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Mémoires et documents de la Société d’histoire de la Suisse romande

Edition numérique

Fréderic DE CHARRIÈRE

Recherches sur le couvent de Romainmotier et ses possessions:
Romainmotier

Dans MDR, 1841, tome 3, première livraison, p. 7-196

© 2019 Société d’histoire de la Suisse romande

/7/

ROMAINMOTIER.

 

Ce fut dans la première moitié du septième siècle qu’un prince Franc, à la longue chevelure, le roi Flodoveus, choisit dans ses États une vallée solitaire pour y bâtir un couvent 1 . Un /8/ faible ruisseau brillait seul au travers des profondes forêts qui ne l’ont pas même abandonnée entièrement aujourd’hui. Son étroit horizon s’harmonisait avec l’oubli du monde; et la sombre verdure des sapins avec les pensées solemnelles de ses premiers habitans.

Ce monastère royal comptait à peine un siècle d’existence, lorsqu’un évènement vint grandement influer sur son avenir.

Le Pape Etienne II, étant dans une position épineuse, pressé par les redoutables Lombards et sans trouver à sa portée de pouvoir capable de délivrer l’Eglise de Rome de tant et de si imminentes tempêtes, se rendit auprès de Pépin, le père de Charlemagne, pour chercher un appui. Il en fut reçu avec la distinction convenable et retenu auprès de lui longtemps.

Cette harmonie des deux pouvoirs religieux et temporel ne pouvait qu’être féconde en résultats politiques, aussi le Cartulaire nous dit-il qu’une vision engagea le Pontife à sacrer roi Pépin, et à défendre que nul fut revêtu de cette dignité dans la suite, sinon de sa postérité. Ainsi fut consommée la ruine de la dynastie des Mérovingiens.

Or, si l’on peut comparer les petites choses aux grandes, ce /9/ voyage du Pape Etienne à Paris n’influa pas moins sur le Monastère de Flodovée que sur la famille de son fondateur, mais en sens inverse. En effet, après avoir franchi le mont Jou (Saint Bernard) et s’être arrêté au Couvent d’Agaune ou de Saint-Maurice, en Valais, il se fit préparer un logement dans un autre monastère, placé sur sa route au pied du Jura; et y ayant été accueilli avec empressement, pieux et bienveillant comme il l’était, il bénit ce lieu, le sanctifia, y consacra des Eglises, à l’honneur des Apôtres, et ordonna qu’il fut appelé désormais le Monastère romain (romanum monasterium vocavit 2 ), pour indiquer qu’il était spécialement et immédiatement placé sous la protection du siège de Rome; l’appuyant ainsi de son autorité, et voulant qu’il fut dès lors affranchi de tout pouvoir, de Roi, Evêque, Comte ou autre.

Ces paroles remarquables, fondement de ce qui fut appelé depuis l’antique autorité de ce couvent, témoignent d’une lutte entre les monastères et les Evêques; ceux-ci, corrompus par la richesse et la puissance temporelle, opprimaient les monastères, qui recherchaient un appui dans l’autorité croissante des Papes 3 . L’exemple en fut donné d’abord au huitième siècle par le célèbre couvent de Fulde, et le couvent de Flodovée le suivit un des premiers. Ainsi peu s’en faut dès son origine un atmosphère de liberté l’environna.

Le voyage d’Etienne eut lieu en 753. C’est donc à cette époque reculée qu’il faudrait placer la fondation du temple de Romainmotier. Plus de mille ans auraient passé sur ce monument sans le détruire. En effet l’originalité de son architecture frappe au premier coup d’œil. Le chœur, il est vrai, est /10/ gothique; certains détails sont plus récens encore. Mais comment ne pas reconnaître la plus haute antiquité dans ces nefs latérales à plein cintre, séparées de la nef principale par d’énormes piliers d’un travail plutôt solide qu’élégant? Et dans ce porche si remarquable orné de sculptures en bas-relief, de fleurs de lys, de têtes couronnées rappelant les tombeaux de rois Francs, et dont la voûte supporte une vaste chapelle, à deux rangs de pilastres du travail le plus simple, presque le plus grossier et couverts de sculptures insignifiantes? Le Temple de Romainmotier est de style Lombard 4 .

La protection du Saint Siège donnait sans doute du relief au monastère romain, mais dans ces tems de violences et de troubles continuels et tandis que les vagues incessantes des peuples barbares, soulevées par un orage mystérieux, se précipitaient tour à tour sur l’Europe , et se heurtaient avec violence, la protection de Rome elle-même était insuffisante. Aussi le Monastère romain fut, dit le Cartulaire, désolé par de méchans hommes et de fâcheux voisins 5 . On se représente alors les /11/ serfs, les colons de l’Abbaye fuyant ces hordes féroces, et venant chercher un asile dans l’Eglise et le Monastère; puis au milieu de l’anxiété générale, tandis que l’ouragan des montagnes fait peut être gémir les profondes forêts, qui bruissent comme la mer, les religieux restent prosternés dans le temple, jusqu’à ce que les clameurs terribles des Sarrazins au teint bronzé, dont l’œil étincelle autant de fanatisme que de soif de pillage, ou des barbares Allemands, ou des Madschares à l’origine lointaine, se fassent ouïr.

Le Monastère romain subsista quoique désolé jusqu’à l’avènement de la dynastie de la Petite-Bourgogne; alors commença pour lui une existence toute nouvelle.

Son ancienne autorité était oubliée lorsque le roi Rodolphe Ier donna à sa sœur Adélaïde, femme de Richard comte d’Autun et marquis de Bourgogne, l’abbaye de Romainmotier pour elle et ses successeurs en 888 * .

Adélaïde, veuve et avancée en âge, la donna irrévocablement à Odon, abbé de Cluny, pour la rétablir en son ancien état, c’est-à-dire sous son même nom et avec le privilège que lui avait conféré le siège de Rome. — Dès lors (929) le Monastère romain fut annexé à Cluny, il devint un de ses membres, après trois siècles à peu près d’existence isolée.

Les efforts d’Adélaïde trouvèrent de fermes appuis dans sa maison. Le roi Conrad de Bourgogne, fils de Rodolphe II, et sa femme Mathilde, de bienheureuse mémoire, confirmèrent cette donation, et, de concert avec l’Abbé de Cluny Maiolus, rendirent à Romainmotier tout à la fois une existence séculière honorable, et une règle monastique. /12/

Saint Odilon 6 , successeur de Maiolus, travailla beaucoup aussi pour Romainmotier, soit auprès du siège de Rome pour la conservation de son antique privilège, soit en obtenant de princes séculiers des dons et des restitutions de biens. Souvent il y résidait. Sous lui, le dernier Rodolphien fit de grandes donations à ce monastère, source tout à la fois de sa richesse subséquente et de grands embarras.

Telle est l’esquisse de l’influence de cette dynastie sur le monastère romain; donnons-lui maintenant si possible quelque vie au moyen de détails.

Les couvens en général avaient existé isolés, sans liens, indépendans les uns des autres, jusques à l’époque (de 926 à 942) où St.-Odon réforma son monastère de Cluny et plusieurs autres qui avec l’autorisation du Pape se réunirent en une seule congrégation 7 . Le Monastère romain contribua à donner ce premier exemple du gouvernement commun d’un ordre monastique: et dans la donation d’Adélaïde on surprend en quelque sorte cette nouveauté dans le travail de sa cristallisation. En voici quelques extraits: « Les dispensations de la Providence divine conseillent aux riches de faire de leurs biens passagers un usage qui mérite des récompenses permanentes; ce dont la parole divine montre la possibilité, en disant que les richesses de l’homme sont la rédemption de son âme! (divitiæviri redemptio animæ ejus!) Moi donc comtesse Adélaïde, pesant toutes ces choses, et désirant pourvoir à mon salut, je trouve nécessaire de donner au profit de mon âme quelque peu de mes biens. Or /13/ rien ne me semble plus propre à atteindre ce but que de faire mes amis des pauvres du Seigneur, selon son précepte (ut juxta domini præceptum amicos mihi faciam pauperes ejus), et de soutenir à mes frais une congrégation monastique, afin que cette bonne œuvre soit de durée et non passagère. Dans cette foi et cette espérance qu’encore que je ne puisse fouler tout aux pieds, j’obtiendrai cependant la récompense des justes en soutenant les contempteurs du monde que je crois justes! 8

« Que tous ceux donc qui vivent dans l’unité de la foi sachent que je transmets à Odon, vénérable abbé de Cluny, et aux frères de cet ordre, le Monastère romain au pays de Vuauld, bâti jadis à l’honneur des princes des Apôtres et que j’avais reçu en don du roi Rodolphe mon frère. Je le remets à Cluny avec toutes ses possessions, afin que les moines s’efforcent de le rétablir en son premier état.

« Ce Monastère sera soumis immédiatement au siège apostolique, comme Cluny , mais ils n’auront tous deux qu’un seul abbé, et après sa mort son successeur ne sera nommé que du consentement commun, en respectant la constitution de Saint Benoît; en sorte que si la moindre part de l’une ou l’autre congrégation voulait, mieux inspirée, faire un choix préférable, les autres y donnassent les mains.

« L’abbé pourra transférer les frères d’une maison dans une autre suivant les ressources de chaque localité.

« Et, pour resserrer cette union, il y aura entr’eux tous communauté de service divin, d’aumônes et de bonnes œuvres; en sorte que nous ayons part à l’efficace de tout office célébré à Cluny, pour Guillaume d’Auvergne, de bonne mémoire 9 , ou autre; et /14/ qu’ils soient en échange associés à l’efficace de tout ce qui se fera pour nous à Romainmotier.»

Adélaïde fit cette donation non-seulement pour son âme et celles de ses parens, mais encore pour tous les bienfaiteurs du couvent, pour la stabilité de la religion, et enfin pour tous les catholiques et vivans et morts.

Puis elle stipula que les moines de Romainmotier conserveraient le mode de vie récemment apporté de Cluny, pour l’instruction des moines à venir, sans changer rien à la nourriture, au vêtement, à l’abstinence, au chant sacré, à l’hospitalité; et sans retrancher quoique ce soit à la charité fraternelle, non plus qu’à la soumission et à l’obéissance 10 monastique.

Enfin désormais cette congrégation ne devait être soumise à aucun pouvoir temporel, pas même à la grandeur royale (nec fastibus regiæ magnitudinis); et au nom du Seigneur, des Saints, et du jour redoutable du jugement, Adélaïde défendit solennellement qu’aucun prince séculier ou ecclésiastique, soit Comte, soit Evêque, soit même souverain Pontife osât porter la main sur les possessions des serviteurs de Dieu pour s’en approprier quelque chose, pour les donner en bénéfice, ou pour établir un prélat sur eux contre leur volonté.

Le testament se terminait par des menaces d’excommunication et des malédictions terribles 11 contre ses infracteurs; voulant aussi qu’une peine de cent livres d’or fût prononcée contr’eux par les Tribunaux civils.

Cet acte de l’an 929 renfermait en germe l’avenir de Romainmotier; il fixa sa position dans le monde, et fut comme le tuteur de cette jeune tige dont nous entreprenons d’examiner le /15/ développement. Nous pouvons classer déjà notre Couvent. C’est un Monastère incorporé à l’ordre de Cluny, soumis à la règle de Saint Benoît, libre, d’après l’institution de la Comtesse, de tout pouvoir temporel, et, d’après la consécration d’Etienne, placé sous la protection particulière de Rome, ainsi que le rappelle son nom.

Qui dira combien d’existences brisées trouvèrent un refuge dans le couvent restauré par Adélaïde? *

Des chartes du roi Rodolphe III de Bourgogne, le dernier de sa race, se présentent.

