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Mémoires et documents de la Société d’histoire de la Suisse romande

Edition numérique

Frédéric de GINGINS-LA SARRAZ

Notices et additions aux Episodes de la Guerre de Bourgogne

Dans MDR, 1849, tome VIII, Mélanges, p. 465-510

© 2020 Société d’histoire de la Suisse romande

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NOTICES ET ADDITIONS AUX ÉPISODES DE LA GUERRE DE BOURGOGNE.

 

AU CHAPITRE 1er.

Quoique le pays de Vaud, apanage d’une branche cadette de la maison de Savoie, ait été gouverné dès le XIIIe siècle par des baillis, ce n’est, cependant, que depuis la réunion de cet apanage aux états de la branche aînée en 1359, que ce pays a formé un bailliage régulier, dont l’administration civile et politique fut assimilée en tout point à celle des autres provinces de la monarchie savoisienne. Les règles de cette administration furent fixées de nouveau d’une manière uniforme par les statuts promulgués en 1430, sous le règne d’Amédé VIII, premier duc de Savoie, (Statuta Sabaudiæ, impressa Gebennis ao M.D.XIII, in-4o, goth.) Ces statuts réservaient toutefois les immunités et franchises de la patrie de Vaud, auxquelles, dit le prince: « il n’entendait nullement déroger, ce pays étant régi par des coutumes particulières non écrites. » (Ibidem in prœmio.)

Ce nouveau bailliage (ballivia Vaudi) embrassait dans son ressort toute la terre romande, à l'exception du comté de Gruyères, et des paroisses formant l'ancien territoire de la ville de Fribourg. Les terres de l’évêché de Lausanne et la seigneurie bourguignonne d’Orbe formaient des enclaves régies par des coutumes particulières. Le bailliage de Vaud /466/ était séparé du bailliage de Chablais, au levant, par la Veveyse, et de celui de Gex, au couchant, par la Versoye.

Quoique l’autorité du bailli de Vaud (ballivus Vaudi) s'étendit sur toutes les villes et sur tous les districts de ce pays en ce qui concernait le maintien de la paix et de l’ordre public, l’exécution des édits souverains, et la convocation des assemblées des bannerets, des vassaux et des députés des villes et des communes, néanmoins l’étendue de ses attributions était variable d’un endroit à l’autre. Dans les villes son autorité était limitée par des chartes de franchises et des immunités locales, et dans les campagnes par les prérogatives des seigneurs ecclésiastiques ou laïques, ayant leur propre juridiction (juridictionem habentes). Parmi ces derniers, les seigneurs que les statuts du duc Amédé qualifient de barons et de bannerets, (barones et bannereti), tenaient le premier rang. Ils avaient le privilége de lever bannière et de commander leurs propres vassaux sous l’étendard du prince ou du bailli de Vaud. Ils jouissaient des droits de haute juridiction civile et criminelle (merum imperium et omnimodam juridictionem) dans leurs domaines respectifs, qu’ils faisaient administrer par leurs propres officiers, (Statuta Sabaudiæ, lib. III, cap. 1). Dans les districts ou mandements seigneuriaux de cette première catégorie, le prince ne possédait que les attributs de la souveraineté et du ressort (superioritas et ressortum). Ces attributs consistaient principalement dans le droit de se faire suivre à la guerre par le ban et l’arrière-ban des vassaux, des barons et des bannerets, d’occuper leurs châteaux et d’y mettre garnison en temps de guerre, de lever des aides ou subsides extraordinaires dans les cas réservés par les actes d’investiture /467/ ou les coutumes féodales, et enfin, de prononcer définitivement par voie d’appel, sur tous les jugements rendus, en première instance, par la cour du bailli de Vaud, siégeant à Moudon, devant laquelle toutes les causes démenées entre les bannerets ou entre les ressortissants de divers seigneurs ecclésiastiques ou laïques, devaient se débattre avant de pouvoir être portées devant le conseil suprême du prince, résidant à Chambéry. (Voir les actes cités à l’appui dans le recueil de M. le baron Grenus, intitulé: Documents du pays de Vaud, introduct. p. XXI.)

Les barons et les seigneurs bannerets étaient tenus en outre de paraître en personne, ou par procureurs, aux assemblées générales des vassaux et notables, et des députés des villes de la patrie de Vaud, convoquées par le bailli de Vaud, soit à Moudon, soit ailleurs. (Voir les documents ci-dessus, introduct. p. XXIV, § 23.)

Les territoires et mandements appartenant sans intermédiaire (immédiate) au domaine (patrimonium) de la couronne de Savoie, ou dont les possesseurs appelés vassaux (vassali) n’avaient sur leurs terres qu’une juridiction d’un ou plusieurs degrés inférieurs (mediam vel bassam juridictionem habentes), formaient la deuxième catégorie des districts renfermés dans le ressort du bailliage de Vaud. Ces districts, groupés autour d’une ville, d’un bourg, ou d'un donjon féodal, dont ils prirent leur dénomination, devinrent autant de petits ressorts administratifs, appelés châtellenies (castellaniæ), dont chacune formait une subdivision du bailliage. La réunion de ces châtellenies composait ce qu’on appelait dans son sens propre et plus restreint, la baronnie de Vaud (baronia Vaudi), tandis que le titre de seigneurie ou de /468/ patrie de Vaud (patria Vaudi) s’appliquait à la généralité du pays.

Dans ces châtellenies, administrées par des châtelains (castellani) que le prince nommait pour une ou plusieurs années, le bailli et le procureur de Vaud (procurator Vaudi) exerçaient dans toute leur plénitude les pouvoirs qui leur étaient attribués par les statuts. Ceux du procureur de Vaud consistaient principalement à soutenir les droits du souverain au civil comme au criminel, soit devant le châtelain, juge de district, soit devant le bailli, juge d’appel, soit enfin devant le conseil du souverain, qui statuait, en dernier ressort, sur les recours en grâce et sur toutes les sentences rendues par la cour du bailli de Vaud.

Lorsque le duc Louis de Savoie investit en 1455 son fils aîné Amédé, prince de Piémont, des pays et seigneuries de Bresse et de Vaud, il lui céda en même temps « les hommages et serments de féauté » qui lui étaient dus par les barons et les bannerets de ces deux pays, sur lesquels il ne se réserva que « la souveraineté. » (Apanage d’Amédé, prince de Piémont, Guichenon, Histoire de Savoie, T. II, pr. p. 404.) Quoique cette espèce de médiatisation fût une dérogation à leur dignité (honores), néanmoins les barons et les seigneurs bannerets du pays de Vaud prêtèrent hommage au prince de Piémont, et le reconnurent sans difficulté comme leur suzerain immédiat, vu que ce prince était, en même temps, le successeur présomptif du duc dans la souveraineté de l’Etat. (Prise de possession du pays de Vaud, au nom d’Amédé, prince de Piémont, en date du 8 mars 1456. Documents du pays de Vaud, no 42, p. 77-87.) /469/

La constitution d’un apanage en faveur de Jacques de Savoie ne paraît pas avoir eu lieu dans des conditions aussi larges, ainsi qu’on l’a déjà fait entendre ci-devant au chapitre 1er des Episodes. Premièrement la charte de l’année 1467 par laquelle le duc Amédé investit ce prince du comté de Romont et de la baronnie de Vaud, ne comprend sous cette dernière dénomination que huit châtellenies, soit la moindre partie de cette baronnie qui en comptait dix-sept. (Voir ci-après le tableau de la baronnie de Vaud.) Il suit de là que le souverain se réserva les dix châtellenies restantes, où le duc Amédé continua d’exercer l’autorité directe, après comme avant cette première inféodation, soit par lui-même, soit par l’intermédiaire du bailli de Vaud. On citera entr’autres preuves plusieurs actes de l’an 1469, émanant de ce souverain, qui concernent Morat, ville et châtellenie, qui ne fut réunie à l’apanage du comte de Romont que plus tard, c’est-à-dire en 1471. (Voir Engelhardt, Chronique de Morat, p. 206-207.)

Il est vrai qu’à cette époque plusieurs terres de la baronnie de Vaud se trouvaient chargées d’hypothèques ou même totalement engagées à des tiers; par exemple, Montagny-les-Monts et Cudrefin étaient hypothéqués à la ville de Fribourg; (charte du duc Amédé, datée de Pignerol, 22 avril 1467); les terres de Corbières et de Grandcour étaient engagées au comte de Gruyères, (de Rodt, Hist. des comtes de Gruyères, p. 299); et celle de Belmont, à Hugues de Châlons, seigneur d’Orbe et d’Echallens. Mais ces terres ne cessèrent point pour cela de faire partie de la baronnie de Vaud, les ducs de Savoie s’étant réservé la seigneurie /470/ directe sur les unes, la supériorité ou le ressort sur les autres, et sur toutes le droit perpétuel de rachat.

