantem versus occidentem extra dictam villam per flumen et ripariam Dolorose illac transeuntes et tantum erravimus dicta die quod devenimus circa decimam horam dicte die ante meridiem usque satis prope dictam villam Novicastri, ubi invenimus unum nominatum Guillelmum Jaquemet de Pontelleyo notarium imperialem qui venerat illuc ut dicebat de mandato et precepto vestri procuratoris pro instrumentando significaciones et alia negocia que faceremus in dicto Novo Castro, qui venit nobis obviam circa duos tractus arcus extra dictam villam dicens cum timore maximo et pro placitate que illico quod gentes domini Marchionis de Rutelin qui ut dicitur pretendit jus habere in dicto comitatu eum perceperant in dicto loco fecerant sibi dici et conferri magnum timorem et terrorem etiam paciens inconveniens de sua persona per certas gentes interpositas dicti fingentes esse suos amicos ad ipsum impendiendum ut nichil faceret super eo quod dictum est et ab illo loco ivimus usque ante pontem prime magne porte dicte ville ubi invenivimus supra dictum pontem ante dictam portam stantem clausam plures gentes omnes munitos gladiis et armis prope se stantibus interquos erant Richardus Seveney, mayor dicti Novi Castri et Richardus Le Pit notarius qui nos recusarent intrare infra dictam villam dicendo quod non intrarent nisi illi qui erant onerati exparte vestra exponere vestram credenciam et hoc pendente interloquendo, dictus Guillelmus Jaquemet qui volebat intrare post nos in dicta villa pro instrumentando fuit captus per brachium et retractus absque permittendo eum intrare infra dictam villam taliter quod ipse retrocessit et non intravit in ea et tunc post plura verba et demonstraciones eis factas nos permiserunt intrare et venire usque ad casti um, ubi post certum tempus intervalli et postquam dictus dominus marchio nos fecerat prandere /313/ et facere bonum festum de suis bonis, nos exposuimus et notificavimus eidem in presencia nobilis et potentis domine Marie de Cabilione, relicte dicti quondam domini Johannis, olim comitis Friburgi et dicti Novicastri plurium que notabilium personnarum ecclesiasticarum nobilium quam aliarum, contenta in dicto vestro mandato et requisimus dictam dominam Mariam de capiendo onus regiminis dominii dicti Novicastri sub vestra manu prout continetur in eodem que prout nobis visum fuit propter timorem displicendi dicto marchioni, noluit acceptare dictum onus, postquam accepit deliberacionem deliberando super hoc et quamvis obtulerimus et presentaverimus dicto marchioni de ei faciendo visionem et copiam dicti mandati quod sibi exhibuimus, et presentavimus realiter de recipiendo eum in opposicionem si se opponeret secundum tenorem illius sibi declarando ad plenum dicta contenta ipse noluit videre nec recipere ymo requisivit nos retrahi pro deliberando super hoc. Et hoc pendente nobis fecit declarari per aliquas gentes notabiles et alias de suis gentibus et domo de non instrumentando aliquid de dictis significacionibus execucionibus et aliis que faceremus in sua presencia si non vellemus cadere in periculo et incontinenti que sequerentur de facto taliter quod nos oportuit, timore dictarum comminaciorum dictorum inconveniencium, facere retrahi Guillelinum Coinde de Grandissone notarium imperialem qui antea fuerat presens ad ea que dicta sunt et successive quia dicta domina non acceptavit dictum onus commisimus et deputavimus dicto regimini dicti dominii secundum formam dicti vestri mandati in presencia dicti marchionis dicte domine et aliorum supra nominatorum nobilem virum Petrum de Joigne domicellum vestrum baylivum de Orba, castellanum Grandissionis et de Eschallens qui presens accepit et acceptavit onus sed dictus marchio in delacionem de volendo obedire dicti manus apposicioni et contenta in dicto mandato petens a nobis vestris dictis commissariis vobis supplicari quod expectaretis usque post publicacionem testamenti dicti quondam domini Johannis olim comitis supradicti quam dicebat debere fieri ante dominicam Ramis palmarum proxime futuram /314/ et quod postea tam respectu dicte manus apposicionis quam certarum requisicionum amicabilium de quibus eum requisivimus per vestrum et ordinacionem pro cognoscendo de jure parcium amicabiliter si velletis petere vel querelare ipse se consuleret suis parentibus amicis et alibi et vobis faceret responsum super hoc, taliter quod deberetis contentari. Cui respondivimus quod oportebat quod faceremus et servaremus vestrum mandatum ad ordinacionem et illud quod dictum est et factum prout supra et absque nos volendo desistere quod libenter vobis decernimus et refferimus et non aliter neque alio modo noluit obtemptare nec obedire dicto mandato significacioni et execucioni illius et successive recessimus a dicto castro sub intentione eundi ad hospicium nostrum in dicta villa inferius et eundo prope portam dicti castri ante ecclesiam dicti loci invenimus magnam cohortem hominum tam illorum dicti marchionis inter quos erant dominus de Valangin, Johannes Allet, Symon de Clarone, Bichardus Senevex, mayores quam aliorum habitatorum dicte ville Novicastri congregatorum propterea in magno numero per quos ut dicebat et ipsis presentibus dictus Johannes Allet, domicellus, majordomus dicti marchionis dixit plura verba portantia minas occasionis dicte execucionis et notificacionis dicendo quod non erat de eorum more et libertate et quod non possent pati patienter et aliqui nobis dixerunt et consuluerunt quod recederemus brevius quod possemus ad evitandum furorem populi communitatis dicti loci moti et positi in tumultu pro dicta execucione. Et quamvis obtulerimus et presentaverimus omnibus illis qui ibidem erant presentes recipere quemcumque qui se vellet opponere in opposicionem secundum formam dicti mandati, quod pluries notificavimus dictis habitatoribus congregatis, prout supra et declaravimus bene plene contenta in dicto vestro mandato, nichilominus tamen plures dictorum habitatorum quam alii homines de domo dicti marchionis perseverarunt in dictis comminacionibus et pluribus minis maxime quod causa quo per nos vel dictum Petrum de Joigne aliquid fieret ulterius respectu dicte manus apposicionis et contentorum in dicto mandato et quod procederemus faciendum /315/ aliquas affixiones ponendo aliquas copias dicti mandati valius loci publice dicte ville vel castro dicti Novicastri quod remaneremus impediti et arrestati ibidem affirmans dictus Johannes Allet et plures alii ex gentibus dicti marchionis quod si ita faceremus quod nos caderemus in periculo habendi tale scandalum et inconveniens per viam facti quod esset irreparabile et quod non possent impedire et sic nos oportuit dicedere absque aliud faciendo quamvis quod proposuissemus ponere affigere dictas copias in dictis locis publicis eo maxime quod invenimus, vidimus et percepimus tam in dicta villa quam exeundo de eadem plures homines armatos et fdlcitos baculis, gladiis, balistis, macquis et aliis armis et tam propre dictam portam dicte ville intus et extra quam alias quod nobis dedit et debuit dare causam et occasionem dubitandi inconveniens et viam facti. Et ab illo loco revertendo applicuimus in porta dicti burgy de Boudry ubi invenimus plures homines armatos et munitos gladiis et balistis qui non permiserunt nos intrare in eodem, ymo tenebant dictam portam clausam quousque Stephanus Boiteux, castellanus dicti Boudry, venit illac qui nos permisit intrare et cui et etiam pluribus et habitatoribus dicti loci stantibus ibidem presentibus nos notificavimus et significavimus dictis manus apposicionem et significacionem ac execucionem fuisse factam vigore dicti mandati in dicto comitatu in dicto Novocastro prout dictum est, qui castellanus nos insecutus fuit usque ad aliam portam dicti burgi prope castrum una cum pluribus gentibus dicte ville eundo versus dictum Grandissonum in qua porta similiter erant plures gentes armate et fulcite armis gladiis utentes verbis diversis rigorosis maxime nobis improperando nos transivisse per alium locum quam per dictam villam eundo ad dictum Novumcastrum et absque nos relaxando et dimittendo in modum quod potuissemus absque incurrendo inconveniens ponere vel affigere dictam copiam dicti vestri mandati prout proposueramus facere. Postea nos transtulimus ad castrum de Vaulmarcoux, in quo nos notificavimus et declaravimus domino Johanni de Vaulmarcoux, domino dicti loci, dictam manus apposicionem execucionem et notificacionem supra dictam et /316/ totum tenorem dicti mandati cui nullus se opposuit et fuerunt presentes ad hoc quod dictum est videlicet postquam exivimus de dicto Grandissone, Guillelmus Coinde, notarius publicus et imperialis et juratus curie ecclesie lausannensis quousque fuit erectus ut dictum est de dicto castro Novicastri, Johannes filius Petri de Joigne domicellus sicut dictus notarius et in omnibus supradictis dictus Petrus de Joigne domicellus et Johannes Bonnart et in hiis que fecimus in dicta villa Novicastri in introitu et exitu et etiam in dicto Boudry cum dicto notario dicti Petrus de Joigne, Johannes eius filius, Johannes Bonnart, Nicolaus Magni de Nosereto, Jaquetus Rolet du Montoux prope de Vers, Jvenot Fainez de grangiis de Deissra versus Arenthodo et Petrus Bonne de Divione. Et hec noster metuendissime domine vobis certificamus fuisse facta per nos vestros commissarios quos supra testibus signis nostris manualibus, sigillo mei dicti Petri de Chauvirey et signeto dicti Guillelmi Coinde notarii hic positis ad nostram requisicionem, quinta die marcii, millesimo quadringentesimo quinquagesimo septimo.

Sic signatis : P. de Chauvirey et J. Veteris.

Copie contemporaine, papier. Archives de Neuchâtel cote 222.

 

XXIX

4 mars 1458 (n. s.). — Relation par Guillemin Jaquemet, de Pontarlier, notaire, de son voyage à Neuchâtel et de sa tentative infructueuse pour y instrumenter au nom du prince d’Orange.

Je Guillemin Jaquemet demourant à Pontallié, notaire de l’auctorité impérial publique, juré de la court de Besançon et tabellion général de très hault, très puissant et très excellent prince monseigneur le duc et conte de Bourgogne en son dit conté de Bourgogne, certiffie à tous en vérité, aujourduy, date des présentes, heure de prime ou environ, je suis venu et arrivé en la ville de Neufchastel pour instrumenter certaine main mise dudit monseigneur le prince /317/ d’Orange ou conté dudit Neufchastel et notifficacion d’icelle que vouloient faire noble seigneur Pierre de Chavery seigneur de Chastelvilain en partie et honnorable homme et saige maistre Jehan vieux clert, licencié en loix, commis ad ce par mondit sr le prince d’Oranges, auquel lieu je n’ay pas trouver lesdis commis et en les actendant audit Neufchastel jusques à deux ou trois heures avant mydy dudit jour ou environ, ung des religieux du prieuré de Morteau nommé messire Besançon Madurel que là estoient avec le marquis de Rothelin, est venu à ma personne et m’a tirer à part et m’a dit les paroles suigans ou les semblables, c’est assavoir : « Guillemin, je vous ame bien et seroye desplaisant de vostre dommaige; l’on a perçeu que vous estes cy venu pour instrumenter pour aucunes choses que vuillent cy venir faire aucuns des gens de monseigneur le prince d’Oranges. Je vous certiffie que l’on ne leur y souffreira riens faire, l’on leur ouvrera bien les portes, mais je fais doubte que quand ilz seront entrer deans qu’ilz n’en partiront pas quand ilz vouldront et principalment au regard de vous, se vous demourés icy guères, vous y pourrés avoir dangier et dommaige de vostre personne. Je vous donne de conseil que le plus briefz que pourrés vous vous departés de ce lieu et que vous en alés dehors, car je vous certiffie que tantost seront en ceste ville grant quantité de gens d’Alemaigne, pour monsr le marquis de Rothelin. » Et par ces lengaiges que m’a dit ledit religieux, pour ce que je me suis doubter d’estre ouctragier de ma personne au dit lieu de Neufchastel, je me suis departis dudit heu de Neufchastel en entencion de moy en aler ors d’icellui lieu, tant pour éviter d’estre outragier de ma dicte personne comme dit est, comme pour aler au devant des dis commis leur dire ce que dessus est dit, et moy estant environ deux trais d’arc loingz de la porte diudit Neufchastel, estant icelle porte deyers Grançon j’ay encontré les dis commis, auxquels l’ay dit, notiffier et declairer les choses dessus dictes. Et puis suis retourner avec eulx contre ledit lieu de Neufchastel pour faire pour eulx ce dont j’estoye requis par ledit Jehan Bonnart, procureur que dessus, et quant iceulx commis sont estez près et devant la dicte porte ilz ont illec /318/ trouver Richart Senevey, mayeur dudit Neuchastel, Richart Pit, notaire, ung nommé Gruyrès, ung aultre nommé Penthecoste et plusieurs aultres ou nombre d’environ vint hommes, les pluseurs embastonés de glaves et furnis de armes, gardans la dicte porte, auxquelx les dis commis ont requis avoir ouverture de la dicte porte, lesquelx mayeur et ses suigans dessus nommés de prime face ont fait difficulté de faire ouverture de la dicte porte disans que s’ilz vouloient faire aucuns explois ilz ne souffriroient pas de les y laisser entrer. Et après ce que iceulx commis leur ont faictes aucunes remonstrances, les dis de Neufchastel leur ont fait ouverture de la dicte porte et sont entrer en la dicte ville et ainsi que je suis voussu entrer avec eulx en icelle ville, l’ung des dis de Neufchastel que je ne cognois m’a pris par le bras et m’a dit : « Au regard de vous, vous ne entrerés pas en la ville; alés-vous en et vous ferés que saige. » Et justement après, plusieurs des dessus dis dudit Neufchastel m’ont aussi dit : « Alés-vous en, car se vous vous parforcerés de instrumenter en ce lieu de Neufchastel, vous vous mectreyés en dangier de vostre personne, car la commune ne le pourroit souffrir, pour ce qu’il n’est pas à coustume de le ainsi souffrir faire. Et se vous promectons que si ceulx que y sont entrer y veuillent faire chose que soit à nostre desplaisir, nous leur donrons à boire de l’aigue qu’est en ce lac, que vehès là », enmonstrant le lac qu’est puis la dicte ville de Neufchastel. Auxquelx j’ay dit et respondu qu’ilz ont pas assez grant ventres pour tout boire et après leur ay dit : Et puisqu’il ne vous plait que je entre leans, je m’en vays et adieu et ainsi je m’en suis retourner. Tesmoing mon seing manuel cy mis, le sambedi quatre jour du mois de mars l’an mil quatre cens cinquante et sept.

Jaquemet.

Original, parchemin. Archives du Doubs. B 540. /319/

 

XXX

[1er Novembre 1457]. Marché conclu par Louis de Chalon avec le sculpteur Jean de la Huerta pour la confection de trois tombeaux, extrait d’un procès entre les deux parties pendant par devant l’official de Besançon.

Et primo quod, cum admodum annis nuper lapsis citra et circa, sunt decem anni lapsi, ipse dominus princeps, quadam devocione motus, fieri et ministerio seu arte dicti Johannis rei, operari facere vellet et intenderet ovragia et negocia que secuntur videlicet, petras cisas et dicta arte operatas, similitudines seu ymagines quadraginta octo hominum ploiantium et sex jacentium, gallice « pour faire et ovrer du mestier dudit deffendeur quarante huit ploians et six gesans », ad ponendas in tribus sepulturis eciam lapidibus, ad ymagines et similitudines leonum, pulvilnalium et parvorum canum operatis et cisis, munitos videlicet dictos sex jacentes suis armis armosiatos gallice « armoyés de leurs armes ». Item etiam in pede, seu gallice « au bout de trois seigneurs gesans » ymagines seu similitudines duorum angelorum tenencium, gallice « ung palme encloué et garni de tinbre. » Verum est quod ipse reus ad hoc ad plenum deliberatus et ex ejus certa sciencia se predicto domino principi punctavit et affirmavit operarium bonum et sufficienter ad predicta ovraigia sibi domino principi perficiendum. Et quod plus est, cum predicto domino principe convenit, forisavit et inhiit de predictis ouvraigiis et operis (sic) perficiendis, complendis ac perfectis et completes ex integro ad dictamen et respectum operariorum in talibus expertorum et sufficientium reddendis, ad vel infra certum terminum tunc futurum et nunc elapsum, videlicet quemlibet jacentem armis suis armosiatum, necnon leonibus pulvinalibus et parvis canibus ut supra munitum, proprecio seu summa viginti francorum, monete currentis in comitatu Burgundie, quemlibet ploiantem predictorum quadraginta octo ploiantium pro precio seu summa unius salucii auri et quemlibet dictorum duorum /320/ angelorum gallice « ung palme encloué et garni de tinbre » ut predicitur, pro precio seu summa duorum saluciorum auri predicti.

Archives du Doubs. E 1349.

 

XXXI

Testament de Louis de Chalon, prince d’Orange et seigneur d’Arlay, fait à Nozeroy, le 8 septembre 1462.

En nom de la saincte et Individue Trinité du Père, du filz et du Sainct-Esperit. Amen.

Nous Loys de Chalon, prince d’Oranges et seigneur d’Arlay, savoir faisons à tous que nous, sain de corps et de pensée et de bon entendement par la grâce de Dieu, doublant les cas et perilz fortuites de la mort esquelx est ung chacun jour submist humaine fragilité, considérans aussi qu’il n’est chose plus certaine de la mort ne plus incertaine de l’eure d’icelle, non vueillant trespasser de ce siegle en l’autre sans faire testament, ordonnance et darière volenté, dispose et ordonne des biens et seigneuries que Dieu nous a donné, vueillans pourvueoir au salut et remède de nostre âme et disposé de nos diz biens et seigneuries que Dieu nous a donné, en demantiers que sens, raison et bonne memoire gouvernent nostre pensée, faisans et ordonnons nostre testament nuncupatif, ordonnance et darnière volunté en révocant tous autres testamens autreffoys faiz par nous en la manière qui s’ensuit.

Premièrement, recommandons nostre âme quant elle piartira de son corps à son Souverain Créateur, à la benoite glorieuse Vierge-Marie et à toute la court celestial de paradis.

Nous elisons la sépulture de nostredit corps en l’église du monastère de Mont-Saincte-Marie en la chappelle a laquelle sont inhumez nos prédécesseurs. Item voulons et ordonnons noz enterrement et obseque estre faiz en ladite eglise bient et solempneement, selon nostre estat, c’est -assavoir nostre enterrement le jour que nostre corps sera /321/ inhumé et ledit obseque deans ung an ensuiguant nostredit enterrement, le tout à l’ordonnance et regard des executeurs de ce nostre present testament ci-apprès nommez.

Item comme nous ayons de pieça mis sus et ayons eu entencion de faire et fonder en nostre hostel une chappelle de chantres musiciens pour y dire et celébrer le divin office, nous qui desirons ledit divin office estre entretenu et tout jours en nostredit hostel et celui de nos enffans et heritier qui sera seigneur de Noseroy, fondons et voulons et ordonnons estre entretenue à tousiours et perpetuelment icelle chappelle en nostredit hostel et de celui de nos enffans qui sera seigneur dudit Noseroy, ses hoirs et successeurs, quelque part que soit son hostel et en icelle estre et devoir estre deux teneurs, deux contres et quatre dessus et deux clercs de la chappelle musiciens, en ce comprins quatre chantres que desia avons ordonné et fondé tant en nostre hostel que en l’église collegial de Noseroy, à nommé, eslire, ordomné, instituer, mué et changié iceulx par celui de noz diz enffans qui sera seigneur dudit Noseroy, ses dits hoirs et successeurs, mesmement à les muer et changier quant il aura cause raisonnable de le faire, par lesquelx voulons et ordonnons estre dicte et celebrée chacun jour en la dicte chappelle, pour le remede et salut des ames de noz predecesseurs, de nous et de nos successeurs, trois messes, c’est assavoir deux en bas, l’une de Nostre-Dame l’autre du Sainct-Esperit et l’autre à note et teneur contre et dessus et selon l’office que au jour appartiendra excepté que les lundi et vendredi voulons et ordonnons les dictes trois messes estre dictes et celebrées de requiem et aussi vespres et compiles à note chacun jour et en oultre ès festes sollempnées, matines à note à teneur contre et dessus, comme dit est et à dire et celébrer ledit divin office tous les dits chantres, prestres et clercs estre presens sur peine de perdre sur celui ou ceulx qui deffauldra ou defaudront pour chacune fois autant qu’il lui devroit appartenir pour icelle fois s’il estoit present, de sa porcion et de la rente cy après desclairée. Laquelle chappelle nous donhons et rentons par ce nostre presens testament à tous jours et perpétuelment /322/ de la somme de cinq cens francs, monnaie presentement cursable au conté de Bourgogne, de annuelle et perpetuelle rente qui sont pour chacun chantre 60 frans et pour chacun clerc de chappelle dix francs qui fait en somme cinq cens frans pour tous les diz gens de chappelle et en oultre pour les diz deux clercs seulement, leur vivre, robe, livrée en l’hostel de nostredit filz, seigneur de Noseroy, que nous assignons, assetons et mectons en apparent au prouffit de la dicte chappelle et des dits chantres, prêtres et clercs qui desserviront icelle sur toutes et singulières les mures, meix et berne et autres choses que avons acquis et que avons au bourg dessoubz de Salins pour par lesdits chantres, prêtres et clercs de ladicte chappelle lever et percevoir les fruiz, rentes et revenues d’icelles par les mains de nostre dict filz qui sera seigneur de Noseroy et ses successeurs et convertir iceulx en la distribucion cy apprès divisée et se ledit assignal n’est souffisant pour en pouvoir lever et percevoir toute la dicte somme de cinq cens francs de annuelle et perpetuelle rente, nous le surplus et ce qui en pourra estre lever sur le dit assignal, assignons et voulons estre parfait et furny sur la porcion et partaige que laissons cy apprès à cellui de noz filz qui sera seigneur de Nozeroy, jusques ad ce que ailleurs il l’ait assigné bien et suffisamment et laquelle somme de cinq cens frans de annuelle et perpetuelle rente nous voulons et ordonnons estre distribuée, chacun an entre les dicts chantres, prêtres et clercs en la manière suigant : c’est assavoir à chacun d’iceulx teneur, contre et dessus soixante frans et à chacun des dits deux clercs dix frans avec ce que dessus, lesquelles sommes voulons estre payé à chacun d’iceulx par quartemps.

Item pour ce que les freres myneurs du couvent que nous avons fondez en notre bourg de Nozeroy sont loigiez en pays de montaigne hors et bien loing de vignoble et que bonnement ne pourroient fyner de vin nous voulons et ordonnons que par nostre filz Loys seigneur de Nozeroy leur soit donné, bailley et délivrez en aulmosne chacun an perpetuellement deans le jour de feste de Toussains de bon vin et net de l’année douze couhrees de vin, lequel leur voulons estre rendu au dit couvent ès fraiz et missions de /323/ nostre filz Loys. Et ad ce obligeons et voulons estre obligiez nostre dit filz Loys et ses hoirs et leur enjoingnons de le ainsi faire sur leurs honneurs et charge de leurs consciences et sur peine de mille livres estevenant a commectre par cellui ou ceulx d’iceulx qui sera en demeure, reffuz ou dilay de le ainsi faire. Et pour chacune année qu’ils y fauldront et a appliquer es dits cas de reffuz, demeure ou dilay la moitié a Monseigneur le conte de Bourgoingne et l’autre moitié a tres reverend pere en Dieu, l’arcevesque de Besançon, qui lors sera et néanmoins voulons et requerons que, la dite peine non obstant et icelle exigee ou non exigee, les procureurs des cours des dits seigneurs et chascun d’eulx les facent et puissent faire contraindre realment et de fait à bailler et faire bailler rendre et delivrer ès dits frères mineurs en leur dit couvent de Nozeroy la dite quantité de vin par sentence d’excommuniment et par la prinse, vendicion sebastacion et exploit de noz biens cy apprès laissez a nostre dit filz Loys, lesquelx pour ce nous obligeons et ypothequons expressement et submectons et juridicions, compulsions, contrainctes et privilèges des seelz des dis seigneurs et de leurs cours comme de chose cogneue confessee et passee en adjugier.

Item voulons et ordonnons en oultre au cas qu’il sera trouve que nous ayons fait tort a aucunes personnes qu’il leur soit amendez, reparez et restituez par noz heritiers cy apprès nommez, incontinant qu’il en apparitra (sic) souffisamment et ou cas que noz heritiers seroient de ce faire reffusans ou dylayans, nous donnons puissance auctorité et faculté aux executeurs de ce nostre present testament, ordonnance et darniere voloncté cy apprès nommez et aux deux d’iceulx qui vacqueront a la dite execucion de faire la dite reparacion et restitucion. Et pour les faire de panre de l’auctorite que leur donnons sans auctorite ou offense de justice et requeste de noz diz hoirs de nos biens, lesquelz tous et singuliers nous mectons pour ce des maintenant pour lors en leurs mains. En deffendant a nos diz heritiers que ad ce faire ne leur donneront aucun empeschement ou contradiction, sur peine d’estre reputez indignes de nostre hoirie et succession, et en oultre voulons et ordonnons /324/ noz serviteurs et chacun d’eulx endroit soy estre remunerez sur nos dits biens par nos dits héritiers des services qu’ilz nous ont fait et feront et au deffault, reffuz ou delay d’iceulx par les dis executeurs selon que leur semblera qu’ilz auront desservy et les services qu’ilz nous ont fait et feront en oultre et par dessus les gaiges que leur avons donne se remunération y chiert.

Item donnons et legons a Jacques nostre bastard pour lui et ses hoirs procreez de son propre corps en leal mariaige et les hoirs de ses hoirs procreez de lui ou deulx en loyal mariaige et non aultrement la somme de quatre cens frans de annuelle et perpetuelle rente, a les panre, lever et percevoir sur ce que nous donnons cy apprès a nostre dis filz Loys de Chalon en la grant saulnerie du Bourg dessus de Salins, par la main de son receveur en la dite saulnerie et de ses hoirs. Et duquel Loys nostre filz et de ses dis hoirs le dit nostre bastard et ses hoirs tiendra et tiendront en fied et hommaige liege les dis quatre cens frans de rente. Et lesquelx quatre cens frans de annuelle et perpetuelle rente le dit Loys nostre filz et ses hoirs masles et les hoirs masles d’icellui et d’iceulx pourront ravoir et recouvrer du dit Jaques et de ses dis hoirs, parmy lui assignant et baillant en bon assignal les dis quatre cens frans de annuelle et perpetuelle rente ailleurs à tenir en fied et hommaige liege comme dessus et ce pour le dit Jaques et ses hoirs masles procreez de son corps en leal mariaige et descendans de lui comme dessus est dit. Et lesquelx quatre cens frans de rente le dit Loys nostre filz et ses hoirs pourra et pourront raimbre et ravoir a tout jours du dit Jaques nostre bastard et de ses dis hoirs parmy lui baillant ou a ses dis hoirs autrepart les dis quatre cens frans de rente en bon assignal ou quatre mille frans pour une foys, desquels quatre mille frans le dis Jaques nostre bastard et ses hoirs sera et seront tenuz de acquerir et acheter rente, que il et ses dis hoirs tiendra et tiendront en fieds et hommaige liège de nostre dit filz Loys et de ses dis hoirs. Et au deffault de lui et de ses dis enfans que la dite rente reviengne de plain droit a nostre dis filz Loys ou a ses hoirs et au deffault deulx a nos autres heritiers cy apprès substituez selon qu’il est /325/ ordonne cy apprès. Et s’il decedoit sans hoirs masles et qu’il laissast une ou plusieurs filles nous voulons et ordonnons qu’elles soyent mariees jusqu’à la somme de deux mille frans monnoye coursable ou conté de Bourgoingne et que la dite rente retournoit et revienne de plain droit au dit Loys nostre filz et a ses hoirs cy apprès nommez.

Item que pour aucunes raisons, causes consideracions ad ce nous mouvans, nous donnons, cedons, baillons, octroyons, delivrons, transportons a tousiours et perpetuelment, par donnacion pure, parfaicte et irrevocable, faicte entre les vifs, vaillable dors maintenant comme apprès nostre decez et dors lors comme de present a nostre dis filz Loys de Chalon absent, les notaires cy apprès nommez commes personnes publiques presens, recevans, stipulans et acceptans pour et au prouffit du dit Loys et de ses hoirs cy apprès divisez, nostre chastel et seignorie de Chastelguyon, nostre droit, part, porcion et partaige de la grant saulnerie Bourg dessus et Vaul de Salins noblesses, fiedz et rerefiedz, juridicions, justices, bois, rivieres, aigues, détours d’aigues estangs, fours, molins, leurs dignités, preeminences, prerogatives et autres droits et appartenances quelconques chargiez des charges cy dessus et apprès declairez, ensamble aussi les meubles qui seront et demeurront de nous au temps de nostre decez en nostre dite place et chastel de Chasteaulguyon et des dites choses pour nous et noz hoirs. Nous devestons et le dit Loys nostre filz absent, les dis notaires presens, stipulans et recevans comme dessus, enkestons et mectons en possession tant par la retenue des usuffruiz d’icelle chose, lesquelx retenons a nous a nostre vie naturelle tant seullement que par ce que confessons et constituons nous tenir et vouloir tenir doresnavant icelles pour et en nom du dit Loys nostre filz et de ses dis hoirs, jusques ad ce que d’icelles il ou ses dis hoirs ayent prins la reelle actuelle et corporelle possession de laquelle panre et apprehender a eulx de leur auctorité prince leur donne auctorité, faculte et puissance lesquelles donacion, cession, transport, devesture, investure, confession et chose dessus dite nous faisons et entendons faire au dit Loys nostre filz pour lui et ses hoirs masles procreez de son /326/ corps en leal mariaige. En oultre les aultres biens a lui cy apprès laissez et divisez pour son partaige sans diminucion d’icellui et sans ce que le dit Loys ne ses dis hoirs soyent tenuz de les conferez ne raporter aucunement en partaige avec ses autres freres ne leurs hoirs es partaiges cy apprès declairez ne aultremept et soubz les reservacions, condicions et modifficacions suiguans, cest assavoir saulf retenu et reserve a nous les diz usuffruiz des dites choses a lui données a nostre vie naturelle tant seullement et en oultre que s’il advenoit que le dit Loys nostre filz alast de vye a trespas avant nous, que au dit cas les dites choses par nous a lui données demeurent et soient nostres comme elles estoient par avant la dite donacion. Et non obstant icelle et aussi que s’il nous survivoit et apprès aloit de vie a trespassement sans laissier hoirs masles nez et procreez de son corps en leal mariaige que au dit cas les dites chouses données viennent, retournent et appartiennent entièrement et de plain droit a nostre tres chier et tres amé filz Huguenin de Chalon son frere s’il vivoit lors ou s’il estoit trespassez a ses hoirs masles nez et procreez de lui en leal mariaige et aux hoirs masles de ses dis hoirs masles tant qu’il y auroit de ses dis hoirs masles descendans d’icellui par la ligne d’icellui des masles et au deffault d’iceulx a nostre tres chier et tres ame filz, messire Guillaume de Chalon et a ses hoirs masles, nez et procreez de lui en leal mariaige et au deffault des dis hoirs masles de tous les dessusdis a nos filles Jehanne et Philippe et aux autres noz hoirs cy apprès substituez selon les grez et ordre d’icelles substituées les dis notaires presens, stipulans et acceptans pour et au prouffit de tous iceulx en tous advenemens des dis cas et d’ung chacun d’iceulx et le tout sans diminucion quelconque que le dit Loys ne tous les dessusdis en puissent faire par vendaiges ne autrement.