Dans l’une il rend à Dieu et à St. Pierre du Monastère Romain, et ce pour la guérison de son âme, le village de Ferreyres (villa Ferrieris) et tout son territoire; de plus un manoir à Moërier (Moriei), deux à Ornyer (Ornei), un à Eclépens (Islapadenes), un à Senarclens (Senerclens), un à Glans, un et demi à Penthaz (Penta), un à Giez 12 , etc. Tout cela dans le comté de Vauld.

La même année autre donation ou reddition, dit la Charte, du roi Rodolphe à Romainmotier 13 , savoir: /16/

Dans le Comté du Vully (Vuisliacense), la chapelle de Saint Léodegard, de Lully 14 , avec cinq manoirs, soit domaines; dans la ville (villa) Tavellis, autrement nommée Orbe 15 , cinq manoirs; à Agyz (in villa Aziaco) un manoir et demi; à Bofllens (in villa Boflinges) six manoirs; et à Vufflens (in villa Wuolflinges) neuf manoirs. — Enfin dans le Comté Equestre (in comitatu Equestrio) l’Eglise consacrée à l’honneur de Saint Martin, dans le village de Bruzinges (Bursins).

Rodolphe confiait toutes ces choses à l’administration et à la /17/ seigneurie du monastère romain, lui refusant toutefois le pouvoir de les aliéner.

Ces deux chartes précieuses, comme source de plusieurs possessions du prieuré, indiquent aussi la forme première du nom de plusieurs villages existans.

Les donations des Rodolphiens, tout en jetant les fondements de la prospérité future de Romainmotier, furent aussi pour lui une source d’amertume. En effet notre Prieuré était cerné de toutes parts par les terres de la puissante famille des Grandson, comtes héréditaires du pays, et qui possédaient en fief ou alleu non-seulement la baronnie de Grandson et Sainte-Croix, mais encore les terres de Chamvent, Belmont, Les Clées, la baronnie de Lassaraz, la Vallée de Joux et Montricher même, sans parler de possessions étendues en Bourgogne [NB: ce passage a fait l'objet d'une rectification dans les Rectifications et Additions, p. 893]. Or Lambert, le dernier comte laïque, étant tombé dans la disgrâce du dernier Rodolphien, sa dignité de comte fut donnée à l’Evêque de Lausanne, et Romainmotier fut enrichi de ses dépouilles 16 . On comprend donc que l’horizon du Monastère fut obscurci de sombres nuages. Aussi les différends avec les dynastes de Grandson, au milieu de phases diverses, n’eurent de terme absolu que la lance de Girard d’Estavayer.

L’orage éclata d’abord à la visite du Pape Léon IX à Romainmotier, en 1049.

La position de ce monastère peu s’en faut sur la route directe d’Italie au nord de la Gaule, lui avait déjà valu la visite du Pape Etienne II , et trois siècles plus tard Léon IX, après avoir traversé le mont Jou et St. Maurice, vint, conduit par Hugo, abbé de Cluny, jusqu’à notre couvent pour confirmer son antique autorité 17 . Il avait à sa suite, entr’autres, Avinard, /18/ archevêque de Lyon, Hugo, métropolitain de Besançon, et Frédéric, Evêque de Genève. Adalbert, primat (princeps) du Château de Grandson, s’y présenta aussi avec ses chevaliers; or le Pape était violemment indigné (violenter commotus erat) contre lui à cause de ses déprédations, dit le Cartulaire.

On lui avait en effet présenté un manifeste de griefs nombreux et cuisans contre Adalbert, qui, au dire des religieux, voulait l’extermination du Couvent 18 . On se plaignait de ce que sans aucune concession ni de l’Abbé de Cluny, ni des moines, il s’était emparé d’un rocher entouré d’une épaisse forêt, près de Ferreyres; qu’il y avait bâti un château fort, d’où il leur avait fait tant de mal chaque jour, qu’ils ne pouvaient l’exprimer. Dévastation dans le village et le moulin voisins, extorsion d’argent, de vin, de bestiaux, et cela non-seulement à Ferreyres, mais encore à Agiez; puis envahissement de possessions à Chamvent, pour lesquelles l’Abbé Hugo 19 réclama auprès de l’Empereur; mais en dépit de la sentence impériale cette terre fut bientôt envahie de nouveau. Enfin ses affidés n’avaient pas, dans toute l’étendue des possessions du prieuré, laissé la moindre maison, où ils n’eussent pris trois ou quatre gerbes. Et pour comble de maux il appelait ce dégat son bon droit, sa justice 20 . Le Couvent se plaignait encore de ce que les Grandson lui avaient fait éprouver de grandes pertes dans son village de Bannens et dans ses possessions auprès de Montricher, etc.

A l’ouïe de ces paroles, le pape Léon, en présence d’un clergé et d’un peuple innombrable, célébra d’abord la messe sur l’autel de Saint Pierre; puis, à la suggestion de l’abbé Hugues, il confirma, à l’ouïe de tous, l’ancienne autorité du lieu, excommunia ses envahisseurs et ses déprédateurs, et, à moins de résipiscence, /19/ les sépara à jamais 21 de la communion de l’Eglise catholique. Et aussi, dit le Cartulaire, parce que les faméliques (famelici) du pays s’attachaient comme des chiens déhontés et enragés à dévorer sans aucune mesure les faibles ressources (substantiolas) des pauvres ecclésiastiques; le Pape, à la suggestion de l’abbé, fixa des limites que les déprédateurs ne devaient pas franchir 22 ; savoir: à l’orient le rocher qui est à la descente du bourg d’Orbe (in descensu vici urbensis); au midi le pont qui est appelé « papuli » (Pompaples), sur le ruisseau du Nozon (super noisonem fluviolum); à l’occident la fontaine voisine du petit village (villula) de Moërier (Moiriacus); au nord enfin le pont des Clées, sur l’Orbe (pons Cletensis super fluvium qui dicitur Urba) 23 .

Or ces limites, souvent rappelées depuis, sont devenues celles de la terre de Romainmotier proprement dite; et la crainte superstitieuse de l’excommunication prononcée par le Pape en favorisa probablement la formation.

Le Prieur de Romainmotier nommé Roclenus, avait reçu le Pape le mieux possible (excellentissime), mais son labeur ne fut pas sans résultat.

Et il faut bien se garder de mépriser le Pape Léon, dit le Cartulaire, car il a fait des miracles.

Sans doute que cette autorité du Pontife de Rome, fit fléchir les dynastes de Grandson, car plus d’un demi siècle s’écoula depuis sans qu’un seul témoignage de discorde se rencontre.— Au contraire, nous trouvons (en 1090 environ) une donation à Saint Pierre de Romainmotier d’une serve (ancillam),nommée Litburga, avec ses fils et ses filles et toute leur postérité, faite par Lambert /20/ de Grandson, Evêque de Lausanne, et son frère Uldric, du lod de leurs frères; donation faite pour l’âme de leurs père et mère, afin que Dieu leur pardonne et à eux-mêmes leurs péchés 24 .

Les deux puissans voisins vivaient donc en bonne harmonie, mais il était difficile que rien ne vint la troubler, surtout avec l’entrelacement des droits seigneuriaux au moyen âge. Aussi au commencement du douzième siècle, voyons-nous le Prieur de Romainmotier, Lambert, se plaindre aux primats du pays (erga principes provinciæ), Waucher * , et Cono de Grandson, de ce que le seigneur Philippe de Grandson et ses fils Falco, Cono et Waucher lui faisaient de grands maux, soit par violence, soit en provoquant les Prieurs par des plaids (placitis) au sujet de certaines prétentions injustes de droits sur quelques hommes de la terre de Romainmotier 25 . Tant fit Lambert, que les primats du pays réunirent à Orbe un conseil d’hommes prudens, clercs et chevaliers, firent venir Guigue, Prieur de Payerne (autre membre de Cluny), et tous condamnèrent les Grandson; toutefois les moines durent leur donner 8 livres de monnaie. Mais de l’amertume était demeurée au fond du vase, et ne tarda pas à se manifester.

L’office de Comte de Vauld avait, nous l’avons vu, été enlevé aux Grandson, et donné à l’Evêque de Lausanne. Or Ebal de Grandson 26 faisait des déprédations nombreuses dans les possessions de Saint Pierre de Romainmotier au sujet de prétentions de droits sur quelques hommes. Un jugement de la cour de Lausanne était intervenu avec envoi de chevaliers comme /21/ ôtages, suivant le mode du temps; mais Ebal de Grandson n’était, paraît-il, pas d’humeur à se soumettre. Alors le Prieur de Romainmotier, Artauld, recourut à un moyen extrême: il se rendit auprès de l’Empereur 27 Henri, à Strasbourg, et en obtint: d’abord une confirmation de tous les dons de Rodolphe de Bourgogne ou d’autres Rois, Reines, Empereurs et Impératrices en faveur de Romainmotier; puis un rescrit adressé 1o à l’Evêque de Lausanne, Gérard de Faucigny, 2o à Amédée III, Comte de Savoie, et à Aimon II, Comte de Genève, pour leur enjoindre de faire exécuter le jugement ci-dessus. Voici la teneur du dernier: « Attendu que Romainmotier est sous notre protection, nous t’ordonnons par la fidélité que tu nous dois, de défendre en tout ce monastère contre Ebal, qui veut le débouter de ses possessions antiques, et mépriser le jugement prononcé par toi et autres hommes prudens, dans la cour de l’Evêque de Lausanne, etc. »

Ebal, désespérant sans doute de résister à cette ligue formidable, se soumit; et touché (corde compunctus), il donna à St. Pierre, du laud de sa femme et de ses fils, le sujet de ses prétentions justes ou injustes. Il posa le don sur l’autel en présence du Prieur Narduin, des moines etc. 28 .

Romainmotier triomphe donc. Néanmoins comme ce même Ebal fonda à peu près à cette époque l’Abbaye du Lac de Joux et la dota richement, on peut sans trop de témérité le soupçonner d’avoir voulu détourner le cours de donations pieuses qui avait son embouchure au Monastère Romain, en lui donnant un concurrent redoutable. Mais si telle fut sa pensée, ses enfans ne la partagèrent pas, car ils ne firent pas moins de dons à Romainmotier qu’à l’Abbaye de Joux, dont ils étaient les Avoués.

Pour suivre la chaîne historique de ces différends nous avons dû omettre bien d’autres faits intercalés; des dons divers, plusieurs bulles de Papes, des contestations avec le Chapitre de /22/ Lausanne, puis la vie remarquable du Prieuré dans la Haute Bourgogne * . Mais nous sommes forcés de mettre quelque ordre dans nos réflexions. /23/


EXISTENCE FÉODALE, CIVILE ET POLITIQUE DE ROMAINMOTIER

 

I.

POSSESSIONS DANS L’EVÊCHÉ DE LAUSANNE

Parlons d’abord de ses jurisdictions seigneuriales et passons en revue les diverses provinces de ce petit Empire, en commençant par la plus considérable, la Terre de Romainmotier proprement dite.

Sans doute que dans le principe Flodovée dota son monastère du terrain qui l’entourait. Plus tard les dons de Rodolphe III de Bourgogne 29 élargirent ce vêtement. Puis vinrent les limites fatales que Léon IX imposa aux envahisseurs du Prieuré 30 .Sous l’impression profonde de cette sentence d’un Pape, au onzième siècle, les limites devinrent un cercle magique, gardé par l’ombre menaçante de Léon IX. On ne peut guère douter qu’elles n’aient contribué à la formation de la Terre de Romainmotier, car à l’époque de cette visite de Léon (1049) et même depuis, le couvent n’était point encore seul à posséder des droits dans les 13 bourgs et villages qui la composaient, savoir: Romainmotier, /24/ Envy 31 , Croy 32 , Lanffrey 33 , Juriens 34 , Premier 35 , La Praz 36 , Vaullyon 37 , Vallorbes 38 , Brethonnières 39 , Bofflens 40 , Arnay ou les Arnetz 41 , et Agyz 42 .