C’est en vertu de ce droit que la duchesse Yolande, femme du duc Amédé, opéra en 1470 le rachat de la châtellenie de Belmont, qui fit retour à la baronnie de Vaud, après la mort de cette princesse en 1478. Quant à la châtellenie de Surpierre, elle faisait jadis partie des biens de la maison des sires de Cossonay, dont les héritiers l’avaient engagée aux sires de Challant, sous clause de rachat, (voir les sires de Cossonay par M. Louis de Charrière, p. 120). Des sires de Challant, Surpierre passa à la maison de Glérens, en Bresse, contre laquelle Jacques de Savoie exerça en 1472 la faculté de racheter cette terre importante, faculté qui appartenait alors à la maison de Savoie, comme ayant succédé aux droits des sires de Cossonay. (Divers titres concernant la seigneurie de Surpierre existant naguères aux archives du château de L'Isle.)

On a vu (chap. 1er) comment, par suite des traités de Montmélian et de Chambéry, l’apanage de Jacques de Savoie, comte de Romont, fut augmenté de manière à embrasser dès lors la totalité des châtellenies composant la baronnie de Vaud, à l’exception de celle de Belmont, ce qui en porta le nombre à dix-sept. (voir le tableau ci-après).

Suivant les statuts du duc Amédé VIII, tous les châtelains de la baronnie étaient subordonnés à l’autorité du bailli de Vaud pour tous les actes concernant l'administration civile et financière, ainsi que pour la défense des places et des châteaux confiée à leur garde. (Statuta Sabaudiæ, lib. II, cap. 74.) Mais lorsque cette baronnie devint l’apanage du comte de Romont, ce régime éprouva diverses modifications importantes. /471/ Ce prince ayant créé un capitaine-général, (locumtenentis armorum), et un gouverneur particulier (gubernator Vaudi), les châtelains de cette baronnie furent soumis, pour le militaire, au capitaine-général du prince apanagé, et au gouverneur de Vaud pour les matières concernant l'administration civile et financière de leurs districts respectifs. (Voir divers actes concernant la ville et la châtellenie de Cossonay. Chronique de Cossonay, par M. Louis de Charrière, p. 88 et suiv.)

Les pouvoirs exercés par le bailli de Vaud dans les terres de la baronnie apanagère de même nom se trouvèrent, par le fait, réduits au jugement en première instance des procès civils et criminels concernant les sujets de cette baronnie et ceux d’une autre jndicature. Quant aux procès débattus entre divers vassaux de la baronnie, ils continuèrent à être portés à la cour de Moudon, présidée par le bailli, et ensuite, par voie d’appel, au conseil du baron de Vaud, siégeant à Romont ou à Morges, lequel conseil, en l’absence du prince, était présidé ou par messire Pierre de Bionnens, licencié es-lois ou par le gouverneur particulier de la baronnie. Voir une charte du 4 février 1475, souscrite par P. de Bionnens, præside Vaudi. (Registre d'Yverdon, T. II, aux arch. canton.) et le procès démené (1475) entre Fr. de Glérens, seigneur de L’Isle, et la ville de Cossonay. (Chronique de Cossonay, p. 90.) Il suit de là que le bailli général de Vaud (ballivus Vaudi), de même que le procureur de Vaud (procurator Vaudi), étaient en même temps officiers du duc souverain et du prince apanagé; ce qui explique la formule suivante dont le comte de Romont se servait dans les chartes et mandements qui émanent de lui: « Mandantes gubernatori, /472/ ballivo et procuratori nostris Vaudi, etc. » (Franchises de Cossonay, du 10 janv. 1468. Chronique de Cossonay, p. 386.)

Le gouverneur de la baronnie de Vaud était en même temps trésorier-général (thesaurarius), et président de la chambre des comptes du prince apanagé. (Charte du comte de Romont du 14 janvier 1473. Grenus, l. c., no 49, p. 100.) C’est à lui que les châtelains rendaient annuellement compte des recettes et des dépenses de leur châtellenie. Mais ces comptes annuels devaient néanmoins être soumis au contrôle de la chambre des comptes de Savoie, à Chambéry, afin que cette haute chambre fût en mesure de dénoncer au souverain toutes les exactions ou levées illégales de deniers, que ses officiers se seraient permises dans leurs châtellenies. (Voir l’investiture de l’année 1455 dans les preuves de Guichenon, T. II, p. 404.)

Ces éclaircissements suffisent pour montrer que lors même que la patrie romande obéissait à deux souverains, dont l’un était à peine subordonné à l’autre dans la hiérarchie dynastique, et dont chacun avait ses officiers et ses vassaux immédiats, cette concurrence n’engendrait cependant aucune confusion, comme on serait tenté de le supposer au premier abord.


AUX CHAPITRES IIIe, VIe ET Xe.

Les comptes de la châtellenie de Gex de la seconde moitié du XVe siècle fournissent quelques renseignements précieux /473/ sur le séjour de la régente de Savoie à Gex, et sur l'enlèvement de cette princesse après le désastre de Morat; ils complètent ceux que nous avons donnés sur ce curieux épisode de la guerre de Bourgogne. Nous en devons la communication à l’obligeance de M. l’avocat Poncet, membre de la Société d’histoire de la Suisse romande. Ces renseignements nous étant parvenus depuis l’impression des feuilles où ils auraient dû trouver place, nous avons pris le parti de les réunir dans une note supplémentaire.

Quand la guerre de Bourgogne eut éclaté (octobre 1474), le pays de Gex (baronia Gaii) se trouva menacé d’une double invasion; d’un côté, par les Suisses qui s’étaient rendus maîtres de plusieurs passages dans le Jura, entr’autres de Jougne et de Pontarlier, et, de l’autre, par le comte de Baugé, Philippe de Savoie, qui, dans cette guerre, tint constamment le parti des Français. Aux mois d’avril et de mai 1475, une attaque simultanée fut même concertée entre les Bernois et le comte de Baugé, qui était soutenu par un corps de troupes que Louis XI avait mises à sa disposition. (Lettre de D. Antonio de Aplano au duc de Milan, en date de Montcalier, 13 mai 1475.)

Ce plan fut déjoué par la vigilance de messire Amédé de Gingins, sire de Belmont, que la régente de Savoie avait investi du commandement militaire dans le bailliage de Gex. Muni des pleins-pouvoirs des princes de Savoie, Jean-Louis, évêque de Genève, et du comte de Genevois, qui présidaient le conseil de régence, siégeant à Chambéry, (en date du 26 juin 1475), le capitaine-général, accompagné de Jean de Sergy, chevalier, se rendit à Gex, et de concert avec noble Antoine de Pougny, lieutenant de messire Réné Bonnivard, seigneur de Barre, châtelain de Gex, toutes les /474/ mesures furent prises pour la défense du pays, soit en faisant réparer et augmenter les fortifications du château fort, soit en établissant des avant-postes pour garder les passages des montagnes tant du côté de Mijoux, qu’au pas de la Cluse, du côté de la Bresse, (du 10 juillet au 18 septembre). (Comptes de la châtellenie de Gex pour les années 1475, 1476.)

Le procureur du bailliage de Gex, Mermet Michaudi, ainsi que le sergent d’armes, Guillaume Nycodi, firent plusieurs voyages au pays de Vaud pour se concerter avec les autorités de ce pays sur les mesures à prendre contre les entreprises des Allemands. Enfin, lorsque ceux-ci eurent déclaré la guerre au comte de Romont et envahi brusquement le pays-romand, les sires de Viry et de Belmont, le chevalier Jean de Sergy, Claude de Pettigny, Claude de Greilly et d’autres gentilshommes de la même baronnie, se réunirent au château de Gex avec le vice-châtelain, afin de savoir ce qu’il y avait à faire pour préserver le pays des calamités d’une invasion pareille, (du 18 au 25 octobre 1475). On résolut, en cas d’attaque, d’abandonner la ville et de se retrancher dans la défense du château dont les hautes murailles, flanquées de quatre tours carrées et d’un donjon arrondi, étaient séparées de la ville par des fossés avec pont-levis. On envoya en même temps le procureur Michaudi au camp des Bernois qui s’étaient arrêtés à Morges, pour savoir d’eux si leur intention était d’étendre les hostilités jusques sur les terres de son altesse le duc Philibert, auquel appartenait la baronnie de Gex, (mêmes comptes). Il est vraisemblable que cet envoyé revint avec une sauvegarde qui préserva cette baronnie de l’occupation allemande. /475/

Après la retraite de l'ennemi, le sire de Belmont et les milices du pays de Gex furent appelés à la défense du Chablais, contre les Hauts-Valaisans, (voir la bataille de la Planta, 13 novembre 1475, au chap. III des Episodes), et le pays de Gex, dégarni de troupes, fut exposé à de nouveaux dangers après la déroute de Grandson. La régente de Savoie qui venait d’arriver à Genève, y pourvut en envoyant dans ce quartier Philibert de Compeys, sire de Chapelle, avec un certain nombre de gendarmes et d’archers piémontais pour renforcer la garnison du château de Gex. (Mars 1476, comptes de Pierre Bonnivard, seigneur de Barre, châtelain de Gex, p. 1481, 1481.)