Item pour eschever que debas, contens ne proces ne naissent apprès nostre decez entre noz enffans pour raison et occasion de nos dis biens, hoirie et succession, nous d’iceulx noz biens, hoirie et succession par nostre present testament, ordonnance et darnière volenté, faisons les partaiges, divisions, institutions et substitutions suigans, /327/ cest assavoir nous voulons et ordonnons que nostre dit filz messire Guillaume de Chalon ait et empourte pour tous ses drois de aisnesse perception et avantaige a lui accordez au traictié du mariaige de lui et de nostre belle fille dame Katherine de Bretaigne sa femme, noz principalté d’Orenges, baronie, terre et seignorie d’Arlay. Ensamble leurs appartenances que nous declairons et entendons estre cest assavoir du dit principalté les cite, chasteal et territoire du dit Orenges, les chasteaulx, ville et territoire de Courtoison, les maison, ville et territoire de Gigondas, les ville et territoire de Jonquieres, les chasteal et territoire de Suze ou diocèse de Voison. Ensemble les noblesses, prerogatives, fieds, rierefieds, hommaiges, justices, juridicions, peaiges, censes, rentes, bois, aigues, rivières, alloux et autres choses estans des dites seignories, les fieds et ressors des chasteaulx maisons et territoires de Causan, de Maligeay, de Violes, de Sainct Andrey, d’Arboz, de Montmiraz et de Chastelneuf, de Redorciez et les dites terre et seignorie et baronnie d’Arlay, les chasteal, bourg, ville et territoire du dit Arlay ensemble les fieds, rierefieds, ressors appartenans au dit Arlay villaiges, justices et juridicions censes, rentes d’iceulx qui ont accoustume de venir et cheoir en la recepte, charge et compte de nostre receveur d’Arlay tant seullement.

Item voulons et ordonnons que le dit messire Guillaume nostre filz ait et emportoit pour ses partaige, porcion legitime, supplément de légitime et austres drois quelconques, raisons, actions, greuses et querelles que ly pevent et doivent, pourriont et devront comporter et appartenir en oultre les dis avantaige et perception en nos dis biens, hoirie et succession, acquestz et autres raisons, drois et actions, tant a cause des traictiers de mariaige de nous et de feue nostre compaigne dame Jehanne de Montbéliard, sa mere, du dit messire Guillaume nostre filz et de nostre belle fille dame Katherine de Bretaigne son espose par nostre decez comme aussi par quelconques autres tiltres, cause, moyen ou raison que ce soit ou peult estre et tant a cause de nostre dite feue compaigne dame Jehanne de Montbéliard, que autres tous et telz drois que avons et povons avoir ou conté de Tonnerre es seignoiries de Saint Aignant et de /328/ Chemory et parmy ce qu’il soit tenuz de payer ce que pour icellui seroit dehu se riens en est dehu par nous, les baronnies terres et seignories d’Auberive, de Orpierre, de Trischeux, de Ancesnue, de Condulcey, de Montreal, de Cournier, de Montbrison, de Novisant, et de Caromb. Ensemble et avec les fiedz, rierefiedz, ressors, noblesses, prerogatives, justices, juridicions, hommaiges, censes, rentes et autres drois appartenances des dites seignories et les meubles qui seront et demourront de nous en tous les dis chastealz cy devant laissiez au dit messire Guillaume nostre filz, exceptez les lectres et tiltres qui ne toucheront ne concerneront les dites seignories que lui laissons.

Item tout et tel droit et action que nous avons, povons et devons avoir es chasteaulx, villes, territoires et seignories de la conté de Velin et baronnie des Baux et de la seignorie de Lers.

Item toute et telle rente, partie et porcion de tous et telz drois et actions que avons, pouvons avoir et qui nous compectent et appartiennent, peuvent et doivent compecter et appartenir, es terres et seignories de Oizeller, de Rougemont, de Maillot, de Montsort et de Mirebel ou conté de Bourgogne, de Vaury et de Charny et tous et tel droit qui nous pourroit et devroit escheoir en et de la terre et seignorie de Tilchastel ou temps advenir.

Item tout et tel droit que nous avons, pouvons et devons avoir es appartenances des sudites terres et seignories.

Item nostre droit de Varre empres Montfaulcon.

Item le rachat et droit d’icellui qui nous compete et appartient au regart des chastel, ville et seignorie de Marnay, a l’encontre de quelque personne que ce soit ou puisse estre et la somme de dix mille florins pour laquelle il fut baillé laquelle lui voulons estre payée par nostre heritier universal cy apprès nommé pour emploier et convertir ou dit rachat du dit Marnay lequel des maintenant pour lors qu’il sera racheté nous voulons appartenir a nostre dis filz messire Guillaume de Chalon.

Item tous et telz drois, raisons, actions, questions et querelles que avons et qui a nous compectent et appartiennent contre les héritiers de feu messire George jadis seigneur /329/ de la Treymoille et contre tous autres a qui peult touchier leurs consors en la cause pour ce mehue ou parlement de Paris.

Item cinquante escuz d’or de annuelle et perpetuelle rente, chacun escu compte pour seze gros viez et de monnaie coursable ou conté de Bourgoingne, assiz et assigney sur les rentes, censes, revenues, prouffiz et emolumens quelconques du chastel et ville de Bouclans et de ses appartenances et a les y relever chacun an de rente et sur les autres terres de nostre dis filz messire Guillaume que avons acquis et achetez de Guillaume de Nozeroy nostre receveur à Salins, auquel le dit messire Guillaume nostre filz les avoit venduz, ensamble les arreraiges qui en sont dehuz.

Item nostre hostel et maison de Avignon.

Item voulons et ordonnons que ou cas que le douhaire de nostre dite belle fille dame Katherine de Bretaigne a elle donnée et convenance tant en faisant le traictié de mariaige de nostre dit filz messire Guillaume de Chalon et d’elle que autrement aura lieu en quelque temps que ce soit que icellui douhaire soit prins, levé, et payé sur le partaige cy dessus par nous laissié, divise et ordonné a nostre dis filz messire Guillaume de Chalons.

Item voulons et ordonnons que nostre dis filz Loys de Chalon ait et emporte en oultre la donacion a lui faicte cy devant et sans aucune diminucion d’icelle pour son partaige nos chasteaulx, villes, seignories, justices, juridicions, fieds, rierefieds, noblesses, rentes, censes, bois, rivières, estangs et autres drois et appartenances quelxconques de viconté et mairie de Besançon, d’Arguel, d’Abbans, Rayne, Montmahoul, Saincte Anne soubz le dit Montmahoul, Chalamont, la Riviere, Hostal, Dompmartin, Vuillessin, Bouverens, Noseroy, Mont Raynal, Chasteal neuf, Vers, Chastoillon sur Curtine, Marigny empres le dit Chastoillon, Lons le Saulnier, Pyemont, Blecterans, Beaurepaire, Sainct Laurens de la Roiche, Angisel, Saincte Anne soubz le dit Sainct Laurens, Gevingey, Cuiseal, Varennes-Sainct-Saulveur, Montfleur, Chevannes, Selières et ce que acquerrons ou temps advenir appartenant au dit Selières, noz maisons de Dijon et de Dôle ensambíe et avec les heritaiges que avons /330/ en la valée de Dijon et de Beaulne et a trois lieux alentour et aussi tout ce que avons oultre la Jous dont n’avons ordonné cy dessus, ensamble les villaiges, territoires, juriddicions, justice, noblesses, prerogatives, fiedz, rierefiedz, rentes, censes, boys, alloux, aigues et toutes et singulières leurs appendices et appartenances, des dites places et seignories, et les meubles qui seront et demourront de nous en iceulx chasteaux et places par nostre deccy.

Item voulons et ordonnons que le dit Huguenin de Chalon nostre filz ait et emportoit pour son droit, partaige, part, porcion legitime et autres drois quelxconques a lui appartenans en nostre dicte succession et hoirie les chastealx, villes et villaiges, fiedz, rerefiedz, justices, noblesses, et autres drois quelxconques de Orbe, Eschallans, Boutain, Montaigny le Courbe, Granson, Belmont, Joigne, Franchastel, Roche Jehan, Chastelblanc, nostre droit et partie des haultes Joux, la baronnie de Teys et les chastealz, terres et seignories de Falavier, Pere et Domène, ensemble et avec les meubles estans ès dis lieux et qui y seront et demorront de nous par nostre decez et trespas.

Item tout et tel droit que avons et povons et devons, pourrons et devrons avoir ou temps advenir en la conté de Neufchastel et ès terres et seignories d’Anthon, Colombier et Sainct Romain et autres ,dont avons proces en la court du parlement de Grenoble, contre nostre cousin le marquis de Saluces, ensamble le droit de l’instance du dit proces.

Item la somme de mille frans de annuelle et perpetuelle rente sur nostre partaige de la grant saulnerie de Salins a panre et lever icelle chascun an par les mains du receveur du dit Loys nostre filz et de ses hoirs en icelle saulnerie, lequel conté de Neufchastel se ledit Huguenin nostre filz le obtient ou ce qu’il en obtiendra et la dite somme de mille frans de rente obtienne le dit conté ou non nous voulons et ordonnons que le dit Huguenin nostre filz et ses hoirs dessus dis les tienne et tiengnent et les repreignent du dit Loys nostre filz et de ses hoirs en sied et se le dit Huguenin nostre filz ne obtenoit le dit conté de Neufchastel mais qu’il demeurast au marquis de Hoperg qui le occupe presentement /331/ que en icellui cas le dit marquis et ceulx qui le tiendront appres lui soyent tenuz de le repanre et tenir en fied de nostre dit filz Loys et de ses hoirs dessus dis et lequel fied ensemble tous ses drois nous ou dit cas donnons et laissons au dit Loys nostre filz pour lui et ses dis hoirs.

Item voulons et ordonnons que le dit messire Guillaume nostre filz ses hoirs et successeurs s’ils sont princes d’Orenges et seigneurs d’Arlay soyent tenus de faire les devoirs des fiedz et supporter les charges d’iceulx des places et seignories qu’ilz seront trouvez devoir estre tenuz en fiedz d’aucun prince ou seigneur par les princes d’Orenges et seigneurs du dit Arlay, par tel que cellui ou ceulx de nos autres enffans esquelx avons donnees et laissées les dites places les reprandront et tiendront en fiedz de notre dit filz messire Guillaume de Chalon et de ses dis hoirs et successeurs qui seront princes d’Orenges et seigneurs d’Arlay, saulf et excepté que le dit Huguenin nostre filz ne sera tenu de reprandre ne tenir en fied les seignories que ly laissons en Daulphiné que des seigneurs duquel fied elles seront trouvées estre mouvans et devoir estre tenues d’ancienneté.

Item voulons et ordonnons que Jehanne et Phelippe noz filles ayent et emportent pour tous et singuliers leurs drois, pars, porcion, partaiges qui a elles pevent ou pourroient compecter et appartenir en nostre succession et hoirie, c’est assavoir la dite Jehanne la somme de quinze mille frans et la dite Phelippe de dix mille frans, le tout monnaie coursable ou conté de Bourgogne pour une foys lesquelx leur seront payez par le dit Loys nostre filz et ce en oultre ce que leur a donné et laissié feue nostre tres chiere et tres amée compaigne dame Leonor d’Armagnac leur mere et en ce les faisons et instituons noz heritiers, cest assavoir la dite Jehanne en la dite somme de quinze mille frans et la dite Phelippe en la dite somme de dix mille frans et pour tant voulons et ordonnons que elles et chacune d’elles soyent contentes de nostre succession et hoirie sans ce qu’elles ne aucunes d’icelles y puissent aucune autre chose demander, greuser ne quereller et parmy lesquelles sommes nous voulons et ordonnons que noz dites filles et chacune d’icelles soyent tenuez de faire et louher quictances, cession et /332/ transport au dit Loys nostre filz pour lui et ses hoirs de tous les dis droiz, pars, porcions, partaiges legitimes et autres quelconques qui en icelle et chascune d’icelle pevent, doivent, pourroyent et devroient compecter et appartenir en nos dis biens, hoirie et succession et ou cas que nos dites filles ou l’une d’icelles yroient ou yroit de vie à trespas sans laissiez hoirs nez et procreez d’elles en leal mariaige et sans avoir testé en aucune ordonnance des dites sommes a elles données pour leur dot et mariaige cy dessus nous voulons et ordonnons que la somme ou les sommes de celle ou celles qui ainsi yra de vie a trespas ou yront retourne et reviengne de plain droit au dit Loys nostre filz pour lui et ses hoirs cy apprès declairés.

Item et nos dis trois filz cest assavoir les dis messire Guillaume, Loys et Huguenin de Chalon nommons, faisons, laissons et instituons noz vrays hoirs, cest assavoir chacun d’iceulx ès biens que lui avons donné et divisez et par la manière que lui avons cy dessus ordonné pour son partaige et aultrement et en oultre nommons de nostre bouche, faisons et instituons nostre hoir universal, seul et pour le tout le dit Loys de Chalon nostre filz, en tous et singuliers noz autres biens, fiedz, rerefiedz, drois, raisons et actions quelxconques dont autrement n’avons cy dessus ordonné ou ordonnerons cy apprès et parmy ce icellui Loys nostre filz sera tenu de payer et appaisier tous noz clains, lais, legas, dettes, aulmosnes et accomplir bien et entièrement toutes et singulières les choses cy dessus et apprès par nous ordonnees dont cy devant et après n’avons chargié et ne chargeons austres de noz enffans. Et au regard des anciennes charges dehueez et accoustumeez de payer et supporter sur et pour nos dis biens tant de fiedz que autres dont autrement n’avons ordonne cy dessus, nous voulons icelles estre payées et supportées en et sur chacun bien et par la maniere que lon les a accoustumé de payer et supporter le temps passé et par ung chacun de noz diz hoirs au regard de son partaige. Et pour et parmy les donnacions, divisions, partaiges et institutions dessus dites voulons et ordonnons que nos dis enffans et hoirs et chacun d’eulx en droit soy, soyent et se trouvent contens et souffis et pour bien et /333/ souffisamment partiz, apporcionnez et instituez de nos dis biens et succession et de toutes eschoites, drois, raisons et actions que ilz ont, peuvent et pourront avoir en iceulx et que plus avant ilz n’y puissent greuser, quereller ne demander mesmement l’ung d’eulx sur le partaige de l’autre ains qu’ilz soient tenuz de laissier et souffrir l’ung l’autre d’eulx joir, user et exploitier paisiblement de son partaige mesmement que les dis messire Guillaume et Huguenin noz enffans et leurs hoirs soient tenuz de laissier joir et user le dit Loys nostre filz et ses hoirs des biens a lui cy dessus donnez et divisez par nous sans luy y donner ne procurer ou conseillier estre donné aucun troble, contredit ou empeschement quelconque sur peine de perdre par icellui qui fera le contraire son partaige et icellui estre acquis et appliqué a l’autre ou autres, tenant, gardant et observant les dites donnacions, partaiges, divisions, institucions et tout le contenu de ce nostre present testament.

Item et en cas que le dit messire Guillaume nostre filz ira de vie a trespassement avant nous survivant Jehan son filz seul ou avec luy autres enffans procreez du dit Guillaume en leal mariaige ou dit cas le partaige que avons ordonné cy dessus au dit messire Guillaume nostre filz ordonnons a ses dis enffans masles et en ce ou dit cas les nommons, faisons et instituons noz hoirs et s’il estoit ainsi alez de vie a trespas delaissiez aucunes filles une ou plusieurs par lui procreez en leal mariaige nous au regart d’icelles voulons et ordonnons leur droit et porcion ainsi que cy apprès est dit et divisé.

Item et se le dit messire Guillaume de Chalon nostre filz n’est ou ne veult estre nostre hoir ou se il lest et va de vye a trespassement sans laissier enffans masles procreez de son corps en leal mariaige ung ou plusieurs procreez de son corps en leal mariaige en quelque temps que ce soit ou adviengne nous ès dis cas et chacun d’iceulx instituons noz hoirs et substituons au dit messire Guillaume nostre filz et a ses enffans masles jusqu’au dernier d’iceulx inclusivement nostre dit filz Loys se icellui est lors en vie ou s’il estoit ja trespassé ses enffans masles et les enffans masles de ses enffans masles par avant trespassez en ligne et non /334/ en teste en tous les biens,, drois, raisons et actions par nous laissiez cy dessus a nostre filz messire Guillaume de Chalon et qui lui seront et pourront estre advenuz de nous sans detraction d’aucune quarte, laquelle detraction nous es dis cas et chacun d’iceulx leur interdisons et deffendons expressement.

Item et semblablement se le dit Loys de Chalon nostre filz nest nostre hoir ou se il l’est et il va de vie a trespas sans laissier enffans masles ung ou plusieurs procreez de son corps en leal mariaige ou ses dis enffans masles sans laissier telz enffans que dessus en quelque temps que ce soit ou adviengne, nous ès dis cas et chacun d’iceulx instituons noz hoirs et substituons a nostre dit filz Loys et a ses dis enffans masles le dit Huguenin nostre filz s’il est lors vivant et s’il estoit ja trespassé ses enffans masles et les enffans masles de ses enffans masles par avant trespassez en ligne et non en teste, ou s’ilz estoient ja trespassez et n’avoient delaissiez aucuns enffans masles nous au dit cas instituons nos hoirs et substituons au dit Loys le dit messire Guillaume nostre filz, s’il est lors vivant et s’il estoit ja trespassé ses enffans masles ou les enffans masles de ses enffans masles par avant trespassez en ligne et non en teste, en tous les biens, drois, raisons et actions par nous cy dessus laissiez et qui seront ou pourront estre advenuz de nous a nostre dit filz Loys et s’il aloit de vie a trespas en aige pupilaire ès dis biens et en tous autres qui lui pourroient appartenir sans detraction d’aucune quarte laquelle ès dis cas et chacun d’iceulx leur interdisons et deffendons expressement.

Item et se le dit Huguenin nostre filz n’est nostre hoir ou se il l’est et il va de vie a trespas sans laissier aucuns enffans masles ung ou plusieurs procreez de son corps en leal mariaige et ses dis enffans masles sans laissier telz enffans que dessus en quelque temps que ce soit et adviengne, nous ès dis cas et chacun d’iceulx instituons noz hoirs et substituons a nostre dis filz Huguenin et a ses dis enffans masles le dit Loys nostre filz s’il est lors vivant ou s’il estoit ja trespasse ses enffans masles et les enffans masles d’iceulx par avant trespasse en ligne et non en teste en tous les biens, drois, raisons et actions cy dessus par nous laissiez /335/ et que seroient et pourroient estre advenuz de nous a nostre dit filz Huguenin et s’il aloit de vie a trespas en eaige pupilaire ès dis biens et en tous autres qui lui pourroient appartenir sans detraction d’aucune quarte laquelle ès dis cas et chacun d’iceulx leur interdisons et deffendons expressement.

Item et se les dis messire Guillaume, Loys et Huguenin de Chalon noz enffans, leurs enffans masles ou les enffans de leurs dis enffans masles et ainsi tousiours d’enffans masles en enffans masles laissent aucunes filles une ou plusieurs procrées de leurs corps en leal mariaige, nous voulons et ordonnons que a l’ainsnée d’icelles qui vouldra estre et sera mariée soit donné et payé par noz dis enffans leurs dis enffans masles ou les enffans masles d’iceulx et ainsi d’enffans masles en enffans masles c’est assavoir par cellui ou ceulx cui ce concernera tel dot et mariaige qu’il sera advisé par iceulx selon ce que leur sera venu et escheu de noz dis biens et autrement esquelx mariaiges ou dit cas les faisons et instituons noz heritiers et pourtant les voulons estre contentes de tous drois légitimes, partaiges, porcions et escheoites qui leur pourroient appartenir en noz dis biens et a chacune d’icelles qui ne vouldra estre mariée et qui sera d’eglise cinq cens frans de annuelle rente a la vie naturelle d’icelle tant seullement et par telle maniere que après son decez la dite rente retournera de plain droit a noz hoirs masles lors vivans cui ce concernera.

Item et ou cas que nous les dis messire Guillaume, Loys et Huguenin noz enffans et les enffans masles d’iceulx jusques au darier inclusivement irons de tous de vie a trespas sans laissier aucuns enffans masles procreez comme dessus et que la dite ligne des dis enffans masles descendans de nous par iceulx enffans masles deffaudroit, que Dieu ne vuille, délaissiez ès survivans les dictes Jehanne et Phelippe noz filles ou aucuns enffans masles ou enffans masles des enffans masles d’icelles ou dit cas nous instituons nos heritiers et substituons a noz dis enffans masles et a leurs enffans masles et ès enffans masles d’iceulx, c’est assavoir au derrenier d’iceulx, en la personne duquel fauldroit la dite ligne des masles en tous nos dis biens, drois, /336/ raisons et actions quelconques nos dictes filles, se elles vivoient lors ou se icelles aucunes d’icelles estoient trespassees, leurs enffans masles et les enffans masles de leurs enffans masles qui par avant seroient trespassez en ligne et non en teste et ainsi tousiours les enffans masles des enffans masles descenduz de noz dites filles tant que la ligne des enffans masles descenduz d’icelles noz filles durera et jusques elle soit faillie, que Dieu par sa digne grâce doine non advenir, par telle manière toutes voye que tousiours l’aisné des dis enffans masles soit tenu de pourter noz nom et armes sur peine de perdre sa partie de nostre hoirie qui lui devroit appartenir laquelle ou dit cas voulons devoir venir de plain droit a l’autre d’iceulx après nous qui vouldra pourter noz dis nom et armes. Et se tous estoient refusans ou deloyans de les pourter, nous au dit cas voulons que tout ce que de nostre dite hoirie leur devroit venir par le moyen des dites substitutions devoir venir et appartenir de plain droit aux substituez en la substitution apprès suigant.

Item et ou cas la dite substitucion auroit lieu ès personnes des enffans masles des descenduz d’icelles noz filles en lung d’iceulx et que nos dites filles ou les dis enffans masles descenduz de nos dites filles auroyent aucunes filles une ou plusieurs, nous ou dit cas voulons et ordonnons que a chacune d’icelles qui vouldra estre et sera mariee, soit donnée ou payé par cellui ou ceulx des dis enffans masles descenduz de nos dites filles en sa personne ou ès personnes dequel ou desquelx la dite substitucion auroit lieu telle somme comme il sera advisé par cellui ou ceulx a qui appartiendra de les douher, esquelles dors maintenant faisons et instituons chacune d’icelles nostre heritiere ou heritieres et pour tout les voulons estre et devoir estre contentes de tous drois de legitime eschoite, porcion et partaige qui leur pourroient et devroient appartenir en nos dis biens et a chacune d’icelles qui ne vouldra estre mariée et qui serait d’église la somme de cinq cens frans de annuelle rente a la vie naturelle d’icelle tant seullement et par tel que apprès leur decez les dites sommes retournent de plain droit a noz hoirs masles lors vivante cui ce concernera.

Item et ou dit cas que nous les dis messire Guillaume, /337/ Loys et Huguenin noz enffans, nos dites filles et les enffans masles de nos dit filz et filles yront tous de vie a trespassement sans laissier aucuns enfans masles ung ou plusieurs en telle maniere qu’il ne demeurast de nous nos dis filz et filles aucuns enfans masles ains que iceulx enffans masles faillissent du tout, delaissiez toutes voyes par nos dis filz et filles ou les enffans masles d’iceulx aucunes filles une ou plusieurs nées et procrées en leal mariaige, ou dit cas nous instituons nos heritiers et substituons a nos dis filz et filles et a leurs dis enffans masles c’est assavoir au dernier enffant masle descenduz d’iceulx et ainsi trespassé sans laissier enffans masles, les dites filles de noz dis filz et filles ou de leurs dis filz masles ou des enffans de leurs enffans masles par avant trespassez en ligne et non en teste et apprès icelles leurs enffans masles et au deffault d’iceulx leurs filles et les enffans et enffans des enffans d’icelles en droicte ligne descenduz de nous et tant que la dite ligne durera et tousiours premièrement les enffans masles que les filles, lesquelles ou dit cas voulons estre mariées par les dis masles et a elles estre donnez et constituez mariaiges telz qu’il sera advisé par cellui ou ceulx des dis masles cui ce concernera et pour lesquels dotz et mariaiges les voulons estre et devoir estre contentes de tous drois qui leur devroit appartenir en nos dis biens, voulons aussi et ordonnons ou dis cas que tousiours l’ainsné filz masle soit tenuz et doigt pourter noz nom et armes sur peine de perdre tout ce qui leur seroit escheu et devroit appartenir de nostre hoirie et de estre appliqué au moins nez suigans vueillant pourter nos dis nom et armes.

Item et ou cas que nous nos dis filz et filles et les filz et filles d’iceulx yrons tous de vie a trespas sans laissier aucuns hoirs procreez de noz corps ou de l’ung de nous et de nos dis filz et filles descendans de nous en droicte ligne et que la dite droicte ligne descendans de nous et quant aux filz et quant aux filles fauldroit du tout entièrement, que ja s’il plait a Dieu nostre createur n’aviengne, ainçois par sa digne grâce et bonté la doint continuer a tousiours, nous ou dit cas instituons noz hoirs et substituons/338/ a nos dis fils et filles et a leurs enffans et ès enffans de leurs enffans cest assavoir au derrenier d’iceulx ainsi alant de vie a trespas sans laissier hoirs procreez de son corps en leal mariaige et en la personne duquel fauldroit nostre dite droicte ligne descendant noz tres chiers et trrs ames nepveurs messires Charles Loys de Chalon chevaliers, Lienart et Bernard de Chalon leurs freres enffans de feu nostre tres chier frere messire Jehan de Chalon jaidis seigneur de Ville soubz Mont-Reaul et de Viteaulx s’ils vivoient lors et s’ilz estoient trespassez leurs enffans masles et les enffans masles de leurs enffans masles qui ja seroient trespassez en ligne et non en teste, cest assavoir chacun d’iceulx par engales porcions toutes lesquelles substitutions dessus dites nous faisons et entendons faire et devoir avoir lieu et sortir leur effect par tel ordre et maniere que tousiours noz dis biens vienront premierement de noz enffans masles descenduz de nous en droicte ligne d’iceulx masles quand ils yront de vie a trespas en quelque temps que ce soit aux enffans masles d’iceulx et ainsi tousiours des enffans masles aux enffans masles descenduz de nous ès de noz dis filz et hoirs cy dessus instituez en droicte ligne des enffans masles tant que la dicte ligne durera et tousiours premierement aux enffans masles que ès filles, tant qu’il y aura enffans masles descendans de nous et de noz dis fils et hoirs en droicte ligne des masles et jusques ad ce que la dite ligne des enffans masles soit faillie, que ja ne soit, ès des dis enffans masles et apprès le derrenier d’iceulx en la personne duquel fauldroit la dicte ligne des masles a nos filles se elles vivoient lors ou se elles estoient ja trespassees ès enffans masles d’icelles successivement de l’ung a l’aultre tant qu’il y aura enffans masles et toujours premierement ès enffans masles que ès filles et au deffault des dis enffans masles quant il n’y en aura plus aucuns aux filles de nos dis filz et filles et apprès a leurs enffans masles et au deffault d’iceulx a leurs filles et ainsi successivement de l’ung a l’aultre et tousiours premierement ès dis masles que ès dites filles et tant qu’il y aura aucun filz ou filles descendans de nous en droicte ligne et que la dite ligne durera jusques ad ce que elle soit faillie et ainsi tousiours /339/ selon l’ordre dessus dit premierement ès descenduz de nous que a nos dis nepveux ou aultre de nostre lignage en ligne collateral et apprès tous les descenduz de nous, et qu’il n’y aura plus aucun qui en fut descendu en droicte ligne descendans et que icelle seroit faillie a nos dis nepveux cy dessus nommez par la maniere cy dessus devisée et au deffault de nos dis nepveux et de leurs hoirs masles nez et procreez de leurs corps en leal mariaige, nous a iceulx substituons leurs filles et en deffault de tous les dis enffans nous substituons les plus et les plus prouchains de nous esquelx par droit et raison nostre dite hoirie devra venir lesquelx noz plus prouchains seront tenuz de pourter noz nom et armes comme dessus est dit et tousiours sans aucune detraction d’aucune quarte laquelle detraction en tous ses cas des dites substitucions nous interdisons et deffendons expressement a noz dis heritiers instituez et substituez cy dessus et aussi toutes alienacions de noz dis biens esquelx les avons ainsi instituez et substituez afin que tousiours ilz puissent venir tous et entierement de l’ung d’eulx a l’aultre selon les grez des institucions et substitucions dessus dites et qu’ilz ne partent hors de nostre linaige et de noz nom et armes ains soient a tousiours entretenuz et conservez.

Item nous confians a plein des sens bontez et loyaultez de noz tres chiers et feaulx chevaliers messire Francoys de Menthon et messire Loys Morel seigneur d’Estalle et de Maysoul voulons qu’ilz ayent la tutelle, gouvernement et administracion des corps et biens des dis Loys, Huguenin, Jehanne et Phelippe noz enffans s’ilz estoient mondres dans lors que nous trespasserons jusques ad ce qu’ilz soyent hors de tutelle pour la dite tutelle pourter, gouverner et administrer au conseil et advis de noz bien amé conseillers maistre Jehan Mourot nostre bailly, Jehan Vieux licencié en lois, le Bon de Blye et Humbert de Vernoy.

Item nous faisons et ordonnons executeurs de ce nostre present testament, ordonnance et darriere volunté honnoré sire maistre Girard de Plaine, seigneur du Fiedz et de Mentry, chief du conseil et president des parlemens de Monseigneur le duc de Bourgoingne, le dit messire François de Menthon chevalier, conseiller et chambellan de /340/ monseigneur de Bourgogne et son bailli d’Aval ou conté de Bourgoingne, nostre dit bien ame conseillier et bailli maistre Jehan Mourot et le Bon de Blye nostre maistre d’ostel, ès mains desquelx nous mectons tous noz biens saulf et exceptez noz lectres et tiltres que voulons demeurer ès mains des dis nos bailli et maistre d’ostel pour mectre et mener ce nostre present testament, ordonnance et derreniere volunté a execucion entière. Et mesmement voulons et ordonnons celle mises ès mains de nos dis bailli et maistre d’ostel les clefz de tous les tresors de noz lectres quelque part qu’elles soyent et par iceulx estre ouvers tous les dis tresors, baillées et delivrées a chascun de noz dis enffans et hoirs les lectres qui ly appartiendront et devront appartenir. Et se tous les dis executeurs ne vouloient ou ne povoient vacquer a la dite execucion, les aultres qui y pourront ou vouldront vacquer le puissent faire, pourveu qu’ils soient tousiours trois, desquelx trois soient tousiours les dis nos bailli et maistre d’ostel et lesquelx noz executeurs qui vacqueront à la dite execucion, voulons estre remunerez bien et dehuement de leurs peines et labeurs par nostre dit heritier universal.

Item et ce nostre present testament, ordonnance et derreniere volunte nous voulons valoir par droit de testament nuncupatif et se ainsi ne voult ou valoit nous le voulons valoir par droit de ordonnance de derniere volunté, et s’il ne vault ou valoit ainsi nous le voulons valoir par droit de codicille ou par droit de donnation faicte a cause de mort, et se ainsi ne vault ou valoit nous voulons icellui valoir par droit de division et partaige fait entre noz dis enffans de noz biens dessus dis, non obstans quelconques coustumes generales ou locales que ad ce seroient ou pourroient estre contraires.