Voici quelques preuves naïves des mœurs du temps et de cette formation successive de la Terre de Romainmotier.

Beaucoup de débats avaient eu lieu entre Romainmotier et Wido, du Château de Siccon (en Bourgogne), qui faisait des réclamations en quelque sorte fondées (calumpniabatur quasi juste) au monastère, sur quelques serfs de Vaullyon (in valle Leonis) et avait en conséquence enlevé un grand butin dans les possessions de Romainmotier. Le Prieur et ses prédécesseurs déjà en avaient souvent réclamé la restitution, quoique sans résultat. Enfin ils se rendirent en 1097 à Orbe, en présence de Burchard, /25/ avoué de ce bourg (advocatus ipsius vici), et d’autres chevaliers du voisinage 43 , et là il fut décidé qu’ils se tairaient tous deux et aussi longtems l’un que l’autre.

En 1141 Ebal (Eubalus) de Grandson et son frère Barthélemi, confirmèrent à Romainmotier le don de leur père Ebal, que nous avons vu, y compris des droits sur plusieurs hommes et femmes, qui étaient de la jurisdiction de Romainmotier:

Voulant encore que si quelques-uns par crainte s’étaient, durant les différends passés, enfuis de la Terre de Romainmotier, ils pussent y revenir et servir en paix l’Eglise; en un mot ils mirent terme à tous leurs autres différends, présens ou passés, et reçurent pour le tout quatre livres, du Prieur Wido 44 . C’est que Grandson et Romainmotier étaient tous deux las de tant de querelles et de débats.

A peu près à la même époque d’autres Grandson, le sire Falco et ses frères, donnèrent à Romainmotier Pierre, surnommé Chevalier (cognominatus miles), ses quatre fils, ses quatre filles, et leur postérité, et cela pour l’âme de Philippe leur père, qui repose à Romainmotier, et de leur mère et autres parens. Ce don fait d’abord solennellement au Château de Grandson, dans la main de Guido (in manu Guidonis), Prieur de Romainmotier, et de Guigue, Prieur de Payerne, fut confirmé et consommé à Romainmotier en présence du couvent par un caillou placé sur l’autel 45 . /26/

Bientôt les dons des Grandson affluèrent.

En 1154, Falco et Cono, représentans des deux branches de Grandson et La Sarraz, abandonnèrent à l’Eglise de Romainmotier tous leurs droits sur dix familles au moins 46 .

Puis en 1158 Barthélemi, fils d’Eubal, partant pour la croisade, (iturus Jerosolymam) mit aussi sur l’autel de Romainmotier un don confirmé le même jour à La Sarraz en présence de Guillerme, prieur de Payerne. Ce don consistait en terres, outre plusieurs femmes ses sujettes, qui s’étaient unies à des hommes de Saint Pierre de Romainmotier, et qu’il donna avec leurs fils et leurs filles 47 .

Autant jadis les Grandson étaient ennemis acharnés, autant ils se montrent amis maintenant. Peut-être avaient-ils des remords. Le Pape Léon, les limites qu’il avait fixées, l’autorité du lieu méconnue, agitaient leur conscience, alors surtout qu’ils se disposaient à entreprendre le redoutable voyage d’outre mer, et que pleins d’enthousiasme religieux et guerrier ils prenaient la croix et consacraient leur vaillante épée à la défense du saint sépulcre contre les infidèles.

Les terres des Grandson cernaient de toutes parts celles du couvent, de là de fréquens mariages entre leurs sujets réciproques, et ces mariages mixtes étaient une épine. Dans nombre de cas en effet, les enfans, fils et filles, suivaient la condition de leur mère, et non de leur père * . Ainsi les enfans d’un homme sujet de Romainmotier devenaient par leur mère sujets de La Sarraz, et l’on comprend combien cette introduction d’un pouvoir étranger sur leurs possessions était à charge aux Prieurs; /27/ de là les dons des Grandson; de là plus tard l’interdiction de ces mariages mi-partis.

Mais le patrimoine de St. Pierre de Romainmotier s’agrandissait à chaque différend. L’astre du prieuré brillait de tout son éclat 48 .

Voici deux preuves explicites de la formation graduelle de la terre de Romainmotier.

En 1256 Rainauld, dit de Valmarcul, donzel, reconnaissant des nombreux bienfaits qu’il a reçus de R. prieur de Romainmotier et de ses moines, leur abandonne tout ce qu’il possède dans le territoire de Agyz (Agyaci); et cela en compensation de 100 livres de dommages causés par la réclamation d’une terre 49 . La compensation devait au moins équivaloir à cette somme considérable alors. On peut donc voir dans la donation du Seigneur de Valmarcul, le couronnement de l’édifice seigneurial de Romainmotier à Agyz dont la première pierre avait été posée par le roi Rodolphe III de Bourgogne en 1011 50 .

Autre preuve:

En 1252 Cono, dit de Arnay, donzel, fait hommage au prieur de Romainmotier et reçoit en fief de lui tout ce qu’il possédait auparavant par droit héréditaire ou par sa mère dans tout le /28/ village et le territoire d’Arnay, et cela pour dix livres à lui payées par le prieur 51 . Cet acte intéressant nous révèle les premiers rapports du Couvent de Romainmotier avec la famille d’Arnay, primitivement indépendante et qui se soumit à la vassalité en échange d’une protection bien nécessaire dans ces temps de troubles où la liberté sans la force était un fardeau 52 .

La terre de Romainmotier avait donc atteint ses limites naturelles par l’adjonction du fief d’Arnay. Elle s’étendait depuis la région des noires joux et des pâturages du Jura, jusqu’à celle des vignes; ayant pour lisière l’Abbaye du lac, les Clées, la rivière de l’Orbe, le village de Pompaples, et la fontaine de Moërier: comprenant surtout la vallée étroite et pittoresque de Romainmotier, dont les versans couverts d’une végétation vigoureuse, livrent passage à leurs pieds à un faible ruisseau tantôt calme, tantôt se précipitant au travers des rochers en cascades à demi voilées par le feuillage; comprenant encore le plateau accidenté, couvert de villages, de bois, et de cultures diverses qui sépare cette vallée du Nozon de celle de l’Orbe.

Dans nombre d’endroits les limites étaient marquées par des croix de pierre; touchant souvenir du ciel au milieu des préoccupations terrestres.

Bientôt un compromis important se présente qui nous fait connaître la situation politique et sociale des hommes de Romainmotier. C’est le Plaid général (Placitum generale) de 1266. /29/

En voici la teneur 53 .

Que tous présens et à venir sachent qu’un grave et coûteux différend ayant existé longtems, entre le Prieur et les religieux d’une part, et leurs hommes de la Terre de Romainmotier de l’autre, au sujet de diverses coutumes et redevances prétendues et déniées par ambes parties 54 : après beaucoup de choses pénibles (gravamina) et de dépenses, un compromis à l’amiable est intervenu, avec promesse solennelle sur les saints Evangiles, de l’observer à jamais, et de le rappeler dans le plaid général (in placito generali recitentur).

Donc entre la Toussaint et la Saint Martin, le Prieur doit ordonner à ses Mayors 55 d’annoncer chacun dans sa paroisse, que le plaid général se tiendra trois jours de suite. Chaque chef de famille 56 est tenu d’y assister, et après cette publication nul ne doit s’éloigner de la Terre assez pour ne pas prêter présence au Plaid général, sauf permission du Prieur, et ce sous peine de 3 sols.

Le premier jour de ce plaid, tous étant assemblés en un même lieu, les mayors (maiores) de la Terre doivent successivement, à l’ordre du Prieur, appeler tous ceux de leur paroisse par leur nom 57 . /30/

Puis le Prieur ordonne à quelqu’un de ses officiers (uni de familia) de publier (bampnire) le plaid général; mais personne ne doit quitter sa place ou parler sans la permission du Prieur, ou exciter quelque querelle , ou tenir des discours qui fassent perdre au Seigneur quelque chose de ses droits; sous peine de 3 sols d’amende.

Le moment sera mieux choisi que tout autre, pour placiter ou abandonner quelque terre. Et après la publication du Plaid, s’il surgit quelque difficulté touchant les chemins (de dévestiture) ou pâturages communs, personne ne doit innover jusqu’à sa tenue, et jusqu’à ce que le Prieur ait fait ses tournées (viatas), s’il le trouve à propos (pour en juger lui même), sous amende de 3 sols.

Or pour bien connaître les droits du Plaid général, soit ceux du Prieur et de l’Eglise , soit ceux de la terre, le Prieur doit envoyer (mictere) le doyen (decanum), sa maison (familiam suam) et les Jurés de la terre (Juratos terre), dont il y a deux par village. Et si ces envoyés (missi) veulent un Conseil supérieur (majus concilium), ils doivent le demander au Prieur, qui le choisira parmi les moines et autres, qui mieux connaissent la coutume du Plaid général.

Maintenant voici la teneur de ce Plaid, non moins remarquable que son organisation.

En premier lieu les hommes de la terre sont hommes libres de l’Eglise de Romainmotier. — Prenons acte de cette absence du servage de la glèbe, au treizième siècle, dans un groupe de douze villages au moins de la Patrie de Vaud. Grande sera notre surprise après les donations de familles entières que nous avons vues: c’est que souvent la langue du moyen âge nous est étrangère. 58

Pour avoir la clef des usages qui suivent il faut partir du principe vrai ou faux qui en est la base, c’est que le sol était la propriété du Seigneur. Tout établissement des hommes de /31/ la Terre était considéré comme une ferme illimitée, un bail emphytéotique et perpétuel. De fait, le Prieur et les moines pouvaient se croire les vrais propriétaires du pays en se rappelant les privilèges des Papes, le Testament de la Comtesse Adélaïde, la confirmation du roi Conrad, et de son épouse Mathilde, les donations du roi Rodolphe et de bien d’autres encore. D’après la règle de Saint Benoît, ils avaient même dû contribuer par le travail de leurs mains à changer en domaines fertiles les forêts primitives; et l’ombre de la religion, seule alors respectée, en avait protégé l’accroissement. Cet ordre de choses était bien plus légitime que la conquête par la force brutale.

Tout établissement des hommes de la Terre était donc considéré comme une ferme illimitée, mais celle-ci avait une forme féodale et particulière et avait pour conséquence la condition mainmortable des propriétés qui règnait, peu s’en faut, sur toute la Terre 59 et en vertu de laquelle le Seigneur entrait en possession de tous les biens meubles et immeubles de celui qui mourait sans héritiers naturels ou légitimes, c’est-à-dire en ligne directe ou indivis 60 . Les Jurés de la terre devaient faire rapport de ces échûtes (exchetas) de la mainmorte. On devait se fier à eux; c’est la coutume, dit le Plaid, et avant ce rapport le Seigneur ne peut entrer en possession de ces biens, au moins pas (saltem) des immeubles.

Ces hommes libres de l’Eglise devaient, s’ils voulaient abandonner la terre, en demander la permission au Prieur; c’est qu’ils pouvaient avoir contracté des obligations, des dettes; mais lorsqu’il n’en était point ainsi, le Prieur était obligé d’accorder cette permission et faisait conduire le partant avec ses /32/ biens meubles, un jour et une nuit; mais les immeubles demeuraient l’héritage incontesté de l’Eglise.

