EXTRAITS DES MANUAUX DU CONSEIL DE LAUSANNE
(1536 à 1564)
PUBLIÉS ET ANNOTÉS PAR
Ernest CHAVANNES
membre de la Société d’histoire de la Suisse romande.
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AVIS
Dans les extraits qui suivent on a omis la plupart des nombreux articles qui traitent de questions ecclésiastiques et des dissentiments entre MM. de Berne, les ministres et les Lausannois, ce sujet ayant été traité avec détail dans l’Histoire de la réformation de la Suisse, par Ruchat. Il était inutile de faire souvent double emploi avec ce livre si exact et si connu.
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EXTRAITS DES MANUAUX DU CONSEIL DE LAUSANNE 1
Pierre Caroli.
1536. 5 novembre. — Fut conférue et bailliée la meyson de la ville, apartenant pour lors à Monsr Pontherouse, à messire Karoli, par la condition que quand ledit Pontherose viendroyet (n’est pas au pays) que ledit Karoli doibje vuydé ladite meyson.
Le jour qu’est dessus, magniffique Sr Monsr de Vatteville, ambassadeur pour la part de magniffiques et puissans Sr de Berne, lequel exposaz disant avoyer charge présenté honorable persone messire Karoli, pour prescher l’évangile en ceste ville; lequel fut receupt et accepté par le petit et grand conseyel, et à ycelluy fut ordoné pour son salayre et viez, c’est assavoyer Vc (500) florins, monoye de Lausanne.
On trouvera dans l’Histoire de la Réformation de la Suisse, par Ruchat, dans la Correspondance des réformateurs dans les pays de langue française, par Herminjard, et dans la seconde /4/ édition de la France protestante, par Bordier, tous les détails nécessaires sur Pierre Caroli, premier pasteur réformé de Lausanne. Contentons-nous de rappeler que Caroli était natif de Rosay en Brie et docteur de Sorbonne. Dès l’an 1524 il s’était attiré des désagréments à Paris par ses prédications malsonnantes. En 1535, il se réfugia à Genève, assista en octobre 1536 à la dispute de Lausanne, où il se déclara définitivement convaincu par les arguments des réformés. On voit par le texte qu’il parvint à obtenir de Messieurs de Berne la place de premier pasteur de Lausanne, étant préféré à Pierre Viret qui, il est vrai, n’avait que vingt-cinq ans. Caroli ne conserva sa charge que peu de mois, car sa doctrine ayant été trouvée « dissonante à la vérité évangélicque, » le Conseil de Berne le destitua le 7 juin 1537 et lui donna pour successeur dans la place de premier pasteur Pierre Viret qui n’avait été d’abord que pasteur en second rang, avec des émoluments très inférieurs à ceux de Caroli. (Voy. l’article du 16 novembre 1536.) Caroli abjura entre les mains de l’official de Lyon, passa en Italie et mourut à Rome.
Ambassadeur du roi de France.
6 novembre 1536. — Fut faict requeste par le Sr Ransiz, ambassadeur de la part du Roy, demandant estre pourvehuz de XXIIII compaignions, luy fere compaignie à passer le Jorat, pourtant qu’il soy creigniet d’aulcuns maulveys garson. Et luy fut accordé par le Conseyel, qui députarez deux Sr de Conseyel pour les conduyre, à scavoyer N. Francois Chabie et N. Ennablo de la Court, avec deux héraulx.
Biens ecclésiastiques.
Le dit jour furent eslehu pour inventerisé les biens des convens Sainct Françoys, La Magdaleyne et Bellevaulx, à scavoyer G. Gumin, G. Ravanel et Francois Guibaud.
Le dit jour, item, furent esleu ausi pour inventerisé les /5/ biens des perrochiales, à scavoyer J. Borgeys, burguemeystre, Jo. de Sto-Cyriaco et les IIII banderet.
Par la largition du 1er novembre 1536, acceptée par les Lausannois le 5 du même mois, Messieurs de Berne avaient acheté la soumission définitive des Lausannois, en leur donnant « les deux couventz dans la ville, assavoir de sainct Franceois et de la Magdeleyne. »
« Item, les cinq parroisses aussi dans la ville, assavoir sainct Pierre, sainct Paul, sainct Estienne, sainct Laurens et saincte Croix en l’église cathédrale, item le prioré de sainct Sulpice près du lac, après le trespas de Monsieur de Bonmont (Aymon de Gingins, prieur de Bonmont et de St Sulpice, qui mourut l’année suivante).
» Item, l’abbaye de Montheron, aussi Bellesvaux auprès de Lausanne, saincte Catherine dans le Jourat, ensemble touttes appartenances et deppendances desdicts cures, abbayes, conventz, prioréz, etc. icelles soyent dedans ou dehors desdictes limittes (de la juridiction et ressort de Lausanne).
» Toutesfois par condition qu’ils pourvoyent les prédicans qui seront sus les dictes cures, aussi que ès moynes et nonnains qui voudront vivre sellon l’évangile et se faire conformes à la réformation de mesdicts Seigneurs, que à iceux et icelles, leurs vies durantes, soyent donnéz leurs vivres sellon leur nécessitté.
» Et davantage, ont mesdits Seigneurs donné ausdicts de Lausanne le chaslet, aussi le moulin de Goubet, pareillement la maison auprès de la grande église, appelée le vieux Evesché. » (M. D. R. VII, 771.)
Messieurs de Berne s’étaient réservé tous les biens de l’évêché et du chapitre de Notre-Dame, outre les droits régaliens. On verra plus loin si les Lausannois se tinrent pour satisfaits de ces conditions.
Pour prendre possession de ces biens, le Conseil de Lausanne commence naturellement par en ordonner l’inventaire (toutefois il avait déjà, au mois de septembre, pris l’inventaire des biens des couvents de la Madelaine et de Bellevaux (M. D. R. XXXIV, /6/ XXXVI) et, le surlendemain, 8 novembre, il commande aux gouverneurs ou syndics des villages du ressort d’apporter en ville, le mardi suivant, les calices et les ornements de leurs églises ainsi que l’inventaire et les rentiers des immeubles ecclésiastiques.
Jusqu’à la fondation de la Bourse des pauvres, dont on parlera plus loin, tous les immeubles ecclésiastiques donnés à la ville furent réunis à son domaine public et administrés par elle, sous la surveillance fort active de Messieurs de Berne.
En premier lieu, la ville devait pourvoir au logement et à l’entretien des « prédicants » ou ministres du nouveau culte : or LL. EE. trouvèrent que les ministres et les diacres étaient insuffisamment payés et insistèrent plusieurs fois, dans les années 1537 et 1538 et jusqu’en 1547, pour que la position de ces ecclésiastiques fût améliorée.
Ensuite, il fallait donner des pensions de retraite aux membres du clergé, soit séculier soit régulier, qui en avaient été usufruitiers et qui, tout en restant dans le pays, accepteraient la réformation de Messieurs de Berne. Ce personnel fut peu nombreux et naturellement diminua d’année en année.
Voici quelques notes à ce sujet recueillies çà et là dans les manuaux. Ces arrangements furent modifiés plus tard.
Le 16 novembre 1536, le Conseil laisse la cure et les revenus de la paroisse de Saint-Etienne au curé, à condition que celui-ci en paie un loyer annuel de 40 florins et que « il debjez accepter la réformation. »
Le 2 janvier 1537, il amodie en viager à domp François Jayet, vicaire de Morrens, la cure dudit Morrens, pour 20 florins par an à condition « que icelluy domp François soyct entenuz maintenir la meison et l’égliesez de la cure et aussi pourvir de prédicant pour administrer la parolle de Dieu. »
Le 17 février 1537, domp François Ponveyroz, ancien curé de Prilly, demande qu’on lui rende sa cure, qu’on avait amodiée. Le Conseil refuse, mais accorde au curé une pension annuelle de 25 florins. /7/
Le 22 mars suivant, le fameux Claude de Prez, ex-chanoine et curé de Saint-Paul, reçoit une pension de 100 florins, « et c’est du temps qu’il soy acquiterat envers la ville, ouz qu’il pleyrat à Messieurs. » Le 5 mars 1551, il se présenta devant le Rière-Conseil, réclamant les arrérages de la pension qui lui avait été promise. Il essuya un refus, vu qn’il n’était pas réformé : « Fuit conclusum, viso quod dicta pensio est de bonis pauperum et quod ipse non est de reformatione christiana, dicta pensio abolitur et dictus dominus de Prez, nec de preterito, nec de futuro, nichil habebit. »
Le 17 septembre 1545, Laurent Cinquensod, ancien chanoine et curé de Saint-Laurent qui, en qualité d’ancien chanoine, recevait de Messieurs de Berne une pension annuelle de 100 florins, un muid de froment et deux chars de vin, reçoit aussi de la ville une pension équivalente, qui lui est payée sur les revenus de l’abbaye de Montheron.
En 1547, Louis Brocat, jadis curé de Saint-Pierre, à qui l’on avait concédé les revenus de son ancienne cure, reçoit une pension supplémentaire d’un demi-muid de froment et un demi-muid de vin.
On a déjà mentionné dans ces mémoires le sort des dames de Bellevaux. (M. D. R. XXXIV.)
On a aussi vu (M. D. R. XXXVI) que, dès le mois d’avril 1536 le Conseil avait attribué l’église des Dominicains de la Madeleine au culte réformé, et qu’au mois de septembre suivant, sans même attendre la largition, il avait fait inventorier les biens des religieux. L’inventaire, ordonné dans le texte, était donc déjà fait. Quant aux moines, le 15 décembre 1536 : « fust balliée license à six religieulx de la Magdellayne soy retiré allieurs et concédées lettres attestatoyres de l’occasion de leur département. » Il est probable que presque tous les Dominicains quittèrent le pays, cependant l’un d’eux, Jacques Daux, paraît être resté à Lausanne. Le 5 février 1540, le Conseil lui assigne une rente viagère d’un char de vin, un muid de froment et 25 florins. A la fin de l’année suivante, cette rente fut augmentée de 60 sols et d’un demi-muid de froment. /8/
Les Franciscains paraissent aussi être partis. On ne retrouve plus que François Chassot, auquel le Conseil accorde, le 9 mars 1540, la pension suivante : Pendant les trois premières années, 40 florins et 9 coupes de froment par an; après ces trois années, on ne lui donnera plus que 9 coupes de froment et l’usufruit d’une certaine vigne sous Saint-François. Chassot vivait encore en 1560 et recevait une pension de 12 florins par an, peut-être en place du froment.
On trouve dans Ruchat, dans le dictionnaire de Martiguier et de Crousaz et au tome XII des présents Mémoires plusieurs renseignements sur le sort des moines de l’abbaie de Montheron. Je me contenterai de les compléter en donnant, autant que possible, le texte original du Manual.
On lit le jeudi 21 décembre 1536 : « Sont comparu les religieux de Montheron et ont fayt une supplication de leur laisser uncor ung moys ad se devoyer désisty de leur abis, affin de ce qui puyse cherchiz en queque aultre lyeu place pour vivre en leur vocation; laquelle leur az estéz concédé en une [sic] qui ne doibiez aller chante messe, ne sà ne là. »
Le 5 septembre 1588, le prieur Jacques Copyn apporte en Conseil les reconnaissances en faveur de l’abbaye de Montheron, contenues en cinq volumes et comprenant les reconnaissances de Cugy, Morrens, Bretigny, Froideville, Bottens, Oulens, Boulens, Berchier, Panthéréaz, Grange du Buron, Assens, Boussens, Poliez-le-Grand, Poliez-Pittet, Pailly, Oppens, Chavornay, Eclépens, Vuarrens, Villars-le-Terroir, Goumoens, Echallens, Villars-Sainte-Croix, Saint-Cierge, Sottens, Montaubion, Chappelle, Saint-Saphorin, Vevey, Cully, Lutry, Pully, Lausanne, Belmont; ensemble 236 reconnaissances.
Le 28 novembre 1538, les religieux n’ayant pas encore quitté leur couvent, le bailli bernois insiste pour qu’on les fasse venir en ville : « In retro consilio, eo videlicet quod baillivus Neyguilliz parte dominorum Bernensium petebat et instanter volebat quod religiosi de Montheron de cetero et amplius non haberent moram in dicto loco de Montheron, sed in Lausanna, videlicet eo quod essent plus apti et plus conveniens pro ipsis religiosis ire /9/ in lectionibus et sermonibus qui fiunt Lausanne. Eo tunc fuit conclusum, ipsos monachos monere ut haberent relinquere locum de Montheron et veniant Lausannam, et eo mediante quod habeant et habere debeant eorum pensiones, prout fuit eisdem promissum. »
En 1542, les moines pensionnés étaient au nombre de dix : Le prieur, Jacques Copyn, Philippe Panchaud, Jean Beyvroz, Thomas Panchaud, Blayse, Claude Gojonex, Claude de Morrens, Jacques Marguerat, François Rochiz et François Ranguys. Ils recevaient chacun une pension annuelle de 18 coupes de froment, 20 setiers de bon vin et 40 florins, outre leur pitance accoutumée. Le prieur avait double prébende.
Jean Bèvre ou Beyvroz vivait encore en 1559; le Conseil lui accordait 10 florins pour le loyer de sa maison. Jacques Copyn ne mourut qu’en 1575.
Quant aux bâtiments ecclésiastiques, le Conseil commence par ordonner, le 21 août 1537, l’enlèvement de toutes les cloches des églises paroissiales, sauf une cloche dans l’église de Saint-Pierre et une autre dans l’église de Saint-Laurent, qu’on conserva afin de pouvoir les sonner en cas d’alarme. Puis, le 10 juillet 1539, il décida la démolition des églises paroissiales de Saint-Etienne, Saint-Pierre, Saint-Paul et Saint-Laurent, pour employer les matériaux à la réparation des murs de la ville et d’une maison à Ouchy, appartenant à l’hôpital de Saint-Roch. Cette opération fut accomplie avec une sage lenteur. On commença par la démolition de l’église de Saint-Paul, située à la Cité-dessous, dont les pierres furent employées, en 1539, à la réfection du pavé de la Barre et des halles de la maison de ville. On a vu (tome XXXVI, pag. 25) que l’église de Saint-Laurent ne fut démolie qu’en 1554. L’église du couvent des Dominicains dura plus longtemps. En 1555, on paya un grand nombre de journées pour amener les pierres du jubé de cette église aux halles de la Palud, après qu’on eut vendu à des particuliers tous les autres bâtiments du couvent.
Les maisons de cure et autres immeubles bâtis furent successivement /10/ vendus, loués ou affectés à l’habitation des ministre du nouveau culte.
On sait que, outre les propriétés de l’évêque et du chapitre, MM. de Berne s’étaient réservé le trésor de la cathédrale, comprenant tous les vases sacrés, les statues et les ornements ecclésiastiques. Mais dans la cession qu’ils firent à Lausanne des propriétés ecclésiastiques mentionnées dans la largition, étaient compris tous les meubles qui garnissaient les édifices religieux. Ces meubles, quoique infiniment moins précieux que ceux de la cathédrale, avaient cependant une certaine valeur.
Le Conseil s’en défit graduellement. Je relève quelques notes que j’ai retrouvées sur ce sujet :
1537. 9 avril. « Furent vendu certeyns callices, estant entre les meyns de sire Anthoine Gavet et Jaques Violat, pour le pris de IIIc (300) bon florins, 4 sols, 6 den. »
1538. 25 mars. « Fut conclud et ordoné debvoyer vendre les chappes et chasubles aultrefoys apartenantes aux convents de Sainct Franscoys et La Magdaleyne à Lausanne, à certeyn marchand de Besanzon, et c’est pour le pris de sixvingts et quatre escus au soloyel du coingt du Roy de France, lesquieulx furent remis ès mayns de Sr Jehan Borgeys 1 . »
En 1540, on transféra dans un coffre, « dernier le fornet » de la salle du Conseil, ce qui restait de ces trésors.
Au mois d’octobre 1545, on en fit une nouvelle vente. En effet on lit dans les comptes du boursier, Johan Rochit ou Rosche : « J’ay receuz de monsieur le banderet de la Pallu, le Sr Glaude Gumuens, de l’argent par luy receuz du brodeur de Besansom, de trenta et IX chappes et chasubles, de quoy il y en avoyt deux /11/ chasubles extimées XXX escus aud soloy, vendu tout en somma la somme de quatre vingt escus aud soloy, desqueulx ledit brodeur délivra pronteman XX escus aud soloy aud dit banderet, et je Jeham Rochit confesse les avoyer receuz les XX escus, chescum escu valiam quatre florin VIII gro., le dernyer d’octobre 1545, qui som en somma LXXXXIII flor. IIII gr.
» Item plus, ay reçuz du Sr Jasque Violat à causa de la fianse du brodeur de Besansom pour les chasubles, desquelles le seigneur Jasque Violat avoit respondu, sosanta escu aud soloy, desqueux sosanta escus j’ay receuz, le XIX d’octobre 1545, trente escus aud soloy, qui se admontem en somma CXXXX flor. »
La seconde somme de 30 écus fut payée le 16 janvier 1546.
Ces ventes opérées, il restait encore un certain nombre d’objets dans ce coffre, qui furent remis par Jean Rosche à son successeur dans la charge de boursier, le 6 mai 1546, suivant l’inventaire ci-après, dont on a conservé la minute suivante :
L’inventaire des meubles et aultres choses remis par le seigneur Françoys Guibaud, ansien boursier, au seigneur Jehan Rosche, moderne boursier, le six de may 1546, présens noble Jaques de Praromand, bourgmestre, noble Loys Gimel, ansien bougmestre; messieurs les banderets Noble Claude Gallerard, Aymonet Rochet.
Premièrement, la croys de sainct François, d’argent, avec son cruciffiz et tiltre, à tron de chasne favergée.
Item, la croix d’argent de la Magdalenne.
Item, une croix de cristal, avec son cruciffiz de boix.
Item, l’image sainct Dominicque avec sa … et ovré d’argent et le pied de cuivre.
Item, le sainct Sebastian sainct François, ses deux flesches d’argent et le pied de cuivre.
Item, l’image sainct François d’argent, avec son pied de cuivre.
Item, une croix de jaspie, avec son petit crucifiz doré.
Item, une custode d’yvoyre ovrée, avec une crois d’argent en cristal au mylieu. /12/
Item, la croix sainct Estienne, petitte valeur.
Item, deux encensiers d’argent, bien ouvréz, avec leurs chennes.
Item, une petitte croix dourée, avec deux branches montantz et son pied d’argent faict à mode du pied d’ung calix.
Item, ung petit sainct Sebastian d’argent, avec son pilier d’argent et le pied de cuivre.
Item une petitte custode à deux branches, montans dourés, le pied d’argent bien ovré d’or et le mylieus fermé de cristal et sa crois dessus d’argent dorée et le petit cruciffifz.
Item, une grant custode de cuivre dorée.
Item, deux patènes d’argent.
Item, deux belles patines dorées.
Item, deux aultres patines dorées, d’argent.
Item, une aultre patine d’argent.
Item, huictz calixes d’argent.
Item, une custode d’argent avec sa coverte d’argent.
Item, trois petittes croix.
Item, un calixe; la cope d’argent et le pied de cuivre doré.
Item, une petitte main d’argent.
Item, une buyte d’encens d’argent.
Ung pied d’argent, out y a frère Thomax Gogacti.
Item, le grand scel bourgeois d’argent 1 .
Item, la garnison d’une custode d’argent, le pied de cuivre.
Item, sainct Pierre martir, d’argent, remis par la relaixée de Ja. Langin, avec son pied de cuivre argenté.
Item, la crosse de cuivre de Monteron.
Item, la crosse d’argent de Monteron en son estuyt et le mange d’argent à quattre trot d’argent, avec son estuyt.
Item, la mictre de Monteron, avec sa garnison.
Item, quattres taxes à grand pied.
Item, deux simples taxes.
Item, une marque de taxe d’argent dorée de largeur d’un teston. /13/
Ce reste de trésor ecclésiastique fut vendu par la ville, en 1556, à N. François Seigneux, citoyen et boursier de Lausanne, seigneur de Vufflens le Châtel, comme on le voit par l’article suivant du manual du 31 août 1556 :
« Mes susdictz seigneurs ont vendus à Monsieur de Vufflens, noble François Seignieux, laz reste de vasselle, tant d’argent, lotthon doré que myctres, crosses, croix, calices et aultres chouses d’esglise, réservée la croix de crystallyn, estant en l’arche du poile de ville, dernier le fornet, et ce pour le pris de cent escus d’or, lesquieulx ledict noble Seignieux a promptement poiés et par honnorable Johan Roschiz recehuz; laquelle vasselle a esté vendue expressément pour laz reédiffication des voltes du Pont, que se feront au lieu des maisons ruynées, aussi à la réédiffication des édiffices que se feront sus lesdictes voultes ou asles, et non pour aultre respect 1 . »
En décembre 1559, M. de Vufflens se rendit à Genève pour vendre ces objets, et mal lui en prit.
Il s’était abouché avec un orfèvre pour cette vente, mais le 13 décembre il fut arrêté et mis en prison à Genève, vu que la vente de ce genre d’objets y était interdite. La nouvelle de cette arrestation cause un grand émoi à Lausanne. Le Conseil s’assemble à l’extraordinaire le dimanche 17 décembre et décide d’envoyer immédiatement N. Claude d’Arnex, seigneur de Saint-Martin, et N. Jehan Gumoens, seigneur de Saint-Cierge, à Genève pour demander la libération de leur collègue. Ils emportent l’attestation que les dits ornements sont bien la propriété de Seigneux qui les a achetés le 31 août 1556.
Le 20 décembre, ces ambassadeurs étant revenus avec la nouvelle qu’on n’a pas voulu relâcher le prisonnier, malgré l’attestation produite, le Conseil de Lausanne députe immédiatement le même Jean Gumoens et N. Henry de Praroman auprès de Messieurs de Berne, pour se plaindre d’un pareil outrage et, /14/ le 21, le Conseil de Berne écrit à celui de Genève pour avoir des explications sur cette détention.
Mais avant que cette lettre de Berne arrivât à destination, le Conseil de Genève avait décidé, le 21 décembre, de relâcher le prévenu « moyennant grandes remontrances, mesme qu’on ne l’a pas suyvy à rigueur, veu que on a bien esté informé que, vendant lesdictes choses, il voloit vendre la façon, disant que les dictes choses pourroient encore servir. Luy estant faites les remontrances, il a requis luy outroyer attestation de sa libération, remerciant Messieurs et disant qu’il ne leur impute sa détention, cognoissant qu’ilz sont bons seigneurs, etc. Arresté qu’on luy dise qu’il baille sa requeste et on y advisera. » Le 22 décembre, « il a derechefs suplié et on luy oultroye ladicte attestation. »
Le lendemain, 23 décembre, le Conseil de Genève répond à celui de Berne que, usant d’indulgence, il a déjà relâché le prisonnier la veille, qu’il avait du reste parfaitement le droit de le poursuivre et de le punir.
Rentré chez lui, Seigneux, naturellement fort irrité de ces procédés, demande au Conseil de Lausanne de lui délivrer : 1o attestation et lettres d’honneur, nonobstant la détention faite à Genève; 2o de lui rembourser les frais causant le dit emprisonnement. Le 27 décembre le Conseil lui octroie ces deux requêtes et décide d’envoyer à Berne trois conseillers, avec le dit Seigneux, « prier nos princes d’avoir leur advis comme l’on doibt se guider pour laz vengeance de tel oultrage;
» Item, que les placards se debgent mettre par les carefours de la réjection de l’attestation donnée par ceulx de Genève audict seigneur de Vufflens, avec la restauration de son honneur; lesqueulx placards sont suspendus jusques au retour desdictz seigneurs ambassadeurs;
» Item, ont ordonné qui se doibt publier de non plus recepvoir en leur ville nul François de ceulx qui se sont retirés à Genèfve;
» Item, ont aussy octroiées lettres de décharge de vendition des meubles d’église à Sr Jaques Boufz, N. Claude Gallerard, Estienne Vuavre et aultres, qui ce sont meslés par leur commandement dudit vendage. » /15/
Le 15 janvier 1560, les ambassadeurs, N. Henry de Praroman et N. Claude d’Arnex, rendent compte au Conseil de Lausanne de leur mission à Berne et rapportent que « nos redoubtés princes de Berne sont grandement irrités de la détention que ceulx de Genèfve ont faicte en la personne de N. François Seignieux, seigneur de Vufflens, donc il en prennent la cause à leur main et prétendent, pour ce effect, tirer lesdictz de Genèfve en marche, pour autant que, par tel imprisonnement, ils ont contrevenus à leur combourgeoisie mutuelle. » Puis les mêmes deux personnages sont chargés de se joindre à l’ambassade de Berne, lorsqu’elle passera à Lausanne.
Le 21 janvier 1560, deux ambassadeurs bernois, Bernard d’Erlach et Jean Wiss, arrivent à Genève pour régler différentes affaires. Le 24, on lit en Conseil la traduction de leurs demandes et propositions. La dernière concerne François Seigneux, sur la plainte duquel les seigneurs de Lausanne ont envoyé des députés à Berne. Les Bernois demandent : 1o qu’on n’emprisonne plus leurs sujets « de telle qualité; » 2º qu’on délivre à Seigneux une autre attestation, celle qu’il avait reçue n’étant « pas à son honneur; » 3o qu’on lui rembourse « tous despends et missions; » 4o que pour l’attestation à délivrer, on se serve d’un modèle préparé par Seigneux lui-même. Le Conseil de Genève décide, séance tenante, de repousser ces demandes; il constate la faute et même le « crime » de Seigneux, qui s’était abouché avec un orfèvre, nommé Hippolyte Revit; dit que l’attestation qu’on lui a remise « est entièrement véritable » et qu’on ne peut rien y ajouter ni en retrancher, « et que de cela ilz [les ambassadeurs de Berne] se contentent amiablement. »
Monsieur de Vufflens et le Conseil de Lausanne furent de fort mauvaise humeur d’être ainsi éconduits par les Genevois, aussi lit-on dans le manual de Lausanne, à la date du 7 février 1560 : « Monsieur de Vufflens a prié Messieurs, voiant l’outrage que les seigneurs de Genève luy ont faict, que l’on ne debge envoié à leurs ambassadeurs du vin de Messieurs, comme l’on a faict à son grand regret. Sus ce a esté par mesdictez très honnorez Seigneurs expressément ordoné de non plus leur envoier les /16/ coquasses de vin, non seulement de l’eaue, synon quand ilz viendront en ambassade par devant mesdictz T. H. S. en Conseil, et non aultrement. »
Cette mauvaise humeur ne dura pas, comme on peut le voir par l’article du 18 juillet 1562.
On apprend par les comptes de la ville que les frais de détention de M. de Vufflens lui furent remboursés par une première somme de 382 flor. 11 s. 6 den., payée le 27 décembre 1559, et par une seconde somme de 59 flor. 6 s., payée le 9 avril 1560.
L’ambassade de Henry de Praroman à Berne coûta à la ville 51 flor. 6 sols, outre 7 flor. pour le loyer d’un cheval 1 .
Juge de Lausanne.
1536. 8 novembre. — Congrégué le Conseyel et Rière Conseyel pour eslire ung baillif au nom et pour la part de la ville, pour aultant que la jurisdition à eulx apertient. Et alors futz esleu Noble Jeham Costable, lequel le vendredi ensuyvant fit serment à l’éveschiez, comme aultrefoyes az esté acostumé. Mès ledit serment fut fayct aux mayens du bourguemeystre et Srs de Conseyel et à la présence de tout le comun.
Nous voici au commencement des nombreuses difficultés que le conseil de Lausanne ne cessa de susciter sur l’exécution de la largition, qui était un traité conclu avec Messieurs de Berne. Ceux-ci en exigèrent l’accomplissement à la lettre, tandis que les Lausannois essayèrent pendant deux ou trois ans, mais en vain, d’esquiver l’exécution de leurs engagements et de rattraper en détail les concessions qu’ils avaient faites en bloc et un peu à la légère le 1er novembre 1536. /17/
Sous le régime épiscopal le bailli était un officier de l’évêque, seigneur temporel de Lausanne, Lavaux et autres lieux, qui rendait la justice au nom de l’évêque et présidait la grande cour séculière. Il faut reconnaître que les Lausannois, étant accoutumés à donner à leur juge suprême le titre de bailli, étaient naturellement portés à lui conserver ce nom, malgré l’amoindrissement considérable de la juridiction laissée à la ville. Mais ils comptaient sans la politique ombrageuse et jalouse de leurs nouveaux maîtres qui, le 18 avril 1537, leur signifièrent entre autres : « Et ainsy que les prénommés de Lausanne ont constitué ung bally et que par le passé n’en ont jamaix rien heuz, tant seulement l’évesque, ne veult estre convenable à messeigneurs de leur permettre cela et est sur ce leur entier vouloyr qu’il démetent icelluy et s’il veulent avoyr ung officier de plus que par le passé, qu’il luy donnent ung aultre nom que ne serve point à la diminution de la seigneurie de mesditz seigneurs. Semblablement qu’il ne doigent apeller ny nommer la jurisdiction que mes honnorés seigneurs leur ont baillée ung ballivaige, ains ung ressort. » En conséquence, le 9 septembre suivant, dans le conseil des Deux Cents de Lausanne, « pour satisfeyre audit article et feyre pleysir auxditz seignieurs fust changé le nom du baillif et luy fust imposé le nom du Juge de Lausanne. » En effet le 20 novembre 1537 on constitue à Jean Constabloz, juge de Lausanne, un salaire de 100 flor. par an.
Pierre Viret.
1536. 16 novembre. — Fut ordoné pour le sa ayre et viez à meystre Pierre Viret, prédicant, à scavoer II chert de vyn, XVIII cop. de froment et XXX florins, ensenble sa demeuranse au covent de Sainct Françoys.
Voyez la note sur l’article du 5 novembre 1536. /18/
Notaires.
1536. 21 novembre. — En Conseyel ont esté ordonné et amis notayres jurés de la comunauté de Lausane et on promis et juréz de receupvoyer les instrumens selon le stille de Lausane et soub le seel de la comunauté, à scavoyer Honorables G. Gumin, P. Gautheys et Georgius dou Crest, lesquel ont juréz aux meyns du bourguomeystre de bien exercer ledit office de notariat à leurs honneurs et proffit de la ville.
La ville établit trois notaires. Ce droit fut confirmé par LL EE. en 1539. En 1758, sur trente notaires pour le baillage de Lausanne, douze pouvaient être nommés par la ville; mais ces douze notaires ne pouvaient stipuler que dans l’enceinte de la grande largition de 1548.
Estatu evangélicque.
1536. 22 décembre. — Le vendredi XXII de décembre, convoqué le Conseyel, Rière Conseyel et IIc, auxquieulx fut exposé par le bourguemeystre en la mode qu’il s’ensuyt : Magniffiques signieurs, vous estes yci invoqués pour cella que messeigneurs de Conseyel ont entendu que aulcuns particuliers, habitans de Lausane et bourgoyes, feysiont célébrer messe, baptiser enfans, fère mariage et aultres sérmonies papales, lesquelles sont différentes et répugnantes à la loy évangélicquez, à laquelle sommes conformés et à ycelle volons vivre; pourquoy fut par ledit signieurs bourguemeystre prié aux dit signieurs acistans vouloyer sur cella avoyer advis et avoyer leurs opinions.
Et alors fut conclud : Ordonéz de crier publiquemant /19/ que ung chescun feysant telles sérimonies papales, comme dessus, et ausi ung chescun allant hoïr messe hors du ballivage, ny allieurs, soyet tenuz poyer, à scavoyer X lib. pour une chescune foyes. Et fut crier le édit le jour que dessus.
Nous ne toucherons que très peu à l’histoire ecclésiastique de Lausanne après la Réformation, quoique, pendant un grand nombre d’années, les manuaux du Conseil en parlent souvent et longuement. On trouvera tous les renseignements nécessaires sur ce sujet dans les ouvrages de Ruchat et de M. Herminjard cités plus haut (page 3), et nous nous efforcerons de ne pas les répéter, en nous contentant de glaner çà et là des faits qui peuvent présenter quelque intérêt.
On a conservé aux archives de la ville le texte même de la publication faite dans les rues le 22 décembre 1536, deux jours avant l’Edit général de réformation pour les pays romands, émané de Messieurs de Berne. Voici ce texte :
« La forme de la publication et cries fayctes à Lausanne, le vendredi XXIIe de décembre 1536.
» L’on vous fayct à scavoyer de la part de nous trèshonorés signieurs de Lausanne, que touttes personnes ecclésiastiques ne soyent si hardis chanter ny célébrer messe dens la ville ny aux ressors, en publicque ny en secret.
» Item, que nulle personne, de quelque estat et condition qu’il soyt, ne debiez fère célébrer messe ny aller aultrepart pour l’oyr.
» Item, que persone ne debiez baptiser ny fayre baptsiser que celon la loy évangélicque, et que toutes sérimonies papales d’essy en avant debient cesser, et c’est sur la paynne de dix livres, sans mercir en avoyer. »
« Aultres cries publiées à Lausanne 1 .
» L’on vous faict à scavoyer, etc., que touttes personnes, de quel estat et qualité qu’il soyct, debiez vivre en payx, amour et /20/ fraternité les ungs avec les aultres et tenir les surtés suyvantes :
» Premièrement, que celluy ouz ceulx qui verront aulcungs soy oultrager par parolles, luy debiez dire : « Je vous metz la surté que vous ne vous oultragés plus; » et celluy transgresseur serat à la peynne de XXV florins. Et qui procéderat plus oultre jusques à effusio de sang, après la surté mise, seratz pour cinquante florins. Et celluy qui, après ladicte surté, tueraz quelcung, de celluy l’on en feratz justice, ny plus ny moyns que d’ung murtrier. »
« Aultres cries publiées à Lausanne.
» L’on vous faict à scavoyer, etc., que tous ceulx qui ont, tiennent, ouz debient, censes, rentes, diesmes, terres, possessions, vignies, prez, champs, maysons, chesaulx, curtilz et touttes aultres choses aultrefoys apertenantes à ung évesque, chappitre, clergie et chapelles de la grand église de Lausanne, que cella doibient notiffier à Monsr le baillif, commis de la part des magnifficques et redoubtés signieurs de Berne. »
Sainct Cierge.
Les petits faits suivants montreront que le nouveau culte ne s’introduisit que lentement à Lausanne, malgré les observations réitérées de Messieurs de Berne au Conseil de Lausanne. Voyez, entre autres leurs lettres du 24 août 1537 et du 14 juillet 1538, publiées par M. Herminjard.
Le 24 juillet 1537, dom André Ansel est emprisonné à la maison de ville pour certaines cérémonies papales faites dans sa maison le dimanche précédent. Décidé qu’il sera puni à teneur des cries; ce à quoi Ansel se soumet.
Le 13 novembre 1537, frère Jaques Daux (ancien moine dominicain), détenu en prison « à cause qui avoit chanté le jour feste Toussainct, en sa chambre. Comparu et à deux genouils en tere, demandant pardon de ladicte offense, et se submist à la miséricorde et ordonance de messeigneurs de Conseil de tout cella que sera ordoné et a promist de poyer ce que sera ordoné. »
Ceux qui ne pouvaient faire à Lausanne leurs dévotions /21/ suivant l’ancienne foi allaient dans ce but à Evian. Le Conseil de Lausanne y prêtait volontiers les mains. En effet, on lit dans les comptes ce singulier article : « Item plus, et délivrés la villie de paques, qu’il fut le 5 de avry 1539, par le comandemen de Munsr Bonaventurat Frontoné ad ung compagniun lequel aly Eviant pour savoer ceux que porroent alers à la pasperie le jour de paques. VIII sols. — Item plus, par le commandement de Munsr le banderet du Pont et de la Cita ad de compagnun lequel sun alers ad autre part pour semblable cas. XII sols. »
Du reste, les chanoines de la cathédrale qui s’étaient réfugiés à Evian y constituaient un corps, qui peut-être ne fut dissous que par le décès de la plupart de ses membres. En 1542 ils formaient encore un chapitre présidé par le prévôt, comme on le voit par l’acte suivant qui m’a été communiqué par M. l’abbé Gremaud, avec son obligeance habituelle, et qui est mentionné dans les Mémoires historiques sur le diocèse de Lausanne, par le P. M. Schmitt, tome II, page 374.
Anno millesimo quingentesimo quadragesimo secundo, die secunda mensis septembris, Petrus Fabri, utriusque juris doctor, canonicus ecclesie cathedralis Lausan. ac Sedun. presens suum testamentum disposuit. Vult sepulturam corporis sui fieri ante magnos fores ecclesie Aquiani vel in alio loco cimisterii eiusdem ecclesie. Item legat dnis preposito, canonicis et capitulo ad presens Aquiani residentibus centum scuta auri boni et casu quo dicti dni defficerent adimplere voluntatem testatoris, eadem centum scuta legat rectori ecclesie parochialis de Exchallens, et casu quo dictus rector defficeret adimplere voluntatem testatoris capitulis de Friburgo et Seduni. Item legat dominabus Sancte Clare nunc Aquiani residentibus decem florenos parvi ponderis. Item, exequutores sui testamenti ordinat Petrum Brisseti, canonicum ecclesie Lausan., Petrum Goujon et nobilem Perronetum de Molendino. In omnibus autem bonis suis heredes universales sibi fecit nobiles viros Franciscum, Anthonium et Johannem Fabri eius fratres. Acta Aquiani, in domo habitationis eiusdem dni testatoris. (Arch. de l’évêché, à Fribourg. Extrait.) /22/
Heures du sermon et du Conseil.
1537. 15 mars. — Fut conclud debvoer sonner le sermon à VI heures de matin et que ycelluy sermon ne doibiez durer que une heure, et que demie heure devant que le sermon soyet parachevez que l’on doibiez sonner le conseyl, et par aynsi entrerons Messrs en conseyl à sept heures.
Articles de Messieurs de Berne.
1537. 23 avril. — Furent convoqués le conseyl et IIc, et c’est à l’occasion de serteins articles aporté de Berne par Messrs nous commys du dit Berne, lesquieulx articles furent leuzt devant lesdit IIc, esquieux estoyent bien gros et extrêmes contre nous liberté. Entre tous les aultres estoyet contenuz que lesdit de Berne estiont content nous leysé les chappes de Nostre Dame et que fussions entenuz rendre ycelles à iceux qui pourriont justiffié estre à eux, selon la réformation de l’évangille. Et fut suppliéz à Messrs de Berne par nous commis nous relaxer et remettre les trésors Nostre Dame, lesquieulx yceulx de Berne aviont pris en leurs meyns; laquelle requeste nous futz totalement dénéguée, comant soy conste aux articles desdit de Berne. Pourquoy fut conclud et totalement délibéré non accepter lesdit articles, mès dresser une anbassade pour aller à Berne soy opposé et prier lesdit de Berne nous layser en nous liberté et franchises.
Et fut bailliée la charge à Messrs de Conseyl, de avoyer advis et bien consulté lesdit articles pour feyre les responses sus yceulx. Fut en oultre ordoné et conclud non prendre /23/ lesdites chappes jusques au retourt de nous anbassadeurs de Berne.
On a vu (M. D. R. XXXVI, pag. 284 et suiv.) que, pendant les négociations qui précédèrent la largition du 1er novembre 1536, les Lausannois firent des tentatives fréquentes et à peu près infructueuses pour améliorer les conditions que voulait leur imposer le vainqueur. Ils finirent par agréer la largition, mais après avoir accepté en bloc toutes les exigences de Messieurs de Berne, ils essayèrent, près de deux années durant, de resaisir en détail quelques-uns des privilèges qu’ils avaient perdus.
Le manual revient, à diverses reprises, pendant les années 1537 et 1538 sur ces efforts des Lausannois. On a donné dans le texte un de ces articles du manual comme spécimen, mais on s’est abstenu d’insérer les autres à leur date, vu qu’il serait fort difficile de les faire comprendre sans répéter constamment les mêmes explications. Il a semblé préférable de faire un narré succinct de ces débats et d’y introduire des citations du manual et d’autres documents, à titre d’éclaircissements.
Outre plusieurs questions secondaires, comme le droit de sceau des notaires, les amendes pour délits contre la réformation, les monstres ou revues militaires, etc., les points sur lesquels portaient les réclamations des Lausannois étaient, comme avant la largition, la juridiction et les biens ecclésiastiques, auxquels vint se joindre un troisième point : la rupture de la combourgeoisie avec Fribourg.
1º La juridiction. Par la largition Messieurs de Berne avaient accordé aux nobles et bourgeois de Lausanne « haute, moyenne et basse juridiction sur toutes causes tant civiles que criminelles » dans un certain territoire, mais en exceptant les trois paroisses de La Vaulx, Lutry, Villette et Saint-Saphorin et la paroisse de Corsier qui devaient ressortir directement à Messieurs de Berne. Le motif de cette exclusion était tout historique : ces paroisses avaient fait partie du domaine temporel de /24/ l’évêque et le Conseil de Berne se substituait simplement à ce prélat dans cette partie de sa seigneurie, comme il l’avait fait à Villarsel, Avenches et autres lieux.
Cependant la largition ajoute : « Il est aussi pourparlé si lesdictes paroisses, ensemble Corsier, ont quelque debvoir à une ville de Lausanne, cela soit en suitte de guerre, ou que lesdicts de Lausanne eussent cognoissance et adjudication sur lesdictes quattre paroisses, cela ne veulent mesdicts seigneurs oster ès dicts de Lausanne, mais leur laisser comme par le passé. »
C’est en se fondant sur ces paroles de la largition que les Lausannois font des réclamations réitérées au sujet de la juridiction sur les paroisses de Lavaux.
En effet, à la fin de 1536 ou au commencement de 1537, le Conseil de Lausanne présente aux très puissans, magnifiques et redoubtés seigneurs de Berne, une supplique sur divers articles qui leur avaient été apportés par des députés bernois. On y lit : « Sus le second qui faict mension des appel des quatre parroches de la Vaulx, respondent ceulx de Lausanne et humblement supplient à messieurs de Berne les laysser joyr de cella qu’il ont heu de tous temps qui n’est mémoyre du contrayre, c’est à scavoir que à ceulx de Lausanne appertient la cognoiscance et adiudication en cas d’appel ès causes civiles sus Corsiez et les aultres troys parroches, et daventage sus lesdites troys parroches, c’est asscavoir Sainct Saphorin, Villette et Lustriez ont cognoiscance et adiudication tant en causes civiles que criminelles, et ceci et vray comme l’évangile. Car c’est assez à ceulx de Lausanne de perdre les appel de Lucens, Villarsel, de Folz, Avenche, Bulle et aultres, lesqueulx sont de Lausanne et la ville hast cognoiscance et adiudication en cause d’apellations et civiles. (Archives cantonales, Onglets des bailliages, Lausanne, A, page 125.)
A quoi le Conseil de Berne répond le 18 avril 1537 : « A cause de la congnoissance et adiudication que prédicts de Lausanne prétendent avoyr en choses et causes civiles et crimineles sus les quatre paroiches en La Vauld : Disent messeigneurs ainsy, que lesdits de Lausanne n’ont aulcugnement faict apparoistre /25/ que telle prééminence leur appartenist, voyre bien à ung évesque, par devant le balliff et officiers duquel les adpellations tomboyent et non point par devant le burguemeistre et conseil de Lausanne. Avecq ce mesdits honnorés seigneurs se sont expressément réservé en l’arrest faict, assavoyr les quatres paroiches, avec leurs apartenances, ensemble l’évesché, et ausdits de Lausanne tant seulement laissé haulte, basse et moyenne jurisdiction rière et entre les boynes et limites que l’on leur érigera; deans lesquelles limites ne sont aulcugnement lesd. quatres parroiches comprises ny inclavées, ains toutellement exceptées. De cousté ce, mesdits très honnorés seigneurs ont donné lettres aux troys parroiches, Lustry, Villete et Sainct Saphorin, corroborées de leur seaulx, de laisser desmeurer une chescune de cousté ses bonne coustumes, us, libertés et franchises; semblable promesse a estée aussy faicte à ceulx de Corsye. »
Sur le reçu de cette réponse, qui touchait encore d’autres points tels que le trésor de la cathédrale et la combourgeoisie avec Fribourg, les Lausannois se réunissent le 23 avril, comme on le voit par le texte, et décident d’envoyer une ambassade à Berne. Mais le 24 juin ils n’ont encore pris aucune décision, car ce jour-là on voit paraître dans le conseil des Deux Cents de Lausanne « deux comys pour la part de magnifiques seigneurs de Berne, demandant la response d’aulcuns articles par eux à nous bailliés. »
Enfin, au mois de juillet, le bourgmestre et Conseil de Lausanne répliquent à Berne… « Aux derniers articles donnés par mesditz seignieurs de Berne aux comis desditz de Lausanne se contient que lesdits de Lausanne n’en ont poynt fayt apparoystre, et à ceste cause mes dits seignieurs de Berne ont voulsu que la réserve par eulx faycte en leur largition des quattres parroches demeoure en son entier, nonobstant que apprès ladite réserve soyt escript que mes dits seignieurs de Berne leyssent auxdits de Lausanne comme par le passé tel debvoyer qu’il soloyent avoyer sur ceulx de La Vaulx, mesmement en cognoyscance. A cetz respondent ceulx de Lausanne que aultrefoys soy sont offert et encore s’ouffre prouver et fayre apparoystre que de tous /26/ temps est notoyre qui hont heu la cognoyscance entière, plénière et pour le tout, ès causes d’appellations, sur les quattre parroches : Lustrie, Villette, Sainct Saphorin et Corsiez; et semblablement ont heu la cognoysance sans aultre, en cas de crime, sus les troys parroches : Lustrie, Villette et Sainct Saphorin. Et secy soy ouffrent prover comme dessus, et jamays ne se proveratz que l’évesque heut poynt de cognoyscance sus les choses nommées. » (Archives de Lausanne, C, 18.)
Cette réclamation fut portée à Berne par Aubert Loys et Pierre de Saint-Cierge, ambassadeurs du Conseil de Lausanne.
Pour terminer le différend, LL. EE. firent quelques concessions dans leur réponse du 21/22 juillet, dont voici la teneur pour ce qui concerne la juridiction : « Premièrement ainsy que ceulx de Lausanne paravant ont entendu et tousiours allégué que les nobles et bourgoys de Lausanne de tout temps ayent heuz la congnoissance des appellations des quatre parroiches : Lustry, Villete, Sainct Saphorin et Corsy; semblablement la congnoissance sus les maléfices et cas criminels de Lustry, Villete et Sainct Saphorin, soy offrant cela fayre apparoyr, combien qu’il n’ayent cela iusques ici desmonstré. Ce néanmoings veulent mes honnorés seigneurs fayre et croyre le millieur et leur oultroyer qu’il puissent congnoistre sus cas d’apellations venantes de Lustry, Villete et Corsy, en ceste sorte nomméement que icelles viennent par devant le ballyff de messeigneurs audit Lausanne, icelluy porra et debvra adoncques prendre et eslire avecq luy quatre hommes des nobles et bourgoys, lesquieulx qu’il luy playra, pour congnoistre et sentencer sus telles causes d’apellations; touteffoys la parthie que sera grévée pourra en oultre apeller par devant les députés pour ouyr telles appellations. » (Archives de Lausanne, C, 19.)
Cette décision du Conseil de Berne fut l’origine de la Cour ballivale et de la Cour d’examen des criminels qui siégeaient au château de Lausanne. La Cour ballivale était composée du bailli, du lieutenant ballival, de trois assesseurs et d’un secrétaire, tous à la nomination du bailli. La Cour d’examen des criminels était composée du lieutenant ballival, des trois assesseurs /27/ ballivaux, du secrétaire ballival et de quatre membres du Conseil de Lausanne 1 .
Ainsi ce point de la juridiction fut réglé pour le moment.