Lorsque le duc de Bourgogne eut levé son camp de Lausanne pour aller mettre le siége devant Morat, la régente de Savoie se retira au château de Gex, (voir au chap. VI des Episodes), où elle arriva le jeudi, 30e jour de mai (1476), avec toute sa suite; « qua die penultima mensis maii, illustr. Domina nostra Ducissa Sabaudiæ in dicto castro Gaii intravit. » (Comptes de Pierre Bonnivard, seigneur de Barre, châtelain de Gex, pour 1476 et 1477.)

Les comptes de la châtellenie de Gex, pour cette même année 1476, confirment les renseignements que nous avons donnés au chap. X, sur la date précise de l’enlèvement de la duchesse de Savoie par ordre de Charles-le-Hardi, en ces termes: « Et stetit (Illustrissima domina Ducissa Sabaudiæ in Castro Gaii) usque ad diem vicesimam septimam mensis Junii, qua die ducissa recessit a castro Gaii, » ( mêmes comptes). Nous devons ajouter ici que la première découverte de cette date importante appartient à notre savant et laborieux confrère, M. le docteur Chaponière, de Genève, /476/ qui, trouvant ces renseignements consignés à la marge d’un ancien registre des archives de Genève, les avait communiqués, par l'intermédiaire de M. Poncet à M. de la Teyssonnière, auteur des Recherches historiques sur le département de l’Ain que nous avons cité en son lieu.

Les comptes de la même châtellenie pour les années 1480 et 1481, en revenant sur ce scandaleux enlèvement, donnent de nouveaux éclaircissements sur la part qu’un simple paysan de Prégny, près de Genève, nommé Jean Bonduz, prit à la délivrance du jeune duc Philibert, qu’il cacha dans les taillis épais bordant autrefois la route entre le Grand-Sacconnex et Fernex. Ce paysan fut plus tard récompensé de sa fidélité par la duchesse Yolande, mère du prince, qui l’affranchit de la servitude de la taille, et lui assura une pension viagère de 10 florins (équivalants à environ 300 francs de notre monnaie actuelle). A ce sujet, voici ce qu’on lit dans ces comptes: « Libravit Johanni Bonduz de Prignins, cui Illustrissima nostra Ducissa, nomine tutricis Di nostri Philiberti Ducis Sabaudiæ, (causa) auxilium personaliter prestitum per ipsum, pro custodia tempore noctis facta, pro servatione persone dicti Di nostri Ducis Philiberti, dum ipse dominus per nonnullos (proh dolor! ) injunotus, cum eadem domina nostra transduci temptaretur hora serotina, die vicesima mensis Junii nuper lapsi ad partes Burgundiæ. Qui Johannes partim causa esse dicitur obviandi ne idem dominus noster dux in manibus talibus sicerum (sicarium?) vi ducere succumberet, unde censetur esse venerandus. 10 florenos pensionem. »

L’enlèvement de la duchesse Yolande ayant fait passer l'autorité aux mains de Jean-Louis de Savoie, évêque de /477/ Genève, celui-ci fit occuper le château de Gex, (6 août 1476), par messire Pierre de Montfalcon, qu’il venait de nommer capitaine et gouverneur de ce château et du pays de Gex, par lettres datées du 3 du même mois. (Littera predicti Di Ludovici [Episcopi Geben.] de tertia die mensis augusti 1476. Ibidem.)

Il paraît qu’après son retour en Savoie, la duchesse Yolande investie de nouveau du gouvernement de l’Etat, séjourna au château de Gex du 7 au 16 mars 1477. (Ibid.) Ce fut seulement pendant le dernier séjour de cette princesse dans ce château, que messire Amédé de Gingins, sire de Belmont, et Jean de Sergy, chevalier, purent être remboursés des frais et dépens qui leur étaient dus pour avoir pourvu à la défense de la baronnie de Gex pendant la campagne de 1475: « Libravit Domino Johanni de Sergier et nobili et potenti Amedeo de Gingins, domino Bellimontis, de mandato et ordinatione domini presidentis et magistrorum computorum Domini, quibus per dominum debebantur causis infra scriptis: Debentur per Dominum ducem Sabaudiæ ... Amedeo de Gingins D. Bellimontis, et Johanni de Sergiaco, militi, ducalibus, ad has partes (Gaii), pro tuitione et defensione patriæ, deputatis commissariis, pro expensis octo personnarum et totidem equitum; videlicet, Claudii de Pittigniaco, Claudii de Grillier, et sex servitores, commissarios ad montes Medii Jurie (Mijoux), et alios circumvicinos passus ad visitandum, ne inimicis domus ducalis diversarum patriarum inhibiti transierent, et passus novos edificarent. 10 florenos. »

(Comptes de Pierre Bonnivard, seigneur de Barre, châtelain de Gex, pour 1476-1477.)


/478/

AU CHAPITRE III.

Rançon de la ville de Lausanne.

On a vu que cette ville dut payer aux Bernois, aux Fribourgeois et à leurs alliés une double rançon pour se racheter de l’incendie et du pillage dont elle était menacée. La première, imposée par la capitulation faite à Orbe, le 24 octobre 1475, fut de deux mille gouldes ou florins du Rhin, équivalant à 2400 livres lausannoises. Il paraît que cette contribution forcée ne concernait que la ville inférieure qui formait alors une communauté séparée de celle de la Cité, ou ville haute. Par contre, la rançon de 7000 gouldes fixée par la capitulation de Morges du 30 octobre suivant, fut frappée sur la Cité et sur la totalité des terres de l’évêque et du chapitre de Lausanne. La pièce, dont nous donnons ci-joint un extrait, ainsi qu’une quittance donnée aux Bernois par les autres cantons, en date du samedi avant le dimanche des Rameaux 1478, (Hall. Collect. msc. à la bibl. de Berne) attestant que ces derniers avaient reçu leur part aux 2000 gouldes ci-dessus, prouve que cette première contribution fut immédiatement acquittée. Quant à la rançon de 7000 gouldes imposée à la Cité et au territoire de l’Eglise, on n’a trouvé aucune trace de la manière dont elle fut payée aux Confédérés ou répartie sur les terres de l’évêché.

Pour acquitter la rançon qui concernait la ville inférieure, les magistrats firent un appel au patriotisme des citoyens de la ville, de toute condition. Ceux-ci y répondirent en apportant leur argenterie et les valeurs monnayées qu’ils /479/ possédaient, lesquelles furent remises en bloc au vainqueur, qui voulut bien s’en contenter et épargner la ville.

On trouvera ici le résumé du document qui constate les noms des contribuables et les valeurs fournies par chacun d’eux. La totalité de ces cotisations s’élève à la somme de 2171 livres lausannoises, soit à 3618 florins, 4 sols de Savoie, petit poids, formant un peu moins que la contribution de guerre payée aux Allemands, le solde ayant été fourni par la bourse de la ville.

Pour indemniser les contribuables de cet emprunt, la ville leur engagea, jusqu’au remboursement du capital, une portion de ses revenus, à raison d’un sol par livre, soit au taux de 5 % d’intérêt, et remit à chacun d’eux une obligation rédigée en forme de cession ou de vente à reméré.

(Relevé de la copie des registres de la ville inférieure de Lausanne, T. II, p. 166-176.)

liste nominative

des nobles, citoyens et bourgeois de la ville inférieure de Lausanne (soit les 4 bannières de Bourg, du Pont, de la Palud et Saint-Laurent), qui ont contribué au payement de la rançon imposée à la dite ville par les Bernois, les Fribourgeois et leurs alliés.