Un séjour seul hors de la terre pendant un an et un jour consécutifs sans permission, entraînait la confiscation des immeubles.

La loi même visait à une appréciation équitable des motifs de ce départ. Celui qui avait quitté la Terre par pauvreté, ou par suite des vexations de la guerre pouvait toujours et ses héritiers après lui recouvrer ses immeubles. — Celui en revanche qui la quittait par orgueil, enflé par ses richesses et emmenant ses héritiers avec lui, se voyait à jamais avec eux privé de ses biens.

Il était permis d’engager, échanger et vendre, en cas de nécessité, même la totalité de ses biens à un homme de condition égale, à son pair (pari suo), c’est-à-dire à un homme de la Terre.

Mais celui ou celle qui s’unissait par mariage à une personne qui n’était pas de condition libre devait quitter la Terre et perdre ses biens 61 . Cet article curieux était une barrière contre l’envahissement d’une seigneurie étrangère dans le domaine de l’Eglise; on avait souvenir des différends avec les Grandson.

Le Prieur craignait aussi la formation d’un Etat dans l’Etat, comme le témoigne la défense de faire quelque serment ou alliance ou de jurer bourgeoisie en quelque village, château, cité, ou ville forte; ou de rechercher le patronage de quelque Seigneur, contre l’intérêt de l’Eglise, sous peine de quitter la Terre et perdre ses biens à moins de venir à résipiscence dans un terme fixé par le Prieur. — On pourrait voir aussi dans cette défense une précaution contre ces associations offensives et défensives, nommées ghildes, indigènes dans le nord et qui /33/ s’étendirent jusques en Gaule. Ces associations, vraies sociétés secrètes du moyen âge, étaient fort redoutées et proscrites sans cesse 62 .

On devait des aides ou subsides au Prieur dans quatre cas. 1o Dans les procès sur sa juridiction. 2o En cas de destruction des récoltes du Prieuré, pourvu que le dommage n’eût pas atteint les hommes de la terre. 3o Pour achat de quelque terre ou revenu. 4o Pour faire la réemption de quelque partie du domaine de l’Eglise engagée par le Prieur, du consentement commun 63 .

Le complément de toute cette législation est le droit de replaict, accordé au plus proche parent de celui qui mourait sans héritier (direct, ou indivis), ou abandonnait la terre. — Un acte du 15e siècle, explicatif du Plaid général, statue: qu’au dire des anciens, il devait obtenir du Seigneur ces biens, pour un prix inférieur d’un tiers à leur valeur 64 . C’était une transition de l’état de ferme perpétuelle à l’état de propriété entière.

Dans une pressante nécessité, les hommes de la terre devaient suivre la chevauchée du Seigneur, pour l’utilité de l’Eglise; faire /34/ faire l’inspection de leurs armes par le Châtelain (de Romainmotier) et lui obéir. [NB: ce passage a fait l'objet d'une rectification dans les Rectifications et Additions, p. 893]

Enfin il était expressément reservé que s’il y avait à innover dans les coutumes susdites, cela se ferait d’un commun accord dans le Plaid général. Et par ces derniers mots ce Plaid général (placitum generale), composé de tous les chefs de famille de la Terre, rappelle tout à coup et d’une manière bien inattendue les Landsgemeinde des petits Cantons.

Ces usages bizarres sans doute n’étaient point cependant le régime du bon plaisir, puisque des deux parts il y avait réserve de droits et moyen légal de changemens 65 .

Nous nous tromperions au reste en voyant dans l’acte de 1266 la création du Plaid général; il n’en fut qu’une modification. — Un acte de 1263 66 nous révèle un fragment du Plaid général existant alors, où l’on croit entrevoir un indice d’une haute antiquité. Alors cette forme, surannée, aurait dû être changée au 13e siècle, parce qu’elle ne correspondait plus à l’état de la société.

Nous ne connaissons dès lors jusqu’au 16e siècle qu’une seule modification apportée à ce plaid général; elle est honorable pour la Terre.

Le Prieur Jean de Seyssel (1393) et le couvent assemblés au son de la cloche, concèdent gracieusement aux hommes de la Terre que les armes de tout genre qu’ils pourront se procurer, /35/ cuirasses, casques, épieux, gantelets, lances et autres (diploydes?), seront affranchies de la servitude de la mainmorte, sans que l’on puisse jamais les prendre en gage; et cela en vue de l’utilité évidente du Prieuré et de toute la Terre, et aussi, dit le Prieur, en considération de l’affection que nos sujets nous ont toujours témoignée, et des sinistres scandales des guerres du château de la Sainte Croix, d’où le sire chevalier Guillaume de Grandson avec ses gens d’armes, vient ravager la Terre et se dispose à continuer ses incursions et ses déprédations aussi violentes qu’injustes. — Ces agresseurs avaient probablement rencontré une résistance victorieuse, qui donna lieu à la demande de la Terre et à la concession du Seigneur.

On peut voir dans Grenus (p. 30) une mention faite de ces déprédateurs du Château de la Sainte Croix. Il semble qu’ils aient occasionné la même année (1393) une expédition militaire de la Patrie de Vaud 67 . — Guillaume de Grandson était proche parent de cet Othon bien connu par son duel avec Girard d’Estavayer (en 1396), et n’y aurait-il pas quelque connexion entre l’existence de ces déprédateurs et le mauvais vouloir du pays envers Othon? « M’a été rapporté, » disait celui-ci, « qu’au pays de Vaud, me tiennent pour ennemi, mais c’est à leur grand tort, considéré que ni moi ni mes devanciers ne leur fîmes oncques choses dont eux me dûssent tenir pour tel 68 . » Othon de Grandson pouvait ne point être complice des déprédations de Guillaume, bien que peut-être le pays établit solidarité entr’eux: il n’en est point accusé par le Prieur de Romainmotier, dont le langage acerbe respire toute l’indignation d’une injure récente, /36/ et ne saurait se concilier avec aucune réticence et aucun ménagement 69 .

Au surplus, il y avait sans nul doute à ces courses dévastatrices une autre cause que le désir du butin. Le mal du moyen âge, la presque nullité de la force publique, engageait chacun à se faire justice à soi-même, mais non sans quelque motif d’irritation. Ces expéditions de Guillaume de Grandson étaient peut-être une recrudescence des anciens différends de cette maison avec le Prieuré. Cette plante trop vigoureuse, portait ombrage aux Grandson et l’inimitié assoupie se réveilla à quelque occasion à nous inconnue. L’idée de changemens était si antipathique à l’esprit du moyen âge, que les donations de Rodolphe suscitaient encore des orages près de quatre siècles après sa mort.

Les charges soit impositions de la Terre de Romainmotier étaient nombreuses 70 .

Mentionnons d’abord les échûtes de la Mainmorte soit des biens meubles et immeubles de tous ceux qui ne laissaient point d’héritiers en ligne directe ou indivis. Cet impôt modifié par le droit de replaict accordé au plus proche parent, devait cependant être d’un rapport considérable.

Puis les Aides ou assistances éventuelles dues au Prieur en quatre cas 71 .

Venaient aussi les Aumôsnes soit l’Aumônerie, c’est-à-dire qu’à la mort d’un chef de famille, ayant charrue, une de ses bêtes de /37/ somme revenait de droit au Seigneur. L’héritier indiquait un animal à son choix, le Prieur le faisait estimer par deux preud’hommes (Probi homines), retranchait cinq sols de la taxe et se contentait du surplus. Cette aumône obligatoire des défunts était un impôt considérable, par l’extension qui lui était donnée 72 .

La dixme existait à Romainmotier, cela s’entend. Le blé devait être conduit dans les granges du Seigneur. En cas de nécessité on pouvait moissonner quatre ou cinq gerbes, sans attendre le percepteur; on pouvait aussi en cas de pluie charger un char de gerbes, et le décharger en partie pour retourner aux champs; mais le second char ne devait pas être déchargé sans appeler, selon l’ancien usage, le Décimateur ou doyen (decanus) * . La dixme des graines et du légume rapportait deux cents muids. On la levait encore sur le vin, les pailles, le chanvre. La dixme de la laine et de tout le bétail naissant appartenait soit au couvent, soit aux Curés 73 . /38/

L’impôt appelé gerbe de la moisson, d’un bichet (soit demi coupe) de froment pour chaque homme marié ou veuf, et d’un bichet d’avoine de chaque femme mariée ou veuve, était un impôt pesant et d’une origine assez bizarre 74 .

Chaque frêste (toit à deux pentes) de la terre payait un bichet de froment pour l’Aumôsnier (office du couvent), et autant pour la maréchallerie, c’est-à-dire pour l’exécution de la Justice.

Item. Chaque maison, dit le Plaid, doit une fois l’an à l’Eglise un chapon, si elle en a; sinon on ne peut la gâger, à moins qu’il n’y ait de la malice dans cette absence de volaille. On pourra en exiger le serment.

Citons encore le droit de forage, soit une coupe de vin pour chaque muids vendu au cabaret.

Enfin les vendes des foires et marchés, estimées 20 Sols par an. 75

Il y avait aussi des corvées.

Chaque charrue devait trois corvées de labourage ou en place dix sols.

Chaque attelage devait encore le charriage de quatre tonneaux de vin du Seigneur, à ses frais, depuis Brussins. A chaque char apportant deux tonneaux, on devait deux pots de vin, afin de ne pas boire au tonneau, et de plus 16 miches de pain de ménage. /39/ On pouvait s’exempter de ce charriage en payant 4 sols par tonneau.

Chaque attelage devait encore le transport des matériaux pour les édifices de l’Eglise et du Seigneur, bien entendu sans dépasser les limites de la terre 76 . Et de plus il devait amener un char de fagots au Prieuré.

Chaque feu, sans attelage, devait une corvée de cognée dans les bois, et aussi une journée de bêche (ligonis) dans les jardins du Seigneur. Puis une journée de faux, ou de faneur, ou (pour les attelages) de transport de foin dans les prés du Seigneur voisins de chaque village 77 .

Enfin il y avait des monopoles.

Les Fours, par ex., étaient bannaux. Chacun sous amende devait se servir de celui de son endroit. C’était un bon revenu 78 . Les Moulins étaient placés sous le même régime 79 , ainsi que le Battoir de Romainmotier avec la scie (ressia) et la Foule sous Croy ou chacun devait faire teindre ses étoffes 80 .

Ajoutons qu’un fort impôt dit la cense des Clées se payait au Duc de Savoye en échange de sa protection. Chaque frêste (toit à deux pentes) de la Terre lui devait une coupe de froment, deux coupes d’avoine, un chapon et six deniers; cet impôt s’élevoit au moins à 200 florins. /40/

Enfin la plupart des terres, en rapport, payaient une modique cense seigneuriale.

Les corvées dûes au Seigneur, étaient pour la culture du domaine qu’il tenait à ses mains (ad manus suas); soit de prés, jardins, champs, et vignes, d’une étendue considérable; plusieurs bâtimens y étaient annexés 81 .

Le Couvent s’était aussi réservé deux étangs pour le poisson, dont l’un considérable se reconnaît encore 82 .

Enfin tous les bois, ou peu s’en faut, qui hérissent les deux versans de la vallée du Nozon au-dessous de Romainmotier, et leur prolongement sur le plateau 83 .

Bien entendu qu’il n’est pas ici question du domaine du Seigneur à Vallorbes qui, tout en faisant partie de la Terre de Romainmotier avait cependant d’autres usages, ni surtout du revenu d’autres possessions fort étendues des religieux 84 ; nous serons donc rassurés sur la crainte de voir le Prieur et les moines manquer du nécessaire.