2o Les biens ecclésiastiques. Par la largition du 1er novembre 1536, Messieurs de Berne s’étaient expressément réservé les biens de l’évêché, du chapitre et du clergé de la cathédrale, mais avaient cédé à la ville de Lausanne les biens des cinq paroisses de la ville et des couvents de Saint-François, de la Madeleine, de Montheron, de Bellevaux, de Sainte-Catherine du Jorat et de Saint-Sulpice, à condition que la ville fournit les cures de prédicants et pensionnât les moines et les religieuses qui accepteraient la réformation. Messieurs de Berne avaient ajouté ces mots « S’ouffrantz mesdicts seigneurs de Berne que, quant le cas adviendra, que le chappitre et le clergé seront par décès abolis de non point oublier lesdictz de Lausanne, ne tenir leurs mains serrées envers eux. »
Les Lausannois, loin d’être satisfaits des importantes donations de biens ecclésiastiques par lesquelles on avait acheté leur /28/ soumission, ne cessent d’importuner le Conseil de Berne pour obtenir une plus large part des biens d’église et de lui rappeler sa promesse de ne point « tenir ses mains serrées. »
Déjà, en novembre 1536, lorsqu’il avait commandé aux gouverneurs des villages du ressort d’apporter « leurs callises, biens d’égliesez, ausi inventayre des biens immeubles des dictes cures, ausi rendeyres des ditz biens, » le Conseil de Lausanne avait donné le même ordre aux gouverneurs de Crissier et de Saint-Germain. Or ces deux villages étaient bien du ressort de la ville qui y avait certains droits de juridiction; mais leurs cures et biens ecclésiastiques dépendaient de la cathédrale. Aussi, dès qu’ils eurent connaissance de cet empiétement, Messieurs de Berne écrivirent-ils au Conseil de Lausanne :… « Item, la cure de Crissie, qui se meult de chappitre, et la cure Sainct-Germain, qui se meult de l’évesché, entendent messeigneurs que icelles leur apertiennent et que ceulx de la ville n’y ayent droict quelconque; pourquoy se dépourteront de l’admodiation qu’il en avoient faict. »
Messieurs de Berne étaient pleinement dans leur droit aux termes de la largition; toutes les réclamations et supplications du Conseil de Lausanne furent inutiles.
En même temps, Messieurs de Berne rappellent que les Lausannois se sont emparés jadis de l’hôpital qui appartenait au chapitre, mais « sy laissent toutteffoys mesdicts seigneurs tel ainsin estre, entant que il aissent sy bon regard que leurs povres soyent deuement pourveuz. » (Arch. canton. bailllage de Laus. No 3318.)
Cette dernière phrase incite les Lausannois à demander des biens d’église pour les pauvres, vu qu’ils n’en ont pas assez.
Voici ce qu’ils exposent au Conseil de Berne : « Nonobstant que l’hospital de Lausanne et par conséquent la mise de l’hospitalier par justes raysons apertienne à ceulx de Lausanne, toutefoys mercient très humblement mesdictz magniffiques signieurs de Berne du bon voloir qu’il ont en cella envers ceulx de Lausanne, lesqueulx ont bon voloir sustenter leurs povres des biens d’icelluy, mès pource que yceux biens sont petis et que il /29/ ne peuvent bonemant leur bon voloir rendre envers leurs povres, vouldroien bien prier, comment de bon cueur prient lesdictz magn. signieurs de Berne, entiers et bons sustentateurs des povres, provoir ledict hospital de quelques biens ecclésiastiques de Lausanne, à ycelle fin que ceulx de Lausanne puyssent mieulx rendre leurs debvoirs auxdictz povres, et envers Dieu cella leurs seroit rémunéré, comment l’évangile l’acteste. » (Arch. cantonales, ongl. des balliages. Lausanne, A, page 125.)
Le 15 février 1537, arrivent à Lausanne les députés du Conseil de Berne, chargés d’exécuter l’édit de réformation et disposer des biens ecclésiastiques du Pays de Vaud. Ils y restent jusqu’au 27.
On a déjà raconté (Le trésor de l’église cathédrale de Lausanne, 1873, in—8) comment ces députés forcèrent les chanoines et le Conseil de Lausanne à livrer au bailli les meubles et ornements de l’église de Notre-Dame. Tous ces objets furent expédiés à Berne, malgré les réclamations réitérées des Lausannois. Il paraîtrait, d’après les documents, que cette expédition se continua pendant plusieurs mois.
A mesure que le bailli, Sébastien Nægueli, exécute les ordres qu’il a reçus et procède au démeublement de la cathédrale, le Conseil de Lausanne fait de nouvelles réclamations, comme le témoigne la lettre suivante qu’il reçoit des députés de Berne, datée d’Aubonne, où ils sont en passage : « Nobles, saiges, prudans seigneurs, singuliers amys et treschiers combourgeoys. Nous avons entendu ce que nous avés escript à cause de nostre ballif, touchant les orgues et gennes de fiert (chaînes de fer) qu’il a ostées de l’esglise Nostre Dame, que ne sçavés croyre que cela soyt par nostre commandement, pansés aussy que cela soyt contre l’arrest prins par nous jusques à nostre retourt. Surquoy vous respondons, que cela que nostre dit balliff en cest endroict a faict, qu’il a de commandement de nous; n’entendons aussy cela estre contre ledit arrest, car une foys cela appartient à nous supérieurs à cause de la réserve que se sont faict, voyre qu’entendons qu’il doige passer oultre, veuz qu’il appartient à nous /30/ dit supérieurs. Sy touttefoys vouliés aller pour ce à Berne, comme disés, aurés conseilz sus nostre response, que cela faictes sçavoyr à nostre dit bally, affin saiche nous et luy excuser. De cousté ce, nous entendons comme gens particuliers et des principaulx facent menasses de fayre injure à nostre dit balliff, pourquoy vous advisons d’y bien penser et considérer la conséquence, car sy par vous ou les vostres luy debvoyt estre fayt desplaysir, cela ne seroit sans rémunération.
» Datum Aulbone, VIIª martii 1537.
» Le bourcier, conseilliers et commis de Berne. »
(Arch. de Laus. EE, 797, lettre missive originale.)
Cette lettre nous apprend que les esprits étaient très montés à Lausanne. Le 22 mars le conseil des Deux Cents se réunit pour délibérer sur toutes les difficultés pendantes avec Berne et envoie une ambassade dans cette ville.
Je n’ai pas retrouvé le texte des nouvelles réclamations lausannoises, mais on peut s’en faire une juste idée par la réponse du Conseil de Berne, laquelle nous est parvenue, et par l’article du manual cité dans le texte. Voici ce que le Conseil de Berne répondit le 18 avril: « Ainsy qu’il (les Lausannois) ont désiré leur laisser la jurisdiction que la grand esglise de Lausanne az et sus les gens d’église et sus les biens et personnes que sont en leurs ressort, aussy les biens, censes, rentes et revenus d’icelle église. Messegnieurs leur ont cela dutout dénégué, et sur ce advisé que ceulx que par le passé ont maintenuz icelle église qu’il le facent par l’advenir aussy. Aussy que ne doige estre faict aulcung empesche à leur officier, quant il fera ouster les terlis de fert en ladite grande église.
» Quant au second, que lesdits de Lausanne ont desiré leur laisser le trésor d’icelle église qu’il aviont retirés en leurs mains. Mes honnorés seigneurs leur oultroyent les chappes, chasubles et tunicques que l’on ne pourra jouste la réformation retirer, ains tout le desmeurant desmorera à mesdits seigneurs.
» Tiercement, touchant la chapelle en la mayson de l’évesché. Mes honnorés seigneurs ne leur sçayvent cela oultroyer et le /31/ veulent retenir à eulx, car il n’ont oultroyé auxdits de Lausanne sinon seulement la mayson 1 ».
L’explosion de colère que cette réponse produisit à Lausanne et dont on trouve des traces dans le manual du Conseil ne servit de rien. Il fallut se résoudre à laisser partir tout le trésor de la cathédrale, puisqu’on ne voulait pas accepter « les chappes de Nostre Dame. »
Depuis ce moment on ne trouve plus de traces de requêtes au sujet des biens meubles de la cathédrale, mais les supplications des Lausannois au sujet des immeubles ecclésiastiques recommencent avec plus d’insistance. Au mois de juillet ils redemandent les cures de Crissier et de Saint-Germain et ils ajoutent les requêtes qui suivent :
« Et pour cest que en la bone largition par mes magniffiques seignieurs de Berne à ceulx de Lausanne fayct, est contenuz que quant le bien de chappitre et clergie seroyent en leurs mayens devenus, que d’iceulx n’auriont poyent leur mayens closes; pour quoy supplient très humblement l’excellence de mesdit seignieurs avoyer regard sus la grose povreté à eux devenuez pour l’absence desdit ecclésiastiques lesquieulx despendrent tous leurs biens à Lausanne au nourrisement tant des povres que riches, et yceulx recompenser et feyre quelque bone largition desdit biens ecclésiastiques.
» Les evesques, le chappittre et la clergie avoyent et fesoyent beaucoup d’aulmones et donnes fondées et rentées aux povres de Lausanne et aultres, dont ceulx de Lausanne prie l’excellence de mesdits seignieurs que leur pleysir soyt sur cest en user comme le passé, ou l’applicqué de sorte que les povres n’y soyent pas obliés 2 . /32/
» Finablement, supplient lesdit de Lausanne la magnifficence de mes magniffiques seignieurs leur layser la grande église de Lausanne avec des biens d’icelle pour l’entretenir, car vous seignieuries peuvent présumyr que cest seroyct gros préjudice et deshoneur que ycelle tumbasse en ruyne, et de cella vous prient et supplient trèsaffectueusement. » (Arch. de Laus. C, 18.)
Le Conseil de Berne se contente de répondre de bonnes paroles sans s’engager à rien :
« Quant au sisième (article), ainsin que ceulx de Lausanne en leurs proposites ont allégué comme les évesques, chapitre et clergy donnoyent beaucoup de aulmones et de donnes, priant icelles ne vouloyr laisser perdre; veulent mes honnorés seigneurs que leur ballyff s’informe quanteffoys l’année sont esté faictes telles donnes ou confraries et combient de blé l’on y a communéement usé, puis qu’il en advertisse messeigneurs pour y avoyr advis compétant.
» Quant au huitiesme, que lesdits de Lausanne ont requis d’avoyr souvenance d’eulx plus oultre aux biens de chapitre et clergy, en considération que en l’outroy faict messeigneurs se sont déclayrés, quant les prestres seroyent deffally, qu’il auriont la main ouverte; disent mesdits honnorés seigneurs ainsin que la deffaulte n’est pas ancores du tout advenue, et avecq ce il ne peulvent pas ancores sçavoyr que c’est des biens de chapitre et de la clergy et qu’il peuvent valoyr, pourquoy présentement n’y sçayvent aultre chose que fayre.
» Quant au dixiesme, que lesdits de Lausanne ont prié de leur laisser la grand esglise de Lausanne avecq les biens d’icelle, mesdits honnorés seigneurs se veulent devant tout informer de la valeur d’iceulx biens, enaprès besoigner selon toute rayson et avecq iceulxdits de Lausanne en apointer. » (Archives de Lausanne, C, 19.)
Les Lausannois durent se contenter pour le moment de ces promesses un peu vagues et même l’année suivante on les obligea de déclarer catégoriquement qu’ils ne réclameraient rien au delà de ce qui leur avait été accordé par la largition, comme /33/ on le verra dans la correspondance au sujet de la combourgeoisie avec Fribourg.
Au cours de ces négociations Messieurs de Berne établirent un sommaire des revenus ecclésiastiques concédés par la largition. Ce sommaire, qui est conservé aux archives cantonales (bailliage de Lausanne, No 3358) n’est pas daté, mais on en peut fixer la date à l’an 1538. En effet, le ministre Comte, présenté le 31 janvier 1538, y est nommé; Saint-Sulpice est déjà en possession de la ville; il n’est pas question des biens mis à part pour les pauvres en 1539. Dans cet état, Messieurs de Berne font entrer les revenus de l’hôpital, que la ville de Lausanne avait accaparés en 1528, et qu’ils considèrent comme étant une cession de leur part à la ville, puisqu’ils n’ont point réclamé ces biens qui provenaient du chapitre de la cathédrale.
La note en allemand en tête du sommaire paraît être de la main d’un des commissaires bernois envoyés, en 1537 et 1538, pour régler les affaires d’église dans le pays conquis. Cette note est sur une colonne à part, au commencement de quatre pages in—folio. On peut supposer que le commissaire envoya ce papier à Berne ou au bailli de Lausanne, avec prière d’établir ce compte pour sa gouverne.
Le compte lui—même est d’une autre main. On remarquera qu’il est calculé tantôt en livres à 20 sols, tantôt en florins à 12 gros ou sols.
Une troisièmé main a écrit l’intitulé suivant : « Le sommaire du revenu que nouz Seigrs ont concédé à la ville de Lausanne, qui vault, toutes charges portées, à lad. ville envyron 2000 fl. »
« Die von Losen begärt diewyll die clergy durch die von der statt vergabet und gestifftett und pitten sy das man ir armen damit bedencken und niene hin gan Aulcrest noch anderswo hin wysen, sonders in der statt lassen.Innamen des Spitals zu Losenn, vom 33 jar, thut 1 /34/
An den. CXXXII lib. VI s. IX d.
An weitzen XIX mut III cöpff I bichet.
An roggen XV mut IIII kpf I quart.
An haber XX mut X kpf I bichet.
An win XVIII vass X sester.
» Die admodiatz des closters von Monteron giltett über allen kostenn die münch zu erhallten und uber alles diss jars XIIIc lib.
Der münchen ämpter hierinne ouch unvergriffen, sampt der pidance, löb und ander zuväll.
Sant Sulpitzius giltet zadmodiatz, VIc flor.
Sant Frantzen closter, IIIcX flor. ouch zadmodiatzen.
Sant Magdalenen closter, IIIIcLXXX flor.
Das closter Bellevaulx, IIc flor.
Sant Kathrinen kloster giltet LXXXVIII flor.
Sant Peters pfarr, LXXXX flor.
Sant Anthonis capell, LXXVIII flor.
Sant Niclaus und Margreth in sant Laurentzen pfarr, X fl.
Die pfarr Sant Laurentzen geltenn IcL flor.
Sant Niclaus capell gestifft in sant Laurentzen kilchen giltet XXXVIII flor.
Aller Seelen capell in gedachter kilchenn, XLII sol.
Sant Kathrinen capell, ouch in bemeldter kilchen, XXI flor.
Sant Alexius capell, XXI flor.
Sant Steffans pfarr, XL flor.
Sant Catherinen capell in sant Steffans kilchenn, X flor.
Sant Gregorien capell in derselben kilchen, XXXIIII flor.
Unser frouwen capell in der kilchen, XXX flor.
Sant Paulus pfarr, IIIcXXX flor.
Sant Anthinos capell in sant Pauls kilchenn, LXXXVIII fl.
Sant Bastians capell in sant Paulus kilchen, IcXXVIII flor.
Sant Peters capell in sant Paulus kilchen, I flor.
Sant Clements capell ouch in Paulis kilchen, V flor.
Die pfarr des heilligen crützes, IcXL flor.
» Denne thut das so inen daran abgat so mangelhalb der /35/ erkandtnussen nit mag inzogen werdenn, das sy nit können berichten.
An den. IIcIX lib. III s. X den.
An weitzen XV mut V kpf III quart.
An win V mut VII sester VIII mas.
» Denne gäben sy den predicanten Vireto und Cosmes :
An den. VIc flor.
An weitzen II mut.
An win II vass.
Dem hellffer IIc flor.
Dem predicanten von Morrens Ic flor.
» Denne sind sy dem spitalmeister für ein mal schuldig blibenn :
IcLXXXXIIII lib. thund IIIc und XXIII flor. IIII sol.
Den sigristen und wächter Ic flor.
» Sommarum alles innemens :
An den. IIIImIIIcXXVII lib. IX den.
An weitzen XIX mut III kpf I bichet.
An roggen XV mut IIII kpf I quart.
An haber XX mut X kpf I bichet.
An win XVIII vass X sester,
» Sommarum alles ires abgangs, ussgäbens und der predicanten, hellfferen, sigristen und spitelmeisters obstand und ussgäbenns :
An den. Im Vc XXXII flor. VII sol. X den.
An weitzen XVII mut V kpf III quart.
An roggen nut.
An haber nut.
An win V vass XIII sester VIII mas.
» Gegen einandern gelegt und abzogenn blipt denen von Losen über :
An den. IImVIIcLXXXXIIII flor. IIII sol. XI den.
An weitzen I mut IX köpff III quart.
An roggen XV mut IIII köpff I quart. /36/
An haber der gat uff mit dem zug.
An win XII vass XIIII sester XXIIII mas. »
3o Combourgeoisie avec Fribourg. Ce n’est pas sans une certaine satisfaction qu’on passe de ce débat sur les biens ecclésiastiques, dans lequel les Lausannois firent preuve de tant d’âpreté et de si peu de dignité, à une autre question qui s’agitait en même temps, où ces mêmes Lausannois se montrèrent de fidèles et chaleureux amis et où ils ne cédèrent qu’à contre-cœur à la raison du plus fort. Il s’agit de la rupture de la combourgeoisie avec Fribourg.
On se souvient (M. D. R. XXXVI, 287) qu’au mois d’août 1536 le Conseil de Berne avait clairement fait entendre aux Lausannois qu’il ne leur serait pas permis de faire « alliance, bourgeoisie, intelligence avec prince, seigneur, ville, communauté ni personne qu’il soit. »
Pendant plusieurs mois il ne fut plus question de cette clause et le Conseil de Berne paraissait l’avoir oubliée, lorsque subitement, le 18 avril 1537, à la fin d’un long message concernant la juridiction, les biens ecclésiastiques et plusieurs autres points, il ajouta cette phrase :
« Il est aussy le vouloyr et intention de mes honnorés seigneurs que ceulx de Lausanne quittent à messeigneurs de Frybourg la bourgeoysie qu’il ont avecq eulx et qu’il la leur rendent. »
Cette demande était si pénible aux Lausannois qu’ils ne répondirent pas à Messieurs de Berne, mais ceux-ci envoyèrent une députation à Lausanne pour demander une réponse. On lit dans le manual que devant le conseil des Deux Cents comparurent, le 24 juin, « deux comys pour la part de magniffiques seigneurs de Berne, demandant la response d’aulcuns articles par eux à nous bailliés, entre lesquieux article le dernier feysant mention, nous admonestant leyser et abandoner la bourgoysie laquelle avons avec messieurs de Fribourg. Sus lequel dernier article fut conclud et totalement résolut par les susdit ycelle bourgoysie demeurer en son estre. » /37/
L’ambassade lausannoise envoyée à Berne au mois de juillet répéta ce refus par écrit en ces termes : « Tant qu’il touche à la bourgoysie de Fribourg, ceulx de Lausanne le leysent aynsin commant en hatz esté faicte responseaux magniffiques seignieurs commis. » (Arch. de Laus. C, 18.)
Le 22 juillet, le secrétaire de Berne remit aux envoyés lausannois le résultat des délibérations du Conseil sur ce point et sur plusieurs autres. On lit dans cette pièce : « … Concernant de rendre et quitter la bourgoysie à ceulx de Frybourg : Depuis que avant aulcungs ans, prédicts de Frybourg ont voulsu aus dicts de Lausanne rendre icelle bourgeoysie, dont en sont esté tenues aulcunes jornées à Payerne; semblablement que lesdits seigneurs de Frybourg avant peuz de jours, ainsin qu’il ont escript ausdits de Lausanne à cause des moennes de La Magdalène, en leur missive ilz n’ont point nommés ceulx de Lausanne leurs bourgoys; avecq ce que lesdits de Frybourg ont rendu et quitté à ceulx de Payerne une perpétuelle alliance qu’il avoyent avecq une ville de Payerne, en leur trametant les lectres d’alliance; semblablement ont aussy faict ceulx de Avenche; ne doibvent fayre aulcune difficulté de quitter une telle bourgoysie que n’a valeur sinon l’espace d’aulcungs ans. Et s’il advenoyt que, à cause de ce, l’on les voulsit blasmer ou imposer aulcune chose que atochat à leur honeur, mes honnorés seigneurs les deffendront et excuseront de cela. (Arch. de Laus. C, 19, pièce originale de la main du secrétaire de Berne. Samml. der ältern eidgenoss. Abschiede, Band IV, Abtheil. I, C., page 859.)
Au mois de décembre, les Lausannois envoyèrent une nouvelle ambassade à Berne, pour exposer encore une fois leurs réclamations au sujet de tous les points en dispute : la juridiction, les biens ecclésiastiques et la combourgeoisie avec Fribourg. Le Conseil de Berne répondit péremptoirement qu’il s’en tenait à la largition et qu’il exigeait la rupture de la combourgeoisie avec Fribourg. Voici les termes de cette réponse, telle qu’elle est consignée dans le manual de Lausanne :
» Avoyer premièrement mes très redoubtés seigneurs du Petit Conseyl, consequemment aujourd’huit messeigneurs du Grand /38/ Conseyl, entendu les responses lesquelles les ambassadeurs de Lausane ont par escript et de bouche fayct sus les articles que dernièrement leurs furent donés par escript, soy sont mes très redoubtés seigneurs résolus comant s’ensuyt :
» Premièrement, que veulent présentement sçavoer si lesdit de Lausane soy veulent contenter de la bénigne et gracieuse largition à eulx fayct par messeigneur du Petit et Grand Conseyl et à eulx bailliés par escript, ouz non, affin que les limites des élargissemens soyent fayctes et sus le totaige dresser lettres et seaulx.
» Secondement, que doibient rendre la bourgoysie à messieurs de Fribourg.
» Tiercement, ont mesdit seigneurs adviséz et se après regarder les aultres articles et ordoné sus yceulx, en après envoyer par escript leur décision et vouloyers aux seigneurs de Lausane. Actum XXIIIIa decembris anno supra 1537. »
Au reçu de ce message de Berne, le petit et le grand conseil de Lausanne se réunirent le mardi 22 janvier 1538 et envoyèrent la réponse suivante :
« Magniffiques, etc. Nostre treshumbre recomandation prémise. Nous avons receupt vous letres à nous par vostre héraulx donées, lesquelles font mention que avés regret de cest que plustout ne vous avons rescript la response de cest que par escript et ausi par nous anbassadeurs dernièrement nous rescriptes, qui est que Vous Excellences voulont sçavoer sil nous voullons contenter de la bénigne et gratieuse largition par la dit vostre excellence à nous faycte; ausi que debions rendre la bourgoysie à messeigneurs de Fribourg.
» Et pour cest que en vous sus dictes letres nous admonestés vous envoyé la responce, il vous playrat scavoer que la susdite bénigne et gratieuse largition acceptons, vous remerciant très humblement des biens en ycelle par Vous Excellences à nous faycts. C’est toutefoyes que les réserves par vous excellences fayctes ne soy debient entendre ny extendre envers nous ny nostre postériorité, que estiont telles que sus nous avoyet ung évesque de Lausane pendant qu’il estoyet souverayn. Qua (car) /39/ par ladicte largition nous n’entendrons dyminuer ny renoncer à nous premières et antiennes libertés, droyes, franchises, tant escriptes que non escriptes. Et seci supplions et entendons estre inceri en l’instrument que sus cest soy ferat de ladicte largition.
» Quant à la bourgoysie de messeigneurs de Fribourg, il playrat à Vous Excellences soy contenter de laz responce desiaz par nous anbassadeurs à vous faycte et c’est pour la rayson qui est tieulle. Premièrement, quant à nostre salvation et honneur mondeyn, ne povons ycelle bourgoysie ronpre, laquelle est fermée par serement, par vostre ayde et voulloyers, à nostre gros pourchatz, cellon Dieu et reyson et sans domaigoz d’aultruy. Datum XXIIa Januarii, etc., anno, etc., 1537, pris à l’Anontiation. » (Manual.)
La réponse du Conseil de Berne ne tarda pas. Elle fut péremptoire et hautaine, comme l’on pouvait s’y attendre. En voici la teneur, en date du 7 février :
« Nobles, sages, etc. Nous avons oyés vous letres concernantes la responce que vous fayctes sus nostre dernière rescription, lesquelles ne sont à nostre contentement.
» Premièrement, tant qui touche le don que vous avons fayct, est cella exprimé en bonne escripture et à cest nous arêtons, sans il adjoter ny derroguer en sorte que soyet, et sans feyre aultre déclaration de vous franchises et libertés.
» Quant au second article, touchand la bourgoysie de Fribourg, layssons entièrement en son estre coment par avand, à sçavoer que icelle debiés rendre et quicter, vous remonstrans que vous mesmes à ycelle avés renuncé par le traictie de la susdite largition, en laquelle avons réservé, entre aultre choses, la suyte de guerre; par aynsin ladicte bourgoysie est nulle. Pour autant ne faycte faulte de remettre sans dillations les letres de ladicte bourgoysie à nous combourgoys de Fribourg; car si cella ne fayctes incontinent, vous feysons inhibition expresse et comandement en tieul endroyct requis, de cesser tous exercices et administrations que vous avions par la susdite largition oultroyées. Sur ce vous sachés adviser. Datum VII februarii anno 1538.
» L’advoyer, petit et grand Conseyl de Berne. » /40/
Voyant que le vainqueur était décidé à user de son droit avec la dernière rigueur; que d’ailleurs la combourgeoisie avec Fribourg serait une lettre morte en présence de la puissante opposition de Berne; enfin, qu’à vouloir résister plus longtemps ils risquaient de perdre les avantages matériels par lesquels on avait payé leur soumission, les Lausannois cèdent. Le conseil des Deux Cents de Lausanne se réunit le mardi 12 février et nomme quatre ambassadeurs : Jean de St Cierge, Jean Louis Loys, François de Plaict et François Sauveys, auxquels il donne « playnnière et entière puissance de povoyer trecter, ronpre et anicheller la bourgoysie de Fribourg. » Les députés lausannois reçoivent pour instructions d’aller d’abord à Berne pour demander à LL. EE. l’assurance que Lausanne serait garantie contre toute querelle ou molestation de Fribourg au sujet de la rupture de la combourgeoisie, et de refuser absolument cette rupture si cette garantie n’est pas accordée.
Il paraît que les députés reçurent toutes les assurances nécessaires, car le lundi 25 février 1538 ils se présentent devant le grand Conseil de Fribourg et exposent qu’ils sont dans la nécessité de rompre la combourgeoisie. Le Conseil de Fribourg, averti par une lettre de Berne, en date du 20 février, consent à cette rupture. Le Conseil de Berne retourne aux Fribourgeois leur sceau arraché à son exemplaire de l’acte solennel et redemande le sien. Les députés lausannois se rendent à la chancellerie avec le petit conseil et là ils remettent solennellement le sceau de Fribourg dont était muni l’acte conservé aux archives de Lausanne, et reçoivent des mains du chancelier le sceau de leur ville qu’ils avaient apposé avec tant de joie un peu plus de douze ans auparavant.
On peut voir encore aux archives de Lausanne (EE, 339) l’acte original du traité de combourgeoisie avec Berne et Fribourg, conclu le 7 décembre 1525. Des trois sceaux dont il était muni il ne reste que celui de Lausanne, les deux autres ont été enlevés le 25 février 1538.
Ce triste voyage coûta à la ville 19 écus d’or. /41/
Défense d’aller à la guerre.
1537. 8 juin. — Furent invoqués les signieurs de Conseyl, Rière conseyl et Deux Cent, et c’est à l’occasion que aulcuns tant infans de ceste ville que habitans et aultres du resort alarent à la guerre desoub certeyn capitayne d’Alemagniez pour la part du roy, contre le vouloyer de Messrs du Conseyl. Pourquoy sus cest fut conclud par les susdit qu’à l’avenir homme ne fut si hardi et téméroyre aller à la guerre sans le vouloyer de Messrs du Conseyl et tieulx transgresseurs seront pugnis jouxte l’ordonance de Messrs du Conseyl et Riere conseyl. Et oultre alors fut conclud aller par les resors prohiber et défendre non aller à la guerre, comant desus.
A cette époque tous les cantons suisses étaient parcourus par des racoleurs qui cherchaient à engager des troupes pour le service étranger, surtout pour celui du roi de France. Malgré les défenses de Berne et de Zurich, François Ier réussit à lever en Suisse 8000 hommes en 1537. Il est probable que le « capitaine d’Allemagne » mentionné dans le texte était un Suisse allemand qui parcourait le pays pour lever des troupes, comme le faisait alors le fameux Kaltschmid, de Kaiserstuhl.
Conseil.
1537. 2 septembre. — Furent esleutz les signieurs conseylliers qui sensuyvent. Premièrement, en laz bandieriz de laz Citaz : noble Pierre Ravier, discret Pierre Vuavre et Guilliaume Sodal pour banderet. En laz bandieriz de la Palluz : honorables et discrés messire Girard Grand; messire Jo. de Sainct Cierge; signieur Aulbert Loys et Jo. /42/ Copin, banderet; Guillaume Ravanel; Jo. Roschiz et Ste. Menestré. En laz bandieriz sainct Laurent : noble François Chabiez; Georgoz douz Crest; François Guibaud pour banderet; Jaques Bouz. En la bannyeriz du Pont : signieur Regnier Pivard, boursier; Pierre Curnillion; Pierre Gautheys et Guilliaume de Lalex pour banderet. En laz bandieriz de Bourg : Noble François Gimel; noble Glaudoz de Praromand; François Sauveys; Estienne Grand. Et alors futz esleuz à Gros Saultier pour le terme de troyes ans honeste Bonaventura Frantonay. Pierre de Sainct Cierge ausi fut esleuz secreteyre.
Nomination du châtelain de l’Evêché.
1537. 11 octobre. — Je François Regnaud, filz de provéable homme Amye Regnaud, citoyen de Lausane, esleutz chastellayn de Lausane, au nom et pour la par des magniffiques signieurs le bourguemeystre, petit et grand conseyl et communaulté de Lausane, fays à scavoir à ung chescun par la teneur de ses présentes que, avoyer vehuz par moy et meurement considéréz les articles à moy donés par prénommés magniffiques signieurs, prometz pour moy et les miens par mon serment touché sus les sainctz de Dieu évangiles et sus l’obligation de tous mes biens meubles et immeubles présens et advenir, et seci de l’auctorité de prénommé Amye Regnaud, mon père, yci présent et à cest moy auctorisant, de tenir et observer les articles yci desoub escrips et à yceulx non contrevenir. Et pour plus grand surtéz que lesdit articles soyent mieulx tenus et observés par mondit filz, je ledit Amyez moy constituez fiance et principal pour ledit François, mon filz, pour les choses et /43/ articles desoub escrips et l’observation d’iceulx et prometz par mon serment touché sus les sainct évangiles pour moy et les miens et sus l’obligation de tous mes biens meubles et immeubles présens et advenir à seci non contrevenir. Présent le secréteyre yci desoub escript, stipulant et acceptant au nom et pour la part des susdit bourguemeystre, petit et grand conseyl de Lausane; en renunsant nous susdit Amye Regnaud et François, père et filz, à toutes exceptions et oppositions et cautelles par lesquelles nous pourrions contrevenir aux choses dessus escriptes. Donné le unziesme d’octobre 1537.
Sainct Cierge.
La teneur des articles est tieulez :
Premièrement, que ledit chastelleyn soyet entenuz et debjez garder tous prisoniers lesquieulx seront exécuté par justice bien et décentement et en rendre bon compte, à scavoer que quant il s’en perdroyet ung prisonier estant aux prisons desquelles ledit chastellayn az chargez, comant de l’Eveschiez et autres apartenantes à messignieurs, que il doibjez demeurer à l’ordonance de messignieurs du Conseyl et cest que par yceulx signieurs serat ordoné debjez tenir et observer.
Item, que lesdict prisoniers estant éxécuté par justice, que il les debjez garder et nourrir à ses propres missions et despens.
Item, garderat tous aultres prisoniers bien et seurement, et du poyement à la mode acostumée.
Item, que il debjez fournier le bourreaulx de cordes, gans, rues, pillons et autres choses nécesseyres à exécution de justice. /44/
Item, seront entenus lesdict signieurs de Conseyl de fournir le dit chastelleyn de bones et sures prisons.
Item, que quant il hauroyet quelque prisonier détenut aux prisons non ayant pour satisfeyre la dispence; que de celluy ne debjez rien prendre le dit chastelleyn, quant le dit prisonier serat relachéz.
Item, que ledit chastelleyn ne debjez permettre que persone allez parler à quelque prisonier que se soyet estant détenuz aux prisons de mesdit signieurs, et ausi le dit chastelleyn ne le debjez subborner aulcunement.
Item, lui serat délivréz la meyson de l’Esveschiez par les conditions suyvantes. Premièrement que il laz debjez tenir coverte à ses propres missions et despens. Touteffoyes lui serat deslivrez la tioullez, marrin et enselloz par messignieurs quant serat de besoingt.
Item, lui serat délivré un chescun an, à scavoer ung muys de blez et ausi une vigniez estant au territoyre situéez En Chouderon, contenant une posaz et demyez, et c’est pour ses saleyres.
Ordre pour la sainte Cène.
1537. 20 décembre. — Furent ordonné les banderet pour mectre ordre le jour de laz Senne, pour mettre en ordre les gens, affin qui ne viennent hors de ordre, mès honnestement et en bonne dévocion.
Béat Comte, ministre.
1538. 31 janvier. — Fut admis par Messrs de Conseil à prédicant, pour prescher le sainct évangille de Dieu, messy /45/ Benoyt le Conte, videlicet Beatus Comes, en latin, lequel nous ont présenté noz magniffiques signieurs de Berne. Et luy fu accouenté troys cent florins par an, à poyer par quartemps, pour ung chescun an; et luy furni de quelque mouble.
Jeux pendant le service divin.
1538. 14 février. — Comparu monseigneur Benoît Conte, prédicant, exposant et disant que, les dimenche quant l’on presche, tant aut matin que après digné, cart ilz en y a plusieurs que jouent à certain jeux; priant ly vouloir mettre remède et fayre déffense et crier. Item fu délibéré et conclu par les susdit conseillier fayre crier que nul ne soit si hardy ne osé de jouyer à quelque jeux qui soit, durant que laz parolle de Dieu se dira et anuncera en l’église, et cecy dessoub la poenne et banch de trois gros, sans marcy avoir.
Cette ordonnance de police fut répétée plusieurs fois, entre autres le sept décembre 1548, en ces termes : « Le petit et grand conseil et communité de Lausane a esté assemblé et ont conclus, que chescun debge assister au sermon laz dimenche et le vendredi et ceulx qui se pormèneront par les rues, ou qui seront eis tavernes pendant le sermon laz dimenche au matyn seront pour chescun trois solz; et que nul ne debge tenir tablette, ny vendre pendant ledict sermon, sus semblable poynne; aussi que les hostes ne debgent ballier à boire après neufz heures de nuyct dessoub le bamp accoustumé. »
Le 5 mai 1549, on décide : « Fuit conclusum debere ire ad sermonem quotidie, maxime die dominico et veneris, et quod vadientur illi qui invenientur in carreriis. » Répété le 16 décembre suivant.
Il est vrai de dire que Messieurs de Berne ne cessaient d’admonester /46/ les gens de Lausanne sur leur conduite irréligieuse, comme on peut le voir par la lettre du 14 juillet 1538, publiée par M. Herminjard, et par les pièces suivantes qu’on cite parmi beaucoup d’autres, comme spécimen 1 :
« L’advoyer et conseil de Berne, nostre salutation. Nobles, chiertz et féaulx, Il nous est venuz à notice, comme aulcungs d’entre vous mesprisent nostre mandement lequel par cy devant vous avons envoyé à cause de vos enfans de les induyre à fréquenter et se trouver ès esglises quant les ministres de la parrolle de Dieu tiendront le caticisme qu’est l’instruction des enfans pour les enseigner à prier le pater nostre, la foy et les dix commandemens de Dieu, et de tout cela ne tiengnent compte, et que pis est, les admonitions et remonstrances que noz baillifz et aultres officiers sur ce leurs ont fayct estiment comme parolles et menaces fryvolles et vaynnes; de laquelle chose avons trèsgrand regretz, dont de rechiefz estroictement par ces présentes vous mandons que vous pères et mères et tuteurs des pupillies ayés à observer nostre sudit mandement; et les enfans lesquelz sont capables d’apprendre ladite preyère, la crainte et dix comandements mener et fayre aller à l’esglise sus le jour et à l’heure que les prédicans tiendront ledit catiscisme. En tant que desirés éviter punition d’emprisonnement pour la première, seconde et tierce foys, et après deffaillians, de bannissement hors de noz pays. A toy nostre baillifz expressément commandans et enjoingnians de tenir mayn et avoyr esgard que cestuy nostre édict soyt observé, la punition et bannissement aye lieu et soyent mis en exequution.
» Datum IXe de may 1545. »
(Arch. cant. vaud. Copie contemporaine.)
« Nostre amyable salutation devant mise. Nobles, prudens trèschers et féaulx, ayans incontinent après la disputation tenue à Lausanne jusques à présent à vous envoyé plusieurs mandements, édicts et ordonnances pour avancement de chrestienne honnesteté, chastiement et punition de toutes vanitez, désordres /47/ et deshonnestéz, et vous, aussi tous aultres noz soubgectz, souventeffoys, paternellement admonesté iceulx observer; ce que touteffoys n’a tant prouffité que aulcuns non seulement y aient obtempéré, ains aussi mesprisé et soy éventé comme aulcunes ordonnances, édictz et mandemens ayons cassé; en quoy la vérité est espargnée et à nous faict tort, car nous summes tousiours esté et encore d’entière voulenté, propos et intention de demourer auprès d’iceulx et nostre réformation et sus iceulx de tenir main, comme Dieu nous a commandé et à nous appartient et summes entenu. A ceste cause derecheff vous trèsacertes admonestons et expressément commandons à tous et chescung noz esmanéz mandemens et ordonnances touchant blasphèmes de Dieu, juremens, jeulx, boire d’autant et oultre mesure, aussi manger, dances, abilemens déchiquetèz, yvrogner, chanter, crier de nuict après l’heure statute, et aultres deshonnestetéz, etc. satisfaire et observer, et user toutes chrestiennes honnestetéz, meurs, parolles et faicts, entant que desirez d’éviter paravant imposées peines corporelles et pécunières. A vous et ung chescung noz officiers trèsacertes commandans en ce avoir bonne et diligente superintendance et les transgresseurs et désobéyssans punir, les peines et bans establys recouvrer, pareillement ès hostes enjoingnans tous forensis estrangers et aussi noz soubgectz qui logeront ou donneront à boire et manger admonester d’observer nosdits mandemens, singulièrement iceulx touchant trop boire et manger, chanter, crier, etc., et de nuict après l’heure establie, ne leur appourter vin, et ceux qui à telles admonitions ne vouldront obéyr à noz officiers accuser. Ce faisant ferez à Dieu premièrement et après à nous plaisir. Datum XIII octobris 1547.
» L’advoyer et Conseil de Berne.
Suscription : « Aux nobles, prudens, noz trèschers et féaulx Burgermaistre et Conseil de Lausanne. »
Notes du secrétaire de Lausanne : « Statuta concern. reformationem. Debent publicari singulis jovis. » D’une autre main : « Contre les excès du vin. — Publicatum per Johannem Gardet /48/ preconem nomine dominorum Lausannensium die XVIII novembris 1547. »
(Arch. de Laus. Lettre missive originale avec sceau plaqué.)
Election de gens de guerre.
1538. 19 février. — Le jour que dessus comparurent par le commandement des sgrs en conseyl les gouverneurs des resors, auxquieulx fut enjoinct et commandé debvoyer eslire gens de guerre pour envoyer là ouz il pleyrat aux signieurs de conseyl et que ung chescun des village debjez eslire les nombre desdit compagnions comant sensuyt par ordre et c’est que il debient aller laz ouz seront commandé aller, à leurs propre missions et despens :
| Romanel | 6 | Belmont | 8 |
| Morrens | 2 | Ochiez | 4 |
| Bretigniez | 2 | Challiez | 3 |
| Freydevillaz | 3 | Prilliez | 3 |
| Cugiez | 3 | Joutens | 3 |
| Loz Mont | 6 | Pallinjoz | 2 |
| Sainctgerman | 8 | Escublens | 8 |
| Rignens | 9 | Sainct Sulpi | 4 |
| Chavanes | 3 | Crissiez | 12 |
| Pulliez. | 15 |
1538. 21 février. — Le jour que dessus comparurent en conseyl les gouverneurs des resors, disans et proposans que au commandement à eux faict touchand l’élection des gens de guerre, que bonement ne seriont à cest satisfeyre, veuz et attendu que il sont povres, et aussi veuz que l’on les veult feyre aller en guerre pour gens estrangiers et à leurs propres despens; pourquoy dient à cest non /49/ estre entenus, prians les signieurs les voulloyer de cest excusé. Auxquieulx fut respondu par les signieurs que à cest ne deubsent faillir et amener leurs gens, et c’est pour le second comandement.
24 février. — Le dimanche XXIIII de février furent convocqués le petit et grand conseyl de Lausane, et c’est à l’occasion de eslirez ung capiteyne et ung banderet pour conduyre les compaignions laz ouz besoing ferat pour le service de messignieurs de Berne. Et alors fust esleuz pour capiteyne c’est à scavoer Noble Glaude de Praromand, citoyen de Lausane, et pour banderet discret Jehan Goudard, bourgoys et marchand de Lausane.
Prieuré de Saint-Sulpice.
1538. 19 mars. — Fut enjoinct et comandé à Barilliod, gouverneur de Cublens [Ecublens], que ycelluy deubt comandé aux prodomes dudict Cublens que yceulx deubsent fournir de chers pour aller quérir de la chaux pour la ville et à la rediffication du prioré de Sainct Sulpis, lequel Barrilliod cella accepta au nom de la communaulté de Escublens, présentant deux chers, disant que se il poviont feyre daventagez, que voullentier le feriont.
Le prieur de Saint-Sulpice, Aymon de Gingins, étant mort l’année précédente, ce bénéfice ecclésiastique était devenu la propriété de la ville de Lausanne, en vertu de la largition. La commune d’Ecublens faisant partie du ressort de Lausanne et le prieuré y possédant des droits considérables, c’est aux communiers de ce village que le Conseil s’adresse pour les corvées à faire pour la restauration des bâtiments du prieuré. Le prieuré de Saint-Sulpice était fort ancien. La première /50/ mention authentique que j’en ai trouvée est de l’an 1135. A cette date, Guy de Merlen ou de Marlanie, évêque de Lausanne, qui avait certainement des relations étroites avec l’abbaye de Molesmes, au diocèse de Langres, confirme à cette abbaye tout ce que ses prédécesseurs lui avaient donné, à savoir l’église de Saint-Sulpice, la chapelle d’Ecublens et leurs dépendances. Les deux prédécesseurs immédiats de Guy de Merlen sont Girard de Faucigny, qui régna de 1103 à 1138, et Conon de Fénis, qui occupa le siège épiscopal de 1093 à 1103. Ainsi l’établissement du prieuré de Saint-Sulpice serait contemporain de saint Robert, fondateur de la congrégation de Molesmes. (Mémorial de Fribourg, I, 378; II, 358.)
Ce prieuré demeura une dépendance de Molesmes jusqu’à la réformation. Dans le pouillé du diocèse de Lausanne, fait en 1228, il est rangé parmi les couvents de moines noirs, « prioratus nigrorum monachorum, et dans tous les documents il est constamment qualifié « Molismensis ordinis. » (A cette même date la chapelle d’Ecublens est déjà devenue une église paroissiale.) L’abbé de Molesmes était le supérieur ecclésiastique immédiat du prieur de Saint-Sulpice, qui demandait son autorisation pour tous les actes importants.
Dans le XIIIe siècle, le prieur est qualifié simplement « rector domus sancti Sulpicii, » puis « rector vel prior, » enfin plus tard, « prior. »
Le comte Pierre II de Savoie possédait, en tout ou en partie, l’avouerie de ce monastère; car le 28 mars 1267, dans un échange avec Aimon, seigneur de Blonay, il cède à celui-ci tous ses droits sur l’avouerie de Saint-Sulpice 1 . Cette cession devait particulièrement convenir à Aimon, puisque l’église paroissiale de Blonay, avec son petit prieuré voisin du château, dépendait de Saint-Sulpice.
La maison de Savoie paraît avoir racheté cette avouerie de la /51/ famille de Blonay peu de temps après; car, par un traité de paix entre Louis de Savoie, baron de Vaud, et Pierre d’Oron, évêque de Lausanne, conclu en l’an 1316, Louis cède à l’évêque et à ses successeurs toute prétention qu’il pourrait avoir sur l’avouerie de Saint-Sulpice 1 .
Les possessions du prieuré étaient assez importantes et, sauf la filiale de Blonay 2 , situées en majeure partie dans le voisinage du couvent, ainsi à Saint-Sulpice même, à Préverenges, Denges, Ecublens, Monnaz, Saint-Saphorin sur Morges. Dans tous ces endroits le couvent possédait des droits seigneuriaux considérables et un grand nombre de familles taillables à miséricorde.
L’origine de la plupart de ces propriétés se perd dans la nuit des temps, cependant les documents nous révèlent celle de plusieurs.
En avril 1274, Ebal et Henri, fils de feu Pierre dit Franceys, chevalier, seigneur de Pont en Ogo, vendent au recteur de Saint-Sulpice (rectori domus sancti Sulpicii), pour le prix de 4 livres 7 sols, tous leurs droits quelconques sur certains hommes taillables possédés par le prieuré de Saint-Saphorin sur Morges.
Le même Henri, donzel et coseigneur de Pont en Ogo, possédait avec le recteur ou prieur de Saint-Sulpice la moitié de la dîme dite de Salvion, qui se percevait sur environ 280 poses de terres près de la Chamberonne, à Ecublens et à Chavannes. Le 29 janvier il vendit sa part de cette dîme au chapitre de Lausanne, pour 40 livres lausannoises; et le 24 juin 1325 le chapitre les accensa à perpétuité au prieuré de Saint-Sulpice pour le cens annuel de 16 coupes de froment et 7 setiers de vin. /52/ La même année, Guillerme, abbé de Molesmes, approuva cet acte. (Arch. de Laus., F., 1.)
Le prieuré possédait aussi au XVe siècle une partie d’une dîme très importante, nommée la dîme de Saint-Laurent, du nom de son principal propriétaire. Cette dîme se percevait sur tous les blés récoltés dans le territoire qui s’étendait de l’église de Vidy à Ecublens et depuis la rive du lac au mont d’Autavignyz, et sur le vin des vignes de Chavannes et de Biez. En février 1335, Humbert de Saint-Laurent, chevalier de Lausanne, fils de Rodolphe, qui était fils de feu Willierme de Saint-Laurent, chevalier 1 , vend cette dîme à Willierme, fils de Rodolphe de Billens, chevalier, pour le prix de 190 livres lausannoises. Dans cette vente sont comprises 26 poses de terres dans les environs. Cette dîme changea de propriétaire plusieurs fois et s’appelait aussi dîme de Chavannes. En 1391, elle appartenait à Henri Encelini et à Alexie, sa femme, qui la vendirent à Girard Gimel, docteur ès droits. Il paraît qu’une partie de cette dîme passa entre les mains du prieur de Saint-Sulpice. Le reste fut vendu, le 11 avril 1560, par noble Louis Gimel à N. Sebastien Loys pour 500 écus d’or au soleil, avec droit de rachat. Elle fut ensuite partagée entre les familles Daux et de Crousaz et devint enfin, au milieu du XVIIe siècle, la propriété de la ville de Lausanne. (Arch. de Laus. F, 4, 7, 10, 28, 30, 31, 34, 53, 56.)
On a dit plus haut que le prieuré de Saint-Sulpice possédait plusieurs hommes taillables dans le pays environnant. J’ai rencontré dans les documents les noms suivants de taillables :
1274. Ulric et Martin Doutreynt; Denis et Germain Costeir; Jean et Renauld Dutoit : tous à Saint-Saphorin sur Morges.
1360. Jean dit Adellin et Guillaume dit Jugla, son frère, à Saint-Sulpice.
Jeannot, fils de Jean Adellin, avec ses deux fils Jean et Michelet. /53/
1361. Germain du Pasquier, de Denges, et sa fille Mermette qui épouse Jeannot Rossans, de Grandcour près Estavayer.
En 1403. Jean, fils du dit Jeannot Rossans. En 1423, Jaquet, autre fils du même Jeannot Rossans.
1362. Perret, dit Tissot, d’Ecublens, succède comme homme taillable au ténement de Jean dit Tromps de Larvaz.
1363. Rolet, fils de feu Jacques Guol, de Denges.
1364. Mermet, dit Ravaz, de Saint-Sulpice.
1365. Guillaume Gauteir, de Saint-Sulpice.
1367. Perret, dit Gros, d’Ecublens.
1387. Mermet, dit Chambrez, d’Ecublens.
1390. 1403. Nicolet, fils de feu Jeannot Chappuis alias Loteir, de Denges.
1390. Jaquet, fils de Nicod Jaquer, de Denges.
1390. Jeannot, fils de feu Rolet dit Maschard, de Denges.
1391. Cécilione Panchaul, mère de Pierre Panchaul, moine à Cossonay.
1391. Perret Gauteir, de Saint-Sulpice.
1397. Jaquet de Laydeffour, alias Clers, de Denges.
1399. Isabelle, fille de Rolet Guol alias Evescoz, de Denges, femme de Jean de Rugnens, fils de Perrod de Broy.
1403. 1423. Hugonet, fils de feu Reymond du Crest, et sa femme Reymonde, fille de feu Sulpisod Gauteir, de Saint-Sulpice.
1412. Jean Cornier, de Préverenges. Son fils Pierre, étant curé de Préverenges, ne pouvant être homme taillable, le prieur de Saint-Sulpice aberge ses biens en viager à Mermette et Perronette, les deux filles naturelles du curé.