Nous Guillaume de Chabie et Jean Grant, clerc, bourgeois de Lausanne, en qualité de prieurs, syndics, recteurs et gouverneurs modernes de la communauté de la ville /480/ inférieure de Lausanne, faisons savoir à tous: que ayant convoqué le peuple, d'après l'avis du vénérable conseil ordinaire de la communauté, dans la maison de la Halle de la Palud, par la voix du crieur public, comme il est d’usage lorsqu’il s’agit de traiter des intérêts de la communauté, d’éviter un danger imminent, ou de subir un malheur avec le moins de perte possible; pour nous et nos successeurs dans le gouvernement de la dite communauté, d’après l'approbation, le conseil, la volonté et l’ordre des vénérables conseillers du conseil ordinaire de la communauté de la ville inférieure et de tout le peuple qui, à l'unanimité, a consenti à ce qu’ainsi fut fait, nous avons vendu et concédé, vendons et concédons, pour nous et nos successeurs, à teneur des présentes à Provide et généreux Arthaud Loys, citoyen et bourgeois de Lausanne, sept livres quatre sols, monnaie de Lausanne, de rente annuelle et perpétuelle pour juste et légitime prix de cent quarante-quatre livres, que nous a livrées le dit Arthaud, soit en vaisselle d’argent fin, marquée et de bon poids, soit en bonne monnaie, bien comptée, et cela pour l’utilité de la dite communauté, soit pour le payement des charges contractées à l’égard des seigneurs de Berne et de Fribourg et de leurs alliés, pour la préservation de la ville et communauté de Lausanne, et des terres de l'église de Lausanne, lors de l'invasion de la patrie de Vaud. Ont signé les membres du conseil ordinaire. Jean Blancheti, licencié ès-lois, Henri Souttens, Louis Gimelli, Jacques Rollier, Antoine Morelli, Pierre de Soucens, Jean de Lalex, Jean Gubet, Jacques Choux, Guido Vincent, Henri Sacrestani, Jean Floret, Pierre Blecheret, Victor Gauterii, Jacques Gauterii, Jean Perodeti, Girard Bosson, Etienne /481/ Movilliodi, Jean Borgeis, Pierre de Cresto, Jordanus Penard et Antoine Linquensol.

Donné dans la maison de la dite communauté, le 24e jour du mois de décembre de l’an 1475.

(Contre-signé)Jean Griset


 

Suit la clause de rachat perpétuel en faveur de la communauté de la ville inférieure de Lausanne.

Suivent les noms des contribuables.

 Livres.
Arthaud Loys144
Pierre Curellat, maréchal de Lausanne48
Anserme de Bonnalaz30
Jacques Rollier32
Antoine Morelli12
Pierre de Soucens80
Jean d’Yverdun62
Victor Gauterii78
Girard de Nanto30
Etienne Gauterii270
Pierre Blecheret50
Jean Renil24
Jean de Fluvio60
Glaudius de Tart30
Guillermus et Berthecus Ravinel60
Nicoletus Ravinel18
Jean Ramus30
Jean Gubet /482/ 30
Marguerite veuve de Pierre Faucoz12
Veuve de Reynaud Gormont40
Vullielmus Malachier20
Jean Fabri6
Berbard du Chastellard120
Glaudius Guerraz, charpentier20
Jean de Lalex12
Henri Souttens60
Guillelmo Chanron12
Armand (Dorerio)10
Jean Bioleis60
La femme de Mermodi Misit11
Louis Gimelli222
Jean Luxuriandi20
Jean Perodeti18
Pierre Veriondi12
Jean Perrin, marchand20
Le seigneur Nycod de Cossonay126
Jacques Vinter, apothicaire9
Jacques Gormont, barbier6
Jacques Choux9
Guido Vincent12
Jean Croserens, (302 flor.)181
Glaudius Brin, (60 sols)3
Pierre Malliet (60 sols)3
Matheus Episcopi (sic)6
Jean Mangin6
Aymonet Rochet (12 sols) et
Ansoz, chapelier (48 sols) /483/ 3
Pierre Fontanaz, (testor)1
Jacques Ronant7
Humbert de Miéville6
Jean Floret30

Suivent les noms des citoyens qui ont contribué à parfaire la somme de cent écus payés au seigneur comte de Romont, pour les dépenses qu’il a faites pour la ville, dans la guerre de Bourgogne, l’an 1476.

Jean Borgesii, apothicaire12
Arthaud Loys44
Jean Vuillie, clerc24
Jean Ministreir24
Jacques Burlat, cordonnier24
Etienne Poget24
Antoine Chouvet, cordonnier12
Perissone veuve de Guido Mermyn28
Girard Devanteir24
Mermet Misit, cordonnier24
François Vaillant45
Clément Curtel, mercier12
Pierre de Vevey, marchand24
Guillaume Daux24
Jacques Floret24
Janin Ministeir, barbier24
Joffred Dochoz, barbier24
Michel Rongier, notaire /484/ 24
Glaudius Gammerez 24
Antoine Seynioux24
Jeannette Patissieriz24
Glaudius Detard, barbier24
Jean d’Yverdon, marchand24

Il paraîtrait suivant le même registre p. 193, qu’après la bataille de Morat (juin 1476), Lausanne fut encore taxée une troisième fois par les Bernois et les Fribourgeois pour obtenir d’eux une sauvegarde pendant l’occupation du pays de Vaud, sauvegarde qui leur aurait coûté 220 florins d’Allemagne ou 440 florins de Savoie. Ceci résulterait d’une procuration donnée par le conseil à Jean Grant, clerc et syndic de la ville inférieure, en date du 2 novembre 1477, à l'effet de poursuivre les paroisses de Lavaux pour le payement de leur quote-part à cette contribution.


AU CHAPITRE XI.

Restitution du Pays de Vaud.

C'est par erreur que nous avons placé au mois de mai la restitution du pays de Vaud à la Savoie; cette restitution eut lieu déjà le 21 février de la même année 1478, à Nyon, avec une certaine solennité. Les plénipotentiaires du jeune duc Philibert et de la régente de Savoie, sa mère, « pro /485/ possessione adipiscenda patriæ et baroniæ Vaudi, » furent messires Humbert de Chevron-Villette, abbé de Tamié et protonotaire apostolique, Antoine Champion, président du sénat de Piémont, et Etienne Paccot.

Après la cérémonie de la prise de possession, les plénipotentiaires (oratores) de Savoie, réunis aux députés des villes du pays-romand dans la maison de noble Jacques Evrard, receveur des péages à Nyon, jurèrent de nouveau, au nom du souverain, le maintien des libertés, franchises et bonnes coutumes écrites et non écrites de la patrie de Vaud en général et de la ville de Nyon en particulier, (franchisias, libertates, usus, consuetudines patriæ Vaudi et loci Nividuni, scriptas et non scriptas.) Les témoins de ce serment furent messires Philibert de Genève, seigneur de Vuillens, et Jean, son frère, protonotaire apostolique, nobles Jean Champion, seigneur de Vauruz, Georges (de Glana) seigneur de Cugy, Pierre de Billens (ancien bailli de Vaud), et Louis Cerjat de Moudon. (Haller, Collect. msc. T. VI, in-4o, p. 92.)


 

Créance Fribourgeoise.

Les sommes d’argent que la maison de Savoie devait aux Fribourgeois tiennent une place assez importante parmi les objets débattus dans le congrès de Fribourg, et cette dette, dont l'origine remontait à l’époque où cette ville se plaça sous la souveraineté de la Savoie, n’a peut-être pas été sans influence sur le parti que les Fribourgeois prirent dans la guerre de Bourgogne. Voici à cet égard quelques renseignements authentiques qui pourront servir à éclaircir cette question. /486/

Par la sentence arbitrale rendue le 16 juillet 1448, à Morat, dans le but de mettre un terme à la guerre suscitée par l’exil volontaire ou forcé de Guillaume d’Avenches, avoyer de Fribourg, et de ses partisans, cette ville avait été condamnée à payer au duc de Savoie pour les frais de la guerre une indemnité de quarante mille gouldes ou florins du Rhin, payables par quarts dans le terme de quatre années, outre quatre mille gouldes de dommages intérêts pour la destruction des châteaux de Villarzel-le-Gibloux et de Montagny-les-Monts qui avaient été incendiés et détruits par les Fribourgeois. (Tschudi, Chr. Hel., T. II, p. 524.) Une partie de cette contribution fut acquittée: 1o Au moyen de la remise et annulation d’une obligation de 10,000 florins du Rhin contractée envers les Fribourgeois par Félix V, pour son couronnement comme pape. (Quittance du duc Louis de Savoie, en date de Genève, 28 octobre 1450. Extraits msc. des archives de Fribourg par Guill. Techtermann, conseiller d’Etat.) 2o Au moyen du payement de 7000 gouldes livrés par eux aux Bernois pour le compte du duc de Savoie. (Quittance de Berne, du 1er avril 1451. Ibidem.)