Item se ainsi ne vault ou valoit nous icellui voulons valoir selon les canoniques sanctions et par tous aultres voyes, manieres et formes qu’il pourra et devra mieulx valoir et pranre son effect a nostre entencion de droit ou de coustume, en revoquant tous aultres testamens par nous fais autresfois par ce nostre present et dernier testament, lequel voulons et ordonnons estre ouvert, leu et publié en la /341/ court de l’official de Besançon, et pour ce que nostre present testament, ordonnance et darreniere volunte ait et obtiene robeur, force, vigueur et valeur perpetuelz nous avons supplié et requis par Jehan Couhart de Noseroy, notaire et juré de la dite court de Besançon, le seel de la court official estre mys en pendant en ce nostre present testament avec le seel de monseigneur le duc et conte de Bourgoingne, duquel l’on use en sa ville de Salins, par le dit Jehan Couart et Jehan Bonnart de Bonnerans, tabellions generalx de mon dit seigneur de Bourgoingne en son dit conté de Bourgoingne par devant lesquelx et en presence des tesmoings cy apprès nommés nous avons fait et louhez, faisons et louhons par ces presentes ce nostre present testament, ordonnance et darriere volunte ensemble de la donnacion irrevocable dessus dite faicte a nostre dis filz Loys, laquelle donnacion avons promis et juré aux sains evangilles de Dieu es mains des dis notaires et tabellions de tenir, garder et observer a nostre dis filz Loys et a ses hoirs masles telz que dessus et en la forme et maniere que dessus est declairé et au deffault de lui et de ses dis hoirs masles au dit Huguenin nostre filz pour lui et ses hoirs masles telz que dessus et au deffault du dit Huguenin et de ses dis hoirs masles au dit messire Guillaume nostre filz et a ses hoirs masles telz que dessus et au deffault de tous les dessus dis et de leurs dis hoirs masles a nos dites filles Jehanne, Phelippe et aux aultres noz hoirs cy devant substituez, le tout selon et en la forme et maniere cy devant declairée sans jamais aler ne venir contre la dicte donnacion. En renunçant a toutes et singulieres excepcions de deception quelxconques. Le tout fut fait et louhé en nostre chastel de Noseroy, en nostre chambre, le huitieme jour du mois de septembre, en l’an nostre Seigneur courant mil quatre cens soixante et deux, presens ad ce faire noble seigneur Gautin de la Balue seigneur de Mont Saint Surlin, Anthoine de Fallerans, Pierre de Joigne, filz de Pierre de Joigne, Henri Vignier, filz de Jehan Vignier, Claude d’Arnay escuiers, venerables et discretes personnes, messire Estienne Vignier, doyen de l’eglise collegial de Noseroy, messires Claude Petit de Montfleur, presbitre, chanoyne de Cuseal, /342/ Estienne Golier, presbitres, curé de Boujaille et Lyon, dit Lyon de Noseroy. Tesmoings ad ce par nous espaciallement appelés et requis.

Ainsi signé. J. Couart, J. Bonnart.

Archives du Doubs. E 1325.

 

XXXII

Neustadt, 1er août 1463. — Lettre de l’empereur Frédéric III au margrave Rodolphe de Hochberg l’informant qu’il a sommé Louis de Chalon de suspendre toute entreprise sur le comté de Neuchâtel jusqu’à ce que soit jugé le procès qu’il a à ce sujet et qui a été déféré par le pape au tribunal d’Empire.

Wir Fridrich, von Gottes Gnaden Romischer Keyser, zu all zeiten Meier des Reichs zu Hungern, Dalmacien, Croacien etc. Kunig Herzog zu Osterreich und zu Steir, etc. Embieten dem Wolgeborunen Rudolphen, Marggraven zu Hochberg, unserm und des Reichs lieben getrewen unnser Gnad und ailes gut Wolgebornner lieber getrewer. Als unnser heiliger Vater der Pabst die sachen zwischen dem Hochgebornnen Ludwigen von Cabilon, Herrn zu Arlat und princen zu Aurayns unnserm und des Reichs lieben getrewen an einem und dir am andern Teil von wegen der Graffschafft Newemburg mit ir Zugehörungen so von uns und dem heiligen Reiche zu lehen ruret für uns als Römischeii Keyser und Lehrenrichter zu Recht geweiset hat, haben wir dieselben sachen zu rechtlichen Austrag an uns genomen und dem obgenanten Ludwigen durch unnser keyserlich Brief geboten alle die weil die durch uns in Recht unentscheiden sein in den Sachen ferr[n]er nichts zu vernewen noch zu attemtiern. Dann ob er [n]ichts darinn vernewen und attemptiren wurdo, so wolten wir soliches alles abtun vernichten und widerruffen. Wann wir willig sein wenn er uns darumb anlangen werde … rechtens wider dich zugestatten und ergeen zulassen nach innhalt unnsers keyserlichen /343/ Briefs darumb ausgeganngen solichs verkunden wir dir dich darnach wissen ze halten.

Geben zu der Newenstat am Ersten tag des monads Augusti nach Cristi Geburde vierzehen hundert und im drei und sechzigisten, unnsern Reiche des Bomischen Vier und zweinzgisten des keyserthumbs im zwelfsten und des Hunga[ris]chen in funften Jarer.

Au bas : Ad mandatum domini imperatoris.
Original, papier. Archives de Neuchâtel. A 44.

 


 

/344/ /345/

RÉGESTE 1

 


 

1.

Le siège pontifical étant vacant, Thiébaud, archevêque de Besançon, accorde à Louis de Chalon, écuyer, seigneur de Montfaucon et d’Arguel, ainsi qu’aux nobles et aux serviteurs qui l’accompagnent, l’autorisation d’entreprendre le voyage de la Terre-Sainte et de converser avec les infidèles; certifiant qu’ils sont ses diocésains, de bonne conduite et qu’aucune sentence d’interdiction ou d’excommunication ne les frappe. Ils peuvent se choisir un confesseur, qui, pendant trois ans, ait le pouvoir de les absoudre de leurs péchés, même de ceux qui sont spécialement réservés à l’archevêque. Ce confesseur pourra transformer en œuvres de piété les vœux de pèlerinage et d’abstinence qu’ils auront proférés, sauf les vœux s’adressant aux apôtres Pierre, Paul et Jacques. — Donné sous le sceau de notre chambre, le 18 juin 1415.

Archives du Doubs. E. 1335. Original sur parchemin, scellé sur double queue. (Impr. par E. Travers : Revue historique, nobiliaire et biographique. Janvier 1869, t. VII, p. 253.)

 

2.

Lettre de Jean de Chalon, prince d’Orange, à Etienne son receveur d’Auberive, lui annonçant le passage de Louis d’Ecrilles envoyé à Avignon par son fils, le sire d’Arguel, /346/ et s’informant d’un marché de bois pour son château d’Orange. — Lons-le-Saunier, 14 février 1416.

Au bas de la lettre, Louis d’Ecrilles certifie le 26 février avoir dépensé à Auberive, à l’aller et au retour, 8 gros vieux pour lui et son valet.

Archives du Doubs. E. 1219. Original sur papier.

 

3.

Louis de Chalon, seigneur d’Arguel et de Montfaucon, Jeanne de Montbéliard, sa femme, et leur procureur Jean Maréchal de Lons-le-Saunier, avaient appelé, au nom de leurs officiers, au parlement de Dôle d’un mandat ducal donné à Lille le 15 décembre 1416 sous le sceau secret du duc de Bourgogne et interdisant à tous nobles des duché et comté de Bourgogne de donner « lettres de garde et debitis. »

Jean, duc de Bourgogne, comte de Flandre, d’Artois et de Bourgogne, palatin, seigneur de Salins et de Malines, à la requête des susdits Louis et Jeanne, mande à l’un de ses sergents d’ajourner à son prochain parlement de Dôle ses procureurs aux bailliages d’Amont et d’Aval pour procéder en cette cause d’appel, à laquelle sont aussi convoqués le bailli d’Amont et Girard Basan de Dôle, conseiller du duc, licencié en lois et lieutenant du bailli d’Aval. — Donné sous le sceau du parlement de Dôle le 6 février 1417 (n. st.).

Archives du Doubs. Trésor des Chartes. B. 36. Original sur parchemin lacéré au bas.

 

4.

Louis de Chalon, comte de Genève et seigneur d’Arguel, Régnaut vicomte de Murat, conseillers et chambellans du roi et du duc de Bourgogne, Guillaume de Saulieu et Jean de Terrant, conseillers et maîtres des requêtes des hôtels du roi et du duc de Bourgogne, commis par la reine au gouvernement du Languedoc, de l’Auvergne et du duché de Guyenne, abolissent à Narbonne, en considération de /347/ la conduite de cette ville, les impositions, quatrièmes et autres subsides extraordinaires pour le fait de la guerre, excepté la gabelle du sel et les arriérés des dites aides jusqu’à la date des présentes. Ils ordonnent au sénéchal de Carcassonne, au viguier et juge de Narbonne et à tous autres officiers du roi de publier cet édit. — Montpellier, 30 avril 1418.

Insérées dans l’acte précédent se trouvent des lettres patentes de la reine Isabeau, datées de Troyes le 30 janvier 1418 (n. st.) et étendant aux provinces du Midi la mesure générale proposée par le duc de Bourgogne dès le 1er octobre passé, d’abolir les aides dans le royaume sauf la gabelle. Ces lettres, dans leur préambule, exposent le mauvais gouvernement et la détresse du royaume en face de ses anciens ennemis qui l’envahissent, le pillage de ses revenus, font l’éloge du duc de Bourgogne et rappellent la nomination, le même jour, des quatre commissaires pour le Midi.

Bibliothèque Nationale. Coll. Doat, vol. 9, fol. 192-197. Copie sur papier du XVIIe s.

 

5.

Lettre de Louis de Chalon et des trois autres commissaires bourguignons (comme au No 4) au sénéchal et à la ville de Beaucaire, renvoyant au 8 septembre la réunion des Trois Etats du Languedoc, primitivement fixée au 22 juillet à Carcassonne, vu qu’ils sont empêchés de s’y rendre et que le pays est encore désuni. Ils se réfèrent à des lettres patentes de la reine adressées à eux commissaires, données à Troyes le 3 juin, modifiant des précédentes, et interdisant aux Trois Etats de se réunir hors de la présence des commissaires. Un vidimus d’autres lettres patentes de la reine adressées aux sénéchaussées de Beaucaire, Toulouse et Carcassonne et ayant même objet, leur est envoyé. — Nîmes, 15 juillet 1418.

Bibliothèque nationale. Coll. Languedoc, vol 88, fol. 219-220. Copie sur papier du XVIIIe s. (Publié par Dom Vaissette : Histoire de Languedoc, nouv. édition, t. X, Preuves, col. 1985-1988.) /348/

 

6.

Lettres patentes du roi Charles VI par lesquelles il interdit à tous ses vassaux et sujets du Languedoc, de l’Auvergne et du duché de Guyenne d’obéir à d’autres ordres, même émanant de personne de son sang, qu’à ceux qui leur seront donnés par Louis de Chalon, comte de Genève, prince d’Orange, son conseiller et chambellan, que le roi par d’autres lettres patentes a nommé son capitaine général dans ces provinces. — Paris, 9 septembre 1418, 38e année du règne.

Bibliothèque nationale, ms. latin 9177, fol. 216-219. Copie sur papier du XVIIe s.

 

7.

Lettres de délai et souffrance du roi Charles VI aux gens de ses comptes et à ses officiers, par lesquelles il les informe qu’il accorde à Louis de Chalon, comte de Genève et seigneur d’Arguel, un an de délai pour jurer l’hommage des terres du royaume et du Dauphiné qu’il tient en fief du roi et qui lui sont échues par la mort de son père Jean de Chalon, prince d’Orange et seigneur d’Arlay. Ce délai lui est accordé parce qu’il est occupé présentement à réduire le Languedoc à l’obéissance du roi et en considération de ses services passés. — Paris, 8 octobre 1418, 39e année du règne.

Archives de l’Isère, B. 3806. Original sur parchemin scellé sur simple queue. (Le sceau manque.)

 

8.

Lettre de Louis de Chalon, prince d’Orange, comte de Genève et seigneur d’Arlay, capitaine général en Languedoc, Auvergne et au duché de Guyenne, aux bourgeois, manants et habitants de Nyons. Il les informe qu’il a reçu naguère trois lettres patentes du roi, établissant la validité de ses /349/ pouvoirs, et les met en garde contre l’archevêque de Reims, qui prépare une expédition contre le Dauphiné, au lieu de se trouver en Normandie pour s’opposer à l’invasion du royaume par les Anglais. — Pont-Saint-Esprit, 12 octobre (1418).

Bibliothèque de Grenoble. 1428. Documents mss. relatifs à l’histoire du Dauphiné, réunis par Nicolas Chorier et Guy Allard. Tome X, No 848. Original sur papier non scellé.

 

9.

Vidimus de lettres patentes du roi Charles VI, donné à Montpellier le 13 octobre 1418 par Guillaume Sachet, donzel, seigneur de Saint-Vigier et de Saint-Privat, écuyer du roi, chambellan du duc de Bourgogne et gouverneur royal de Montpellier. Ces lettres patentes, datées de Paris le 29 août 1418, confirment la nomination par la reine de Louis de Chalon et de ses trois collègues comme commissaires pour le Languedoc, l’Auvergne et le duché de Guyenne, et renforcent leurs pleins pouvoirs.

Bibliothèque nationale. Ms. latin 9177, fol. 211-214. Copie sur papier du XVIIe s.

 

10.

Lettre des consuls d’Arles aux syndics d’Orange les informant que le 31 décembre passé des gens armés du prince d’Orange avaient traversé un bras du Rhône avec des bateaux, envahi la Camargue leur territoire et emmené de leurs ressortissants avec leurs bestiaux. Ils les prient de s’entremettre en leur faveur auprès du prince pour leur faire restituer leurs gens et leurs bêtes, en faisant valoir que comme sujets du roi ils ont droit à sa protection. — 8 janvier (1419).

Archives municipales d’Orange. AA. 12. Original sur papier. /350/

 

11.

Reçu délivré par Louis de Chalon, prince d’Orange, comte de Genève et seigneur d’Arlay, à Jean Fraignot, receveur général de Bourgogne, pour la somme de 200 francs, que le dit receveur lui rembourse pour avoir en décembre passé, à la requête de la duchesse de Bourgogne, défrayé de sa bourse le capitaine lombard Jacques de Hupperan et ses compagnons des dépenses qu’ils avaient faites à Bourg-en-Bresse. Ce capitaine et ses suivants s’y étaient retirés, après avoir été détroussés près de Tournus, et avaient dû engager leurs chevaux et harnais pour subvenir à leurs dépenses. Jacques de Hupperan a promis de servir loyalement le duc de Bourgogne. — 5 janvier 1420 (n. st.).

Archives de la Côte d’Or. B 11740. Original sur parchemin, scellé sur simple queue du sceau de Louis de Chalon.

 

12.

Philippe, duc de Bourgogne, etc. (comme au No 3), à la requête de Girard Vion, son procureur, fait ajourner par un de ses sergents devant son parlement de Dôle, pour le 3 février prochain, Louis de Chalon, prince d’Orange, comte de Genève et seigneur d’Arlay, qui prétend être vicaire de l’empereur, Guillaume de Boujailles, châtelain d’Echallens, Antoine d’Arnay, lieutenant du châtelain d’Orbe, Jaquot Lambercier, se disant juges impériaux, et Yvonet Fellin, châtelain de Jougne, pour répondre de leurs empiètements de souveraineté. — Donné sous le sceau du parlement de Dôle le 3 septembre 1422.

Archives du Doubs. B. 458. Original, scellé sur simple queue (le sceau manque).

 

13.

Lettre de Louis de Chalon, prince d’Orange, etc., aux syndics, nobles, bourgeois et habitants d’Orange, portée /351/ par son conseiller Guillaume de Saulieu, qui est chargé de s’informer de leurs affaires, de les exhorter à faire bonne garde et de rétablir l’union parmi eux, si c’était nécessaire. — Nozeroy, 18 novembre 1422.

Archives municipales d’Orange. E E, No 17. Original sur papier, scellé.

 

14.

Louis de Chalon, Antoine et Adrien de Toulongeon passent une convention avec Philippe, duc de Bourgogne, représenté par Jacques de la Vielzville, seigneur de Norieu, bailli de Dijon, conseiller et chambellan du duc, pour le rachat de captivité de Jean de Toulongeon, maréchal de Bourgogne et frère des susdits. Le duc achète, pour l’échanger, le connétable d’Ecosse à Guillaume de Byes, qui le détenait prisonnier, et le remet à Louis de Chalon et aux deux frères Toulongeon. Ceux-ci payeront 3500 écus d’or à Guillaume de Byes et les frais causés par la captivité du connétable. Si le rachat du maréchal s’effectue autrement que par l’échange du connétable, soit en espèces, ce dernier sera rendu au duc et celui-ci remboursera les 3500 écus d’or et ce qui aura été payé pour son entretien. Dans ce cas Antoine et Adrien de Toulongeon, rendront encore au duc le sire de Jeugruse, un prisonnier qu’il leur avait remis. Donné sous le sceau de la cour du duc et signé par Guillemin de Aisey, élève juré de la cour de la chancellerie. Témoins : Pierre de Vauldrey, Jean de Monsaugeon, Brenetant de Cessaul et Henri de Faullerieu, écuyers. — Châtillon-sur-Seine, le 3 février 1424 (n. st.).

Bibliothèque nationale. Collect. de Bourgogne, vol. 95, fol. 624-626. Copie sur papier du XVIIIe s.

 

15.

Louis de Chalon, prince d’Orange, comte de Genève et seigneur d’Arlay, promet sous serment de s’en remettre à l’arbitrage de l’archevêque de Tarentaise et de l’évêque de /352/ Lausanne pour mettre fin à son procès avec le duc de Savoie touchant le comté de Genève. Témoins : Guillaume de Saulieu, docteur en lois, seigneur de Montfleur, Henri de Doubz, chevalier, et plusieurs autres. Signé sur le repli du secrétaire du prince : J. Chapuis. — 19 mai 1424.

Archives du Doubs. E. 1319. Original sur parchemin, scellé sur double queue. (Le sceau manque.)

 

16.

Lettre en latin de Louis de Chalon, etc. (comme au no 15) au bourgmestre, aux bourgeois et autres habitants de Bâle. Il a appris avec un grand déplaisir leur intention de venir au secours de Fribourg en Brisgau contre son oncle le margrave de Bade. Au nom de leur commune amitié, dont ils lui ont donné autrefois des preuves, il les engage à renoncer à leur intention, vu que de son côté il est tenu de secourir son oncle le margrave. — Ecrit de son château de Lons-le-Saunier, le 1er juin 1424 (L. de Viscenco secrétaire).

Archives de l’Etat de Bâle-Ville : « Politisches » Guerres du margrave Bernard de Bade 1408-1428. Original sur papier, scellé du sceau plaqué de Chalon (Le sceau manque).

 

17.

Le duc de Savoie Amédée [VIII] ratifie la sentence d’arbitrage rendue le 5 juin à Thonon par Jean [des Bertrands], archevêque de Tarentaise, et Guillaume [de Challand], évêque de Lausanne, en présence de Jean de Beaufort, chevalier, docteur en, lois, chancelier [de Savoie], et d’Henri de Colombier, seigneur de Vufflens, au sujet de son procès avec Louis de Chalon, prince d’Orange et seigneur d’Arlay. Témoins : l’archevêque de Tarentaise; l’évêque de Lausanne; le prévôt de Montjoux; Jean de Beaufort, chancelier; H[umbert], Bâtard de Savoie; le seigneur de Menthon; Nicod Festi; H[enri] de Colombier; le seigneur de Divonne; /353/ Urbain Cerisier; Claude de Saix; François de Compeys; R. de Montvuaginard. (Bolomier secrétaire.) — Thonon, 7 juin 1424.

Archives du Doubs. E. 1319. Original sur parchemin scellé sur simple queue du sceau d’Amédée VIII.

 

18.

Lettre du chevalier Arnold de Ratberg, bailli d’Altkirch, au bourgmestre et au conseil de Bâle. Il les informe avoir appris de source certaine il y a deux jours que [Louis] de Chalon et les [seigneurs] de Warsee et de Neuenburg ont rassemblé une puissante armée pour assiéger Belfort et Delle. La perte de ces places serait au détriment de Bâle, si cette ville n’y avisait. — [Lundi] 19 juin 1424.

(Au dos.) Il demande aux susdits de bien vouloir lui livrer 500 flèches et 2 arbalètes, et les informe en outre avoir appris par Walther d’Andelow et Hug Priot de Dysion que les seigneurs susnommés ont l’intention de mettre le siège devant Belfort demain ou mercredi avec 15 000 gens d’armes à cheval. Il s’excuse de n’avoir pu venir en personne leur donner ces nouvelles.

Archives de l’Etat de Bâle-Ville. Lettres II. Nos 370 et 371. Original sur papier scellé.

 

19.

Lettre du bourgmestre et du conseil de Zurich, en réponse à une lettre du bourgmestre et du conseil de Bâle, qui leur avaient demandé un secours de 100 tireurs (Schützen) contre [Louis] de Chalon et ses alliés, et leur avaient dépêché en outre Hemmann Offenburg, conseiller bâlois. Le conseil de Zurich vient d’entendre ce dernier et a pris connaissance de la copie d’une lettre, par laquelle le duc Louis, comte palatin du Rhin, le margrave de Bade et l’évêque de Spire avaient conclu entre eux une alliance pour le plus grand bien du pays et des marchands, alliance que /354/ le margrave de Bade a violée. Il serait bien disposé à leur venir en aide si présentement il ne devait pas entrer en campagne contre Milan avec ses confédérés. — Zurich, 2 juillet 1424.

Archives de l’Etat de Bâle-Ville. « Politisches ». B. 7, 2. Guerres du Margrave Bernard de Bade. Original sur papier, scellé.

 

20.

Lettre de Louis de Chalon au bourgmestre et au conseil de Bâle, accusant réception de leur lettre et faisant savoir qu’il ne peut y répondre présentement, mais qu’il le fera sous peu; — Ecrit au prieuré de Maraulz, 3 juillet [1424].

Archives de l’Etat de Bâle-Ville. « Politisches ». Guerres du margrave Bernard de Bade. 1408-1428. Original sur papier, scellé du sceau de Chalon.

 

21.

Sauf-conduit donné par Louis de Chalon, prince d’Orange, à Guillaume chevaucheur de la ville de Bâle, qui y rapporte la lettre précédente (No 20). Ce sauf-conduit est adressé « à tous chevalier, écuyers, capitaines de gens d’armes et de trait, gardes de bonnes villes, ponts, ports, passages et détroits, sujets, alliés et bien vueillans du duc de Bourgogne et du prince, ou à leurs lieutenants. (L. de Viseu secrétaire.) — Maraulz, 3 juillet 1424.

Archives de l’Etat de Bâle-Ville. « Politisches ». Guerres du margrave Bernard de Bade. 1408-1428. Original sur papier, scellé du sceau plaqué de Chalon.

 

22.

Lettre de l’avoyer et du conseil de Soleure au bourgmestre et au conseil de Bâle, en réponse à leur demande de secours contre Louis de Chalon. Soleure rappelle le contenu de cette lettre de Bâle, reçue le 24 juin, et exposant que le margrave /355/ Bernard n’avait pas tenu ses engagements d’assurer la liberté commerciale de la route fluviale du Rhin, d’où en étaient résultées des hostilités, à l’occasion desquelles Louis de Chalon, l’allié de Bernard, menaçait Bâle. Soleure assure Bâle qu’il répondrait volontiers à sa demande s’il n’était pas déjà engagé à porter secours à Berne, qui se trouve aussi en lutte avec le même Louis de Chalon à cause d’un de ses bourgeois, Anthony Spilman. — Soleure, 4 juillet 1424.

Archives de l’Etat de Bâle-Ville. « Politisches » B. 7, 2. Guerres du margrave Bernard de Bade 1408-1428. Original sur papier, scellé.

 

23.

Lettre de Louis de Chalon, prince d’Orange, à Antoine Ferrière, son écuyer et capitaine d’Anthon, l’informant qu’il a chargé Pierre de Vorges, son écuyer, de lui transmettre ses ordres oralement. Dans un post-scriptum le prince l’engage à prendre Falavier et Pusignan, ou telle autre place du Dauphiné, et d’y réserver les vivres et l’artillerie qu’il pourra y trouver pour les garnisons que le prince y mettra. — Bletterans, 30 juin [1428].

Archives de l’Isère. B. 3380. Copie contemporaine sur papier.

 

24.

Louis de Chalon ratifie le traité conclu par ses procureurs Guillaume de Saulieu, seigneur de Montfleur, et Hugues, seigneur de l’Aubespin, avec le Conseil du Dauphiné. Un supplément de fief de 2000 livres tournois lui sera assigné sur Auberive et lieux voisins. En considération des services qu’on attend de lui, ses terres de Theys, Pierre, Domène et Falavier lui seront rendues, à charge d’en rendre hommage au dauphin avant la Saint-Jean prochaine. Pour Aussoyne, auquel le dauphin ne prétend que le droit d’investiture, la cour de Grenoble décidera du procès qui est en cours. Quant à Anthon, Colombier et Saint-Romain qui ont été /356/ occupés par Louis de Chalon, il doit y laisser entrer les gens du dauphin, qui y replaceront leurs bannières. Ses soldats les évacueront et en laisseront le gouvernement à un châtelain agréé par le dauphin. Louis rendra également Pusignan et Saint-Alban avec les prisonniers que ses soldats ont faits, parmi lesquels sont nommés Jean de Mirebel, Jean de Valenciennes et Pierre Pasqual. — Lons-le-Saunier, 15 août 1428 (Théobald secrétaire).

Archives de l’Isère. B. 3798. Original sur parchemin, scellé sur double queue.

 

25.

Charles VII, roi de France, fait grâce à Louis de Chalon et à ses gens de tous les crimes et délits qu’ils peuvent avoir commis dans son royaume, spécialement en occupant Anthon, Colombier et Saint-Romain. Il le fait en considération des services qu’il attend de lui et de l’hommage que, par procureur, il lui a prêté au mois d’août passé pour ses terres du Dauphiné et d’ailleurs. — Chinon, 26 septembre 1428 (6e de son règne).

Bibliothèque d’Avignon. No 2912, fol. 1. Original sur parchemin scellé sur double queue (Le sceau manque).

 

26.

Procès-verbal d’une notification d’exploit, dressé à la requête de Louis de Chalon, comme seigneur de Jougne par Guillemin Jaquemet de Jougne, demeurant à Pontarlier, et par Nicolas Matthey de Vers, demeurant à Jougne, les deux notaires et jurés de la cour de Besançon. Guillemin Perrier et Pierre Vauchier de Pontarlier, sergents du duc et comte de Bourgogne, étaient venus signifier à Louis de Chalon, au château de Jougne, un exploit par lequel, à la requête d’Alix de Chalon, sa sœur, femme de Guillaume de Vienne, il était cité au parlement de Dôle. Louis de Chalon refusa de recevoir cet exploit à Jougne, alléguant que ce lieu était hors du comté de Bourgogne, /357/ au diocèse de Lausanne, et demanda qu’il lui fût cité le lendemain à la Rivière, où il serait prêt à le recevoir. Les sergents y consentirent. Témoins : Yvonet Ferlin, écuyer, châtelain de Jougne; Jaquet Thiébaut de Bletterans et Jean Jaquemet de Jougne, clercs; Estevenin, le maréchal de Bule, et plusieurs autres. — Jougne, 30 janvier 1429 (n. st.) (12e année du pontificat de Martin V).

Archives du Doubs. E. 1349. Original, parchemin.

 

27.

Relation faite au Parlement de Dôle par Henri Val de Fontevry, conseiller et chambellan du duc et comte de Bourgogne et son bailli d’Aval, de son voyage à Orbe pour y saisir la terre de Louis de Chalon, prince d’Orange. En vertu d’un mandat du duc, daté de Dôle le 11 février 1429, et à la requête de Jean de Grangny, procureur du duc au bailliage d’Aval, Henri Val avec une suite de vingt personnes se transporte aux portes de Jougne le 17 février 1429 (n. st.). Avec lui se trouvaient Antoine de Symart, châtelain de Bracon, Jacques de Vaultravers, châtelain de Pontarlier, tous deux écuyers du duc; Jean Girard, de Salins, tabellion général du duc en son comté de Bourgogne; Hugues Bonnart, de Salins, clerc juré de la cour du bailliage d’Aval, et plusieurs autres. Là, devant les portes, Louis de Chalon le pria de lui faire voir son exploit et ne le laissa entrer qu’après avoir reçu l’assurance qu’il ne serait pas signifié à Jougne. Le bailli et sa suite continuent leur chemin jusqu’à une croix de pierre près d’Orbe, où ils sont arrêtés par Pierre de Jougne, procureur du prince d’Orange, assisté de Guion Chapponnet, Jean de Pompaples, Jean Malsein, Pierre Chevalier et d’autres. Après avoir parlementé, le bailli poursuit sa route, mais plus loin il est obligé de mettre pied à terre pour franchir successivement deux barrières avec quelques-uns de sa suite. La troupe des opposants s’augmente, entre autres de Haquinet dit Queval, de l’Isle en Flandre, et d’un nommé Monstereal, archers de Louis de Chalon, de Jaquet de Cuffegnon et de Pierre /358/ Jolynet. Le bailli parvient jusqu’à la porte d’Orbe sous le château, mais elle est fermée, et toujours Pierre de Jougne proteste et en appelle de l’exploit qu’il est venu signifier. Henri Val menace les personnes présentes d’une amende de 500 livres estevenins, lit son exploit de saisie de la terre d’Orbe et ajourne Pierre de Jougne, en tant que procureur de son maître, au Parlement de Dôle pour le 3 mars prochain. Le lendemain, 18 février, le bailli repasse au château de Jougne et y retrouve Louis de Chalon, lequel proteste de son attachement au duc de Bourgogne son seigneur, accepte l’ajournement au Parlement de Dôle, mais se réserve de « relever les appellations » émises par son procureur. Le prince, rapporte le bailli, croit avoir compris que la saisie a eu lieu parce qu’il n’a pas fait au duc le dénombrement de sa terre d’Orbe, mais il est prêt à le faire comme ses prédécesseurs. Témoins : Jean Girard, Hugues Bonnart, Antoine de Symart, Jacques de Vaultravers, Girard de Cendrecort, chevaucheur, Perrenet, sergent, Pierre de Germigny, bourgeois de Salins, Huguenin Perrier, Jean Gros, Vuillaume Roussel, bourgeois de Pontarlier, et d’autres. — 17 et 18 février 1429 (n. st.).

Archives du Doubs. E. 1242. Copie sur papier du XVe s.

 

28.

Lettre de Louis de Chalon à Antoine Ferrière, son capitaine d’Anthon, lui enjoignant, de l’aveu de la dame de Pusignan, de placer Othenin de Montagny et Claude de Montermont, avec six combattants s’il le faut, dans la place de Pusignan. Le prince s’étonne de n’avoir pas de nouvelles du prisonnier de la garde de la monnaie de Crevins, ni des autres prisonniers qu’avait son frère Jacques Ferrière. Il faut que la garde de cette monnaie soit en son pouvoir. Il lui envoie le bâtard Rondelin et d’autres arbalétriers, mais il ne peut lui envoyer les charpentiers que vers la mi-août. — Bletterans, 1er août [1429].

Archives de l’Isère. B. 3380. Copie contemporaine sur papier. /359/

 

29.

Lettre de Louis de Chalon au duc de Savoie Amédée VIII, le priant de retarder encore la sentence d’arbitrage qu’il devait rendre dans la cause pendante entre le prince d’Orange et le marquis de Saluces et dont le prononcé avait été fixé au 2 septembre prochain. Il allègue les troubles qui sont survenus, l’ordre qu’il a reçu de son seigneur (le duc de Bourgogne) de se rendre auprès de lui et les difficultés que le conseil de Grenoble met à lui fournir les pièces qui lui sont nécessaires pour ce procès. — Lons-le-Saunier, 16 août [1429].