1423. Pierre, dit Cornier, fils de feu Pierre Cornier, de Préverenges.
1423. Nicolet, fils de feu Nicod dit Guedon, fils de Jeannot Guedon, de Saint-Sulpice.
1433. Jaquet du Pasquier, de Denges.
1469. Pierre Terraz, dit Bolenget, de Saint-Saphorin sur Morges.
1471. Nicolet Colon et Claude Burgoz, de Saint-Sulpice. /54/
1509. Jaquet, fils de feu Claude Curribel, de Denges, pour les biens de Nicolet Chappuis alias Colliod.
La formule de reconnaissance de la taille était à peu près la même dans la plupart des cas ci-dessus. J’en citerai une du 9 mars 1403 comme exemple : … « Pro quibus possessionibus ego dictus Johannetus debeo predicto domino priori, anno quolibet in festo omnium sanctorum, talliam et tributum talliabilem ad misericordiam, voluntatem et ordinacionem predicti domini prioris, necnon et ultra dictam talliam, debeo eidem domino meo priori, anno quolibet in festo Nativitatis Domini, unam parvam meneydam cum dimidia; item et unum ruydoz seu duo jornalia quolibet anno reddenda, unum in semorando vineas dicti prioratus, et aliud fenando prata dicti domini prioris sita ultra Venopiam, sumptibus tamen et missionibus dicti domini mei prioris. Confitens ego dictus Johannetus quod prefatus dominus prior habet in mea persona, bonis, rebus et possessionibus meis predictis bannum, clamam, barram, sasinam, laudimia, comissionem et excheytam bonorum meorum quorumcunque, item directum dominium, mediam et bassam juridicionem et exercicium juridicionis, excepto ultimo supplicio. »
Dès le commencement du XVe siècle, les hommes taillables tendent à diminuer dans les propriétés du couvent de Saint-Sulpice. En 1429, le prieur Jacques Provannaz, considérant qu’un grand nombre de ténements demeurent incultes, tant à cause de la peste récente qu’à cause de l’horreur de la taille (ob orrorem jugi et servitutis tallie), donne ces terres à cens perpétuel à un de ses parents, acte approuvé par Guillerme Damoncort ou de Amoncuria, abbé de Molesmes. Le 17 octobre de l’année suivante, le même abbé reconnaît avoir reçu du prieur de Saint-Sulpice cent écus d’or pour sceau et lod d’un plein pouvoir accordé par le chapitre général de Molesme au dit prieur, pour affranchir ses hommes de la taille et de la main-morte. (in quadam littera potestatis per nos abbatem eidem priori largite in nostro generali capitulo, continente eundem priorem affranchizare et liberare posse homines sui predicti prioratus a quacunque servitute talliabili et manu mortua…) /55/
L’opposition croissante à la servitude de la taille se manifesta d’une manière frappante le 23 juillet 1465 dans la circonstance suivante. Le commissaire des extentes d’Urbain de Chivron, prieur commendataire de Saint-Sulpice, avait voulu exiger de Jacques Cornier, de Préverenges, domicilié à Lausanne, la reconnaissance qu’il était homme taillable du prieur pour certaines petites possessions provenant de son père, Pierre Cornier, et situées à Préverenges et à Ecublens. Pierre Cornier s’était reconnu homme taillable à miséricorde le 10 janvier 1423. Son fils Jacques refusa de renouveler cette reconnaissance, parce que ce genre de servitude était un abus et quasi infamant; mais il se déclara prêt à abandonner ces possessions au seigneur, plutôt que de prêter un autre hommage qu’un hommage franc et libre. Le commissaire du prieur admit cet hommage libre 1 . /56/
On trouve encore des hommes taillables dans les domaines du prieuré de Saint-Sulpice, au milieu du XVIe siècle. En 1547, le /57/ Conseil de Lausanne, successeur du prieur, affranchit de la taille plusieurs biens dépendant du prieuré, soit à Saint-Sulpice, soit à Denges, entre autres ceux de Jean Roche, boursier, de Jean Guillet et de Claude Pasquier. Peu à peu, jusqu’au XVIIIe siècle, toutes les propriétés soumises à la taille furent affranchies.
Comme seigneur terrien, le prieur de Saint-Sulpice avait le droit de chasse dans toute l’étendue de sa juridiction.
Le 24 janvier 1471, Pierre Mayor, de Vufflens-la-Ville, donzel, officier à Saint-Sulpice pour Urbain de Chivron, prieur commendataire, fit comparaître devant lui Nicolet Colon et Claude Burgoz, hommes du prieuré, pour avoir pris un cerf sur le domaine du prieur, sans avoir payé le tribut usuel, qui était le pied droit du dit cerf. Ces deux hommes avouèrent leur délit et s’en remirent à la miséricorde de leur seigneur.
Le prieuré possédait aussi un moulin et un foulon à écorces (molendinum et battitorium) sur la Venoge, au-dessous de la route, probablement sur l’emplacement du moulin actuel. Les habitants de Préverenges et de Denges étaient obligés d’y moudre leur blé. En 1429, cette usine fut amodiée par Pierre Bichet, de Denges, pour la redevance annuelle de quatre muids et trois coupes de froment, d’une pièce de nappage et d’une pièce de serviettes neuves (unius pecie gausapium et unius pecie maparum novarum legalium et receptibilium). Le fermier avait en outre droit aux noix des îles de la Venoge et du bois de Rueyres, pour la redevance d’un pot d’huile par an; il avait la jouissance du verger près du moulin, avec ses fruits, sauf ceux d’un poirier réservé au prieur; il avait le droit de pêche dans le bief du moulin, mais devait remettre au prieur la moitié des poissons pris; enfin, il pouvait prendre son affouage dans les îles de la Venoge, mais devait être garde-forêt du prieur pour son bois de Rueyres. (Arch. de Laus. Saint-Sulpice, I, No 2.)
Le prieur de Saint-Sulpice possédait la collation de quelques bénéfices ecclésiastiques qui étaient ceux des églises paroissiales de Blonay (où il y avait un petit prieuré), d’Ecublens et de Préverenges. Le patronat de cette dernière église rapportait annuellement au prieur un muid de froment, mesure de Morges, onze /58/ sols lausannois et un ressat ou une réception pour le prieur et deux religieux, avec trois chevaux. Les curés successifs de Préverenges, à leur entrée en fonctions, signaient une reconnaissance de ces charges. Ainsi, Pierre de Lignerolles, curé en 1364, Michod de Ottens, en 1369; Etienne Baconier; Guillaume Rosset, en 1395; Etienne de Williens; Pierre Cornier, en 1406; Humbert Crostel de Pomy, en 1435; Girard Bougie en 1447.
Je n’ai trouvé aucun renseignement sur les religieux du monastère, mais les documents nous apprennent que dès le commencement du XVe siècle, cette maison fut fort négligée par ses prieurs. Jacques Provannaz, qui fut prieur de 1423 à 1447, était maître d’hôtel de Georges de Saluces, évêque de Lausanne; il n’était que rarement à Saint-Sulpice et faisait administrer les biens du couvent par son frère Thomas. Après lui, le prieuré devint une commende, dont le titulaire, toujours absent, amodiait les propriétés de son bénéfice. Il semblerait qu’alors il n’y eût plus même de conventuels, du moins à en juger par une clause de l’amodiation faite par le prieur commendataire Urbain de Chivron. Je transcris ici les principales clauses de ce bail qui fut signé le 12 novembre 1464.
Par procuration, datée de Rome, le 24 octobre 1463, Urbain de Chivron, protonotaire du siège apostolique et administrateur perpétuel du prieuré de Saint-Sulpice, transmet ses pouvoirs à N. Amédée Bon de Compeys, seigneur de Gruffy et de Prangins. Celui-ci amodie pour trois ans, pour le prix de 360 florins par an, à Jean Pordolliet ou Prodolliet 1 , curé de Torny et bénéficier de la cathédrale de Lausanne, en récompense de ses nombreux services, le prieuré de Saint-Sulpice avec tous ses droits, fruits, provenances, rentes, cens, obventions, prés, vignes, champs, oches, bois, maisons, granges et autres membres, ainsi que toutes les charges et honneurs qui incombent au dit prieuré. Urbain de Chivron se réserve seulement les échutes des hommes /59/ taillables, les émoluments des reconnaissances, les legs et les donations pies. Jean Prodolliet exercera la juridiction et aura la collation des bénéfices. Il s’oblige à dire l’office dans l’église du prieuré aux heures accoutumées et à tenir dans le dit prieuré des personnes propres à desservir les offices et à vivre honnêtement (tenere in dicto prioratu personas ydoneas ad deserviendum in divinis et honeste vivendum). A la fin de son bail, il restituera en gros cierges (torchiis) onze livres et en petits cierges (parvis candellis) quatre livres de cire qu’il a reçues à son entrée. Acte fait à Lausanne, dans la maison du chanoine Philippe de Compeys, en présence de Boniface Fabri, official, de Girard Oddeti, chanoine, de noble Pierre de Compeys, châtelain de Prangins, et de noble Jean Mestral de Gruffy, témoins requis. Le 27 août 1465, Urbain de Chivron, étant à Genève, ratifie ce bail. (Arch. de Laus. Saint-Sulpice, I, No 6.)
Voici les noms de quelques prieurs que j’ai relevés sur les documents des archives de Lausanne, avec les dates extrêmes de leur mention.
Ybalus, 1325.
Jean d’Illens, 1345.
Jean de Colombier, appelé aussi dom Jean Panchaul ou Panchauz. 1345, 1381. Dans différents actes, de 1351 à 1365, Jean de Villanova Regis paraît comme prieur; serait-ce le même ?
Pierre d’Estavayer, 1387.
Guillaume Arnod, de Grandson, 1389, 1401.
Jean d’Illens, 1403, 1412.
Jacques Provannaz ou Provane, maître d’hôtel de l’évêque Georges de Saluces, 1423-1477. Il est ordinairement absent, son frère Thomas administre le prieuré pour lui.
George de Canalibus, docteur ès droits, protonotaire apostolique, administrateur perpétuel du prieuré, 1456.
Urbain de Chivron, chanoine de Genève, de Lausanne et de Maurienne, recteur de l’église paroissiale de Saint-Gervais à Genève, administrateur perpétuel et prieur commendataire, 1463-1470. /60/
Mermet Penneti, licencié ès décrets, chanoine de Lausanne et de Genève, commendataire et administrateur perpétuel, 1491-1499.
Aymon de Gingins, protonotaire apostolique, chanoine de Genève, abbé de Bonmont, prieur commendataire perpétuel, 1507-1537.
Les bâtiments du prieuré n’existent plus. Déjà en 1538 ils étaient en fort mauvais état, puisque le manual nous dit que le Conseil de Lausanne impose des corvées aux gens d’Ecublens pour les réparer et les reconstruire. Ils furent transformés en maison seigneuriale.
Il ne reste plus de l’église que l’extrémité orientale, comprenant les transepts et trois absides semicirculaires, surmontés d’une tour quadrangulaire. Le style de la construction indique qu’elle remonte au milieu du XIIe siècle. (Voyez Rahn dans les Mittheilungen de Zurich, tome XVIII, 2e livr., et Blavignac Histoire de l’architecture sacrée.)
Lorsque la ville de Lausanne prit possession du prieuré de Saint-Sulpice, environ une année après la largition, elle succéda aussi à la juridiction qu’elle a conservée jusqu’à la révolution de 1798, et maintint les mêmes officiers pour administrer la justice, tels que le châtelain et le curial.
Cependant il paraîtrait que, dans les premières années, on contestait son droit de propriété, malgré les termes positifs de la largition. Aussi se fit-elle donner, en 1540, l’attestation suivante :
« Sebastian Nägely, gentihome et bourgeois de Berne, ballifz de Lausanne ou nom et pour laz part de laz magnifficence de nos trèsredoubtés seignieurs supérieurs de Berne, à vous, les magniffiques, spectables, nobles, honnorables et discretz seignieurs advoiers, ballifz, burguermeister, capitaines, juges, chastellains et aultres officiers, en quelque lieu et de quelque auctorité que ce soit, augmentacion avec désir à vous complaire et à ces présentes adjoucter foy plénière. Combienque en laz ville de Lausanne soit notoire et manifest que nozdit trèsredoubtés seignieurs supérieurs de Berne, entre les aultres biens, dons, /61/ préhéminences et largitions faictz à une communité, ville et cité de Lausanne, haient donner, laisser et habandoner eis nobles et bourgeois du dict Lausanne : C’est à scavoir, le prioré de Sainct Sulpis, près du lac, après le trespas du seignieur de Bonmont, ensemble toutes appertenances et dépendences dudict prioré, icelles soint dedans ou dehors les limites de laz seigniorie et ballivage de Lausanne; ce nonobstant, eis circonvoisins et aultres lieux hors dudit ballivage de Lausanne, l’on pourroit ignorer ladicte largition et donation, à cause dudict prioré de Sainct Sulpis et de ses dépendences, A ceste cause, nous ledict ballifz, à l’instance et suplication de spectable homme messy Jehan de Sainct Cierge, burguermeister, et ou nom de ladicte communité de Lausanne, à vous les magniffiques, spectables, nobles, honnorables et discretz seignieurs advoiers, ballifz, burguermeister, capitaines, juges, chastellains que dessus, par laz teneur de ces présentes attestons, certiffions et notiffions ladicte donation et largition dudict prioré de Sainct Sulpis et de ses dépendences comment dessus avoir esté faicte par nozdict seignieurs supérieurs eisdict nobles et bourgeois de Lausanne, et d’icelle largition et donation plussieurs fois avoir vehu l’article, lequel avons faict extraire de laz générale donation et largition que dessus. En priant et requérant vous lesdit seignieurs estans hors des limites de noustre ballivage et ceux qui sont dedans et dessous noustredit ballivage, tant médiat que immédiat, exhortans et néantmoins à vous commandans à adjoucter et adhiber foy à noz présentes lettres d’attestation, ainsin comment l’on adjoucteroit et adhiberoit, tant en jugement que dehors, à l’original de ladicte concession et largition générale. Delaquelle noustre présente attestation et certiffication avons concéder et décréter audict burguermeister de Lausanne, ou nom que dessus, ces présentes lettres dessoub noustre seaulx, sans noustre préjudice et des noustres, avec le signet du notaire ci dessoub escript, commissaire de nozdict seignieurs supérieurs et noustre secrétaire. Daté à Lausanne, le quatorzième jour du mois de febvrier l’an noustre Seigneur Jesuchrist mille cinq cent quarante, prins à saz nativité. (Arch. de Laus. EE, 259.) »
Jes GIGNILIATTI. » /62/
Les propriétés furent affermées à des prix croissants, par exemple en 1557, à 950 florins; en 1562, à 1050 florins; en 1570, à 1480 florins; en 1581, à 1900 florins; en 1597, à 2605 florins 1 .
Le bail de 1597, fait aux enchères publiques, fut adjugé à Pierre Secretan, au prix de 2605 florins, pour le terme de six ans. Il comprenait la maison seigneuriale de Saint-Sulpice avec tous ses fruits, cens, appartenances et dépendances universelles. L’amodiataire avait les charges et les avantages suivants : Il devait 1o résider dans la maison seigneuriale de Saint-Sulpice et entretenir les toits de la maison et de toutes les dépendances; 2o payer la pension du ministre de Saint-Sulpice et d’Ecublens, savoir annuellement un muid de froment, un muid de messel, un char de vin; de plus le ministre devait avoir la jouissance d’une demi-pose de vigne et d’un pré et 50 gerbes de paille annuellement; 3o payer au châtelain et au curial de Saint-Sulpice à chacun 3 coupes de froment et 60 sols par an et leur nourriture lorsqu’ils tenaient la cour; en outre, aux officiers de Saint-Sulpice, de Denges et des Vaulx, à chacun 10 florins par an; 4o fournir le vin pour la sainte cène à Ecublens et à Saint-Sulpice; 5o fournir tous les cinq ans à chacun des officiers une robe aux couleurs de la ville.
L’amodiataire percevait pour son compte : 1o les deux tiers de tous les bamps et clames; 2o les deux tiers de tous les lods; 3o le tiers de toutes les échutes pour main-morte et taillabilité. Les deux autres tiers allaient au Conseil de Lausanne, ainsi que les échutes des condamnés exécutés.
Enfin une clause onéreuse pour le fermier était celle-ci : « Item quand aucungs seigneurs seront de nostre part commis aller audict Saint Sulpis pour les affaires dudit lieu, ledit admodiataire sera entenu supporter les charges. »
La ville de Lausanne ne conserva pas cette propriété intacte. Elle en aliéna diverses portions à plusieurs reprises. Ainsi, en 1663, elle échangea avec N. Gabriel Vulliermin, seigneur de /63/ Monnaz, tous les fiefs, cens et juridiction lui appartenant, à cause du prieuré de Saint-Sulpice, rière les grandes et petites Vaux sur Morges, Vufflens-le-Châtel, Monnaz, Clermont, contre le fief que Vulliermin possédait à Ecublens. En 1665, elle vendit au ministre Collinet plusieurs terres à Saint-Sulpice et aux environs. Depuis lors, la ville a successivement vendu toutes ces propriétés.
On a dit plus haut que la ville de Lausanne avait succédé à la juridiction du prieur de Saint-Sulpice.
Dans cette juridiction était compris le village de Denges tout entier, à l’exception des chemins publics et de deux maisons. Au commencement du XVIIe siècle, ce village avait environ vingt feux. Or, suivant l’usage des seigneurs en ce temps, le Conseil de Lausanne avait fait ériger à Denges un pilier avec girouette peinte aux armes de la ville. Mais LL. EE. trouvèrent cela mauvais, prétextant que la girouette avait été plantée trop près du chemin public qui n’était point de la juridiction de Lausanne, et ordonnèrent au Conseil de cette ville de la faire abattre. Celle-ci envoya une humble requête à Berne, offrant de mettre la girouette plus en arrière et témoignant de sa soumission à LL. EE. Celles-ci se laissèrent toucher par cette supplication et écrivirent au bailli de Lausanne, le 17 décembre 1635, comme suit : « Jaçoit que conformément à ce que t’avons escript le 19 de novembre dernier passé, nous ayons sommé noz chiez et féaulx de la ville de Lausanne d’abbattre ceste girouette, laquelle sans nostre permission ilz ont fait dresser à Denges, tout joignant le grand chemin, t’ayantz commandé de te prendre garde que cela s’effectuast; si est-ce touteffois que sur leur humble requeste et représentation à nous faite, combien reprochable leur seroit la tant subite démolition de ladite girouette, Nous leur avons de grâce spéciale permis qu’icelle puisse subsister en son estat présent, jusques à ce que d’elle mesme elle tombe et que son pilier, sur lequel elle est maintenant posée, soit pourri et renversé; mais par après elle ne debvra estre redressée sans nostre particulière licence. » /64/
Prix de coulevrine.
1538. 23 mai. — Comparurent les compagnyons collevrinier demandant leur vouloir largy leur pris accoustumé pour joyer les dimenches pour abillité les joyeulx et jueunes enfans, et de leur vouloir augmenter leur pris; eys queulx leur fu octroyer et augmenter de sinq florins, que montent XX florins, à leur poyer pour une chescune dimenche durant douze dimenche, videlicet XX gros.
Le 12 juin 1539 le Conseil décide que désormais le prix habituellement donné aux arbalétriers sera donné aux arquebusiers.
Abolition des fêtes catholiques.
1538. 19 juin. — Le mecredy veille feste Dieu, XIX jour de juing mille VcXXXVIII, à cause de ladite feste Dieu fu tenu le conseil.
25 juillet. — Ulterius fuit conclusum quod fiat justicia et exequatur ipsa in qualibet die et festo, demptis die dominica et quatuor festis, que de precepto dominorum Bernensium observantur et coluntur. (En marge : Vide statutum.)
Les Lausannois qui n’avaient, en majeure partie, accepté la réformation qu’à regret, continuaient à chômer les fêtes de l’église romaine. D’après l’édit de réformation du 24 décembre 1536, complété par celui qui fut publié à la suite du synode de Lausanne, en 1538, on ne devait célébrer, outre le dimanche, que quatre fêtes : Noël, le nouvel an, l’Annonciation et l’Ascension. On voit qu’en juin 1538 on chômait encore la Fête-Dieu; mais, le 25 juillet suivant, on décide de se conformer exactement à l’édit. La cause immédiate de ce changement fut la réception à /65/ Lausanne, le 22 juillet, d’une lettre comminatoire du Conseil de Berne, où on lit entre autres : « Ce que nous nécessairement occasionne vous trèstous et ung chascun par ceste escripture vous admonester voire expressément commander de vous meillieurer et entièrement observer nousd. mandemens, édicts, réformation et ordonnances, en tant que desirés d’éviter nostre male grâce, indignation et grièfve punition. (Voyez Herminjard. op. cit. V, 51.) »
Sages-femmes et baptême.
1538. 31 octobre. — Comparuerunt sapientes mulieres vocate les dignans, quibus fuit prohibitum ne habeant baptizare infantes in domibus secrete. Item, quod habeant nominare patrem et matrem predicatoribus baptisando ipsos infantes. Nomina illarum que adfuerunt in consilio sunt hec Peroneta Guibaudaz; Peroneta Terraillion; Johaneta Verdan; Claudia, uxor Stephani Escoffeys; uxor Nicodi Chablex et Maria residens prope domum Claudii Braliard.
Le 4 novembre, les dignans prêtèrent serment d’observer le règlement ci-dessus et de déclarer si les enfants étaient légitimes ou non. Au commencement de l’année précédente, le Conseil de Genève avait aussi interdit aux sages-femmes de baptiser. (Herminjard, op. cit. IV, p. 165.)
Changement de calendrier.
Mutatio millesimi sumpti a nativitate Domini 1539.
Comme on l’a vu précédemment, l’usage d’une partie du diocèse de Lausanne était de commencer l’année au 25 mars, jour de l’Annonciation. Dès maintenant et pendant quelques années Lausanne se conforma à l’usage de Berne, où l’on commençait /66/ l’année à Noël. (Voyez Favey, Supplément au dictionnaire historique du canton de Vaud, pag. 113.)
Consistoire.
1539. 27 janvier. — Conclusum in consistorio non debere deduci nysi tres cause, videlicet : cause matrimonii, divorsii et adulterii vel pailliardise.
Ce ne fut pas sans quelque difficulté qu’on parvint à établir un consistoire à Lausanne.
Déjà le 14 août 1536, avant la dispute de religion, Messieurs de Berne avaient fait connaître au Conseil de Lausanne leur intention de « doner ung consystoire » pour les causes spirituelles coment matrimoniales et autres. » Les Lausannois avaient fait observer que ce nouveau rouage administratif ou judiciaire leur semblait inutile. (M. D. R. XXXVI, pag. 287, 293.)
Immédiatement après l’édit de réformation, dès le mois de janvier 1537, le Conseil de Berne reprend son projet et annonce au Conseil de Lausanne qu’il aura « pouvoyr d’establir ung consistoyre selon le contenuz de la dicte réformation, touteffoys que le balliff de messeigneurs soyt assistant. » D’après ce nouveau projet, le consistoire ne devait plus s’occuper uniquement des causes « matrimoniales et autres, » mais, comme dans le pays allemand de Messieurs de Berne, il aurait à connaître de tous les délits contre l’édit de réformation, qui comprenait des ordonnances sur la religion, l’adultère, les gloutonneries, les jeux, les vêtements, les danses, etc. (Arch. cant., bailliage de Lausanne, No 3318, Ruchat, Hist. de la réformation, IV, 522—531.)
A cette ouverture de Messieurs de Berne, les Lausannois répondent vaguement qu’ils « auront si bon advis et mettront peyne à provoir au contenuz d’icelluy [article] par le conseil des seignieurs prédicans. » (Arch. cant., onglets des baillages, Lausanne, A, pag. 125.)
Mais ce vague acquiescement ne satisfait pas le Conseil de Berne qui a l’esprit précis, aussi revient-il à la charge le 18 avril /67/ 1537 en ces termes : « Concernant le consistoyre, ceulx de Lausanne en doibvent establir et ordonner ung, ainsin que les articles des commis de mes honnorés seigneurs le contiennent. » (Arch. de Laus., C, 11.)
A quoi les Lausannois répliquent, en juillet, qu’ils ont « eslehuz gens pour ilz estre [au consistoire], lesqueulx soy tiennent près, quant ilz seront demandéz. »
Evidemment les Lausannois ne mettaient pas beaucoup de zèle à obéir à LL. EE. Néanmoins le consistoire commence à fonctionner. Mais il s’occupe uniquement des causes matrimoniales et laisse de côté les délits contre les mœurs et contre l’édit de réformation, ce qui attire au Conseil de Lausanne la semonce suivante, en date du 24 août : « Aussi nous vient à notice comme ne traictés quasy aulcunes causes au consistoyre, sinon tant seulement celles concernantes mariages, par avanture pource que nostre bailly est co-auditeur. Vous notiffians que doigés en cela fayre comme fesons ici en nostre ville, pour toutes causes, tant matrimoniales, jeux, ivrogneries, dances, blasphemes, déchiquetures de vestement, putherie, maquerélaige, que aultres comprises en nostre réformation, et en ce ne vous fayre difformes à nous et vous nous ferés plaisir. (Herminjard, op. cit., IV, pag. 279.)
Les Lausannois tenaient beaucoup à ne rien laisser diminuer à la juridiction qui leur avait été concédée et désiraient naturellement que le bailli bernois, qui siégeait au consistoire, se mêlât le moins possible de cette juridiction. En conséquence, ils firent, au mois de septembre, les observations suivantes au Conseil de Berne : « … Aussy vous hatz pleutz nous rescripre tochant le concistoyre. Ilz vous playratz scavoyer à vous susdicts serviteurs de Lausanne, que causes de jeux, ivronyeries, dances, blasphèmes et déchicquiteries qui touchent à police de ville et que à l’heure qu’elles se font méritent correction, coment fayre l’entendons. Pourquoy icelles causes ne se doybvent démener au concistoyre, car aultrement l’on pourroyt tirer touttes causes devant le concistoyre par indirectz. Trèshumblement supplient vous excellences icelles causes laysser à nostre correction, /68/ laquelle seratz tieule que Dieu et vous signiories soy contenteront. » (Arch. de Laus. C. 22, Herminjard, pag. 290.)
Le Conseil de Berne se rendit à ces raisons et répondit le 21 septembre : « Tant qu’il touche les causes que se doibvent déterminer au consistoyre, mes honnorés seigneurs ont congneuz sus cestuy article que tant seulement causes concernantes mariages et palliardise doigent venir par devant le consistoyre; mais les aultres esmandes par le Conseil de Lausanne estre éxéquutées et qu’il recouvrent icelles, depuis que messeigneurs les leur ont laissées, en sorte qu’il n’ayent esgard, ny n’en laissent à nulli riens. » (Arch. de Laus. C. 24.)
C’est en conformité avec cette réponse de Berne que le Conseil de Lausanne prend la décision consignée dans le manual.
Pauvres.
1539. 23 février. — Fuerunt convocati burgenses numero IIc, per quos fuit resolutum et totaliter conclusum visitare pauperes habitantes in villa Lausanne et civitate Lausanne. Pro quibus visitandis fuerunt electi quinque bandereti, unacum ipsis adjunctis, Petro Gautheys, Girardo Bosson, Georgio dou Crest et Stephano Gaudin. Per quos burgenses fuit ultra conclusum debere expelli et banniri omnes pauperes advenas et extraneos et ceteri de villa et resorto in quibus est paupertas et penuria; videlicet hii qui honeste vixerunt et bone fame, quod illi debeant nutriri et allimentari de bonis hospitalis seu communitatis Lausanne ad hec dedicatis, in hoc quod de cetero non addeant coram domibus clamando et petendo elemosinas.
Ulterius, fuit statutum et ordinatum per quos supra, quod nullus burgensis teneatur nec debeat locare domum nemini extraneo seu advene, quin prius ipsum locatarium /69/ presentet coram consilio, et hoc sub pena decem florenorum applicandorum communitati.
La mendicité paraît s’être accrue à Lausanne à un tel degré que, nous dit le texte ci-dessus, le conseil des Deux Cents fut obligé d’adopter des mesures énergiques, de renvoyer de la ville les mendiants étrangers, de faire nourrir les pauvres des biens de l’hôpital et de la commune et d’empêcher l’invasion de nouveaux pauvres. Mais cette décision ne pouvait s’exécuter sans des ressources nouvelles. On se souvient que, pendant les deux années précédentes, le Conseil de Lausanne avait fait auprès de Messieurs de Berne nombre de démarches inutiles, afin d’obtenir un supplément de biens ecclésiastiques pour les pauvres, et que LL. EE. avaient répondu que, après enquête, leur bailli ferait les distributions nécessaires. Mais le mal étant allé en empirant, les Lausannois firent de nouvelles tentatives qui furent couronnées de quelque succès. Le 3 mars 1539, ils députèrent à Berne quatre membres du Conseil, pour exposer la situation et la nécessité de nouvelles ressources pour subvenir à l’entretien de tant de pauvres. Le résultat de ces pourparlers se trouve dans la décision suivante de Messieurs de Berne, en date du 21 avril :
« Articles passés et concluz par magniffiques et puissans seigneurs messieurs l’Advoyer et Conseil de Berne sus les proposites à eulx faites et tenues par les ambassadeurs et commys de la ville de Lausanne, ce XXI d’avril l’an mille cinq cens trente neuff.
» Premièrement, quant au fait de l’hospital par lesd. de Lausanne debvoir à construyre, ont mesd. redoubtés seigneurs advisé et regardé la maison et convent de la Magdelaine estre à ce propice et bien convenable, tant pour l’entretenement des rendus et prébendaires, comme aussi pour despartir donner l’ausmonne générale, comme icy après sera desclairé 1 . /70/
» Et quant au vieil hospital desd. de Lausanne, icelluy debvra estre pour héberger et entretenir les estrangiers allans et venans.
» Enapprès, ainsi que lesd. de Lausanne, pour la fondacion et entretenement dud. hospital, ont présenté aulcuns biens et revenuz, comme de leur ancien hospital, du convent de la Magdelaine et de toutes leurs confraries, iceulx estre sommés et carculés, les ont mesd. trèsredoubtés seigneurs trové non souffisantz à cella et de trop petit revenuz et sur ce ordonné que lesd. de Lausanne de présent et pour ung commancement doibgent mettre et eslargir les biens des cures et chapelles existantes dans leurd. ville avecq les aultres dessus mencionnéz, et que les aultres biens d’esglise, comme de Monteron, Sainct Sulpis, Ballevaux, Saincte Catherine et les Cordelliers, pour le présent doibgent ainsi rester et desmorer à lad. ville de Lausanne pour l’entretenement des affaires et négoces d’icelles, voyant les grosses charges que sont ancour de présent sus lesd. biens; et ce touttefois jusques à tant que plus grande desclaracion icy ou après en soit faite.
» Et affin que led. hospital ayt tant mellieur commancement, ont mesd. redoubtésseigneurs anichillé et aboly certainne aulmosne quotidiane que se donnoit en leur nom par leur ballyff de Lausanne, la remettant et réduysant aud. hospital, et pour icelle estably et ordonné de donner et expédier ausd. de Lausanne trente muys de froment, mesure dud. Lausanne, annuellement et ung chescun an, au jour et terme accoustumé.
» Mais pourtant que ancour tout cella ne peult souffisamment rapporter de donner et distribuyr l’aulmosne en la sorte et magnière que font mesd. trèsredoubtésseigneurs en leur ville, ont iceulx concluz et ordonné que lesd. de Lausanne, des biens susd. doibgent faire et donner une donne quottidiane à leurs povres, qui seront mys et escript dedans ung roule, à ung chescun d’iceulx ung pain ou ung morseaul de pain jusques à la valleur d’ung cart, et par ce moyen garder lesd. povres de non ainsi aller mendier parmy la ville.
» Item, de prendre et retirer dedans led. hospital les anciens, /71/ impuyssans et mallades qui n’ont de quoy vivre et ne peulvent bonnement gaigner leur vie, iceulx entretenir et administrer à eulx toutes leurs nécessités, selon leur possibilité.
» Semblablement aussi de recevoir et alberger les povres allans et venans et iceulx entretenir, selon ce que la nécessité le requerra; toutteffois non pas si longuement comme par lesd. de Lausanne avoit esté ordonné et regardé.
» Mesd. redoubtésseigneurs ont changé l’ordonnance par eulx faite accause des enfans et sur ce ordonné que les enfans qui n’auront père ne mère, parens ne amys pour les entretenir doibgent estre accouenté avecq quelque gens de bien pour les nourrir et, iceulx estre venu en eage, qu’il doigent estre envoyé pour aller servir et gaigner leur vie.
» Et pourtant que ancour de présent n’est aulcunement possible de savoir le revenu et valleur annuelle desd. biens, n’ont mesd. redoubtésseigneurs accause de cella bonnement seheu mettre ne faire conclusion finale aud. affaire, fors seulement commandé ausd. de Lausanne de ainsi commancer et faire toutjour quelque bon commancement en la sorte et magnière comme dessus est desclairé, principalement pour l’honneur et la gloire de Dieu et pour la charité envers nostre prochain; par telle réserve que le bally, ensemble les prédicans dud. Lausanne doigent avoir le regard sus iceulx affaires, affin de savoir si les choses se font et distribuent en la sorte que mesd. redoubtés seigneurs l’entendent et ont ordonné, et avecq cella doige toujour estre assistant et évoqué aux comptes qui se rendront pour lesd. affaires … » (Arch. de Laus. C, 11.)
Ces articles furent fidèlement exécutés. Messieurs de Berne donnèrent annuellement leurs trente muids de blé et le Conseil de Lausanne mit à part, pour les pauvres, les biens ecclésiastiques spécifiés. Ainsi fut fondée la Bourse des pauvres bourgeois de Lausanne, qui, bien modifiée sans doute, existe encore de nos jours. Aussi les anciens comptes de cette bourse portent-ils, jusqu’en 1659, l’intitulé suivant : « Sensuyt le compte que rend … comme recepveur et aulmosnier, et à icelluy nom, des biens et revenuz de la Magdeleine, cures Saincte Croix, Sainct Paul, /72/ Sainct Etienne, Sainct Pierre et Sainct Laurent, et plusieurs chappelles 1 en icelles fondées, appartenantz aux trèshonnorés seigneurs dudict Lausanne, assigné pour la nourriture et entretenement des pouvres dudict Lausanne. »
Le plus ancien compte conservé aux archives de la ville commence au mois de novembre 1542.
La clause d’après laquelle les ministres devaient assister aux comptes de la Bourse des pauvres amena beaucoup de frottements; les ministres, Viret surtout, se plaignant toujours que ces biens n’étaient pas consciencieusement administrés. (Voyez Ruchat : Histoire de la Réformation passim.)
Conseil.
1539. 28 septembre.— Fuerunt congregati burgenses in magno numero, videlicet IIc, per quos fuit statutum et ordinatum quod quicunque electus burgimagister, borserius, seu habens alterum officium, nolens illud acceptare, solvere debeat civitati centum libras, necnon esse expulsus per annum et diem a jurisdicione lausanensi et ab omni commodo et honore communitatis.
1539. 9 octobre. — Die jovis festi sancti Dionisii, nova mensis octobris, fuerunt presentes in consilio sequentes : Primo, dominus Johannes de Sancto Ciriaco, burgozmaistre; nobilis Ludovicus Gimel, Johannes Rochyz, Franciscus Deplex, P. Curnillion, borserius; P. Wavre, G. Ravinel, Franciscus Guibaud, G. Gumini, Stephanus Menestrey, Monetus Rochet, Jo. Guilliet, novus consiliarius; Ludovicus d’Yverdon, Bonaventura Frontonex, Aubertus Luys, Franciscus Genevaz, Enabloz de laz Cort, Jacobus Boufz. /73/
Quiquidem domini consiliarii supra proxime nominati personaliter comparentes per levacionem manus prestiterunt juramentum, videlicet : esse boni et fideles communitati, procurare bonum et evitare malum toto eorum posse, bene consulere justa eorum conscienciam; tenere maiorem opinionem et secretum id quod erit consultum; comparere singulis diebus martis et jovis, quibus tenebitur consilium et tociens quociens fuerint convocati per sonum simballi aut eorum banderetos, et hoc sub pena trium solidorum pro quolibet deffectu.
Item fuit ordinatum quod detur cuilibet consiliario comparenti singulis diebus jovis et martis, videlicet novem denarii et unum modium avene pro uno anno pro eorum sallario.
Ordonnance contre les mascarades.
1540. 10 février. — Mardy, feste de Carèmentrand, fu conclu de fayre crier que nulle personne soit hardy ny osé de fayre cestuy jour de Carèmentrand nulle masque ne chose déhonneste, soubz la poenne d’estre trois jour en jaquemard en pain et en eaue.
Droit de chasse.
1540. 15 juin. — Jacobus Bugnyon remisit laz leydaz, videlicet pedem dextrum unius chivriouz capti in territorio de Cugie, prout moris est remittere nobilibus et burgensibus Lausanne.
Jeux dramatiques.
1540. 31 août. — Comparuerunt Franciscus Regnaud et Glaudius Gumini, burgenses Lausanne, requirentes venerabili consilio, quatenus placeat dicto venerabili consilio /74/ eisdem dare et largiri aliquas pecunias, aut quid eisdem placuerit, ad supportandas nonnullas missiones per eosdem sustentas in lusione cujusdam historie facte dominica precedenti, videlicet unum scutum solis.
On voit par les comptes de Pierre Curnillion, boursier de la ville, de 1539 à 1542, qu’il paya à des « compagnions qu’il joyèrent une false moralisée en la Palud, pour ayder à supporter les éffrés par eulx soutenus, comme le conste par la cédulle, datté 1540. I. éscu. » C’est probablement l’histoire mentionnée dans le texte ci-dessus.
De temps à autre, l’on trouve, soit dans les manuaux, soit dans les comptes de la ville, des indications sur les amusements publics à Lausanne; j’en note quelques-unes au hasard.
En janvier 1548, le boursier paie « ad Pierre Blan, pour une jornée de son cher pour chargé le marrin pour feyre les loges de l’istoere de Sodome et Gomore, » 1 flor. 3 gros.
Le 28 janvier 1552, il paie « pour fere le bastillion, » 31 sols et 6 deniers.
Le 17 janvier 1553, il livre à « Nycolas Ramuz, pour dispence faicte en sa mayson, tant pour ceulx qui firent le bastillion de neige à Sainct François, que pour ceulx que l’assallirent, un escus et demy. »
En 1556, le boursier livre, le 21 mars, « aux joueurs d’instrumens de musique et bastelleurs qu’ont joué devant mes honnorés seigneurs, 5 flor. 8 sols.
2 avril : « Aux bateleurs le jour jouarent sur la corde en la Palud, » 7 flor.
7 août : « A dame Magdalène pour quatre libvres rasiné de Bordeaux, pour faire des fusées et autres choses pour la gallère, » 1 florin.
3 septembre : « Pour les despens faict au pris de Morges par les fiffres, tabourins, zegarres, que aultres extraordinaires de ceulx de Thonon et Yverdon, que maistre de gallère et son compagnion, » 33 florins. /75/
1559. 19 novembre : A esté délivré à maistre Symon, maistre d’escolle, pour le jeu d’une tragédie, 10 florins. Ce maistre Symon ne serait—il point Simon Du Rosier? (Voyez France protestante, V, col. 1056.)
Le 21 mai 1563, on donne 60 sols « pour les maistres historiens, qu’ont joé. »
Le manual nous apprend que le jeudi 13 septembre 1565 « l’on n’ha tenu le Conseilz à cause de l’histoire de Saincte Susanne joée et démenée ledict jour en laz place de laz Palud par les escholiers et estudians de Lausanne, tant en grec, lattin, françois que alleman. » Voici ce que la représentation de cette histoire coûta au public : d’abord le 30 août, le boursier livre « aux régens et maistres du collège de ceste ville, pour don libéral à eux faict, pour supportation des frais causant leur prétendu de faire jouer par leurs disciples l’histoire de Saincte Suzanne en langue latine et en place publique, » 10 florins.
22 septembre : « Pour avoir fait le paulxfert et la ceinture de fert à l’engin de la comédie jouée par les escolliers, » 3 florins 9 sols.
23 septembre : « Pour dresser les loges de la comédie jouée en la Palud par les escolliers, » 15 flor. 3 sols 6 den.
Le bailli bernois, Petermann de Wattenwyll, ne voulut pas négliger de protéger la littérature et donna « den Schullmeistern und Schullern do sy die histori Susanna gespilt hannd, » 10 florins.
En août 1570, le boursier paie pour la construction « du chasteau qui fut appelé de Mensonge, dernièrement par maistre Estienne Perrinet dressé sus la place de Montbenon, pour passetemps, pour plusieurs mattières heues de divers marchands, » 192 flor. 2 sols 2 den.
En 1572, on paie à « syre Jaques Jornat, d’Ytalie, passant et conduysant certeinne beste appellé dragon terrestre, » 30 sols.
Mais le passe—temps favori des Lausannois, au XVIe siècle, était de manger et boire, comme en font foi bien des passages des comptes, des manuaux et des mandats bernois. /76/
Libraire.
1540. 23 novembre. — Magister Anthonius librarius habuit in locationem a dominis unum membrum in Sancto Francisco, spacio sex annorum, precio, cujuslibet anni, quattuor florenorum solvendorum per quarta tempora. Et ipse edocuit et ostendit dictis dominis ejus litteram naturalitatis et prestitit juramentum in forma.Tant que les anciens bâtiments du couvent des cordeliers furent habitables, le Conseil les loua ou prêta à diverses personnes pour logements, boutiques ou ateliers. C’est dans ces bâtiments que furent installées l’imprimerie Lepreux et beaucoup d’autres industries.
Je ne sais qui était ce maître Antoine, libraire. J’en trouve deux de ce nom au milieu du XVIe siècle. Au nombre des bourgeois habitant la bannière de Bourg, mentionnés dans la revision du 15 avril 1545, on trouve Anthonius Mornay, de Marcilogia, episcopatus de Mendes, librarius Lausanne.
D’un autre côté, le 15 octobre 1551, Jean Hervasius, imprimeur et libraire à Bâle, s’adresse au juge de Lausanne pour être payé de la dette que lui doit feu Antoine Schorus, libraire à Lausanne.
Service militaire.
1542. 2 avril. — Fuit hora matutina in domo ville, videlicet in aula maiori ipsius domus, congregata tota communitas Lausanne, seu omnes ipsius ville burgenses, ad sonum campane, ut moris est, quibus burgensibus fuit per honorabilem Franciscum Sauvey, burgimagistrum Lausanne, expositum quomodo nudiustertius magniffici et potentes domini nostri Bernenses ad ipsos legaverunt /77/ quoddam mandatum per magnifficum Anthonium Tillier, ballivum Lausanne, eorum nomine emanatum et per eumdem sigillatum ac signatum per egregium Gignillatti, commissarium, in quo continentur certi concernentes guerram articuli et alia ex ipsis dependentia, sub data ultime martii, anno 1542, volentes siquidem tale quale mandatum ad ipsius formam observari debere. Quo mandamento lecto et eius tenore considerato, fuit per ipsam communitatem seu dictos burgenses conclusum et arrestatum ipsum tale mandamentum observari debere et ipsum proclamari fieri, ne quis de eodem in futurum ignorancia pretendat.
Je ne transcris pas le reste de l’article qui concerne des affaires ecclésiastiques, sur lesquelles on trouvera tous les détails désirables dans les ouvrages de MM. Ruchat et Herminjard.
Quelques années plus tard, quand le joug bernois fut bien solidement établi, on ne se fût certes pas permis de convoquer la bourgeoisie pour délibérer sur l’acceptation ou la non acceptation d’un ordre émané de LL. EE.
L’ordonnance en question, conservée aux archives de la ville, est fort longue et concerne surtout le service militaire étranger.
Un autre ordre de Berne, donné en 1546, ne fut pas accepté à Lausanne, comme on le verra à cette date.
Peste.
1542. 19 octobre. — Ob epidemiam in Lausanna vigentem et propter quod cum Dei adminiculo aliquis bonus exoriatur ordo, fuit arrestatum et conclusum habere diversas personas pro adminiculo infirmorum seu infectorum.
Et primo, fuit electus marron, gallice, Nycodus Chablex qui prestitit juramentum in talibus prestari solitum. /78/ Et fuit ei ordinatum pro eius stipendiis et salario, videlicet a tempore incohationis sui talis servicii et pendente suo servicio, pro qualibet hebdomada unus bichetus frumenti et sex solidi, et habeat et habere debeat pro quolibet corpore mortuo quod tumulabit, videlicet, si sit parvum corpus, tres solidos; si vero grande, sex solidos.
Item, fuit ordinata una guydaz, gallice, videlicet N. filius quondam N. Janyn, cui etiam tempore sui servicii fuit ordinatum pro qualibet septimana sex solidi cum una diurna michez, prout ceteri ordinarii pauperes in Lausanna habent. Et fiat per ipsam guydaz ebdomalis questa cum bissacula et campana, videlicet qualibet die dominicali, et de eadem questa, pro labore sui servicii, percipiet ad discretionem domini hospitalarii.
Item, fuit magis ordinatus et deputatus cirurgicus pro adminiculo eorumdem morbosorum seu percussorum, videlicet magister Johannes Arnaul; cui fuit ordinatum pro eius salario annuali, pendente suo servicio, videlicet sex solares, et pro quolibet paciente quem habebit in regimine seu cui apperiet venam necessariam aut aliud adminiculum necessarium faciet, videlicet, pro quolibet paupere sex solidos, pro quolibet divite duodecim solidos solvendos eidem per tales pacientes; in hoc tamen quod si esset aliquis tam pauper ut non sibi daretur facultas talia solvendi, pacienter hoc substinebit idem cirurgicus super suo primo ordinato salario. Et ultra hec, administrabitur eidem cirurgico diurnus victus per nobiles et burgenses. Et etiam quia habet in Lausanna ipse cirurgicus uxorem et singulum puerum, ordinatum fuit ipsos uxorem et puerum reduci in domo hospitalis magni Lausanne, in quo loco illis per /79/ dominum hospitalarium administrabitur diurnus victus juxta eorum statum; servietque ipsa uxor tali domino hospitario, pendente sua mansione, in rebus ipsius hospitalis necessariis, juxta eius facultatem et posse.
1543. 6 mai. — Estatus pour temps de peste. L’an courrant mil cinq centz quarante et troys et le sixiesme jour du moys de may, en la maison de la communaulté de Lausane ont estés congrégués et invocqués par le son de la cloche, come toujour a esté de bonne coustume, asscavoir les nobles, provéables et discrètes personnes du vénérable Conseil estroyt appellé les Vingtz et quattres et aussi du rière Conseil appellés les Soixantes du dict Lausane, pour faire les estatus et ordonnances suyvantes sur les poinctz à eulx expousés par noble Loys Gemel, bourguemaistre du dict Lausane.
Et premièrement, a esté exposé que pource que les maisons de la dicte ville de Lausanne, qu’estoient aultreffoys des abbaies, esglises et chappelles, maintenant appartenantes à une ville et communaulté de Lausanne à présent tombent en ruyne, à l’occasion de quoy pour manutention d’icelles la dicte ville supportoyt diverses grosses et annuelles missions. Pour à cella obvier a esté l’advis et bon vouloyr des signieurs estroyt Conseil, sil le bon vouloir des signieurs du rière Conseil estoyt tel, asscavoir que icelles tieulles maisons soy deubsient vendre et crier vendables et les délivre aux plus offérissantz, jouxte l’ordre et manière que noz souverains signieurs de Berne ont venduz leurs biens des esglises.
Plus oultre, a esté mis en avant et exposé que causant /80/ la pestilence de la quelle meintenant sommes contagmynés et affligés par le vouloir du Seigneur, que pour appaiser son ire sur nous addressée, ungchescun aye à le prier nous vouloir illuminer de son Sainct Esprit pour myeulx le recongnoistre et louer, à icelle fin qu’il luy plaise révocquer sa sentence la quelle il a donnée contre nous. Et puys amprès il mettre en la dicte ville quelque bon ordre et bonne police pour obvier jouxte le bon vouloir du Seigneur à la dicte peste.
Et premièrement, que desia a esté le bon vouloir des dictz seigneurs Vingt et quattres, sil comme dessus est dict le bon vouloir desdictz seigneurs Soixante estoit tel de prouvoir d’ung bon et ydonée médecyn, lequel aye à regarder de jouxte le scavoir qu’il luy aura esté donné par le Seigneur Dieu, de faire ordonnances en médecines ou aultre bon régime, comme myeulx il le pourra entendre, pour les communiquer ou faire communiquer à ceux qu’en auront nécessité, eulx estantz prins ou suspicionnés de peste, estant premièrement le dict médecin de cella advertir, et secy jouxte son pouvoir, aux missions touteffoys de telz pestifféroux; au quel tel seigneur médecyn soit donné de contribué ung gaige annuel et sallaire compétant, à icelle fin que myeulx il puisse à cella vacquer et moiennant cella il puisse subvenir aux neccessités de luy et de son mesnaige.