Fribourg n’ayant pu s’acquitter dans les termes fixés des dividendes restants (23,000 gouldes d’un côté, et 4,000 de l’autre, 27,000 en tout), et ayant de plus négligé de remplir d’autres engagements que lui imposait la sentence de Morat, avait été condamnée par un second jugement rendu sous l’arbitrage de Jean, comte de Fribourg et de Neuchâtel (mars 1450), à payer à la Savoie un nouveau dédommagement de cent mille gouldes. (Voir Guillaume d’Avenches et Ant. de Saliceto, par le curé Girard, 1802, in-12, IIe partie, p. 26 et 28.) /487/

Cette ville se trouvait en outre déchirée par la guerre civile: les campagnards accablés de tailles extraordinaires s'étaient soulevés contre leurs magistrats, tandis que ceux-ci étaient partagés en diverses factions ennemies, dont chacune se disputait le pouvoir et abusait d’une prépondérance momentanée pour proscrire ses rivaux et s’emparer de leurs biens. (Tschachtlan, Chr. de Berne, p. 321-323.) De trois partis, l’un prétendait rester fidèle à ses anciens maîtres, c’est-à-dire à la maison d’Autriche devenue avec le temps suzeraine de cette ville, fille aînée des Zähringen; l’autre voulait se donner à la maison de Savoie qui offrait à son commerce des débouchés immédiats et avantageux. Le troisième, oubliant que Berne s’était rangé parmi les ennemis de Fribourg dans la dernière guerre, penchait pour se placer sous le protectorat de cette république. Telle était la situation des Fribourgeois, lorsque l’Autriche, fatiguée de ces discordes, les abandonna à leur propre sort et renonça formellement à sa suprématie sur leur ville, (ao 1451). (Girard, l. c., IIe partie, p. 13. Berchthold, l. c., T. I, p. 342.)

Par un traité fait l’année précédente, le duc de Savoie et les Bernois s’étaient engagés réciproquement à ne donner séparément aucune assistance aux Fribourgeois. (Tschachtlan, p. 323.) Ceux-ci se voyaient ainsi privés d’appui de tous les côtés par une suite naturelle du mécontentement que leurs propres divisions et les violences auxquelles les partis s’étaient livrés tour à tour inspiraient à tous leurs voisins. (Ibidem, p. 32.)

Dans ces circonstances critiques, l’avoyer, le conseil et la communauté de Fribourg écrivirent le 5 juin 1452 au duc Louis de Savoie, qu’ils s’étaient déterminés à le choisir /488/ pour leur protecteur, et ils le priaient d’envoyer des ambassadeurs pour recevoir leur déclaration. (Girard, l. c., IIe partie, p. 34.) Cet acte de soumission s’accomplit effectivement le samedi 10 juin suivant, avec beaucoup de solennité, dans l'église principale de Fribourg, où cette ville déclara qu’elle se soumettait de plein gré (una voce unanimiter ... se subjiciunt) au duc Louis sans autre réserve que celle du maintien de ses franchises et coutumes. (Ibidem, p. 36.) Le 19 juin, le duc, étant à Seyssel, ratifia cet acte de soumission, confirma aux Fribourgeois leurs franchises et leur fit généreusement la remise des sommes considérables qu’ils lui devaient encore, (savoir 23,000 gouldes pour solde des frais de la guerre stipulés par le traité de Morat, et 100,000 gouldes pour l’amende qu’ils avaient encourue par le jugement du prince de Neuchâtel pour n’avoir pas rempli les conditions que leur imposait ce traité). ( Extraits msc. des arch. de Fribourg de Guillaume Techtermann. Jean de Müller, T. VI, p. 368, no 279.)

Quoique l’acte de soumission de Fribourg fût ainsi absolument consommé, le duc Louis ne s’en tint pas là. Trois jours après, touché du triste tableau que les députés de Fribourg, qui se trouvaient auprès de lui à Seyssel « por ly faire la reverence », lui tracèrent de leur situation, le prince, par un mouvement entièrement libre et spontané, s’engagea à payer à leur ville à titre de secours gratuit, pendant 20 ans une somme annuelle de deux mille deux cents florins du Rhin, (Techtermann, l. c., seconde charte de Louis, duc de Savoie, en date de Seyssel, 21 juin 1452, que J. de Müller confond à tort avec la précédente); ce qui revenait à une somme totale de 44,000 gouldes ou florins d’Allemagne. /489/

Telle est l'origine d’une dette que les Fribourgeois envisagèrent plus tard comme une des conditions de leur soumission à la Savoie, (voir Berchthold, l. c., p. 344), tandis qu’elle avait sa source dans un acte de libéralité de leur nouveau souverain, postérieur à cette soumission. (Girard, l. c. p. 38.)

Cependant les Bernois faisaient mine de vouloir prétendre à la co-régence de Fribourg, et considéraient l’adoption de cette ville par le duc Louis comme un acte contraire aux conventions faites entr’eux pendant la guerre. La question ayant été soumise à un jugement d’arbitres ou de médiateurs réunis à Morat, le 18 décembre 1452, ceux-ci adjugèrent aux Bernois une somme de quinze mille gouldes que le duc dut leur payer pour l’abandon de leurs prétentions à la co-régence de Fribourg, indépendamment des 7000 gouldes qu’ils avaient déjà reçus pour leur part aux frais de la guerre. (Tschaschtlan, l. c., p. 323. Tillier, histoire de Berne, T. II, p. 138.) Cet accommodement fut accepté par les Fribourgeois, le 24 janvier 1453, et ratifié par le duc de Savoie, à Genève, le 29 du même mois. (Ibidem.)

Les deux premiers dividendes promis à la ville de Fribourg, soit 4,400 florins du Rhin, furent payés (ao 1454), aux députés de cette ville, à Genève où ils s’étaient rendus pour les recevoir. (Girard, l. c., IIe partie,p. 41.) Diverses sommes montant à environ 6000 florins du Rhin, furent encore livrées jusqu’à l’année 1460 sur les dividendes échus à cette date. (Techtermann, l. c.) Le payement des dividendes arriérés et de ceux qui devaient être acquittés par la suite fut réglé par une convention faite sous la médiation /490/ des députés des Cantons Suisses et du margrave Rodolphe de Hochberg, à Morat, le 14 février 1460.

Le comte de Gruyères, alors bailli de Vaud, prit à sa charge le payement des arrérages dus sur les dividendes échus qui s’élevaient à 1963 florins du Rhin, somme pour laquelle le duc Louis lui engagea les terres de Corbières, de Grandcour et de La Molière, ainsi qu’il a été dit en son lieu. Le restant de la somme promise aux Fribourgeois par le duc de Savoie, à titre de donation (nostræ donationis) soit 25,600 florins du Rhin, fut convertie en une obligation ordinaire portant un intérêt annuel ou cense de 1280 florins du Rhin, pour laquelle le prince dut s’engager à donner des sûretés convenables. (Convention datée de Morat, du 14 février 1460. Techtermann, l. c.) Par un acte subséquent, en date de Montcalier, 20 mars 1460, le duc Louis ratifia la convention de Morat, et donna pour sûreté de son engagement les villes de Vevey et de la Tour-de-Peylz, dont les recettes furent affectées au payement des intérêts de la créance fribourgeoise. Dans le cas où ces recettes ne suffiraient pas, celles du bailliage de Chablais tout entier devaient y suppléer. (Ibidem.)

Dès son avénement au duché de Savoie, Amédé IX reconnut la dette de 25,600 gouldes, contractée par son père envers Fribourg; il alla même plus loin en ajoutant aux hypothèques données par le duc Louis les seigneuries et mandements de Montagny-les-Monts et de Cudrefin, dont les revenus devaient être employés au payement des intérêts de la créance, et sur lesquelles il accorda en outre aux Fribourgeois le droit, après trois années écoulées, de prélever annuellement une somme de 4000 florins en amortissement /491/ du capital, et même de se mettre en possession de ces deux seigneuries, à défaut du payement des dividendes promis. (Charte d’Amédé IX, duc de Savoie, en date de Pignerol, 22 avril 1467. Ibidem.)

On verra que les Fribourgeois ne manquèrent pas, en temps opportun, de se prévaloir de cette concession impolitique. En attendant, pour obvier aux abus qu’elle faisait naître, la cense annuelle de 1280 florins fut, par une nouvelle convention, répartie comme suit:

Montagny286 florins.
Evian172
Cudrefin172
Conthey et Saillons286
Chillon136
Vevey et la Tour228
Total: 1280

soit 2560 florins de Savoie bon poids. (Convention approuvée par le duc Amédé à Chambéry, le 8 juillet 1469. Techtermann, l. c.) Après la mort d’Amédé, la duchesse Yolande, comme régente et tutrice de son fils Philibert, ordonna de nouveau à ses officiers de se conformer aux précédents arrêtés en ce qui concernait la créance due à Fribourg. (Donné à Verceil, le 13 février 1473. Ibidem.)