Archives de l’Isère. B. 3139. Publié par l’abbé Chevalier : Documents historiques inédits sur le Dauphiné, p. 308-309.

 

30.

Lettre de Louis de Chalon à Antoine Ferrière, écuyer, son capitaine d’Anthon. Il l’informe que son frère Jacques Ferrière vient de le quitter pour aller au duché [de Savoie] enrôler des soldats et qu’il le rejoindra vers le 23 avril. Le prince d’Orange sait que son correspondant a mandé auprès de lui Denisot de Beuf. Qu’il amène cinquante hommes ou plus pour le même terme que dessus, mais il ne faut pas lui dévoiler ses projets. Mettre au feu cette lettre après l’avoir lue. — Nozeroy, 11 avril [1430].

Archives de l’Isère. B. 3380. Copie contemporaine sur papier.

 

31.

Lettre de Louis de Chalon à l’un de ses receveurs du Dauphiné. Il a appris qu’on se propose d’assiéger Anthon. Aussi lui mande-t-il d’aller espionner avec un de ses compagnons à Grenoble, à la Côte-Saint-André et à Romans, et de s’enquérir si des gens d’armes arrivent du Languedoc. Il doit immédiatement communiquer le résultat de ses /360/ recherches à la garnison d’Anthon et à lui-même. - Lons-le-Saunier, 21 mai [1430].

Archives du Doubs. E. 1218. Original sur papier.

 

32.

Vidimus, daté d’Avignon à l’auberge des Deux Faucons près Saint-Didier le 10 décembre 1430, donné par Raoul, seigneur de Gaucourt, conseiller et chambellan royal, gouverneur du Dauphiné, à la requête de Jean de Saint-Germain, licencié en lois, procureur général des Trois Etats du Dauphiné (Jean de Plastro et Jean Fabri, notaires et secrétaires delphinaux).

Ce vidimus concerne des lettres patentes de Louis III, roi de Jérusalem et de Sicile, duc d’Anjou, comte de Provence et Forcalquier, du Maine et de Piémont, par lesquelles il s’engage à remettre au gouverneur du Dauphiné la ville d’Orange, qui meut de son fief et qu’il occupe depuis que le dit gouverneur en a été chassé, si dans l’espace de deux ans cette ville n’a pas été restituée à Louis de Chalon par le roi de France. Louis III se réserve cependant, lors de cette remise éventuelle, l’hommage qui lui serait dû pour ce fief et qui lui serait prêté par le dit gouverneur au nom du roi. Ces lettres étaient datées de Barbentane le 8 décembre 1430, la 14e année de son règne, et scellées d’un sceau aux armes du roi Louis avec légende mentionnant Pierre de Belvaux, gouverneur de la Provence.

Archives de Vaucluse E. 13. Original sur parchemin, scellé sur double queue (Le sceau manque).

 

33.

Extrait d’un compte de Matthieu Régnault, receveur général de Bourgogne, concernant les dépenses faites par l’armée du prince d’Orange en Charolais, pendant le mois de mars 1431. Il a payé à :
Girardin de Coussy, demeurant à Chalon, 14 fr. pour /361/ 17 pièces de bois de chêne de 26 pieds de long, fendues par le milieu et employées à faire la couverture de deux manteaux, dont un pour une bombarde, etc., comme pour le fait de l’armée du prince d’Orange qui a pris les forteresses de Sancenay, Masilles, Chasteau et Pierre doux.
Jean des Dames, navetier demeurant à Chalon, 8 fr. 4 gros, pour faire un autre manteau de bombarde.
Rovert Chaourse, ouvrier de menus fers demeurant à Chalon, 2 fr. 3 gros, pour l’achat de deux gros plots de noyer de 6 pieds de long et 2 ½ pieds de large, pour faire deux culées de bombardes.
Jacot Rouffart, demeurant à Chalon, 6 gros pour l’achat de bois de noyer destiné à faire des rouelles pour échelles.
Sept charretiers, 2 fr. 11 gros, pour 14 journées à 10 blancs par jour.
Jean de Roland, Richard Fournier, Jean Gastereau, voituriers demeurant à Dijon, avec trois valets, 7 fr. 8 gros, pour 6 personnes et 17 chevaux, soit 23 bouches, à raison de 2 gros par bouche, pour mener de la poudre à canon, des pioches, des arbalètes, des panais, des pierres de bombarde, etc., de Dijon à Saint-Jean-de-Losne.
Jean Tahart et Jean Champenois, voituriers demeurant à Dijon, avec un valet et 8 chevaux, soit 11 bouches pendant 11 jours, à raison de 2 gros par bouche et par jour, 20 fr. 2 gros, pour avoir mené de Dijon à Lons-le-Saunier un des gros chars du duc destiné à transporter une bombarde du prince d’Orange de Lons-le-Saunier à Tournus.
Huguenin Olivier, navetier demeurant à Seuvre, avec 4 personnes, 9 fr. 4 ½ gros, pour avoir mené par eau la bombarde de Prusse et l’artillerie, de Saint-Jean-de-Losne à Chalon.
Etienne de Fontenelle, 6 gros, pour avoir gardé le dit bateau jour et nuit, afin que l’eau n’endommageât pas l’artillerie.
Etienne Duvernoy, 6 fr., pour trois douzaines de lances neuves non ferrées, à raison de 2 gros pièce.
Jean Mareschal de Besançon, canonnier demeurant à Dijon, 20 fr. pour l’exercice de son métier pendant un mois avec un valet. /362/
Guiot et Laurent Rousse, frères, et Jean Minutet, maçons demeurant à Chalon, 5 fr. pour dix jours, à raison de 10 blancs par jour, pour faire des pierres de bombardes et veuglaires.
Colin Acroart dit le petit Picart, écuyer, 30 fr. pour acheter un cheval et pour la conduite de 25 hommes de trait qu’ils a menés sous ses ordres au service du duc de Bourgogne.
Lancelot Colle, Guillaume Bertrée, Durant Mahiet et Jean Maille, sergents de monseigneur, demeurant à Chalon, 3 fr. pour divers voyages.
Huguenin la Caille, 1 fr.; Colin Martin, 18 gros; Huguenin Coteneau, 3 gros, aussi pour divers voyages et messages.
Laurent le Blanc, sergent, un franc, pour avoir porté un vidimus de lettres closes du chancelier et du conseil ducal aux châtelains de Cuisery et Saigey, pour saisir les terres et revenus des nobles de ces châtellenies qui n’ont pas été à l’armée du prince d’Orange.
Jean de Laval, 8 gros, pour avoir porté des lettres closes du bailli de Chalon au prince d’Orange à Mont-Saint-Vincent, etc.
Au prince d’Orange, 101 fr. 2 gros payés comptant à diverses personnes pour leurs services ou messages, tels que : mener 100 panais de Nozeroy à Saint-Jean-de-Losne, espionner à Lyon et environs, amener 12 charretées de fagots à Sanceney pour en brûler le pont, etc.

Archives de la Côte d’Or. B. 1647. fol. 106-120. Compte de Matthieu Régnault.

 

34.

Mars 1431. Déclaration des dépenses et pertes d’artillerie faites par l’armée du prince d’Orange au siège de Sancenay, d’après le compte de Matthieu Regnault, receveur général de Bourgogne.

Jean de Rochefort, commis au gouvernement de l’artillerie, a donné au bâtard d’Oyé : 2 grosses arbalètes garnies chacune de doubles guindaux; une casse de trait /363/ commun; 100 grosses dondaines et 12 feux de lances. Devant Sancenay ont été dépensés : un caque de poudre à canon; 6 pierres de bombarde de 240 livres chacune; 43 pierres de veuglaire pesant chacune 10 livres; 15 livres de plombées à couleuvres; ont été rompues 12 poelles de bois ferrées; 7 pieds ou peoiches; un pied de chèvre perdu; une couleuvre à main dérobée; 8 panais fendus; 25 fustées dépensées; une casse de trait commun; 12 lances données aux gens de Philibert de Vaudrey; 12 pieds de chèvre et 6 pieds de fer.

Archives de la Côte-d’Or. B. 11865. fol. XXV.

 

35.

Lettre du prince d’Orange à la Chambre du Conseil ducal à Dôle. Il accuse réception de leur lettre et les informe qu’il a reçu la veille à midi des nouvelles par Varembon : Marcigny-les-Nonnains est pris par les Armagnacs, qui sont devant Semur-en-Brionnais. Varembon se retire à Paray-le-Monial et mande auprès de lui les gens qu’il avait encore en Auxerrois. Le prince a fait tenir ces nouvelles au chancelier, qui doit se rendre dimanche (le surlendemain) à Dôle. Il y enverra de ses gens pour savoir ce que le chancelier a décidé. — Montmahoux, 27 avril [1431].

Archives de la Côte-d’Or. B. 11942. No 84. Original sur papier.

 

36.

Lettre de Louis de Chalon à Nicolas Rollin, seigneur d’Anthume, chancelier du duc de Bourgogne. Il lui accuse réception de sa lettre et répond à son invitation de faire avancer ses gens en la terre de Chierlieu, sur la rivière d’Amance, pour secourir le comte de Vaudémont en Barrois, qu’il doute qu’il puisse le faire, si on ne lui fournit pas l’argent nécessaire pour les payer. — Lons-le-Saunier, 13 mai [1431].

Archives de la Côte-d’Or. B. 11942. No 95. Copie du temps sur papier. /364/

 

37.

Lettre de Louis de Chalon aux seigneurs de la Chambre du Conseil ducal à Dijon, les priant de relâcher Pierre de Loisie, Henri Monon et d’autres de ses serviteurs, dont il a besoin et qui sont retenus prisonniers, à la requête du procureur ducal, à cause d’un procès. — Cuiseaux, 25 mai [1431].

Archives de la Côte-d’Or. B. 11942. No 111. Original sur papier.

 

38.

Philippe, duc de Bourgone, de Lothier, de Brabant et de Limbourg, comte de Flandres, d’Artois, de Bourgogne et de Namur, marquis du Saint-Empire, seigneur de Salins et de Malines, sur la requête du prieur et du couvent de Romainmôtier, mande à son bailli d’Aval au comte de Bourgogne, ou à son lieutenant, ou encore au premier huissier de sa Chambre du Conseil, d’ouvrir une enquête sur des exactions dont se sont rendus coupables le prince d’Orange et ses gens à l’égard des habitants de Vaux-et-Chantegrue, près de Pontarlier, dépendant du couvent de Romainmôtier. Le prince d’Orange avait imposé ce village, qui ne comptait guère que 19 feux, d’une redevance extraordinaire de 73 écus d’or, pour se récupérer des pertes qu’il avait subies lors de sa campagne d’Anthon. Cités à Nozeroy pour la levée de cette somme, les habitants de ce village, accompagnés du procureur des religieux de Romainmôtier, tentèrent en vain de fléchir le prince, qui ne voulut pas les recevoir. Ils en appelèrent aussitôt au Parlement de Dôle. Dans l’intervalle des sergents du prince saisirent 11 juments des dits habitants, d’une valeur de 80 fr., les emmenèrent à Nozeroy et rencontrèrent près de cet endroit les habitants du village qui s’en retournaient chez eux. Une rixe survint. Perrenet le Bouteiller de Nozeroy frappa de son bâton Estenon Griffon, un de ces habitants, bien qu’ils se réclamassent de la garde /365/ du duc de Bourgogne. En conséquence ce dernier ajourne le prince d’Orange et ses gens devant la Chambre de son Conseil à Dôle pour instruire la cause, qui sera remise ensuite au Parlement de Dôle. — Dijon, 4 juin 1431. (Delamandre, secrétaire.)

Archives cantonales vaudoises à Lausanne. C. I. d. 17. Original sur parchemin scellé sur simple queue (Le sceau est brisé).

 

39.

Lettre de Louis de Chalon à l’un de ses châtelains, par laquelle il lui réitère l’ordre d’apporter à Nozeroy certaine somme d’argent et de la remettre à Pierre Basset, pour lui permettre (à lui Louis) de partir de Dijon en ambassade au service du duc de Bourgogne. — Dijon, 19 mars 1432 (n. st.).

Archives du Doubs. E. 1232. Original sur papier.

 

40.

Louis de Chalon, se référant aux accords qu’il a conclus avec Charles [VII], roi de France et dauphin du Viennois et selon lesquels ses terres du Dauphiné lui seraient rendues, s’engage solennellement à ne causer dorénavant aucun dommage au roi son seigneur. — Loches, 22 juin 1432.

Archives nationales. Trésor des Chartes. J. 251. Original sur parchemin, scellé sur double queue du sceau de Chalon. (Sceau rond de 45 mm. Ecu écartelé, au 1 et 4 d’une bande; au 2 et 3 d’un cornet; sur le tout un écusson chargé de quatre besants; penché, timbré d’un heaume cimé de cornes de cerf; supports : deux lions).

 

41.

Lettre d’Henri de Doubs et de Vaucher de Sirod, maîtres d’hôtel de la princesse d’Orange, à Richard Ferlin, châtelain et receveur de Grandson, par laquelle ils lui mandent de /366/ préparer des provisions pour la réception à Nozeroy du duc de Bourgogne, venant de Saint-Claude : une douzaine de grands beches, une douzaine de morens, une douzaine de grandes anguilles, une centaine d’autres poissons tels que boillasses, palées, féras et perches; des perdrix et faisans à capturer tout vifs et une centaine de chapons. Il doit s’enquérir d’un chariot pour faire parvenir ces volatiles samedi prochain au plus tard et garder encore le poisson vivant. — Nozeroy [mardi] 22 février 1435 (n. st.).

Un post-scriptum mentionne encore deux douzaines de grandes truites et prie de défrayer le porteur de la présente lettre.

Archives du Doubs. E. 1246. Original sur papier.

 

42.

Mandement de Charles [VII], roi de France et dauphin du Viennois, ordonnant au gouverneur du Dauphiné ou à son lieutenant, au conseil delphinal et à Aynart de Bleterens, procureur du Dauphiné, d’entériner l’accord conclu à Lyon le 5 janvier 1437 (n. st.) entre le roi dauphin et le prince d’Orange et tendant à faire remettre à ce dernier ses terres du Dauphiné. Le prince réclamait immédiatement les terres de Falavier, Theys, Pierre et Domène, sans préjudice de celles d’Anthon, Saint-Romain et Colombier remises provisoirement en main tierce, et demandait qu’on lui donnât bonne hypothèque pour 852 florins de rente annuelle, à cause de la succession de Béatrix de Viennois. Le procureur du Dauphiné ayant fait opposition à cet accord, il avait été convenu que les parties remettraient le dossier de leurs preuves pour le 1er mars et auraient jusqu’au 1er juillet pour accorder les points de fait en litige, époque où le Grand Conseil du roi prononcerait en la cause. Mais le dit procureur n’ayant pas envoyé son dossier au 1er juillet, sous prétexte d’autres occupations, le roi donne l’ordre d’entériner l’accord de janvier et proroge à la Toussaint le délai imparti à son procureur pour remettre son dossier au Grand Conseil. — Mehun-sur-Yèvre, 16 juillet 1437. /367/ (Donné … sous notre sceau ordonné en l’absence du grand. Par le Roi dauphin en son conseil, Malliere, secrétaire.)

Archives de l’Isère. B. 3803. Original sur parchemin, scellé sur simple queue (Le sceau manque).

 

43.

Pierre, cardinal de Foix et légat d’Avignon et du comtat Venaissin, étant assuré que Louis de Chalon, prince d’Orange, s’emploiera au besoin à défendre les terres dont il a la charge, lui promet de son côté son amitié et son secours pour défendre ses possessions, si besoin en était, avec la réserve cependant qu’il ne promet rien qui soit contre le roi [de France] et contre le roi d’Aragon. — 7 mai 1438.

Archives de l’Isère. B. 3803. Original sur parchemin, scellé d’un sceau plaqué (Le sceau annoncé, aux armes du cardinal, manque).

 

44.

Bulle du pape Eugène IV au prince d’Orange. Il fait éclater sa joie de ce que la séparation des Eglises orientale et occidentale, qui durait depuis quatre cent cinquante ans, vient de prendre fin. Il l’informe que Jean Paléologue, empereur des Romains (Romeorum), Joseph, patriarche de Constantinople, les représentants des patriarches d’Alexandrie, d’Antioche et de Jérusalem, des envoyés de l’empereur de Trébizonde, des Ibériens, des Ruthènes et des Valaques, avec des métropolites, des clercs, des nobles et une multitude d’Orientaux, sont venus auprès de lui dès l’année passée, amenés et entretenus à ses frais. Après discussion avec des docteurs qu’il a fait venir de partout, ils ont confessé que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils et reconnu la primauté du siège romain, comme son destinataire le verra par le décret qui a été promulgué et qui est joint à cette présente bulle 1. Une délégation arménienne /368/ est annoncée et est prête à en faire autant. Il l’exhorte à faire faire des processions et des prières dans ses possessions, pour rendre grâces de ce qui a déjà été obtenu et implorer l’achèvement de la conversion des Orientaux. Il lui fait part de son intention de rassembler une flotte et des forces terrestres pour le printemps prochain, pour libérer les catholiques d’Orient du joug des infidèles, l’engage à y concourir et le prévient qu’il lui écrira encore à ce sujet. — Florence, 7 juillet 1439.

Archives du Doubs. E. 1329. Original sur parchemin.

 

45.

Lettre du prince d’Orange à Pierre de Vuillafans, son châtelain de Montagny. Il lui annonce que le duc et la duchesse de Bourgogne viendront sous peu de Saint-Claude à Nozeroy, et en prévision de cette venue il lui ordonne d’envoyer de suite quatre chasseurs, un dans chacune des châtellenies d’Echallens, d’Orbe, de Grandson et de Montagny, pour y chasser des perdrix et faisans, que l’on gardera vivants pour les envoyer quand on les demandera. Ces chasseurs doivent être surveillés par des gens sûrs pour qu’ils ne dérobent rien. En outre il doit amasser dans ces mêmes châtellenies des chapons gras en aussi grand nombre qu’il le pourra, pour les envoyer de même à réquisition, du soir au matin. Il ne doit pas regarder à la dépense, dont il lui sera tenu compte. — Nozeroy, 2 octobre 1442.

Archives du Doubs. E. 1253. Original sur papier.

 

46.

Philippe, duc de Bourgogne, etc., à la requête de Jean Lauternier, procureur de Louis de Chalons, octroye copie de lettres patentes scellées sur double queue du grand sceau /369/ du duc et obtenues autrefois par Louis de Chalon pour son procès pendant par devant le Parlement de Dôle et concernant la seigneurie de Jougne. La cour du Parlement de Dôle authentique cette copie le 18 mars 1443 (n. st.) (Gorrelier, secrétaire).

Ces lettres patentes, datées de Bruges le 25 novembre 1429, portaient que le duc remettait au prince d’Orange toute peine et amende qu’il pouvait avoir encourue pour avoir comme vicaire impérial tenu des journées à Besançon et à Jougne, vu que le prince a renoncé expressément à ce vicariat. Quant à la seigneurie de Jougne, que le duc avait confisquée, celui-ci en décidera sommairement lors de sa prochaine venue en Bourgogne. Cependant s’il ne pouvait le faire avant la réunion du prochain Parlement de Dôle, c’est à ce dernier qu’il appartiendra d’en juger (T. Bouesseau, secrétaire).

Archives du Doubs, E. 422. Original sur parchemin, scellé sur double queue du sceau de la cour du Parlement de Dôle.

 

47.

L’abbé Pierre Morel et les religieux de Saint-Oyan de Joux O. B. (Saint-Claude) s’engagent à célébrer trois messes hebdomadaires dans la chapelle fondée par Jeanne de Montbéliard, femme de Louis de Chalon, et dotée par elle d’une rente annuelle de vingt francs, comptés à 18 sols chacun et chaque sol à 8 engrognes 1. Ces messes seront célébrées pour le salut des âmes de la susdite dame et de son mari, de leurs prédécesseurs et successeurs, le lundi de requiem, le mercredi de Saint-Claude et le samedi de Notre-Dame, chaque fois après la messe de la chapelle de Chalon et à son de cloche comme ces dernières. Ces vingt francs de rente annuelle seront pris sur la part que la fondatrice possède à la grande saunerie de Salins et payés par le receveur de son mari et ses successeurs. Ils pourront être convertis et assignés /370/ sur un franc-alleu qui ne soit pas plus éloigné de Saint-Claude que ne l’est Salins. L’abbé et le couvent s’engagent en outre à maintenir la dite chapelle en bon état avec ses verrières, livre, calice, vêtements et ornements d’autel. Pour assurer leurs engagements, pris par devant Henri Viguier, demeurant à Nozeroy, procureur de Jeanne de Montbéliard, et stipulés par Etienne Girod de Moyrent, clerc et notaire impérial, l’abbé et les religieux déclarent se soumettre à la juridiction du pape, de l’auditeur de la chambre apostolique et des cours du duc et comte de Bourgogne. Témoins : Jean de Nollent, prêtre, et Janin Guinet de Tours en Touraine.

Archives du Doubs. B. 509. Original sur parchemin, scellé sur double queue des sceaux du chapitre et de l’abbé de Saint-Claude.

 

48.

Lettre de Louis de Chalon à Pierre Jeanneret, son receveur de Grandson, lui ordonnant de livrer à son veneur Loys, qu’il envoie à Grandson avec trois chasseurs pour chasser des sangliers, les denrées dont il a besoin : 4 pintes de vin par jour, 3 ½ sols par jour pour leur pitance, une coupe de froment par semaine pour faire leur pain, un muid de méteil par semaine pour faire du pain pour les chiens et mâtins, 2 coupes d’avoine par semaine pour le cheval du dit Loys, le tout mesure de Grandson, et en outre du sel pour saler la venaison. Le veneur rendra compte tout au long des dépenses qu’il aura faites, et ces dépenses avec celles du receveur seront portées dans le compte de ce dernier. — Jougne, 24 octobre 1446.

Archives du Doubs. E. 1247. Original sur papier.

 

49.

Lettre du prince d’Orange aux syndics et au conseil d’Orange, leur mandant de poursuivre les travaux entrepris au château d’Orange, et de remettre dans ce but à Antoine /371/ Thibaut dit Burguet les cent florins provenant des gabelles, qu’ils auraient dû lui envoyer. — Nozeroy, 10 avril 1447.

Archives municipales d’Orange. EE. no 17. Original sur papier scellé.

 

50.

Mandement de Philippe, duc de Bourgogne, etc., à son bailli d’Aval au sujet d’un parc pour la chasse que le prince d’Orange se proposait d’établir près de Vers-en-Montagne. Ce dernier avait commencé dans ce but d’enclore de mur un bois qui lui appartenait et qui touchait à son château de Vers. Mais des particuliers de l’endroit et d’ailleurs, qui possédaient certains prés compris dans ce bois, faisaient opposition à ce projet. Le bailli doit se rendre sur les lieux, appeler les intéressés, taxer les dits prés et forcer leurs propriétaires à en recevoir le prix du prince qui est prêt à le payer. — Donné en notre château de Hesdin, le 3 juillet 1448, sous notre sceau secret en l’absence du grand. (N. Dommessent, secrétaire.)

Archives du château d’Arlay (Jura), caisse A O. II. Original sur parchemin, scellé sur simple queue. (Le sceau manque).

 

51.

Mandement du prince d’Orange à Simonin de Vers, son receveur à Vers[-en-Montagne]. Il doit ordonner au sergent du prince à Nam 1 d’obliger les hommes corvéables de ce village d’amener chaque semaine une charretée de tuiles à Vers pour achever la tour carrée qui se trouve au-dessus de la porte du château de Vers. Le sergent gagera ceux qui feront défaut et fera exécuter la corvée aux dépens du gage. Le receveur donnera le pain accoutumé à ceux qui feront la corvée. Le même mandement prescrit au châtelain de Vers d’écrire au tuilier la quantité de tuiles à faire amener, et la quantité de pain que le receveur doit délivrer /372/ et passer dans ses comptes. — Vers [-en-Montagne], 1er avril 1456.

Archives du château d’Arlay (Jura), caisse A O. II. Original sur papier.

 

52.

Geoffroy Allemant, seigneur de Châteauneuf et d’Uriage, maître d’hôtel du roi dauphin, capitaine de cent lances, ordonne, en qualité de commissaire des gens d’armes nouvellement imposés au Dauphiné à l’occasion de l’expédition de Catalogne, la mainlevée de toutes les terres et seigneuries du prince d’Orange en Dauphiné, et spécialement de la seigneurie d’Auberive. Il mande au premier sergent delphinal sur ce requis d’ôter les penonceaux et bâtons royaux qui ont été apposés sur les dites places et seigneuries. — Valence, 1er décembre 1462 (De Labarre, secrétaire).

Archives du Doubs. E 1220. Original sur papier avec sceau plaqué.

 

53.

Sans lieu ni date. — Lettre de Louis de Chalon à Pierre de Jougne, lui ordonnant de lui envoyer pour samedi prochain au soir tous les chapons qu’il doit encore selon son dernier compte, car il s’attend à la délivrance de la princesse d’Orange pour cette nuit, et le baptême aura lieu le dimanche suivant avec grande affluence de monde.

Archives du Doubs E.1234. Original sur papier.

 

54.

Lettre de Louis de Chalon aux syndics, conseil et habitants d’Orange, les informant qu’il a appris que le seigneur de Roiche et Valence s’assemble avec d’autres près de sa principauté d’Orange. Il leur mande de les faire épier pour connaître leurs intentions et de faire bonne garde. — Cuiseaux, 6 janvier (sans indication d’année).

Archives municipales d’Orange. EE. No 17. Original sur papier, scellé.

 


NOTES :

Note 1, page 6 : Signalons en passant que, contrairement à un usage fréquent, il convient d’orthographier le nom de cette famille Chalon (du latin Cabillonum, Chalon-sur-Saône) et non Châlons (du latin Catalauni, Châlons-sur-Marne). [retour]

Note 1, page 16 : C’est-à-dire dans la comté de Bourgogne, devenue plus tard la Franche-Comté. De Philippe-le-Hardi (1384) duc de Bourgogne à la mort de Charles-le-Téméraire (1477) le duché et la comté de Bourgogne furent réunis sous le gouvernement unique des ducs de Bourgogne, sans que les empereurs d’Allemagne, comme on le verra au cours de cette étude, eussent renoncé à leurs prétentions sur la comté de Bourgogne. [retour]

Note 2, page 16 : Clerc (Ed). Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t.I. p. 430. [retour]

Note 3, page 16 : E. Petit. Histoire des Ducs de Bourgogne, t. IV. p. 79-80. [retour]

Note 1, page 17 : Tuetey (Alex). Etude sur le droit municipal au XIIIe et au XIVe siècle en Franche-Comté, p. 14. [retour]

Note 1, page 18 : En 1237, son père avait possédé quelque temps la seigneurie des Clées. [retour]

Note 1, page 20 : Brevis ac dilucida Burgundie superioris quae Comitatus nomine censetur descriptio, per Gilbertum Cognatum, Nozerenum. Bâle, 1552. In-12, p. 25-26. M E. Monot en a publié une traduction en 1907 citée dans l’index bibliographique de ce travail. [retour]

Note 1, page 21 : Cette date n’est qu’approximative; dans la dispense de parenté que le pape Benoît XIII accorda à Louis de Chalon le 10 janvier 1398, il est dit que les conjoints n’avaient pas sept ans : vos qui nondum septennes existitis. Pièces justificatives I. [retour]

Note 1, page 22 : Voir sur ces événements : Ed. Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 226-237. [retour]

Note 2, page 22 : Par sa sœur Jeanne, mère de Marie. Tous deux étaient les enfants du comte de Genevois Amédée III. Déposition de Guillaume de Nozeroy. Enquête de 1451. Titres non classés. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 23 : Raymond V des Baux en mourant ne laissait que deux filles : l’aînée, Marie, épousa Jean de Chalon-Arlay en 1386. Par le contrat de mariage du 11 avril 1386, Raymond des Baux assurait à sa fille la principauté d’Orange, Courthézon, Gigondas, Condorcet, etc., tandis que Jean de Chalon, en considération de son futur mariage, donnait à Marie des Baux son château d’Orpierre en Dauphiné et prêtait à son beau-père 25 000 florins d’or, en recevant Courthézon pour gage. A. de Pontbriant. Histoire de la principauté d’Orange. Avignon 1891. In-8o, p. 15. [retour]

Note 2, page 23 : Henri de Montfaucon, fils du comte Etienne de Montbéliard, avait eu quatre filles de son mariage avec Marie de Chatillon : Henriette, Marguerite, Jeanne et Agnès. Il quitta la Franche-Comté en avril 1396 pour se joindre, en qualité de chambellan du comte de Nevers, à l’armée que l’empereur Charles IV et le roi de Hongrie Sigismond dirigeaient contre le sultan Bajazet. Cette armée, où brillait la fleur de la chevalerie franc-comtoise, fut anéantie le 25 septembre 1396, à Nicopolis sur la rive droite du Danube. Henri de Montbéliard y périt; à la nouvelle de sa mort, son vieux père, le comte Etienne mourut de douleur. La famille de Montbéliard s’éteignait avec lui; ses grands domaines furent partagés entre ses quatre petites-filles. De Gingins. Recherches historiques sur les acquisitions des sires de Montfaucon, p. 158-160. [retour]

Note 1, page 24 : Les terres de Bouclans, de Vuillafans, de Myon, de Cicon, d’Aigremont, de Rougemont. Archives du Doubs. E. 1320. [retour]

Note 2, page 24 : Pièces justificatives I. Jean de Chalon, père de Louis, était cousin germain d’Henri de Montfaucon; leurs enfants étaient donc parents au 3e degré comme on le verra par le tableau suivant :

Jean II de Chalon-Arlay
|
Louis de Chalon,
sire d’Arguel
|
Marguerite de Chalon, mariée en 1356 à Etienne de Montfaucon, comte de Montbéliard.
|
Jean III de Chalon-Arlay
|
Henri de Montbéliard.
|
Louis de Chalon-Arlay Jeanne de Montbéliard.
[retour]

Note 1, page 25 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 279. [retour]

Note 1, page 26 : D. P. Benoit. Histoire de l’abbaye et de la terre de St-Claude. Montreuil s-m. 1892, t. II, p. 72. [retour]

Note 2, page 26 : Le journal d’un bourgeois de Paris, toujours hostile aux Bourguignons, accuse bien à tort Jean de Chalon de trahison; de plus, il fait une erreur de quelques jours dans la date de la capitulation. « Item, le XXIIIe jour d’octobre, prindrent Saint-Denis, comme Saint-Cloud, par traïson d’aucuns qui estoient dedens, si comme on disoit que le signeur de Chaalons en estoit consentent, lequel estoit au duc de Bourgogne. » Journal d’un bourgeois de Paris, édition A. Tuetey. Société de l’histoire de Paris. Paris 1881, In-8o, p. 13. [retour]

Note 1, page 27 : « Quamvis insciis religiosis et eorum inequisito assensu, prefati domini factum pepigerint, audientes tamen Johannem de Cabilone et ejus commilitones id juramento firmasse, eisdem super fideli et diligenti custodia exhibia regraciari decreverunt; et procul dubio alias notam ingratitudinis incurrissent. Nam cum terrore nimio admissi fuerant, quod rapacissimi omnium castra sequencium Burgundiones publice dicebantur, recedentes tamen nullum ecclesie dampnum quodcumque modicum intulerunt; sed reliquias ipsius et jocalia secretissime abscondisse et eadem sine stipendiis servasse justum et acceptissimum reputabant. »
Chronique du religieux de Saint-Denis, Edition Bellaguet 1839 » t. IV, p. 504.
Lettres de l’an 1411 contenant l’appointement fait à St-Denis avec le Prince Jean de Chalon. Bibliothèque nationale. Collect. Moreau, 890, fol. 516. [retour]