Quant à l’appréciation difficile de la pesanteur des impôts de la Terre, il faut se contenter d’un à-peu-près.

Dans une supplication adressée en 1453 par le prieur Jean Louis de Savoie au Duc son Père pour l’exemption d’un subside, /41/ il rappelle les franchises de la Terre et la lourde cense des Clées, puis ajoute que d’autre part les hommes de Romainmotier ont des charges multipliées et presque insupportables vis-à-vis du Prieuré; et que tant par suite de pestes excessivement fréquentes (pestes creberrimas), qu’à cause des fardeaux qui leur incombent et aussi parce qu’ils sont en un lieu stérile, ils sont chaque jour annihilés et amoindris de telle sorte qu’il en existe à peine la moitié autant qu’autrefois 85 . Au premier abord cet exposé de l’état de la Terre remplit le cœur d’une compassion douloureuse. Toutefois il accompagne une demande d’exemption de subside, et bien qu’il ne puisse être entièrement imaginaire 86 , il perd par cette circonstance quelque peu de son poids; souvent en effet on exagère la vérité pour la rendre plus émouvante. Mais si les charges qui pesaient sur la terre étaient lourdes, et nous ne saurions affirmer n’en avoir omis aucune de peu de conséquence 87 , c’est moins en elles-mêmes que mises en regard de l’état de l’agriculture.

En effet les corvées de labourage, de faux, de cognée, de charrois même du vin , données en échange d’une nourriture abondante ne devaient pas être fort onéreuses: beaucoup de fermes de nos jours ont des conditions pareilles. /42/

Le droit de vendre vin au cabaret se paie partout; chaque homme de la terre avait même la faculté d’en vendre, sans payer de forages, un demi-muids de son crû.

De plus la nécessité est mère de l’industrie. La lourde cense des Clées se levait par frêste (par toiture à deux pentes); bientôt de nombreux ménages se logèrent à l’ombre d’une seule toiture, prolongée sur plusieurs maisons; ainsi chaque ménage ne dût qu’une petite fraction de l’impôt. En vain les receveurs réclamèrent, croyant les droits du Prince lésés par cette invention. L’usage en prévalut, au point qu’une enquête ayant été faite par Berne en 1589, elle avoua « le dit tribut n’avoir oncques été payé, ni es Comtes et Ducs de Savoie , n’y à nous dempuys nôtre heureuse conqueste, par chefs de focage, ains par maisons » 88 .

Cette même invention enlevait tout aiguillon au bichet de froment perçu par l’aumônier et à celui perçu pour la maréchallerie.

Restaient donc les grands impôts de la gerbe de la moisson, appelée aussi cense des mariages, de la dixme, puis la pièce de bétail de l’aumônerie, les échûtes de la Mainmorte , et les assistances éventuelles dues au Prieur.

Mais pour envisager la situation de la terre sans préjugé, il ne faut pas oublier que plusieurs charges, fort lourdes de nos jours, n’en atteignaient pas les habitants.

L’impôt militaire, par ex., dont ils étaient exempts ou peu s’en faut.

Ils pouvaient aussi sans payer aucun droit de mutation vendre tous leurs immeubles. Il est vrai que cette faculté étant restreinte à leurs pairs, c’est-à-dire aux hommes de la Terre, c’était une grande entrave pour le commerce. /43/

De plus ils avaient un avantage que doit nous faire apprécier la valeur croissante du combustible; l’usage de bois nombreux, soit pour affouage, soit pour charronage, soit pour bâtir.

Ils avaient encore l’usage de nombreux pâturages (Pasquiers), de carrières etc.

Enfin l’acte d’affranchissement de la condition mainmortable des propriétés , accordé à la Terre à la fin du 16e siècle, nous fournit une précieuse donnée sur le revenu de la mainmorte, des aydes qui l’accompagnaient, de l’aumônerie 89 et du charroi obligatoire des gerbes de dixme, dans les granges du Seigneur. Tous ces impôts, est-il dit, ne rapportaient pas autant au Seigneur que les lods et ventes au huitième denier qu’on leur substitua 90 .

Après calcul exact la position des hommes de la Terre ne paraîtrait donc pas triste, avec une agriculture perfectionnée, mais là était le mal. Tout retentissait de plaintes sur la stérilité du sol, et sur la pauvreté d’un pays, qui est plutôt riche aujourd’hui, grâce aux progrès agricoles 91 .

Les nombreux actes de non-préjudice que renferment les archives de Romainmotier viennent à l’appui de nos calculs.

Faciles étaient nos pères, en général, au sujet des services à rendre à leurs princes. Leur loyauté, leur désintéressement se montraient sans cesse à découvert. Mais ne voulant pas que l’on tirât à conséquence indue, pour l’avenir, leurs bons offices, lorsqu’ils allaient au delà des dreytures, ils avaient soin de demander un acte de non-préjudice, témoignage tout-à la fois de leurs franchises et de leur loyale affection pour le souverain. /44/

Mais si leurs charges habituelles eussent été , comme le dit la supplique, « quasi insupportables » ils ne s’en seraient pas si facilement imposé de nouvelles 92 .

Du reste ces charges ne pesaient pas d’une manière uniforme sur tous les habitans de la Terre. Le moyen âge, on le sait, était moins l’époque de l’égalité que du privilège. Et ici se présenteront quelques particularités originales.

Et d’abord le bourg de Romainmotier était distingué en deux parties: a) La Combe, composée des maisons construites au fond de la vallée sur le même plan que l’Eglise et le Cloître , et habitées par les borgeys proprement dits; b) Assommotier qui se trouvait au-dessus du moûtier.

Or les habitans de la Combe avaient des franchises dont ceux de Assommotier étaient privés 93 .

Deux autres localités en possédaient aussi de nombreuses: Vaullyon et Lapraz. La situation froide et stérile du premier les explique. Quant à Lapraz, ses franchises très-considérables étaient balancées par de bien fortes redevances 94 .

Il y avait aussi quelques immunités ecclésiastiques 95 . /45/

Enfin et surtout il y avait dans la Terre une classe de fonctionnaires grandement privilégiés qui formaient une aristocratie réellement originale. On les nommait les Francs (Franchi).

Parmi eux se trouvaient d’abord sept Mayors ou Villici. Ils étaient les hommes d’affaires, les lieutenans du Seigneur, chargés de représenter les intérêts de l’Eglise. Leur office était analogue à celui de nos Juges de Paix et de nos Receveurs tout à la fois. Ils avaient des cours dont la jurisdiction était, il est vrai peu étendue, et ils devaient ouïr les causes devant leurs maisons. Ils devaient de plus veiller aux récoltes du Seigneur dans leur voisinage. — Celui de Romainmotier en particulier devait recevoir les sermens des bourgeois et syndics de Romainmotier et des « messeilliers » de la paroisse. Il devait encore le cas échéant remplacer le Châtelain. Enfin il avait la charge de justifier et signer les poids et mesures de toute la Terre. Il semble donc que cette mayorie avait une sorte de prééminence sur les autres 96 .

Le huitième Franc était le Sautier (Salterius), sorte d’huissier du Châtelain et du Mayor de Romainmotier 97 .

Le 9e le Maréchal (marescallus) était le gendarme, la maréchaussée de la Terre 98 . /46/

Les 10me et 11me deux Forestiers ou garde-forêts 99 .

Le 12me le Sommier (sommerius), avait l’office de conduire loz bahu (le coffre, la malle) du Prieur quand il se rendoit au chapitre de Clugny ou ailleurs. — Il devoit garder loz bahu dans l’hôtellerie (in hospitio) et obéir au Seigneur dans le voyage, comme un serviteur (tamquam servus) 100 .

Le 13me le Marrilier (matercularius) devait porter le vase d’eau bénite devant la procession, soit dans l’intérieur du Cloître, soit à l’extérieur. Il devait aussi pourvoir d’eau pour être bénite, et porter celle-ci aux lieux accoutumés de l’Eglise 101 , à chaque Dimanche et fête solemnelle.

Le 14me le Portier (Porterius seu Janitor). A cette époque le couvent, l’Eglise, les prisons, etc. étaient entourés de murailles élevées qui en faisaient une petite ville fortifiée dans une plus grande; une sorte de citadelle monastique. Le Portier d’icelle était là non-seulement pour la sûreté générale, mais encore pour le bon ordre et la décence 102 .

Enfin, ce qui est caractéristique, le 15me Franc était le Cuisinier (Cocus) du Couvent 103 . /47/

Ces Francs formaient une vraie classe privilégiée, intermédiaire entre le Couvent et le reste de la Terre; sorte de chaînon qui les unissait.

En effet, outre certains salaires 104 , ils étaient encore francs de toutes clames; des charriages de vin 105 et du bois de construction (marrin); des corvées de charrue, de coupe de bois, et de travail dans les jardins; des journées de faux et de faneur; des vendes dans les foires et marchés; de la redevance d’un chapon à Noël; des impôts de la maréchaussée et du bichet de froment de l’aumônier; ils prétendaient remplacer la pièce de bétail de l’aumônerie par 60 sols; enfin ils étaient exempts de la lourde cense des Clées 106 .

Il était dû par chacun pour reprise (pro repreisia ou propter repreisiam) c’est-à-dire quand il y avait mutation de personne dans l’office 107 , soixante sols. C’est que ces offices des Francs avaient été inféodés à leurs titulaires, par le Seigneur; et qu’à chaque mutation de personne, il y avait reprise de ces fiefs d’un singulier genre. Par là on reconnaissait la suzeraineté du couvent, qui redoutait, non sans raison, de laisser s’établir dans la Terre un pouvoir indépendant.

Or au 15e siècle ces offices de Francs se transmettaient par /48/ héritage du père aux fils, et même aux filles, pour ne pas parler d’un dégré plus éloigné 108 .

Ils pouvaient 109 s’engager, se vendre, et se cumuler. Ils pouvaient même se morceler, ce qui est passablement étrange et devait entraver beaucoup l’accomplissement des charges de l’office.

On trouve encore des exemples de veuves usufruitières des biens de leurs maris, y compris tel ou tel office de franc.

Tous enfin étaient assujettis à la condition mainmortable 110 .

Et, chose peu en harmonie avec les idées répandues! les familles nobles résidant en la Terre 111 , étaient privilégiées /49/ beaucoup moins par suite de leur noblesse que par les offices de Francs qu’elles possédaient: à ces offices tenaient leurs immunités et non à leur noblesse héréditaire. Bien plus, ces offices furent plus d’une fois une source, une occasion d’anoblissement 112 .

Les Francs étaient donc la vraie aristocratie de fait de la Terre de Romainmotier.

Ces offices se trouvent mentionnés de bonne heure.

Cette famille (familia), ces serviteurs (famuli) du Prieur dont il est question souvent dans les anciens actes, n’étaient autres, que les Francs à ce qu’il paraît. — Sous le Prieur Vitfred, par ex. au 12e siècle, Bencelin, chevalier de Agiez changeant de demeure à cause des embûches de ses ennemis, vient au couvent habiter au milieu des officiers (inter famulos) et sur le même pied qu’eux 113 ; et parmi les témoins de l’acte se trouve Richard le cuisinier (Cocus). — Dans le commencement du même siècle, on trouve Constantin, officier (famulus), et Turombert, mayor (Villicus), témoins d’un autre acte 114 , etc.

L’état de ces offices que nous avons passé en revue est de la seconde moitié du 15me siècle 115 . Tous étaient alors régis par un système unique. Le Couvent les avait façonnés selon ses /50/ vues; mais il n’en avait pas toujours été ainsi, et ces franchises reçurent successivement diverses modifications.

Voici, par exemple, un acte de 1226.