Telle était, en ce qui touche cette créance, la situation des choses lorsque Berne et Fribourg déclarèrent la guerre an comte de Romont, (octobre 1475). Dès l’entrée des alliés dans le pays de Vaud, les Fribourgeois s’emparèrent du bourg de Cudrefin et du château de Montagny où ils se /492/ firent prêter serment de fidélité par les habitants et où ils mirent des châtelains. (Schilling, p. 227, Chron. de Neuchâtel, l. c., p. 240. Kuenlin, Dictionnaire de Fribourg.) Ces deux châtellenies restèrent en leurs mains pendant toute la durée de la guerre et jusqu'à la rétrocession du pays de Vaud à la maison de Savoie, soit jusqu’au mois de février 1478.

D’un autre côté, les Hauts-Valaisans s’étaient rendus maîtres des seigneuries de Conthey et de Saillons dans le Valais savoyard, lesquelles faisaient partie des hypothèques données aux Fribourgeois. L’évêque de Sion et les dixains ayant gardé ces seigneuries conquises sur la maison de Savoie, se substituèrent à celle-ci comme débiteurs de la ville de Fribourg, pour le capital que représentait la cense de 286 florins du Rhin, assignés sur ces deux terres. (Voir la notice sur la conquête du Bas-Valais; Archiv. für schveizer. Geschichte, T. III, p. 145 et 244.)

Il est bien évident qu’en imposant à la Savoie l'obligation de payer en entier la créance de 25,600 gouldes, le congrès de Fribourg ne tint point compte, comme l’équité le demandait, des valeurs hypothécaires dont les Fribourgeois s’étaient emparés. Plus tard, lorsque Berne exigea de la Savoie qu’elle renoncât à la souveraineté de Fribourg, (23 août 1477), il paraît qu’on eut égard à ces circonstances puisque la créance fut réduite alors à dix-huit mille gouldes ou florins du Rhin. (J. de Müller, T. VIII, p. 180.) C’est ce qui résulte au moins d’une nouvelle convention faite à Fribourg entre cette ville et les fondés de pouvoirs du duc Philibert, savoir messires Antoine Champion, président de Piémont, et Godefroi, comte de Saint-Martin, seigneur de /493/ Strambino, par laquelle ce prince céda le château, la seigneurie et le mandement de Montagny-les-Monts, aux Fribourgeois pour la somme de 6700 florins du Rhin, en déduction de leur créance de 18,000 florins, laquelle fut ainsi réduite à 11,300 florins d’Allemagne. La ratification du duc Philibert est datée de Montcalier, du 12 décembre suivant. Par cet acte, le prince réserva le bénéfice du rachat perpétuel sur la seigneurie de Montagny. (Extraits des arch. de Fribourg, par Guill. Techtermann, msc.)

Les renseignements qui précédent et qui ont été puisés aux sources les plus authentiques démontrent clairement que l’émancipation de Fribourg fut, de la part de la Savoie, un acte plus ou moins forcé, mais entièrement gratuit, qui ne coûta absolument rien aux Fribourgeois, quoi qu’en disent les historiens de cette ville. Il semble en outre que puisqu’on envisageait la dette contractée envers Fribourg en 1452, comme le prix de sa soumission à la Savoie, il eût été juste qu’en exigeant de cette puissance l’abandon de sa souveraineté, on l’eût en même temps libérée de sa dette.


AU CHAPITRE XII.

Pièces justificatives touchant les peaux de moutons.

1o Patentes par lesquelles Yolande de France, régente de Savoie pour son fils le duc Philibert 1er, nomme Amédé de Gingins, sire de Belmont, capitaine-général dans le bailliage /494/ de Chablais et la baronnie de Gex, datées de Montcalier, 28 novembre 1474. (Arch. de Turin. Comptes de la trésorerie-générale de Savoie, p. 1475 et 1476, no 123, fo 378, et copie vidimée aux arch. de La Sarra.)

2o Lettres patentes par lesquelles Yolande, régente de Savoie, accorde à Amédé de Gingins, sire de Belmont, capitaine-général en Chablais et pays de Gex, un traitement annuel de 200 florins petits poids, à prendre sur les rentes des châtellenies de Ternier, Gaillard et Balleyson. Datées de Montcalier, du 30 décembre, (ao nativitatis domini) 1475. (ubi supra, fo 379.)

3o Reconnaissances prêtées par les vassaux et tenanciers de la baronnie du Châtelar et de Montreux au sieur Erhard Schuderberg, de Lucerne, comme seigneur engagiste de cette baronnie ... ao 1478. (Arch. du Châtelar.)

4o Information prise par ordre du duc Philibert 1er, au sujet de la capture de quelques marchandises enlevées à certains marchands allemands à Rolle, au logis de l’Ange, au mois de janvier (Epiphanie) de l’an 1476, comprenant:

a) La requête présentée au duc par Andrée de Valpergue, veuve de Pierre de Gingins, sire du Châtelar, et ses quatre fils mineurs, François, Jacques, Claude et Amé, de l’an 1478.

b) La lettre du duc Philibert au sénat de Chambéry, par laquelle il lui ordonne de faire, avant le 31 décembre, une enquête sur cette capture. Datée de Montcalier, du 1er décembre 1478.

c) Commission donnée par le sénat de Chambéry à maître Pierre Girardi, secrétaire ducal, pour faire cette enquête. Datée de Chambéry, du 12 décembre 1478. /495/

d) Déposition de onze témoins successivement entendus à Genève, à Rolle et à Nyon, les 16, 18 et 19 décembre 1478. (Acte vidimé aux arch. du château de La Sarra.)

5o Transaction entre Amédé de Gingins, sire de Belmont en Genevois, et ses quatre neveux d’une part, et de l’autre, Erhard Schuderberg, fondé de pouvoirs de Henri Koller, de Nuremberg, et Anselme Schuder, de St.-Gall, au sujet de la capture de 329 livres de graine de kermès (granis cramesinis) et de 50 livres (5 paquets [timbrios] de 10 livres) de peaux de martre zibeline, séquestrées à Rolle et évaluées à 2000 florins du Rhin, valant chacun deux florins de Savoie, moyennant 1400 florins du Rhin d’indemnité. Datée de Vigon, en Piémont, du 5 mai 1479. (Acte orig. aux arch. du château de La Sarra.)

6o Acte de cession et vente de la seigneurie du Châtelar faite par noble Amédé de Gingins, sire de Belmont, comme tuteur des nobles François, Amédé, Claude, Jacques, Antonie (ou Andrée) et Louise de Gingins, ses neveux et nièces, enfants de feu N. Pierre de Gingins, chevalier, faite au duc Philibert 1er de Savoie, pour le prix de 3300 florins d’or petit poids, que le trésorier du duc avait avancés au dit Amédé pour payer certains marchands allemands qui réclamaient une indemnité de plus de 4500 florins petit poids, pour marchandises à eux enlevées sur les terres du duc de Savoie, pendant la guerre. Daté de Chambéry, du 12 janvier 1481. Signé G. Favier. (Original aux arch. de Turin, copie vidimée à celles de La Sarra.)

7o Confirmation de la cession et vente susdite, nonobstant la plus-value de la dite seigneurie du Châtelar, qui fut estimée valoir 1150 florins d’or petit poids, en sus des /496/ 3300 florins déjà payés; laquelle plus-value fut comptée au seigneur vendeur et à ses pupilles par N. Alex. Richardon, trésorier de Savoie. Acte reçu par Egr. André de Douvres (Douris), notaire impérial et ducal à Genève, le 20 janvier 1481. (Arch. de Turin, comptes du trésorier-général pour 1480 et 1481, no 131, fo 184, et vidimus aux arch. du château de La Sarra.)

8o Lettres patentes de Charles 1er, duc de Savoie, établissant Amédé de Gingins, sire de Belmont, conseiller privé du duc et son châtelain du Châtelar. Datées de La Tour-du-Pin, du 12 janvier 1483.

9o Lettres accordées par le duc Charles 1er de Savoie à Amédé de Gingins, son châtelain du Châtelar, pour dispenser celui-ci du payement annuel de 200 florins dus au trésor ducal par tous les châtelains du Chablais sur les revenus de leur office, en considération de ses dépenses extraordinaires pour la réparation de ce château et pour l’entretien de ses neveux et nièces ruinés par la guerre contre les Suisses. Datées de Rivoli, du 17 mars 1484. (Les deux actes 8o et 9o réunis en original aux arch. du château de La Sarra.)