Semblablement, a estu mys en avant d’avoir ung cirurgien et barbier pour saigner et faire toutes aultres décentes nécessités en cas de cirurgie à tous ceulx que, come dessus est dict, seront frappés de la peste ou d’icelle suspicionnés, envers ungchescun bourgeoys et habitant d’une ville de Lausanne; moiennant aussi ung gaige et sallaire /81/ compétent, quel luy sera ordonné, lequel aussi cirurgien soy debvra guyder jouxte le vouloir dudict seigneur médecyn tant que à luy sera de besoing et possible.
Davantaige, a estre mis en avant, quant aux aultres ordonnances des pestifféroux ou suspicionnés de peste, come sensuyt : Asscavoir que sil par le vouloir du Seigneur il advenoyt que aulcung habitant dict locataire d’une ville de Lausanne fuz frappé de peste, que incontinant icelluy frappé aye à vuyder son habitation et aller hors de la ville en lieu commode pour habiter, par l’espace de six sept maines, ou, s’il ayme mieulx, à l’ospital Sainct Roch, à cella dédié, au quel lieu de l’ospital il luy sera administré victuaille jouxte sa nécessité; et les aultres habitans et chambriers d’icelle maison non frappés de peste, ains tant seullement infectz ou suspicionnés, aussi alors et incontinant doibie vuyder icelle maison et comme dessus aller hors la ville en lieu commode et non à l’ospital, par le terme que dessus, et tout cella dessoub le bamp de dix florins, à poier à mes trèshonorès signieurs par ungchescun à cella contrevenant. Et sil par adventure tieulx pestifféroux ou suspicionnés ne vouloient cella faire, que a lors les marrons sur cela députés doivent et peuvent entrer en icelles tieulles maisons et mener iceulx telz contrevenantz hors, comme dessus est déclairé, sur quoy pour cella ne seront exemptz desdictz bamps, ains plustoz en amprès plus grièfvement chastiés jouxte le bon vouloir de mes dictz signieurs.
En oultre a esté mis en avant que sil jouxte le vouloir du Seigneur il advenoyt que aulcongs signieurs bourgeois et ayantz maison en Lausanne fuissent pestifféroux ou /82/ suspectz de peste, que iceulx jouxte leur bon vouloir pourront demeurer en leurs maisons ou sortir hors, jouxte le vouloir du Signieur et d’eux, et secy jouxte ce que dessus a esté dict, assçavoir du terme et bamp. Et sil par adventure aulcongs d’iceulx suspicionnés de peste vouloit aller pendant ce temps pour ses négoces neccessités ou esbas hors de sa dicte maison, cella moings qu’il pourra debvra faire, sans demeurer ny fréquenter par les rues, à tout une verge blanche en sa mayn, en soy eslogneant des gentz tant que à eulx sera possible, toujour sur la peine et bamp sur déclairé. Et pour ce qu’il est de besoing que pendant le terme sur déclairé ungchescun des dictz pestifféroux aye à nettoyer sa maison pestifférouse, ce ungchescun d’iceulx sera tenuz faire jouxte et soub le bamp prédict; cella pour obvier à plus gros mal se fera et debvra faire de nuyt amprès neufz heures et non de jour.
Lesquelles chouses estres par lessusdictz signieurs entendues, ilz les ont louées et approuvée, remettant tout cella au bon vouloir et plaisir des surnommés signieurs bourguemaistre et estroyt conseil dictz les Vingt et quattres de icelles faire ou minuer et adioindre s’il estoyt requis, jouxte leurs bons advis et vouloir desdictz signieurs bourguemaistre et estroyt conseil.
Pourquoy le jour suyvant que fuz le lundi septiesme du prédict moys, estantz les dictz signieurs bourguemaistre et estroyt conseil au lieu que dessus pour cella faire congrégués, ont faictz et concluz come dessus a esté déclairé.
Et quant au médecin quil sera ordonné, a esté faict tel traicter et appointemant, asscavoir que premièrement il /83/ luy sera baillier une maison qu’estoit aultreffoys de messy Jacques de Montfalcon avecq toutes ses appartenances, pendant le bon plaisir et vouloir de mesdictz signieurs. Plus oultre, pendant ce qu’il plaira au Seigneur nous affligé de peste, luy sont esté ordonnés quarante escus au soleil, lesquieulx luy seront poiés annuellement et par quart temps par le borsier desdictz signieurs, et secy à la rate du temps qu’il aura servys, jusques autant qu’il luy soyt dict que de servir quant à la peste qu’il s’en déporte. Et sil pendant le temps pestifféroux il luy plaisoyt saignier quelque personne ayant la peste ou quil fuz de peste suspicionné, il aura les advantaiges suyvantz, asscavoir, d’ung noble ou signieur de conseil ou aultre bon et riche bourgeoys deulx bons testons, d’ung aultre moindre bourgeoys ung bon teston, et de toutes aultres moindres personnes d’une chescune six solz, avecq ses aultres avantaiges jouxte le bon vouloir de telz pestifféroux.
Et davantaige a esté ordonné, pource que en temps non suspect de peste en la ville de Lausanne est requis et besoing havoir ung médecyn pour soubvenir aux malades, avons et ont mesdictz signieurs ordonné à tel médecyn dix escus d’or au soleil, avecq la dicte maison et appartenances, lesquieulx luy seront poyés annuellement et tous les ans, comme dessus est dict, au bon vouloir de mesdictz signieurs; laquelle pension et maison pour avoir, icelluy medecyn viendra en conseil pardevant mesdictz signieurs pour icelle tieulle pension rénover et refrescher de troys ans en troys ans, sans luy déroguer à tous ses aultres avantaiges et gaings; surquoy sera icelluy médecyn tenus demeurer en la ville de Lausanne, luy réservant les hissues /84/ et sorties qu’il pourra faire hors nostre dicte ville pour aller visiter d’autres malades.
Le mardi prochainement suyvant a esté esleu et admis pour médecyn, comme dessus a esté dict, assçavoir spectable messy Jaqcues Blécheret, cytoien de Lausanne, docteur en médecyne, au quel par devant les signieurs bourguemaistre et estroit Conseil au lieu que dessus fuz à luy lisue et déclairée la sur narrée ordonnance, laquelle avecq action de grâce il a acceptée et a faict serement et promesses en tel cas requises.
Le XXe de may 1543, ont esté invocqué les signieurs conseillers XXIIII, LX et Deux centz de Lausanne, aux quelz signieurs ont esté mis en avant les articles sur escriptz, lesquieulz les ont loué, approuvé et ratiffié, à iceulx consentantz comme aviont faict les signieurs XXIIII et LX.
Dans les deux premières parties de ces extraits, il a été parlé de plusieurs pestes qui avaient éclaté à Lausanne jusqu’en 1533. On voit, par les longs articles du manual, que la peste était forte en 1542 et 1543; cependant il paraîtrait que, vers le mois de mars 1543, il y eut une certaine diminution dans la rigueur du fléau, car le 15 de ce mois, le Conseil arrête que les marrons qui sont à St-Roch peuvent y rester, si cela leur convient, mais qu’ils doivent se nourrir à leurs frais et n’ensevelir personne sans son consentement. Au mois de mai, il y eut une forte recrudescence de l’épidémie, puisque, outre le marron qui devait ensevelir les morts et le guydaz qui, armé d’une besace et d’une sonnette, faisait la quête, on édicte des règlements de police pour les pestiférés et on nomme un médecin et un chirurgien.
La maladie régna pendant plusieurs années dans tout le pays.
On trouvera peut-être quelque intérêt à voir groupées chronologiquement les mentions qu’on trouve éparses dans le manual jusqu’à la fin du XVIe siècle. /85/
1548. 23 février. — Le Conseil donne à l’hôpital de Saint-Roch les biens de toutes les confréries.
1550. 9 septembre. — On nomme un marron (Jean Chevat), avec la même pension qu’on donnait au marron, en 1543. Jean Bendey est nommé chirurgien et barbier des pestiférés.
1550. 14 octobre. — Jean Chevat, « qui n’est suffisant et n’a satisfaict à son serement », est remplacé par Jacques Rot, dit Seiglaz, avec sa femme, pour servir avec l’autre marron, nommé André Arbin.
1551. 23 avril. — François Bargiz est nommé marron à la place de Jacques Rot.
1551. 5 mai. — Les seigneurs du Conseil acceptent « pour guidon de leur hospitallier et povres pestiffereulx de leurs hospital Saint Roch, ascavoir Claude de Vinoge, borrellier, leurs bourgeois, luy promettant six gros par sepmaine. »
1551. 18 juin. — On décide de ne pas lever le mai cette année.
1551. 25 août. — Le Conseil arrête de nommer un diacre « ad consolandum pestiferos, » que les bannerets et dizeniers feront bonne garde et que ceux qui sont infectés de peste doivent se tenir à l’écart de ceux qui sont en santé. (Quod omnes qui erunt infecti se abstrahant a consortio sanorum.)
1551. 26 août. — On prend quelques précautions de propreté qui ne donnent pas une idée très avantageuse des habitudes de nos ancêtres : « A esté ordonné que nul ne debge gecter, ny de jour ny de nuyct, uryne hors les fenestres des maisons, ny porter bue [boue] et aultres chouses infectes de nuyct devant neufz heures, sous le bamp de LX sols. »
1552. 7 janvier. — Jean Bendey est de nouveau « admis barbier et cirurgien des povres pestiffereulx, à gage et pention de laz ville, audict son art, pour ladicte communaulté, à trente florins par an en temps de prospérité et santé; et en temps de peste, pour quarante escus par an, promettant bien servir par son serement et non déshobéyr. »
1552. 15 octobre. — « Ordonné au consolateur des povres pestifféreux quarante escus par an, à scavoir dix escus par /86/ quartemps pendant temps dangereux et trente florins en temps de félicité. »
1553. 13 avril. — « Johan Bendey, cirurgien des pestifféreux, est reconfirmé en son dict service, par les termes, temps et sallaires de l’an dernièrement prochainement passé. »
1555. 14 novembre. — « Nycod Gazon a esté admis barbier des pouvres pestiffereux sous semblable gage que Chambrettat avoit et dix florins davantage. »
1561. 2 octobre. — « Messeigneurs ontz mis messy Jaques Blécheret, docteur, en la pension annuelle, comme estoit maistre François Vitalis, ministre des paouvres pestifféroux, temps qu’il nous playraz; laquelle pension se poyeraz et prendraz sur les biens de paouvres, en ce qu’il dege la dimenche soyt trouver à la Magdelenne pour fayre prier les paouvres et iceulx consoler par la paroulle de Dieu. »
1564. 8 août. — « … Et ce pourtant qu’audict lieu de Lyon, il meurt de peste grandement et qu’on ne permet personne sortant du dict lieu de Lion d’entrer, ny à Genefve, ni aultres villes par le chemin. »
1564. 22 août. — On décide de mettre des gardes aux portes de la ville « pour se donner garde et donner serement si les venans sont des lieux où il sont suspectz de maladie de peste. »
1564. 24 août. « Mess. ont esleu pour marron de l’infection de la maladie de peste, de quelle Dieu par sa saincte grâce nous en veuille préserver, assavoir Pierre de Payerne, lequel a faict serement de bien et loyalement servir audict office de marron, et de bien adviser et cognoistre bien de ladicte maladie; que s’il y a aucung malade, de regarder si c’est de ladicte maladie, le doibge révéler, comme s’appertient. »
Louys Farjoz « a esté esleu pour garde des paouvres infectés de la prédicte maladie. »
» Est ordonné le sgr Claude Sudal , comme admodiateur dudict hospital de St Roch, doibge subvenir les pauvres malades infectés et fournir des vivres et choses nécessaires pour le soulagement et ayde desdictz pouvres infectés de peste, si telle nécessité survenoit. Que Dieu nous en veuille trèstous préserver. » /87/
1564. 29 août. — « Est ordonné à Pierre de Payerne, Loys Farjoz et une femme, constitués pour servir à l’hospital de St Roch au temps contagieux, à ungchescun d’eulx une coupe de messel sur l’aumosne de Montheron. »
» Messeigneurs ont esleu Claude Plantaz pour compaignon et ayde de Pierre de Payerne, en ce qu’il a esté constitué pour marron des pestifféreux. »
» Semblablement a esté esleue pour assister es pouvres malades à l’hospital de St Roch, Morisaz Guerraz. »
1564. 15 septembre. — On décide de mettre des gardes aux portes de la ville, « pour s’enquérir et s’informer des estrangiers venus en cette ville, dont pour le myeulx l’on sache lire les actestations et passeportz … et ce occasion de pourveoir au dangier qu’est à present par le vouloir de Dieu en plusieurs lieux de infection de peste. »
1564. 5 octobre. — « Le seigneur bourguemaistre a refferu à messieurs de Conseilz comme dimenche ouz lundi dernièrement passé, monseigneur le ballifz moderne, noble Pierre d’Erlach, luy a dict et faictz sçavoir comme ilz havoit recehuz lettres de noz trèsredoubtés seigneurs de Berne de continuer et de contremander les monstres des armes quilz se debvoient faire lundi prochainement venant, à laz bienvenue de monseigneur le ballifs novellement esleu, noble Peterman de Vatville; et ce à cause de suspection de peste. »
1564. 12 octobre. — On reconfirme la pension de « maistre Johan Bendey. »
1564. 19 décembre. — La peste paraît avoir diminué, puisque le Conseil permet à « Johan Bendey, barbier des pestifférés de demeurer en la maison de l’hospital de St Roch pour la garde d’icelle. Quant ès deux marrons, est ordonné de s’enquérir qui sera le plus propre pour retenir. »
1565. 25 septembre. — On décide de renvoyer d’un an la foire de la St Gall (16 octobre), « causant le temps dangereux de peste. Que Dieu nous veuille préserver. »
1565. 11 octobre. — Le Conseil apprend qu’un petit enfant est mort à l’auberge du Lion et ordonne qu’il ne soit point enterré /88/ avant d’avoir été visité « s’il auroit la peste ou non; » que l’hôte et les domestiques de l’auberge doivent se tenir serrés et ne pas se mêler avec les autres. « Et ont commandé à maistre Jehan Bendey, barbier pestifféré, de aller visiter ledict enfant en la place du Lion, au jour, et mener avec luy ung des marrons seulement, et qu’ils doibgent, par le serement qu’ilz ont faict, révéler fidellement ce qu’ilz en trouveront, sans aucune cauthelle ny feincte … Suyvant la prédicte ordonnance lesdictz seigneurs banderetz sont allés pour entendre la relation desdictz barbier et marron, touchant la visitation dudict enfant décédé. Lequel barbier a refféru, par son serement, avoir ladicte maladie, ayant des taches et dur dessoubz le bras et estre taches de peste. Dont mesdictz seigneurs ont derechefz ordonné que ledict hoste doibge serrer sa maison et les dictz barbier et marron se tenir à l’hospital. »
1565. 9 novembre. — Louis Légeret d’Aigle demande la permission de demeurer en ville jusqu’à Pâques, « pour ce que en son pays est infection grande de peste. »
1566. 5 janvier. — « Mes honorés seigneurs de Conseil ayantz entendu la preudhomie, sçavoir et industrie de Estienne, filz de Jehan Flament de Lyon, bourgeois de Genève, barbier, mesmement par la relation en dict conseil faicte par monsieur Sterpin, docteur en médicine; l’ayant enquis de son savoir et expérience en l’art de cirurgie et causes provenantes de peste, avec les moyens requis, remèdes et médicamens propres pour en user et remédier contre ladicte maladie, auroit rendu assés pertinente raison, entant qu’il en a heu bonne résolution dudict barbier. Pour ces causes, mesdictz seigneurs l’ont constitué, estably et ordonné barbier des pouvres pestifférés en leur ville … Sera tenu de visiter ceulx dont il en sera requis et de fidellement révéler et reférer en saine conscience, sans aucune déception, ceulx que seron actainct dedicte maladie et ceulx que ne le seront pas, après deue visite. En oultre sera tenu, selon le don et grâce que le Seigneur Dieu luy aura donné en foy et religion chrestienne, par toute bonne diligence consoler chrestiennement les pouvres malades, servant en cest /89/ endroict de consolateur envers iceulx, et les admonester de leur salut par moyens de saine doctrine et passages de la Saincte Escripture et comme icelle purement nous enseigner … Lequel service, tant de consolateur que de barbier, a volontairement accepté et de son plein gré…
1566. 2 avril. — On paie un supplément aux sonneurs qui ont sonné « les closches au grand temple pour les presches, cependant que à sainctz François a esté deffendu d’y prescher, causant laz suspection de peste. » Les comptes nous apprennent que ce fut pendant six semaines.
1566. 10 octobre. — « Messeigneurs ont ordonné, causant la suspection du dangier de malladie de peste éminente et enflammée cy environ, autour de ceste ville et cité de Lausanne (de quelle Dieu par saz grâce nous veullie préserver), que l’on doibge faire à faire, en premier lieu, les publications de mieulx adsister et fréquenter les sermons de laz parolle de Dieu, tant ès jours de dimenche que jour de prières, et d’havoir recours à Dieu premièrement, comme est raisonnable. Et puis de mettre gardes ès portes de ville, comme parcy devant avoit esté accostumé, et de non permettre entrer les pestifférés et suspects de malladie de peste dans laz ville. »
1566. 12 novembre. — « Ordonné debvoir faire des cabolles près l’hospital St Roch, pour exhorer les infectés, ouz soit suspectz de peste. »
1567. 30 juin. — La peste règne encore. On met les convalescents « chez laz Bordaz 1 . »
1567. 22 juillet. — « Ordonné que le barbier pestifféroux doibge entrer à l’hospital et commencer, tant pour servir de son art de sirurgie que pour consoler les povres mallades pestifféroux. »
1567. 21 août. — On nomme un nouveau marron et une marronne.
1567. 18 septembre. — « Le barbier pestifféreux doibge entrer /90/ en l’hospital, pour exercer son office et consoler les povres pestifférés. »
1567. 23 octobre. — « Les ministres présentent comme consolateur des pestiférés Francoys Brucelles, natifz de Macon, qu’a esté long temps à Genefve, habitant par l’espace d’environ 22 ans. »
1569. 17 septembre. — « La maladie de peste a commencé en ceste ville, comme on asseure, en la maison où se tient la Parisa, aussi en la maison de Bernardin Bichet, en la maison de maistre Jehan Richard, hyer vendredy. »
1569. 22 septembre. — « Ordonné que ceulx qui sont infectés ne se doibgent mesler parmy les sains et qu’ilz doibgent porter une verge pour signe. »
Ordonné de faire deux cabolles et en faire « vers La Borda. »
1569. 11 octobre. — « Ordonné doresnavant n’ensepvelir les pestifférés à St Françoys, ains au curtil dessous l’estaing près la porte dudict St Françoys, au faulxbourg du Chesne. »
1570. 23 février. — La peste semble finie, car les barbiers et marrons peuvent sortir de Saint-Roch.
1571. 12 septembre. — Les ministres présentent comme consolateur pour les pauvres pestiférés « maistre Christofle Lazalus. »
1571. 27 septembre. — On ordonne de faire « des cabolles » en quelques pièces près de Saint-Roch.
1571. 4 octobre. — « Monsieur Jaques Aulbert, docteur médecyn de ceste ville, a présenté à messeigneurs ung livre en papier, par luy dressé et composé, tant pour régime de vivre en général pour la préservation de la peste, remèdes intérieurs et extérieurs pour se préserver de la peste, pour la curation d’icelle, du subiect d’icelle et aultre déclaration. »
1571. 16 octobre. — On délivre au sieur Aulbert, docteur médecin, trente florins, « pour avoir dressé certain escript pour le régime en temps de peste, que pour remède contre dicte maladie. »
(Ce livre fut imprimé chez Jean Le Preulx, imprimeur à Lausanne, qui en remit 350 exemplaires au Conseil le 22 novembre.)
2572. 13 mai. « Ordonné de visiter lieu propre et commode pour y mectre d’aultres cabolles pour les povres pestifférés. » /91/
1572. 15 juillet. — Les ministres ayant « esté chargés de eslire ung consolateur pour la consolation des pauvres pestifférés, sur ce ont déclairé qu’ilz ont faict toute diligence pour en recouvrer ung consolateur, ce que n’en ont point trouvé quy aye voulsu accepter dicte charge, touteffois s’offrent faire leur debvoir de consoler et visiter. »
1572. 27 octobre. — « Causant maladie contagieuse de peste, pour ne s’estre le vin vendu à pinte, aussi plusieurs hostelleries serrées, » on gratifie l’amodiateur du longuel de 300 florins sur sa ferme.
1578. 18 novembre. — « Messieurs ont ordonné, puisqu’il plaît à Dieu nous visiter de ses verges, par maladie de peste, que on doibt réduire des povres attainctz de peste en l’hospital St Roch, et maistre Guillaume Eustace, dict Mariolaz, marron, et sa femme marronne debvoir exercer leur charge. »
1580. 1er octobre. — « Nos dicts seigneurs ont constitué Lucius Gättlin, de Memmingen, au service de chirurgien et barbier des pestifférés. »
1582. 30 octobre. — « Ordonné, veu les verges de présent évidentes de peste, l’hospital doibge estre ouvert et Loys Yvert, marron des pestifférés y doibge entrer et visiter les décédés de peste et ensepvelir avec bière couverte honnestement. »
1584. 19 novembre. — On décide de pourvoir de marron et marronne l’hôpital Saint-Roch « causant ce y a desjà troys maysons en la cité infectées de maladie contagieuse de peste. »
Conseil.
1542. 5 octobre. — Jovis, quinta mensis octobris seu post sanctum Michaelem anno quo supra 1542, in assistentia huius novi consilii fuere astantes : videlicet, primo, honorabilis Franciscus Sauvey, burgimagister, nobilis Claudius Praroman, nobilis Ludovicus Gemel, Petrus Gauthey, Johannes Borgeys, Regnerius Pivard, Petrus de Sancto Ciriaco, Enabulus de Curia, Claudius Fontannaz, Jacobus /92/ Boufz, Johannes Goudard, Franciscus Blescheret, Guilliermus Sodali, Franciscus Seynyou, Franciscus de Playct, Franciscus Guybaud, nobilis Petrus Ravier, P. Vuavre, Georgius du Crest, Stephanus Grand, Aymonetus Roschet, Guillermus de Lalex, Ludovicus d’Yverdon, Franciscus Daux, qui omnes prenominati prestiterunt juramentum in talibus prestari assuetum.
Election du bourgmestre.
1542. 19 novembre. — Fuit congregata communitas Lausanne ad eo quod honnorabilis Franciscus Sauvey, burgimagister Lausanne, nudiustertius dies suos clausit extremos, pro eligendo unum novum et alium burgimagistrum. Et per vocum pluralitatem fuit nominatus, vocatus et electus per triennium nobilis Ludovicus Gemel, qui onus acceptavit et juramentum in forma prestitit, etc., et hoc sub salario assueto, videlicet quinquaginta florenorum annualium.
Jusqu’au milieu du XVIe siècle, les élections de bourgmestre ne sont pas régulièrement consignées dans le manual. Les fonctions de Jean Borgeys, élu bourgmestre en septembre 1536, se terminaient légalement en septembre 1539. Au moment de l’élection de 1539 il y eut quelque difficulté à trouver un citoyen qui voulût accepter cette honorable mais onéreuse charge. En conséquence le Conseil rendit une ordonnance portant que tout citoyen qui refuserait la place de bourgmestre paierait une amende de cent livres et serait banni pour an et jour. (Voyez l’article du 28 septembre 1539.)
Dans les manuaux Jean de Saint-Cierge paraît comme bourgmestre du 2 octobre 1539 au 25 avril 1540. Le 25 mai, messy Gerard Grand préside le Conseil pro « burgimagistro; » /93/ le30 août il est qualifié burgimagister. Le 7 octobre 1540 le bourgmestre est François Sauvey ou Souvey; il avait probablement été nommé le premier dimanche de septembre, époque réglementaire. Il présida le conseil jusqu’au 9 novembre 1542 et mourut (peut-être de peste) le 16 du même mois, avant d’avoir accompli ses trois années de charge. Le manual nous dit qu’il fut remplacé par noble Louis Gimel, auquel succéda, le 7 septembre 1545, noble Jacques de Praroman.
Conseil.
1543. 27 septembre. — Consilium anni 1543. Pro eodem consilio fuerunt electi sequentes : Primo in banderia Burgi nobilis Claudius de Pratoromano, nobilis F. de Pré dominus de Granges, honorabilis Stephanus Grant, Bonaventura Frontonex, ac vexillifer Franciscus Blescheret.
In banderia Civitatis honorabilis Petrus Vuavre ac Franciscus Gindron, necnon Guilliermus Sudali vexilliffer.
In banderia Paludis : nobilis Petrus de Sancto Ciriaco, honorabiles Girardus Grant, Johannes Borgeois, P. Menestrey, Guilliermus Ravenel et Franciscus de Plaict, cum Claudio Gumoens juniore vexilliffero.
In banderia Sancti Laurencii : honorabilis Franciscus Guibaud, borserius; Georgius de Cresto, nobilis Albertus Loys, Jacobus Boufz, cum Bernardo Ruffi vexilliffero.
In banderia Pontis honorabiles Petrus Gauthey, Guilliermus Delalex, Anthonius Bouvard, Stephanus Gaudin junior, cum Aymoneto Roschet vexillifero.
Et jovis quarta octobris comparuerunt prelibati domini qui fecerunt solempniter juramentum requisitum. /94/
Dissolution de l’abbaye des Nobles Enfans.
1544. 28 avril. — Fuerunt congregati burgenses, seu commune, coram quibus comparuerunt nobiles Jacobus de Praroman, Franciscus Chabie et Ferdinandus Loys, asserti delegati parte abbatie infantium ville Lausane et eo nomine; quiquidem vocis organo prenominati Ferdinandi Loys sponte et libere relaxarunt et remiserunt communitati Lausanne omnia et singula bona communitati ipsius abbatie pertinentia, et hoc satisfaciendo compositioni centum scutorum auri facte per dominos Bernenses occasione certarum insolentiarum per ipsos Bernenses assertarum instinctu Petri Viret Lausane latoris verbi Dei. Quod fuit per ipsos burgenses acceptum et ratifficatum, in hoc tamen quod ipsa bona taxari debeant per dominos consiliarios Lausanne et quatuor parte dicte abbatie eligendos; et eo casu si contingat ipsa bona valere ultra summam dictorum centum scutorum, summa illa restans expediri debeat prenominatis Jacobo Praroman, Francisco Chabie et Ferdinando Loys et eorum consortibus pro supportatione et in exhonerationem expensarum per ipsos sustentarum occasione injuste accusationis ipsi abbacie imposite per quem supra Viretum.
Ruchat, V, pag. 244, donne assez de détails sur l’Abbaye des enfans de la ville dont on a parlé précédemment. On ajoutera seulement ici que, outre l’amende générale de 100 écus d’or infligée à l’abbaye, quelques-uns de ses membres paraissent avoir été condamnés spécialement; ainsi Pierre Ravier à 10 écus d’or, François Chabie à 10 écus, Jacques de Praroman à 10 écus et Ferrand Loys à 20 écus. — Trois ans plus tard la liquidation des biens de cette abbaye n’était pas terminée, car le /95/ 10 février 1547, Ferrand Loys, Urbain Constantini, François Gignilliati, Jacques Daux, Marius Francisci, Jean Pivard, Jean Floret, Jean Carrad, Jean de Lalex, Jacques Bovyon, jadis recteurs de l’abbaye, demandent compensation pour les frais qu’ils ont eu à Berne pour la dissolution de l’abbaye. Le Conseil leur accorde à chacun 8 écus au soleil sur les revenus de l’abbaye, en attendant satisfaction complète.
Bourgeoisie.
1544. 4 août. — Domini sexaginta burgenses fuerunt simul congregati pro tractando de burgensia extraneorum habitantium in villa et civitate Lausannensi. Per quos dominos fuit dominis XXIV consulibus data potestas tractandi de et super eodem facto ad reipublice utilitatem.
10 août. — Dom. ducentum burgenses dederunt dominis consulibus omnimodam potestatem concludendi et ordinandi de eadem burgensia extraneorum habitantium in civitate Lausannensi et etiam de compositione fienda; promittendo observare omne id et quicquid super eodem facto fuerit conclusum per eosdem dominos sine quacumque contraventione.
Tout ce qui concerne les origines du droit de bourgeoisie à Lausanne est pour moi d’une grande obscurité. Les documents qui nous sont parvenus sur ce sujet important sont rares, confus et souvent contradictoires. On a vu dans une partie antérieure de ce travail (M. D. R. XXXVI pag. 68 et suivantes), qu’au commencement du XVIe siècle il suffisait de posséder une maison dans la ville pour être réputé bourgeois de Lausanne, et que néanmoins plusieurs personnages non qualifiés de bourgeois y étaient revêtus de fonctions publiques même importantes.
En 1527, il fut décidé que les étrangers domiciliés à Lausanne /96/ et non propriétaires de maisons seraient astreints à payer une certaine somme pour être admis à la bourgeoisie, et que tout locataire d’appartement devrait être agréé par le Conseil. Mais aucun document, à ma connaissance, ne prouve que des admissions à la bourgeoisie, à prix d’argent, aient eu lieu à cette époque.
Sous le nouveau régime, le 23 février 1539, la ville étant infestée d’étrangers sans moyens d’existence, le Conseil renouvela l’ordonnance aux termes de laquelle nul bourgeois ne pouvait prendre un locataire dans sa maison sans le faire préalablement agréer par le Conseil. Une année et demie plus tard, le 25 juillet 1540, il fut décidé que tout étranger habitant Lausanne serait tenu de produire une attestation de son origine et de ses mœurs, sous peine de bannissement 1 .
Au mois d’août 1544, comme l’article du manual nous l’apprend, on revint au projet qu’on avait eu en 1527 et on résolut d’admettre à la bourgeoisie plusieurs étrangers domiciliés dans la ville (burgensia extraneorum habitancium), et les Soixante et Deux Cents donnèrent au Conseil pleins pouvoirs pour régler cette affaire au mieux des intérêts de la ville et pour fixer la finance d’admission 2 .
En conséquence, à la fin de l’année 1544 et au commencement /97/ de 1545, on procéda à une espèce de recensement ou revision (visio) des différents quartiers de la ville et on admit un grand nombre de personnes à la bourgeoisie, contre une redevance, une fois payée, variant de 5 florins à 20 écus d’or.
On serait en droit de supposer que, d’après l’usage admis jusqu’alors, tout propriétaire de maison aurait été considérécomme bourgeois et aurait été au bénéfice de cette position acquise. Mais on reconnaît avec surprise que ce ne fut point le cas, ce qui augmente encore l’obscurité qui règne dans cette matière déjà si obscure.
En effet on possède encore aux archives de Lausanne la minute d’un fragment de liste d’admissions à la bourgeoisie qui furent faites par le Conseil, du 23 décembre 1544 au 15 janvier 1545, dans les bannières de Bourg, du Pont, de la Palud et de la Cité. Sur 264 personnes qui se présentèrent devant le Conseil, 58 propriétaires de maisons sont admis comme bourgeois, 40 personnes admises à la bourgeoisie n’ont pas de maisons; pour les 166 autres il n’y a aucune indication à ce sujet. Sur ce même nombre de 264 personnages, un refuse de payer la finance d’admission et on le bannit; 3 sont simplement assuffertés, c’est-à-dire qu’ils reçoivent un permis de séjour, sans droit de bourgeoisie; 42 sont simplement nommés sans aucune indication quelconque d’admission ou de prix; donc il y eut 218 bourgeois admis.
Parmi les personnages admis à la bourgeoisie en décembre 1544 et janvier 1545, on en remarque avec étonnement plusieurs déjà connus dans l’histoire de la ville et ayant rempli des charges municipales ou autres. On citera comme exemples :
Humbert Chautran. (Honorabilis Humbertus Chautran acceptavit pro viginti scutis, quam summam pro bonis serviciis [domini] dederunt.) Il était du conseil des LX en 1536. Le commissaire Rebeur qui, au milieu du XVIIe siècle, a fait un relevé des anciens bourgeois de Lausanne, dit qu’il était « poste pour le roy de France. »
Antoine Grant. (Honorabilis Anthonius Grant de Novo Castro, ex dominis consulibus Lausanne, fuit acceptus pro 4 scutis, quos /98/ pro bonis serviciis domini dederunt.) Il était aussi du conseil des LX en 1536.
Antoine Grandis. (Discretus Anthonius Grandis, de Sancto Martino de Vaux, de loco de Saint Sales, pro duobus scutis.) Il était membre du conseil en 1534 et 1535.
Noble Jacques Dedin ou Didin. (Nobilis Jacobus Dedini fuit acceptus pro sex scutis, quos domini pro bonis serviciis dederunt ei.) Il avait été vice-bailli et sautier de l’évêque de 1525 à 1536.
François Verney. (Franciscus Verney, de Lustrier, habet domum et fuit acceptus pro X flor.) Il avait fait partie du contingent lausannois dans l’armée de Berne, en 1536.
Jacques Gerbex. (Jacobus Gerbex, de Espesses, habet domum in Quercu. Fuit admissus pro V fl.) Il avait fait partie du même contingent.
Messire Girard Grant, docteur en droit. (Dominus Girardus Grant acceptavit. Domini dederunt ei decem scutos solis pro serviciis.) Girard Grant avait été syndic en 1523, avait joué un rôle prépondérant dans les négociations qui amenèrent la conclusion de la combourgeoisie avec Berne et Fribourg, avait été consulté par le conseil dans toutes les questions difficiles, et tout récemment encore avait rempli les fonctions de bourgmestre par intérim, de mai à septembre 1540.
Nicod Bergier. (Nicodus Bergier fuit acceptus pro quattuor scutis, quos domini dederunt pro bonis serviciis tam per ipsum quam filios suos factis.) Il avait été nommé du conseil des LX en 1536.
Antoine Gavet. (Anthonius Gavet, de Rupe, natus burgensis Lausanne, fuit acceptus et juravit, et compositum ad bene placitum dicti Gavet.) Outre qu’il est expressément dit être né bourgeois de Lausanne, A. Gavet avait été membre du Conseil en 1527, 1529, 1535, 1536.
François de Plaict. (Franciscus de Plaict fuit acceptus in burgensem et dederunt domini compositionem. Prestitit juramentum.) Il avait été, de 1528 à 1536, secrétaire de la cour temporelle de l’évêque, qui l’avait nommé à ces fonctions sur la présentation du Conseil de la ville. /99/
Denis Marjollat. (Denisius Marjollat, de Viviaco, fuit acceptus pro quinque florenis. Habet domum in Palude.) Il avait fait partie, en 1536, du contingent lausannois dans l’armée de Berne.
Louis Constantin. (Ludovicus Constantini acceptavit; V flor.) Il était membre de la cour de justice de l’évêque en 1534.
Enfin, parmi les personnes simplement mentionnées dans la liste, sans autre indication quelconque, soit de réception à la bourgeoisie, soit de prix, on rencontre entre autres les noms suivants de personnages établis à Lausanne et ayant exercé des fonctions publiques :
Mermet Malliet, qui était huissier du Conseil et possédait une maison dans la rue de Bourg.
Guillaume de Lalex, conseiller en 1533 et 1534, banneret en 1536.
Antoine Bovard, homme considérable, lieutenant d’un contingent militaire lausannois en 1533, conseiller et ambassadeur à Fribourg en 1533, capitaine en 1534, conseiller en 1534, 1535 et 1536, ambassadeur à Berne pour le renouvellement de la combourgeoisie en janvier 1536, commandant de place à Lausanne dans le même mois de janvier, gardien pour la ville du couvent de Sainte-Catherine du Jorat, ambassadeur à Genève, membre de l’ambassade lausannoise qui accepta la largition du 1er novembre 1536.
Jacques Daillens, banneret en 1534 et 1535, membre des LX en 1536.
P. Curnillion, conseiller en 1529, 1530, 1535, 1536; chargé de porter de l’argent aux Lausannois qui se trouvaient dans l’armée de Berne en 1536, gardien de l’abbaye de Montheron pour la ville pendant la même année; membre de l’ambassade qui accepta la largition du 1er novembre 1536.
Dans cette liste de 264 noms on en pourrait relever bien d’autres appartenant à des citoyens connus, établis à Lausanne et y ayant exercé des fonctions publiques 1 . /100/
L’examen attentif de tous ces noms paraît devoir conduire à la conclusion suivante :
1o Tout habitant de Lausanne, ancien bourgeois ou non (voy. le nom d’Antoine Gavet), propriétaire de maison ou locataire, dut régulariser sa position, payer une finance et prêter serment au Conseil.
2o Cette finance était fixée arbitrairement par le Conseil, probablement d’après la position de fortune du bourgeois reçu. On dispensait de cette taxe ceux qui s’étaient distingués par des services rendus à la ville.
3o Cette liste de noms, qu’on a toujours considérée comme le premier catalogue connu de nouveaux bourgeois reçus à Lausanne, n’est qu’un fragment d’un recensement général des habitants de la ville, par lequel on voulut exécuter la décision prise d’éloigner les gens sans aveu et sans moyens d’existence et ne /101/ conserver dans la ville, soit comme bourgeois soit comme établis, que ceux qui pourraient payer la taxe.
4o Un grand nombre de ceux qui sont mentionnés comme ayant été reçus bourgeois en décembre 1544 et janvier 1545, l’étaient déjà, soit comme propriétaires de maisons, soit en vertu d’autres circonstances. En conséquence, on ne peut affirmer avec tertitude que certains personnages importants et revêtus de charges publiques ne fussent pas déjà bourgeois avant ce recensement de 1544 et 1545, où ils sont mentionnés comme ayant été reçus à la bourgeoisie.
Le taux d’admission à la bourgeoisie ayant paru assez arbitraire LL. EE. envoyèrent au Conseil de Lausanne le rescrit suivant :
« Nostre amyable salutation devant mise. Nobles, prudans, trèschers et féaulx, Nous avons entendu vostre lettre datée IXe jour de ce moys, faysant mention des empos que prétendez mectre sus les estrangiers que sont venu habiter en la ville de Lausanne, et par ces moyens recepvoir en bourgeoys et les laysser jouyr et user de toutes utilités communes. Surquoy vous respondons et par mode d’ordonnance advisons et establissons que des estrangiers que doresenavant viendront pour habiter et faire résidence rière Lausanne et user, jouyr et gaudir des pasquiers, utilités et émolumens commungs, que ung chescun d’eulx, s’il est paravant nostre soubgect doige payer pour l’entraige dix florin; et celluy qu’est soubgect des ligues vingt florin, et ung estrangier trente florin; touteffoys avant estre receu, monstrer bonnes lettres et sceaulx et digne de foy de leur nayssance, s’il est procréé de légitime mariage ou bastard, ou s’il est de libère et non servile ou talliable condition, lesquelz tailliables ou de servile condition ne debvez accepter pour habiter rière vous. Item que ung chescun ayt et monstre testimonialles comme et pour quelles raysons il est départy de son pays, et de sa renommée et conversation; en ce voullons estre réservés les prédicans, les maistres d’escolles, les professeurs, les escolliers, noz commissaires et tous aultres noz officiers.
» Datum XVI. decembris 1544.
» L’Advoyer et Conseil de Berne. » /102/
Suscription : Aulx nobles, prudans, nos trèschers et féaulx Bourgmaistre et Conseil de Lausanne.
Note du secrétaire de Lausanne : Le mandement envoyé à Messieurs de la ville sur la cause de la bourgeoisie.
(Arch. de Laus. Lettre originale avec traces de sceau.)
Mais cette ordonnance ne paraît pas avoir été exactement observée.
Quand le prix de la bourgeoisie n’était pas payé comptant, la ville en exigeait l’intérêt au 5 %.
Pendant les années suivantes, surtout de 1551 à 1554, on reçut un grand nombre de bourgeois et d’habitants assouffertés (c’est-à-dire ayant un permis de séjour), parmi lesquels on remarque encore plusieurs Français. (Voyez l’article du 2 mai 1554.) Mais la bourgeoisie paraît avoir été personnelle et liée au domicile dans la ville et à la possession d’une maison. C’est le 8 février 1558 qu’on voit pour la première fois mentionner les enfants d’un nouveau bourgeois : « Pierre Acton, de Rossillon en Provence, ha esté recehuz et admis bourgeois pour luy et les siens procréés et à procréer enfans, pour quattre escus délivrés à leurs moderne bourcier et deux escus délivrés auldictz seigneurs pour leurs vin. Lequel a faict le serement à ce resquis. » Mais cette clause en faveur des enfants, n’est point répétée dans d’autres admissions pendant plusieurs années.
Le 20 novembre 1564, le conseil des Soixante décide d’observer exactement une ancienne ordonnance (que je n’ai point retrouvée), portant « de ne recevoir aulcung en leur ville à bourgeois qu’il n’ayt pour le moins le vaillant de cent escus réduictz en ladicte ville. »
Le 6 juin 1566, une nouvelle ordonnance maintient la même condition et la compléte. On n’admettra aucun bourgeois qui ne soit de condition franche et libre, et chaque bourgeois nouvellement reçu payera 100 florins et 10 florins pour chaque enfant mâle ou femelle. Quant aux habitants, on n’en assouffertera aucun qui ne soit de condition franche et libre, qui n’ait un métier pour gagner sa vie et ne possède au moins 100 florins. Le prix de /103/ l’assouffertation est de 100 florins, mais elle est exclusivement personnelle, « et ce sera tant seulement pour eux, sans que leurs enfans ilz soient compris, nonobstant la nativité d’iceulx en nostre dicte ville et cité, laquelle ne leur pourra servir aulcunement. » Ces assouffertés ne jouissent pas des paquiers communs, sauf par permission accordée chaque année à Pâques et contre une finance de 12 sols par grosse bête et de 3 sols par petite bête; ils ne peuvent non plus jouir des bois de la communauté. Ceux qui ont été reçus bourgeois et assouffertés jusqu’à aujourd’hui, parce qu’ils se disaient libres et francs et qui se trouveront être sujets d’autres seigneurs, seront renvoyés « de la ville et seigneurie et toute leur famille et postérité, nonobstant leur nativité estre heue dans nostre dicte ville, cité et seigneurie de Lausanne. » Les sujets d’autres seigneurs, précédemment reçus, qui se seront fait affranchir subséquemment, recevront de nouvelles lettres pour lesquelles les bourgeois paieront 100 florins et les assuffertés 10 florins.
La formule des lettres de bourgeoisie et d’habitation à délivrer à l’avenir est inscrite tout au long dans le manual.
Ces conditions furent modérées le 5 janvier 1568, et on régla que chaque nouveau bourgeois sera tenu d’avoir 500 florins et chaque assoufferté 100 florins en immeubles, non uniquement dans le territoire de Lausanne, mais dans les terres de LL. EE. Les assouffertés pourront couper du bois mort et des épines et ne paieront que 6 sols par grosse bête et 6 deniers par petite bête, pour droit de pâturage. Enfin, « quant aux enfans desjà néz des assouffertés dans ladicte ville de Lausanne, l’on ne les contraindra point à sortir hors laz ville, ains les lairra l’on comme tojours assouffertés; et ce pour le temps de présent causant les grandes guerres et perséquutions contre les fidelles chrestiens par les papistes et infidelles commencées, calamités de pestes et aultres troubles et misères régnantes suz laz face de laz terre. »
A ce sujet le Conseil reçut de LL. EE. la lettre suivante :
« L’Advoyer et Conseil de la ville de Berne, aux nobles, honnorables, prudens, nos trèschiers et féaulx Bourguemeistre et Conseil de la ville de Lausanne, Salut. Avoir entendu le contenu de /104/ voz lettres, par lesquelles demandez nostre advis, si vous debvez ou pouvez recepvoir en nostre ville de Lausanne les personnages et mennages de la nation françoise qui, pour éviter les cruaultéz que les papistes exercent contre eulx, viendront se retirer en nostre dicte ville de Lausanne pour servir à la gloire de Dieu et cercher le repos de leurs consciences; Vous mandons pour responce que vehues les grandes callamitéz, persécutions et cruaultéz que pour le jourdhuy par les ennemys de la religion chrestienne sont préparez aux pouvres fidelles, tant de ladite nation françoise que aultres, nous ne sçaurions en bonne conscience leur refuser accès, habitation et résidence rière noz terres et pays, ains sommes trèscontentz qu’ils soyent de voz bénignement receus et traictés le plus humainement et famillièrement qu’il sera possible; Pourveu qu’usant en ce de discrétion, vous ne recepviés indifferemment toutes sortes de gens incongneues, ains seulement ceux là desquelz vous pourrez avoir bonne actestation et réputation d’estre gens de bien et dignes de l’hospitallité susdicte. Lesquelz estans par vous receuz pour manans et habitans de vostre ville, donnerez ordre qu’aulcung tord, excès, opprobre ne viollence leur soit faicte, ains entretenuz le plus gracieusement qu’il sera possible (comme dict est) jusques à ce qu’il plaira au Seigneur les ramener en leur pays, estantz les tumultes de guerre, oppressions et persécutions présentement y exercées par sa grâce appaisées. Sur ce vous sachés conduyre.
» Datum VIIa Augusti 1568. »
Suscription : Aulx nobles, honnorables, prudens, noz trèschiers et féaulx, Bourguemeystre et Conseil de la ville de Lausanne.
Note du secrétaire de Lausanne : Lettres et mandt pour laz réception des François fugitifz pour laz perséquution de l’évangille. Recehue le Xe d’aoust 1568.
(Arch. de Lausanne. Lettre originale, avec sceau plaqué.)
Ces derniers règlements nécessitèrent une revision des /105/ bourgeois pareille à celle de 1544. Elle eut lieu au mois de janvier 1568.
Le 19 octobre 1620, le prix de la bourgeoisie est fixé à 300 florins, avec l’obligation pour le nouveau bourgeois de posséder dans la juridiction mille florins en fonds clairs et liquides.
Le 8 novembre 1621, le premier de ces deux derniers chiffres est porté à 400 florins et le second à 1500 florins.
Le 20 octobre 1657, il « est ordonné que ceux qui seront cy après receus à bourgeois en ceste ville ne pourront, ny eux, ny leurs enfants qui seront desja néz, prétendre à aucune charge en ce public, sinon à celle des seigneurs 200, et seulement trois ans après telle réception. Leurs enfans qui naistront dans la ville après telle réception, qui seront premiers citoyens, ne pourront non plus prétendre, ny ne seront establis en la charge de sgr conseiller, de sgr juge, secrétaire et autres qui s’establissent par messieurs les 200, ains seulement à la charge et chambre des sgrs 60. Mais seulement les enfants dedicts enfants pourront estre establis et esleus ès dictes charges de sgrs conseillers et autres, quand ils en seront recongneus dignes et capables. »
Le 19 octobre 1659, le prix de la bourgeoisie est fixé à 600 fl. y compris le fils aîné, pour chacun des autres fils déjà nés il faut payer 100 florins; le tout outre les droits et émoluments.
En 1668, on fit une ordonnance qui suscita une vive opposition. On lit dans le minutaire du conseil des 200, commencé le 12 septembre 1667, la note suivante qui n’est pas datée : « Ordonné que dores en là, pendant qu’il se trouvera trois cents chefs de famille bourgeois de ceste ville, l’on n’en pourra plus recepvoir à bourgeois d’aucune condition, ny pour quel prix que ce soit. — Après quoy messieurs Juge, Lieutenant ballifval, Seygneulx, d’Eschandens et capitaine major de Crosaz, ont conjoinctement protesté de la nullité de dite ordonnance, pour avoir esté trop précipitamment rendue et contre ce qui avoit esté quelques années auparavant ordonné. … Mesmes ledict seigneur lieutenant ballifval a protesté pour l’intérest de LL. EE.; mais la plupart du peuple ne tinst aucun compte des dictes protestes, ains se retirast-on avec beaucoup de bruit. » /106/
Cette décision amena la verte mercuriale suivante envoyée par le bailli de Lausanne, par ordre de messieurs de Berne.