Note 2, page 27 : Ce prince a été souvent confondu avec le personnage dont nous étudions la vie. Il appartenait à la famille de Chalon-Auxerre, branche sœur des Chalons-Arlay. Après avoir épousé Marie de la Trémoille, il s’éprit d’une Aragonnaise, Jeanne de Périllo, demoiselle d’honneur de la cour ducale, qu’il enleva en 1406 pour la conduire au château de Maulne. Banni en 1410 du comté de Bourgogne, ses terres confisquées, il se jeta à corps perdu dans la lutte contre le duc Jean-sans-Peur, bien que ses sympathies n’allassent aucunement au parti armagnac. En mai 1410, il obtint le pardon du duc, mais recommença la guerre huit mois après. Il reprit sa ville de Tonnerre, s’y retrancha en 1411, luttant contre le prince d’Orange qui commandait la Comté pour la duchesse Marguerite. Mais, malgré sa vaillance, il reperdit ses possessions, qui, confisquées par Jean-sans-Peur, furent données au comte de Charolais, le 26 janvier 1412. Louis de Tonnerre ne s’avouait cependant pas vaincu; longtemps encore il poursuivit la lutte, mais toujours avec une issue malheureuse. Voir l’intéressante étude de M. Ernest Petit. Le Tonnerrois sous Charles VI. Bulletin de la Soc. des Sciences de l’Yonne 1891. [retour]

Note 1, page 28 : Du nom de la terre et du château d’Arguel aux environs de Besançon, qu’il possédait. [retour]

Note 2, page 28 : Remise au duc de Bourgogne par Louis de Chalon et Jeanne de Montbéliard de tous les arrérages auxquels ils pouvaient prétendre d’une rente sur la saulnerie de Salins, possédée par le comte Henri de Montbéliard. A la mort de ce dernier, cette rente avait été mise en la main du duc, puis restituée à Jean de Chalon. « Nous, Loys de Chalon, seigneur d’Arguel et de Montfaucon, et Jehanne de Montbéliard, dame des diz lieux, sa femme, de l’auctorité de nostre tres chier seigneur et père, Monseigneur et messire Jehan de Chalon, seigneur d’Arlay et prince d’Orenges, et mesmement nous la dicte Jehanne, de l’auctorité de nostre dit seigneur et mary, faisons savoir à tous… » Lons-le-Saunier, 14 avril 1411. Archives du Doubs. B. 36. [retour]

Note 1, page 29 : Voici un de ces mandements adressés à son châtelain d’Echallens, au pays de Vaud. « Guillemin de Boujaille, chastellain d’Escherlain, nous te mandons que tu faces les mission necessaire pour siz sergant et arbalestrez que nous envoions audit lieu pour la garde du dit Escherlain et par rapourtant ces presentes, ensemble les mesmes parties de ce que tu misioneras pour ceste cause te serat compté en ces premiez compte que tu feras à Monseigneur ou à ses gens. Donné à Boujaille, le XVe jour de septembre l’an mil CCCC et unze. » Archives du Doubs, E. 1230. [retour]

Note 2, page 29 : Mandement de Jean de Chalon à Jean Bernart, receveur d’Orbe, de préparer ses comptes pour le 16 mars de cette année, à laquelle date se trouveront à Orbe les gens de ses neveux de Montbéliard et de Neuchâtel et son fils Louis. Nozeroy, 29 février 1412. Archives du Doubs. E. 1238. [retour]

Note 1, page 30 : Lettres patentes de l’an 1412 par lesquelles le duc Jean commet lieutenant général de Bourgogne et Charolais Messire Jean de Chalon, prince d’Orange. Bibliothèque nationale. Collection Moreau 890, fol. 515. [retour]

Note 2, page 30 : Le 20 février 1413, il envoie de Nozeroy son valet « le petit Guillaume » demander vingt écus à son châtelain d’Echallens « veuz, dit-il, ce que nous en alons en France et s’en n’est ja aler Monseigneur ainsi comme le pourteur le vous dira ». Archives du Doubs, E. 1230. [retour]

Note 3, page 30 : Le 22 septembre 1413, elle écrivit aux officiers de la chambre des comptes à Dijon : « Chers et bien amez, veuillez scavoir que nostre cousin d’Arlay sera devers nous lundy au giste prouchain venant, pour adviser sur le faict de la garde et seureté de ce pais, attendu que se Tonnerre est rendu nous aurons chascun jour la guerre au poing ». E. Petit. Le Tonnerrois sous Charles VI. [retour]

Note 1, page 31 : Archives du Doubs. E. 1252. [retour]

Note 2, page 31 : E. Petit. Le Tonnerrois sous Charles VI. [retour]

Note 1, page 32 : Jean de Chalon ne paraît pas avoir pris part lui-même à la campagne d’Artois de 1414. Il resta auprès de la duchesse de Bourgogne qui désirait l’avoir auprès d’elle, pour garder la Comté durant l’absence de son mari. Le 18 mai, il se trouve à Rouvres auprès de la duchesse avec les sires de St-Georges, Thibaut de Neuchâtel, le sire de Couches et d’autres seigneurs. On l’y retrouve les 12 et 13 juin et du 17 au 21 août. E. Petit. Itinéraires de Philippe-le-Hardi et de Jean-sans-Peur. p. 605. [retour]

Note 2, page 32 : L’activité du prince d’Orange était fort grande à ce moment. C’est à lui seul, pour ainsi dire, qu’incomba la tâche de préparer la défense des deux Bourgognes. Il s’occupa tout particulièrement de l’artillerie à rassembler pour cette campagne, et dans les premiers mois de l’année 1414, il passait un marché avec Guillaume de Mantoche pour la fabrication de six canons à deux chambres, contenant chacun deux livres de poudre et que l’on devait essayer à trois coups après livraison. E. Petit. Le Tonnerrois sous Charles VI. [retour]

Note 3, page 32 : La compagnie de Louis de Chalon fut passée en revue le 28 mai 1414, par messires Jean de Neuchâtel et Antoine de Vergy, seigneur de Rigny. « Noms des seigneurs qui commandaient en la ditte armée. Noble et puissant damoisel Loys de Chalon, seigneur d’Arguel, Banneres, 12 banneres, 7 chevaliers bacheliers, 175 escuyers, 1 trompette, 3 menestriers. » Comptes de Régnault de Thoisy. Bibliothèque nationale. Collection de Bourgogne. 104, fol. 40 recto. [retour]

Note 1, page 33 : Le duc de Bourgogne n’assista pas en personne au sac de Tonnerre, mais il séjournait aux environs à Montbard. Après que, sur son ordre, la cité de Tonnerre eut été rasée, 3000 seigneurs et 10 000 hommes de Bourgogne ravagèrent la Comté. Le 10 novembre, le prince d’Orange et les autres chevaliers sortant du Tonnerrois, vinrent rejoindre le duc à Montbard. Ce dernier se justifia auprès du roi Charles VI des excès commis par ses troupes, par une lettre qui arriva à la cour le 28 novembre. Louis de Tonnerre, à l’arrivée du duc de Bourgogne, s’était en effet enfui auprès du Roi pour y plaider sa cause. Ern. Petit. Le Tonnerrois sous Charles VI. [retour]

Note 1, page 34 : Par un compromis du 12 janvier 1414, entre Jeanne et sa sœur Agnès, la première avait reçu les deux tiers de la châtellenie d’Orbe et la seconde les deux tiers de la châtellenie d’Echallens, qui leur revenaient comme héritage de leur sœur Marguerite, dame d’Orbe et d’Echallens. A la mort de celle-ci, en 1410, Jean-sans-Peur avait mis le séquestre sur la ville d’Orbe. Il le leva un peu plus tard, grâce aux démarches du prince d’Orange et confia même à Louis de Chalon la garde du châtel d’Orbe. De Gingins. Recherches historiques sur les acquisitions des sires de Montfaucon, p. 190-193. [retour]

Note 2, page 34 : Nozeroy, 14 décembre 1414. Mandement à Guillaume de Boujaille, receveur d’Echallens. Archives du Doubs. E. 1230. Idem à Girart Constable, receveur de Montagny. Archives du Doubs. E. 1252. [retour]

Note 1, page 35 : Jean-sans-Peur passa les premiers mois de l’année au château d’Argilly, près de Beaune, dans les fêtes et les réjouissances. C’est dans la forêt avoisinant le château qu’il reçut les ambassadeurs du roi Charles VI qui venaient lui demander son serment pour la paix proclamée à Arras le 23 février. Jean de Chalon se trouvait encore auprès de lui. « Les dis chevaliers firent ce qui leur estoit commandé, et si chevauchèrent avec les ambassadeurs tant que vindrent ès forestz et de là vinrent ès tentes. Et là, descendirent et trouvèrent grant foison de barrons de Bourgoingne, telz que le prince d’Oranges, les seigneurs de St-Georges, de Vergy, mareschaut de Bourgoingne, de Neufchastel, de Rigny, d’Autrey et grant foison d’aultres, qui tous estoient venus voir le Duc en son nouvel logis, et vindrent recevoir les dis ambassadeurs et les menèrent devers le Duc, qui estoit en son oratoire. » Chronique de Jean le Fèvre, seigneur de St-Rémy, édit. Morand, T. I, p. 203.
Dans l’acte mentionné à la note suivante, Louis de Chalon s’intitule, conseiller et chambellan de l’excellent seigneur et prince Monseigneur le duc de Bourgogne. Enfin dans un mandement de Jeanne de Montbéliard à Guillaume de Nozeroy du 18 avril 1415, on lit : « … Et parce que Monseigneur et Loys monseigneur sont à présent devers Monseigneur de Bourgogne… » Archives du Doubs. E. 1230. [retour]

Note 1, page 36 : Marché conclu à Bruges le 14 avril 1415 avec Barthélémy Bertin, marchand de Lucques. Archives du Doubs. E. 1328. [retour]

Note 2, page 36 : Régeste No 1. [retour]

Note 1, page 37 : Nozeroy, 1er août 1415. Mandement de Jean de Chalon à Jean Bernart, son receveur d’Orbe, lui ordonnant de payer les dépenses d’Alain son archer qu’il envoie comme châtelain à Orbe à la place de Ferlin « qui s’en va avec Loys nostre filz oultre mer… » Archives du Doubs. E. 1238. [retour]

Note 2, page 37 : Pièces justificatives II. [retour]

Note 3, page 37 : Cf. Diesbach (Max de). Les pèlerins fribourgeois à Jérusalem (1436-1640). Archives de la Soc. d’hist. du canton de Fribourg, t. V, p. 189-282. [retour]

Note 4, page 37 : Pièces justificatives III. 20 décembre 1415. Reçu par Louis de Chalon de Girard Constable, receveur de Montagny, de 10 coupes d’avoine pour sa dépense à Orbe, « le vendredi devant Noël » à son retour du Saint-Sépulcre. Archives du Doubs. E. 1252. [retour]

Note 1, page 39 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p.352. [retour]

Note 2, page 39 : Archives municipales d’Orange AA. No 14. Lettre de Louis de Chalon aux syndics d’Orange, datée de Nozeroy 16 novembre 1413, leur annonçant l’arrivée du dit Bouton. [retour]

Note 3, page 39 : En février 1416, il envoyait à Avignon son écuyer Louis d’Ecrilles, chargé d’une mission inconnue et qui devait passer à Orange à son retour. Régeste No 2. [retour]

Note 1, page 40 : De Gingins. Recherches historiques sur les acquisitions des sires de Montfaucon, p. 188. [retour]

Note 2, page 40 : On appelait « Lettres de debitis » des lettres autorisant un créancier à poursuivre un débiteur lorsque le titre de l’obligation manquait de force exécutoire. [retour]

Note 3, page 40 : Régeste No 3. [retour]

Note 1, page 41 : Dom Plancher. Histoire de Bourgogne, t. III, p. 469. [retour]

Note 2, page 41 : Texte de la capitulation dans Dom Plancher, Histoire de Bourgogne, t. III. Preuves, p. CCCVI. [retour]

Note 3, page 41 : Revue des chevaliers passée à Beauvais. Dom Plancher, Histoire de Bourgogne, t. III, p. 472. [retour]

Note 1, page 42 : Ibid. p. 472-480. [retour]

Note 2, page 42 : Rousset. Dictionnaire des communes du Jura, t. III, p. 538. [retour]

Note 1, page 43 : Archives municipales d’Orange. Registre des délibérations de la ville. BB No 4, fol. 27 vo. [retour]

Note 2, page 43 : Dans son testament, Marie des Baux exprime le vœu d’être enterrée à l’abbaye du Mont-Sainte-Marie, dans le Doubs. Elle donne au couvent des frères mineurs d’Orange une rente annuelle de 50 florins d’or pour la célébration d’une messe quotidienne pour le salut de son âme. Bibliothèque nationale franç. 29709, fol. 46-47 (Imprimé de 1731). [retour]

Note 3, page 43 : Condorcet et Jonquières. [retour]

Note 1, page 44 : Lettres patentes de la reine du 30 janvier 1418. Besse : Recueil de diverses pièces servant à l’histoire du roy Charles VI, p. 186. [retour]

Note 1, page 45 : Besse, op. cit. p. 211. [retour]

Note 2, page 45 : Beaucourt (marquis de), Histoire de Charles VII, t. I, p. 28. [retour]

Note 3, page 45 : Dans les pages qui vont suivre, nous avons abondamment puisé dans le consciencieux travail publié par M. Paul Dognon, dans les Annales du Midi, t. I, 1889 et intitulé : Les Armagnacs et les Bourguignons, le comte de Foix et le Dauphin en Languedoc. L’exposé de M. Dognon, tiré en grande partie des registres de délibérations de plusieurs villes du Midi, éclaire la trame compliquée des événements qui se déroulèrent en Languedoc durant les années de 1417-1419. En plus d’un point, M. Dognon a pu corriger le travail de M. Léon Flourac sur Jean 1er, comte de Foix, que nous avons d’ailleurs utilisé, et l’Histoire de Languedoc, de Dom Vaissette. [retour]

Note 1, page 46 : Besse. Recueil de diverses pièces… p. 186. Ordonnances des rois de France de la 3e race. T. X, p. 431. [retour]

Note 2, page 46 : Louis n’avait alors que des espérances sur le comté de Genève qu’il disputait au duc Amédée de Savoie, mais la plupart des actes de cette époque lui donnent ce titre. [retour]

Note 3, page 46 : Dans la commission donnée au comte de Genève, la reine Isabeau s’exprime ainsi : « Scavoir faisons que nous, considérans les grands sens, prudhomies, loyautés, vaillances et bonnes diligences estans ès personnes de nostre très cher et amé cousin, messire Louis, comte de Genève et seigneur d’Argueil, aisné fils de nostre très cher et amé cousin le prince d’Orenge et seigneur d’Arlay… de maistre Guillaume de Saulieu et Jean de Terrant, conseillers… avons aujourd’huy… instituez et stablis… nous procureurs généraux. » [retour]

Note 1, page 48 : Son armée comptait exactement 4 chevaliers bannerets, 2 chevaliers bacheliers, 4 écuyers bannerets, 363 écuyers et 4 trompettes parmi lesquels nous relevons les noms du sire de l’Aubespin, de Jean de Vienne, de Louis d’Escrille, d’Huguenin de Vaudrey, de Richard Ferlin, tous futurs compagnons du sire d’Arlay et qui partagèrent une grande partie de son existence. Bibliothèque nationale. Coll. Bourgogne 103, p. 97-107. [retour]

Note 2, page 48 : Chronique de Berry, édit. Godefroy. Hist. de Charles VI, p. 411. [retour]

Note 1, page 49 : Le 2 avril, les commissaires arrivaient devant Pont-St-Esprit si nous en croyons la lettre qu’ils adressèrent le 5 avril aux habitants d’Albi, et dont nous donnons un extrait plus loin. [retour]

Note 2, page 49 : P. Dognon. Les Armagnacs et les Bourguignons. [retour]

Note 3, page 49 : Archives municipales d’Orange. Délibérations. B. B. 4 fol. 29 et 30. [retour]

Note 1, page 50 : Compayré. Etudes historiques et documents inédits sur l’Albigeois. Albi, 1840, in-8o, p. 264. [retour]

Note 2, page 50 : Chronique de Berry. [retour]

Note 1, page 51 : Dom Vaissette. Histoire de Languedoc. Nouvelle édit., t. IX, p. 1040 et suiv. [retour]

Note 2, page 51 : « En l’an MCCCC XVIII, dimars a XI del mes d’abril, vengron et interon en Montpellier mossenhor d’Oguelt, fih de mosslo prince d’Aurengua, moss. le vescompte de Murat, mosseu Jehan Teucort et mosseu…. comis per nostra sollempna dona madona la regina logatenens et venerabla del nostre senhor a regir lo pays de Lengadoc ». Petit Thalamus de Montpellier. Montpellier 1836. In-4o, p. 466. Louis de Chalon était communément appelé au Midi, Monsieur d’Arguel, du nom de la seigneurie d’Arguel, qu’il possédait comme fils aîné du prince d’Orange. [retour]

Note 1, page 52 : P. Dognon. Les Armagnacs et les Bourguignons. [retour]

Note 1, page 53 : Petit Thalamus de Montpellier, p. 466. [retour]

Note 2, page 53 : Régeste No 4. [retour]

Note 3, page 53 : Besse. Recueil de diverses pièces, p. 211. [retour]

Note 4, page 53 : Ibid. p. 218. [retour]

Note 1, page 54 : Besse. Recueil de diverses pièces, p. 208. [retour]

Note 2, page 54 : P. Dognon. Les Armagnacs et les Bourguignons. [retour]

Note 3, page 54 : Relation de ce qui s’est passé en la cité de Carcassonne pendant les troubles du duc de Bourgogne. Besse, p. 388. [retour]

Note 1, page 55 : Archives municipales d’Albi. CC. 174. [retour]

Note 2, page 55 : Archives municipales d’Albi. AA. 33. La lettre de Louis de Chalon aux consuls d’Albi leur fut présentée le 24 mai, d’après une annotation du secrétaire des consuls. [retour]

Note 3, page 55 : Lundi XXVIe jour de septembre, Messire Charles de Clermont a fait presenter à la court certaines lettres royaulx pour estre receu par procureur à l’office de seneschal de Carcassonne, faisant foy de procuration pour ce faicte. Sur quoy la court a appointté que, veues les dites lettres royaulx et de procuration ycelle court fera ce qu’il appartiendra sur ce et au Conseil. Journal de Clément de Fauquembergue, t. I., p. 174. [retour]

Note 1, page 56 : A Toulouse on établit Hugues de Caraman en qualité de sénéchal. P. Dognon, op. cit. [retour]

Note 2, page 56 : Besse. Recueil de pièces, p. 104. [retour]

Note 3, page 56 : Léon Flourac. Jean I, comte de Foix, p. 71. [retour]

Note 1, page 57 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 358. [retour]

Note 2, page 57 : Flourac. Jean I, comte de Foix, p. 45. [retour]

Note 1, page 58 : P. Dognon. Les Armagnacs et les Bourguignons. [retour]

Note 2, page 58 : P. Dognon. Les Armagnacs et les Bourguignons. [retour]

Note 3, page 58 : Le retour offensif de Louis à Nîmes s’explique ou par la résistance du château aux Bourguignons tandis que la ville se soumettait à eux, ou par un mouvement hostile et passager des habitants contre les commissaires. [retour]

Note 4, page 58 : Régeste No 5. [retour]

Note 1, page 59 : Archives de Narbonne, Comptes 1418. Communication de M. Dognon. Il avait passé le 31 juillet à Montpellier, mais sans s’y arrêter. [retour]

Note 2, page 59 : C’est à cette époque que les commissaires transférèrent à Béziers les 3 foires que l’on avait coutume de tenir à Pézenas, pour récompenser les habitants de Béziers de ce qu’ils s’étalent soumis des premiers à la Reine et au duc de Bourgogne. Les lettres sont datées de Nîmes du mois de juillet. Ordonnances des rois de France de la 3e race, t. XII, p. 260. [retour]

Note 3, page 59 : Les Etats refusèrent au comte de Genève le subside que celui-ci leur demandait, puis votèrent un fonds de 7000 livres pour les frais de deux ambassades à envoyer au Roi et au Dauphin. Mais le sire d’Arguel parvint à se faire remettre ce fonds. P. Dognon. op. cit. [retour]

Note 4, page 59 : Régeste No 9. [retour]

Note 1, page 60 : Flourac. Jean de Foix, p. 71. [retour]

Note 2, page 60 : Berry place à tort cet événement en l’année 1417. [retour]

Note 3, page 60 : Dom Vaissette. Hist. de Languedoc. Nouv. édit., t. X. Note CLXXXI, fol. 1992. [retour]

Note 1, page 61 : Ed. Clerc. Essai sur l’Histoire dé Franche-Comté, t. II, p. 363, note 2. [retour]

Note 2, page 61 : On le voit siégeant au Parlement le 25 juillet, cf. Journal de Clément de Fauquembergue, t. I, p. 142. [retour]

Note 3, page 61 : « Les ducs de Bourgogne et de Bretagne s’assemblèrent à Charenton, comme dist est, pour cause de l’impédimie qui régnait adont à Paris, si grande que, par le rapport des curés, il morut celle année dedens Paris, plus de LXm personnes. Et morurent de celle pestilence le prince d’Orenge, le seigneur de Fosseux, messire Jeunet de Poix, le seigneur d’Aux et aultres gentilzhommes, serviteurs du duc de Bourgogne. » Chronique de Jean le Fèvre seigneur de St-Rémy, édit. Morand, t. I, p. 337. Les annotateurs des Mémoires de Gollut ont indiqué à tort la date du 4 décembre. (Mémoires historiques de la république séquanaise, nouv. édit. col. 1028, note 5). Nous avons adopté cette date du 2 septembre d’après un certificat de sépulture de divers princes de la maison de Chalon, donné par les religieux de l’abbaye du Mont-Ste-Marie, près de Pontarlier, qui se trouve aux Archives du Doubs. E. 1329. [retour]

Note 4, page 61 : Dans une enquête faite en 1451, Simon de Vers dit : « que le dit leu messire Jehan de Chalon estoit tenus et réputé à son vivant chevalier et avoit esté fait chevalier en la bataille de Flandres comme il a oyt dire à feu messire Jacques de Vienne, jadis seigneur de Ruffey et à plusieurs aultres chevaliers et escuiers qu’avoient estez en la dicte bataille, lequel feu messire Jehan quant il s’en ala à Paris, ouquel lieu il trépassa, ala en armes ou service de feu monseigneur le duc Jehan, cui Dieu pardoint, et le vit passer luy qui deppose par le lieu de Vers, en armes… » Archives du Doubs, Fonds Chalon, supplément. [retour]

Note 1, page 62 : Jean Toutblanc dépose en 1451 « qu’il a esté en plusieurs armées avec le dit feu messire Jehan de Chalon et mesmement en cinq années qu’il fit en son temps ou pays de France, par l’ordonnance et ou service de feu monseigneur le duc Jehan, cui Dieu pardoint, esquelles années il mena grant compaignie de gens d’armes et de trait, à chascune fois environ de IIII à V cens lances, pour l’entretenement desquelles gens il fraya et missionna moult grandement, tant ès dons qu’il faisait ès dis gens d’armes comme pour leur entretenement. » Enquête de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 2, page 62 : Le même témoin dépose encore « qu’il y a oyt dire à feu Estienne de Saint-Georges, jadis serviteur dudit messire feu Jehan et à plusieurs aultres dont il n’est recors, que icelluy feu messire Jehan, à sa dernière volunté, avoit ordonner une chapelle estre fondée en l’esglise de Sainte-Katherine du Vaul des Escoliers, à Paris, en laquelle esglise ses entrailles sont enterrées. » [retour]

Note 1, page 63 : Déposition d’Huguenin de Vuillafans, écuyer. « Dit qu’il a souventes foiz conversez avec feu messire Jehan de Chalon… lequel il a veu et sceu estre l’ung des doulx, courtoix et débonnaire seigneur à toutes gens qui fust ou comté de Bourgogne, et lequel amoit bien et chèrement ses subgietz et serviteurs et singulièrement amoit-il ses enffans comme sembloit audit depposant. » Enquête de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 2, page 63 : Un des écuyers de Louis, Huguenin Othenin, de Lons-le-Saunier, dépose en 1451 « que en l’an mil IIIIc et XVIII ou environ, le dit seigneur deffendeur estoit ou pays de Languedoc, avec lequel ledit depposant estoit en sa compaignie, et durant ce temps, furent apportées nouvelles certaines au dit Seigneur deffendeur que ledit feu messire Jehan de Chalon son père, estoit trespassé au lieu de Paris, lesquelles nouvelles oyes, leditsr deffendeur print les robes de deul et s’en vint asses tost apres ou pais de Bourgogne. » Enquête de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon, supplément. [retour]

Note 3, page 63 : Archives municipales d’Orange. Registres des délibérations, B. B. 4 fol. 34vo et 35. Ces députés furent envoyés le 15 septembre, et le 18, les syndics faisaient part au conseil de leur réception par le prince. [retour]

Note 1, page 64 :. Régeste No 6. Dans des lettres patentes du jour précédent, Charles VI avait nommé Louis son capitaine, général pour commander à 600 hommes d’armes. L’objet de ces deux lettres semble être le même. [retour]

Note 2, page 64 :. Léon Flourac. Jean de Foix, p. 72. [retour]

Note 3, page 64 :. Besse. Recueil de pièces, p. 235. « Chers et bien amez, nous avons sceu par le rapport de plusieurs de nos féaux, la bonne et vraye obéissance que vous avez faite pour le bien de nous et de nostre royaume, à nostre amé et féal cousin, conseiller et chambellan, Louis de Chalon, comte de Genève et prince d’Orange, dont vous nous sçavons très bon gré et vous en avons pour tous recommandez… nous voulons que en vostre bon propos vous perseverez et demeurez en ayant regart au bien de nous et de nostre royaume et en obviant au damnable et déloyal propos que feu Bernard d’Armignac et ses adhérans et complices avoient envers nous… » [retour]

Note 1, page 65 : Régeste No 7. [retour]

Note 1, page 66 : Archives municipales d’Orange EE. No 17, 10 octobre 1418. Les habitants d’Orange tinrent compte de l’avertissement de leur maître. Ils formèrent un conseil de guerre, se munirent d’artillerie et fortifièrent la ville. Puis ils réussirent à obtenir de l’archevêque de Reims qu’il ne serait fait aucun dommage à la place. Cependant, ils mirent en garde le prince contre la gendarmerie delphinale qui avait couché à Carpentras pour passer le Rhône avec le dessein de le surprendre. La Pise. Histoire d’Orange, p. 111. [retour]

Note 2, page 66 : Lettre du 12 octobre. Régeste No 8. Les deux autres lettres sont du 11 oct. et leur teneur est presque la même. [retour]

Note 3, page 66 : Dom Vaissette, dans son Histoire de Languedoc, t. X, fol. 1992, donne le texte d’une trêve qui serait intervenue entre Louis de Chalon et Régnault de Chartres, le 12 novembre 1418. D’après M. Dognon, l’on n’aurait là que le procès-verbal de négociations qui auraient échoué. [retour]

Note 1, page 67 : Besse. Recueil de pièces, p. 250. [retour]

Note 2, page 67 : Régeste No 10. [retour]

Note 3, page 67 : Léon Flourac. Jean de Foix, p. 76. [retour]

Note 1, page 68 : Bibliothèque nationale, mss. lat. 9177, fol. 199. [retour]

Note 1, page 69 : Voici l’analyse de cette pièce que donne Ed. Clerc, sans indiquer d’autre provenance que celle-ci : Archives Chalon. Papiers de guerre.