10o. Rétrocession de la seigneurie du Châtelar en faveur des fils de feu Pierre de Gingins, sire du Châtelar, tué (ao 1476) en combattant contre les Suisses, faite par Blanche, duchesse régente de Savoie, au nom de son fils Charles II, de pur et franc-allod, et en considération des services de la maison de Gingins, (énumérés dans l’acte), pour la somme de mille cinq cents florins, petit poids, payés au trésorier ducal. Datée de Turin, du 19 décembre 1490. (Copie vidimée aux arch. du château de La Sarra.)

11o. Extrait du compte du trésorier-général Seb. /497/ Ferrero, p. 1490 et 1491, fo 31, portant: Recette de N. Amédé de Gingins, seigneur de Belmont, pour 1500 florins d’or, petit poids, qu’il a livrés au susdit trésorier pour la rétrocession ou rachat de la terre du Châtelar. Du 19 octobre 1491. (Arch. de Turin et vidimus aux arch. de La Sarra.)

12o. Extrait du compte du trésorier Seb. Ferrero de 1491 et 1492, no 145, fo 154, portant payement de florins 131,10 d., petit poids, fait à messire Antoine de Gingins, seigneur de Divonne, conseiller privé de son altesse ducale, pour solde de ses frais et dépens avec 4 serviteurs et 5 chevaux, pendant son ambassade auprès du roi de France. Départ de Turin, 20 juillet 1491; retour à Turin, 1er septembre 1491. N.B. On comptait par jour, sur les terres de Savoie, neuf gros dont quatre par homme et cheval de suite et cinq gros pour l’ambassadeur, outre l’ordinaire. Sur les terres de France, dix gros et demi, dont trois gros et demi pour homme et cheval de suite, outre l’ordinaire, et sept gros pour l’ambassadeur. Total 234 florins 4 gros 2 deniers.

Item, pour se rendre de Turin à Chambéry, à la conférence des ambassadeurs du roi de France et des Ligues suisses; puis de Chambéry à Duyn et de Duyn à Fribourg en Suisse. Départ de Turin, le 14 septembre 1491; retour à Turin, le 11 novembre 1491. En tout 58 jours, dont à déduire 37 jours où le seigneur de Divonne séjourna en sa maison avant de partir pour Fribourg; reste 21 jours de voyage comptés sur terres de son altesse, par jour à 9 gros, pour 16 jours, et sur terres des Ligues, 5 jours à 13 gros et demi par jour. Daté du 17 décembre 1491. (Loco ubi supra.) /498/

13o. Compte du trésorier Seb. Ferrero pour 1491 et 1492, no 145, fo 167. Livré à N. Amédé de Gingins, seigneur de Belmont, 100 florins pour sa dépense avec suite, dans trois voyages faits par lui, ao 1489, avec messire Amédé de Montfalcon, prieur de Ripaille; députés par le duc Charles, pour la remise du Chablais et de Morat. Daté du 14 janvier 1491. (Archives de Turin, vidimus aux arch. de La Sarra.)

14o. Patente de premier président du conseil ducal, accordée par Blanche, duchesse régente de Savoie, à messire Antoine de Gingins, seigneur de Divonne, avec un traitement annuel de 600 florins d’or, petit poids, et l’entretien ordinaire de trois personnes et de trois chevaux. Datée de Turin, du 27 janvier 1492. (Arch. de Turin et vidimus aux arch. de La Sarra.)

15o. Abergement passé par Amédé de Gingins, seigneur de Belmont et co-seigneur de Montreux, à Jean Mantillon, de Rumilly, habitant à Vevey, de deux moulins à Vevey, au Bourg-Franc, pour l’entrage de 5 florins d’or, petit poids, de 12 sols, et 16 coupes de froment de cense annuelle, mesure de Vevey. Daté de Chailly, 6 octobre 1495. Répertoire de Vevey.

16o. Déclaration du duc Philippe, portant que la baronnie du Châtelar est un franc-aleu. Daté du 1er février 1497. (Aux arch. du Châtelar et de La Sarra.)

17o. Confirmation de la rétrocession de cette baronnie (voyez 10.) par Philibert II, duc de Savoie, surnommé le Beau. Datée de Genève, 21 juin 1498. (Copie vidimée aux arch. du château de La Sarra.)


/499/

AU TABLEAU A.

La liste suivante des gentilshommes chefs-d'hôtel, c’est-à-dire chefs de nom et d’armes de leurs maisons, est extraite des preuves de l’histoire de Bresse de Guichenon; elle peut servir de pièce justificative au tableau A des baronnies et terres à bannière, ou fiefs immédiats du pays-romand au milieu du XVe siècle. Nous avons cru devoir omettre dans ce tableau les terres de Montagny-les-Monts, de La Molière, de Font, de Cugy, d'Estavayer, de Combremont-le-Grand et de Surpierre, parce que ces seigneuries firent partie de l’apanage constitué au comte de Romont.

LISTE

des deux cents gentilshommes, chefs-d’hôtel, nommés par le duc Louis de Savoie, pour garants de l'exécution du traité conclu entre lui et le roi Charles VII, à Cleppié en Forez, 27 octobre 1452.

Seigneurs du pays-romand.

Louis de Châlons-Arlay, prince d’Orange.
Jean de Fribourg, comte de Neuchâtel.
François, comte de Gruyères.
Jean de Vergy, seigneur de Champvent.
Jean de Vergy, seigneur de Montricher.
Guillaume, seigneur de La Sarra et de Bossonens. /500/
Humbert de Collombier, seigneur de Vuillerens.
Richard de Collombier, seigneur de Vufflens.
Jean, seigneur de Vaumarcus.
Jean, seigneur de Blonay.
Antoine de Montagny, seigneur de Brissogne.
Boniface de Challant, seigneur de Villarzel.
Georges de La Molière, seigneur de Font.
Jean Champion, seigneur de Vauruz.
Amé, seigneur de Vuippens.
Petremand de Goumoens, seigneur de Bioley.
Humbert de Glane, seigneur de Cugy.
Amé d'Estavayer, seigneur de Chenaux.
Guy de la Baume, seigneur d’Attalens.
Jean de Gingins, seigneur de Divonne.
Louis de Bonnivard, seigneur de Greilly.
Guillaume de Challant, seigneur de Châtel-Saint-Denis.
Jean de Gruyères, seigneur de Montsalvens.
François d’Avenches, seigneur de Combremont-le-Grand.
François de Russin, seigneur d’Allaman.
Amé de Rovéréa, seigneur de Saint-Triphon.
Humbert de Glérens, seigneur de Surpierre et de Berchier.

27 chefs-d’hôtel.

(Guichenon, Histoire de Bresse, Ire partie, p. 80.)


/501/

TABLEAU A

Villes, baronnies et terres à bannière du pays-romand dont les seigneurs relevaient immédiatement de la souveraineté du duc de Savoie.

 

 BAILLIAGE DE VAUD.
  
 Au douaire de la duchesse Yolande,
régente de Savoie
 :
BELMONT,bourg, château et châtellenie.
  
 A la maison de Châlons-Arlay:
CERLIER,ville, château et châtellenie;
GRANDSON,bourg, château et baronnie;
ORBE,ville, château et châtellenie;
MONTAGNY-LE-CORBOZ,château et mandement;
ECHALLENS,bourg, château et châtellenie.
  
 A la maison de La Baume-Montrevel:
ILLENS, ARCONCIEZ,châteaux et mandements;
LA ROCHE ou PLAFAYON,château et mandement;
ATTALENS,bourg, château et mandement.
  
 A la maison de Vergy:
CHAMPVENT,bourg, château et mandement;
LA MOTTE,château et mandement;
MONTRICHER,bourg, château et baronnie. /502/
  
 Au Comte de Gruyères;
AUBONNE,ville château et baronnie;
COPPET,bourg, château et baronnie;
LA MOLIÈRE,château et mandement, (engagés);
ORON,ville, bourg, château et châtellenie;
PALÉZIEUX,château et mandement,
  
 A la maison des sires de La Sarra:
LA SARRA,ville, château et baronnie;
CHESEAUX,château et mandement;
BOSSONENS,château et mandement.
  
 A la maison de Collombier:
VUILLERENS, COLLOMBIER, VUFFLENS,châteaux et mandements.
  
 A la maison de Menthon:
PONT-EN-OGO,château, mandement et baronnie.
  
 A la maison de Russin:
ALLAMAN,château et mandement.
  
 A la maison de Challant:
CHATEL-ST.-DENIS,bourg, château et châtellenie;
VILLARZEL-LE-GIBLOUX,VUISSENS, châteaux et mandements.
  
 A la maison des sires d’Alinge-Coudrée:
St.-MARTIN-DU-CHÊNE,château et mandement. /503/
  
 Aux nobles Champion, seigneurs de
la Bâtie et de Beauregard:
VAURUZ,bourg, château et mandement;
GOUMOENS-LE-CHATEL, (St.-Barthélemi),château et mandement.
  