« B. Tscharner, Balliff à Lausanne, Aux nobles, puysans, sages, prudens et honnoréz Bourguemaistre, Conseill et deux cens de la ville de Lausanne, salut. Plaise vous sçavoir que sommes souverainement commendés par lettres du sixième du courant, qui nous sont délivrées par la poste dimenche dernier après midi, de vous représenter vostre précipitation et incompétance et le grand desplaisir de LL. EE., Nos Souverains Seigneurs, en ce qu’en vostre dernier assemblée de deux cents, avez, par la pluralité de la populace qui n’entend pas mieux, pour loy, règle et ordonnance perpétuelle et irrévocable estably et ordonné que vous ne passeriez aucuns bourgeois, jusques à ce que la bourgeoisie fust descreue et diminuée jusques à trois cens cheffs et pères de familles, sous la pretexte et cest advantage que les anciens bourgeois prévaudroyent de ce règlement ès charges publiques à l’advenir et vendroyent tant mieux et plus advantageusement leurs vins; contre laquelle ordonnance des plus signaléz et principaux ont pourtant protesté. Et de vous advertir et exhorter à vous desporter de ceste ordonnance, l’enlever, annullir de part vous et par vostre authorité mesme, demeurer et vous tenir auprès de vostre ancienne et louable pratique et coustume, à peine et qu’au contraire ne la cassiez par obéyssance, L. Ex. nosdits Souverains Seigneurs la révoquéront, cancelleront et la rendront inofficieuse, n’approuvans, ne permectans semblables innovations; à celle fin nous ont aussi commendé d’observer si le ferez ou non. Tout en vertu et considération des raisons suyvantes :
« Primo, que c’est un droit régall appartenant nüement et seullement aux authorités souveraines et absolues, lesquelles ont et non à des subalternes, lesquels, sans permission et consentement de leurs supérieurs, n’ont le pouvoir de faire et establir loix et ordonnances stables et irrévocables; par ainsi n’estoit de vostre compétance de faire ladite ordonnance, par laquelle l’authorité souveraine se treuve non seullement choquée, mais les droitures et revenus d’icelle aussi affoiblis et amoindris, car si /107/ cest ordonnance, qui traîne apres soy plusieurs mauvaises conséquences, incommodités et inconvéniens, soubsisteroit, en peu de temps la ville ne peut, selon son debvoir et les règlements faits, tant pour le secours de Genève qu’autrement, assez fournir du monde en un besoin.
» Item, la ville de Lausanne réduite à trois cents cheffs ou pères de famille, s’y trouveroyent plusieurs maisons abandonnées qui teumberoyent en ruyne, au détriment et préjudice des droits et directes de L. Ex. Nos Souverains Segnieurs; qu’y possèdent quantité et passé ce nombre des maisons en fieff et directe, ou les lods se perdent ou se diminuent; par ce moyen aussi la ville de Lausanne deviendra de ville, village : Au contraire et au lieu quand la ville comment auparavant sera maintenue et peuplée par commerces, négoces et gens de mestiers, luy seroit louable, séant, redonderoit à honneur et bonne réputation et ce la rendroit tant plus capable de ce défendre en un besoin.
» Item, par telle diminution et descroit des bourgeois et habitans, L. Ex. Noz Souverains Seigneurs en patissent et leurs droits et revenus se diminuent à l’esgard des quelques artisans, singulièrement cordonniers, tonnolliers et autres qui, à cause de leur chasteau de Lausanne, leur sont adstraincts, de laquelle adstriction ils s’acquitent, les uns par argent, les autres par services réells, à l’esgard d’autres considérables et preignantes considérations.
Nous donques commendé, en vertu des susnommées lettres souveraines, par ces présentes vous déclarons la vollonté et l’intention et commendement de L. Ex. Nos Souverains Seigneurs, sur vostre indheue et inconsidérée ordonnance faite, comment sus est déclaré et quant vous conjurons la dessus nous déclarer vostre résolution, vous recommandans par debvoir et d’affection en nos prières assiduelles à la protection divine.
» Datum à Chasteau de Lausane, jeudi 18 may 1668. »
Suscript : Aux nobles, Puysans, vertueux, sages et prudens et honnoréz Bourgue-Maistre, Conseil et Deux Cens à Lausanne.
(Arch. de Laus. Lettre originale scellée.) /108/
Le 14 juin 1688, nouveau règlement. Le prix de la bourgeoisie est fixé à « mille florins pour la réception de chasque bourgeois, cent florins pour chasque masle, et cent florins pour les droits de la chambre, le tout payable comptant, et dix florins pour un brochet. Item, que celuy qui sera receu à bourgeois mettra deux mille florins en fonds, pour seurté que ses enfans ne seront point en charge au publicq. » … « Qu’ils ne pourront prétendre ny aspirer aux charges de ce publicq que conformément au reiglement du 20 octobre 1657, soubs encore cette restriction, que celuy qui se passera bourgeois ne pourra, non plus que ses enfans déjà nés, prétendre à la charge des Deux Cents que dix ans après leur réception en dite bourgeoisie et n’en pourront iceux jouir que tandis que luy et sa postérité feront résidence personnelle et actuelle dans les limittes de la grande largition. … »
En 1720, le prix de la bourgeoisie est fixé à 2000 florins; en 1740, à 2500 florins, outre 200 florins pour les enfants non mariés et 250 florins de droits.
Le 20 février 1749, il est réglé que celui qui sera reçu bourgeois, ne pourra trafiquer en vin pour le débiter en détail avant dix ans après la réception, ni aucun de ses enfans pendant ce terme.
Le prix de la bourgeosie fut successivement élevé en 1749 à 3000 florins, en 1768 à 4000 florins, en 1779 à 5000 florins, outre 500 florins pour un fils, 250 florins pour les droits de la chambre, 30 florins pour le bourgmestre et 30 florins pour le secrétaire.
On ne changea plus rien aux conditions de la bourgeoisie jusqu’à la révolution de 1798; en 1797 encore, on rappelle dans les lettres de bourgeoisie délivrées, les restrictions imposées par les règlements du 20 octobre 1657, du 14 juin 1688 et du 20 février 1749.
Bourreau.
1544. 9 octobre. — Fuit acceptus exequutor sentenciarum latarum contra delinquentes, vulgariter vocatus /109/ borreaux, Johannes Gonvers de Lucye, qui prestitit juramentum in forma in talibus fieri solitum. Cui domini ordinaverunt pro stipendiis suis, videlicet, quolibet anno unum modium, medium frumenti et medium messelli, triginta florenos solvendos per quarta tempora; cum una domo pro sua habitacione personali, sex solidis pro quolibet die exequutionis, cum prandio, et una veste colorum ville de tribus annis in tres annos; item, una posa vinee. Et hoc dum bene fecerit et prelibatis dominis placuerit.
D’après le manual passim on voit que le bourreau de Lausanne est surtout appelé au dehors, par exemple à Moudon et à Genève. En 1552, Jean Tevenyn fut nommé bourreau. Son salaire consistait en 40 florins, un muid de froment, 2 muids de vin, une maison en la Madeleine; de 3 ans en 3 ans une robe aux couleurs de la ville, « et quand il ferat office, il n’aura point d’argent. »
Potence.
1545. 30 avril. — Domini ordinaverunt fieri in Palude unam potentiam ad torturandum sive torquendum improbos pestis infectores atque mendicantes impios extraneos et fieri cridam sabbati futura, ne quis infectus peste letifera veniat nec accedat in urbem Lausanne, et in dicta potentia torqueri inobedientes eisdem et contravenientes.
Conseil.
1545. 1er octobre. — Pro consilio fuerunt presentes in consilio domini sequentes noviter electi. Primo, nobilis Jacobus de Pratoromano, burgimagister; nobilis Ludovicus Gimel; dominus Girardus Grant; Johannes Borgeois; /110/ P. Curnillion; nobilis Franciscus Senyeux; nobilis Ennabulus de Curia; Jacobus Boufz; B. Frontonex; G. de Neschel; Guilliermus Sodal; nobilis Claudius Gallerard, banderetus Burgi; Stephanus Vuavre, banderetus Civitatis; honorabilis Johannes de Rupe, bursserius; honorabilis Franciscus Guibaud; Guilliermus Ravanel; G. de Cresto; P. Ministrerii; Ludovicus de Yverduno; Johannes Guilliet; Reymondus Perrin; Aymonetus Roschet, banderetus Pontis; Claudius Gumoens, banderetus Paludis; Franciscus Blescheret, psalterius; P. Planellet, secretarius; qui premissi, more solito, prestiterunt juramentum.
Eadem die nobilis P. de Sancto Ciriaco, locum tenens domini judicis inferioris, prestitit juramentum in forma. Nobilis Albertus Loys et Ludovicus de Yverduno prestiterunt juramentum in forma.
Eadem die per dominos consules, considerantes magnissimum laborem consilii, fuit ordinatum quod quilibet ex dominis consulibus percipiat annuatim, ultra sallarium ordinarium, pro sallario suo et in augmentem eiusdem, videlicet quattuor cupas pulchri et receptibilis frumenti, cum modio avene jam alias ordinato et constituto ac novem denariis ordinariis.
Guillaume Franc, chantre.
1546. 5 janvier. — Fuit ordinata et constituta pensio annualis Nicolao de Copeaux, doctori in facultate medicine, et provido Guillermo Franc, cantori, residentibus Lausanne, pro bonis serviciis factis et fiendis per eos, videlicet : cuilibet ipsorum unum modium frumenti et unum currum vini albi annis singulis. /111/
Je n’ai pas de renseignements sur Nicolas de Copeaux, docteur en médecine. On voit seulement par le manual qu’il était encore à Lausanne le 17 janvier 1548, car à cette date le Conseil lui loue, pour deux écus sol par an, la cure de Saint-Etienne, jusqu’alors occupée par Guillaume Franc.
Guillaume Franc est beaucoup plus connu par la part qu’il prit à la composition des mélodies pour le psautier de Clément Marot. Originaire de Rouen, il se réfugia d’abord à Genève où il fut chantre jusqu’au mois d’août 1545. Il vint alors se fixer à Lausanne, où LL. EE. lui donnèrent la place de chantre de la cathédrale et lui firent donner des leçons dans le collège qui venait de se fonder. Il recevait de Messieurs de Berne un traitement annuel de 120 florins et un muid de froment. En outre, le Conseil de la ville lui fit aussi une pension annuelle d’un muid de froment et d’un char de vin et lui donna (7 octobre 1546) la jouissance de la cure de Saint-Etienne, avec le jardin contigu. En janvier 1548, on remplace cette cure par un logement gratuit dans une maison ayant jadis appartenu à l’autel de Sainte-Catherine. Il paraît que le Conseil lui retira sa pension, car on lit dans le manual, à la date du 30 janvier 1560 : « Maistre Guillaume Franc a présenté requeste à Messeigneurs aux fins de le restablir en son premier estre de avoir pension de mesdictz trèshonnorés seigneurs, pour aultant qu’il a grande famillie et qu’il prent poyne à estudier les petis enfans. Sus ce messeigneurs luy ont ordonné vingt florins pour ceste année, et pour les années advenirs mesdictz seigneurs adviseront de luy restablir pension. » Sa pension fut en effet rétablie le 3 avril 1561.
D’après les comptes des baillis bernois à Lausanne, Guillaume Franc paraît être mort vers le commencement de 1571.
Sur les mélodies qu’il a composées pour le psautier protestant, voyez O. Douen : Clément Marot et le psautier huguenot, Paris 1878, tome I.
Suite de guerre.
1546. 8 janvier. — Fuit tentum retro consilium, congregatis dominis sexaginta consulibus, quibus fuit /112/ prolectum mandatum guerre missum per dominum ballivum Tillier, parte dominorum Bernensium, per quos dominos fuit conclusum non debere observari illud mandatum juxta contentum eiusdem, quia tendit in diminutionem auctoritatis ville et civitatis; sed debere procedere juxta honnestum debitum ad fines obtinendi majorem compensam a predictis Bernensibus, et fieri monstras generales et ulterius procedere juxta respectum dominorum consulum.
Et fuit conclusum fieri debere vexillum in monstris, colorum ville et per dictos dominus electus vexillifer pro eisdem monstris tantum Aymonetus Roschet.
Lune undecima predicti mensis anno quo supra ad sonum campane et per vocem preconis fuerunt congregati domini burgenses et habitatores Lausanne, qui laudarunt conclusionem preproxime superius descriptam, modo et forma in eadem contentis.
22 juillet. — Per dominos LX burgenses pro guerra fuerunt electi officiarii sequentes : Primo, capitaneus, nobilis Claudius de Pratoromano; locumtenens, nobilis Ennabulus de Curia; vexillifer, Franciscus Daux, traban, N. Franciscus Regnaud.
Voici un extrait du compte du boursier Jean Rochit ou Rosche, qui nous dit ce que coûta la bannière de la ville que le Conseil décida de faire faire :
« Item plus, ay délivré aud syre Jehan Guylyet, banderet du Pont, pour VII aulnes et demi de tafetas noer pour fayere une ensegnye d’aquebutyer, pour conduyere deux cent aquebutyer de la ville pour aler aud servise de nous soverens seigneurs de Berne, causan le bruyt qui estoyet de deux mille ytalyens et espanyo lesqueux voloen passé par les terres de nous souverens seigneurs de Berne, et furen esleuz pour capitenne N. Claude de /113/ Praroman; N. Enablo de la Court, son lyeutenan; Glaude Gumoens banderet; le chastellen Regnaud, sautye de bende, et fuz fayt marché en plen concel pour ledit tafetas le XXVI de julyet 1546.XXV florins.
» Item plus, ay délivré ad maystre Anni Fransoy, pentre, pour la fason de l’ensegnye des aquebutyer, donné le XVIII d’aoust 1546, quatre escus aud soloy.XVIII flor. VIII gros.
» Item plus, ay délivré ad la feme de Jehan Mercye pour la fasson de ladicte bandyére et pour la toelle noyere mise à l’entour du baton, donné le XI d’aoust 1546.I flor. VI gros.
» Item plus, ay délivré ad maystre Jehan le menusye pour le baton de ladicte bandyère et la fason de troys gennes de toelle pour les ensegnyes, donné le XIII d’aoust 1546.VI gros.
» Item plus, ay délivré ad Fransoy Fréchaud pour son tressaud ? de soye et XXV clo pour racoustré ladicte ensegnye.IX gros.
» Item plus, ay délivré pour des fringes prise pour ladicte bandyère ad Glaude Vylyard, prise par monsr le banderet Gumoens.VI gros III den.
» Item plus, ay délivré ad mons le banderet Gumoens pour le fer de la lanse de la dicte ensegnye III gros.
Item plus, ay délivré pour demi cent de clavin et VI corgeon pour ladicte ensegnye.II gros. »
Conseil.
1546. Septembre. — Electio dominorum consulum pro anno futuro 1547.
Premièrement, En Bourg : Noble Jaques Praroman, bourguemaistre; noble Loys Gimel; noble Ennable de la Cour; honnorable Bonevanture Frontonex; noble Claude Gallerard, banderet; honnorable Françoys Blescheret, gros saultier.
En la Cité : Honnorable Guilliaume Sodal; honnorable /114/ George de Neschel et honnorable Estienne Vuavre, banderet.
En La Palud : Honnorable Jehan Rosche, borsier; monsieur Girard Grant; honnorable Jehan Borgeois; noble Françoys Senieux, Sr Guilliaume Ravanel; Sr Loys d’Yverdon; Sr Pierre Menétrey; honnorable Claude Gumoens, banderet.
Sainct Laurent : Le Sr Françoys Guibaud; noble Aulbert Loys; Sr George du Crest; Sr Jaques Boufz; honnorable Bernard Ruffy, banderet.
Au Pont : Sr Pierre Curnillion; Sr Guilliaume de Lalex; Sr Reymond Perrin : Sr Soffrey Buet; le Sr Jehan Guilliet, banderet.
Petrus Planelleti, secretarius.
Etablissement d’un haut forestier.
1546. 18 novembre. — Hon. Franciscus Guibaud fuit acceptus foresterius totius Joreti, Rasparum ac nemoris d’Yvernan [Vernand] super ceteris foresteriis, cum juramento requisito et sub sallario cuiuslibet anni duorum scutorum solis.
Jusqu’à ce moment, les grands domaines forestiers de la ville, considérablement accrus par la largition, n’avaient été surveillés que par de simples gardes. C’est de cette époque que date l’établissement d’un chef forestier de la ville. Ce fonctionnaire existe encore. Connu jusqu’à ces dernières années sous le nom de haut forestier, il est maintenant appelé Inspecteur des forêts.
Le 14 janvier 1550, Pierre Wavre est haut forestier avec le même salaire. /115/
Bourgeoisie dans les communes du Ressort.
1548. 10 janvier. — Anthonius du Bonyon et Claudius Bernard, gubernatores de Renens, nomine eorum communitatis requisierunt et humiliter suplicarunt dominis consulibus, tanquam eorum dominis, sibi concedi licenciam componendi extraneos habitatores in eorum villagio et territorio de et super sufferta eorum pasturagiorum, etc., prout ceteri vicini dictorum suplicantium fecerunt. Qua suplicatione facta, prelibati domini concesserunt predictis suplicantibus predictam eorum suplicationem, eo mediante quod predicti gubernatores, nomine quo supra, tenantur et debeant, quod tanquam scientes promiserunt, expedire prelibatis dominis medietatem compositionis seu compositionum predictarum ad primam requestam prelibatorum dominorum seu eorum executoris.
On voit par cet article que le Conseil de Lausanne exigeait des communes de sa juridiction qu’elles versassent dans sa caisse la moitié de la finance totale qu’elles percevaient pour la réception d’habitants ou de bourgeois. C’est ce qu’on appelait le tot quot. On en voit plusieurs exemples pendant les XVIIe et XVIIIe siècles. Quelques communes payaient sans difficulté, d’autres disputaient le droit de la ville. En 1759, le Conseil de Lausanne décrète que le tot quot sera au moins d’un quart de la finance payée, pour les communes qui reconnaissent le droit de la ville; les aultres communes ne pourront recevoir de bourgeois jusqu’à ce qu’elles se soient mises en règle.
Droit impérial.
1549. 11 juin. — Fuerunt presentes domini consules et retro consules, coram quibus fuerunt lecte ordinationes /116/ per dominos Bernates ipsis destinate, tangentes modum per quem debetur procedere super homicidis. Et quia in ipsis ordinationibus plures articuli sunt inserti contra privilegia civitatis Lausanne, fuit arrestatum et conclusum eligere ydoneos et bene consultos, ut articularent contra ordinationes pretactas.
Un nommé Jaques Daulx, de Lausanne, était accusé d’un meurtre, commis dans la ville, sur Jean Myvillaz, de Fribourg. Les parents et alliés de la victime n’ayant pu obtenir qu’il fût mis en jugement, LL. EE. en prirent probablement occasion pour édicter l’ordonnance ci-après qui règle la procédure à suivre en cas d’accusation de meurtre.
L’article du manual dit que les Lausannois trouvèrent que certains articles de cet édit enfreignaient leurs privilèges et nommèrent des personnes compétentes pour adresser leurs observations à Messieurs de Berne. Nous donnons aussi le texte de ces observations et la lettre de LL. EE. qui y fait droit.
« Ordre de justice en cas d’homicides ou meurtres que adviendront en la ville, cité, jurisdiction et dans les franchises et limites de Lausanne, et lequel messieurs Bourguemaistre, petit et grand Conseil de ladicte ville de Lausanne, doresennavant suyvront et observeront, etc., faict par nos trèsredoubtez seigneurs Advoyer et Conseil de Berne et ausdicts de Lausanne envoyé. Actum 16 maii 1549.
» Premyèrement, les seigneurs bourguemaistre et conseil de Lausanne, ou le juge par eulx député eis causes criminelles, tiendront main et employeront toute diligence que, incontinent leurs sera notiffié ou appercevront estre perpétré homicides ou mourtres en la ville, cité, jurisdition et franchises dudit Lausanne, que les homicides ou meurtriers soyent prins, mys en captivité et prison et détenuz.
» En apprès, que par eulx soyent retiréz et gardés les habilliementz des blessés ou tués, ou délivréz à leurs parens, pour les produyre sur les journées juridiques que l’on tiendra. /117/
» Item, si les blessés ne meurent incontinent sus les lieux et places, seront députés de la part du magistrat de Lausanne et envoyéz vers eulx personnages pour les interroguer lesquelz les ayt invady et blesséz.
» Item, quand les parens des tués et occis, assavoir ceulx esquelz appertient la vengeance et droict héréditaire, invocquent le magistrat de Lausanne d’administrer justice, etc., icelle leurs doibt estre tenue en forme et manyre comme s’ensuyt.
» Et affin que y soit procédé formalement et justement, debvront lesdictz parens, avant que entré en droict et faire instance et clamme, etc., comparoistre devant mes trèsredoubtéz seignyeurs advoyer et conseil de Berne et les requester et prier que soit de leurs playsir et bénignité de leurs conseillier en quelle sorte et parolles ilz pourront fayre la clamme.
» Item, en cas que lesdictz parens ne vouldront faire instance et clamme, ains l’affaire remectre au magistrat ou juges de Lausanne, adonc icelluy magistrat etc., sera tenu de prendre informations et tesmogniages des gens non suspectz, non partialz, dignes de foy, et qui sont estés présentz et ont vehu le desbat etc., lesquelz judiciairement déposeront et tistiffieront par leurs sermens à main levées faict, etc., et leurs dépositions escriptes par ung notaire juré et signées, closes et séellées, envoyées à mesdictz trèsredoubtéz seignyeurs de Berne, ensemble une missive des seignyeurs bourguemaistre et conseil de Lausanne, par laquelle y requerront et demanderont advis et conseil comme la clamme se doibvra faire, etc. Cela faict, regarderons, verrons, urrons [ouïront] et pondérerons mesdictz très redoubtéz seignyeurs de Berne lesdictes informations et testiffications et sus icelles donnerons leurs advis et conseil et ordonnerons comme l’on debvra faire la clamme et le rescriprons audict de Lausanne.
» Pareilliement, quant les délinquans prétendront de respondre en justice, se purger et excuser de la mort de ceulx qu’ilz ont tué, allégans cela par eulx faictz à leurs corps deffendans debvront requérir mesdictz trèsredoubtéz seignyeurs de Berne à leurs ouctroyer et concéder de prendre informations et testiffications, /118/ et quant cela leur sera permis et oultroyé, adonc icelles in formations seront prinses, escriptes, signées, séellées et closes, à mesdictz seignyeurs envoyées.
» En forme comme dessus au précédent article est déclairé, adjoinct que quant l’on vouldra prendre icelles informations et testiffications, que les parens des tuéz et occis et aussi ceulx des délinquans ou leurs procureurs des deux costés comparessent et soyent présens. Et premyèrement ambes parties proposent ès tesmoings ce que par eulx veulent estre déposé et testiffié; et puis apprès se retireront, et en leurs absence l’examen faict, les tesmoings estre ouy et leurs dépositions dehuement et formalement escriptes, signées, séellées, closes et envoyées, etc., comme sus est dict.
» Item, quant plusieurs seront en ung desbat et tous ensemble frapperont de leurs espées, bastons, pierres, etc., sur aulcung, dont la mort ensuyve et l’on ne pourraz certainnement scavoir celuy qui a donné le coup de la mort, adonc debvront iceulx trèstous estre prins, mis et détenus en prison comme sus est dict Ou, sy cas est qu’ilz s’enfuyent et eschappent, les pourra on trèstous ensemble comprendre en une clamme, jusques à ce que celuy qui a donné le coup de la mort par les aultres ses complices soit nommé, ou par bon tesmogniage spéciffié et déclairé.
S’ensuit la forme et procédeure des trois journées.
» Premièrement, les parens et amys des occis et tuéz demandant justice ausdictz seignyeurs bourgmaistre et conseil, doibt estre estably et nommé jour de tenir justice, laquelle se doibt tenir ouvertement en la place N. 1 .
» Et estans les seignyeurs bourgmaistre comme juge, aussi les seignyeurs du petit et grand conseil comme justiciers en ladicte place assis, doibt estre par soutier à haulte voix crié et proclamé si personne est présente pour demander droit et justice. /119/
» Et apprès, les acteurs, l’acteur doibvent, doit demander ung parlier pour pourter sa parolle.
» Cela faict, se doibt faire la clamme contre les délinquans ou délinquant, en sorte comme ès acteurs, à l’acteur, a esté par mes trèsredoubtéz seignyeurs de Berne conseillé, etc., mettans en congnoissance.
» Sur ce, doibt estre sentencé que l’on doibge ouvrir le cercle en quatres ou troys lieux et faire aultant de passages et par le soultier à haulte voix crié : Si N. N. sont, est présens, présent, qu’il viennent, vienne en avant pour respondre sus la clamme contre eulx, luy, faicte à cause de l’hommicide ou meurtre (et doibt estre la clamme par ledit soultier en parolles, comme elle est faicte spéciffiée, etc.), perpétré en la personne de N., les habilliemens duquel ycy gisent, etc. Aujourdhuy premyer court et premyre proclamation ou citation.
» Le soultier doibt ainsin cryé troys ou quattre foys, en chescung passaige une foys, etc.
» Sus ce, par sentence doibt estre congneu que le cercle doibge estre sarré et les passaiges clos, ou que le soultier face proclammation pour la premyère court et seconde citation, etc., comme il a faict la premyère en trois ou quattre lieux.
» Cela faict, mettent, met les acteurs, l’acteur en congnoissance.
» Sus ce, doibt estre congneu, le cercle et passages estans ouvers, estre sarré et cloz, puis apprès ouvrir par sentence, adonc fait le soultier la tierce crie par trois ou quattre foys en parolles, comme dessus, etc., pour la premyère court et tierce citation.
» Après la dicte crie, doibt estre mis en droit et congnoissance de sarrer le cercle, etc., et sus ce donnée sentence, puis que lesdictz N. N., ne persone en leurs noms comparoissent pour respondre, que l’on doibge sarrer le cercle et ainsin finie la premyère court.
» Et le jour mesme l’on peult procéder plus oultre et tenir la seconde court en sorte et manyère comme la premyère; fort que les cries et citations doibgent estre faictes pour la seconde court et premyère, seconde et tierce citation; et le cercle par sentence /120/ estre sarré, après mise en droict, doibt estre sentencé, etc., puis que lesdictz N. N. ne personne en leurs noms comparoissent pour respondre sus la clamme, etc., ut supra, et les deux cours tenues, que la tierce doibge estre establie et tenue après quatorzes jours et avant troys sepmainnes, et le soultier à haulte voix crier : Quel qui voyra lesdictz N. N. en villes, villages, pays, en boys, sus les champs, eaues et aultres lieuz, doibge notiffier eisdictz N. N. les deux courtz et journées estre tenues, et la tierce establye apprès quatorzes jours et avant trois sepmainnes pour sçavoir venir et comparoir sus icelle, pour respondre à la clamme, etc., ut supra.
» A la fin doibge estre par sentence congneuz que l’officier doibge retirer et garder les habilliemens, pour les (si besoing faict) produyre à la tierce et dernière journée, et proclamation faicte, la cour estre levée.
La tierce journée.
» Les acteurs, etc., pourveuz d’avant parlier, proposent comment si devant soyent tenues deux journées contre N., à cause de l’hommicide, meurtre, etc., qu’il a perpétré en la personne de N. Or présentement est la tierce journée, puys doncq que par cy devant n’est, ne sont, etc., comparuz, etc., pour respondre, etc., demandent lesdictz acteurs au nom que dessus justice estre administrée pour la tierce instance et journée et ce mettant en droit.
» Sus ce est donné sentence que l’on doibge ouvrir le cercle et de crier en chascung passaige, comme paravant et [est] faict en la premyère et seconde journée, ainsi à la tierce journée et premyère, seconde, tierce crie ou citation.
» En après, est le cercle et passages par sentence sarrés et clouz, puisque personne ne comparoit, etc.
» Sur ce les acteurs, etc., proposent puis que N. N., ledict N. n’ast, n’ont respondu et faict ses, leurs excuses et se purger dudict hommicide, etc., meurtre, etc., demandent les acteurs la sentence, etc.
» Sur ce doibt estre congneu et sentencé, etc., puisque le /121/ dict N., lesdictz NN., ne personne en leurs, en son noms et lieux n’est, ne sont venu, venus ou comparu, comparus sus les proclamations cryes, citations susfaictes pour respondre, ut supra, etc., que la tierce et dernyère journée justiciale et court soit dehuement et comme de droit ainsi que les deux précédentes tenues et finies. et le N.. les N. N. N., par ordonnance et diffinitive sentence, iceluy, iceulx, prénommé, prénommés estre voluntaire et meschamment, sans cause, etc., de nuict, etc., avoir tué, meurtrir, etc., ledict N., et son. etc, leurs, etc. corps déclairé, déclairéz homicide, homicides, meurtrier, meurtriers, compdanné, condampnéz et adjugé, adjugéz eis prochains parens, etc., dudit N., asçavoir que le corp, les corps dudict N., desdictz N. N. estre oultroyé et ballié ès mains et puissance dedictz parens, pour en faire à leurs volunté, quand le, les trouveront en la ville, cité et rière la jurisdiction, franchises et limites de Lausanne, et ses, leurs biens aux seignyeurs rière lesquelz ilz gisent et desquieulx ilz se meuvent; et en ce réservé le droit d’aultruy et l’estatus de mes très redoubtéz seignyeurs touchantz les biens confisqués, et ainsi par le soultier estre proclammé et la justice levée, etc.
» Item, est à noter quand les parens des deffunctz ne feront instance ne clamme contre les homicides, meurtriers, en tel cas que néantmoings debvra estre administrée justice et tenues journées et courtz comme dessus, et le procureur fiscal, ou le bourguemaistre de Lausanne faire les instances et clammes en sorte et manyère et par parolles, comme mes trèsredoubtéz seignyeurs de Berne auront advisé et conseillé, et les corps des hommicides, etc., meurtriers, etc., adjugéz aux seignyeurs de Lausanne, etc. et les biens, etc., comme dessus, etc., que tieulx ayent perdu la ville et cité et jurisdiction, etc. dudict Lausanne, etc. Ainsi quant ilz seront appréhendus en ladicte ville et cité, jurisdiction et franchises, etc. desdictz seignyeurs de Lausanne, que adonq l’on en fasse justice et exéquution comme d’ung homicide meurtrier. Touteffois en ce estre réservé à mesdictz très redoubtéz seignyeurs de Berne la grace et pardonnance et que cecy ne dérogue ne porté préjudice à la souverainnité, préminences /122/ et aultres drois de mesdictz trèsredoubtéz seignyeurs de Berne, et ainsi doibt estre faicte par le soultier la publication de la sentence, etc., affin qu’elle soit notiffiée audict N., esdictz N. N.
» Item, en cas que mesdictz trèsredoubtéz seignyeurs ayant vehues les informations conseillieront eis délinquans pouvoir souffrir le droit et justice et ainsin se présenter pour respondre, etc., adonc eulx accompagnyé de leurs parens et amys arméz et embastonnéz, etc., premyèrement estre cloz le cercle par sentence, on leurs prendra et déposera leurs armes et bastons, et s’ilz sont amenés prisonniers et liéz devant la justice l’on les déliera et gardera et eulx respondrons par leurs parliers, etc.; et apprès clamme et deffence, etc., sentence donnée, etc.
» Ont aussi mesdictz trèsredoubtéz seignyeurs de Berne expressément réservé de pouvoir corriger mésus et faultes lesquelz en ce endroict pourroent estre faictes et commises et de mettre ordre et faire déclarations, changemens, abolitions, etc., touteffois et quantes que bon leurs semblera et leurs sera loysible. Actum ut supra. »
(Arch. cant. Livres des Baillages. Lausanne, tome VI, fol. 138. Copie contemporaine.)
Voici la minute des réclamations faites par le Conseil de Lausanne :
« S’ensuyt ce que les ambassadeurs de Lausanne ont à requesté à noz trèsredoubtés et souverains seigneurs de Berne.
» Premièrement, le bourguemeystre, vingt quattre et soixante de Lausanne mercient trèshumblement l’exellence de nousdictz souverains seigneurs de Berne de ce qu’il leur a pleut leur communiquer et envoyer leur ordre et manière de procéder en justice, en cas de meurtre et homicide, lequel ordre et manière de procéder lesdictz de Lausanne veulent observer de leur puissance. Touteffoys en ce que l’excellence desdictz souverains seigneurs vheut les parens et instans aller requérir leurs advis et bon conseil pour faire clamme, etc., et que aussi les délinquans quil prétendront inster déffense allent requérir leursdictes excellences pour leurs oultroyer de prendre informations et examen, lesquelles informations, signées, séellées et closes, /123/ soient envoyées à nozdictz souverains seigneurs, pour sur ce faire entendre auxdictz de Lausanne leur bon voloir et ordonnance, etc.
» Sur ce dient lesdictz de Lausanne que dempuys que Lausanne est Lausanne il ont laz congnoissance et judication en toutes causes criminelles, sans ce que jamais le seigneur évesque aye heuz sus telz cas criminel aulcune préminence, fors seulement l’exécution de la congnoissance desdictz bourgeoys et laz grâce, lesquelles préminences anciennes nosdictz souverains seigneurs ont laysé auxdictz de Lausanne et augmenté par leur begnine largition, avec toutes haulte, moyenne et basse juridiction, soit réservant seulement la grâce, desquelles préminences susdictes lesdictz de Lausanne dempuys et par avant ont toutjour usé, sans estre entenu d’envoyer les procès à leursdictz seigneurs et supérieurs, comme font et sont tenu de faire aultres leurs soubgetz qui n’ont point telles préminences et libertés comme eulx; aultrement sembleroit estre tolly et osté auxdictz de Lausanne non seulement laz juridiction et seigniorie à eulx largie, mais aussi la préminence qu’il ontz heuz de tous temps de congnoistre èsdictes causes criminelles, comme dessus est dit et desclairé.
» Pourquoy supplient trèshumblement l’exellence de nozdictz souverains seigneurs le bourguemeystre vingtquattre et soixante dudict Lausanne remectre et permettre icelluy advis et conseil estre pris à Lausanne desdictz seigneurs bourguemeistre et conseil, comme telles préminences leur appertient droictement, tant par vertu de leurs anciens droictz et tiltres que aussi par vertu de ladicte bégnine élargition, et par ce pourrons éviter lesdictz de Lausanne grandes coustanges et missions que leur seroit forcé soubtenir et lesdictz de Lausanne pourvoyront à l’ayde de nostre Seigneur par telle diligence que Dieu et leursdictes magnifficences seront contens. Et pource que par venture lesdictz trèsredoubtés seigneurs pourriont préméditer que en tel cas lesdictz de Lausanne, estant l’homicide perpétré par aulcungs de Lausanne, estre favorable ou trop rigoreux de leur adiudication vers d’aultres, les parens d’iceulx adjugés pourront impétrer /124/ envers le magistrat de Lausanne de supercédé à l’exéquution de leur congnoissance ici par aulcung space de temps, touteffoys à leurs despens, pour pouvoir impétrer grâce desdictz trèsredoubtés seigneurs.
» Sur lequel article produietz en conseil avec le parlement et d’aultre déclaration à nozdictz seigneurs faicte, le seigneur lieutenant de monseigneur l’advoyé esdictz ambassadeurs az faict tel rapport au mode suyvant : « Messieurs les ambassadeurs, messieurs ont regardé et entièrement entendu ce que leur avés proposé et bien entendu les articles par vous produict, et pour ce qué quant il vous fut envoyé le mode de procéder en cas de meurtre et homicide, tout le conseil estoit accompli, par ainsin messieurs feront apparoistre au conseil entier les raisons et articles par vous produictz, suyvamment vous envoyerons laz responce, et pour ce que les parens qui ce sons démis de laz clamme de l’homicide de quoy il ce agit, cella demourera en soucéance jusques à ce que vous envoyons laz responce laquelle en briefz vous seraz envoyé. »
(Arch. cantonales. Livres des baillages, Lausanne, tome VI, fol. 157. Minute originale.)
Le Conseil de Berne fit droit aux observations des Lausannois et leur envoya la réponse en ces termes :
« Nous l’Advoyer et Conseil de Bernne faisons scavoir par ces présentes qu’avons entendu la requeste à nous faicte par nobles, prudens, noz chers et féaulx Bourgmaistre et Conseil de Lausanne, contenante comme ayans receu la forme et le mode de procéder contre les malfecteurs et délinquans en cas d’homicide à eulx envoyée, icelle ayans acceptée comme raisonnable et bonne, réservé certain passage contrevenant à leurs droicts, tiltres et jurisdiction, asscavoir qu’ilz soyent entenu de venir demander conseil à nous pour donner cognoissances et sentences, etc., chose que leurs est trop gravable et préjudiciable, nous prians en ce avoir esgard, etc. Sur ce avons ordonné a aucuns noz conseillers de regarder sur cela et faire déclaration, mitigation et avoir advis, lesquelz nous ont faict entendre et rapporté avoir eheu sur ce délibération et consultation en forme /125/ suyvante : Puis que avons à nosdicts de Lausanne donné certaines libertéz, et qui ne sont tenu comme aultres noz soubgectz de nous envoyer les procès des malfacteurs, etc., qui ne soyent sans leurs bonne voulenté tenu de desmander de nous conseil sus cas d’homicide, ains que puissent juger et sentencer (touteffoys suyvant et observant en aultres endroicts ladicte forme) comme bon leurs semblera et en bonne conscience et par leurs seremens; touteffoys que cela soit faict, y procédez que nous n’en ayans desplaisir; car tel cas advenant, nous voulons expressément réserver selon nostre bon plaisir et exigence de l’affaire y adviser et regarder. Davantage, puis que avons réservé la grâce, doibgent lesdicts de Lausanne nous envoyer les sentences que donneront, ensemble clamme, déffense, réplicques, allégations, testiffications, proves et en summa tous les procès, pour scavoir sy en tel cas voulons faire grâce et pardonnance ou non, et à ce que après ordonnerons donner lieu. Ilz ne debvront ne pourront aussy à ceulx qui seront adjugéz et déclairéz homicide faire aulcune grâce sans nostre sceu, consentement et volenté, etc. Laquelle susescripte déclaration, ordonnance et advis nous plaict, dont l’avons ratiffiée et confirmée et en vigueur d’icestes ratiffions et confirmons. Tesmoing nostre scel placqué à icestes. Données ce vendredy 28e jour du moys de mars 1550. »
(Arch. de Laus. EE, 839. Lettre missive originale, avec traces de sceau plaqué.)
Jacques Daulx, qui paraît avoir été l’occasion de cette ordonnance, comparut devant la Cour impériale au mois de juin 1550. Il fut acquitté de l’accusation de meurtre.
Cette procédure fut pratiquée plusieurs fois; par exemple, dans les années 1565, 1568, 1624, 1662, 1671, 1672, 1682, et probablement à d’autres dates que je n’ai pas notées.
Règlements de police.
1549. 25 juin. — Fuit conclusum ne homines irent ad bastubas cum feminabus; et jovis fuit electa pro feminabus /126/ et non alia dies, demptis viro et uxore qui possunt simul adire bastubas.
1549. Août. — Fuit conclusum quod meretrices que condempnabuntur in carceribus que non habebunt pro solvere dictos carceres, si tribus vicibus fuerint reprehense, debeant poni ou collard tribus horis.
Cloche pour l’horloge de Romainmotier.
1549. 5 septembre. — Parte magniffici domini ballivi Hanns Frisching fuit dominis consulibus suplicatum ut sibi dono daretur unum cimballum pro faciendo unum orologium apud Romamostier; quod satis lente ei fuit concessum.
Bannerets.
1549. 8 septembre. — Fuit conclusum quod domini vexilliferi non debeant habere eorum opignyones in consilio, dempto in causis civilibus que coram dominis LX devolvuntur.
Conseillers bannis.
1549. 7 octobre. — Quia honnorabiles Guillelmus Ravenel, Soffredus Buet et Bonaventura Frontonay fuerunt accusati de adulterio, cum sint electi de numero dominorum XXIIII consulum, tamen fuerunt per annum expulsi secundum statuta dominorum et sedes eorum sint vacue anno durante.
Articles de Berne.
1550. 8 avril. — Fuit tentum retro consilium et … fuit lecta una littera, missa per dictos dominos Bernenses dictis dominis consulibus et communitati, tangens mille scuta /127/ auri que debeant infra annum expedi et tradi pro redimendo census per ante Sabaudie debitos in villis Helvetiorum. Super hiis fuerunt deputati quattuor ex dominis consulibus et retro consulibus, ut per suplicationem per eos fiendam respondeant dictis missivis. …
On sait que le pays romand, conquis par les Bernois et les Fribourgeois, avait été hypothéqué par les ducs de Savoie pour d’assez fortes sommes.
Le Conseil de Berne résolut de purger ces hypothèques, mais afin de payer ces dettes sans qu’il lui en coûtât rien, comme dit Ruchat, il imposa tous les habitants à un pour cent de leurs possessions; ceux qui ne possédaient rien payaient six sols par feu.
Les habitants de Lausanne furent exemptés de cette taille, mais en compensation la ville fut imposée à une somme ronde de mille écus, comme on le voit par le document suivant :
« Nostre amyable salutation devant mise. Nobles, prudents, trèschiers et féaulx, Nous croyons que soyés bien advertys des causes et urgentes nécessités que nous ont meues de faire une généralle imposition à tous nos soubiects du pays de Savoye, et singulièrement la principale estre pour rembre (sic) les grosses summes d’argent empruntées à rayson de cinq pour cent par jadis le duc de Savoye, et par tel moyen décharger et libérer nousdicts pays et soubiects, et non pas pour nostre singulier prouffit, ou pour mettre l’argent en la bourse de nostre ville. En quel endroict ne vous avons voulsuz charger comme nous aultres soubiects, en considération qu’avez esté nous bourgeois et assisté à la conqueste desdicts pays, ains seullement vous imposer mille escus à lever et prendre sur vous biens qu’avez rière vous limites et qui sont rière votre jurisdiction, au contenuz de nostre libéralle Largition; en vous réservant la taille sus les biens des étrangiers situés rière vous, et en récompense de ce vous voullons quicter, éxempter et affrancher de la taille de vous biens qu’avez en la Vauld et aultres nous jurisdictions. Nous confians /128/ que, en contemplation desdictes raysons et causes et que nous conseilliers, bourgeois et anciens soubiects de ladicte taille ne sont exempts, ne ferez reffus de nous délyvrer dans deux termes establis; asçavoir à la Sainct Martin prochaine la moytié, et à l’aultre Sainct Martin suyvante de l’an 1551 l’aultre moytié desdicts mille escus; vous promettans, lesdictes sommes d’emprunt une foys estre rendues et par tel moyen nous soubiects et pays affranchez, que vous laisrons en vous franchises et libertés au contenuz de vous lettres et seaulx et ne vous chargerons en temps de guerre et aultres accidents plus que nous aultres soubiects; touttefoys en ce réservant nostre souverainté, authorité, prééminences, droictures, etc. Donné ce XIIIe jour de mars.
» L’advoyer, petit et grand Conseil de Berne. »
(Arch. de Lausanne, EE, 75, Lettre missive originale, avec sceau plaqué.)
Les quatre paroisses de Lavaux: Lutry, Villette, Saint-Saphorin et Corsier, voyant la faveur accordée à Lausanne, voulurent y avoir part et être aussi exemptées de la taille. Elles envoyèrent des députés au conseil de la ville, lesquels exposèrent que de tout temps ces paroisses avaient été considérées comme bourgeoises de Lausanne, tête de l’église (caput ecclesie) et demandèrent que le conseil voulût bien s’entremettre en leur faveur auprès de Messieurs de Berne. Le conseil de Lausanne refusa de transmettre cette supplique, se fondant sur ce qu’elle était contraire à la souveraineté bernoise (que tangit auctoritatem, preheminentiam et utilitatem dom. Bernensium, contra quos non est consulendum).
En attendant, les Lausannois se mirent en devoir de rassembler la première moitié de la somme de 1000 écus, due à la Saint-Martin 1550. On imposa chacune des bannières de la ville.
| La bannière de Bourg produisit | 94 écus | 3 flor. | 6 sols | 3 den. |
| » du Pont | 100 » | 4 » | 1 » | — » |
| » de St-Laurent | 82 » | 3 » | 11 » | 6 » |
| » de la Palud | 89 » | 9 » | — » | — » |
| » de la Cité | 50 » | 3 » | 3 | — » |
| 420 écus | — flor. | — sols | 9 den. /129/ | |
| L’écu compté à 4 flor. 9 sols. |
Cette somme fut recueillie en écus au soleil, en écus de Gênes, en testons pesans, en testons de Lorraine, de Savoie, en sols de roi, de Fribourg, etc.
Le conseil essaya d’obtenir la réduction de la contribution de la ville à 800 écus. En cas de réussite, on aurait emprunté 300 écus et l’on aurait payé la somme en une fois. Mais ces démarches n’ayant pas abouti, on envoya, le 26 mai 1551, deux embassadeurs porter à Berne le premier versement qui était échu depuis le mois de novembre précédent. Au mois de mars 1552 on s’occupait de trouver l’argent pour le second versement. Il fut payé et porté à Berne au mois de juillet par noble François Seigneux, seigneur de Vufflens. Ce voyage coûta 19 écus, 4 flor., 6 sols, 3 deniers.
Hôpital de Saint-Roch.
1550. 20 avril.— … Item, ont conclu et dutout résolu transsituer et remuer leurs mayson et hospital de Saint Roch allieurs et autre lieu plus lointein qu’il n’est et l’on ordonné à Ballisvaulx; jouxte toutteffoys l’advis de messeigneurs de Conseil, sy bon leurs semble audict Bellisvaulx, et de laz façon d’édiffice.
Revendeurs.
Item, que nul revendeur, réservé leurs maselliers et bochier, le jour du marchié, ne doibgent achetter chair et bestes, soit veaul, chevril et aultres volallies, oultre et qu’il ne soit frappées IX heures de horologe, soubz le bam accostumé.
Les douze écoliers de Messieurs.
1551. 15 janvier. — Noble et vénérable Heustace du Quesnoy, natifz de Lisle en Flandre, diocèse de Tournay, /130/ docteur et lecteur en médicine, a esté accepté desdits seigneurs habitant en leurs dite ville de Lausanne, lequel a faict sérement aulxdicts seigneurs à ce resquis.
Voyez H. Vuilleumier : Les douze escholiers de Messieurs. Lausanne 1886. In—12.
Eustache du Quesnoy, natif de Lille, docteur en médecine, avait professé à Heidelberg, puis était allé à Genève, et enfin en janvier 1551 on le voit s’établir à Lausanne, où, d’après quelques passages des manuaux, il pratiquait la médecine. A la mort de Quintin le boiteux, il lui succéda dans ses fonctions en novembre 1552. Ces fonctions étaient l’enseignement à donner au séminaire d’étudiants que Messieurs de Berne avaient établi et entretenaient à leurs frais à Lausanne, sous le nom des « douze escholiers de Messieurs. » En même temps, comme la plupart de ses prédécesseurs et de ses successeurs, E. du Quesnoy était chargé d’avoir ces écoliers en pension chez lui, dans une maison de la Cité affectée à cet usage par LL. EE.
Eustache du Quesnoy conserva ses fonctions jusqu’au milieu de l’année 1557. 1
Voici les noms des maîtres des 12 escholiers que j’ai pu retrouver :
1542—1546. Cælius Secundus Curio.
1546—1549. André Zébédée.
1549—1552. Quintin le boiteux.
1552—1557. Eustache du Quesnoy.
1557—1558. Jean Tagault.
1559—1561. M. de Mex (B. Comte).
Depuis l’an 1562 cet instituteur paraît avoir pris le nom de professor artium. Blaise Marcuard remplit ces fonctions pendant plusieurs années.
Voici les noms de ceux qui avaient ces « escholiers » en pension.
1545—1546. Jean Mimard. /131/
1544—1549. Zébédée.
1549—1552. Quintin le boiteux.
1552. Théodore de Bèze (pendant un mois).
1552—1557. Eustache du Quesnoy.
1557—1558. Jean Tagault.
1564—1571. Blaise Marcuard.
Après cette dernière date les 12 escholiers ne sont plus mentionnés. Cette institution paraît avoir cessé. En 1580, la classe des pasteurs de Lausanne en demanda le rétablissement.
Punition de blasphèmes.
1551. 12 février. — Ont ordonné lesditz seigneurs que ceulx qui jureront et feront aultres blasphemes, par devant l’audience de leurs consistoire et justice, avec l’ordonnance de noz souverains seigneurs de baiser terre, seront XXIIII heures détenus en leurs prisons en pain et eau.
Bannissement.
1551. 2 juin. — Lesd. seigneurs ont bampny Helisabet, fillie de Jacob Brentoz, de Fribourg, et luy ont commandé de sortir hors de leurs ville et jurisdiction dans ung jour natural, sus poenne d’estre fuetée publicquement, et ce à laz relation des sgrs jurés de leurs consistoire, pour estre palliarde privée et adultère avec plusieurs, laquelle a accepté, réservant leurs bonnes grâces, à ycelles se recommandant.
Fête du mai.
1551. 11 juin. — De laz part des nobles enfans de laz cité de Lausanne a estés présentée à messeigneurs certainne supplication pour faire honeste réjouyssance et /132/ assemblée pour lever le may; laquelle lesdicts seigneurs ont admise, réservant à eulx les ordonnances, élection du jour, devise de laz bannyère et toutes aultres chouses nécessaires.