Humbert abbé du Lac (de Joux) et Jean seigneur de Prangins, font savoir, que les religieux de Romainmotier ont rendu à Pierre fils de Perrotin, bourgeois de Lausanne, le châzement (casamentum) de Pierre, chevalier de Romainmotier, ayeul maternel de Perrotin, et bisayeul (proavus) de Pierre. Or Perrotin faisant hommage au Prieur sera tenu de desservir ce châzement, jusques à ce que son fils soit parvenu en âge de discrétion. Et telle est la coutume de Romainmotier que nul ne peut tenir un châzement de l’Eglise à moins de résider dans les terres de celle-ci, et de n’avoir aucun autre Seigneur que le Prieur. Or celui qui en est pourvu ( « casatus istius casamenti ») est tenu de venir chaque jour prendre les ordres du Prieur et de les exécuter fidèlement. Si plus tard Pierre ne voulait pas ratifier la démarche de Perrotin son père, qui, sans réclamation, l’a offert pour homme libre à Dieu et à St. Pierre, devant le grand autel de Romainmotier, ils n’auraient ni l’un ni l’autre aucun droit sur ce châzement 116 . — Qui reconnaîtrait dans ce châzement la mayorie de Romainmotier, et pourtant, on peut croire qu’il en fut l’origine.

Un siècle plus tard (en 1356) nous trouvons un débat entre le prieur Arthaud Alamand et le couvent d’une part, et Guillerme, mayor de Romainmotier. Le Prieur prétendait qu’après la mort de son père celui-ci était tenu de replaciter à miséricorde l’office de la mayorie et ses héritiers après lui; et que de plus Guillerme /51/ était tenu à l’aumône d’une pièce de bétail, comme les autres hommes de la Terre de Romainmotier. Guillerme s’en défendait. Un arbitrage 117 lui donna tort.

Partout les possesseurs de fiefs, grands ou petits, tendaient à l’affranchissement de leurs obligations envers le Suzerain; mais ainsi ne l’entendaient pas les religieux, qui sans doute avaient souffert de ces velléités d’indépendance. Une autre querelle avait éclaté déjà sous le père de Guillerme, mayor. Le Prieur soutenait: a) qu’il devait charrier dans ses granges les dixmes et quintes 118 de ses bleds, comme les autres hommes de la terre , et le mayor prétendait en être franc; b) qu’il ne devait rien percevoir sur les biens meubles des délinquans, tandis que le mayor prétendait y avoir la meilleure part; c) enfin celui-ci réclamait le droit de marquer (signare) et sceller (sigillare) les mesures du blé et du vin dans la Terre, et quelque part des bans encourus à ce sujet. — Un arbitrage termina ce débat 119 . La faculté de sceller les mesures lui fut confirmée, mais en signe qu’il la tenait du Seigneur (recognitionis), il dut payer 3 sols annuels au doyen 120 . — Toujours la /52/ même crainte d’un pouvoir indépendant. — Et sous peine de perdre sa mayorie (sub pena villicationis) il devait être fidèle aux religieux dans l’exercice de son office.

Autre vestige du travail d’assimilation de ces offices de Francs.

En 1277 les religieux donnent en possession héréditaire à deux frères, Pierre et Willelm , la maréchallerie (mareschaciam nostram) à condition de bien remplir les offices des « marescalli » et de s’acquitter fidèlement de l’exercice de la Justice. Et en cas de replaict 121 le Prieur ne pourra exiger plus de 10 livres, et les deux frères payeront annuellement 40 sols de cense. — Dix livres de replaict, 40 sols de cense, révèlent un office considérable.

Puis, de 1315 à 1322, quatre chefs de famille dits maréchals (ou maréchauz), enfans et héritiers de Pierre et Willelm, vendent successivement à leurs benins Seigneurs , et du consentement de leurs enfans (neuf nommés), leurs droits sur cette maréchallerie, pour la somme fort élevée de cent et huit livres. — C’est que la maréchallerie avait alors encore des droits étendus sur tous les villages de la Terre 122 , y compris des redevances de bled, et autres 123 , et que probablement le Prieur Willerme de /53/ Montricher racheta à cette époque le bichet de froment que devait chaque frêste pour la maréchaussée.

L’exercice de ces franchises était quelquefois onéreux. — En 1443, par ex., la veuve d’Anthoine de Mont vend une possession pour payer une dette de son mari, contractée envers Jean de Juys prieur, à cause de son office de la franchise de la foresterie.

Plusieurs de ces noms d’offices devinrent des noms de famille, maréchal ou maréchaux , par ex., mayor, maruglier (marrillier).

Ne dédaignons pas ces détails, futiles en apparence, sur une partie originale des usages de Romainmotier. « On ne voit bien que ce qu’on voit de très-près » 124 .

Les offices des Francs nous conduisent à parler de l’organisation judiciaire de la Terre de Romainmotier.

Les mayors, nous le savons, avaient des cours. Ils entendaient les causes devant leurs maisons, mais ne pouvaient donner sur les immeubles qu’un premier avis (forte … prima dicta) et ne pouvaient juger les causes de biens meubles que jusqu’à la valeur de 40 sols, renvoyant les autres au Châtelain de Romainmotier. Leurs tribunaux n’étaient donc guères que des Tribunaux de police 125 . De leur sentence il y avait appel à la cour du Châtelain, de celui-ci au Juge des appels, et du Juge des appels au Seigneur qui décidait en dernier ressort, même les plus grandes causes.

On usait à Romainmotier de la coutume de Moudon, sauf les points locaux réservés.

Un acte remarquable 126 de 1489 rappelle comme un fait /54/ établi de temps immémorial, que le Prieur rend la justice à ses sujets dans deux tribunaux 127 , l’un séculier, ayant pour chef son Châtelain, l’autre ecclésiastique, ayant pour chef son Représentant (vices gerentem) 128 . [NB: ce passage a fait l'objet d'une rectification dans les Rectifications et Additions, p. 893]

Voici des réglemens pour la cour civile 129 ; c’est le frère (Prieur) Jean de Seyssel, de bonne mémoire, qui parle (en 1411). « Comme ainsi soit qu’au jour du Dimanche, tous fidèles chrestiens soient tenus de se reposer de tout labeur, et accomplir le service divin de toute leur puissance, et que dans nostre Terre de Romainmotier, la cour civile s’est tenue dès longtemps ce jour-là, ce qui selon la loi de Dieu ne devait être fait. Voulant pourvoir de remède à ce que tel abus ne tourne au préjudice de nos âmes et à la perpétuelle damnation d’icelles, comme aussi de nos sujets: Ayant appelé les gouverneurs et syndics de Romainmotier au nom de la commune, et nos preud’hommes chacun pour soi et au nom de sa commune, avons statué:

« La prédite cour devoir se tenir chaque « sambadi » après nones 130 , au son de la grande cloche, à l’accoustumée.

« Le coup de poing doibt valoir seulement trois sols et les autres coups autant que les autres jours de la semaine. — Il semble qu’un coup de poing donné le samedi était puni auparavant d’une amende de 60 sols 131 .

« Un parlier sera tenu de conseiller chaque partie plaidant en cour pour quatre deniers par jour, et s’il ne la veut conseiller, /55/ pendant quarante jours il ne pourra en conseiller aucune 132 autre. — On dirait d’un avocat consultant.

« Item, du consentement des preud’hommes, ordonnons qu’après le son de la grande cloche pour tenir la cour, tous ceux de la Terre doivent quitter leur labeur et faire feste 133 , et férier le jour du Dimanche fidellement, et qui fera au contraire, tout ce qu’il aura besogné devra être brûlé devant l’église.

« Et nous les preud’hommes voulons les choses susdites être ainsi faites, comme salutaires à nos âmes et tendantes à la gloire de Dieu, etc. »

Détails curieux, non-seulement comme vestiges d’anciennes mœurs, mais aussi comme témoignage de la situation politique des hommes de la Terre. Un système représentatif, des Etats 134 y existaient; toute modification aux usages établis devait être consentie par les preud’hommes au nom de leurs villages; en confirmation sans doute de l’article du Plaid général qui ordonnait que tout changement se fit d’un commun accord. Seulement l’article du Plaid rappelle plutôt l’action d’une landsgemeinde, et l’acte actuel une représentation de la Terre; il pouvait y avoir combinaison des deux systèmes.

Voici une de ces cours en action 135 :

Un bois était en litige; les communes de Bofflens et de Brethonières en réclamaient toutes deux la possession. Plusieurs hommes de celle-ci avaient été gagés ou d’une hache, ou d’une pièce de vêtement, etc. On nomme enfin des arbitres, qui, ne se /56/ croyant pas assez habiles sans doute, en nomment d’autres, avec mission de terminer le différend comme devant une cour. Ces derniers prononcent d’un commun accord que si trois hommes de Bofflens, qu’ils désignaient, les plus honnêtes et les plus dévôts sans doute, voulaient jurer sur l’hostie et les saintes reliques que le bois appartenait à Bofflens, cela devait suffire. Aussitôt les hommes désignés s’écrient qu’ils y consentent de tout leur cœur (lubenter). Ainsi dit, ainsi fait, solemnellement et au jour fixé. Et après le serment, ayant encore les genoux en terre, ils posèrent à la connaissance des preud’hommes assistant en la cour, si ce qu’ils avaient fait était suffisant, se disant prêts à faire plus encore; et l’affirmative ayant été reconnue , une lettre judiciaire en gain de cause leur fut accordée.

Bien entendu qu’au moins dans la cour civile, l’office du Châtelain, son chef, se bornoit à recueillir la sentence des preud’hommes assistant en la cour; et que ceux-ci, vrais juges, n’étaient point nommés par le Seigneur, à ce qu’il paraît.

De plus, constamment on avait autrefois la sagesse de recourir à un arbitrage pour terminer les différends. C’était la marche habituelle des affaires. Voici les formes de l’un de ces arbitrages, il s’agissait de l’usufruit d’un office de Franc par une veuve (v.s.). Les arbitres choisis en 1462 136 devaient, en cas de dissentiment, nommer un surarbitre (unum medium). Et on leur donne tout pouvoir de prononcer, cependant après mûre délibération avec les habiles de la patrie 137 . Promettant de se soumettre à leur sentence prononcée « amore, odio, vel propria voluntate. » Et les arbitres acceptent ce fardeau, tant par dilection pour les /57/ parties que pour bien de paix et promettent de prononcer (à jour fixe) à l’heure du boire, ou du repas (hora potationis seu prandii), ou de remettre le différend au surarbitre. Le Prieur fait apposer à son tour le sceau de la cour devant les portes du prieuré de Romainmotier.


LAPRAZ.

 

Bien qu’appartenant à la Terre de Romainmotier, Lapraz mérite une mention particulière.

D’abord il faisait partie d’une paroisse étrangère (Cuarnens) 138 . Néanmoins la dixme de Lapraz appartenait, aux trois quarts au moins, soit à l’Infirmier, soit à la Pitance du Couvent 139 .

De plus, le terrage, autre impôt en nature, se levait avec la dixme sur une grande partie des terres de Lapraz, ce qui équivalait, pour ces terres là, à la double dixme (2 gerbes sur onze) 140 .

De plus le village et son territoire n’étaient point soumis à la mainmorte, mais laudés au denier six, et ce en vertu d’une transaction pleine de preud’hommie avec le Prieur Jean de Juys 141 . /58/

Tout ce qui peut jeter du jour sur l’état des classes non privilégiées, au moyen âge, est précieux. — Essayons donc d’apprécier la situation sociale des hommes liges de Lapraz.