 A la maison de Vuippens:
VUIPPENS,château et mandement.
  
 A la maison de Goumoens:
BIOLEY-MAGNOUX,château et mandement.
  
 A la maison de Langin:
EVERDES,château et mandement.
  
 A la maison de Viry:
ROLLE et MONT-LE-VIEUX,ville, château et baronnie.
  
 A la maison de Saint-Trivier:
MONT-LE-GRAND,bourg, château et mandement.
  
 A la maison de Compey-Gruffy:
PRANGINS,château et baronnie;
DENENS,château et mandement.
  
 A la maison de Gingins:
DIVONNE,château et baronnie;
GINGINS, /504/ maison forte et mandement.
  
  
 BAILLIAGE DE CHABLAIS.
  
 Au duc de Savoie:
VEVEY,ville et châtellenie;
LA-TOUR-DE-PEYLZ,bourg, château et châtellenie;
CHILLON,château et châtellenie;
VILLENEUVEville et châtellenie.
  
 Aux sires de Blonay:
BLONAY,château et baronnie.
  
 A la maison de Gingins:
LE CHATELAR,château et baronnie;
MONTREUX,bourg et vidomnat.
  
 Aux sires de Compey-Thorens:
AIGLE,ville, château et châtellenie;
LES ORMONTS,château et mandement;
AIGREMONT,château et mandement.
  
 A la maison de Rovéréa:
LA ROCHE D’OLLON, SAINT-TRIPHON,châteaux et mandements.
  
 A la maison de Duyn et aux nobles Tavelli:
BEX,château et mandement.
  

/505/

TABLEAU B.

Terres et seigneuries ecclésiastiques situées dans le pays-romand, 1467-1476.

 LE PRINCE ÉVÊQUE ET CHAPITRE DE LAUSANNE.
LAUSANNE,ville impériale avec un territoire et un ressort comprenant 23 villages, renfermés entre la Venoge et la Lutrive, formant avec le Jorat un bailliage qui appartenait en toute souveraineté à l’Evêque avec titre de comte et de prince de l’Empire 1 .
  
 A la mense épiscopale:
LUTRY, VILLETTE, ST.-SAPHORIN, CORSIER,Les 4 paroisses de Lavaux appartenant à la mense épiscopale.
  
 A la maison de Chalons sous la mouvence de l'Evêque.
BOTTENS,château et seigneurie.
  
 A la maison de Glerens sous la mouvence de l'Evêque.
BERCHIER, /506/ château et mandement.
  
 A la mense épiscopale:
LUCENS,château, bourg et châtellenie;
VILLARZEL-L’ÉVÊQUE,château et mandement;
AVENCHES,ville, château et châtellenie;
BULLE, LA ROCHE,ville et châtellenie; château et mandement.
  
 Au chapitre de Notre-Dame de Lausanne:
ALBEUVE,paroisse et mandement;
SAINT-PREX,bourg et mandement;
CRANS,mandement;
DOMMARTIN,château et mandement;
ESSERTINES,château et mandement;
VUARRENS,mandement.
  
  
 MONASTÈRES 2
  
HAUTERIVE,abbaye de l’ordre de Citeaux, sous l'avocatie de la ville de Fribourg.
VILLARS-LES-MOINES,prieuré de l’ordre de Cluny.
PAYERNE,abbaye de l’ordre de Cluny.
BEAULMES,prieuré et seigneurie dépendant de l’abbaye de Payerne.
ROMAINMOTIER,prieuré de l’ordre de Cluny et châtellenie. Les prieurés de Vallorbes, de Bursins (à la Côte), de Corcelles et de Bevex (canton de Neuchâtel), en dépendaient.
BONMONT,abbaye de l’ordre de Citeaux sous l'avocatie des sires de Divonne et de Gingins.
LAC DE JOUX,abbaye de Prémontrés, sous l'avocatie et le vidomnat des barons de La Sarra.
St.-SULPICE, /507/ prieuré de l’ordre de Citeaux.
LUTRY,prieuré de l'ordre de Savigny, en Lyonnais, réuni à la mense épiscopale de Lausanne.
HAUTCRÊT,abbaye de Citeaux, sous la gardienneté des seigneurs d'Oron.
MONTHERON ou THÉLA,abbaye de Citeaux, sons l'avocatie des évêques de Lausanne et des seigneurs de Goumoens.
LA PART-DIEU,chartreuse sous l'avocatie des comtes de Gruyères.
CHARMEY,chartreuse (de la Val-Sainte), sous la garde des seigneurs de Corbières.
HUMILIMONT ou MARSENS,abbaye de Prémontrés, sous la garde des seigneurs de Vuippens.
SEMSALES, MONTPREVEYRES, ETOYprieurés dépendant de la prévôté de Mont-Joux ou Grand-Saint-Bernard.
AUBORANGE, terre de franc-aleu, OLLON, Vidomnat, SALES (près Bex), prieuré rural, appartenant à l’abbaye de St.-Maurice en Valais.

/508/

TABLEAU C.

BARONNIE DE VAUD

Districts composant l’apanage de Jacques de Savoie, comte de Romont et baron de Vaud.

MOUDON,ville et châtellenie.
MORAT,ville et châtellenie.
MONTAGNY-LES-MONTS,château et châtellenie.
ROMONT,bourg, château et châtellenie, avec le titre de comté.
RUEbourg, château et châtellenie.
YVERDUN,ville, château et châtellenie.
CUDREFIN,bourg et châtellenie.
SAINTE-CROIX,bourg, château et châtellenie.
LES CLÉES,ville, château et châtellenie.
COSSONAY,ville, château et châtellenie, avec le titre de baronnie.
MORGES,ville, château et châtellenie.
NYON,ville, château et châtellenie.
GRANDCOUR,bourg, château et châtellenie.
CORBIÈRES,bourg, château et châtellenie.
ESTAVAYERville, château et châtellenie.
SURPIERRE,château et châtellenie.
PAYERNE,ville, château et châtellenie.

Explication: Les noms imprimés EN GRAS sont ceux des Bonnes-Villes qui jouissaient de priviléges et de franchises municipales. /509/


TABLEAU D.

Districts du pays-romand conquis dans la guerre de Bourgogne qui, après la paix, restèrent aux villes de Berne et de Fribourg.

Districts.Villes, bourgs, châteaux et paroisses de leur ressort.
FRIBOURG.Fribourg la ville et les XXIV paroisses qui formaient son ancien territoire. (V. Kuenlin, Dict. du cant. de Fribourg.)
CERLIERCerlier, Anet, Feniz (Vinelz) et Champion (IV paroisses comprenant 10 villages.)
MORATMorat, Villars-les-Moines (prieuré), Meyriez, Chiètres, Ferembalm (en partie), Mottier y compris Lugnorres, Jorissant et le Mont-de-Vully. ( VI paroisses comprenant 28 communes.)
ILLENS.Illens, Arconciez, Treyvaux, Ecuvillens, Magnadans et Farvagny. (V paroisses, 6 villages.)
LA ROCHE DU VANEL.Plafayon et les vallées supérieures de la Singine et du Lac-Doméne.
EVERDES. /510/Château et mandement avec les villages de Marsens, Sorens et l'abbaye d’Humilimont.
ECHALLENS.Bourg et château; Bottens, château et mandement; Goumoens-la-Ville, château et mandement; Goumoens-le-Joux, château et seigneurie; les villages d'Assens, Etagnières, Penthéréaz, Villars-le-Terroir et Polliez. (1 bourg, 4 châteaux et 11 villages.)
ORBEVille, château et châtellenie.
GRANDSON.Ville, château et baronnie, comprenant les paroisses de Giez, Fiez, St-Maurice, Novales, Mauborget, Provence, Concise, Corselles, Onnens, Bonvillars et Yvonand. (XII paroisses soit plus de 20 villages et hameaux avec les prieurés de Grandson et de La Lance.)
MONTAGNY-LE-CORBOZ.Château et mandement; Chamblon, Essert et Valeyres. ( II paroisses, et 4 communes.)

NOTES:

Note 1 A cette époque les ducs de Savoie étaient encore en possession du vicariat de l'Empire dans la ville et dans les terres de l'évêché de Lausanne, vicariat qui fut révoqué par l’empereur Maximilien en 1510. (Mém. et Docum. de la Société d'hist. romande, T. VII, p. 679 et suiv.)[retour]

Note 2 Quoique renfermés dans les bornes du bailliage de Vaud, ces monastères jouissaient de l'immunité locale sous la sauvegarde de la maison de Savoie; quelques-uns de ces monastères avaient en outre pour avoués ou gardiens particuliers, les descendants des premiers fondateurs.[retour]


 

 

 

 

 

 

 

 

 

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