18 juin. — Fuit conclusum quod pro presenti anno non levabitur mayum et quod illi qui noctu yverunt per villam eant XXIIII horis en jacquemart.
Voyez la note sur les articles du 19 octobre 1542 et du 6 mai 1543.
Message de Berne.
1551. 21 octobre. — Sont esté assemblés les seignieurs petit et grand conseil nommés XXIIII, LX, IIc, par devant les queulx sont comparus les seignieurs ambassadeurs soubnommés pour laz part de messeigneurs de Berne envoiés, à sçavoir : nobles et magniffiques seignieurs, monseignieur l’advoier de Wattenvil; Hanns Steiger, boursier; noble Yost de Diesbach, conseillier; Nyclauss Zur Kynden, commissaire général, tous conseilliers de laz ville de Berne, lesqueulx ont exposé devant lesdict IIc que l’on dehust avoir advis de mettre ordre sus cas de peste; en laz longue justice; sus les biens des pouvres; sus les comptes; sus les tavernes deshonnestes; sus les légatz et consistoire et il mettre bon ordre en toutes chouses; lesquelles chouses il ont fort amiablement proposées.
Sus ce a esté conclus d’aller remercié messeignieurs de leurs admonitions; aussi de eslire ambassade dans ung moys, pour envoier à Berne pour respondre sus le totage.
Lépreux.
1553. 26 janvier. — A refferu messy Jaques Blescheret, docteur, aiant aussi charge de messy Heustace du Quesnoy, /133/ tous docteurs en médicine, avec maistre Estienne, cirurgien, que le fils de … de Pullie est infec de lèpre et ladrerie et debvoit estre sequestré des hommes, et ce par leurs serement … Cogneuz et ordonné qu’il doibt estre sequestré et remis en leurs maisons hospital des ladres, avec ses biens à leurs dite malladière.
Dans la première partie de ces extraits on a déjà cité des cas de lèpre; on en trouve encore plusieurs mentionnés dans les manuaux pendant le cours de ce siècle.
Par exemple, le 14 avril 1556 : « Messy Jaques Blescheret, médecin et certains cirurgiens ont refféru, de ce estant commis, que Nicolardaz, femme de Claude Chappuys dict Vyte, et aussi que Claude, filz de feuz Claude Dapaz alias dict Bachoux, sont infectés de parfaicte ladrerie, pourquoy doibent estre séparés. Par ainsin, mesd. seignieurs ont ordonné que dans quinse jours il doibgent estre séparés par commandement à faire par le seignieur juge. »
Le 25 novembre 1560, on reçoit dans la maladière une lépreuse de Lutry.
Le 5 mars 1561, le Conseil reçoit ordre de Berne « pour faire visiter donne Ayme Blescheret, femme de Jean Roschiz, sus cas de lépre … »
Le 1er avril 1574, la fille de feu Jacques Pappan, lépreuse, est séquestrée à la maladière. Mais le bâtiment paraît avoir été abandonné depuis quelque temps puisqu’on ordonne « de refaire la couverture en la maison dedite maladière. »
Le 20 février 1595. « La lépreuse de Vidi soit doublement chastiée pour ne se tenir séquestrée et ne voloir porter les quinclettes. »
9 février 1598. « A Pierre Jordan, entaché de maladie contagieuse de lépre, est accordé mansion en la maladière de Vidy … en ce qu’il ne doibge donner aucune charge, ains se nourrir et entretenir à ses propres despends, d’autant qu’il est gavot. » /134/
Forêts de Sauvabelin et de Fougère.
1553. 14 février. — Glaude Bellyn a esté admis garde du bois de Sauvabellyn, lequel haurat trois solz par gagement et cinq florins pour son sallaire, lequel a presté le serement.
Lors de la largition du 1er novembre 1536, Messieurs de Berne s’étaient réservé les biens du chapitre de la cathédrale et de l’évêque; ainsi les forêts de Sauvabelin et de Fougère, qui avaient appartenu au chapitre, n’avaient point fait partie de cette donation.
Le 26 août 1552, LL. EE. cédèrent ces forêts en toute propriété à la ville de Lausanne, avec le droit d’y établir des gardes. Voici une copie de cette donation :
« Nous l’Advoyer et Conseil de Berne faisons sçavoir et confessons par ces présentes, comme ainsy soit que nobles, prudens, noz chers et féaulx, Bourgimaistre, Conseil et bourgeoys de la ville et cité de Lausanne nous ayent humblement prié et requesté que feust de nostre bénigne grâce leur donner noz boys de Saulvebellin et Fougières, pour en faire leur commun prouffit et pour entretenement de leur républicque et tant mieux pouvoir pourter et soubstenir les charges d’icelle, s’offrans humblement le déservir et à l’advenir sy bien gouverner que en aurons honneur et eulx prouffit; sur ce considérans leur requeste estre raisonnable et en contemplation de leurs bons et loyaulx services que cy devant nous ont faict et pour l’advenir de faire se présentent; de spécialle grace et en donnation gratuite, leur avons donné et par ces présentes donnons et conférissons lesdicts deux boys, pour iceulx posséder, tenir, gaudir, jouyr et en faire à leurs libere voulenté, tout ainsy que le Chappitre de Lausanne paravant et nous jusques à présent les avons possédé, jouy et gaudy; avec leurs fonds, propriétez, droictures et appartenances universelles et singulières et mesmement de pouvoir ordonner /135/ gardes sus iceulx et imposer bans et iceulx recouvrer; à nous réservans expressément en iceulx et toute leurs comprise et limites cy après spéciffiées et desclairées haulte, moyenne, basse et omnimode jurisdiction, aussy les albergemens que nos bailliffs de Lausanne et nous avant date d’icestes avons faicts; pareillement reservans à noz bailliffs le pasquerage de deulx vaches siennes et d’y pouvoir coupper et prendre des verges. Nous dévestissans sur ce desdicts boys et mettans les dicts de Lausanne en perpétuelle et paciffique possession et corporelle saisine d’iceulx; tousiours saulves les reservations susdictes, en vigueur d’icestes, lesquelles en vériffication, corroboration et observation avons scéelées de nostre scel pendant. Données vendredy vingtsixiesme jour du moys d’aougst, l’an de grâce nostre Seigneur courrant mille cinq cens cinquante deulx.
» Sensuyvent les limites et confins des dicts boys … »
(Arch. de Lausanne, C, 58. Parchemin avec sceau pendant.)
On lit dans les comptes du boursier l’article suivant à ce sujet :
« Item, a livré pour certaine dispence faicte quand monseigneur le ballifz mict en possession mes honnorés seigneurs du boys de Sauvabellin et Fiougiere, comme le conste au billiet datté 3 novembre 1552 : 33 sols 9 den. »
Réception à Thonon.
1553. 6 juillet. — Noble Francois Seignieux, seigneur de Vufflens, a relaté à messeigneurs que luy, ensemble une dozayne d’enfans de ville, sont estés Evian et à Thonon. Auquel lieu de Thonon l’on leur a faict tant d’honneurs et offertes et présentations et deffrayemens qu’il n’en sçauroit racompter laz moitié; car lesdictz de Thonon soy sont offert corps et biens au service des seigneurs de Lausanne. Semblablement les seigneurs d’Evian ont porté du vin eis seigneurs que dessus et leur ont faict bonne chière avec deffrayement de tous despens. /136/
On voit par les comptes du boursier que, au mois de mai 1552, ceux de Thonon étaient venus faire une visite à leurs voisins de Lausanne. Le Conseil les festoya.
Congrégation tenue dans la cathédrale.
1553. 17 août. — Monseigneur le burgermaister Noble Jaques de Praroman, lequel de laz part de nos magniffiques seigneurs de Lausanne a assiter en laz congrégation générale par les députés par noz trèsredoubtés princes de Berne en l’esglise cathédrale dudict Lausanne tenue, a refférus a nozd. magnif. seigneurs de Lausanne les poincts et passages cy après déclairés :
Premièrement, que les mag. srs ambassadeurs de Berne ont faict beaucopt d’honneurs audict seigneur burguemaister et icelluy ont tousjour faict assister avec eulx auprès du mag. sgr ballifz et auquel sgr burguemaister, au nom de toute laz généralité de Lausanne, il ont faict remonstrances suyvantes, pour sus icelles il pourveoir, à sçavoir de députer jour et heure congrue pour tenir le consistoire, et combien que il n’aurrat au dict jour député des causes, touteffois les seigneurs assistans seront tenus soy représenter et comparoir sus laz place à l’heure députée, pour tenir ladicte cour, s’il est nécessaire. Et si le groz saultier et secrétaire dudict consistoire ne peuvent souventeffois assister audict consistoire, l’on leur debvrat ordonné des soubstitués.
Item, que le juge du consistoire ne debvrat accorder en argent ny pugnir aulcun délinquant en cas consistorial, ains laisser fère pugnition jouxte laz cognoissance qui serat par le consistoire déclairée. /137/
Item, que les seigneurs conseilliers, pour donner exemple à leur popular, ne vestiront leurs bons vestemens ny leur famillies les jours de festes papistiques, ains suyvront plus amplement les presches de laz paroule de Dieu qu’il n’ont faict.
Item, que toutes cerimonies papales après le trespas et ensepvelement des deffunctz soint du tout bas mises, et mesmement laz donaz ou aulmosne que se faict le jour de l’ensepvelement ou le lendemain, mais ladicte aulmosne ou donaz n’est point deffendue dans ung mois ou aultre terme plus grand après ledict ensepvelement.
Item, d’avoir l’œil sus les tavernes et cabaretz, semblablement tenir main sus ceulx que charment les maladies, qu’il soint admonestés s’en désister, et si dans laz tierce admonition il ne s’en déportent, à laz quarte admonition l’on userat de bampnissement à terme.
Item, avoir les biens des pouvres en singulière recommendation, affin que ne se déperdent.
Cet article a été donné en extrait par Ruchat, tome VI, pag. 69. On le publie de nouveau parce qu’il donne une idée des mœurs lausannoises.
Consistoire.
1553. 25 octobre. — Sont estés esleuz les sgrs cy après nommés pour assister au consistoire, à sçavoir : les seignieurs Guill. Ravenel, George du Crest, Bernard Ruffy, Gerard Bosson, tous sgrs conseilliers, et honnorables Jaques Blecheret et Etienne Gandyn, du nombre des sgrs LX, lesqueulx sont estés establis pour assister au consistoire ung an /138/ durant, à sçavoir l’an 1554, et lesqueulx ont presté le serement de maintenir les libertés de Lausanne.
Ledit jour mesdt sgrs ont ordonné de pension tous les ans aux sgs susnommés, ensemble le groz saultier et le secretaire dudit consistoire, à ungchescun d’eulx cinq florins poiables par le sgr Gerard Pigvard sus le revenus de Bellevaux, et le groz saultier rendrat compte des bamps au sgr boursier tous les ans, et est à noter que lesdt cinq flor. de pension sus ordonnés lesdt sgrs assistans hauront leurs anciens stipendies accoustumés de poier en tenant laz cour consistoriale.
Prisonnier.
1554. 15 février. — Sont estés assemblés les magniffiques seignieurs conseilliers de Lausanne, eisqueulx honnorable Johan de Crose, hoste de l’ange et bourgeois de Lausanne, chastellain de Chesaulx, lequel ayant pris ung prisonnier à Chesaulx apertenant à noz redoubtés princes de Berne, et lequel prisonier il ne ose mener au chasteaulx d’Oche, sans le consentement de messeignieurs de luy permettre de laisser mener ledit prisonier par dessus leurs terres, ville et jurisditions. Laquelle requeste mesd. seignieurs en susside de justice luy ont octroiée.
Ambassade à Berne.
1554. 17 avril. — Nobles Jaques de Praroman, seignieur burguemaystre de Lausanne, François Seignyeux, seignieur de Vufflens et banderet de laz Palud, honnorables Jaques Boufz, seignieur boursier, Lois Diverdon et egrège Johan Gumoen, tous conseilliers de Lausanne, ont faict le rapport /139/ de laz charge à eulx comme ambassadeurs donnée pour aller à Berne, déclairans que l’on leur a faict petit visage à Berne et que l’on n’ast pas voulsus veoir ny lisre leurs drois et tiltres, aussi qu’il n’ont pehuz obtenir les seignieurs IIc à Berne; touteffois il ont heuz de conseil de suspendre ung peu, car le vent n’est pas bon, mais sil lon retorne ung aultre copt l’on pourrat obtenir facilement le contenus de laz suplication, contenant entre aultres chouses, qu’il plaise à messeigneurs de Berne ne vouloir rompre l’estatus faict par messeigneurs de Lausanne touchant le vyn contre ceulx de laz Vaulx, aussi de nous maintenir lettres et seaulx.
De laquelle response messeignieurs de Lausanne ne se contentent, ains vieulent suyvre plus oultre.
Le droit de vendre du vin de Lavaux à Lausanne avait, de toute ancienneté, été une source de disputes et de tiraillements entre les bourgeois de Lausanne et les gens de Lavaux.
Etrangers.
1554. 2 mai. — Les seignieurs ministres députés pour laz part de leur classe et à leur nom ont prié messeignieurs les LX vouloir permettre et admectre en leur ville les estrangiers. Sus ce a esté ordonné de fère à laz discretion de messeignieurs de conseil comme par cidevant, non entendant touteffois de retirer chescung synon ceulx que leur plairrat, sans confronter avec les seignieurs ministres, aussi sans leur mettre des espies pour scavoir comme il vivent, affin que esclandre n’en vienne.
Voyez la note sur l’article du 10 août 1544 concernant la bourgeoisie./140/
Convocation du Conseil.
1554. 2 mai. — A esté conclus de non plus oultre sonner le conseil des seignieurs XXIIII le mardy ny le jeudy, ains les seignieurs viendront au conseil incontinant apprès le sermon; et quand l’on vouldrat tenir les seignieurs LX l’on sonnerat à l’aube du jour XII copt sans soner laz modaz, touteffois l’on ne viendrat synon après le sermon. Item, l’on sonnerat seulement une modaz quand l’on tiendrat les seignieurs IIc.
Le 24 octobre de la même année on décide de nouveau de sonner le conseil.
Jean de Coignac.
1554. 14 août. — Seigneur Loys d’Yverdon est ordonné ambassadeur pour aller à Lymoges, au pays de Lymosyn, pour le prisonnier détenu en leurs prison Noble Johan de Cugnyat.
Jean de Coignac, écuyer, seigneur de Château-Chervix, lieu situé six à lieues de Limoges, et frère de François de Coignac, seigneur de Saint-Jean Ligoure, était un dangereux malfaiteur. Il avait plusieurs fois détroussé et tué des passants sur les grands chemins et, depuis quelques années, avait entrepris, avec quelques complices, de fabriquer de la fausse monnaie dans son château. Craignant les révélations des membres de sa famille et des gens de sa maison, il résolut de se défaire de ces témoins importuns. Au mois de décembre 1553, aidé de deux affidés, il assassina pendant la nuit, à coups de dague, dans son château, un domestique, une chambrière, sa femme enceinte, sa mère, deux enfants et leur bonne. Puis les assassins transportèrent les /141/ cadavres dans un hangar rempli de bois et les brûlèrent. Coignac et l’un des complices s’enfuirent; l’autre, un prêtre défroqué, nommé Jean des Maisons, dit Bernarduras, fut pris. Le procès fut instruit à Limoges et la sentence fut prononcée le 7 avril 1554. Les deux fugitifs, Jean de Coignac et Jean Célérier dit Gros, furent condamnés par contumace, « ledit de Coignac à estre mené et traisné par l’exécuteur de la haulte justice sur ung tumbereau jusques au pillory, lieu public de la présent ville, et sera tenaillé de tenailles ardentes, aux quatre lieux et quantons plus apparentz de ladite ville, et à la dicte place ledict de Coignac à estre bruslé tout vif et mys en cendres; et le dict Célérier pendu, estranglé audict lieu publicq de la présent ville par ledict éxécuteur de la haulte justice, si appréhendés peulvent estre, aultrement seront exécutés par figure. Et affin de perpétuelle mémoire, en sera affigé ung tableau en ung gibet en ladicte place publicque, où seront escriptz les noms et surnoms desdictz deffaillans, et avons confisqué et confisquons au Roy tous et chascuns des biens dudict de Coignac, etc. » Bernarduras fut condamné à la même peine et exécuté le même jour, comme il appert par ce qui suit : « Et ledict jour après mydy, en présence de nous Joseph de Beaune, juge magistrat criminel susdit, a esté ladicte sentence exécutée en la personnne dudict Bernarduras, qui a esté suyvant icelle tenaillé par aulcuns cantons de ladicte ville, et après couppé les braz et jambes vif et la teste tranchée, qui est demeurée en la place publicque. Et quant ausdictz de Coignac bruslé par figure et ledict Célérier par figure pendu. »
Signé Beaune : Delaporte.
Jean de Coignac se réfugia à Lausanne, où il fut emprisonné. On voit par le texte et par les comptes de la ville que le Conseil envoya Louis d’Yverdon et Nicolas Rosche à Limoges pour prendre des informations contre ce criminel et sans doute ils en rapportèrent les pièces du procès qu’on peut lire aux archives de la ville. (Ce voyage coûta 186 flor. 4 sols.)
Le criminel fut exécuté à Lausanne avant le 22 novembre 1554. Le Conseil fut accusé par certaines personnes de ne l’avoir /142/ pas mis à mort assez cruellement, car à la date du 15 août 1555 on lit dans le manual :
« Le sr de Montricher a esté député à Berne pour respondre à quelques calumnies et incrépations ouz accusations faictes vers eulx de non havoir procéder juridicquement au procès et procédeure criminelle envers ung certain François, nommé Johan du Cugniat, sr de St Johan et Chasteaul-Charvy, lequel a esté exéquuté audit Lausanne; havoir usé de tropt grande doulceur et moindre poenne et havoir user quasi de grace. »
On lit dans le compte de recettes de François Seigneux, boursier de Lausanne :
» Item, a receu ledit sr boursier pour le vendage faict par mesditctz T. H. S. de conseil d’ung manteau de velours noyr audict boursier vendus pour IIII escus; au sr Jaques Boufz ung part d’esperon pour trois sols; et au sr Guillaume Sodal ung part de bourgequins, six sols; et au sr Jaques Dalliens une courraye pour un florin : le tout receuz par ledict bourcier, ce que dessus et non aultre chose, quelles choses éstoient des hardes du sr de Chasteau Chervys dict St Jean et de Cognyat. Car le reste que fut vendus ne fut poyé, comme appert au manuel de l’an 1554, le 22 novembre. Se monte ce que dessus à IIII flor. IX sols. l’escus. XX flor. IX sols. »
On paya au châtelain de l’évêché 50 florins pour avoir alimenté le prisonnier pendant dix semaines.
Troupes pour Berne.
1555. 19 février. — Sont estés assemblés les seignieurs LX pour le faict et élection de cent hommes de guerre hacquebusiers, jouxte le contenus des lettres par messeignieurs de Berne envoiées, dattées du XVe de fébvrier. Sus ce sont estés establis noble Glaude de Praroman pour cappitaine, et pour lieutenant de cappitaine égrège George de Neschel; pour banderet hon. Glaude Gumoen et pour son lieutenant sr Maire François. Laz reste de l’election se /143/ ferat par cinq seignieurs de conseil des XXIIII, cinq des srs Soixante, accompagniés des seignieurs cinq banderetz.
Le 4 mars le Conseil de Lausanne députa à Berne N. François Seigneux, seigneur de Vufflens le Chatel et boursier de la ville, et N. Amy Ravier, seigneur de Montricher, pour demander que le contingent d’arquebusiers lausannois fût autorisé à marcher sous la bannière de Lausanne. Il leur fut répondu par l’avoyer que « en suytte de guerre laz ville de Lausanne peult fère sortir bannyère avec leurs gens de guerre esleuz, et ce pour autant que ainsin par le passé a esté usité, aussi pour les bons services à nos dit trèsredoubtés princes faictz du temps de laz combourgeoisie laquelle estoit entre eux et la seigniorie de Lausanne. »
A l’ouïe de cette réponse favorable le Conseil de Lausanne décida, le 7 mars, de lever cent hommes de plus « lesqueulx hauront chesque teste ung mourrion ou cabasset. »
En vue de cette expédition, « pour aller aux armes à Francfourt, » les Lausannois furent obligés de faire un emprunt; le Conseil emprunta au tuteur d’Antoine Langin 142 écus au soleil, à Claude Thulliez alias Reydel de Lausanne 550 écus au soleil, et à Jean Forestey 300 florins. (L’écu valait alors 4 flor. 10 sols.)
Les hommes de Lausanne furent passés en revue. Pour ce grand jour on équipa à neuf de pourpoints et chausses les quatre fiffers et tabouriniers de la ville et l’on fit venir des tabouriniers et fiffers de Payerne, de Vevey et d’Evian. La revue eut lieu sur la place de Montbenon. Le conseil offrit un diner aux « esleuz pour la guerre. »
Imprimeur.
1556. 9 avril. — A esté permis à maistre Riveri, premier imprimeur à Lausanne, de imprimer les Proverbes de Salomon en ryme.
Le secrétaire du Conseil ignorait que dans le siècle précédent (en 1493) Jean Belot, de Rouen, avait imprimé à Lausanne un /144/ magnifique volume in-folio intitulé : Missale in usum Lausannensem, dont il y eut deux éditions subséquentes, à Genève en 1505, et à Lyon en 1522. (Voyez Bulletin de l’Institut national genevois, II, pag. 290.)
Le même secrétaire dit dans le manual que, le 27 décembre 1554, le Conseil avait « admis certain imprimeur habitant en leurs ville, nommé Johan Creppin ». Mais celui-ci n’imprima probablement rien à Lausanne; peut-être est-ce le même que le fameux imprimeur Jean Crespin, établi à Genève.
Riveri resta à Lausanne jusqu’en 1561, puis se fixa à Genève. Dans ces deux villes il imprima entre autres plusieurs ouvrages de Pierre Viret, dont il était l’ami.
Le 5 août 1557, on lit dans le manual de Lausanne : « Soy face billiet de cincq escus d’or, addressant à monsieur le bourcier, pour Riveri imprimeur à Lausanne, pour luy délivrer en pur don pour une fois. Lequel billiet ha ledict Riveri. »
Mais l’imprimerie ne pouvait prospérer à Lausanne sous la surveillance ombrageuse de Messieurs de Berne, qui ne voulurent permettre que l’impression de livres d’école approuvés par les ministres de Berne, comme on le voit par l’extrait suivant d’une ordonnance du 18 mai 1557 :
« Schultheis, etc. Uff der unsern von Losen zwo parte gelegt suplicationen, ist unser will und meynung. Erstlich … Denne der andern halb, betraffend die truckeri, wellen wir inen die so lang es uns gevellig ist begünstiget haben, doch der gestalt und mit der lütrung, das sy allein bucher so zur schul dienstlich sin mogen trucken lassind und sunst kheine andre; doch sollen dieselbigen zevor durch die schulherrn und verordneten allhie besichtigot und approbiert wärden, dan so sy da übersachen wurden, wellen wir uns vorbehalten haben so hierumb ze straffen und die truckeri abzethünd. »
(Arch. cant. vaud.)
Prix d’arquebuse.
1556. 26 mai. — A esté ordonné par messeigneurs que ceulx quil ne sont bourgeois, ains tant seulement assouffertés /145/ ne doibgent havoir le chappellet au jeu de l’acquebute à Lausanne, combien qu’auroint faict le plus beau cop audit jeuz, mais les bourgeois et enfans de ville doibgent estre préférus à iceulx haians faict le plus beau cop après iceulx, ainsin et jouxte comme anciennement a esté icy à Lausanne usé par les joueurs, leurs laissans leurs honneste ordre et rite.
Musicien.
1555. 28 mai. — Messeigneurs ont admis maistre Oronce, le musicien, à leur pension ordinaire, auquel il ont annuellement ordonné demy muyd de froment, ung muyd de vin blan et dix florins d’argent, commenceant le terme de sad. pension à laz Sainct Jehan prochain.
Maistre Oronce était Français. On lit au manual, le 19 mars 1562 : « Oransoz Roy, musicien, a prins congé honneste de messeigneurs, se retirant en son pays pour raison de l’évangile presché en France. »
Pauvres.
1557. 28 janvier. — L’hoste de l’Ange, Sr Johan de Crosa a faict serement qu’il tiendra main d’avoir en sa maison une boette des pouvres, laquelle il présenterat eis marchans et passans.
Fontaines.
1557. 13 avril. — M. T. H. S. ont délivrés à messy Jaques Besson l’ingénieulx deux escus, tant pour l’engin de l’eaul par luy délivré aulxdictz seigneurs, comme pour commencement de don pour l’invention des fontaines. /146/
Réfugiés anglais.
1557. 6 juillet. — Le mardi VI de julliet 1557 furent assemblés les seigneurs XXIIII et LX du Conseilz pour les affaires de certains Anglois, en nombre environ XXV mennages, lesquieulx requèrent permission d’habiter en leurs ville, à cause qu’ilz sont persequutés et deschassés d’Angleterre come mainteneurs de laz parolle de Dieu, par laz perséquution grande et tirannie de laz roinne d’Angleterre, dressée contre les fidelles suivant laz vraye réformation évangélique et laz parolle de Dieu. Une partie desquieulx seigneurs Anglois soy présentant ont présenté laz supplication par eulx faicte à nous trèsredoubtés seignieurs de Berne, les suppliant mesditz seigneurs de mesme. Lesquieulx seignieurs de Conseilz en ont ordonné comme s’ensuyt, leurs en passant lettres de laz teneur suivantes, sy telles ilz acceptent :
Nous les bourguemaistre, conseilz et rière conseilz de laz ville de Lausanne faisons scavoir à tous que, nous estans aujourdhuy faicte et présentée humble supplication et requeste pour laz part de vingt et cincq mennages des gens fidelles deschassés d’Angleterre, contenant que eulx estans retirés pour laz confession du Seignieur du glaive, feuz et très inhumainne et espouvantable perséquution faicte audit Angleterre contre haultz et pety estatz et toutes personnes favorisans à l’évangille de Nostre Seigneur, et par quelque temps trouvé logis et place soubz la souverainneté du duc de Clèves et d’ilec à raison de laz diversité et discordance d’oppinion de laz Saincte Cène de Nostre Seigneur soy soient retirés soubz laz conduitte de /147/ Dieu vagabundantz, et en cete tribulation et perséquution ils ayent jecté leur confort et espérance, après Dieu, en nous souverains seigneurs de Berne, pour estre recehuz en leurs terres et pays; ce que estre faict par eulx, comme ès lettres patentes sus ce dressées se contient; après havoir visîté aulcunes villes et places des terres de nousdictz seigneurs, soy soient finallement arrestés en nostre ville; et en considération des grandes commodités qu’ilz ont en icelle trouvées, tant à raison du collège, instruction des enfans que aultres, désirre ilz faire leurs arrest et demourance, Nous sur ce humblement requérans comme seigneurs chrestiens et pytoyables avoir de cestes leurs extrême nécessité et perséquution pitié et compassion d’iceux et les recepvoir et admettre pour habîter, converser et demourer en nostre dicte ville, terre et jurisdition; n’entendans estre en charge aulcugne à nous ny nous bourgeois et peuple, ny demandans aultre avancement ny contribution, ayantz en eulxmesmes moyen de gagner, à l’aide de Dieu et de leurs amys de pardelà, les nécessités de cette poure vie, aussi de leurs mestier et trafficque sans charger personne, s’ouffrans tellement verser et trafficquer chrestiennement en vie et doctrine que Dieu en haura contentement et ne nous repentirons de leurs havoir faict ce bien de les recepvoir;
Nous doncq, après bonne et meure considération et advis, desirrans de tout nostre povoir faire office de magistratz chrestien et de tout nostre povoir avancer laz doctrine et religion évangélique, estans mehus de chrestienne charité et compassion envers ces poures fidelles perséquutés pour laz parolle du Seigneur, avons, en considération /148/ des raisons prédictes et de l’oultroy en leurs faveurs faictz par nousdictz souverains seigneurs, aussi de l’équitable requeste à nous faicte par le magnifficque seigneur Jherosme Manuel, ballifz dudict Lausanne, iceulx ungchescung mesnages, et non plus, admys, recehus et assuffertés, comme par ces présentes les admettons, recepvons et assouffertons, pour habiter, demourer, résider, converser et trafficquer en nostre dicte ville, seigneurie et jurisdition et soubz nostre hobéissance, et par et moyennant les expresses conditions suyvantes :
Premièrement, que iceulx, en particullier et général, soient tenuz et doibgent vivre selon laz réformation chrestienne de noz souverains seigneurs de Berne, sans aulcunement contre ny sus icelle dire, faire, ny entreprendre. Pareillement, soint entenus hobéyr et satisfaire à nous mandemens, statuz, coustumes et usances, tant anciennes que novelles, et contribuyssant générallement à toutes chouses, ainsy que nous bourgeois et habitans sont tenus faire, s’entretenans chrestiennement et en bonne charité avec nous bourgeois naturels et populary, les haiant en honneur et bonne amytié. Semblablement, ne doibgent, en manyère ny façon quelconque, ouvertement ny secrettement, entreprendre aulcugne chouse contre nostredicte ville, estatz, seigniorie, jurisdicion, bourgeois et peuple, soubz poinne d’abolition, rétractation et anéantissement de laz présente réception et admission; ains chrestiennement, honnestement et amyablement s’entretenir avec ungchescung, vivans et conversans honnorablement ainsin que à bons et loyalz fidelles s’appartient, procurans l’honneur et prouffict de nostredicte ville, bourgeois /149/ et jurisdicion et évitans nostre dommage et déshonneur de tout leurs povoir.
Item, pource par l’oultroy faict par nousdictz souverains seigneurs de Berne, iceulx ont réservé povoir user â l’endroyct desdicts suppliantz de quelque impos pécunyaire pour laz reception et entrée d’iceulx en leurs terres et pays, quant ilz seront en délibération le faire sus les estrangiers que cy devant de France ouz allieurs sont estés en leurs dictes terres et pays recehuz; considérant que en ce seroit infringé l’oultroy, largition et donation à nous faicte par nousdicts souverains seigneurs, désirrans l’entière observation d’icelluy oultroy, et n’entendans icelle réserve s’extendre, fors que quand lesdicts suppliantz feront résidence en aultre ville, lieuz, terre et place de nousdictz souverains seigneurs n’ayantz semblable largition d’iceulx que nous, avons pourtant par exprès réserver que, avant iceste réception aie lieu, que iceulx suppliantz doibgent procurer envers nousdictz souverains seigneurs et princes de Berne de abolir et anéantir (quant à nous, nostre ville et communaulté) la dict réserve, affin laz prédicte largition demeure en son entière valleur, contenance et efficace.
Item, havons par exprès conditionné que lesdictz suppliantz, tous en généralz insolidement et l’ung pour l’aultre, soy doibgent obliger et astraindre de nourrir, entretenir, soustenir, alimenter et pourveoir en toutes chouses nécessaires à tous leurs povres et quilz hauront nécessité, en sorte que de ce n’en hayons aulcune charge ny moleste, et ce ensuivant leurs oufferte.
Plus, havons réservé et conditionné que, advenant lesdictz suppliantz voulsissent faire quelque noveau édiffice et /150/ batissement, que avant laz construction d’iceulx, ilz nous doibgent déclairer et monstrer le lieuz, place et manière qu’ilz le prétendent faire, affin de sur ce il povoir faire observer et maintenir noz droictz, tant pour les chemyns, charrières, que aultres de jurisdicion et seigneuriage équitables. Semblablement, que advenant que lesdictz suppliantz usans de leurs mestiers fassent quelque marchandise vendable hors de nostre ville et jurisdition, que d’icelle en doibgeons havoir laz superintendance et apposition de nostre seaul, pour observation de nous drois et jurisdicion.
Item, et que laz présente réception et admission ne se puysse extendre ny entendre, synon entant et par le temps que nostre bon voloir et plaisir sera et non plus oultre.
Et combien le principal mouvement et fondement de laz présente reception soit faict pour l’avancement de laz gloire du Seigneur et par charité et compassion chrestienne, néantmoins pource que cy devant en laz réception d’aultres estrangiers pour le mesme faict recehuz en nostre ville et jurisdicion, iceulx sont estés composés de quelque somme pécuniaire pour leur entrée et réception, et c’est en supportation des grandes charges de nostre dicte ville et communaulté, estimans estre nécessaire et équitable user de quelque équalle procédeure, avons conditionné et arresté que lesdict supplians pour leurs dicte entrée et réception soient tenus nous payer et satisfaire la somme de 1 centz escus d’or au soloil, applicqués au prouffyctz de nostre dicte ville.
Et moyennant l’observation des chouses susescriptes, les /151/ admettons, recepvons et assuffertons pour habitans de nostre dicte ville et jurisdicion, à forme des prédictes réserves et conditions.
Ruchat dit (loc. cit. IV, 493) que les Anglais réfugiés dans diverses villes de la Suisse, à cause de la persécution de la reine Marie Tudor, ne restèrent que peu de temps dans ce pays. Il y a tout lieu de croire que les vingt-cinq familles dont il est ici question ne firent à Lausanne qu’un séjour tout à fait temporaire et que l’acte de réception, qu’on vient de lire, resta à l’état de simple projet. En effet, l’on remarquera que la finance de réception a été laissée en blanc, probablement jusqu’à ce qu’on eût débattu le prix avec les Anglais; en outre, les comptes du boursier, N. François Seigneux, ne mentionnent aucune somme reçue de ce chef.
Voyez, sur les Anglais réfugiés à Genève, l’article de M. Heyer, M. D. G. IX.
Exécution d’un malfaiteur génois.
1557. 19 juillet. — Lesdicts seigneurs (de Conseil) ont conclu et ordonné d’exéquuter par justice certain leurs prisonnier genevois [lisez génois], nomme Jaques Facco, jouxte laz grâce faicte de nous souverains seigneurs de Berne, luy couper laz teste et son corps attaché au gybet, et ce à vhuyct heures aujourdhuy, ce lundi.
Jacobo Centurione Facco, de Gênes, avait reçu la procuration générale des frères Nicolas, Antoine et Jean-Baptiste Pinello Borzone, négociants dans la même ville. En vertu de cette procuration notariée, datée de Gênes le 23 février 1557, Facco était chargé des affaires de ces Génois aux foires de Lyon, à l’époque de Pâques 1557.
Facco quitta furtivement Lyon et s’enfuit, emportant avec lui des valeurs appartenant à ses commettants, consistant entre autres /152/ en une somme de 1700 écus d’or et une cédule de 1775 livres 1 sol 6 deniers tournois. Les Génois mirent aux trousses du voleur un nommé François des Gouttes, marchand de Lyon. Facco fut arrêté à Lausanne, à l’auberge du Lion d’or, le 8 mai.
Dans l’interrogatoire qu’il subit, il avoua qu’il avait prémédité son coup; que le 1er mai, avant de quitter Lyon, il avait expédié par des muletiers quatre coffres « pleins d’accoustremens, de linges et aultres choses contre Ytalie, » parce qu’il avait l’intention d’aller à Bologne, pour y trafiquer de son bien mal acquis.
Le même Facco avait quitté Lyon, sans payer 121 livres qu’il devait à noble George Obrech de Lyon, pour affaires de change. Il devait, de plus, à Laurent Charlier, bourgeois de Lyon, 1650 livres pour diverses transactions commerciales, datant déjà de l’année 1555.
Le 1er juin 1557, Facco étant amené en jugement « par devant le seigneur juge et les seigneurs bourgeoys de la charrière de Bourg, » le procureur fiscal, remplissant les fonctions de ministère public, demanda au tribunal « ledit Jaques Facoz debvoir estre remys entre les mains de l’exécuteur de la haulte justice et par luy estre mené et conduict, ayant une corde au col, jusques au lieu où l’on a accoustumé mené les malfaicteurs et délinquans, et audit lieu estre eslevé au gibet et en icelluy estre attaché, pendu, estranglé et deffiny ses jours, pour il affin d’estre pour exemple aux aultres à l’advenir, ses biens confisqués à nousdicts trèshonnorés seigneurs de Lausanne 1 et à tous autres rière lesquelz il seront et s’en trouvera; réservé néaulmoings la grâce de noz trèsredoubtés et souverains princes de Berne; demandant de cela cognoissance desdictz seigneurs bourgeoys et assistans. »
La sentence fut rendue conformément aux conclusions du procureur fiscal.
Mais le 7 juin, le Conseil de Lausanne fut informé que le bailli bernois, Jérôme Manuel, avait fait une démarche auprès de /153/ François Seigneux, seigneur de Vufflens et boursier de la commune, pour qu’on n’exécutât point Facco, avant que certains marchands étrangers fussent revenus de Berne, où ils étaient allés demander sa grâce. Ces marchands cherchaient évidemment à rentrer dans leurs fonds volés, avant que, par l’exécution du criminel, ils fussent confisqués.
Le résultat de cette ambassade fut la lettre suivante de Messieurs de Berne au Conseil de Lausanne, qui accordait un sursis d’un mois au criminel pour rendre ses comptes : « Nobles, prudents, trèschiers et fénulx. Nous vous avertissons que suyvant la requeste à nous faicte de la part des nobles Vincent Tintoux et Jehan Réal, seigneur de Morrens, aussy des conseilliers et eschevins de la ville de Lyon, pour la délyvrance du marchand genevois, nommé Jacques Faccon, vostre prysonnier, Nous luy avons faict ceste grâce et miséricorde qu’il doige estre mené au lieu accoustumé d’exécuter les malfaicteurs et illec avoir la teste trenchée et ainsy finir ses jours. Et pource que de la part dudict seigneur de Morrens et Tintoux avons esté priéz et requis de vouloir audict prysonnier (au cas qu’il ne fust nostre playsir de luy donner la vie) octroyer quelque gracieux terme, pour rendre compte et faire déclaration de ce qu’il pourroit estre redebvable à ses créditeurs et aultrement, et aussy déclairer les debtes à luy par aultruy dehuz, Nous avons sur ce, pour ce faire, donné et constitué terme d’ung moys inclusivement, pour tout dislay; par telle condition toutteffoys que doigés ledict prysonnier si bien garder, que ce pendant ilz ne vous puisse eschapper ny soy saulver, car aultrement vous serés tenuz d’en respondre, et que au but dudict terme vostre susdicte sentence soit contre luy exécutée. Sur ce vous saichés conduyre. Donné ce XVIIIe de juing 1557.
» L’Advoyer et Conseil de Berne. »
Cet ordre de sursis fut remis au Conseil de Lausanne le 19 juin. Dès que le mois fut écoulé, le 19 juillet, Facco fut exécuté, comme on l’a vu par l’article du manual ci-dessus.
Les personnes lésées par Facco firent immédiatement des démarches auprès du Conseil de Lausanne, pour lui faire rendre les valeurs confisquées. Le 6 août, on trouve la note suivante /154/ dans le manual : « Le seigneur François de St Pol, au nom des seigneurs Guilliaume, Johan, Henry et François des Gouttes, marchans à Lyon, a présenté de leur part une supplication, par laquelle il demandoit leur estre restitué les deniers en escus trouvés sur Jaques Facco, Genevois, lequel a esté exéquuté. Semblable requeste discret Pierre Rochard, hoste de la Croix blanche, au nom de certain marchant de Lyon, a faicte. Sus ce a esté ordonné que, despuis que ledict argent a esté confisqué, il ne doibt estre rendu, ains demourer ès mains de messeigneurs, pour en fère à leur bon plaisir. »
En attendant, les Lausannois se mirent à dépenser une partie du « trésor » du supplicié. Outre quelques petites sommes employées pour les « négoces de la ville » et s’élevant ensemble à environ 830 florins, on préleva sur l’argent confisqué, au mois d’août 1557, 400 écus pistollets, valant 2000 florins « pour aller achepter à Basle des harnoys » (équipements militaires), et au mois d’août 1558, 450 écus pistollets, soit 2250 florins, pour acquisition faite des frères Blescheret de Genève, « de la hasle et haslage de rivaige de la Rive d’Ochie et des deppendances; item, pour l’achapt de la maison, dicte la maison du Signe et appartenances, le tout siz à Rive d’Ochie. »
Mais les Génois qui avaient été volés par Facco étaient persévérants. Plus d’un an après l’exécution du criminel, le 9 septembre 1558, N. Antoine Pinello Borzone se présenta devant le Conseil de Lausanne, réclamant la restitution de l’argent et des cédules confisqués, contre juste paiement de tous frais de justice. Il était muni de deux lettres de recommandation, l’une du célèbre André Doria, datée du 15 juillet, l’autre du doge de Gênes, datée du 18 juillet.
Le Conseil renvoya la chose au Conseil des LX, lequel refusa formellement de rendre les espèces (elles étaient déjà en partie dépensées). Quant aux cédules, on décida que « venantz ceulx au nom desquelz elles sont faictes, ou gens pour eulx, avec bonnes justifications, en fianceant, par bonne fiance de la ville de Lausanne, d’en garder la ville et communité de tous dampz et intérestz, icelles leurs soint rendues. » /155/
Peu satisfait de cette réponse, Antoine Pinello porta sa réclamation à Messieurs de Berne qui, le 13 septembre, écrivirent au Conseil de Lausanne … « Ce que bien avoir entendu, ensemble certaines lettres de recommandation … ne leur avons leur dicte requeste peuz ny sceuz reffuser, sur ce affectueusement vous exhortant et admonestant que, nonobstant ladite coustume et franchise par vous alléguée, ayant esgard à droict et équité, aussy à la qualité du faict, ensemble leur perte et grand despens par eulx, tant à la poursuyte dudict larron que des choses par luy desrobées, soustenuz, ilz vous playse user envers eulx de libéralité et largesse touchant les mille et septcents escus, en leurs faisant d’iceulx amiable restitucion, moyennant satisfaction des despens par vous à cause dudict exécuté supportez … En ce nous ferés aussy singulier et grand playsir. Mais touchant les cédules et aultres papiers, que par vous sont esté rière ledict exécuté trouvéz et retiréz, pource qu’iceulx ne vous peuvent ny doibvent de rien servir, est nostre voulloir et exprès commandement que … vous doigés icellesdites cédules et aultres escriptures aux dicts suppliants … sans contredicte, amiablement remettre et restituer entre leurs mains, pour s’en servir comme mieux leur conviendra. Sur ce vous saichés conduyre. Donné ce XIIIe de septembre 1558.
» L’Advoyer et Conseil de Berne. »
Le 19 septembre, munis de cette lettre, Antoine Pinello et consorts se présentent de nouveau devant le Conseil des LX de Lausanne, qui décide : « Quant à l’argent demandé, ne soit restitué, ains l’on se reffiert aux premières résolutions et ordonnances pour le mesme faict par lesdictz seigneurs LX faictes. Et quant aux polices, pour le respect des susdittes lettres par nosdictz souverains princes, comme dit, envoyées, par lesquelles ils commandent icelles restituer; pour complaire à nosditz seigneurs, a esté ordonné que les polices faisantes en faveur des nomméz eis susdictes lettres recommandatoires leurs soient restituées, par serement que icelles leurs appertiennent, promettans d’en porter guérence, faire quittance, soy soubsigner et sceller. » /156/
Mais l’affaire n’en resta pas là. Onze ans plus tard, en 1570, nous voyons les frères Pinello Borzone en appeler à la Chambre des extrêmes appellations, siégeant à Lausanne. Cette chambre était composée de « Jérôme Manuel, boursier et superarbitre, Pettermann d’Erlach, Simon Wurstemberger, tous trois du Conseil étroit de la ville de Berne; Benedicht de Diesbach et Jehan de Watenwyl, gentilzhommes du Grand Conseil dudict Berne, juges et auditeurs des extrêmes appellations de Lausanne. »
Le 15 mars 1570, ce tribunal rendit la sentence dont voici un extrait. Après avoir rappelé les faits de la cause : « Ordonnons et prononçons que les ditz de Lausanne soyent et doigent estre tenus rendre et restituer auxditz Pinello frères, des deniers trouvéz sus ledit Facco, asçavoir la somme de douze cents escus, ung chascung vaillant cinq florins, monnoye de Lausanne, payables par lesditz de Lausanne audit lieu, ou soit dans la ville de Genève, à leurs choys; sur la prochaine feste de Penthecoste l’an présentement courant, six centz escus, desquels six centz escus le prénommé noble Anthoyne Pinello, en son nom et au nom de sesdictz frères, se seroit volontayrement et spontanément paroffert en donner cent escus pour soulagement et alimentation des povres de l’hospital dudit Lausanne; pour lesquelz cent escus se debvront les ditz de Lausanne obliger envers le recteur de l’hospital dudit lieu et à ses successeurs dudit office, à cinq escus de cense annuelle par eulx annuellement payable audit recteur présent et advenir, avec souffisante ypothécation et autres choses à ce requises et nécessayres. Et les autres restans six centz escus se debvront par lesditz seigneurs de Lausanne et leurs successeurs payer aux ditz Pinello sur le jour feste Penthecoste ensuyvant, qui sera l’an 1571; le tout argent comptent, sans aulcune figure de procès … » Sous réserve que cette restitution ne préjudicie aux franchises de Lausanne, que les Pinello donneront quittance générale et définitive, avec bonne caution à Genève; que ceux de Lausanne ne seront plus jamais inquiétés de ce chef.
Le premier versement fut fait aux frères Pinello le 30 juin 1570. Le second et dernier versement ne fut fait que le 25 /157/ septembre 1573, date de la quittance définitive signée par Antonio Pinello.
(Arch. de Lausanne.)
Vêtements de luxe.
1557. 20 juillet. — Noble Guillaume, fils de noble Johan de Ilens s’est soubmis au bamp, jouxte les ordonnances de mes trèsredoubtés seigneurs de Berne, à cause de l’offence de havoir portéz chausses et collet chapplés dans laz ville de Lausanne; lequel bamps et offence a promis de poier et luy a l’on tornéz et rendu sesdictz abillemens; avec promesse de non plus rière leur seigneurie les porter, luy ont faict grâce de laz confiscation des abillemens.
La confiscation de tels habillements avait été prononcée par le bailli Sébastien Näguely contre toute personne qui en porterait après le terme de six mois, à dater du 28 octobre 1540. (Voy. Herminjard, Op. cit. Vl, pag. 368.)
Installation d’un nouveau bailli.
1557. 17 août. — Ont comparus les governeurs de leurs villages et ressorts suivants, ascavoir de Pullie, Andreas Gros et P. Perret; de Bémont, Claude de laz Cuaz et Pierre Foyat; de Cugy, Claude Gringet, Anthoinne Damyan; de Bretignye, François Perret et Claude Mathey; de Morrens, Joham Borjaux, François Favey; de Froidevillaz, François Monachon; des deux Mont, Joham Corbat, Claude Dangoz; de Crissier, Pierre Richard, Claude Fontannaz; de Bussignie et Sainct Germain, Claude Gorgerat; de Escublens, Rengesrenges, Thibaud Pasquier, governeur, accompagnié de Joham Masson; de Chavanes, Joham Mulet et /158/ Pierre Pitaulx; de Rugnens, Jaques du Bugnom; de Villars Sainte Croix, Stivent du Clo; de Riva et Ochie, au lieu de governeurs, Bertrand de laz Gravaz et P. du Soujon; de Denges, Stivent Beschet; aulquieulx mesdictz seigneurs ont faict exprès commandement de commander à tous lesdictz villages et un chescung d’iceulx d’estre prêt et appareillier en armes, harnois et en toutes aultres hostensilles armés, et de soy trouver en bon ordre, équippage d’armes à Lausanne, pour faire monstres généralles audict Lausanne, en ce moys prochainement venant de septembre, jouxte le mandement sus ce faict par nous trèsredoubtés seigneurs de Berne. Et ce soubz la poinne et bamps à ung chescung défalliant de dix florins pp. pour une fois détention de saz personne.
Restant à commander le village de Poudex, de Romanel, Prillier, Jouctens et Mexirier, de Sainct Soulpics, Espalinge, Challie, Vernant et aultres.
Et soy feront à laz venue de monseigneur le ballifz novellement esleuz, nommé Noble Peterman d’Erlach.
Au XVIe siècle, les baillis de Lausanne pour Messieurs de Berne entraient généralement en fonctions à la Saint-Michel (29 septembre) ou au 1er octobre, mais ils ne se succédaient pas à des époques régulières. Ainsi le premier bailli, Sebastien Nägueli fut en fonctions depuis la conquête jusqu’en septembre 1541; Antoine Tillier, de 1541 à 1546; Hans Frisching, de 1546 à 1553; Jérôme Manuel, de 1553 à 1557; Peterman d’Erlach, de 1557 à 1564; Peterman de Wattenwyl, de 1564 à 1572.