Ils n’étaient pas mainmortables pour leurs propriétés.— Ils ne payaient donc pas au Prieur les échûtes à défaut d’héritier direct ou indivis. Le plus proche parent héritait alors ab intestat et sans qu’il y eut besoin de replaict 142 .

Ils avaient la libre disposition de leurs biens; ils pouvaient même, semble-t-il, déshériter absolument leurs enfans, car il n’y a aucune réserve de légitime 143 .

Lapraz n’était pas astreint à ne vendre et engager ses biens qu’à ses pairs, hommes de la Terre 144 . — Grande facilité et de très-grand prix pour le commerce.

On se demande si dans le reste de la Terre, un père ne pouvait de son vivant morceler son bien, pour doter ses enfans, puisque /59/ cela est réservé pour Lapraz 145 . — Au moins, dans le reste de la Terre, les familles devaient avoir intérêt à rester groupées autour de leurs chefs, au mode patriarchal et sans se détronquer; et cela, soit pour les héritages, soit parce que les indivis payaient moins d’impôts, la plupart se levant par feus, par chefs de maison.

Les hommes de Lapraz ne devoient pas au Prieur les aydes aux quatre cas (v. s.).

Ils avaient en somme plus de libertés, mais aussi plus d’impôts, malgré leurs franchises 146 , que le reste de la Terre, car les lods au denier 8 rapportaient plus que la mainmorte, les aumôsnes, et les charrois de dixme (v. s.), et Lapraz payait les lods au denier six, les aumôsnes et la double dixme: mais le commerce et l’industrie étaient moins entravés chez eux. /60/


VALLORBES.

 

La vallée de Romainmotier est séparée par un plateau de la vallée plus large, plus profonde et non moins pittoresque de l’Orbe. — En remontant celle-ci, on arrive à une enceinte étroite de montagnes élevées, où l’Orbe, entourée de sapins et de verdure, sort de terre en bouillonnant. — On compare involontairement cette source à la célèbre fontaine de Vaucluse. A part la magie des souvenirs, la source de l’Orbe est plus pittoresque et plus grâcieuse, de cette grâce un peu sévère, il est vrai, des paysages de montagne. Il faut toute la vie et la splendeur de l’azur d’un ciel méridional, pour voiler l’aridité qui entoure la fontaine de Pétrarque, vrai symbole de ce mot de Madame de Staël « la gloire n’est qu’un deuil éclatant du bonheur! »

Au-dessus de la source, la mystérieuse grotte aux fées, séjour apparemment des génies de la montagne et des eaux, prolonge ses voûtes tour-à-tour étroites et majestueuses et ses stalactites aux formes bizarres, jusqu’à des profondeurs où nul ne s’aventure volontiers.

L’Orbe coule d’abord avec calme, parfois confondue avec la verdure qui l’entoure, parfois contrastant avec elle par le reflet brillant de ses ondes: mais bientôt les montagnes se rapprochent et les flots tourmentés par les rochers se précipitent en imposante cascade, couronnée de chênes séculaires! Le mugissement de ses ondes, incessamment renouvelées et brisées en écume plonge l’âme dans une ineffable rêverie, en réveillant en elle le sentiment de l’infini. Sa beauté n’est égalée que par bien peu de ces cascades fameuses, qui voient se succéder des flots de touristes, mais elle est peu connue. Au reste la nationalité et la moralité des habitans de la vallée de l’Orbe ne pourraient que souffrir de la perte de son obscurité. /61/

Au centre de ces merveilles la piété du moyen âge plaça un Prieuré; dont la fondation est inconnue jusqu’ici.

Il existoit au 13e siècle 147 , ayant pour supérieur celui de Romainmotier. Il semble que déja en 1219, des terres à Collombier (sur Morges), avaient été accensées par lui à l’Abbaye de Joux.

En 1271, le Prieur de Vallorbes, Willerme, acheta pour 27 livres, une vigne à la Côte, à Delais (Dullit?) — Et Jean, sire de Prangins, qui prétendait à la suzeraineté, consentit à cette vente en apposant son sceau.

En 1308, le Prieur de Vallorbes eut avec ses gens un différend sur le charriage de son vin. — Le supérieur fit alors une enquête, qui constata l’obligation de ceux-ci d’amener le vin du Prieur, à ses frais toutefois et non aux leurs. — La répugnance des sujets à amener le vin, depuis la Côte à Vallorbes, se comprend: on se représente à cette époque les routes détestables et peu sûres. Mais on respectait les biens des couvens, et l’on avait soin sans doute d’en mettre les panonceaux en évidence dans les convois.

Il paraît toutefois que ce prieuré était bien pauvre, car en 1321 Radulphe humble, sous prieur de Romainmotier 148 , et tout le couvent du lieu, ainsi que les Prieurs du lay damp Waultier, de Bevey, et de Corcelles, placés sous la sujetion immédiate du monastère romain, envoyent à Reymond, Abbé de Cluny, l’expression de leur obéissance dévouée jusqu’à la mort 149 , en lui représentant qu’il n’y a pas de ressources suffisantes pour entretenir le Prieur et le moine, qui résident quelquefois (aliquociens) dans le prieuré de Vallorbes, ainsi que le curé /62/ (qui a sa mense avec eux); et que d’ailleurs l’existence de ce prieuré n’est point nécessaire; et ils supplient sa paternité 150 d’unir celui-ci à la mense de Romainmotier, croyant en conscience cette union nécessaire. Ils font transmettre à cet effet à l’Abbé de Cluny, l’inventaire de la pauvreté de cette maison par son Camérier d’Allemanie et de Lotoringie. (Lorraine) 151 .

Voici la réponse: Reymond, par la miséricorde divine humble ministre de l’Eglise de Cluny, salue en celui qui est le vrai salut de tous 152 . Désirant éviter les dépenses aux maisons de son ordre, et ayant, soit par la supplication précédente, soit par beaucoup d’autres personnes dignes de foi, acquis la certitude de l’insuffisance des ressources de la maison religieuse de Vallorbes, il l’annexe à celle de Romainmotier. Voulant que le Prieur de celle-ci la gouverne avec tous ses droits et ses possessions, comme incorporée à sa mense. — Il sera d’ailleurs pourvu convenablement à l’avenir du Prieur (de Vallorbes), et aussi à l’exercice du culte divin et des autres bonnes oeuvres, en cette localité. /63/

C’est donc seulement depuis 1321 que le prieuré de Vallorbes cessa d’exister, et que Vallorbes fit partie de la Terre de Romainmotier proprement dite.

Il y avait cependant dissemblance de condition et d’usages.

Vallorbes ne payait que peu de censes sur son territoire, mais en revanche ses habitans devaient au Seigneur la Taille à miséricorde à cause de leurs possessions 153 . — Celle-ci était attachée, remarquons-le, non aux personnes, mais aux terres. C’était une servitude territoriale et non personnelle. La condition taillable à miséricorde n’était pas le servage de la glèbe * , sans toutefois être une condition décidément libre.

Nous trouverons ses racines dans la domination romaine 154 .

La population agricole, sous les Romains, était en général composée de Colons d’origine libre, quoique cette liberté fut restreinte dans des bornes assez étroites, sous le patronage des grands propriétaires du sol. — Les colons payaient à ceux-ci une rente sur les terres, un cens qui était invariablement fixé. Ils payaient ensuite à l’Empereur une capitation variable, qui alla sans cesse croissant avec les besoins de l’Empire. Vinrent les Burgunden, qui partagèrent le sol avec les propriétaires romains. Mais tandis que chez les Romains la propriété et la souveraineté étaient distinctes, la souveraineté n’appartenant qu’à l’Empereur, depuis l’invasion, la souveraineté se morcela, devint locale et se fondit avec la propriété du sol. Dès lors la cense, ou le revenu foncier, et la taille ou capitation variable, se trouvèrent dus à la même personne. — Changement peu avantageux, sans doute, pour les contribuables. /64/

Le Prieur de Vallorbes et plus tard celui de Romainmotier pouvaient ne pas abuser du droit féodal de capitation variable, soit de taille à miséricorde, mais encore était-il pénible de ne devoir cette équité qu’au bon plaisir du Seigneur. Ainsi pensèrent les hommes de Vallorbes.

En effet, en 1403, Jean de Seyssel, Prieur, et son couvent, rassemblés en chapitre au son de la cloche; ouïe la requête des hommes de Vallorbes 155 , en vue de leur utilité et aussi de celle du prieuré, les affranchissent entièrement et irrévocablement, après mûre délibération, de toute servitude taillable; mais avec stipulation expresse qu’eux et leurs héritiers resteront hommes liges, et leurs possessions assujetties à la condition mainmortable, selon la coutume de la Terre de Romainmotier; et que pour le tout ils donnerent 40 francs de bon or d’entrée et 20 livres de redevance annuelle 156 .

Ils payèrent bien, on le voit, ce passage de l’hommage taillable à l’hommage lige, et cette liberté civile plus entière 157 . Aussi y attachaient-ils un grand prix.

Ecoutons en effet Claude Michaudi vicaire de Romainmotier pour François de Savoie (en 1488). « Les cultivateurs et habitans de Vallorbes 158 nous ont exposé, que Jean de Seyssel avait accordé à leurs prédécesseurs le bienfait (beneficium) de /65/ l’affranchissement (manumissionis) du joug et de la servitude de la taille à miséricorde, suivant un acte qu’ils nous donnèrent à lire le tenant dans leurs mains. Et parce que cet acte enlevé de Vallorbes avec d’autres par les soudarts (gens d’armes), a été traité d’une manière peu convenable (inhoneste), ils craignent pour l’avenir un semblable sinistre, sinon pire encore; soit par dégats d’ennemis 159 ou autres évènemens funestes et trop fréquens; soit parce qu’appelés à faire usage en divers lieux de cet instrument, il peut être déchiré, se perdre, ou devenir caduc, et inutile par un maniement trop fréquent; d’autant que l’écriture commence à en être endommagée (mais non dans un endroit suspect), par vétusté, ou à la suite de traitemens peu bienséans. Ils supplient donc qu’il en soit fait un vidimus ayant toute l’autorité du titre même 160 .

Quelle impression profonde les dévastations de la guerre de Bourgogne avaient laissée dans la Patrie de Vaud! La position de Vallorbes était depuis l’affranchissement de 1403 161 , à peu près celle du reste de la Terre de Romainmotier. /66/ Mais, chose insolite et bizarre, il y avoit à Vallorbes un Mayor et un Mestral; et de la cour du Mayor on interjetait appel à la cour du Mestral de Vallorbes 162 , et de celle-ci seulement à la cour du Châtelain à Romainmotier.

Quant aux impôts. — Aucune mention n’est faite pour Vallorbes des aides ou assistances éventuelles dues au Prieur en quatre cas; elles paraissent avoir été remplacées par les vingt livres annuelles dont il a été question et qui, d’abord, seulement réparties entre tous par les preud’hommes, furent ensuite, d’un commun consentement, attachées aux diverses terres suivant leur étendue.

Celles-ci devaient encore une cense seigneuriale peu considérable 163 .

De plus, la dixme des graines, légumes et chanvre qui s’élevait annuellement à environ dix-huit muids mesure de Romainmotier. — Or le tiers de la dixme de la paroisse de Jougne y était compris dès longtemps, car, en 1321 déjà, le curé de Jougne avait confirmé cette possession au Prieur de Vallorbes, Jaques de Disy 164 .

Le Terrage, autre impôt en nature, se levait sur une partie des terres arables.

Venaient encore les aumôsnes et les vendes 165 . /67/

Puis les corvées, de charrue, de faux et de râteau dans le domaine du Seigneur à Vallorbes 166 .

De plus le charriage du vin (v. s.) ou en échange 3 sols, dûs par tout possesseur d’un cheval.