« Une grande lettre en parchemin contenant les instructions données à Louis d’Ecrille pour aller près du prince d’Orenges, lieutenant général pour le Roy au pays de Languedoc, le chargeant de remettre ès mains dudit prince d’Orenge, les lettres que le Roy lui avait écrites, par lesquelles il le remerciait de la bonne conduite qu’il avait tenue pour le bien du royaume, le priant de continuer et, dans le cas où le comte de Foix accepterait les offres à luy faites de la charge de connétable et du gouvernement, de recevoir son serment au nom du Roy. Cette lettre est datée de Provins du 2 février 1419. Signé : Charles, et plus bas, par le Roy, Pesnel ». Ed. Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 365, note 2. [retour]

Note 2, page 69 : P. Dognon. Les Armagnacs et les Bourguignons. [retour]

Note 1, page 70 : Dom Vaissette. Histoire de Languedoc. Nouv. édit., t. IX, p. 1052. [retour]

Note 1, page 71 : Comme Uzès et Nîmes. [retour]

Note 2, page 71 : Devant les Etats réunis à Toulouse, le vicomte de Murat s’attribuait un peu plus tard tout le succès de ces négociations. [retour]

Note 3, page 71 : Il y entra le 28 avril. [retour]

Note 1, page 72 : Archives du Doubs. E. 1327. [retour]

Note 2, page 72 : Dom Vaissette. Histoire de Languedoc. Nouv. édit., t. IX, p. 1052-1053. [retour]

Note 3, page 72 : « Après le décès de feu messire Jehan, le prince retourna hâtivement du pais de Languedoc pour cerchier et veoir le fait et trésor dudit feu seigneur son père. » Déposition de Perrot Faulquier, écuyer. Enquête de 1464. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 1, page 73 : « Item aussi avoit et devoit avoir très grant trésor qu’il avoit gaigniez et appourté de l’armée de laquelle il fut chief ou pays de Languedoc jusques à la somme, par commune renommée de deux cens mille écus d’or ou environ. » Enq. de 1464. [retour]

Note 2, page 73 : Une des suivantes de Jeanne de Montbéliard, Louise de Salins dépose en 1466 « que feu monseigneur le prince retourna assez tost, dudit pays de Languedoc dont il amena quatorze ou quinze mulez chargiez les aucuns de figues, orenges, et aultres choses de despense d’ostel et les veit deschargié et deslier les ferdeaux; ne scet qu’il avoit ès ferdeaux des aultres mulez car elle ne les veit point deffardeler. » Enquête de 1466. Archives du Doubs. E. 1350. Jean de Chifflay chevalier dépose « que le dit seigneur deffendeur estant au pais de Languedoc en armes, duquel païs il estoit gouverneur, amassa et gaigna ou dit pays, plusieurs biens, tant en or et argent monnoyé, comme en vesselle et aultres meubles. » Enq. de 1451. Fonds Chalon. Supplément. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 74 : Besse. Recueil de pièces, p. 297. [retour]

Note 1, page 76 : Annuaire du Jura pour 1862, p. 87. [retour]

Note 2, page 76 : Déposition de Madame Louise de Salins, suivante de la princesse d’Orange. Enquête de 1466. Archives du Doubs, E. 1350. [retour]

Note 1, page 77 : Clerc (Ed). Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 443. [retour]

Note 2, page 77 : « Office qu’il a bien et loyalement gouverné et exercé au temps de feu nostre très redoubté seigneur et père. » Lettres patentes de Louis, du 4 juillet 1419. La Rivière. Archives du Doubs. E. 1239 et 1240. [retour]

Note 3, page 77 : Elle épousa Lancelot de Luyrieux. Rousset. Dictionnaire des Communes du Jura, t. III, p. 538. [retour]

Note 1, page 78 : Voir dans Dom Plancher, Histoire de Bourgogne, t. III, p. 536 l’énumération des chevaliers composant la troupe de Louis de Chalon. [retour]

Note 1, page 79 : Plusieurs personnages importants allèrent en ambassade le 24 septembre vers le Roi et la Reine à Troyes « leur exposer la grande trahison perpétrée en la personne de feu mondit seigneur le duc Jean, affin d’eulx encourager à aider ma ditte dame la duchesse et à monseigneur son fils à punir le dit méfait. » Bazin. La Bourgogne de 1404-1435, p. 83. [retour]

Note 2, page 79 : Bibliothèque nationale. Coll. Moreau 890, fol 514. [retour]

Note 3, page 79 : Régeste No 11. [retour]

Note 1, page 80 : Chronique de Georges Chastellain, t. I, p. 150. [retour]

Note 2, page 80 : Ed. Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 380, note 1. [retour]

Note 1, page 81 : Chronique de Georges Chastellain, t. I, p. 180. [retour]

Note 2, page 81 : « Et le lendemain jour de la Trinité (Henri V) épousa très solempneusement ladite dame en la mesme paroche où estoit situé son logis. Et furent faites les noces riches et pompeuses, et si solennelles que le recorder seroit impossible, car toute extrémité de gloire et de beubant y estoit mis en avant plus que ne se pourrait dire, ny escripre … Aussi l’or et la richesse y estoient sans mesure et les courages sans espargne. Le duc bourgougnon paroit moult ceste feste, excepté qu’il ne se vestoit que de noir, et estoit accompagné moult noblement comme des deux frères comtes, le comte de Conversan et le comte de Ligny son fils, le prince d’Oranges » … Chronique de Georges Chastellain, t. I, p. 134. [retour]

Note 1, page 82 : Lettres de Louis de Chalon en date de Bletterans, des 6 et 7 juillet 1420. Archives de l’Isère. B. 3840 et du 20 août. Archives du Doubs. E. 1240. [retour]

Note 2, page 82 : Il se trouvait à Jougne, le 16 octobre, à la Rivière le 18. Archives du Doubs. E. 1240. [retour]

Note 3, page 82 : « Et tourches de cire ». Archives du Doubs. E. 1240. [retour]

Note 4, page 82 : Nozeroy, 12 octobre 1420. Mandement du prince aux gens de ses comptes d’allouer à Pierre de Jougne 12 livres, 4 solz, 6 deniers lausannois « pour poisson qu’il nous a aujourd’hui appourté et pour despens », Archives du Doubs. E. 1240. [retour]

Note 1, page 83 : Pièces justificatives IV. [retour]

Note 2, page 83 : Estienne de Veirer, bachelier en lois, procureur du prince d’Orange, dit que Pierre de Jougne a payé ses dépenses lors de son passage à Orbe, « pour aler au lieu de Lousanne pour appeller de certaine admonicion et lettres excommunicatoires que li officiaulx dudit lieu avoit donné et octroyez au procureur de monseigneur l’évesques de Lousanne et ycelles lettres avoit fait publier aux églises cathedra du même lieu et en plusieurs aultres lieux de la diocèse, à l’encontre de mondit seigneur le prince et de ses adhérans en ceste partie, au fait de la monnoye que mondit seigneur le prince fait batre au dit lieu de Jougne. » 15 janvier 1421. Archives du Doubs. E. 1240 [retour]

Note 3, page 83 : Archives du Doubs. E. 1240. [retour]

Note 1, page 84 : Remise par Charles VII, alors dauphin, à Louis, prince d’Orange, en considération de ses services, de la commise des fiefs du Dauphiné dont il n’avoit pas rendu hommage. Archives nationales. K. 1137, portef. 4. [retour]

Note 2, page 84 : Ed. Clerc a placé ces obsèques au retour de Louis de Languedoc, c’est-à-dire à la fin de l’année 1419. Contrairement à son opinion, nous croyons qu’elles eurent lieu dans les premiers jours de mars 1421. En effet, le 24 février de cette année, Louis de Chalon mandait de Nozeroy à Pierre de Jougne, son receveur d’Orbe et de Montagny, d’apporter tous ses comptes à une journée qu’il avait assignée à Jougne aux gens de son beau-frère le comte de Neuchâtel « le vendredi devant l’obsèque de feu monseigneur cui Dieu pardoint ». Archives du Doubs. E. 1240. De plus, le document suivant nous confirme dans notre opinion. C’est une lettre datée de Dijon du 28 février 1421, de Guillaume de Vienne, seigneur de Saint-Georges, à Maximin seigneur de Ribeaupierre, le priant de renvoyer à plus tard la journée qu’il doit avoir avec lui, « car, au mercredi devant Pasques flories, l’en doit faire les obsèques de feu messire Jean de Chalon, seigneur d’Arlay et de sa femme où il me convient estre ». Albrecht (Dr Karl) Rappollsteinisches Urkundenbuch. Colmar 1894. Band II, p. 137. [retour]

Note 1, page 85 : En 1451, Guillaume de Nozeroy, bourgeois de Salins dépose que « ledit sr deffendeur, environ l’an mil IIIIc et XX, fit faire l’obseque dudit feu messire Jehan de Chalon son pere, en l’abbaye de Mont-Ste-Marie, ouquel obseque y eust grant multitude de gens, tant prelas, barons, chevaliers, escuiers que aultres gens d’église. Et fit ledit sr deffendeur grans frais et missions. » Enquête de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 2, page 85 : « Ledit sr deffendeur a paier à feu messire Vaulchier Raillart et messire Jehan Raillart son filz la somme de deux mil frans, florins ou escus et duquel des trois n’est pas recors, lesquels deux mil frans, florins pu escus furent empruntés pour faire les frais des frais funeraulx qui furent fais à Paris pour ledit feu messire Jehan et pour amener son corps dez ledit Paris jusques à l’abbaye du Mont-Ste-Marie. » Ibidem. [retour]

Note 1, page 86 : Cf. un mandement de Louis du 19 mars 1432. Archives du Doubs. E. 1232. [retour]

Note 2, page 86 : Ed. Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 381. [retour]

Note 1, page 87 : Amédée III, comte de Genevois, mort en 1367, avait eu 5 fils qui décédèrent tous sans postérité et 5 filles, dont la seconde, Jeanne, mariée à Raymond IV, prince d’Orange, donna le jour à Marie des Baux. Le tableau suivant expliquera la parenté de Louis de Chalon :

Amédée III
|
Jeanne - Raymond IV
|
Marie - Jean de Chalon
|
Louis de Chalon.
[retour]

Note 2, page 87 : De Gingins. Recherches historiques sur les acquisitions des sires de Montfaucon, p. 181. [retour]

Note 3, page 87 : 10 février 1407. Rente à percevoir annuellement à Pâques sur les recettes des péages de Chillon et de Villeneuve. [retour]

Note 1, page 88 : D’après ses dires, l’abbé de St-Claude aurait participé à ce prétendu complot et d’autres complices devaient empoisonner les fontaines de Savoie. Cibrario. Origini e progresso delle Instituzioni della Monarchia di Savoia. Turin 1855. In-12. Parte seconda, p. 237. [retour]

Note 2, page 88 : Il fut décapité près de Ternier, sur le pont de l’Arve, le 1er février 1420. [retour]

Note 3, page 88 : Le 2 avril 1421, le bourgmestre et le conseil de la ville de Bâle donnent à Louis de Chalon un sauf-conduit pour lui et sa suite allant auprès de l’empereur des Romains. Urkundenbuch der Stadt Basel, t. VI, p. 118. Dans une lettre du 22 avril 1421 adressée par les autorités de la ville de Nuremberg à l’empereur Sigismond pour le renseigner au sujet des visiteurs attendus à la diète de l’Empire, on lit ce qui suit : « Darnach sein zu uns komen unser herren herzog Johannes von Peyem, … der marggraf von Baden und der herre von Schalaun. » Kerler : Deutsche Reichstagsakten unter Kaiser Sigmund, t. II. Gotha, 1883, in-4o, p. 26. D’autre part, voici un extrait des dépenses de la ville à l’occasion de la Diète en avril 1421 : « Propinavimus dem Herzogen von Schallan … summa 2 lb. 8 sh. » Ibidem, p. 46. [retour]

Note 1, page 89 : Henri Viguier, bourgeois de Nozeroy, dit que « après le trespas dudit feu messire Jehan de Chalon, le dit sr deffendeur fit grant poursuite du comté de Genesve, tant par devant l’empereur Sigismond comme aussi devers feu monseigneur le duc de Savoye dernièrement trespassé, à plusieurs et diverses fois, et devers lesquels il envoya grandes et sollempnelles ambassades, comme ledit depposant la oyt dire à feu messire Jehan Prévost, jaidis docteur en lois et conseiller dudit seigneur deffendeur qui avoit esté ès dites ambassades, les frais de laquelle poursuite ont peu coster audit seigneur deffendeur, selon l’advis dudit depposant environ X mil frans, dit en outre qu’il a oyt dire à feu Huguenin Vaulclens, lequel ledit sr deffendeur avait envoyez devers l’Empereur pour oyr droit en la cause qu’il avoit par devant ledit empereur contre mondit seigneur de Savoye touchant ledit comté de Genesve, que ledit sr deffendeur avoit esté condampné ès deppens de mondit seigneur de Savoye et icelluy monseigneur de Savoye absolz de l’impétition et demande dudit sr deffendeur. » Enquête de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 1, page 90 : Mémoires et documents publiés par la Société d’histoire de Genève, 2e série, t. III, p. 141. [retour]

Note 2, page 90 : Huguenin de Salins, écuyer, dit « qu’il y a environ XXII ou XXIII ans, et aultrement du temps n’est racors, que ledit sr deffendeur accompaigné de plusieurs chevaliers et escuiers et jusques au nombre d’environ VIxx chevaulx, en la compaignie desquelx ledit depposant estoit, s’en ala à Noremberg, en Alemaigne pour le fait du comté de Genesve, ouquel lieu il cuidoit trouver l’Empereur et ne le trouva pas, ains seullement les électeurs de l’Empire et plusieurs aultres seigneurs d’Alemaigne. » Enquête de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 3, page 90 : « Et après ce qu’il s’en fut alé dudit Norembert, ledit feu messire Guillaume de Salyeu et ledit depposant y demorarent environ IX sepmaines pour poursuivre ledit proces, et par avant feurent messire Jehan Prevost, maistre Pierre de Merlier et Jehan de Champaignole qui, avoient esté à plusieurs et diverses fois devers ledit empereur tant ou pays de Hongrie que aultre part en la poursuite dudit proces. » Déposition de Gauthier de Falerans. Ibidem. [retour]

Note 1, page 91 : Pièces justificatives XI. [retour]

Note 2, page 91 : Entre temps des pourparlers n’avaient cessé d’être engagés entre Louis de Chalon et le duc de Savoie. C’est à Lausanne que se rencontrèrent le plus souvent les envoyés des deux princes. Le 6 octobre 1421, Louis y dépêchait son conseiller le doyen de Besançon, messire Jean de Vaudrey et Guillaume de Saulieu. Archives du Doubs. E. 1240. [retour]

Note 3, page 91 : Lévrier. Chronologie historique des comtes de Genevois. Orléans 1787. In-8o, t. II, p. 282. [retour]

Note 4, page 91 : Il n’avait jamais renoncé à obtenir gain de cause, puisqu’on 1424 encore, l’un de ses conseillers les plus actifs, Jean de Champagnole était parti pour la Hongrie pour y plaider auprès de l’Empereur. A son retour, Louis le combla de faveurs, exempta ses biens de toute charge et lui concéda des droits importants de chasse et de pêche. Rousset. Dictionnaire des Communes du Jura, t. I, p. 425. [retour]

Note 1, page 92 : Régeste Nos 13 et 17. [retour]

Note 2, page 92 : Le texte du traité se trouve reproduit en entier dans de Gingins : Recherches historiques sur les acquisitions des sires de Montfaucon, p. 340-356. [retour]

Note 1, page 93 : Gollut. Mémoires historiques de la république séquanaise. Edit. Duvernoy. Col. 1061. [retour]

Note 2, page 93 : Chronique de Georges Chastellain, t. I, p. 292. [retour]

Note 3, page 93 : Bourges, 14 mars 1421. Lettres de Charles, régent le Royaume, dauphin de Viennois, de provision de conseiller d’Etat, accordées à Louis de Chalon. Archives de Vaucluse. E. 13. [retour]

Note 1, page 94 : Le but principal de cette entrevue était la délimitation des pays de Bourgogne et de Savoie. D’après Guichenon, la réception du duc par Amédée VIII aurait eu lieu à Thonon, mais les textes parlent positivement de Genève. [retour]

Note 2, page 94 : Nozeroy, 17 mars 1422. « Pierre de Joigne, nostre receveur d’Orbe, nous envoions par delà Richart Ferlin, pour ce que vous devez achetez et faites provision par de là des choses suigantes. C’est assavoir : mortelles, ung millier; anguilles grosses, freches, trois douzaines; palées IIIc et ambles deux douzaines et que ycelles choses soient à Nozeroy ce samedi prouchain au plus tart, car dymenche prouchain, Monseigneur de Bourgongne sera à l’ostel à Noseroy. » Archives du Doubs. E. 1240. [retour]

Note 1, page 95 : Dom Plancher. Histoire de Bourgogne, t. IV, p. 50. [retour]

Note 2, page 95 : Régeste No 12. [retour]

Note 1, page 96 : Avec le prince d’Orange figuraient Guillaume de Vienne, sire de St-Georges, Hué de Lannoy, maître des arbalétriers de France, Jacques de Courtiambles, seigneur de Commarin, Guy Arménier, président de la chambre du conseil à Dijon. Archives de la Côte d’Or. B. 297. [retour]

Note 2, page 96 : Archives municipales d’Orange. Délibérations 28 mai 1421. BB 4, fol. 61 vo. [retour]

Note 1, page 97 : Régeste No 13. [retour]

Note 2, page 97 : Nommé maréchal le 21 février 1423, il succéda à Jean de Cottebrune. [retour]

Note 1, page 98 : Régeste No 14. [retour]

Note 2, page 98 : Bazin. La Bourgogne de 1404-1436, p. 118. [retour]

Note 3, page 98 : Bibliothèque nationale. Collect. Moreau, 890, fol. 343. [retour]

Note 1, page 99 : Régeste No 16. [retour]

Note 2, page 99 : Voir plus haut page 88, note 3. [retour]

Note 3, page 99 : Thiébaud VIII, comte de Neuchâtel-Bourgogne. Parmi les seigneurs qui suivirent Louis de Chalon dans cette expédition, les lettres des villes du Rhin mentionnent un sire de Warsee. Il s’agit sans doute d’Antoine de Vars. Vars, localité de Franche-Comté, canton d’Autrey, arrondissement de Gray. (Haute-Saône.) [retour]

Note 1, page 100 : Schreiber. Urkundenbuch der stadt Freiburg. Bond II. 2e Abteilung. Wackernagel (R.), Geschichte der Stadt Basel, t. I, 446, présente l’expédition de Louis de Chalon comme un épisode de la guerre que les villes du Haut-Rhin soutenaient alors contre le marquis de Bade. [retour]

Note 1bis, page 100 : Idem.[retour]

Note 2, page 100 : Elle avait épousé en 1393 Léopold le Superbe, duc d’Autriche, mais dès l’année 1406, Léopold appelé à gouverner l’Autriche comme tuteur de son cousin Albert, quitta l’Alsace pour n’y plus revenir. Il y laissa sa femme avec le pouvoir d’administrer en son nom. Catherine mourut le 26 janvier 1426. [retour]

Note 3, page 100 : Régeste No 18. M. Stouff a fait une erreur de date en confondant l’expédition du prince d’Orange de juin-juillet 1424 et les incursions armées faites sous la direction de Thiébaud de Neuchâtel en 1425. La lettre d’Arnold de Ratperg est de l’année 1424 et non de 1425. Stouff (Louis). Les origines de l’annexion de la Haute-Alsace à la Bourgogne en 1469 dans : Revue bourguignohne de l’enseignement supérieur, t. X, 1900, p. 90 note 3. [retour]

Note 1, page 101 : Lettre des bourgmestres de Bâle à ceux de Fribourg-en-Brisgau, 24 juin 1424. « Wir lassent üwer gute früntschaft wissen daz mengerleye warnungen ut einander komen sind, tags und nachts, wie der Printz von Zschalon, von Warse und die drye landvögt von Burgunden und ouch ander welschen herren, ein grose sammung by einander habent und in das Elsass meinent zu ziehende. » Schreiber. Urkundenbuch II, p. 338-339. Bâle faisait alors partie de la ligue des villes d’Alsace et de Brisgau. [retour]

Note 2, page 101 : 4 juillet 1424. Lettre des bourgmestres de Fribourg-en-Brisgau aux villes de Zurich, Lucerne, Soleure et Berne. Ibidem, p. 348-349. [retour]

Note 3, page 101 : Régeste No 19. [retour]

Note 1, page 102 : Régeste No 22. Lettre de Berne à Bâle du 8 juillet 1424, aux Archives de Bâle. Briefe II. No 379. [retour]

Note 2, page 102 : Régeste No 20. [retour]

Note 3, page 102 : Régeste No 21. [retour]

Note 4, page 102 : Marault, cant. de Vignory, arrond. de Chaumont, départ. de la Haute-Marne, ou peut-être Marast dans la Haute-Saône, arr. de Lure, cant. de Villersexel. [retour]

Note 5, page 102 : 8 juillet 1424. Lettre de Walther von Andlo, chevalier, et de Cummann von Bolsenheim, bailli d’Einsisheim, aux bourgmestres de Brisach. « Uff hinacht samstag in der nacht unser gnedigen frauwen von Oesterrich ein abgeschrifft komen ist, darinne vierhundert herren, ritter und knechte und sechshundert reisiger und bogener der vorgenanten unserer gnedigen frauwen, von des herren von Tschalun des Printzen wegen, absagent, und ist derselb brieff versigelt mit des obgenanten Printzen insigel, und ligent vor Befurt und meinent das zu nöten und zu bekümbern. » Schreiber, Urkundenbuch der stadt Freiburg. Band II, p. 352. [retour]

Note 1, page 103 : Lettre des bourgmestres de Bâle à ceux de Fribourg. 8 juillet 1424. Schreiber. Urkundenbuch, p. 350-352. [retour]

Note 2, page 103 : « Also beschriebent wir und manntent die von Strazburg, die richstette in Elsaz und die stette in Brisgow, zu ziehende und zugent wir usz mit gantzer macht uf den obgenanten printzen, uf zinstag vor Keyser Heinrichs tag, anno prescripto, gen Hirsingen. » — Chronikalien der Rathsbücher, 1356-1548, dans Basler-Chroniken. Leipzig. 1890, t. IV, p. 32. [retour]

Note 3, page 103 : « In demme und wir also usz zugent, da brach der Printz von Oreng uff, und zoch abe und hindersich, nacht und tag, wider hein, also zugent die unserm und menglich wider hein, uf keyser Heinrichs tag, anno 1424. » Ibidem. [retour]

Note 4, page 103 : Archives de l’Etat de Bâle-Ville. Briefe, t. II, No 384. [retour]

Note 1, page 104 : Contrairement à l’assertion fournie par l’Art de vérifier les dates, Louis de Chalon Tonnerre dut mourir au plus tard à la fin de 1422. E. Petit. Mort de Louis II de Chalon, comte de Tonnerre, dans Bulletin de la Société des Sciences de l’Yonne, 1er semestre 1893. [retour]

Note 1, page 105 : Sur cet essai de restauration du royaume d’Arles et le rôle qu’y joua la maison de Chalon-Arlay, voir l’ouvrage capital de Paul Fournier. Le royaume d’Arles et de Vienne de 1138-1378. Paris 1891. In-8o. [retour]

Note 1, page 106 : Diplôme impérial du 17 septembre 1288. Archives du Doubs, B. 455. [retour]

Note 2, page 106 : Diplôme impérial du 2 mai 1291. Archives du Doubs. B. 455. [retour]

Note 3, page 106 : Paul Fournier. Le royaume d’Arles, p. 295, note 3. [retour]

Note 1, page 107 : Ibidem, p. 290, note 1. [retour]

Note 2, page 107 : En 1410. Couronné en 1433. [retour]

Note 3, page 107 : Leroux. Nouvelles recherches critiques sur les relations de la France avec l’Allemagne, p. 150-151. L’on a exagéré la portée du traité de Cantorbéry, qui ne parvint pas à faire sortir Sigismond de l’inertie dans laquelle il se tint. [retour]

Note 1, page 108 : Archives du Doubs. B. 455. [retour]

Note 2, page 108 : 1er mars 1420. Mandement de la duchesse de Bourgogne, Marguerite à son conseiller Girard Basan. Voir page 83. [retour]

Note 1, page 109 : Pièces justificatives V. [retour]

Note 2, page 109 : L’original de cette concession ne se retrouve plus aux Archives du Doubs; il a dû disparaître très tôt avec d’autres diplômes compromettants pour Louis de Chalon, mais les archives impériales d’Autriche conservent encore dans des registres la plupart des actes impériaux enregistrés lors de leur envoi. C’est en partie d’après ces registres que M. Altmann a dressé le régeste des diplômes de Sigismond. Nous donnons le texte de la concession du vicariat d’après les archives de Vienne. Pièces justificatives VI. [retour]

Note 1, page 110 : Sur le vicariat d’Edouard III, voir l’ouvrage de M. Deprez. Les préliminaires de la guerre de 100 ans. Bibliothèque des Ecoles d’Athènes et de Rome, fasc. 86, 1902. In-8o. [retour]

Note 2, page 110 : Quatre chevaliers et deux nobles avaient reçu des instructions pour conférer au roi d’Angleterre le titre de vicaire. Deprez, p. 195, note 5. [retour]

Note 3, page 110 : C’est ce seigneur qui fut chargé par l’Empereur de l’investiture de Louis de Chalon. Diplôme du 14 juin 1421. Archives impériales d’Autriche à Vienne. R. R. G., fol. 92. [retour]

Note 1, page 111 : Diplôme du 14 juin 1421 aux archives impériales d’Autriche à Vienne. RRG. fol. 93. Henri Beyer était chargé de faire parvenir à l’Empereur cette somme d’argent. [retour]

Note 2, page 111 : Pièces justificatives VII. [retour]

Note 3, page 111 : Pièces justificatives VIII. Déjà en 1337, l’Empereur en conférant à Edouard III le vicariat lui avait également donné le droit de frapper à son effigie des monnaies d’or et d’argent. Ces monnaies eurent cours et furent fabriquées à Anvers. C’étaient des « escus à l’aigle », au nom de l’Empereur. Deprez. Les Préliminaires de la guerre de 100 ans. p. 195, note 5. Pour Louis de Chalon, cette concession était la confirmation d’une faveur déjà octroyée par Rodolphe de Habsbourg à ses ancêtres. Malgré toutes nos recherches, nous ne sommes pas parvenus à retrouver un exemplaire de cette monnaie impériale frappée à Jougne. [retour]

Note 1, page 112 : Duvernoy et après lui Clerc ont parlé à propos de cette effigie d’un aigle « triparis ». Nous ne saurions donner de signification à cette épithète. Il s’agit là évidemment d’une mauvaise lecture, le diplôme portant ces mots : « aquila imperialis tipario imprimatur ». Paléographiquement, on lit très nettement tipario c’est-à-dire d’après le type de, et non tripario. [retour]

Note 2, page 112 : Voici le commencement d’un arrêt rendu par sa cour, le 10 février 1422, touchant la citation de deux bourgeois de Besançon, Jacques Mouchet et Jean Michel. « Ludovicus de Cabilone, princeps Aurayce, comes Gebennensis ac dominus de Arlato, vicarius generalis per serenissimum principem dominum Sigismundum, Dei clemencia Romanorum regem, serenissimum, augustum, ac Hungarie, Dalmacie, etc. regem, dilectis nostris … ceterisque justiciariis … infra limites nostri vicariatus constitutis ». Arch. du Doubs. B. 422 Parmi les juges d’empire, nous relevons les noms de Jean de Romainmôtier, bailli d’Orbe, d’Antoine d’Arnay, lieutenant du bailli d’Orbe, de Guillaume de Boujailles, châtelain d’Echallens. de Jean Lambertod, damoiseau d’Orbe, etc. [retour]

Note 1, page 113 : Voir plus haut p. 94. [retour]

Note 2, page 113 : Régeste no 12. [retour]

Note 3, page 113 : Pièces justificatives IX. [retour]

Note 4, page 113 : Archives impériales d’Autriche R. R. C. fol. 167. « Sane, licet illustris Philippus, quondam comes Burgundie et Flandrie, princeps et consanguineus noster carissimus, dum ageret in humanis et nunc diem clausit extremum, se pro guardiamo seu tutore civitatis Bisuntine nobis et imperio sacro et nulli alteri immediate subjecte gereret, quanquam nulla privilegia super hujusmodi guardia a sacro Romano imperio demonstraret, ejusdem guardiae pretextu dampnabiliter jura sacri imperii et jurisdictionem imperialem niteretur evacuare, abolere, et, si sibi foret possibile, penitus absorbere … » [retour]

Note 1, page 114 : Peut-être aussi dans la pensée de l’Empereur, cette charte ne devait-elle valoir qu’à la mort du présent duc Philippe. Le texte présente une certaine obscurité à cet égard. D’ailleurs, nous ne possédons plus le texte original. En effet, dans une déclaration du 12 janvier 1438, obtenue par le Duc du prince d’Orange, celui-ci déclare que c’est à son insu que pareille concession a été obtenue et que dès qu’il l’a eue entre les mains, il l’a jetée au feu ! Le texte que nous donnons est tiré des registres de Sigismond aux Archives impériales de Vienne, où la pièce avait été enregistrée avant d’être envoyée. Pièces justificatives X. [retour]

Note 2, page 114 : Engagé en 1421 comme conseiller aux gages annuels de 150 fr. Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté t. II. p. 432, note 1. [retour]

Note 1, page 115 : Lettres du 11 janvier 1423. Presbourg. Archives impériales d’Autriche à Vienne. R. R. G. 1742. [retour]

Note 2, page 115 : Archives impériales d’Autriche. R. R. D. 168 vo. [retour]

Note 1, page 116 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II. p. 400-401. [retour]

Note 2, page 116 : Bazin. La Bourgogne de 1404-1435, p. 128. [retour]

Note 1, page 117 : Orbe, 6 janvier 1425. Lettres de Louis établissant Jacques de Glenne écuyer, comme commissaire au pays de Vaud, aux gages annuels de 20 florins. Archives du Doubs. E. 1231. [retour]

Note 2, page 117 : Lettre en date de Lille du 27 avril 1425, adressée à Guillaume de Boujaille et portée par l’écuyer du prince Pierre du Pin. Archives du Doubs. E. 1231. [retour]

Note 1, page 118 : Lettres impériales du 24 mai 1427 chargeant l’archevêque de Besançon et Louis de Chalon de procéder à une enquête au sujet de l’appel lancé par Jean de Torna, procureur impérial, contre une sentence de Nicolas Czeiselmeister qui enlevait la juridiction de la ville de Valence à son évêque Jean de Poitiers. Archives impériales d’Autriche à Vienne. R. R. H. 144. [retour]

Note 2, page 118 : Leroux. Nouvelles recherches, p. 174-175. [retour]

Note 3, page 118 : Archives du Doubs. E. 1241, 1245. [retour]

Note 4, page 118 : Janvier 1426. Messire Loys de Chalon, prince d’Orange et seigneur d’Arlay avait 240 fr. de pension par mois du duc. Compte de Matthieu Regnault, Bibliothèque nationale. Collect. Bourgogne. 104, fol. 236.