L’installation d’un nouveau bailli à Lausanne se faisait avec un certain apparat, comme on peut le voir dans le Dictionnaire historique du canton de Vaud, page 515, et devenait l’occasion de grandes démonstrations. LL. EE. ordonnaient des /159/ « monstres généralles ou revues de toutes les milices du baillage, ce qui explique l’article du manual, où nous voyons le Conseil de Lausanne convoquer les chefs de toutes les communes de sa juridiction, afin de prendre des mesures en vue de ces « monstres. »
Outre ces revues, il y avait naturellement d’autres spectacles publics. On voit par les comptes de la ville que, lors de l’installation du bailli Petermann d’Erlach, on bâtit en Sauvabelin « un chasteau » qui fut garni d’artillerie, et qu’on paya à Francois Gindron 15 florins 9 sols « pour certain engin faict » à cette occasion.
Mais le grand spectacle était toujours la revue. Les Lausannois faisaient bien les choses au XVIe siècle, comme au XIXe, ainsi que le prouvent les articles suivants des comptes du boursier, où il détaille les sommes payées aux « phifres et taborins lesquelz avoient sonné à la monstre faicte le dixiesme d’octobre 1557, à la venue du susdit seigneur bally :
» Au phifre et taborin de Fribourg, tant pour leurs despens, faictz en chemin venant à Lausanne et pour leur retour et pour leur vaccations.XII fl. II s.
Item, à deux phifres et deux taborins de PayerneXXII fl. II s.
Item, à deux phifres et de taborins de Mouldon.XII flor.
Item, à ung phifre et deux taborins de YverdonXI flor.
Item, à cinq, tant Vivey que MustruzXIIII flor.
Item, à deux de RuazV flor.
Item, à quattre de EvianXII flor.
Item, à deux de Morges.V flor.
Item, aux deux du seigneur de CursingeIX flor.
Item, à celuy d’OulensXV sol.
A celluy de Berchie.XV sol.
A … Tonioz de ThononIII fl. VI s. »
Outre ces frais de route et de vacation, il fallait encore payer l’entretien de ces musiciens pendant leur séjour à Lausanne, aussi le boursier paya-t-il à Jean Nardin « pour despense par luy soustenue en son logis pour les taborins et phifres, lesquelz ont soné à la monstre faicte à l’arrivée de treshonnoré seigneur /160/ bailly, noble Petermann Darlache LXVII flor. 5 s. »
Il fallut envoyer un messager exprès pour avoir quelques-uns de ces fifres; on paya 5 florins à « François Contoz pour aller quérir à Fribourg Emo Grec et le phifre nommé Chory et autres phifres et taborins dudict lieu, lesquelz estoyent avec le seigneur de Cursinge et fusrent mandéz pour sonner à la monstre faicte à la venue dudit seigneur ballifz Derlach. »
On envoya le même Contoz « à Genève pour achepter des perdrix, chappons et autres vollailles pour fère présent » au même bailli, à son arrivée, auquel on donna pour ses étrennes le 1er janvier suivant, 10 écus d’or au soleil.
Troupes pour Berne.
1557. 23 octobre. — L’on a recehuz lettres de noz trèsredoubtés princes de Berne pour la suytte de guerre et pour maintenance du pais, par lesquelles il demandent trois cent et cinquante personnes, nommément bons acquebusiers. Sus ce a esté conclus que l’on ne recuserat la quantité, ains allègrement se esliront.
Voici la lettre reçue de LL. EE. de Berne :
« Nostre amiable salutation prémise. Nobles, prudents, trèschers et féaulx, à cause des occurrents faicts de guerre que sont à présent, nous az semblé bon et nécessaire pour maintenance et protection de noz villes et pays, de faire élection de gens, à laquelle vous avons imposé troys cents et cinquante personnes, lesquelles vous commandons incontinent eslyre et ordonner, singulièrement de bons hacquebusiers, avec exprès commandement de se pourveoir de bastons et harnets, ungchescung selon son pouvoir et estat, comme en tel cas est requis, et sur ce attendre nostre voulloir. En oultre, à cause que plusieurs des nostre rière vostre protection cy devant sont tyré en guerre, est nostre voulloir et commandement, vous commandons aussy expressement vous informer et encercher qui ou quelz sont ceulx /161/ là, et iceulx par leurs noms mettre en escript et iceulx nous envoyer. Donné ce XX d’octobre 1557.
» L’Advoyer, petit et grand conseil de Berne. »
Suscription : Aux Nobles, prudents, noz trèschierz et féaulx Bourguemaistre et conseil de Lausanne.
Note du secrétaire de Lausanne, au dos
« Rtum XIIIe [sic] octobris 1557.
» Pour suytte de guerre. »
(Arch. de Lausanne.)
Charrois pour la ville.
1558. 24 mai. — Ceulx de Belmont subgectz de mes honnorés seigneurs sont estés enjoinctz de charrier pour mesdictz seigneurs certains chesnes pour fère l’onglette du grand temple Nostre Dame, lesquelz chesnes mesdictz seigneurs ont octroyé à noz redoubtés princes de Berne. Sus ce lesdictz de Belmont ont acquiesci et protesté que il n’entendent debvoir aulcung charrey pour chappitre, combien que soit pour l’onglette, synon pour messeigneurs de Lausanne leurs seigneurs.
Le compte du boursier entre dans le détail des chênes achetés « pour donner à noble Petterman Derlach, seigneur bailly de Lausanne, et ce pour réparation de l’onglette qu’est sus la lanterne du chœur du grand temple dudict Lausanne, lesquelz chesnes fusrent acheptéz pour espargner les chesnes des Raspes. »
On acheta 21 chênes qui coûtèrent 27 flor. 9 sols.
On paya pour les abattre 3 flor.
Pour les equarrer pour les amener facilemt 11 flor.
Pour les journées du maître charpentier et de son aide 2 florins. /162/
Sorcières.
1558. 16 juillet. — Messieurs de Conseilz estant assemblés pour l’examen et poursuitte des deux prisonières, l’Anne George et laz Grucellaz de Crissier, hérèges et sorcières, ouz de cella suspectes et accoulpées, ont cogneuz que lesdites détenues doibgent estre inquérues en leurs personnes par laz corde et torture, tant pourtant qu’ilz sont accoulpées par le procès de laz relaixée de Pictet, comme pource qu’elles hont endurées d’estre appellées voudeisses, sans soy estre faict pourgées, comme mesdictz seigneurs en ont heuz bonnes informations et certaines.
Départ de Pierre Viret.
1559. 28 février. — Les dictz seigneurs [du Conseil] ont donné en pur don à messy Pierre Viret tous les biens meubles qu’il pourroit havoir de laz communaulté de Lausanne; et se combien que laz donne Sebastianne saz femme, messy Merlyin et discrect Michiel Roland les haient présentés aulxdicts seigneurs pour les restituer.
Pierre Viret et nombre de ses collègues dans le ministère et dans l’enseignement se démirent de leurs fonctions en 1559, à cause de divergences avec Messieurs de Berne, au sujet de la discipline ecclésiastique.
Nous expliquons encore une fois que nous nous sommes intentionnellement abstenu de nous arrêter à ces questions qui cependant tiennent beaucoup de place dans les manuaux.
Ruchat en parle avec détail dans son Histoire de la Réformation. Sur le départ de Viret, voyez le tome VI, pages 267 et suivantes. /163/
Blasphèmes.
1559. 19 novembre. — Messeigneurs les nobles et bourgeois de Bourg se sont assemblés avec mes honnorés seigneurs du conseil, lesquelx tous d’ung accord ont estés de advis et résolution de condampner Glaude de Myvillaz de Romanel, en sortissant des prisons de Rive, doibge crier mercis à Dieu et à la seignorie, estre fuatté et puis avoir percé la langue et condampné eis despens de la justice, et c’est pour autant qu’il a meschamment proférus telz propos, que la Vierge Marie n’estoit pas mère de Nostre Seignieur.
Nominations.
1560. 1er septembre. — Sont estés esleuz … à scavoir : Noble Francois Seignieux, seigneur de Vufflens, pour seigneur burguemaister; honnorable Glaude Vuangnyerrez, pour seigneur boursier; seigneur Urban Constantin pour seigneur secretaire; seigneur Guillaume Trolliet, banderet de la Pallud; seigneur François Blécheret, banderet de Bourg; seigneur Estienne Vuavre, banderet de la Cité; seigneur Philip Guibaud, banderet du Pont; seigneur Bastian Rochiz, banderet de Sainct Lorent; seigneur François Regnaud, hospitallier du grand hospital : seigneur George Du Crest, recepveur de Sainct François; seigneur Michel Ruffi, procureur fiscal; seigneur Jaques Papan, hospitalier de Sainct Roch.
Chroniques du Pays de Vaud.
1560. 25 octobre. — Nous sont estés données par égrégie Jaques Cornut de Mouldon les doubles des croniques /164/ du pays de Vaud, en papyer bien escript et présentées à mesdicts seigneurs le vendredy XXVe d’octobre 1560, bien anotées et descriptes eis marges la substance.
31 octobre. — A esté ordonner au seigneur Jaques Cornuti troys escus pistollet pour nous avoyer délivrer ung quernet des croniques du pays de Vaud.
Musicien.
1560. 31 octobre. — A esté ordonné à la simple requeste de mestre Glaude de La Cannissyère, musicien, natifz de Paris, nous ayant ouffert sa personne et tout son ordre de fifert, saquebutte et musique; cognoissans la nécessité de nostre ville de tel personaige, l’avons accepté en l’équalité des précédens fifers, comme feuz Bertrand pancion avoit de nous, icelluy mettans à ladicte pancion.
Cette pension consistait en un muid de vin, un muid de froment et 80 florins par an.
A la fin de janvier précédant, le Conseil lui avait déjà fait don de 10 florins, en même temps qu’il faisait un présent de 20 florins à Guillaume Franc et de 10 florins à Oronce Roy, dont on a déjà parlé.
On lit à la date du 23 juin 1562 : « Mestre Glaude de La Cannessyère, fifert, c’est démis de telle charge, attendu que l’est remis au collège pour le cathesquyme. »
Tout en pensionnant Claude de la Canissyère, le Conseil achetait des instruments de musique. On lit dans les comptes, au 8 octobre 1560 : « Item, a livré au sire André Perald, musicien pour achept d’une saquebute pour la musique en l’honneur de la ville, XXI florins. » /165/
Incendie.
1560. 12 décembre. — Ledict jour estans ancor en Conseilz pour les négoces de la ville, par la volunté de Dieu et par grand malleur, le feu soy prins en grandes flambes de feuz en la maison de feuz nobles Andrey Guat ou de noble Françoise de Versonay, sa femez; une grande maison, belle, sise en la bandyère de la Pallud. Et duraz ledict feuz jusques au laindemant, nonobstant toutes bonne diligence; et se prins ung peuz de temps avant une heure après midy. Et fust sonnée la closche despuy une heure jusques à trois heures, sans ce que personne de nous subgectz villagiens et resortans nous soyent venus à aulcung secourt ni ayde. Pourquoy soit regarder à l’advenir à leur bonne volunté et leurs en faire remonstrance et griefz chastoyement et punition. Et n’avons heuz ayde, sinon les nostres, citoyens et habitans de la ville, après Dieu tout puissant. Et n’a faict ledict feuz aulcung domaige, sinon à ladicte maison, de grandz meubles playnne. Et aussy aux grandz effrays de la seignourie. Dieu nous préservoit. Amen.
13 décembre. Conseil extraordinaire. — Pour cause de feuz, de quoy Dieu nous garde az l’advenir, premyèrement a esté ordonner et fait commandement au seigneur Johan Gumoen de fayre faire trente eschelles; item, vingt crochetz; item, fayre ou achepter deux cens brochetz ou sellions de cuir.
Le 16 décembre, le Conseil fit comparaître devant lui les villageois du ressort en grand nombre et leur fit une verte semonce. /166/
Préparatifs de guerre.
1561. 20 janvier. Conseilz extraordinaire. — Nous avons receupt lettres de noble Françoys Seignyeulx burguemaistre, estant pour nous négoces à Berne, contenantes que monseigneur le ballifz lui avoit dict qu’il avoit receup mandement de nos seigneurs saulverains pour faire tenir prest tous les esleuz de la guerre et de ce nous en advertir, pour faire tenir les nostres prest et faire la visite et trouver d’argent pour la soude des compagnons, affin que ne soyons prins au déporvehuz, cart ontz ne scay le jour ni l’heure, ni en quel lieu, pour ce qu’il se faict grand préparatives en la Savoye.
30 janvier. — A esté deffenduz aux grangiers du Buron, Montandrey, Chevrissye, Agleran, de non ballier leurs chers et chevaux pour le service de la guerre, cart iceulx retenons pour nostre service, à cause qu’il tiennent nous granges et leurs dépendences.
22 avril. — A esté ordonner fayre mandement à tous subget, à poynne de perdre corps et biens, de non absenter le pays, ni moin se mettre à subjection d’autres princes, ni se mettre à gaiges d’iceulx soub la poynne comme dessus.
28 mai. — Le magnifficque seigneur ballifz, noble Pierre de Erlach, ayant receupz de nous souverains seigneurs de Berne, sur l’effaict de la guerre, mandement exprest, lequel il az communiquer à noble Henry de Praroman, tenant ciège de bourguemaistre, lequel a refferuz à mes honnorés seigneurs du conseilz le contenuz d’icelluy mandement. /167/
Premyèrement, que nous hayons à tenir preste l’élection de la guerre, laquelle est de IIIc hommes;
Item, que les non esleuz soyent de mesmes prêt;
Item ausy, de mettre garnisom des nostres esleuz, pour iceulx mettre au chasteau de Lausanne et pour la conservacion d’icelluy;
Item, augmenter en la ville, tant au clochie que de nuyt, le gay;
Item, que les navatiers ne dègentz passer personne estrange de las du lac;
Item, que les hostes dègent desclairer les estrangiers logés en leurs tavernes à monsr le bourguemaistre ou à son lieutenant;
Et ce se parfasse sans aulcungs dilays.
Et après avoir entendue la susescripte relation, après nous estre humblement recomander à Dieu, au nom de son Filz Jesuchrist, nostre seul Saulveur et Rédempteur, pour lequel desirons mourir, que tel mandement en toute diligence doibt sortir son effaict, et que les seigneurs banderetz doigent sur ce pour ce jourdhuy fayre tel commandemens à tous les esleuz et à tous aultres restans.
Item, que le seigneur capitaynne avec les accoustumés électeurs, pour l’heure de mydy eslire gens capables et ydoynnes et propres, pour iceulx présenter audict seigneur ballifz pour iceulx mettre en garnison audict chasteau, en nombre pour le présent douzes personnes, au contentement dudict seigneur ballifz, ou soyent esleuz au bon advis des susdict électeurs. Et de mesme, de bon vouloyer accomplir les choses prémises.
5 juin. — Ordonné de faire publier que personne ne /168/ debge habandonner la ville ni leurs terres, sous l’indignation de mesdict seigneurs, pour aulcungs bon respect lequel demoure rière nous, affint que par telle sortie la ville ne demeure dépourvehue des nostres bourgeoys receup et assuffertés.
Sur les événements des années 1560 à 1564, qui aboutirent au traité de Lausanne du 30 octobre 1564, on trouve des renseignements dans tous les historiens suisses qui ont traité de cette époque : Ruchat, Tillier, Verdeil, Vulliemin, etc., et dans la collection des Recès des Diètes. Je ne m’étendrai donc pas sur ce sujet et me contenterai de ce qui est nécessaire pour éclaircir les articles des manuaux.
Emmanuel-Philibert, duc de Savoie, ayant été réintégré dans ses Etats par le traité de Câteau-Cambrésis, était en négociation avec les Suisses pour obtenir la restitution des pays conquis par Berne, tant en deçà qu’au delà du Léman.
Il y eut une très grande agitation dans le Pays de Vaud qui, en majorité, voulait être fidèle au gouvernement de Berne et où l’on craignait une attaque du duc de Savoie. Le Conseil de Berne, tout en négociant avec habileté, se tenait prêt à toute éventualité et la ville de Lausanne le secondait de son mieux par ses préparatifs. Entre autres elle s’approvisionna d’artillerie et fit réparer complètement les murs de la ville.
Déjà au mois de février de l’année précédente, Messieurs de Berne avaient envoyé des députés dans le pays de Vaud pour mettre les habitants en garde contre les « practiques » des étrangers et pour les sonder sur leur fidélité.
Voici le texte des instructions données à ces députés :
« Instruction à noz trèschiers et bien ayméz conselliers, noble Hans Frantz Nägli, ancien advoyer; honnorable Ambroyse Im Hoff, de nostre conseil estroict; noble Augustin de Luthernoir et honnorable Ulrich Koch, de nostre grand conseil, touchant leur charge qu’ilz ontz à proposer et desclairer à tous gentilhommes, nobles, bourgeois, manantz et habitans de nostre pays conquis. /169/
Premyèrement, leur dirès nostre affectionnée salutation et leur présenterès de nostre part nostre bonne grâce; leur exposant davantage que sommes estés advertis que plusieurs practiques et sollicitations se font, deviennent et s’adressent auxdictz leurs chiers et féaulx par aultres gens que les officiers et sollicitateurs des affayres de nostre ville de Berne, chose que ne sçaurions avoir aggréable; vous mandant et commandant trèsacertes que ne prestiez les aureilles aulxdictes practiques et instiguations, de quelque costé qu’elles viennent, sans nous ou nous officiers en advertyr et certiorer, comment vostre debvoir y gist; car ceulx qui feront aultrement en seront par nous punys sellon l’exigence du cas et leur démérite. Et vous y acquitant honorablement, comment vous estes tenus, nous révellant celles practiques, instances et traffiques desquelles l’on usera envers vous ce nous sera chose trèsagréable, comme procédante de debhue loyaulté du subiect à ses seigneurs; nous parouffrans de nostre costé vous donner tousiours à cognoistre le désir qu’avons de vous faire tout ce que bons seigneurs envers leurs subiectz sont tenus.
» Si vous mandons et commandons aussi de n’absenter aulcugnement noz terres et pays sans nostre congé ou de noz officiers; ains, en iceulx demourantz, actendretz tousiours nostre bon vouloir et commandement, comme à bons et loyaulx subiectz appertient … Sommes persuadés que le ferés d’aussy bon cueur que nous avons en vous nostre parfaicte confiance.
» Actum 2ª februarii 1560.
» Secrétaire du Conseil de Berne. »
(Arch. de Lausanne EE, 829.)
Pilier de justice.
1561. 24 juin. — A esté ordonner que seigneur Jehan Gumoen, maisonnare, seigneur George Du Crest, avec les seigneurs banderetz, tous ensemble se doibvent transporter à Morrens, pour illec mettre et apposer ung pillyer /170/ armoyer de nous armes, là au lieu et place à nous propre et convenable, pour nous d’icelluy servir à l’exercice de laz justice, avec ung collier.
Ce pilier fut placé le lendemain; on en mit aussi un à Renens le 8 juillet.
Plaintes des ministres.
1561. 5 août. — Remonstrances des seigneurs ministres. Par devant nouz ontz comparust spectables Richard du Boys, Jehan de Bosco et Jaques Langloys, nous ministres, poursuyvans au debvoyer de leur ministère, nous ontz faict requeste et prouposite suyvante.
Premyèrement, que plusieurs personnes du temps des presches et prédications soy tenent par les rues et ancort davantaige prennent audace d’aller aux tavernes et cabarest, par ce démonstrans en ville réformée malvays exemple aux aultres et aux estrangiers.
Item, que la dimenche du temps du cathesquysme, plusieurs sontz retirés par des taverniers, plusieurs jeunes, soyt en boyre que en jeux; ne respectans à la paroulle de Dieu, ains tenue en grand mespris, chose grandement scandalleuse contre Dieu, etc.
Item, au dernier article, que plusieurs femes débourdées et deffrontées demourent par plusieurs jours en la ville, donnans par ce et attirans plusieurs jeunes filz et aultres à toutes voluptés et concupiscences deshordonnées. Par ce nous prians il vouloyer avoyer advis, esgard, émande, punicion et chastoyement.
A esté par messeigneurs, estre considérés les troys /171/ poinctz susavancés, ordonner que par tous moyens seraz sus ce en toute diligence mis bon ordre, mieulx que par cy devant n’a esté faict, en tant que Dieu et les seigneurs ministres aurontz contentement, en les remercians de leur bonne diligence, par ce remettans la charge aux seigneurs banderest et dizanniers.
Ces plaintes des ministres étaient fréquentes. J’en cite encore un exemple. Le 7 janvier 1563 : « Messy Loys, 1 seigneur ministre à Lausanne, a faict remonstrance à messeigneurs et admoneste, vehuz les incurrens et afflictions d’église, d’aller myeulx et plus continuer les sainctes prédications. Item, de mettre ordre de deschasser les chiens du temple pendant les prédications; et que les seigneurs jurés et aultres cognoissans des causes, ne doibgent consulter leurs causes pendant les prédications. Sus quoy a esté ordonné, comme par cy devant messeigneurs les LX ont ordonné, de faire commandement aux disenniers de faire aller leurs disennes aux sermons; et de faire commandement aux manigliers et guets du clochier et maximéement à Guillaume Mestraulx qu’ilz en doibt havoir laz charge, de deschasser les chiens du temple; et de non consulter les causes pendant les prédications. »
Trouvaille de vieilles monnaies.
1561. 25 novembre. — Jaques Guillier et certains aultres de Pullye, nous subjectz, rendans debvoyr de vrays subjectz, nous ontz présenter et apporter ung bisach pesans dix à neuf livres de mydallyes de cuyvre, grevées et bien marquées, dès lung temps en terre controvées, estans dans ung chouderon enterrées dans terre profonde, chose bien /172/ antique et à messeigneurs estrange et novelle en mémoyre du temps passé, que sontz extimées de nulle valeur. A quelle presentation monseigneur le ballifz de Erlach en a heux grand regret et mescontentement, touteffoys seigneur Jehan Françoys pour lui en haz receup pour et au nom dudict seigneur ballifz en plain conseilz contentement, combien que à se fayre messeigneurs n’estaient tenus.
Billiet à Jaques Guillyet et à ses adhérens, adressant audit sr borsier de VI fl. pour cause et pour raison de ce qu’il nous donner les midallyes de cuyvre bien marquées et controvées rière nous, rière le territoyre de Pullye, en grand nombre, petites et de petite valleur, estant dans ung choderon ausy de cuyvre gasté, et des quelles ung chescung en a heuz pour mémoyre plusieurs pièces, et les ontz apporter en conseilz en ung bisach de toylle de la pesanteur de X, XII et XV libvres. Dieu scay le temps, il i az plus de XIIcc ans et davantaige, à ce les escripteau d’icelles lisables.
Ces deux notes sont tirées, l’une du manual des LX, l’autre du manual du Conseil.
Achat du château de Menthon.
1562. 27 janvier. — Honnorables Loys de Yverdon et George de Neschel, nous délégués et commis pour trecter et achepter du magnifficque seigneur Bernard, baron de Menthon, le reachept et myeulx vallience du bien et revenuz du chasteau de Menthon, situé à Lausanne, et de ses dépendences et appertenances; lesquelx par bonne diligence ont faict tel acquys dudit seigneur baron, pour le /173/ pris de neuf cens escus, par eulx délivrés et poyés des escus prins en la crotte; duquel acquys en ontz remis acte de vendicion à nous faicte par ledit seigneur baron, à nous délivrée et expédiée, signée par deux notayre, du Crest et Machet, avec ausy le reachep du premier vendage en parchemyn, receup par Deleanal, etc.
L’acquisition du château de Menthon par la ville de Lausanne fut une affaire compliquée. On a vu dans les précédents extraits des manuaux que le château de Menthon, sis à la Cité, centre féodal de biens considérables dans le Pays de Vaud, avait été vendu à la famille de Diesbach, et que la famille de Menthon s’était réservé le droit de rachat.
En 1562, le propriétaire de ce château était noble Guillaume de Diesbach, bourgeois de Berne, seigneur de Reichenbach et avoyer de Morat. Le possesseur du titre de réméré était Bernard, baron de Menthon, demeurant au château de Menthon, près d’Annecy.
Guillaume de Diesbach voulant vendre sa propriété, deux acheteurs se présentèrent : la ville de Lausanne et noble Sebastien Loys. Les deux concurrents mirent à cette affaire une égale passion.
Le 24 décembre 1561, le Conseil de Lausanne décide d’emprunter de noble Jacob Wyss, bailli d’Yverdon, 2200 écus d’or au 5 %, hypothéqués sur les domaines de Montheron, sous prétexte de préparatifs de guerre, mais en réalité pour acheter Menthon. Cette délibération est tenue secrète.
En effet, déjà le 12 novembre, le Conseil avait envoyé un de ses membres, Louis d’Yverdon, à Annecy, pour traiter avec le baron de Menthon de l’acquisition de son droit de réméré. Celui-ci, homme très fin, ne se laissa pas aborder, sous prétexte qu’il était occupé « avecq le seigneur de Nemours lequel estoit venu de la court dempuis trois jours. » Le député lausannois ne put donc rien faire. /174/
Le 26 décembre, nouvelle ambassade à Annecy, tout aussi inutile que la première. Bernard de Menthon était introuvable; on le disait tantôt à Cursilly, tantôt à Menthon, tantôt à Annecy, tantôt ailleurs. Mais les députés de Lausanne rencontrèrent à Cursilly Sebastien Loys qui avait été plus heureux et avait réussi à conclure verbalement avec le baron de Menthon pour son droit de rachat. Le prix convenu ne m’est pas connu. Il paraîtrait, sans que ce soit certain, que S. Loys aurait fait à Cursilly, aux députés de Lausanne une promesse verbale de passer à la ville le marché qu’il venait de conclure. Mis au pied du mur, à son retour à Lausanne, S. Loys ne tint pas sa promesse.
Le Conseil de Lausanne, fort en colère, décide le 7 janvier 1562 d’avoir Menthon « quoy qu’il coste et ne laixer pour ort ni argent de celais retirer à nous; » et envoie une troisième députation auprès du baron de Menthon. Les députés partent le 9 janvier.
En attendant, S. Loys s’empresse d’aller auprès de Guillaume de Diesbach et lui achète, le 11 janvier, le château de Menthon et ses dépendances pour trois mille écus d’or, outre 60 écus pour les épingles de Madame.
La troisième ambassade des Lausannois eut plus de succès. Ils trouvèrent Bernard de Menthon à Annecy; mais celui-ci ne voulut traiter qu’après avoir fait visiter, par ses hommes d’affaires, son château de Lausanne et ses propriétés de Lavaux. Les députés de Lausanne furent donc obligés de revenir d’Annecy à Lausanne et à Lutry, avec les gens du baron, puis de retourner au château de Savigny en Savoie, où enfin, le 20 janvier, ils conclurent leur marché et payèrent à Bernard de Menthon neuf cents écus d’or pour le droit de rachat.
Ainsi d’un côté, S. Loys avait acheté Menthon, mais n’avait qu’une promesse verbale (il le paraît du moins) pour le droit de rachat; de l’autre côté le Conseil de Lausanne avait un titre bien en règle pour le réméré, mais n’avait pas la propriété.
Les deux parties récriminèrent violemment l’une contre l’autre, mais finirent par s’arranger. /175/
Par acte du 28 mars 1562, approuvé par le Conseil des Soixante, le 30 mars, la ville de Lausanne s’engagea à payer à Sebastien Loys une plus value de 350 écus d’or, y compris les épingles payées à Mme de Diesbach, et devint ainsi propriétaire du château de Menthon et de ses dépendances pour 3350 écus d’or, outre 900 écus payés au baron de Menthon; total : 4250 écus, faisant, à 5 florins 3 sols l’écu, 22 312 florins 6 sols.
Mais les faux frais que la ville eut à supporter furent énormes. Les voyages répétés à Annecy, les émoluments des notaires, les étrennes et pots-de-vin, etc., coûtèrent 1128 flor. 9 sols 6 den. C’est le chiffre auquel je suis arrivé en additionnant les détails de tous ces déboursés, qui sont fort curieux, mais trop longs pour être donnés ici.
Troupes allant au service du prince de Condé.
1562. 7 juillet — … Item ausy, que plusieurs esleuz pour aller en guerre se débouchent pour absenter la ville, desirans sus ce aller au service du prince de Condey, que sontz les principaux de la ville; pourquoy il soit advisé.
9 juillet. — Sontz comparuz tous les hostes et hostesses, pour iceulx remonstrer qu’il hayent à bien entretenyr les gendarmes et Allemans que sontz en partie du nombre de nous princes de Berne, lesqueulx passerontz par nostre ville les jours prochains, lesquelx vontz à la guerre pour la maintenance de la paroulle de Dieu et pour le prince de Condey, allans à Lyon, comme lontz dict, en garnison. Dieu les condhuise et en soit le protecteur ! Amen.
12 juillet. — Conseilz extraordinaire le dimenche XIIe de juilliet pour la guerre et aultres négoces de la ville.
(En marge : Noble Nycolas de Diesbach, bourgoys de Berne et courenel pour le prince de Condey de XIII /176/ bandières allant à Lyon pour la mainctenance du sainct Evangile.)
Sontz comparust devant messeigneurs nobles Glaude et Henry de Praroman, frères, avec honnorable Glaud Gumoen, banderet, proupousans comme il sontz appellés au service dudict coronnel, pour estre à la surdaz [solde] d’icelluy et luy ontz promys tel service; ne se pouvans déporter de telle promesse, vehuz lettres à eulx ce jourdhuy délivrées; prians sur ce mesdict seigneurs, vehuz la chose attouche à ungchescung crestien, leurs vouloyer donner congé et ne prendre en male par leur département, soy et leurs enfants et biens à mesdict seigneurs recommandans, avec toutes honnestes et gracieuses paroulles; hayans ausy pouvoyer de lever et charge pouvoyer lever XXX souldard bien équypés; prians en oultre que, le temps pendant qu’il demourrons en ladicte guerre, soyt pour eulx que leurs souldard, ne soit donner aulcungs empêches à leurs femmes, enfans et biens, ains que tout doibt cesser jusques à leur retour, aydant le Saulveur; item en oultre, que ceulx que aurontz et quil sontz constitués en offices de dignités pour tel service ne soyent déposés, soy recommandans à mesdict seigneurs, et sur ce avoyer leurs bon advis et conseilz; prians en oultre vouloyer avoyer mémoyre de leurs.
Meshonnorés seigneurs ontz accorder aux susdit nobles supplians, avec noble Glaude d’Arnex absent, parce qu’il soyent tenus demander congé à monsr le ballifz, desplaisans de leur département, attenduz qu’estoyent subgetz à nostre service; et que Dieu les condhuises. Et aurontz mémoyre d’eulx en se que à messeigneurs seraz possible, car /177/ messeigneurs ne leur pouvent donner congé, parce qu’il ne leurs appartient, ains audict seigneur ballifz; donnant ausy congé à George Pernaux, officier, sans estre privé ni les aultres de leurs offices, ains restitués, si playct à Dieu, en iceulx offices.
13 juillet. Conseil des LX. — Meshonnorés seigneurs LX, estre entendue la requeste et congie que dessus demandé, leurs recommandent l’honneur de Dieu et le leur, marrys estans de leur département. Soy reccommandent de rechiefz à la seignourie, femmes et enfans et biens, sur ce que il degent deman présenter les souldards, affin soyent remontrés de bonne vie et conversation, selon l’ordre que se doibt tenir comme évangélistes.
14 juillet. — Sont comparust les esleuz pour aller en guerre pour la maintenance de la paroulle de Dieu, après estre remonstrés tous ensemble ainsin qu’est requis.
Sont nommés comme s’ensuyt : Nobles Glaude de Praroman, Henry de Praroman et Glaude Gumoen (en marge: Gumoen obiit Lugduni causa morby 22ª augusti), charge hayans des soubnommés souldardz.
Premyèrement, Pierre de Sainct Cierge; Jehan Blain; Guilliaume Biolley; Françoys du Flon; Pierre Tronchet; Jérosnime Françoys, fils de égrège Jehan Françoys; Andrey Bergier; Jaques Baud; Françoys Lombard; Loys Aguet; Jehan Mallagnye; Claude Chappuys, mercier; Abraham Rignet; Estyvent Pernod; Jaques Levrier, barbier, Claude Marforin; Claude Marsel; Jehan de Lalex; Guilliaume Pernollet; Glaude Girard; George Pernaux; Françoys Humbert; Pierre de Lessert; Jaques Fernex; Pierre Painblain; Jehan Minoux; Marcel Grand; Pierre Muffaz; Françoys /178/ Rosset; Petremand Pivard : Françoys du Nant, mercier; Ysbrand de Lylaz.
Dieu en soit le conducteur ! Amen.
18 juillet. — Noble et puissant Françoys Seignyeulx, seigneur de Vufflens et seigneur bourguemaistre, ayant faict compagnye aux devant nommés capytaynnes et souldardz jusques à Genèfve, au quel lieu, à la requeste du corronel, les seigneurs de Genèfve ontz donner permission à tous ceulx de Lausanne de pouvoyer aller, entrer, sortir et venyr audict Genèfve, sans ce que il soit faict détencion ni oultre à tous ceulx de Lausanne. Et entrarent audict Genèfve ledict seigneur de Vufflens, sa compagnye et lesdict, souldardz, avec toutes ouffertes d’honeurs par les seigneurs sindicques au nom de toute la ville. Et fust envoyer vin de deux grandz coquasses, avec présentation de plusieurs honneurs. Par ainsin a ester concluz et arrester, quant ceulx de Genèfve viendrontz à Lausanne que de mesme leur soit faicte compagnye et présentation de tout honneur et services.
Les capytaynnes et souldardz départirent dudict Genèfve de bon zèle et cueur. Dieu les condhuise.
21 juillet. — Billiet aux seigneurs F. Loys et L. d’Yverdun, ambassadeurs envoyés à Berne pour obtenir advis et conseilz pour passer la charge de capitaynne à seigneur George de Neschel de pouvoyer eslire IIIc hommes arquebusiers de guerre pour iceulx condhuyre en France.
13 août. — Seigneur George de Neschel, revenant du camp de nostres gens, en premyer lieu a présenter de la part d’iceulx humbles recommandacions et que ungchescung est en bon estre et en bonne sainté. Au surplus nous /179/ gens ont prins Tornuz et marchent contre Chalon, lequel en briefz seraz assiégé. Dieu les condhuise. Amen. De la part de Monsieur de Cheyres a recommander toute la compagnye.
27 août. — Nobles Glaude et Henry de Praroman, frères, et Pierre de Montherant. Honorable Glaude Gumoen est mort et descéder par malladie à Lyon, le sambedy XXII d’aoust 1562; et duquel est grand domaige. Dieu lui a faict paix 1 .
28 août. — Nous avons receupt lettres de la part de monseigneur de Soubize de Lyon, contenantes nous plaise, pour la maintenance des esglises et pour la ruyne des ennemis, nous plaise les vouloyer caucionner pour certaynne somme de denyers et donneraz fiances à Lyon et aultres gaiges.
Meshonnorés seigneurs, en respectans et considérans le contenuz de la requeste, ontz sur ce ordonner, avant que procéder plus oultre sus la perfection de tel empromp, ausy premyer que recepvoyer des gaiges allégués, que le tout soit mis devant les magnifficques seigneurs LX, devant lesqueulx seraz présentée ladicte requeste et lettre et par eulx seraz considérer à leur bon plaisir.
29 août. — Furent assemblés messeigneurs les seigneurs LX du Rière conseilz pour l’affaire dessus déclairé, lesquieulx seigneurs en ont ordonner de non les cautionner ny soy constituer fiances.
17 septembre. — Lesdits seigneurs XXIIII, LX, IIc estans assis et assemblés suyvant la lectre missive emandée et escripte à noz treshonnorés sgrs du Conseil par monseigneur de Soubize de Lyon au nom de toutes les esglises /180/ de France, par laquelle il suplie nosdtz seigneurs voloir cautionner et fiancer certaynne somme de diniers en Allemagnye pour la protection et maintenance de la religion crestienne, pour poyer les gens de guerre pour maintenance d’icelle. Suyvant laquelle lettre aussi a comparus noble et magniffique seigneur Pierre de Herlach, seigneur ballifz de Lausanne, par devant lesditz seigneurs, lequel de mesmes a faict requeste ausd. seigneurs XXIIII, LX, IIc pour fayre ledit fiancement et caution de quelque somme de diniers en Allemagnye pour ledt seigneur gouverneur, pour maintenance de religion crestienne.
Lesquieulx seigneurs ont sus lesd. requestes la plus part ont ordonné que telz fiancement ne se doibt fayre en sorte que ce soit.
Cette expédition en faveur du prince de Condé, chef du parti protestant en France, se fit de l’aveu tacite de Messieurs de Berne. Ruchat l’a racontée avec détail (VI, p. 489 et suiv.), ensorte que nous n’en dirons pas davantage. Les articles des manuaux nous ont paru intéressants à citer en entier, quoique Ruchat s’en soit servi dans son histoire.
Elections.
1562. 6 septembre. — Les seigneurs deux cents assemblés pour les élections le dimanche VIe jour de septembre l’an 1562.
Ledict jour adsistarent en conseilz ordinaire des seigneurs XXIIII, LX et IIc, asçavoir noble François Seigneulx, seigneur bourguemaistre et tous aultres quilz sont esleuz pour ilz adsister quilz ont ilz peux comparoir au son de laz closche comme est accoustumé. /181/
A esté mis par devant lesdict seigneurs IIc s’ilz seroit bon que d’icy en avant le gros saultier ne heusse point laz charge du consistoire et que meshonnorés seigneurs bourguemaistre et conseilz appelé XXIIII en heussent eulx mesmes laz charge de en eslire ung chastellain de leursdict consistoire d’icy en avant, et ce à cause que les seigneurs ministres ont souvent faict plaintifz que il s’est adventé qu’on ha esleuz par laz voix du common quilz ne sembloient assés idoinnes ny propices, combien que d’aultre part ilz fussent tenus pour gens de bien. Lesquieulx seigneurs ont tous en common cogneuz, statuyt et ordonné que ainsy soy fist et en laissent l’election à l’ordonnance des seigneurs vingt et quattre.
Lesdict seigneurs ont esleuz pour groz saultier le seigneur Michel Ruffi.
Et pour leurs chastellain, asçavoir hon. Joham Blanchard.
Et ont aussi esleuz pour leurs procureur fiscal, asçavoir noble Joham Dedin.
Lesquieulx tous officiers ont faict le serement ungchescung particulièrement, comme appartient à ung chescung d’iceulx. Et davantaige, quant au chastellain, l’on luy a commandé que si plaict à mesdict seigneurs XXIIII de luy faire commandement d’aller faire résidence à laz maison de l’éveschie, que il doibge aller faire résidence personelle pendant sondict office, ès conditions du précédent chastellain.
1er octobre. — Nouveaulx Conseilz. Adsistarent au Conseilz les seigneurs conseilliers de nouvelle élection faicte pour l’année future … /182/
6 octobre. — Suyvant l’ordre que les treshonnorés seigneurs de Conseilz appelés XXIIII ont charge de l’election des seigneurs LX et deux cent de leurs Conseilz de leurs cité et communaulté de Lausanne, lesdits seigneurs ont faict élection pour l’année suivante 1563 comme s’ensuyt.
Sensuit l’election faicte par treshonnorés seigneurs bourguemaistre et Conseilz de Lausanne pour les seigneurs du Conseilz tant rière Conseilz dict LX que pour les IIc et laz cour d’iceulx, le predict jour pour l’année future 1563.
Ici sont les noms des personnes nommées à la cour des LX, au Conseil des LX, et au Conseil des Deux Cents.
13 octobre. — Le mardi XIIIe jour d’octobre 1562 par devant l’audience des trèshonnorés seigneurs bourguemaistre et Conseilz de Lausanne lesd. seigneurs ont faict le serement resquis jouxte l’ordre qu’appartient comme dessus sont déclairés estre esleus et ceulx quilz de présent non comparus ny faict serement sont marqués ou le debvent estre au rolle des sgrs banderet d’ung chescung d’iceulx pour le faire une aultreffois. Voyez l’article du 5 septembre 1563.
Artillerie.
1562. 22 octobre. — A comparus maistre Michel Hebtenstrictz, demorant à Syon, fondeur d’artillierie, avec Girard Primet, lequieulx ont promis faire artillerie pour laz ville, à sçavoir vhuyct pièces, une chescune de trois quintaux de bonne matière; et quattre ouz cincq dosennes d’arquebus à croc de LX livres une chesquune pièce, pour dix /183/ florins le quintaux estant parfaict, et messeigneurs fourniront laz matière et métal.
1563. 15 janvier. — Messeigneurs ont convenu avec certain maistre fondeur d’artillierie, nommé Francois Sermont, du pays de Grison, demorant à Martignye, pays de Valleys, pour faire de l’artillierie pour eux incontinent à paques prochaines, à sçavoir pour quatorze florins le quintal et à six livres par quintal de décalle et le sourplus de décalle ledit maistre l’emmendera et puis ilz balliera ledict maistre cent escus d’or pour fiance; à sçavoir cent arquebus à croc de pesanteur ung chescun de …
Le 29 janvier 1563 le premier de ces deux fondeurs reçoit attestation d’avoir fait deux pièces. Le 26 avril, la ville commande à François et Pierre Sermont frères, cent arquebuses à croc pesant chacune 50 livres pour le moins et 10 à 12 pièces d’artillerie pesant chacune 250 livres. Les fourneaux étaient établis dans les terrains de l’ancien couvent de Saint-François derrière l’église.
Le 7 janvier, on acheta de Michel Bizel, poudrier de Thonon, un quintal de poudre de canon pour 45 flor. et pendant toute l’année on paie de grosses sommes pour les charrettes, caisses et autres choses nécessaires pour l’artillerie et les arquebuses.
On fondit même de l’artillerie pour les voisins, comme le montre l’article suivant du 10 octobre 1564.
« A larequeste par noble et prudent Anthene Treman, ambassadeur soit commis de la part des nobles et bourgeois de la ville de Syon, à nosditz honorés seigneurs faicte, de permettre fondre environ six pièces d’artillerie au fourneau desdicts seigneurs desia construict en ceste ville, et ce d’aultant n’ont commodité rière Syon d’en pouvoir faire faire et aussi pour leur eschever plus grandz fraiz, ont faict ladicte requeste par le predict Treman leur permectre faire fondre les dictes pièces en ceste dicte ville. Ce que mesdictz seigneurs considérans lesdictz de Syon estre alliés et confédérés de noz souverains princes de Berne, que /184/ pour ceste occasion ne pourroient estre marris ce estre oultroyer, ains le prendre à la bonne part; pourquoy mesdictz seigneurs en considération desdictes alliances et pour faire service ausdictz de Syon, veu que mesmes ceulx de deça sont par eulx humainement receus, de grâce spéciale et amiable octroy permectent fondre ladicte artillerie audict forneau de cestedicte ville, sans leur préjudicquer à chose que ce soit, ains pour ceste foys de ce les gratiffient pour respect de bonne amitié et voisinance. »
Postes.
1563. 16 mars. — Monsr Ribus, chevaucheur pour le roy de France en laz poste rière Lausanne, soit entenus poier les vins de ung escus d’or par année pour ovrir les portes de ville de nuict aulx postes, à debvoir par luy délivrés aux portiers de ville de S. Pierre et S. Francois.
Punitions.
1563. 24 mars. — Certain nommé Gro Bernard doibge estre expelly hors leurs ville, tant pourtant qu’ilz ne sçait poin prier Dieu, nonobstant toute diligence et commandement qu’on luy aie faict, et aussi comme pour ce aussi qu’ilz incite les enfans et escholliers à boire de l’eau ardens, chouse préjudiciable, comme pour aultres chouses et offences et plaintifz doibge sortir pour toute laz sepmainne quilz vient.
Déjà le 20 août de l’année précédente on lit l’article ci-après que je joins à celui-ci :
« La Jenon Gonvert, dicte Escublenche, pour avoyer subtraict plusieurs enfans estudiens de leurs donner à crédit sus des livres dérobés, des poyres et fritaiges, icelle estre mise deux heures en la gèbe au Pont, pour exemple tant à elle que aultres femmes et enfans. (En marge : Revendresse, subtraisseresse.) » /185/
Réprimande de Berne sur l’administration de la justice.
1563. 26 mars. — Pardevant messeigneurs bourguemaistre et Conseilz de Lausanne estant invoqués aud. Conseilz et comparissans les nobles et bourgeois de leurs rue de Bourg, lesquieulx havoint faict cognoissance de fuatter une prisonnière détenue ès prisons de monseigneur le ballifz et estre bannye. Il ha comparus le magnifficque seigneur ballifz Pierre d’Erlach, gentilhomme et bourgeois de Berne, fesant remonstrance auxd. bourgeois de Bourg de ce qu’il l’havoint adjuger seulement à fueter, au lieu de laz adjuger à laz mort, à quoy elle debvoit estre adjugée, asçavoir à estre noiée jouxte le droy impérial; et que si il ne sçavent faire tel jugement et ignorent le droy impérial, qu’ilz en doibvent demander l’advis à messeigneurs de Conseilz et jouxte icelluy se guider et faire leurs jugement et cognoissance par le moiant de leursdit advis. Et que messeigneurs nous trèsredoubtés seigneurs et princes de Berne ne soy en contentent point, ny dudit jugement, ny de deux aultres précédants, asçavoir de certain de Romanel qu’avoit blasfémer et proféré grand blaphème contre laz Vierge Marie, méritant pour ce laz mort; toutteffois l’havoint seulement adjuger à havoir percée la langue. Et ung aultre rière Espalinge, nommé Ranffelliz, que debvoit estre adjugé à laz mort, ne l’a touteffois esté, dont nousditz seigneurs en havoint grand regrectz. Pourquoy sil n’y advisoint et mestoint du remède et d’en user jouxte le droy impérial, nousditz seigneurs et princes il pourveroint pour il mettre d’aultres juges suffisans. Lesquels /186/ seigneurs ont pris terme jusques à deux heures après mydi pour il havoir advis.
A laquelle heure s’estant assemblés lesditz seigneurs de Bourg avec leditz seigneurs de Conseilz, il concluerent unanimément, d’ung mesme voloir, sans aulcune contradicte, ains du tout concordablement :
Que quand adviendra d’icy en avant que conviendra faire cognoissance et jugement et punition corporelle sus malfacteurs, les seigneurs de Bourg, nobles et bourgeois cognoissans, doibvent prendre l’advis de messeigneurs de Conseilz avant toutes chouses et se guider sellon tel advis. Et qu’ilz doivront estre assemblés lesditz seigneurs bourgeois de Bourg et en vouter et opiner parainsamble avec lesditz trèshonnorés seigneurs de Conseilz, au poelle de laz maison de ville.
Et quant au faict du présent jugement sus la confession de ladicte Jenette, fillie de feuz Jaques Ducrest de Bussignye, détenue ès prisons de nousdictz seigneurs de Berne par egrège Jehan François, chastellain de Rive, sus la confession et procès conclu le 5 de mars 1563; en ont conclu et opiné lesdicts nobles seigneurs bourgeois de Bourg et soy sont du tout résolus et tenus au bon advis de messeigneurs de Conseilz, lequel a esté que ladicte détenue debvoit estre condamnée et adjugée à laz mort et estre noyée au lac, puys après estre morte estre enterrée vers la Chamberinaz, au lieu où l’on a accostumé de deffaire les malfaicteurs, et ses biens estre confisqués à nous trésredoubtés seigneurs et à tous aultres seigneurs rière lesquieulx sont existants, laz tenant du tout pour bonne, sainne et juridique. Et ont ordonné que noble Claude de Gallerard doibge faire le rapport, tant au seigneur ballifz que son /187/ chastellain audict Rive et aussi bien à leur juge, comme seigneur de Conseilz et dudict Bourg tant à present qu’à l’avenir. Réservant en tout laz grace de nous trèsredoubtés seigneurs et princes de Berne.
Sensuivent les noms des seigneurs de Conseilz dudict Bourg qu’on esté d’opinion et d’advis comme messeigneurs de Conseilz des seigneurs XXIIII et aussi des seigneurs aultres suivans. Et premierement, Noble Henry de Praroman, N. Claude Gallerard, François Blescheret, Noble Michel Sainct Cierge, Pierre Mussiquin, N. Loys Gimel, Noble Jeham Gimel, Noble Jehan Dedin, seigneur Johan Floret, Pierre Richard, Joham Decroso, Johan Carrad, Pierre Destallens dict Bertho, Cl. Lulian, Johan Richard, Claude Bevex, Gaspard Girard, Claude Chassot, Jaques Levrier, P. Guennaz, George Currellat, Collet Arensoz, George Chebaz, Claude Cullat, Nicolas Jasson, Pierre Jasson, Jehan Fugoux, Vullieme Dunant, Anthoine Raccaud, Pierre Currellat, lesquieulx tous ont estés de l’advis comme mesdictz seigneurs de Conseilz, reservé trois suivants, ascavoir : Pierre Richard, hoste de la Croix blanche, George Currellat et Claude Lulian, eux trois seulement que l’ordonnoint estre seulement fuattée et bannie, non obstant ses grand démérites. Touttefois que lesdictz trois derniers nommés, ont bien esté résoluement d’advis que d’icy en avant l’on en doibge estre comme dessus à l’advis et en vouter parainsamble comme dessus en Conseilz, et ainsi en user à l’advenir, et doibge estre réduitte par escript tojour laz reserve de laz confiscation des seigneurs rière quieulx il seront les biens des délinquans, comme par cydevant l’on a usé.
B. Ruffy. /188/
La récente condamnation à mort de Jeannette Ducret est mentionnée au manual le 11 mars en ces termes : « Tochant certainne fillie détenue en prison au chastel, a esté cogneuz par messeigneurs que messeigneurs de Bourg la dehussent adjuger à estre noyée et puis après ensepvelie à rive de lac, pource qu’à l’instigation de saz mère elle avait donné des poisons par gresses, dont ceulx quilz en havoint heuz estoint devenus folz et enragés. »
Maître d’écriture.
1563. 30 mars. — L’on a accepté certain maistre d’escripture pour apprendre les enfans, pour les pris, asçavoir : ceulx quilz ne vont point à l’escholle pour 6 sols pour quart temps; et ceux qu’apprendront aussi à escripre et chiffrer douse sols par quart temps; et aux clercs quil vont à l’escholle trois solz seulement par quart temps; lequel s’appelle maistre Adam Arnoulx.
Maître Arnoulx, aussi appelé Arnolff, avait eu un prédécesseur du nom de Jacques Cassot. Arnoulx ne resta pas longtemps en fonctions, car le 10 juin de la même année on lit au manual : « Messeigneurs ont ordonné et esleuz pour maistre d’escripture à Lausanne Anthoinne de Preghat, natifz d’Issoire en Auvernie, pour laz pension et sallaire qu’on a ordonné à l’aultre précédent, quilz n’a guères que l’on havoit constitué maistre d’escripture, lequel précédent maistre l’on le révoque et luy resèque l’on sadicte pension, luy laissant à laz rate du temps que l’a servir et il constitue l’on ledict Preghat. »
Par les comptes du boursier on apprend que le salaire de ce maître d’écriture était de 25 florins par an; mais il se faisait sans doute d’autres revenus par des travaux spéciaux. Par exemple on voit dans ces mêmes comptes l’article suivant. « Item, a délivré à maistre Anthoenne de Preghat, escripvain icy à Lausanne, pour avoir escript le tableau des Pseaumes mis à St François /189/ et pour facture d’icelluy … le XXIIe de febvrier 1564. — XXVI sols. »
Jérôme Bolsec.
1563. 19 avril. — … Comparu ascavoir messy Jérosme Bolsec, docteur en médicine et sirurgien, lequel a resquis lesdicts seigneurs d’estre recehus habiter en leurs ville, ouz bourgeois; et a présenté deux lettres favorables de recommandation, l’une de monseigneur le ballifz de Thonon et l’aultre de monseigneur le ballifz d’Orbe … Messy Jérosme a esté admis et assoufferté habitant en leurs cité de Lausanne par tel sy et moiennant qu’ilz doibge se présenter pardevant leur consistoire et leurs ministres et de promettre de vivre jouxte laz réformation de nous souverains seigneurs et princes de Berne, sans dogmatiser et troubler les églises, et à eux se déclairer si prétend havoir quelque scrupule ouz oppinion et se déclairer. Item, a esté assoufferté pour riens et sans contribuer et doibge vivre paisiblement, luy donnant ce qu’ilz debvroit donner pour saz contribution, en respect et amour desdicts seigneurs ballifz.
Voyez sur cet homme d’une importance posthume : France protestante. 2de édition, tome II, col. 745 à 776.
Les termes employés par le secrétaire du Conseil manifestent une certaine crainte au sujet du séjour de Bolsec à Lausanne, et témoignent évidemment que ce n’est qu’en considération des lettres de deux baillis bernois qu’on lui permit d’habiter cette ville. Il est juste d’ajouter que les appréhensions du Conseil de Lausanne ne se réalisèrent pas, car on lit dans le manual, au 2 décembre 1563 : Méssy Jérosme [Bolsec], médecin, a prins congié de messeigneurs avec honnestes remerciations, actions de grâce des bénéffices par luy recehuz d’iceulx, avec présentation de /190/ services de saz personne et povoir, à l’exhortation de noz redoubtés seigneurs de Berne soy retirans d’icy. Messeigneurs luy ont faict rapport que ont bon contentement de luy et tanteffois qui luy plaira venir habiter ici en leurs ville, n’ahiant faict aultre chose que sachent et jouxte le contentement qu’ont heuz de luy, il le recevront comme paravant, tant en respect de saz conversation comme de ce qu’a refféru nosdictz redoubtés seigneurs luy ont permis aller, passer et venir par leursdict pays.
Condamnation d’une sorcière.
1563. 4 mai. — Messeigneurs ont ordonné tochant certainne de Bussignye, femme de Jehan Viollet alias Verdam, dudict lieuz, détenue prisonnière ès prisons du magnifficque seigneur ballifzs d’Erlach au chasteau de Lausanne, que nonobstant les dépositions des testmoings examinés audict chasteau, que sus tel examen l’on ne doibt donner torture jouxte nostre costume. Mais bien l’on laz pourra torturé sy elle a permis s’appeller vaudeyse et qu’elle le confesse sans tirer en cause les appellans et tels prononceurs.
11 mai. — Tochant laz prisonnière de Bussignye détenue en prison au chasteau a esté cogneuz pource qu’elle a varié et qu’elle a estée accusée accoulpée par une femme qu’est morte, que disoit que elle mouroit pour ladicte détenue et qu’elle l’accoulpoit à saz mort, estant morte à telle foy et opinion, que l’on laz peult estacher à la corde et ung peu l’eslever; et que son marys a produit à testmoings certains testmoings pour prover que elle en estoit desacoulpée; toutteffois par sondict provage a prover le contraire et que telle femme ne l’a jamais désaccoulpée; mais au contraire, ont prové maximéement une prove qu’elle /191/ havoit donné du lard alias baccon à elle, dont ne fist despuis jamais bien, ains morust l’aiant accoulpée à saz mort; et vehuz son mauvais bruyt et mauvaise fame d’estre sorcière ouz voudeisaz, et qu’elle ne s’en est point pourgée et a varié en son dire, confessant dernièrement ce que par cy devant havoit expressément nyé tochant d’havoir gousté avec elle et luy donner du lar ouz baccon.
17 mai. — Conseilz extraordinaire avec aussi certains des seigneurs LX et II de laz bannière de Bourg, pour l’advis faire de laz cognoissance du procès criminel de Stevenaz, femme de Jehan Violet de Bussignye, détenue ès prisons du magnifficque seigneur ballifz de Lausanne, n. Pierre d’Erlach.
S’ensuivent les noms des seigneurs nobles bourgeois de Bourg, àsçavoir : N. Claude Praroman, seigneur de Chappellaz; n. Jo. Dedin; Jo. Floret; Jo. de Croso; Cl. Vauderey; Claude Lullian; Gaspard Girard; Jo. Richard, borrallier sellier; Pierre Guennaz; n. Jo. Gimel; Cl. Chassot;
Lesquieulx seigneurs de conseilz consultant ensemble avec lesdict seigneurs de Bourg ont heuz advis de l’adjuger à debvoir mourir par le feuz comme sorsière pour ses démérites d’havoir renoncer Dieu, soy estre donnée au diable et havoir faict mourir gens et bestes et empoisonnés. Et tochant la requeste faicte par monseigneur le ballifz N. Pierre d’Erlach, sy plaisoit à messeigneurs de conseilz permettre de faire le jugement d’icelle au chasteau dans laz ville, pour cestuy cop et ceste foys, pour éviter poines tant à luy, son chastellain et officier, comme aussi lesdict seigneurs, adsistans de Bourg; lesdict seigneurs ont sus ce /192/ ordonné, que combien qu’ilz désirrent complairre en tout ce qu’ilz pourroint audict seigneur en chouses bien plus grande, toutteffois ilz le prient n’havoir à desplaisir si en ce endroit il ne luy pouvoint complaire et ne le peuvent gratiffier. Pourquoy ont ordonné de faire ledict jugement à Rive d’Ochie, ainsi comme a esté accostumé et non audict chastel de laz Cité.
Obligations des villages du ressort.
1563. 2 juillet. — Messeigneurs ont faict procure ample et généralle à seigneur Gabriel Pomettaz de suivre contre ceux du ressort pour les faire à gager et subaster leurs bestial et aultres biens, tant meubles que immeubles, et suivre contre eulx, tant contre eulx que tous aultres pour faire laz fortiffication, fossaulx, édiffices et réparation de ville et de poier les deux solz et quinse solz charriages et toutes aultres chouses que lesdictz du ressort sont entenus de faire.
Les villages du ressort reconnurent leurs obligations envers la ville.
Elections.
1563. 5 septembre. — Ordonné de invoquer le nom de Dieu avant que faire les élections, pour myeulx par sa divine inspiration, ayde et grâce faire lesdicte élections.
Les élections de l’anée 1563 pour l’anée aussi suséquente le cincqe jour de septembre.
Le dimenche cincq de septembre l’an de grâce aiant cour mil cincq cents soixante et trois, estants assemblés /193/ monseigneur le bourguemaistre, noble François Seignyeulx, messeigneurs les seigneurs du conseilz appellés XXIIII et les seigneurs du rière conseilz appellés les LX et les seigneurs du grand conseilz appelés les seigneurs deux cents, en leurs maison de ville de Lausanne en laz Palud, pour faire les élections des offices soubnomés, asçavoir du seigneur bourguemaistre, du seigneur boursier, du secrétaire de conseilz, des seigneurs banderets, de leurs recepveur de Sainctz François, de leurs mestral.
Après que monseigneur le bourguemaistre a faict les remerciations et excuses pour messeigneurs de conseilz, ilz ont faictz les élection desdictz offices comme s’ensuyt :
Premièrement ont esleuz monseigneur le bourguemaistre moderne noble François Seygnyeulx, seigneur de Vufflens et de Viveys, encores pour ces trois ans prochains advenir, lequel a faict le serement à ce resquis.
Item, ont esleuz pour leurs boursier, asçavoir le seigneur Phillippe Guybaud, lequel a faict reffus pour ce que son père havoit desia esté leurs boursier et que sont occupés, en demandant cognoissance aulxdicts seigneurs; lesquieulx ont cogneuz iceulx debvoir estre jouxte laz loix et ordonnance sus ce escripte debvoir icelle observer à ceulx qu’en font reffus; ce qu’a accepté ledict seigneur Phillip en debvoir estre et poier jouxte la reigle.
Quoy causant ont esleuz seigneur Raymond Perrin pour leurs boursier, lequel a faict le serement.
L’an et jour derrier escriptz les derriers nommés seigneurs ont esleu pour leur seigneur secretayre du Conseil, asçavoir : Provide et honnorable seigneur Bernard Ruffy, lequel a juré en forme requise. Et c’est pour le terme de /194/ troys ans. Requérant luy admettre ung soubstitué en son absence et qu’ilz sera empesché, lequel Ruffi a resquis lesdicts seigneurs qu’en cas qu’ilz ne puisse exercer ledict office et qu’ilz lui advinse quelque empêchement, de s’en povoir démettre et que leurs pleuz en ce endroyt pour excuser, soit pour le premier, second que tier an, le tenir, et qu’allors ils leurs en pleust en eslirre ung aultre.
Item, les dicts seignieurs ont esleuz et reconfiermé tous les seigneurs cincq banderet pour trois années, ainsi comme desia par cy devant sont estés; lesquieulx ont aussi faictz le serement à ce resquis et ordonné.
Item, ont esleuz pour leurs mestral, asçavoir : noble Pierre de Sainctz Cierge.
Et pour leurs recepveur de leurs biens de Sainct François, Montheron, Sainct Soulpirs, etc., àscavoir : discrectz homme Gabriel Pomettaz; lesquieulx tous deux ont faict le serement ainsi qu’est resquis.
19 décembre. — Le dimenche XIX de septembre 1563 furent assemblés messeigneurs les honnorés seigneurs bourguemaistre et Conseilz, rière Conseilz et Deux Cent du conseilz de Lausanne, tant pour ordonner les bamps des vendanges de ceste présente année, comme à l’instance de provide Raymond Perrin quilz prétend et supplie lesdictz seigneurs pour se démettre d’estre boursier de ville, pour les raisons par luy alléguées et pour ses doléances déclairées jouxte laz supplication prodhuytte par escript; lesquieuls ont esleuz seigneur Michel Sainct Cierge pour leurs boursier, lequel a accepté et a faictz le serement à ce resquis. Et pource que ledict seigneur Raymond s’est démys, il ont aussi démys et l’on condampné aux poinnes, ascavoir /195/ qu’il doige poier à messeigneurs de laz ville, au boursier novel, pour leurs bourse et prouffit de ville, cent florins; item, dix escus promptement à messeigneurs les deux cent.
Item, ont ordonné les bamps des vendanges, asçavoir : de demain en quattorse jours le premier parchet d’Ochie de trois jours; et le parchet suivant second, de Villard et Contignye, le jeudi, vendredi et samedi suivant; le parchet de Sainct Laurens, le lundi suivant, mardi et mercredi; et l’aultre dernier parchet de Paleyre, Echissie, Montribaux, etc., les jours après ensuivant, tojours après ensuivant.
30 septembre. — Le nouveaul Conseilz pour l’année suivante 1564.
Le dernier jour de septembre l’an de grace aiant cours 1563.
Sont déclairés estre esleus les seigneurs de Conseilz suivants :
Et premièrement les seigneurs de Conseilz de laz bannière de laz Cité sont nomméement : Monseigneur de Sainct Martin, N. Claude d’Arnex; N. Claude Gallerard, hospitallier; discrects Claude Sonney et discrects Claude Sudal.
En laz bannière de laz Palud, avec et oultre le seigneur bourguemaistre, noble Francois Seignyeulx, seigneur de Vufflens, sont esleus, asçavoir : Noble Ferdinand Loys, seigneur de Chesaulx; seigneur Loys d’Iverdon; seigneur Claude Vanière; seigneur Francois Gignilliat.
Pour laz bannière de Sainct Laurens : Provéables et honnorables Jaques Boufz; seigneur Jehan Gumoens; /196/ seigneur George du Crest et discrectz Jehan Blan, au lieu de B. Ruffi.
Et pour laz bannière du Pont : seigneur Guillaume de Lalex; seigneur Estienne Bosson; seigneur Claude Pasquier et seigneur Jehan Malliet.
Et pour la bannière de Bourg : Monseigneur de Chère, Noble Henry de Praroman; Noble Michel de Sainct Cierge, seigneur boursier; seigneur Estienne Gaudin; seigneur Pierre Musiquin.
Lesquieulx seigneurs ont faict le serement à ce resquis, excepté honnorable Loys d’Yverdon, seigneur Cl. Sonneri, que sont absents de ville.
Lesquieulx seigneurs ont esleus pour soubstitué de leurs secretaire Bernard Ruffi, asçavoir : discrectz homme Petermand Pivard, leurs citoien, lequel a faict le serement à ce resquis. Et aussi l’ont passé juré et a faict aussi le serrement dedicte jure.
Seigneur Jehan Malliet, ancien mestraulx, a remis à messeigneurs le marc de poidz accomply de lotton; les esbalances de lotton; deux marques de ville pour les aises d’estaing, lesquelles marques sont de fers; l’eschandillion et mesure pour les mesure de molin; deux marques pour seeller les haulnes et quartherons, theises et vasseaulx de bois; et le baston de mestrallie. Lesquelles chouses et meubles sont estés remises à noble Pierre Sainct Cierge, leurs moderne mestral, avec ledict baston de mestrallie; avec exhortation de rendre son debvoir.
La constitution communale, inaugurée en 1529, avait graduellement et insensiblement subi de grandes modifications dans un sens aristocratique, selon la tendance du siècle. /197/
A l’origine, c’était la commune entière (totum commune) qui, le premier dimanche de septembre élisait le conseil par bannières, et nommait le bourgmestre, le boursier et les principaux officiers de la commune. Ces élections étaient ratifiées par le Conseil des Deux cents (omnes burgenses scilicet ducentum. Voyez nos précédents extraits). Plus tard, sauf en 1535 où l’on revint aux anciens usages, le Conseil des 200 paraît avoir continué à nommer le Conseil des 24, le bourgmestre, le boursier, les bannerets, etc. Ce mode de vivre dura jusque vers 1550. Depuis lors les 200 ne paraissent plus comme nommant le Conseil, mais seulement le bourgmestre, boursier et bannerets. Le Conseil des 24 n’est plus mentionné avant son entrée en fonctions à la Saint-Michel. Son mode d’élection n’est plus spécifié, quoiqu’on voie par l’article du 5 octobre 1564 que cette élection avait aussi lieu le premier dimanche de septembre. J’ai lieu de croire qu’il se recrutait lui-même, ce qui est d’autant plus probable que c’était lui qui nommait les Conseils des 60 et des 200. Ainsi le Bourgmaître, le boursier et les 24 nommaient les 60 et 200, et ceux-ci nommaient le bourgmaître et le boursier.
Voyez l’article du 6 octobre 1562, qui est parfaitement explicite à ce sujet.
Criminel fouetté.
1563. 27 octobre. — Jaques Perey le joennoz soit détenus en l’armaire es halles en prison jusques à vendredi et que audict jour il soit mené en la salle ouz poelle de laz maison de ville et que laz il soit despollié tout nudz et fuatté par deux officiers quil seront déguisé, affin de non estre de luy cogneuz. Et pour le chastier de plusieurs chastommies ? et offences qu’a faict, et ce sans préjudice de son honneur.
Ledict jour Jaques Perey prédict a esté presenté pardevant messeigneurs au poelle de ville et a esté vuysté et /198/ fuatté secrettement à verges, ensuivant ladicte ordonnance. Et a juré de non porter haine ny rancune à laz justice, ny personne, ny aulx officiers que l’ont fuatté en général, ny en particulier, ny pourchassé aulcung, ny point de dommage. Et luy a ont commandé de vuider laz ville de Lausanne pour an et jour et l’absenter, à debvoir commencer d’icy à dimenche prochaine à debvoir vuider.
Paroisse d’Ecublens.
1563. 16 novembre. — Maistre Michel, seigneur ministre de Escublens, S. Soulpirs, Chavannes, etc., l’a comparus pardevant messeigneurs exposant que lesdictz ses parrochiens ne font leurs debvoir de aller ouyr laz parolle de Dieu, ny les dimenches, ni jour de prières, et entre aultres ceulx de Chavanes et maximéement Pitaulx Perret et certains aultres qu’a nommés, les prians ilz mettre de l’ordre.
Sus quoy a esté ordonné de faire commandement au chastellain dudict Sainct Soulpirs de faire à publier audict S. Soulpirs et à laz prédicaton, qu’ilz doibgent mieulx rendre leurs debvoir qu’ilz n’ont faict et qu’iz doibgent observer les mandement par nous trèsredoubtés seigneurs et princes de Berne émané de non faire pasches les dimenches et jour du repos, et ceulx quilz seront défaillans d’aller ouyr laz prédication de l’évangille soint gagés pour trois solz ungchescung défaillant audict jour du repos et les doibgent poier promptement sans figure de play, lesquieulx seront mis en laz boitte des povres et illec applicables pour les délivrer aux povres desdictz lieux deffailliants. Et aussi doibgent mieulx rendre leurs debvoir /199/ d’adsister aux prédications du sainctz évangille les jours de prières par jeudi. Et aussi les deffallians nommés par ledict seigneur ministre doibvront estre tirés au consistoire pour les chastier.
Maistre Michel, ministre de la paroisse d’Ecublens et Saint-Sulpice, était Michel Réverol, de Vauprivas en Dauphiné, qui avait été nommé à ces fonctions le 28 février 1539.
Les plaintes des ministres sur leurs paroissiens, soit dans la ville de Lausanne, soit dans les villages du ressort, sont assez fréquentes et assez semblables les unes aux autres. On citera un autre exemple de ces plaintes : Le 18 mai 1553 « le seigneur ministre de Montheron a resquis à messeigneurs de luy aider pour aultant qu’ilz convient doner et administrer laz Saincte cenne de messeigneurs en son ministère à ces Penthecostes prochaines; pource qu’ilz font reffus de l’instruction en partie aulcugne; et aultres ne viennent au sermon, sinon quand l’on done ledict sacrement de cenne. Qu’ilz leurs plaise luy doner des seigneurs pour leurs faire les admonitions et remonstrances aulx paisans. Dequoy messeigneurs luy ont sceuz bon gré de son bon zèle, et ont ordoné que seigneur Pierre Musiquin ilz doibge aller avec le seigneur chastellain pour leurs faire les remonstrances et admonitions. »
Quelques jours après, le 27 mai, les ministres de Lausanne demandent au Conseil « de mettre ordre de non permettre profaner laz saincte sene par les estrangiers et d’y mettre ordre qu’ilz, les estrangiers, n’y doibgent estre recehuz, ni les aultres voisins d’aultres paroisses, combien qu’ilz soint à laz réformation, mais qu’ilz doibgent aller soubz leurs ministres laz recoivre. Item, de mettre ordre pour les closches que l’on sonne plus en grand bruyt et en grand différence que les dimenches, en certains jours de festes permises par nous très redoubtés seigneurs de Berne oultre les dimenches; de non plus alnsi faire, ains également comme les dimenches … Item, ont rencontré que messeigneurs de conseilz doibgent mieulx et plus souvent aller /200/ à laz prédication qu’ilz ne font, affin d’aller monstrer mellieur exemple aux aultres d’y aller plus souvent … et maximéement ont resquis d’eslirre gens quilz se donnent garder des gavots et estrangiers quilz vont à laz sene, pour les en faire retirer et les advertir. »
Chasse.
1564. 6 janvier. — François Nicolas alias Gilliéron et Planallet aiants pris par leurs chasse une beste de veneyson, asçavoir ung pety bischollant ès boys et raspes de messeigneurs, vers Montheron, l’ont présenté et donné à messeigneurs, et luy donnera l’on X florins de don et qu’ilz facent diligence pour havoir le sanglier.
25 janvier. — A Jehan Bellet cinq florins pou avoir tué une biche, et ses compagnons de la commune du Mont aultres cinq florins pour avoir chasser et poursuivy à ladite chasse; dont ladite biche a esté livrée et admenée par ledit Bellet à mesdit seigneurs, que sont en somme dix florins.
Laquelle biche a esté ordonné délivrer à monseigneur le ballifz d’Erlach ung quartier dernier, et ung aultre quartier dernier sera porté à Viveys et présenté par ung seigneur de conseil aux seigneurs commis de Berne que se doibvent là trouver pour aller, comme ung peut entendre, journoyer avec ceulx de Valley sur certain différent. Et le reste partir à mesditz seigneurs de Conseil.
Coutume de Lausanne.
1564. 29 février. — Soit faict ung livre pour réduire les coustumes de Lausanne par escript, de quelles seront faictz examens. /201/
Cette décision du Conseil ne paraît pas avoir été exécutée; car, à ma connaissance, il n’existe pas aux archives de rédaction écrite de la coutume de Lausanne d’une date aussi ancienne.
Journée ou conférence de Nyon.
1564. 28 avril. — Estans les treshonorés seigneurs du Conseil XXIIII assemblés pour traicter et adviser touchant la maintenance et protection du bien publicq et républicque de la ville de Lausanne, en ce que le duc de Savoye ou aultres pourroit prétendre et quereller sus ladite ville ou en quelque endroict des dépendences d’icelle; Et ce causant que à présent journée seroit establie mesmes sus le lundy prochain en la ville de Nyon pour suyvre à l’appoinctement entre noz redoubtés princes de Berne et le dit prince et duc de Savoye. Dont lesditz trèshonorés seigneurs ont pour ce faict arresté d’en parler et advertir nozditz redoubtés princes, aux fins leur requester la ville de Lausanne soit comprins audit traicté de paix de tout ce que ledict duc pourroit prétendre en icelle ou en quelque endroict à l’advenir; et mesmes cy devant a prétendu à la jugerie de Billens, auquel lieu se donnoient et tenoient les causes d’appellations, soit qu’il y prétende ou aultres de Savoye que en ce cas et aultres desdites dependences de la ville ledit duc y soit mainteneu, et aultres que pour le prouffict de lad. ville et republicque sera requis de avancer; Messeigneurs ont arresté d’en requester messeigneurs les ambassadeurs et leur dresser requeste pour aussi en avoir leur advis et conseil et mesmes leur plaise par ung article spécial les comprendre en l’appoinctement comme le cas le requiert, scavoir que ledit duc renonce au droict /202/ par luy, ou aultres à son nom prétendant, sur la terre, jurisdiction et balliage de Lausanne et icelluy duc pour cest effet promectre prester toute ayde et faveur, comme du reste du pays par luy sera quicte contre tous prétendans ès choses prédictes ou dépendences dudict Lausanne, affin on soit hors de toutes querelles que occasion de toutes prétendues actions pourroient estre suscitées.
30 avril. — Ledict jour lesdictz trèshonorés seigneurs estans assemblés pour, suyvant leur ordonnance et advis, occasion de la requeste conclue, faire aux redoubtés princes de Berne et ambassadeurs députés pour journoyer avec le duc de Savoye, et à ceste présente journée debvoir se tenir à Nyon; assavoir advoir leur advis pour estre leur féaulx de Lausanne comprins en ung article au traicté de paix, dont suyvant ce monseigneur le bourguemaistre noble François Seigneux en a heu advis de monseigneur le bourcier Graffenried, l’ung des seigneurs ambassadeurs, lequel luy en fit bonne responce qu’il estoit de cest advis d’avancer d’estre mis en article. Semblablement noble Ferdinand Loys en tint propos à monseigneur l’advoyer Neguelly et monseigneur le bourcier Manuel. Touttefois en avoir esté aussi informé aultres seigneurs, dont par pluralité est faict responce que pour le présent n’estoit besoing l’avancer, n’en ayant pour ce aucune charge. Suyvant tel advis heuz desdictz seigneurs ambassadeurs, pour aultant que le faict touche ausdictz de Lausanne en ce que ledict duc ou aultres pourroient prétendre, mesdictz seigneurs ont conclud seroit nécessaire de se treuver audict lieu de Nyon, pour sentir s’il y auroit moyen pouvoir estre mis en article de paix, sans importuner lesdictz seigneurs /203/ ambassadeurs, sinon ainsi qu’il sera advisé le plus commodément selon le bon vouloir et advis d’eulx.
Et pour ce faire ont prié monseigneur le bourguemeistre se treuver audict lieu, auquel donnent tel charge, et de faire ce que pour le prouffict et maintenance d’une ville de Lausanne verra estre de faire. Ainsi mesdictz seigneurs ont arresté.
La pièce suivante, de la main du secrétaire de Lausanne, ni datée, ni signée, me paraît être la minute d’un projet de pétition à LL. EE. de Berne, au sujet des questions qui avaient été débattues dans le Conseil de Lausanne les 28 et 30 avril :
« Magnifficques et trèsredoubtés seigneurs; il vous exposent vos trèshumbles féaulx de la cité et province de Lausanne, comme leur soit venu à notice à présent, au plaisir de Dieu, voz excellences délibérés convenir avec ung seigneur duc de Savoye, possible pour déterminer de tous voz différens avec icelluy, concernant toutes ses prétentions de pays par deça nouvellement par Voz excellences acquis et possédés, ballivages, terres et seigneuries, numméement du pays de Vaulx, Chablays et Gruyère, sans avoir encores peu entendre. Tandis soit faicte aucune mention ny propos de l’évesché ny cité de Lausanne et appendences, leur a semblé, cependant, ne doibvent demeurer en telle taciturnité que, après toutes choses conclues, leur peust estre imputée culpe non s’estre à Voz excellences en leur endroict aulcunement advancés : tombant par adventure, par aultres arrestz et articulations, à l’advenir à Vos seigneuries grand fascheries et à eulx dommages et grandz desplaisirs. Car, combien que les prédecesseurs de son altesse soyent estés, ja long tems a, privés du vicariat et previlèges impériaulx sus ladite terre, ville et église de Lausanne, comme tous dictz privilèges et vicariat d’empire furent reconfirmés par l’empereur Maximilian à Aymé de Montfalcon, lors seigneur évesque dudict Lausanne, luy conférissant et réinfeudant de nouveau tous iceulx privilèges, vicariatz, /204/ préhéminences et protection de dicte église et dépendences, néantmoings ledit seigneur duc pourroit avoir sesdictz précédens droictz ou offices de jugerie, séneschallie ou aultres subrogué en rière fiedz à aultres ou aultre à leur nom, ou pour aultres droictz y pourroit ancour prétendre. Pour obvier à telz dangiers supplient trèshumblement Voz excellences mentioner en après et tellement arrester dudict Lausanne, que tant qu’il concerne l’évesché, esglise, cité de Lausanne et leurs dépendences soit renuncé à toutes pretentions … donner ayde contre tous contrevenant et veuillantz … »
(Arch. de Laus. EE. 629. Minute originale.)
On sait qu’à la journée de Nyon, qui eut lieu le 30 avril 1564, on débattit les préliminaires de la paix, signée à Lausanne au mois d’octobre suivant. Tous les historiens, comme Ruchat, Tillier, Verdeil, Vulliemin ayant traité ces questions avec détail, nous n’y reviendrons pas. Nous ferons seulement observer que le projet du Conseil de Lausanne n’eut pas de suite. Il n’est fait aucune mention spéciale de cette ville dans le traité de paix, tel qu’il a été publié par Grenus. (Documents, p. 227—239.)
Nouveau bailli bernois.
1564. 3 septembre. — Conseil des Deux Cents … Et pour élection d’ung seigneur capitainne, de son lieutenant, de deux porte enseigne et de leurs lieutenants, tant pour faire la rencontre et bienvenue du seigneur ballifz esleuz novellement pour ceste Sainct Michel prochaine ouz environ, comme pour l’ung desdictz banderet porteur de l’enseigne noire pour le faict de laz guerre, si estoit nécessaire. Ont lesdictz seigneurs desdictz conseilz esleuz àscavoir : noble Claude de Praroman, conseigneur de Rugnens; et pour son lieutenant seigneur George de Neschel; et pour banderet de l’enseigne de ville seigneur Jaques Boufz et discrect Aymé Regnaud son lieutenant; et pour l’enseigne /205/ et bannière noire des hacquebusiers, tant pour laz guerre que ladicte venue et rencontre, ont esleuz noble Claude d’Arnex, seigneur de Sainct Martin; et pour son lieutenant noble Guillaume Derlens, lesquieulx tous ont faict le serement à ce resquis de bien exercer leursdicte charge bien et fidellement de tout leurs povoir, excepté seigneur George de Neschel qui estoit absent du lieuz.
16 septembre. — Mes honnorés seigneurs ont advisé sus faict des monstres prochaines, suivant l’élection faicte par les seigneurs capitaine, son lieutenant, banderetz, pour les trabenders, ascavoir honneste Jehan Pivard, seignenr Jehan Blanc, François Freschaux et noble Pierre de Sainct Cierge. Aussi ont advisé que sil monsr de St Martin est receu en démission de porteur d’enseigne de la guerre, comme il prétend requérir à messeigneurs les IIc, qu’ilz le trouveroient fort propre pour sergent général de bende. Lesquelles élections dudict sergent général et trabenders messeigneurs les approuvent, aussi discrect Pierre Tronchet adjoinct avec eulx.
Aussi a esté donné pouvoir èsdict capitayne et son lieutenant, assistés des seigneurs banderetz, de visiter les armes et donner ordre qu’on soit de bon et honneste équippage. Touteffois sont admonestés qu’ilz ayent, suyvant l’occurrence du temps présent, à doulcement traicter les subgectz.
27 septembre. — Messeigneurs ont esleu pour assister avec monseigneur le bourguemeistre, noble François Seigneux, seigneur de Vufflens le chastel et Viveys, et ce pour recevoir le serement de entrée de monseigneur le ballifz moderne, comme a esté usité et presté par les prédecesseurs, /206/ tant seigneurs évesques que les seigneurs ballifz. Quelz seigneurs assistans ont esté nommés : seigneur Guillaume de Lalex; seigneur Loys d’Yverdon; seigneur Estienne Gaudin l’aisné; seigneur Estienne Bosson; seigneur Claude Pasquier et seigneur Pierre Musiquin, tous seigneurs de Conseil; et aultres, asçavoir : Monsr Jehan Loys Loys, seigneur Pivard. Avec monsr le secrétaire égrégie Bernard Ruffy, pour stipuler et recevoir ledict serement en faveur de mes honnorés seigneurs de Lausanne.
Aussi est ordonné de tenir prestz les bulles des libertés et franchises et confirmation d’icelles, par des empereurs à ladicte ville de Lausanne concédées; ensemble les instrumens des seremens prestés par des seigneurs évesques dudict Lausanne que précédens ballifz pour la part de noz redoubtés princes de Berne constitués en ceste dicte ville.
5 octobre — … Ledict seigneur bourguemaistre a refférus à messieurs de conseilz dessus escript, comme dimenche ouz lundi dernièrement passé monseigneur le ballifz moderne, noble Pierre d’Erlach lui a dict et faictz sçavoir comme ilz havoit receheuz lettres de noz trèsredoubtés seigneurs de Berne de continuer et de contremander les monstres des armes quilz se doibvent faire lundi prochainement venant à laz bien venue de monseigneur le ballifz novellement esleu, noble Peterman de Vatville, et ce à cause de suspection de peste.
Lesdictz seigneurs dernier nommés ont ordonné que lundi prochainement venant ilz doibgent aller avec monseigneur le bourguemaistre, luy fesant compagnye une trentenne d’hommes honnorables à cheval, avec leurs pistollet pour les desbender sans pierre, pour aller au devant et à /207/ l’encontre, pour laz bien venue de monseigneur le ballifz de Lausanne novellement et modernement esleus, pour le salluer et luy donner le bon joie de saz bien venue, luy présenter honneur, service et plaisir, présenter à boire et collation à luy et noble compagnie et faire toutes bonnes charesses qu’ilz se pourraz et doivra faire. De desbender six pièces d’artillierie vers laz porte Sainctz Pierre et quelque hacquebus à crocq à laz porte et tours Sainct Pierre. Et aussi de en débender certains hacquebus à croc à la tour Sainctz François, en respondant aux précédents. Item, d’en desbender six hacquebus à croc vers Sainctz Estienne, quand ilz haura monseigneur le ballifz faictz le serement vers ledict Sainctz Estienne. Mais s’il advient que ledict monseigneur le ballifz n’en veullie point faire de serement, que allors l’on ne doibge point desbender lesdictz six acquebus à croc vers ledict Sainct Estienne.
Item, a esté ordonné de faire et présenter ung don audict seigneur ballifz novellement esleuz, à son harrivée au chasteau, asçavoir de deux belles et bonnes boittes de dragée, six potz ouz grand symesses d’ypocras, demye dosenne de perdrix, demye dozenne de chappons, deux dozennes de grives, demye dozenne de bégasses, ung bon muton gras.
9 octobre. — Laz journée du serement faict par noble et magnifficque seigneur Pierre de Wattenvill, bourgeois de Berne, ballifz esleu novellement de Lausanne, à saz venue et entrée de ville.
Le lundi noufze jour d’octobre l’an de grace aiant cours 1564, à l’heure de unse heures, environ midy, estans assemblés dans Lausanne, en laz rue de laz Mercerie, avant /208/ et près laz porte dicte de laz Cité, près le temple aultreffoys dictz de Sainct Estienne, entre et devant laz maison de discrect François Gignilliat et celle de discrect et égrége et sçavant messire Jaques Blescheret, docteur en médicine, d’aultre part; noz honnorés seigneurs bourguemaistre et conseilz de Lausanne soubnommés pour reçoivre et donner le serement accoustumé au dict magnifficque seigneur ballifz d’observer et maintenir toutes les libertés et frenchises, us et bonnes costumes de Lausanne, tant escriptes que non escriptes, à forme des seremens que les évesques jadix de Lausanne et les précédents seigneurs ballifz de Lausanne, de laz part de noz trèsredoubtés seigneurs de Berne députés, ont jusques icy par cydevant faict. Pour ce, ès présences et assistances des magnifficques, nobles et prudens Jerosme Manuel, seigneur bourcier du pays conquis; Erhard de Wattevile, gentilhomme de Berne, seigneur de Dusy en Bourgongne; Hanns d’Erlach; Niclaus Wierman; Thibaud Frisching et aultres bourgeois de Berne, s’est personnellement constitué noble, magnifficque et prudent seigneur Pierre de Wattevile, bourgeois de Berne, moderne ballifz de Lausanne, à sa venue et entrée pour l’exercice de sa charge : A juré, ayant la main en hault eslevée, de tenir, garder, observer et de faict maintenir, sans nullement infringir, les droictz, libertés, franchises, privillèges, usances et coustumes escriptes et non escriptes des nobles, citoyens, bourgeois et toute la communaulté de Lausanne et jurisdicion d’icelle. Lequel serement a esté faict et presté par ledict seigneur ballifz audevant de la porte de la Cité, près le temple Sainct Estienne, lieu accoustumé prester telz serement par les seigneurs /209/ ballifz ses prédécesseurs et jadis par les évesques de Lausanne. Et ce en la présence de noble François Seigneulx, bourguemeistre de Lausanne, seigneur de Vufflens le chastel, Viveys et La Tour de Peyl, instant et requérant ledict serement estre faict de toutes les choses prédictes pour l’intérestz et prouffict de la ville, cité et communaulté de Lausanne et comme appertiendra en quelconque sorte à l’advenir; duquel serement presté ledict seigneur bourguemeistre a requis à moy secrétaire du conseil soubz signé estre faites lettres testimoniales à future mémoire.
Le tout faict et passé audict Lausanne, en la charrière publicque devant ladicte porte de la Cité, presens nobles et honnorés seigneurs Ferdinand Loys, seigneur de Chesaulx; Henry de Praroman, seigneur de Cheyre; Guillaume de Lalex; Jaques Beufz; noble Michel de Sainct Cierge; noble Claude de Gallerard; Estienne Bosson; Claude Vuagnière; Claude Pasquier; George du Crest; Pierre Musiquin, tous seigneurs conseillers; les seigneurs cinq banderetz, sçavoir honnorables François Blescheret; Estienne Vuavre; Philippe Guibaulx; Guillaume Trolliet et Bastian Roche; aussi présens noble Claude de Praroman, conseigneur de Rugnens; noble Jehan Loys Luys, conseigneur de Marnans, Bectens, etc.; noble Jehan Réal, seigneur de Morrens; avec plusieurs aultres, tant citoiens, bourgeois et habitans de Lausanne que estrangiers; et moy Bernard Ruffy, secrétaire du conseil, assistans ès choses prédictes.
Bernardus Ruffy.
Conseil.
1564. 5 octobre. — Conseil novel, ouz premier, après les élections. Le jeudi cinq jour d’octobre l’an de grâce aiant /210/ cours mil cinq cens soixante et quattre adsistarent en conseilz, les nobles, honnorables et prudentz seigneurs conselliers de Lausanne, dictz les seigneurs vingtz et quattre du Conseilz soubnommés, esleus novellement et dernièrement le dimenche avant le jour dictz feste Nativité Vierge Marie, passé dernièrement et prochainement. Asçavoir : Noble Francois Seignyeulx, seigneur de Vufflens le chastel, de Viveys et laz Tour, seigneur bourguemaistre de Lausanne; noble Ferdinand Loys, seigneur de Chesaulx; noble Henry de Praroman, seigneur de Cheire; honnorables Loys d’Yverdon; Guillaume de Lalex; seigneur Jaques Boufz; Jo. Gumoens; Estienne Gaudin; noble Claude d’Arnex, seigneur de Sainctz Martin; Estienne Bosson; noble Claude Gallerard; Johan Blan; François Blescheret, banderet de Burg; Estienne Wavre, banderet de laz Cité; noble Michel Sainct Cierge, seigneur boursier de ville; Claude Vuanière George du Crest; Claude Sonney; Claude Sudal; François Gignilliat; Pierre Musiquin; Claude Secrestan; Johan Panit; Philippe Guybaud, banderet du Pont; Guillaume Trolliet, banderet de laz Palud; Sebastian Rosche, banderet de Sainct Laurens; Michel Ruffi, gros saultier; Bernard Ruffi, secrétaire; Petermand Pivard, substitué. Lesquieulx seigneurs de conseiz ont tous faictz le serement à ce resquis et ordonné.
Journée et traité de Lausanne.
1564. 14 septembre. — Est ordonné d’achepter des lans pour reffaire le planchy du grand poyle de la maison de ville; semblablement de faire six cocasses et reffaire les aultres, quelles se poyeront par le recepveur de S. François. /211/ Aussi est ordonné de faire à faire environ trente petit coussins pour le service des dictz seigneurs à tenir en leur maison de ville, et se servant tant pour la prochaine journée se debvoir tenir en ceste ville par les seigneurs ambassadeurs de noz princes et souverains de Berne que du duc de Savoye.
Le Conseil s’occupe des préparatifs pour recevoir les diplomates qui doivent sieger à Lausanne. Les comptes de la ville contiennent très peu d’indications sur les dépenses faictes à ce sujet. Pour n’y pas revenir je grouperai les articles épars des comptes que j’ai pu trouver :
« Item, a délivré à Pierre Mathiot, aultrement du Croux, de Fribourg, pour avoir faict deux dozennes de coussins de peau rouge pour le poile du conseil, marché faict avec luy par n. Henry de Praroman à quinze sol le coussin et douze solz pour ses despens par chemin dempuis Fribourg, venant remply lesd. coussins, oultre les despens par luy faictz en remplissant lesd. coussins XXXI flor.
» Item, à Jehan Bochuz pour l’achept du grand tapis de drap vert, contenant trois aulnes, pour la table du grand poyle de la maison de ville de la Palud XV flor.
» Item, délivré à Aymé Grec, officier, pour sa poennes de deux voyages, allant par commandement de messeigneurs, querre des tapisseries de Madame de Bavoye, emprumptées pour tapisser les poëles de la maison de ville de la Palud, causant la journée en ceste cité seroit estre establie entre noz redoubtés princes de Berne et l’altesse du duc de Savoye. Et pour ce audit officier deux florins, aussi pour le vin délivré par commandement aux serviteurs de lad. dame estans venus querre lesd. tapisseries III flor. VIII sol.
» Item, à maistre François Prahin hoste, pour dispences en sa taverne faictes et vin fourny le jour qu’on dressat l’artillerie sus Montbenon pour la récréation de noz redoubtés seigneurs de /212/ Berne, des seigneurs juges des Ligues et des ambassadeurs de Savoye, tenans journée en ceste ville VII flor. Xl sol. »
Sans date. — Nos seigneurs de Lausanne ont receu lettres de noz redoubtés princes de Berne en datte du Xe de septembre 1564, par lesquelles ont adverty estre mis ordre que les hostes fassent provision de victuailles et d’aultres choses nécessaires et requises, causant la journée par leurs excellences establie avec le commis du seigneur duc de Savoye icy à Lausanne, pour illecq avec l’ayde de Dieu et des seigneurs médiateurs de leurs très chers alliés des onze Cantons neutres deffinir les différens entre eulx nosdictz souverains seigneurs de Berne et l’altesse pendans indécis, lesquelz seigneurs médiateurs et les délégués de nozdictz souverains seigneurs et ceulx du seigneur duc de Savoye se trouveront au giste en ceste ville sus le XXIIe jour du prochain moys d’octobre au soir.
19 octobre. — Suyvant la journée se debvoir tenir en ceste ville entre noz redoubtés princes de Berne et l’altesse du duc de Savoye, et à la sepmaine prochaine, a esté ordonné tenir deux hommes au cloché de Sainct François pour la garde du feu, tant de jour que de nuict. Plus, l’on ranforcera de quatre hommes au guex de la ville pour tenir compagnie aux guex de la ville par chesque bannière, dont les deux seront pour veiller devant la mynuict et aultres deux après la mynuict. Item, advertir les guex qui seront au clochier de Sainct François, s’ils appercevuent quelque feu en la ville de dangier, doibgent donner signe pour le faire entendre aux guex du grand temple par ung coup de son de la cloche dudict Sainct François.
A esté aussi ordonner faire visitation de toutes les /213/ cheminées des hostes et aultres logeans en cestedicte journée, pour les faire tenir nectes. Item, a esté ordonné de envoyer aux ambassadeurs de noz redoubtés princes, savoir le jour de leur venue et le jour de leur départ, chesque repas six semesses de ville; et aultres seigneurs ambassadeurs des Cantons quatre cocasses à leur premier repas de leur venue en ceste ville, et aultre quatre cocasses le dernier repas de leur retour. Item, cependant que ladicte journée se tiendra en ceste dicte ville, sera donné aux officiers, pour leurs poines et se tenir prest à ce à quoy on les employera, à chescun trois solz par jour. Item, faire visiter tous les hostes pour les advertir d’estre fournis de bon vin vyeulx et parer les chambres honnestement; aussi les estables. Item, est ordonné de tapisser le grand poyle de tapisseries 1.
22 octobre. — Le dimenche XXIIe jour d’octobre 1564, causant la journée establie en ceste ville entre noz redoubtés princes de Berne et le duc de Savoye, arrivarent ledict jour au giste, savoir de la part de nosdictz princes, les nobles, magnifficques, prudens seigneurs Hanns Frantz Negelly, seigneur advoyer; Hanns Steiguer, aussi seigneur advoyer; Hanns Rudolff de Graffenried, seigneur bourcier du pays ancien desdictz princes; Jérosme Manuel, seigneur bourcier du pays conquis; Ambrosius Imhoff et monseigneur le banderet Wingart, tous du conseil privé de Berne; egrégies Josué Tilman et Samuel Zechinden, leurs secrétaires. Aussi arrivarent les ambassadeurs du duc de Savoye, entre lesquelz estoient monsr du /214/ Bochet et monsr de Montfort. Et ce pour journoyer causant la querelle prétendue par ledict duc de Savoye sus le pays conquis par nosdictz princes de Berne, dont pour conclusion de la paciffication et traicté d’accord fut arrestée la journée estre tenue en ceste ville de Lausanne. En laquelle aussi arrivarent ledict jour, pour moyenneurs et arbitres, scavoir des seigneurs des Cantons cy après nommés : premier monseigneur l’advoyer de Zurich, esleu pour présider; et pour superarbitres ung seigneur de Basle, avec le secrétaire; aussi de Lucerne, le seigneur advoyer; de Ury, Claris, Schwitz, Underwald, Zug et Saleurre et deux aultres cantons, de chesque lieu ung seigneur député.
Ledict dimenche au soir, estans mes honnorés seigneurs assemblés environ les neufz heures du soir en la maison de ville de la Palud, ont fut ordonné de serrer toutz les tiltres qu’estoient espars en leur crocte de ladicte maison et les mectre ès armoires qui y sont et les enclorre par bons loquetz, pour en ayder de ladicte crocte les seigneurs ambassadeurs de Genève, n’ayant en ladicte maison aultre lieu plus commode pour eulx qu’en ladicte crocte; pour ce qu’au grand poyle des seigneurs de conseil estoient les seigneurs arbitres, au poyle de la cour des seigneurs soixante estoit pour noz redoubtés seigneurs de Berne, en la grand sale les seigneurs ambassadeurs de Savoye, et ladicte crocte pour les seigneurs ambassadeurs de Genève.
Lesquelz seigneurs commencèrent à traicter le lundy suyvant, XXIIIe du moys, et a duré ladicte journée dempuis ledict lundy, tant pour l’affaire envers lesdicz seigneurs de Berne que concernant le faict entre la ville de Genève, jusques au mardy, dernier jour dudict moys; auquel jour /215/ estans bien tard, les seigneurs juges et arbitres assemblés, se fit conclusion quant à l’endroict de noz redoubtés seigneurs de Berne, quelz seigneurs juges et arbitres départirent pour se retirer le lendemain, que fut mecredy premier jour de novembre. Le jeudy XXVIe dudict mois d’octobre 1564, mes honnorés seigneurs, estans assemblés conclurent faire à faire une porte en la maison des hoirs feu seigneur Pierre Ménestrey, en la muraille de ladicte maison, joignant la paroy du poyle des seigneurs soixante, pour y entrer par la cuisine près dudict poyle. Et ce pour accommoder, causant le banquet commun de festin prétendu faire par les seigneurs ambassadeurs de Berne aux seigneurs des Ligues, juges et arbitres, aux ambassadeurs tant de Savoye que de Genève, dimenche prochain XXIXe dudict moys; et ce suyvant le bon vouloir desdictz seigneurs de faire ledict festin en ladicte maison de ville, lieu plus commode que aultre part.