Sur Jacqueline de Bavière et sa vie aventureuse voir le beau volume de Löher. Jakobaea von Bayern und ihre Zeit. Nordlingen 1869, 2 vol. in-8o. Jacqueline était fille de Marguerite de Bourgogne sœur de Jean-sans-Peur, et de Guillaume de Bavière. A la mort de ses parents, son oncle Jean, comte de Hainaut, de Hollande et de Zélande la força d’épouser le duc de Brabant, pensant que cette union serait stérile et dans le but d’hériter de ses beaux domaines. Jacqueline s’enfuit alors en Angleterre où elle trouva un protecteur en la personne de Gloucester qui fit annuler son mariage, l’épousa en 1423 et se prépara à envahir le Hainaut. C’est alors que Philippe-le-Bon lui déclara la guerre. [retour]

Note 1, page 119 : Juin 1426. Gollut. Mémoires historiques de la république séquanaise. éd. Duvernoy, col. 1072. [retour]

Note 2, page 119 : Jacqueline fut abandonnée peu de temps après par Gloucester qui s’était épris d’une de ses suivantes Eléonore Cobham et qu’il épousa; il avait de nouveau obtenu du pape Martin V l’annulation de son premier mariage. [retour]

Note 3, page 119 : Propositions des princes électeurs réunis à Nuremberg du 7 au 10 juin 1426, au sujet des moyens à employer pour poursuivre la guerre contre les Hussites. « Item das unser Herr der König dem Herzogen von Burgundie, von Soffray, von Schalun und den steten von Braband und andern, daz sie der Cristenheit zu stein ouch komen und schicken wollen, schriben und irmauen sol. » Kerler (Dietrich). Deutsche Reichstagsakten unter Kaiser Sigmund, t. II, p. 469. [retour]

Note 1, page 120 : Déjà le 30 janvier 1429, le prince d’Orange avait refusé de recevoir à Jougne un mandement du duc de Bourgogne. Régeste no 26. [retour]

Note 2, page 120 : Clerc, et après lui de Gingins, paraissent avoir ignoré la relation de ce voyage conservé aux Archives du Doubs. Régeste no 27. Ils mentionnent Guy Arménier comme l’exécuteur de l’ordre du Duc tandis que ce fut son bailli d’Aval, Henry Val de Fontevry. [retour]

Note 1, page 121 : Dans un vidimus de 1443. Régeste no 46. [retour]

Note 2, page 121 : Pièces justificatives XXII. [retour]

Note 1, page 124 : En juillet 1419, Antoine Ferrière faisait partie des bandes bourguignonnes qui dévastèrent le Velay, après le départ de Louis de Chalon du Languedoc. Sous les ordres d’un certain Héracle de Rochebaron, il s’empara du château de Pradelles, près du Puy. Ch. Roches. Les Bourguignons en Velay, dans Tablettes historiques du Velay, t. V. (1874-75). [retour]

Note 1, page 125 : Déposition de Pierre Valet, notaire à Colombier. Enquête de 1437. Archives de l’Isère. B. 3802. [retour]

Note 2, page 125 : Il fut tué à la bataille de Verneuil (17 août 1424). [retour]

Note 1, page 126 : « Car les gens du Conseil du Dauphiné le (l’accord) nottifièrent au Roy pour y donner provision, lequel leur manda que attendu les affaires qu’il avoit ils feissent au mieulx qu’ils peussent pour apaiser ledit prince et pour ce, les diz gens du Conseil voyans la dite response et sachans que du Roy ils ne povoient avoir ayde ne secours, car ou temps que ledit accort fut fait et par avant, les ennemis du Roy estoient en grant puissance, laquelle de jour en jour croyssoit, lesqueulx tenaient adoncques le siège devant Montargis, et estoit le royaume, Dieu ainsi le permectant et soffrant, bien au bas et en très petit estat, d’autre part le pais du Daulphiné estoit dépourveu des seigneurs et nobles et autres gens d’armes, car les plus vaillans et notables et en grant compaignie estoient mors tant en la bataille de Verneuil que de Crevans. » Fragment d’un mémoire du parlement de Grenoble sur les droits du prince d’Orange, Bibliothèque de Grenoble no 1423, fol. 388. [retour]

Note 2, page 126 : Maître Claude Marc, notaire à Grenoble, dépose en 1437 « que le prince d’Orange avoit ses officiers pour l’exercice de la juridiction et garde des dictes terres, c’est assavoir juge, chastellain, procureur et autres officiers nécessaires, et en fut messire James de St-Germain juge et messire Raoul de Convens, chastellain pour ledit monsr le prince. » Enquête de 1437. Archives de l’Isère B. 3802. [retour]

Note 1, page 127 : « Les gens du prince prinrent Colombier et Saint-Romain et fortifièrent les dites places de fossés, eschisses et autres habille, mens de guerre, puis corurent par les mandemens des dites places et autres du pays en boutant feuz, pregnent prisonniers, bestes et autres biens de povres subgetz. En plusieurs maysons furent mis feuz et tout le bestial de Viennois fut prins par les gens du prince et gecté hors du Dauphiné ». Mémoires du parlement de Grenoble. [retour]

Note 2, page 127 : Régeste no 23. [retour]

Note 3, page 127 : Imbert de Grolée, seigneur de Viriville en Dauphiné, maréchal de Dauphiné, bailli de Mâcon et sénéchal de Lyon depuis 1418. [retour]

Note 1, page 128 : Régeste no 24. [retour]

Note 2, page 128 : Régeste no 25.
Les lettres d’abolition, qui étaient des lettres patentes émanant de la chancellerie royale écrites sur parchemin, étaient des actes par lesquels le roi « quittait, pardonnait, remettait, effaçait et abolissait » un crime et soustrayait les coupables à la peine qu’ils auraient encourue. A.Giry. Manuel de diplomatique, p. 777. [retour]

Note 1, page 129 : Mémoire du parlement de Grenoble. Bibliothèque de Grenoble, No 1423, fol. 388. [retour]

Note 1, page 130 : Régeste no 29. [retour]

Note 2, page 130 : Régeste no 28. [retour]

Note 1, page 131 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 413-414. [retour]

Note 2, page 131 : « Le 6 octobre 1429, on écrivit aux srs de Planes et à Thibaud le Bâtard qui estoient du côté de Vitry et à Zacharie de Ronchemoux qui estoit du côté de Champagne pour savoir l’état et des nouvelles des ennemis afin que le chancelier, le prince d’Orange et le maréchal de Bourgogne pussent y pourveoir et faire plus sûrement conduire et mener au duc en Flandres, ses coursiers, bagues et joyaulx qu’il demandait pour la célébration de ses noces. » Bibliothèque nationale. Col. de Bourgogne, t. XXI, p. 68 vo. [retour]

Note 1, page 132 : La liste des chevaliers se trouve dans Gollut. Mémoires historiques, éd. Duvernoy, coll. 1085-1126. [retour]

Note 1, page 133 : Pièces justificatives XII. [retour]

Note 2, page 133 : « Pour bénéficier du traité de Troyes, Louis prétendit qu’il avait fait la guerre d’Anthon sur l’ordre du duc de Bourgogne, et pour cela il a produit une lettre du Duc datée du 5 avril, de Péronne ». Mémoire du parlement de Grenoble. Pour nous, la complicité du duc de Bourgogne ne fait aucun doute. Le 18 avril 1430, Louis écrivait à Antoine Ferrière : « Nous avons eu lectres de Monseigneur de Bourgoigne, lesquelles contiennent en effait qu’il veult que nous faisions guerre aut Daulphiné le plus fort que nous porrons ». En même temps, Philippe lui envoyait plusieurs de ses vassaux de Bourgogne. Chevalier. Choix de documents historiques sur le Dauphiné, p. 313. [retour]

Note 1, page 134 : Pour tout ce qui suit, nous avons puisé dans l’intéressante relation de la guerre d’Anthon, écrite peu de jours après les événements, qui se trouve aux Archives de l’Isère. B. 3139. M. Ulysse Chevalier a publié in extenso cette relation dans son Choix de documents historiques inédits sur le Dauphiné, p. 300-338. Nous l’avons complétée par les documents, lettres et enquêtes des Arch. de l’Isère, B. 3380 et 3802 et par la chronique d’Aymar du Rivail, De Allobrogis libris novem, édit. Alf. de Terrebasse, p. 512 et suiv. [retour]

Note 2, page 134 : Régeste no 30. Le Prince envoya son châtelain de Grandson enrôler des arbalétriers à Fribourg et son châtelain de Jougne, Yvonet Fellin, lever une imposition de cent livres sur sa lettre d’Echallens pour payer ses gens d’armes. Archives du Doubs. E. 1232, 1245. [retour]

Note 1, page 135 : Lettre de Louis du 18 avril 1430. Chevalier, op. cit. p. 314. [retour]

Note 2, page 135 : Guichenon. Histoire de Savoie, t. II, p. 43. [retour]

Note 1, page 136 : « Et fut ainsi que le duc Amé de Savoye et ledit Prince avoient conclu vouloir avoir ledit pays de Viennois et ledit duc le pays de Grenoble et les Montagnes. Et lui baillait ledit duc 300 lances dont avoient la conduite de par luy le sire de Varembon et messire Imbert Mareschal ». Chronique de Berry, éd. Godefroy, Histoire de Charles VII. Paris 1661, p. 380. [retour]

Note 2, page 136 : Chevalier, p. 316. [retour]

Note 3, page 136 : Le 24 avril, il écrivait à Ferrière : « Quant de nostre costé, nous serons tout prest, passé jeudi qui vien ». Le 3 mai : « Très chier et bien amé, au XIIIIe jour de ce mois de may nous aurons de gens grant foison, car nous en mandons de plusieurs costez si avons nouvelles qu’il nous en vient assés. » Chevalier, p. 314. [retour]

Note 1, page 137 : Voir la biographie de Rodrigue de Villandrando par Quichefat. Nous y avons puisé plusieurs renseignements précieux. [retour]

Note 1, page 138 : Chevalier, p. 319. [retour]

Note 2, page 138 : « Quodie crastina sabbati, gentes in dicta turri se dicto gubernatori reddiderunt. Dictus gubernator aliquos Sabaudienses remisit et alios ad partes Burgundie transmisit suis gipponis vestitos, cum baculo, sine tamen spera et capucio, incedentes. » Chevalier, p. 319. [retour]

Note 1, page 140 : Pièces justificatives XIII. [retour]

Note 2, page 140 : Régeste no 31. [retour]

Note 1, page 141 : « In memoriam rebellionis et dampnate dicti d. Ludovici impreysie ». Chevalier, p. 319. [retour]

Note 2, page 141 : « Après ledit traictié, quant ledit prince entra à grant puissance dedans Anthon, il se faisait appeler daulphin de Viennois et en son propre nom, cuydant avoir gaigné tout le pais du Daulphiné, il donnoit et destribuoit à ses gens les seigneuries et offices dudit pais. » Mémoire du parlement de Grenoble. Bibliothèque de Grenoble. No 1423, fol. 388. [retour]

Note 1, page 142 : Chevalier, op. cit., p. 324. [retour]

Note 2, page 142 : « Et in exercitu dicti d. Ludovici erant septingenti vel circa tam milites quam scutifferi, associati suis grossis famulis bene annatis, sicut statim cujuslibet militis et nobilis congruebat, ultra balisterios, sagitarios et alios pedites grossos maleos plumbeos defferentes, de quibus adduci dictus d. Ludovicus de partibus suis Burgundie septem mulos oneratos fecerat, sicut deposuerunt certi preysonerii presertim Heraclius Ferrerie, nepos dicti Anthoni capitanei Anthonis, qui dictos mulos et maleos exonerari vidit et jussit. » En marge, le rédacteur de la relation a donné le croquis de ces maillets, sortes de marteaux à longs manches et à deux têtes. Chevalier, p. 330. [retour]

Note 1, page 143 : Par Rodrigue qui avait pris les devants. [retour]

Note 2, page 143 : Quicherat. Rodrigue de Villandrando, p. 46. [retour]

Note 1, page 145 : Quicherat, p. 47-48. [retour]

Note 2, page 145 : « Le prince d’Orange estant de ce adverty se mist sur les champs, délibéré de combatre iceulx françois, à tout bonne bende; touteffois il fut rué jus et y furent mors sur la place environ de deux ou trois cens Bourguignons … En la dicte deffence ledit Rodrigue de Villandras exploicta merveilleusement bien sans y oublier son prouffit. » Chronique martinienne, édit. gothique d’Ant. Vérard, fol. 276-277. [retour]

Note 1, page 146 : « Quant vint à la bataille où il fut honteusement défait, comme rayson estoit, il n’y avait bannières, estandart, penon ne penonceaulx aux armes ne à l’enseigne de monseigneur de Bourgoigne mais estoient les bannières, etc., qui se pourtaient par ses gens desployées et destonnés à grant pompe à ses armes, devise et enseigne, lesquelles demorarent en la dicte bataille. » Mémoire du parlement de Grenoble. Bibl. de Grenoble, No 1423. [retour]

Note 2, page 146 : « Et ipse d. Ludovicus vituperose cum sui magni et potentis destrerii, quam equitabat adjutorio, infra castrum Anthonis veloci cursu se ut melius potuit reduxit, arnesiis suis et destrerio ex sanguine et vulneribus sibi illatio rutillante in colorem rubeum transmutatis, sic quod vix cognosci praeter per suum destrerium poterat. » Chevalier, p. 329. [retour]

Note 1, page 148 : Archives du Doubs. E. 1233. [retour]

Note 2, page 148 : 12 juin 1430. A Jehan de Chanceaulx, sergent de monsr le duc demorant à Chalon la somme de dix huit gros pour porter hastivement lettres de par le lieutenant du bailli à Jehan Belier de Bourg en Bresse pour savoir la certainté … » Archives de la Côte d’Or. B. 3653, fol. LI. [retour]

Note 3, page 148 : Canat de Chizy. Documents inédits sur l’histoire de Bourgogne. [retour]

Note 1, page 149 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 417. [retour]

Note 2, page 149 : Chronique d’Antonio Morosini, édit. Lefèvre-Pontalis et Dorez. Société de l’histoire de France. Paris 1898-1901, t. III, p. 284-293. [retour]

Note 3, page 149 : Chevalier, p. 333. [retour]

Note 1, page 150 : Ibidem, p. 334. [retour]

Note 2, page 150 : « Et ut adimplerentur verba per dictum d. Ludovicum tam in apperto quam secrete spiritu, ut creditur, malo probat a, qui semper dixerat quod quando ipse perderet castrum Anthonis, ipse perderet principatum Aurayce … » Chevalier, p. 334. [retour]

Note 1, page 151 : La Pise. Tableau de l’histoire des princes et principauté d’Orange, p. 122-123. [retour]

Note 2, page 151 : Capitulation de la ville. Archives d’Orange. Délibérations B. B. 4, fol. 159-168. [retour]

Note 3, page 151 : Le 22 juin (1430) la princesse ordonnait de Nozeroy à Pierre de Jougne de rechercher le voleur à Lausanne et de l’amener prisonnier à Nozeroy. Archives du Doubs. A la même époque, le châtelain de Grandson, Richard Ferlin, recherchait à Fribourg un « pot d’argent de Monseigneur ». Archives du Doubs. E. 1245. Le 2 février 1431, Pierre de Jougne reçut un rapport de gens de Bavois qu’il se trouvait dans ce village un homme qui avait volé des lettres et des joyaux d’or et d’argent du prince d’Orange. Le voleur lui échappa. Archives du Doubs. E. 1232. [retour]

Note 1, page 152 : Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 417. [retour]

Note 2, page 152 : Archives du Doubs. E. 1232. Pourtant, il dédommagea d’un don d’une livre, Antoine de la Fléchère, d’Echallens pour les pertes subies à Anthon. Idem. [retour]

Note 1, page 153 : Régeste No 38. [retour]

Note 2, page 153 : Mandement du duc de Bourgogne à son bailli d’Aval, lui ordonnant de faire restituer aux suppliants de Vaux-et-Chantegrue leurs onze juments saisies par le prince d’Orange et ne tenant pas compte de l’appel émis par Nicolas Magin, chapelain, et Benoist Blandin,procureur du prince d’Orange à Nozeroy. Dijon, 6 juillet 1431. Mandement de Henri Valée, bailli d’Aval à ses sergents touchant la dite restitution. 7 août 1431. Archives cant. vaudoises, C. I. d. 18 et 19. [retour]

Note 3, page 153 : Lettre de Jean Estienne, sergent, au duc de Bourgogne, l’informant qu’il s’est rendu à Nozeroy, pour faire restituer les juments volées, mais que Huet Conart, procureur du Prince, s’est opposé à l’exécution du mandement du Duc, en en appelant au parlement de Dôle. Pontarlier, 3 février 1432. Archives cantonales vaudoises, cote ci-dessus. [retour]

Note 1, page 154 : Le 26 août 1430. Archives municipales d’Orange. Délibérations B. B. 4, fol. 162ro. [retour]

Note 2, page 154 : Régeste No 32. [retour]

Note 1, page 156 : Mandements de Louis datés de la Rivière, 6 juillet et de Vuillafans, 17 juillet 1430. Archives du Doubs. E. 1253 et 1232. [retour]

Note 2, page 156 : « A Mathé Gevray et Antoine de Villecourt, écuyer et Girardin de St-Ylaires la somme de sept frans, c’est assavoir aux dis escuiers VI pour leurs voiages d’avoir été par trois fois de Chalon à Clugny, Mazilles et là environ pour avoir chevauché les ennemis de monsr qui nouvellement ont prins les villes et chasteaulx de Mazilles et aultres forteresses près d’Ollee, pour savoir et encquérir de leur estat et commune, et pour le tout avoir rapporté à messire le prince d’Oranges et Maréchal de Bourgogne, tant ez lieux de Beaunes, Chalon comme du Bourgneuf près Germoles, afin de mettre en tout provision comme il appartiendra. » Canat. Documents inédits, t. I, p. 304. [retour]

Note 1, page 157 : Quicherat. Rodrigue de Villandrando, p. 59. [retour]

Note 2, page 157 : La délégation quitta Mâcon le 14 septembre. Journal de Jean Denis, bourgeois de Mâcon. Canat, op. cit., p. 200. [retour]

Note 1, page 158 : Canat, op. cit., p. 202. [retour]

Note 2, page 158 : Lecoy de la Marche. Le roi René, t. I, p. 78. [retour]

Note 3, page 158 : Archives de la Côte d’Or. B. 1647. Fol. 63 vo et 127. [retour]

Note 1, page 159 : La réputation de l’artillerie du prince d’Orange était ancienne; les ducs de Bourgogne l’appréciaient. Le fragment de compte suivant en témoigne : « A Jehan Carondelet, conseiller de monsr le duc, la somme de vingt-cinq francs qui deuz lui estoient pour les fraiz du charroy d’une bombarde qui fut prinse par emprunt de feu messire Jehan de Chalon, jadis sr d’Arlay et prince d’Orenge, laquelle fut menée en l’an CCCC XIII dès la ville et cité de Besançon devant Rougemont ou bailliage d’Auxerrois, au siège que lors y avait fait mettre feu monsr le duc Jehan, cui Dieu pardoint, à l’encontre de ses adversaires et aussi pour les fraiz d’avoir fait depuis naguères mener icelle bombarde dès la ville de Chalon où elle avoit esté remenée jusques en la ville de Cuseau pour icelle rendre à messire Loys de Chalon, prince d’Orenge, comprins en ce X frs pour l’achat d’un char neuf. » Archives de la Côte d’Or, B. 1647, fol. 1131. [retour]

Note 1, page 160 : Régeste No 33. [retour]

Note 2, page 160 : Archives de la Côte d’Or. B. 1647, fol. 89. [retour]

Note 1, page 161 : Bazin. La Bourgogne de 1404-1435, p. 165. [retour]

Note 2, page 161 : Régeste No 34. [retour]

Note 3, page 161 : Dondaine. Sorte de machine à lancer des pierres ou des traits. [retour]

Note 4, page 161 : Panais. Sorte de bouclier. [retour]

Note 1, page 162 : « A Phibert d’Estousi et à Jehan le Verissey demourans à Chalon pour leur char à neuf chevaulx, et à trois personnes qui sont douze bouches, pour six jours, commençans le Xe jour dudit mois d’avril, qu’ilz ont vacqué à avoir mené une bombarde du prince d’Orenge de Chalon à Semur en l’Auxerrois, en entencion de la mener ou voiaige et armée dudit Aucerre, devant aucunes forteresses tenant le party des ennemis … A Estienne Pillot, de St-Marceau et à Ranillot Labourans voicturiers, demourans à Chalon pour ung char à six chevaulx qui ont mené dudit Chalon à Semur VI pierres appartenans à la dite bombarde, deux caques de pouldre et autre artillerie. » Archives de la Côte d’Or. B. 1647. fol. 123. [retour]

Note 2, page 162 : Le 29 mars 1431, le parlement de Dôle condamnait Louis pour une cause que nous ignorons, à payer au Duc quatre mille livres estevenantes. Archives du Doubs. B. 36. [retour]

Note 3, page 162 : Régeste No 35. [retour]

Note 1, page 163 : Lecoy de la Marche. Le roi René, t. I, p. 81 et suiv. [retour]

Note 2, page 163 : 14 mai 1431. Réponse donnée de par le roy (conseil d’Angleterre à Rouen) aux articles baillées par escript de par monseigneur le duc de Bourgoingne, par messire Philibert Andrenet, chevalier, et Jehan Abonnel, dit le Gros, ses conseillers … « Au douziesme article faisant mencion de monseigneur le prince Dorenges, le roy a ordonné de faire communiquer avec les gens de mondit seigneur le prince qui sont à Rouen et de y faire tel appointement qui bonnement sera possible. » Stevenson. Letters and papers illustrative of the war of the english in France during the reign of Henry the Sixth. London, 1864, vol. II, p. 192. [retour]

Note 1, page 164 : Régeste No 36. [retour]

Note 2, page 164 : Régeste No 37. [retour]

Note 1, page 165 : Bazin. La Bourgogne de 1404-1435. p.175. [retour]

Note 1, page 167 : Voir les dépositions de nombreux témoins. Pièces justificatives XV. [retour]

Note 2, page 167 : Déposition de Nicolet Odenin, bourgeois de Louhans. Archives du Doubs. B. 459. [retour]

Note 3, page 167 : Pièces justificatives XIV. [retour]

Note 1, page 168 : Pierre David, voiturier de St-Monceaulx, dépose : « que le prince d’Orenges a par ses gens et officiers tellement opprimez, vexez et travailliez par arrestz et empêchement lesdits voicturiers qu’ilz ont laissié ledit chemin, qu’il est le droit chemin, et sont aler passer par Savoye et pour ce que ledit chemin leur estoit trop long et en temps d’iver malaisie pour leurs bestes, ils ont fait un accord avec le prince … dit en oultre que ledit monsr le prince a dit à lui qui parle et à plusieurs autres voicturiers qu’il tenoit ledit peaige de l’empereur et que s’ilz mènent les denrées et marchandises qu’ils voicturent par le pais de Savoye qu’il ne leur demandera rien, mais s’ilz les mènent et voicturent par le pays de Bourgogne qu’il les fera prendre. » Archives du Doubs. B. 459. [retour]

Note 2, page 168 : Pièces justificatives XVII. [retour]

Note 1, page 169 : « Coués » (caudati), ainsi appelait-on les Anglais sur le continent en souvenir de la légende de St-Augustin de Cantorbéry qui, insulté par les habitants de Dorchester, les avait fait condamner par le ciel à porter une queue. [retour]

Note 2, page 169 : Pièces justificatives XVI. [retour]

Note 1, page 170 : Pièces justificatives XVIII. [retour]

Note 2, page 170 : Bazin. La Bourgogne de 1404-1435, p. 177. [retour]

Note 1, page 171 : Voir sa lettre du 19 mars 1432 à l’un de ses châtelains, où il lui enjoint de lui faire envoyer immédiatement les sommes d’argent demandées. Régeste No 39. [retour]

Note 2, page 171 : Bazin, op. cit., p. 180. [retour]

Note 3, page 171 : Canat. Documents inédits, p. 326. [retour]

Note 4, page 171 : Voir le texte complet de ces instructions. Bibliothèque nationale, Coll. Bourgogne, vol. 95, fol. 732-735. [retour]

Note 1, page 172 : Bazin, op. cit., p. 183. [retour]

Note 1, page 173 : Pièces justificatives XIX. Ce traité est cité et mentionné par Du Tillet : Recueil contenans les guerres et traictez de paix, trefves et alliances d’entre les Roys de France et d’Angleterre. Paris 1588, p. 139, ainsi que dans l’Histoire d’Orange de la Pise. [retour]

Note 1, page 174 : Archives de l’Isère. 3806. [retour]

Note 2, page 174 : Régeste No 40. [retour]

Note 1, page 175 : Archives du Doubs E. 1232. [retour]

Note 2, page 175 : Lecoy de la Marche. Le roi René, t. I, p. 106. [retour]

Note 3, page 175 : Il s’y trouvait le 26 mars. Archives du Doubs. E. 1233. [retour]

Note 4, page 175 : Bazin. La Bourgogne de 1404-1435, p. 198 et suiv. [retour]

Note 1, page 176 : Canat. Documents inédits, t. I, p. 347, note 2. [retour]

Note 1, page 177 : Le 26 août, Vaulchier de Sirod écrivait à Richard Ferlin : « Or est ensin que aujourduy j’ay receu lettres de monseigneur contenant qu’il espère et fait doubte qu’elle (la duchesse) ne soit à Noseroy deans 8 jours. » Archives du Doubs. E. 1246. [retour]

Note 2, page 177 : Nozeroy, 9 novembre 1434. Attestation par Henri de Doubs et Vauchier de Sirod, que Richard Ferlin a envoyé à Nozeroy « siex grans beches (brochets) quatorze troites et sept grosses anguilles pour la venue de Madame la duchesse de Bourgogne qui fut à Nozeroy le 18e jour d’octobre et y demorat jusques le mercredi après boire. » Archives du Doubs. E. 1246. [retour]

Note 1, page 178 : Bazin, op. cit., p. 206. [retour]

Note 2, page 178 : Régeste No 41. [retour]

Note 3, page 178 : Il séjourna à Grandson du 7 au 9 mars. Archives du Doubs » E. 1246. [retour]

Note 1, page 179 : Chronique de Perceval de Cagny, éd. Moranvillé. Soc. Hist. de France 1902, p. 201. [retour]

Note 1, page 180 : Bibliothèque nationale. Nouv. acq. fr. 8706, fol. 33. Dunod. Histoire de l’église de Besançon, t. I, p. 245 et Preuves p. LXIV. [retour]

Note 1, page 183 : Voir sur la conduite des Ecorcheurs en Bourgogne pendant ces années, Fréminville (J. de), Les Ecorcheurs en Bourgogne (1435-1445). Mémoire de l’Académie des Sciences de Dijon, t. X. [retour]

Note 1, page 185 : Déposition de Pierre du Pin, de Lons-le-Saunier, écuyer : « Dit qu’il y a environ XL ans qu’il fut presens au lieu de Nozeroy, ès nopces de la dite dame et de messire Guillaume de Vienne, ès quelles nopces il vit feu messire Jehan de Chalon, lequel y fit haulte et plantureuse feste et y fraya grandement à grans sommes de deniers qu’il ne saroit extimer; dit en oultre que la dite dame fut vestue le jour de ses nopces de draps de soye mais il ne seroit déposer de quelle valeur ni de quel prix ses habillemens estoient, car pour lors il estoit bien jeune et n’y avoit pas grant connaissance. » Enq. de 1451. Arch. du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 2, page 185 : Déposition de Damoiselle Loyse de St-Georges. Enq. de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 1, page 186 : « Auquel lieu le dit sr deff. receut la dite dame sa sœur et tous ceulx de sa compaignie très joyeusement et là firent bonne chère. » Ibidem. [retour]

Note 2, page 186 : Gauthier de Fallerans, seigneur de Frontenay, dit : « qu’il est bien souvenant quant la dite dame vint et fut amenée en l’ostel dudit sr deff. au lieu de Noseroy laquelle y vint bien povrement habillée selon son estât et depuis qu’elle fut avec ledit sr deff. icellui la fit habillyer bien et honorablement selon le lieu dont elle est partie et lui administroit et faisoit administrer son vivre et toutes ses nécessitez à ses denier et missions et l’amoit chièrement comme sa sœur, ainsi que ledit depposant l’a veu et sceu durant le temps qu’elle a demorer avec ledit sr deff. duquel ledit depposant estoit pour lors et encour est serviteur domestique, sans ce qu’il vit oncques que ledit sr deff. feist aucune rigueur ou n’ust aucune depplaisance ou malveillance contre la dite dame » Enq. de 1451. [retour]

Note 1, page 187 : Ce procès se plaidait encore en 1451. [retour]

Note 2, page 187 : « Elle ne povoit riens avoir pour soy aidier en ses nécessitez que icelly sr ne ly devoit pas tenir ses termes, car elle avoit assez apporté du sien en l’ostal de céans, en deniers contens, vint mil frans, plusieurs bagues et joyaulx, mesmement grands quantitez de perles. » Déposit. de Catherine de Vuillafans, suivante de Jeanne. Archives du Doubs. E. 1350. Enquête de 1451. [retour]

Note 1, page 188 : Gingins (de). Recherches historiques sur les acquisitions des sires de Montfaucon, p. 212. [retour]

Note 2, page 188 : Nozeroy 14 mai 1427. Mandement de la princesse d’Orange à Pierre de Jougne, châtelain d’Orbe, de délivrer un muid de froment à frère Aubin qui est chargé des ouvrages à faire au monastère d’Orbe. Archives du Doubs. E. 1241. [retour]

Note 3, page 188 : Gingins (de). Histoire de la ville d’Orbe et de son château. Paris, Lausanne. 1855. In-8o, p. 70. [retour]

Note 1, page 189 : 13 septembre 1444. Reçu d’un muid de vin par : « Sœurs Maulx, cordelire et abasie des seurs cordelire de l’églisse de Ste-Claire d’Orbe ». Archives du Doubs. E. 1242. Cf. F. Barbey, Orbe sous les sires de Montfaucon et de Chalon. Revue historique vaudoise 1911, p. 372. [retour]

Note 2, page 189 : Pièces justificatives XX. [retour]

Note 3, page 189 : Régeste No 42. [retour]

Note 1, page 190 : Dijon, 6 août 1436. Catalogue des manuscrits de la bibliothèque de Carpentras, t. III, p. 252. [retour]

Note 2, page 190 : En 1447, Louis, attendant son remboursement, envoya l’un de ses conseillers à René d’Anjou, le 28 avril. Ibidem. [retour]

Note 3, page 190 : Régeste No 43. [retour]

Note 4, page 190 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 449. [retour]

Note 1, page 191 : « Dit oultre que fut avec ledit sr à Troyes en Champagne, quant il ala devers monsr le connestable de France, traictier le mariaige de monsr le prince présent et de madame la princesse. Et fut présent quand ilz parlèrent ensemble dudit mariaige et entre aultres choses mondit sr le connestable queroit fort sçavoir de combien icelli sr façoit bon mondit sr le prince son filz car aultrement il ne vouloit point entendre ne besoigner audit mariaige. Et oyt et veit que feu ledit sr deit qu’il façoit bon son filz des principaultez d’Orenges et seignorie d’Arlay; ne ly oyt point dire, sur ce requis, qu’il fit bon les dites principaultez et seignorie de vingt mille frans. Bien oyt que les Bretons estans en la compaignie de mondit sr le connestable disoient entre eulx que c’estoit grant fait de vint mille frans de rente et sembloit qu’ilz s’en merveillassent et que l’on devoit besoigner audit mariaige. » Déposition de Philippe d’Arlay. Enquête de 1466. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 2, page 191 : Celui-ci est daté de Troyes, du 22 juin 1437. Le connétable de Richemont promettait à sa nièce « forteresse ou chateau, bonne et convenable », et mille livres de rente annuelle ou 100 000 livres en principal, lesquelles 100 000 livres et forteresses seront situés au royaume de France, deçà la rivière de Seine au plus près des païs de Bourgogne et au païs de Dauphiné, Viennois, et non ailleurs et qu’il lui doit délivrer dans le jour de fête Nativité Nostredit Seigneur 1438. Louis donnait à son fils la principauté d’Orange et la seigneurie d’Arlay. Archives du Doubs. E. 1437. [retour]

Note 3, page 191 : Nozeroy, 2 février 1438. Mandement du prince aux gens de ses comptes de bailler à Richard Ferlin, 14 livres, 16 solz lausannois pour 20 bechets et 8 anguilles qu’il a envoyez « tant pour les ambassadeurs du duc de Britaigne, qu’ilz ont estez en nostre hostel comme pour les noces de Pierre de Vaudrez ». Archives du Doubs. E. 1246. [retour]

Note 1, page 192 : 1er octobre 1438. Mandement à Richard Ferlin de lui envoyer un cheval chargé de jolerie pour la venue de sa fille. Archives du Doubs. E. 1247. « Pour la venue de Madame d’Arguel, IIIIxx et XI chapons. Pour la despense de deux hommes qui ont mener les dites polliales (poulailles) à Noseroit VI s. Compte de Richard Ferlins; Archives du Doubs. E. 1246.
Jolerie. Poissonnaille, fretin, alevin. En languedocien, jol signifie : Petit poisson. Jean Humbert. Nouveau glossaire genevois. Genève, 1852, t. II, p. 7. [retour]

Note 2, page 192 : Régeste No 44. [retour]

Note 1, page 194 : En 1435 déjà le 31 juillet, le prince d’Orange était mandé auprès du gouverneur de Bourgogne à Dijon : « pour venir et estre devers lui pour avoir advis avec eulx à la garde et deffense du pais de Bourgogne » et pour envoyer tous leurs gens à Is-sur-Tille. Canat. Documents inédits, t. I, p. 369. [retour]

Note 2, page 194 : De Fréminville. Les Ecorcheurs, p. 136. [retour]

Note 3, page 194 : Canat. Documents inédits, p. 417. [retour]

Note 4, page 194 : Canat., p. 420. [retour]

Note 1, page 195 : Voir plus haut page 121. [retour]

Note 2, page 195 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 460. [retour]

Note 1, page 196 : Régeste No 45. [retour]

Note 2, page 196 : Mémoires d’Olivier de la Marche, t. I, p. 282. [retour]

Note 1, page 197 : Canat. Documents inédits, t. I, p. 435-436. [retour]

Note 1, page 198 : A. Tuetey. Les Ecorcheurs sous Charles VII, t. I, p. 351. [retour]

Note 2, page 198 : Archives du Doubs. E. 1234. [retour]

Note 1, page 199 : Régeste No 47. [retour]

Note 2, page 199 : Nous en donnons ci-contre un dessin d’après un croquis fait au XVIIIe s. Bibliothèque nationale. Pièces originales 651 fr. 27135 pièce 202. [retour]

Note 3, page 199 : « Le mausolée de Jeanne de Montbéliard fut jeté en 1793 dans le gouffre où la demeure de Mr le subdélégué Désiré Deleschaux avait disparu le 21 septembre 1792. Annuaire du Jura pour 1843, p. 179. [retour]

Note 1, page 200 : Echallens, 26 octobre 1445. « Nous avons veu comme le pan du mur de nostre chastel dudit Escharlain du cousté de la tourt Ronde … est cheu et a abatu une partie de la dite tourt. Faictes incontinent relever l’engin qu’est rompu. » Archives du Doubs. E. 1234. [retour]

Note 1, page 201 : Amédée VIII était le fils du premier mariage de Bonne de Berry et Jean IV d’Armagnac, fils de son second mariage. Etant frères utérins, Eléonore était nièce du premier. [retour]

Note 2, page 201 : Archives du Doubs. E. 1322. [retour]

Note 3, page 201 : Le contrat de mariage est daté du 4 mai 1446. Samaran (Charles), La maison d’Armagnac au XVe siècle, p. 343. [retour]

Note 4, page 201 : Pièces justificatives XXIII. Nozeroy, 13 mai 1446. Mandement à Pierre Jeanneret, receveur de Grandson, de préparer des volailles, « car nous avons entencion de faire nos nopces au 1er jour de juillet. » Archives du Doubs. E. 1247.
Nozeroy, 9 août 1446. Mandement à ses receveurs de payer les frais de ses écuyers Jean de Noveselle et Jean de la Verrière, qu’il envoie dans ses châtellenies, « pour y chaissier ès perdrix aux chiens couchans pour nos nopces ». Archives du Doubs. E. 1247.
Nozeroy, 23 septembre. Mandement au même de procurer à Jean de la Verrière un cheval et gens de pied pour amener des perdrix et des cailles à Nozeroy. Ibidem. [retour]

Note 1, page 202 : Nozeroy, 8 septembre 1446. Mandement au même de faire amener à Nozeroy, 200 poussins et 100 chapons « que nous avons ordonné de faire provision pour nos nopces, car nous ferons nos dites nopces, Dieu devant, le XXVIe jour de ce dit present mois ». Arch. du Doubs. E 1247. [retour]

Note 2, page 202 : Nozeroy, 18 sept. 1446. Mandement à Pierre Jeanneret de lui envoyer 6 grosses anguilles et 6 grosses truites et de lui garder le reste à Grandson, à moins que Bernard de Gères, son maître d’hôtel n’en réclame pour le duc de Savoie. « Et y faites tellement que mondit sr de Savoye soit bien porveu et forniz de bon poisson, du meilleur que vous povez finer, quoi qu’il couste ». Archives du Doubs. E. 1247.
A délivré pour la despanse de Monseigneur le duc de Savoye, de Madame la duchesse, à retour des nopces de mondit sr le Prince, faite Orbe le dite dépense, pour ung giète (gîte) et une digné ( un dîner) XVI livres, XV sols, IIII deniers ». Compte du receveur d’Orbe, Pierre Michel. Archives du Doubs. E. 1243. [retour]

Note 3, page 202 : Nozeroy, 25 septembre 1446. Mandement au même de faire mener à Jougne quatorze grosses anguilles, douze grands « lux » et douze grandes truites, un cheval chargé de jolerie (petit poisson) et les fromages qu’il a, et que le tout « soit mercredi dedans vespres, sans y faire faulte … car c’est monsr. de Savoye et pour madame de Savoye, pour leur retour ». Archives du Doubs. E. 1247. [retour]

Note 1, page 203 : Pièces justificatives XXIV. [retour]

Note 2, page 203 : Archives du Doubs. E. 1349. Procuration donnée à cet effet à Gauthier de Fallerans, gouverneur d’Orange, le 9 février 1448. Archives de l’Isère. B. 3803. [retour]

Note 3, page 203 : Régeste No 48, 49, 50 et 51. [retour]

Note 4, page 203 : « Dit qu’il a oyt dire publiquement et notoirement que monseigneur d’Arguel faisoit beaucolpt de choses et besoingnes sans le vouloir et consentement de mondit sr le prince son père, desquelles icellui mondit sr estoit très mal content et disoit que ledit sr d’Arguel s’en repentiroit ». Déposit. de Jean de Nozeroy. Enq. de 1451. Archives du Doubs. Fonds Chalon. Supplément. [retour]

Note 1, page 204 : 8 novembre 1450. Archives du Doubs. E. 1243. [retour]

Note 1, page 205 : « Et advint de Guillaume de Chalon, seigneur d’Arguel … et leva plusieurs gens d’armes bourguignons et aultres, où qu’il en peust finer, à grans coustz, fraiz et missions; car le duc Philippe avait longuement esté sans guerre ou division et n’estoient les nobles hommes nullement pourveuz de chevaulx ne d’armures. Si leur falloit donner et cousta au sr d’Arguel ung grand avoir, laquelle chose son père, le prince d’Orange, ne print pas bien en grée, et quant le sr d’Arguel vendoit aucune chose ou aucune des seigneuries qui luy venoient de la succession de sa mère, le prince les rachetoit au nom de l’ung ou de deux fils qu’il avoit du second mariage et de la fille d’Armignac, et dont mortelle rumeur et un tel discord s’esmeut entre le père et le filz, que le père fist depuis plusieurs traictez au préjudice du sr d’Arguel ». O. de la Marche. II, p. 171. [retour]

Note 2, page 205 : Vienne, le 21 mai 1451. Archives du Doubs. E. 1243. Bruxelles, 27 mai 1451. Philippe duc de Bourgogne, à la requête de Louis de Chalon, lui donne pouvoir de prendre possession de la terre d’Orbe, qu’il avait acquise du duc de Savoie, à condition que le fils de Guillaume de Chalon, par son tuteur, pourra, dans le terme de 20 ans, la racheter du prince d’Orange. Archives du Doubs. E. 1243. [retour]

Note 3, page 205 : Clerc. Ouvr. cité, t. II, p. 488. [retour]

Note 1, page 206 : « Bien est vray qu’il a relevé les deniers de deux frans par feu » sur ses hommes imposez pour le voiaige de Turquie. Le scet car il les a veu relever audit Saint Agne (Saint-Anne) de Montmahou et croit qu’il a ainsi fait aux aultres lieux. » Déposit. de Pierre d’Esternol. Enq. de 1466. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 1, page 207 : Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 505. [retour]

Note 2, page 207 : Mandement de Pierre de Vuillafans, receveur de Montagny, de préparer pour le 23 mai prochain, pour la venue du duc de Bourgogne, trente chapons qu’il engraissera et nourrira. Nozeroy, 23 avril 1454. Archives du Doubs. E. 1253. [retour]

Note 1, page 208 : Olivier de la Marche, t. II, p. 399. Extrait d’une lettre de J. Meurin, clerc de Jean Schoonhoven, secrétaire du duc de Bourgogne. Longingen (Lavingen), 6 juin 1454. « Et ne partirons que jusques après les jours de la Penthecouste, comme l’on dit, et quant partirons, nous devons tirer à Stotkart, qui est audit comte de Witemberg et le veult mondit sr aller veoir, en tenant ce qu’il lui promist à son parlement dudit Ulme; et de là à Neufchastel et dudit Neufchastel à Noseroy vers Monseigneur le prince (d’Orange) et d’illec au plaisir Noster-Seigneur à Dijon, vers vous; et ainsi que je perçois que nous cheminons, il sera prez la fin de ce mois avant que nous soyons en Bourgogne. » Chronique de Matthieu d’Ecouchy, éd. de Beaucourt, t. III, p. 466. « Et apprez tous ces festoiemens fut conduit jusques à Bâle et d’ilec jusques a ce qu’il entra en ses pays de Bourgoigne et qu’il fut en seurté, ès quelz pays le festoièrent le prince d’Orenge, le comte de Fribourg et plusieurs autres grans seigneurs, aussy les bourgeois et communaultez de ses bonnes villes où il passoit. » Ibidem, t. II, p. 259. — « Pour garder trente chappons que ceulx de Grandson et de la terre ont donnez à Monditseigneur pour le retort des Alamagnes de Monseigneur de Bourgogne et pour sa despense faite en l’ostel de Monditsr à Noseroy, lesquels chappons le dit receveur a gardé au chastel de Granson dort le XXIIII jour de may jusqu’au XIX jour de juillet ensuegant … VIII coupes froment ». Compte de Pierre Jeanneret, receveur de Grandson, 1454. Archives du Doubs, E. 1247. [retour]

Note 2, page 208 : Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 499. [retour]

Note 1, page 209 : « Et une fois ledit feu sr emmena luy deposant et son barbier nommé Jehan d’Artois en la dite cave prendre oudit petit escring ung sac où il avoit six mille escuds lesquelx il presta à mondit sr le duc avec grant quantité de vaisselle qu’il avoit et estoit de temps du siège de l’Entorches, vers Mâcon que les Englois tenoient, sont plus de quarante ans. » Enquête de 1466. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 1, page 210 : Olivier de la Marche, t. II, p. 225, note 1. [retour]

Note 2, page 210 : Nozeroy, 28 avril 1447. Lettres du prince d’Orange au roi René l’informant qu’il est prêt de recevoir son remboursement. Bibliothèque nationale. Coll. Dupuy 643, fol. 121. [retour]

Note 3, page 210 : Archives du Doubs. E. 1230. [retour]

Note 1, page 211 : « Jaçoit sitôt que l’on sceut son département, il fut suivi du comte de Dampmartin, de sy près que on ne pourroit plus; il leur eschappa et vint à St-Claude, en Bourgongne; il y fut receu honorablement par le prince d’Orange, qu’auparavant le Dauphin avait moult hay par auculnes destraisses que ledit prince et le mareschal de Bourgoingne avoient faites sur les gens du Roy. » Mémoires de Jacques du Clercq, édit. Buchon et Ponjoulat. Mém. pour servir à l’histoire de France. 1837, p. 619. [retour]

Note 1, page 212 : Chronique de Chastellain. III, p. 179. [retour]

Note 2, page 212 : C’est à Vers et non à Nozeroy, comme l’ont prétendu certains auteurs, que le Dauphin fut reçu, encore moins à Orange, où les annotateurs de Gollut ont fait venir Louis de Chalon. [retour]

Note 3, page 212 : « Or ne s’estoit oublié le prince d’Orenges de faire savoir ces nouvelles au duc de Bourgogne, aussi tost et dès le premier jour de son arrivée envoia battant un message devers luy atout (avec), unes lettres par lesquelles il lui annonçoit le soudain cas advenu, affin d’avoir avis sur ce qui en pouvoit ensuir. » Chastellain, t. III, p. 180 et suiv. [retour]

Note 4, page 212 : De Beaucourt. Histoire de Charles VII, t. VI, p. 100-101. [retour]

Note 1, page 213 : Chastellain, t. III, p. 180. [retour]

Note 2, page 213 : Archives de l’Isère. B.3806. [retour]

Note 1, page 214 : Tours, 7 déc. 1461. Lettres du roi adressées à ses conseillers les gens du Parlement de Dauphiné séant à Grenoble, par lesquelles, il entend que Louis de Chalon jouisse à l’avenir des terres de Theys, Domène et Falavier, conformément aux lettres qu’il lui avait déjà octroyées sur ce sujet à Grenoble, le 25 juillet 1456, et enjoint qu’incontinent et sans délai le susdit prince soit mis en possession des dites terres et seigneuries. Pilot de Thorey. Catalogue des actes du dauphin Louis II devenu Louis XI. Grenoble 1899, t. I. No 1325 bis.
Valence, 1er déc. 1462, mainlevée de la terre d’Auberive. Régeste No 52. [retour]

Note 2, page 214 : Archives du Doubs. E. 1325. [retour]

Note 3, page 214 : Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 507. [retour]

Note 4, page 214 : « Six muis de froment que Monditseigneur a bailliez à l’abbé et couvent dou Mont-Saincte-Marie pour un aultel fondel en la chappelle de mondit seigneur de la dite abbaye pour feue ma très redoubtée dame, madame Lyonore d’Armagnyac, princesse d’Orenges, cuit Dieu pardoing, pour dire et célébrer chacun jour une messe pour ma dicte dame. » Extrait d’un compte de Pierre Jeanneret, receveur de Grandson pour l’année 1459. Archives du Doubs. E. 1248. [retour]

Note 1, page 216 : Pièces justificatives XXVII. [retour]

Note 2, page 216 : Pièces justificatives XXVIII. [retour]

Note 1, page 217 : Cf. Pièces justificatives XXIX, déposition de Guillemin Jaquemet. [retour]

Note 2, page 217 : « Vobis promittimus quod si illi qui intrarunt velint facere aliquid quod nobis dipliceat, dabimus eis bibere de aqua que est in isto lacu. » Déposition de Guillaume Jaquemet. Archives de Neuchâtel, Cote 222. Les gens de Neuchâtel déclarèrent au notaire Jacquemet, auquel ils avaient interdit l’entrée des portes : « Vous promettons que si ceulx qui y sont entrés y veuillent faire chose qui soit à notre déplaisir, nous leur donnerons à boire de l’eau qui est en ce lac. » Le notaire leur répliqua : « qu’ils n’avaient pas assez grand ventre pour tout boire ». Cf. Pièces justificatives XXVIII et XXIX. [retour]

Note 1, page 219 : Archives de Neuchâtel. K. 5. 11. [retour]

Note 1, page 220 : Actes et titres concernant le droit de sa majesté le roi de Prusse sur le comté de Neuchâtel et Valengin. Imprimé en 1707, p. 15. [retour]

Note 2, page 220 : Chambrier (Frédéric de). Histoire de Neuchâtel et Valengin. Neuchâtel, 1840. In-8o, p. 178. « A délivré, par le mandement de feu bonne mémoire monsr le Prince, que Dieu pardoin, donné à Noseroy le XXVIII jour de may mil IIII LXIII à frère François, courdellier, pour aller à Romaz, auquel lieu il ala par mandement ». Compte de Guillaume Jeanneret, receveur de Grandson. Archives du Doubs. E. 1248. [retour]

Note 3, page 220 : Nozeroy, 14 février 1460. Mandement à Guillaume Jeanneret de bailler à Jacques Chaudrille 10 grosses anguilles, qui doit les apporter à Salins, mercredi prochain, « auquel lieu nous serons à une journée où les trois Estats du conté de Bourgoigne doivent estre ». Archives du Doubs. E. 1248. [retour]

Note 1, page 221 : Chronique de Georges Chastellain, t. IV, p. 186. [retour]

Note 2, page 221 : Déposition de Pierre d’Andriset, écuyer, lequel « avoist grande familiarité et accointance à feu le Bon de Blye, tellement que quand il aloit à Noseroy ou ailleurs, où ledit seigneur estoit, le dit Bon de Blye quand il y estoit le façoit adez coucher avec luy et pour l’accointance et familiarité qu’il avoit avec ledit Bon de Blye une fois entre aultres qu’ilz estoient couchez ensemble en la chambre dudit Bon de Blye ou chastel dudit Noseroy, sont environ huit ou neuf ans, luy déposant luy demanda pourquoy il estoit ainsi rigoreux contre monseigneur d’Argueil en ly remonstrant que si devoit aultrement conduire qu’il ne façoit, à quoy ledit Bon lui respondit les parolles suigans ou semblables en effet … » Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 1, page 222 : Cf. page 259. [retour]

Note 2, page 222 : Nozeroy, 8 janvier 1463. Lettre d’Aymé de Villers à Pierre de Jougne lui réclamant ses gages dus pour une demi-année en le priant de les lui faire parvenir par le porteur des présentes vu que : « Monseigneur le visconte mon maistre s’en doit partir de cy deans huit jours pour aler en Flandres comme vous scavez et je m’en vais avec lui … » Archives du Doubs. E. 1237. [retour]

Note 1, page 223 : Archives du Doubs. E. 1244. « Pour la despense de mons. le maistre d’oustel le Bon de Blies, Aymonet Fellin, qui furent à Granson pour mander ès subjects de monsr tant de Granson comme de Montagnie aulcuns dons pour et en nom de mons. le viscomte de Bezenson et signeur de Chastelguyon, aulcune somme d’argent pour aidier et supporter les missions de la despense de son voage (voyage) de Flandre, ouz il ia en entencion d’aler bien bref par devers mon très redoubté seigneur mons. de Charoloys, ensemble de aultre officiers de mondit sr qui ont accompagniez ledit maistre d’ostel, III livres, III solx, VIII deniers ». Compte du receveur de Grandson, 1461. Archives du Doubs. E. 1248. [retour]

Note 1, page 224 : Déposition d’André de Toulongeon. Enquête de 1464. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 2, page 224 : Nozeroy, 9 sept. 1462. Mandement à Jean Mandrot, receveur d’Orbe, de payer la somme de 6 livres à Pierre Marchandet « pour aller à Genesve acheter du métal pour parfaire nostre bombarde ». Archives du Doubs, E. 1350. [retour]

Note 3, page 224 : Déposition de Viennot Bardelier. Enquête de 1464. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 1, page 225 : Pièces justificatives XXXII. [retour]

Note 2, page 225 : Lettre publiée par E. Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 519 note 4. [retour]

Note 3, page 225 : Ibidem, p. 520. [retour]

Note 1, page 226 : Déposition de Jean de Bonnefoy, de Luxeuil. Enquête de 1464. Archives du Doubs. E. 1350. Jacote de Grandson, lingère du prince, dépose : « que sont environ quinze ans que feu ledit sr feit oster de la grosse tour du chastel de Noseroy, couverte de plomb, trois coffres-forts ferrez qu’estoient au fond d’icelle tour … lesquelx furent portez en la tour quarrée qu’est emprès la chappelle dudit chastel, dit que ce fut à l’occasion de ce que ung que l’on nommoit le seigneur de Viconne et ung sien serviteur nommé Jehan Quintet que fut pendu devers Bletterans voulaient croicheter les sarrures des diz coffres ». Enquête de 1464. [retour]

Note 1, page 227 : Perrin Moyne l’Abbaye dit que « durant la dernière maladie du prince a continuelment esté en sa chambre jour et nuit et a vu plusieurs fois les dis Falerans, Pierre de Joingne, Claude d’Arnay et le sr de St-Sorlin, nommé Claude de la Balme, tous ensemble ou aucunes soys les deux ou les trois d’eulx parler ensemble, secrètement à l’ung des coings de la cheminée et une foys veit que ledit feu sr fut mal contant de ce qu’ilz parlaient tant entre eulx et leur dit : « Quesse là, vous ne faictes que parler »; ils ne respondirent mot, mais ilz se tindrent de plus parler ensemble pour celle foys. » Enquête de 1464. [retour]

Note 2, page 227 : Déposition de Jean Bonnefoy. Enquête de 1464. [retour]

Note 3, page 227 : Déposition d’Odot de Rigney. Enquête de 1464. [retour]

Note 1, page 228 : Perrot Maréchal dit « que le jeudi avant le jour du trespas dudit feu monsr le prince, le depposant estant audit Noseroy en certaine estable, estant en l’hostel … vit ung nommé Laurent, serviteur de Pierre de Jougne et Henry Boisselet, serviteur de Huguenin, monsr de Chalon, qui lyoient et mectoient à point un fardel d’environ demi-aulne de long et ung tier d’aulne de large et ainsi qu’il se voult approchier d’eulx pour leur aydier à adressier ledit fardeau, ilz luy dinrent qu’il se tirast arrière et que ce n’estoit point à luy affaire dont il ne fait autre semblant, mais s’en ala en une estable du costé celle où estoient les dis Laurent et Henry et n’y avoit que ung paroy entre d’eulx ouquel paroy il trouva ung petit pertuis par lequel il regarda ce qu’ilz façoient et les vit lyer de cordes et enserdeler d’une toille rouge ledit serdeau lequel quant ils l’eurent mis à point icellui Laurent le cuida le lever et soldre de terre pour l’empourter, mais il ne peut, ainsi comment que ledit Henry luy aidast à lever et lui deit qu’il convenait qu’il l’empourtast soubz son manteau, ce qu’il feit. » Enquête de 1464. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 1, page 229 : Déposition de Hugues Nyellier alias Girardin, de Lons-le-Saunier. Enquête de 1464. [retour]

Note 2, page 229 : D’après Clerc, II, p. 523, Hugues et ses compagnons auraient couché à Foncine le premier soir. Hugues Nyellier, de Lons-le-Saunier, dépose avoir rencontré les voyageurs sur le chemin de la Faucille l’après-midi du vendredi, c’est-à-dire le lendemain de leur départ de Nozeroy. L’étape de Nozeroy à Foncine, suivant le récit de Clerc, aurait été bien courte. [retour]

Note 1, page 230 : Déposition de Jean Varin et de Jean Guiétan, religieux de Grandvaux. Enquête de 1464. [retour]

Note 2, page 230 : « Trois ou quatre jours après le partement dudit Huguenin, ung nommé Jehan Pillemoine, son chambrier ramena en l’hostel de Jehan Colon ung cheval sur lequl l’on disoit avoir esté emmené la vaisselle or et argent, et estoit tout talé (taillé) et estourché ès flancs, et sur le dolz (dos), dont elle fut mal contente et dit audit Pillemoine que l’on devoit bien prendre ce cheval pour le ramener en tel point, à quoy icellui lui dit qu’elle se teut, de par le dyable. » Déposit. d’Agnès, femme de Jean Bouret. Enquête de 1464. [retour]

Note 3, page 230 : Le prétexte du pèlerinage à Saint-Claude explique le grand détour effectué jusqu’à Mijoux, au pied de la Faucille, alors que la route habituelle de Nozeroy à Orbe passait par Jougne. De Gingins (Recherches historiques, p. 245) a commis une erreur en indiquant Gex comme destination des voyageurs. Leur passage à Orbe est attesté par plusieurs témoins de l’enquête de 1464 et par l’historien Clerc. [retour]

Note 1, page 231 : Déposition de Lyon, l’armurier, de Besançon : « ung notable homme demorant à Orbe ou à Verdun (Yverdon) en Savoye fut logié en l’hostel de lui qui parle et en parlant et divisant des nouvelles qui courraient lors, mesmement de la maladie et aussi du trésor de feu monseigneur le prince dont estoit grand bruyt, ledit marchant lui dit que en partant qu’il avait fait de la dite ville d’Orbe, avoit environ deux jours, il rencontra Huguenin, monseigneur de Chalon, que l’on nomme seigneur dudit Orbe, qui entroit en ladite ville et avoit en sa compaignie seze chevalx, dont il y avait deux chevaulx de bazuz lesquelx estoient chargé ung chacun de deux bouges ès deux costez et sur la creupe d’un chascun desdis chevaulx une grande boîte bien ferrée et sembloit que les dis chevaulx feussent fort chargiés ». Enquête de 1464. [retour]

Note 2, page 231 : Dépositions de Guillaume de Montcler, écuyer, et de Jean Martin, recteur des écoles de Nozeroy. Ibidem. [retour]

Note 1, page 232 : Déposition de Nicolas Floret. « Sont environ deux mois qu’il fut à Lyon pour acheter des drops de soye pour ma dame la princesse et illec parla à un parmantier pour luy enseigier où il se assortirait de draps de soye et ledit parmantier lui dit que guères n’avoit que ledit Huguenin, monseigr estoit passé par ledit Lyon et avoit fait ledit parmantier ung oqueton pour l’un de se gens, lequel lui monstra quand il le voult payer un grand tax de lions d’or et bien tant ou plus qu’il en fut entré en son chappeau en monstrant à luy qui parle son chappeau lequel estoit à la façon que l’on porte maintenant à longue testière ». Enquête de 1464. [retour]

Note 2, page 232 : Bulletin archéologique du Comité des travaux historiques et scientifiques. 1885, p. 271. [retour]

Note 1, page 233 : Clerc. Essai sur l’Histoire de Franche-Comté, t. II, p. 527. [retour]

Note 2, page 233 : « Nous élisons la sépulture de nostredit corps en l’église du monastère de Mont-Sainte-Marie en la chappelle en laquelle sont inhumez noz prédécesseurs ». Testament de Louis de Chalon. Pièces justificatives XXXI. [retour]

Note 1, page 238 : Enquête de 1464. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 1, page 239 : L’inventaire de ce trésor a été publié par J. Gauthier. Bulletin archéologique du Comité des travaux historiques et scientifiques. Année 1885, p. 270-273. [retour]

Note 1, page 240 : Enquête de 1464. Archives du Doubs. E. 1350. [retour]

Note 2, page 240 : E. 1246. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 240 : Idem. [retour]

Note 1, page 241 : E. 1245. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 241 : E. 1233. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 241 : E. 1247. Archives du Doubs. [retour]

Note 4, page 241 : E. 1247. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 242 : E. 1247. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 242 : E. 1240. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 242 : E. 1247. Archives du Doubs. [retour]

Note 4, page 242 : E. 1252. Archives du Doubs. [retour]

Note 5, page 242 : E. 1232. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 243 : E. 1231. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 243 : E. 1243. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 243 : E. 1242. Archives du Doubs. [retour]

Note 4, page 243 : E. 1247. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 244 : Déposition de Guiot Odet. Enquête de 1468. E. 1350. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 245 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 439, note 4. [retour]

Note 2, page 245 : E. 1246. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 245 : Clerc. Ouvrage cité. II, p. 442. [retour]

Note 1, page 247 : E. 1350. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 247 : E. 1311. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 248 : E. 1241 à 1242. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 249 : E. 1240. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 249 : Un ordre, daté de Jougne du 15 septembre 1444, ordonnait à Pierre de Jougne de faire construire 4 moulins à bras, du modèle de celui existant à Jougne dans la grosse tour ronde, un à Orbe, un à Montagny, près de la citerne, un à Grandson dans le vieux four, un à Echallens, dans le logis de Pierre ou dans le cellier à vin. Archives du Doubs. E 1242. [retour]

Note 1, page 251 : E 1230, 1231, 1233, 1234, 1237. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 254 : E 1245, 1246, 1247, 1248. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 254 : E 1245, 1253. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 255 : E 1233, 1238, 1241, 1242, 1243, 1247. Archives du Doubs. Un reçu du 14 septembre 1435 est signé par « Seur Henriette, altesse et serviteresse des povres seurs de Sainte-Claire de Orbe » Un autre du 27 mai 1438 est signé par « Pierre Franz de Landereaz, cordelier et confesseur des seurs cordeilleres d’Orbe ». [retour]

Note 2, page 255 : E 1230. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 255 : Annuaire du Jura, 1865, p. 120-142. [retour]

Note 4, page 255 : Clerc. Essai sur l’histoire de Franche-Comté, t. II, p. 1310, note 2. [retour]

Note 5, page 255 : Archives d’Arlay. Caisse D. V. II. [retour]

Note 1, page 256 : Rousset. Dictionnaire du Jura, t. IV, p. 515. [retour]

Note 2, page 256 : E 1238, 1240. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 256 : E 1240. Archives du Doubs. [retour]

Note 4, page 256 : Pièces justificatives XXX. [retour]

Note 1, page 257 : E 1235, 1242. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 257 : E 1248. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 257 : Bulletin de l’Académie des sciences et arts de Besançon. 1883. [retour]

Note 1, page 258 : E 1240. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 258 : E 1230. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 258 : En 1425, le commissaire est Jacques de Glenne, écuyer, en 1429 Jean de Romainmôtier, en 1440 Jean Cuyenet. E 1231, E 1233. En 1434, le procureur général est Jean de Barbaise, en 1435 le procureur Jean Malsan, d’Orbe, en 1443 le procureur général Henri Bouchet. E 1233, 1241, B 460. Le 8 janvier 1456, Jean Jolenet de Moudon est nommé « Commissaire ès causes des appellations ès terres du pays de Vaud ». E 1230. Archives du Doubs. [retour]

Note 4, page 258 : E 1230. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 259 : E 1230, 1233, 1237, 1241, 1244, 1246, 1247, 1248. Archives du Doubs. Rousset. Dictionnaire historique du Jura, t. IV, p. 505. [retour]

Note 2, page 259 : Ed. Clerc. Ouvrage cité, t. II, p. 521. [retour]

Note 3, page 259 : On ne s’occupera que des terres vaudoises, en raison du caractère incomplet des documents pour les autres seigneuries. [retour]

Note 4, page 259 : L’office de bailli d’Orbe était occupé en 1423 par Jean de Romainmôtier, puis par Jean Mayor, celui de châtelain en 1423 par Guillaume d’Ornans, qui avait déjà servi Jean de Chalon, père de Louis. Pierre de Jougne est mentionné dans la même charge en 1422, tandis que le 6 novembre 1427 c’est Jean d’Ornans qui l’occupait, en 1429 Jean de Doubs, en 1439 Gauthier de Fallerans. En 1440 Pierre de Jougne paraît avoir cumulé l’emploi à Orbe, à Echallens, et à Grandson, ainsi qu’à Montagny et à Bottens. Les receveurs d’Orbe furent Jean Bernard avant 1415, Jean Viret 1415, Pierre Michiel en 1421 et 1443, Pierre de Jougne 1422-1425, Pierre Chevalier, Estevenin de Jougne 1437, Pierre de Vuillafans 1438-1445, Pierre Michiel 1447-1457, Jean Mandrot 1459-1462, Pierre Mauparlant 1462-1470. Les receveurs d’Echallens furent Guillemin de Nozeroy ou de Boujailles 1405-1427. De 1428 à 1472, Pierre de Jougne fut châtelain et receveur. A Montagny, on trouve comme châtelain Girard Costable en 1411, Richard Ferlin en 1438, puis Pierre de Vuillafans. En 1446, le salaire annuel du châtelain d’Orbe était de 26 livres, 13 sols 4 deniers, celui de receveur de 8 livres, 13 deniers, celui de bailli (il en recevait un autre pour Echallens) de 5 livres, 6 sols, 8 deniers. [retour]

Note 1, page 260 : E 1232. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 260 : E 1234. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 261 : E 1230, 1233, 1234, 1241. Archives du Doubs. De Gingins. Histoire d’Orbe, p. 229. Pièces justificatives XXI et XXV. [retour]

Note 2, page 261 : En 1447 la ferme des moulins d’Orbe fut affermée pour 3 ans à Jean Dogniez pour 29 muids de froment par an. E 1243. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 261 : E 1243. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 262 : E 1248. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 262 : E 1253. Archives du Doubs. [retour]

Note 3, page 262 : E 1243, 1247. Aymonet Tissotet fut dégradé et exécuté à Orbe en 1447. En 1448, Louis de Chalon mande à Nozeroy le bourreau de Lausanne pour brûler un « Vaudois ». Pièces justificatives XXVI. [retour]

Note 4, page 262 : Maxime Reymond. Les dignitaires de l’église Notre-Dame de Lausanne, p. 91. [retour]

Note 1, page 263 : E 1248. Archives du Doubs. [retour]

Note 2, page 263 : E 1244. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 283 : Schweidnitz. [retour]

Note 2, page 283 : Jauer, ville de Prusse, district de Liegnitz (Silésie). [retour]

Note 1, page 284 : Un mot a été omis par le copiste. [retour]

Note 3, page 263 : E 1234. Archives du Doubs. [retour]

Note 4, page 263 : E 1237, 1244, 1248. Archives du Doubs. [retour]

Note 5, page 263 : E 1232, 1238. Archives du Doubs. [retour]

Note 1, page 264 : Renseignements de M. Arthur Piaget, archiviste d’Etat, à Neuchâtel. [retour]

Note 1, page 305 : Sceau rond de 40 mm. Légende entre filets et grenetis. Champ : écu penché, écartelé Chalon (bande chargée d’une étoile) et Oranges (cor enguiché) à l’écu de Genève, brochant sur le tout, timbré d’un heaume de profil sommé de deux bois de cerf. Support : deux lions debout.
Lég. : H. loys de Chalon prince d’Orenge conte de Ge[nes]ve et s. d’[ar]lay. [retour]

Note 1, page 345 : Les 54 documents analysés ici sont en français, sauf les Nos 1, 10, 16, 17, 32 et 44 qui sont en latin, et les Nos 18, 19 et 22 qui sont en allemand. Au No 9 l’acte vidimé est en français, tandis que l’annonce de la transcription et la fin sont en latin. [retour]

Note 1, page 367 : N. Valois : Le pape et le concile, II, p. 173, n. 3, nous apprend que 310 copies du décret d’union des deux Eglises furent envoyées en diverses parties du monde. Cf. aussi Hefele-Leclercq : Histoire des conciles, t. VII, 2e partie, p. 1072. [retour]

Note 1, page 369 : Engrogne, ancienne monnaie de billon du duché de Bourgogne, frappée sous les ducs héréditaires de la seconde race. [retour]

Note 1, page 371 : Les Nans, village de l’arrondissement de Poligny (Jura), qui dépendait en toute justice de la seigneurie de Vers. [retour]

 


 

 

 

 

 

 

 

 

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