« Et le charroy dès Vallorbes à Romainmotier en temps de vendanges, ou devant, quand ils en sont requis, des cercles, tonneaux et seilles », qui sans doute se fabriquaient déjà à Vallorbes.

Le Seigneur possédait encore le moulin bannal, amodié à la commune de Vallorbes, pour une coupe d’orge par feu.

Et le Four bannal qu’il avait remis au curé au lieu de sa mense (loco mensæ suae), qu’il avait jadis avec le Prieur, alors qu’il vivait en société ecclésiastique avec lui et le moine de Vallorbes.

Le Curé percevait encore la dixme du bétail naissant et la moisson.

Nul que le Seigneur ne devait tendre des filets dans la rivière, mais les habitants de Vallorbes pouvaient y pêcher à la ligne (cum linea et trobla); et le curé y avait, d’après la coutume, « nansam » .

Aucune mention n’est faite de droits de chasse, pas plus à Vallorbes qu’à Romainmotier!

Dans le domaine du Seigneur à Vallorbes étaient compris: le cheseau de la maison de l’ancien Prieuré, qui n’existait plus déjà au 16me siècle 167 .— Une maison quarrée, dont les locataires /68/ n’étaient assujettis ni aux censes du moulin, ni à celles du four, etc. — Des prés 168 . — Quelques terres arables 169 et bois. — Enfin la Ferrière 170 .

On ne semait guères à Vallorbes que de l’orge et de l’avoine, et peu ou point de froment. - Et même la culture des céréales n’était pas la principale agriculture, mais bien les prés 171 . A la vérité, le système d’agriculture ne les rendait pas aussi profitables que de nos jours. Chaque maison, peu s’en faut, avait jardin et clôsel (verger) contigus.

Le Terrage qui se levait sur la moitié à peu près des terres de labour fut, en 1487, remplacé par une cense en argent à la suite d’une transaction remarquable. Des délégués 172 du Prieur commendataire de Romainmotier, François de Savoie, se rendirent à Vallorbes, et après en avoir placé les preud’hommes sous le poids du serment, ils en reçurent une désignation générale des terres astreintes au Terrage en même temps qu’à la dixme, et sur lesquelles on levait en conséquence deux gerbes sur quatorze 173 . Or, voyant de leurs yeux, que la plus grande partie demeuraient incultes à cause de cette servitude, et bien avisés de l’avantage de l’Eglise, les délégués, sur la requête des preud’hommes, usèrent de leurs pleins-pouvoirs pour remettre ces terres à la dixme simple, et remplacer le Terrage par 6 deniers annuels pour chaque pose 174 . /69/

On préférait une cense en argent, peut-être réduite, et pesant sur la masse de ses ressources, à un impôt en nature qui, attaché à un terrain déterminé, décourageait l’agriculteur en absorbant le fruit de son travail.

Il est remarquable que les mandataires furent nommés par le Prieur, sur la supplication des preud’hommes de la Terre de Romainmotier; il semble qu’il y ait eu une initiative de celle- ci, prenant en main la cause de Vallorbes.

Peut-être que les terrains soumis à cette sorte de double dixme ne furent laissés en friche que lorsque l’extension de la culture ayant fait baisser le prix des céréales, le revenu en devint trop chétif, alors seulement on chercha un reméde. — Il serait curieux de connaître la source de cet impôt local si pesant!

Autre particularité. Les habitans de Vallorbes avaient un droit général de défrichement dans toute l’étendue de leur territoire, sous ombre des vingt livres qui avaient succédé à la taille à merci, et des censes sus indiquées, et sans qu’on pût aucunement accroître leurs charges.

Or, est il dit 175 , « suivant une coustume de toute ancienneté, nul ne doibt extirper sur les commungs, que ce ne soit par le consentement de la communaulté, car le village est en lieu estroict, enclos entre roches et montagnes, et si quelcung y avoit puissance d’extirper sur les commungs, les pacquiers se perdroyent, que leur seroit gros préjudice, veu que le nourrissage du bestail est le meilleur de leurs biens, et bien a esté /70/ regardé, de bailler liberté à la commune de tenir main sur ce » 176 .

L’industrie qui de nos jours fait fleurir Vallorbes y existe depuis longtemps. — Le premier qui édifia la Ferrière (ferreriam) près de Vallorbes fut Dom Gaufred, Prieur de Romainmotier 177 à la fin du 13e siècle. Le même Gaufred avait fait établir une scie à Vallorbes, et donna sur son produit 20 S. annuels au Couvent 178 .

Dès lors nous ne trouvons rien qui ait trait à cette industrie, jusqu’à Michel de Savoie, au commencement du 16e siècle, qui accensa une forge, sous redevance annuelle de dix sols 179 .

Puis en 1528, Claude d’Estavayer, Prieur, considérant qu’une forge du prieuré est dégradée et fort incommode, et qu’il est mieux de la relever que de la laisser tomber en ruine complète, abberge et accense irrévocablement, en solide emphitéose, à Pierre Valloton autrement nommé Develley 180 , ses débris et le cours d’eau nécessaire à son jeu; et de plus la localité 181 et l’eau nécessaires pour bâtir une usine à fondre et forger le fer 182 , et pour établir un atelier de fabrique de faux et autres instrumens. /71/

Item, Dans l’un des deux endroits à son choix, il pourra construire à nouveau un martinet 183 , une meule à aiguiser, des roues (rotas), et des soufflets (follas), autant qu’il sera nécessaire, sans préjudicier à autrui. — Pour cet abbergement Pierre Valloton devra 9 florins annuels, et la fabrication de 3 quintaux de fer bon 184 , d’entrée. Et si l’abbergement acquérait une valeur considérable, nous (Prieur) en faisons présent au censier, pour beaucoup de réels et agréables services.

Il est difficile de ne pas voir dans cet abbergement l’origine de l’industrie de Vallorbes.— Claude d’Estavayer était meilleur économiste que guide spirituel.

Or c’est bien l’industrie qui a fait fleurir Vallorbes, car un recensement de la population de la Terre de Romainmotier fait en 1529, et que rien ne doit nous faire soupçonner d’inexactitude, n’indique que douze feus à Vallorbes, qui compte aujourd’hui près de 1500 habitans 185 .


MOËRYER,

 

Dont le nom latin (moiriacus) nous fait peut-être toucher à l’invasion des Sarrazins, était contigu à la Terre de Romainmotier proprement dite. /72/

L’origine des possesions du Prieuré dans ce village, est sans doute la donation d’un manoir (ou domaine) par Rodolphe, en 1011.

En 1405, quatre chefs de focage, ou plutôt 4 frêstes de Moëryer, payaient la cense des Clées.

Romainmotier y possédait de plus (à la fin du 15me siècle), les cinq huitièmes, de toute la dixme des blés, légumes et chanvres, qui s’amodiaient ordinairement pour dix muids, moitié froment, moitié avoine 186 .

Il y avait un mayor de Moëryer, chargé d’y percevoir les revenus du Seigneur. Il était, vu le voisinage, compté au nombre des Francs de la Terre, et partageait leurs privilèges.


ORBE SOIT TAVELLIS.

 

Rodolphe III avoit en 1011, donné à Romainmotier cinq meix (ou manoirs) à Orbe 187 .

Ce fut le noyau de possessions plus étendues, car un abandon ou plutôt un déguerpissement (werpitio) du bourg d’Orbe, en faveur du Couvent de Romainmotier, par le Comte de Bourgogne, Renaud fils de Vuillerme le jeune, eut lieu sur la demande et avec l’approbation (laudante et rogante), de Borcard Vidame ou Avoué du Couvent 188 . /73/

Cette restitution (werpitio) de possessions usurpées peut se rapporter à 1098, époque où le Comte partit, avec son frère l’archevêque Hugues, pour Terre sainte, où l’attendoit la mort.

Renaud donne en même tems l’usage de la forêt royale, pour le chauffage des pauvres, en l’hopital d’Orbe, qui appartenait à Romainmotier 189 .

Ce titre renferme un anneau de cette chaîne de souvenirs qui lient le présent au temps jadis, car Messire Borcard, le Vidame, appartenait à la famille de Goumoëns.

Le sort de ces possessions de Romainmotier n’est pas connu. Il semble qu’en 1255, Orbe appartenait en entier aux Montfaucon sous la suzeraineté du Comte Palatin de Bourgogne 190 .

Mais Romainmotier y conserva tout au moins un domaine utile, que Pierre de Graffenried acheta, après la réforme, au bas prix de 18,000 florins 191 . /74/


APPLES.

 

Apples dépendait du Couvent de Romainmotier, dès les Rodolphiens.

En 1009, le roi Rodolphe, donna à Saint Pierre de Romainmotier et aux moines, pour la guérison de son âme, et la rédemption de celle de sa chère femme Agiltrude, l’Eglise d’Apples, et tout ce qui en dépendait 192 , sans aucune réserve. Il donna encore le village même d’Apples (Aplis) 193 et ce qu’il y possédait; y compris tous ses serfs et serves (servos nostros et ancillas qui in ipsa villa et potestate manent), et nommément Gooldus avec ses fils, ses filles et toute sa posterité 194 .

Apples fut plus tard disputé à Romainmotier, car en 1125, l’Empereur Henry lui en confirme la possession, sur la demande du Prieur Artaud, ainsi que de toutes les autres donations de Rodolphe ou d’autres rois; contre Ebal de Grandson, sire de Lassaraz, qui voulait, dit l’Empereur, débouter ce monastère d’antiques propriétés 195 .

Puis en 1222, Humbert de Vufflens, du lod de sa femme et de ses fils Aymon et Reymond, donne en gage au Couvent de Romainmotier l’avouerie (advocaciam) qu’il avait à Apples, et tout ce qu’il possédait dans ce village à bon droit ou injustement /75/ (juste vel injuste); et cela pour trente livres lausann. valant 12 marcs d’argent. Et Jean sire de Cossonay, s’établit fidéjusseur de la paix (pacis) 196 .

On ne sait comment cette avouerie passa aux Montricher: mais en 1265, les religieux de Romainmotier cédent à Jaques et Rodolphe, coseigneurs de Montricher toutes leurs possessions dans le village voisin de Torclens 197 et dans son territoire; et ceux-ci en échange renoncent à l’avouerie (advocaciam) d’Apples, en faveur des religieux.

Malgré la donation de Rodolphe, l’autorité du Couvent n’était donc pas sans mélange à Apples. Aussi le Prieur ne négligeait-il aucune occasion de l’accroître.

Ainsi en 1277, les Donzels de Saint-Saphorin lui vendent des censes à Apples 198 .

Ainsi encore en 1350, Arthaud Allamand Prieur, et le Couvent, après s’être réunis plusieurs fois en chapitre au son de la cloche, pour tenir conseil avec la solemnité convenable, concèdent au curé de Voufflens le Chastel 4 muids annuels de blé, sur leur dixme d’Apples, et cela en échange de toute la dixme de son Eglise (de Voufflens) perçue dans le territoire d’Apples (en Montagny): cette dixme demeure néanmoins dans la Seigneurie des sires de Vufflens le Chastel. — Par cet échange curieux le Prieur devenait possesseur vassal de la dixme de Montagny qui /76/ ne lui appartenait pas auparavant, et restait suzerain de ce qu’il donnait en échange.

Il y avait même à Apples des hommes libres indépendans.

Ainsi en 1337, Nicolet dict Fermon de Apples, Donzel, entre en hommage lige perpétuel de Willerme de Montricher alors Prieur, et reçoit en fief lige, diverses possessions, de son propre alleu, dans le territoire d’Apples 199 ; y compris Willierme de Apples, dit de Clarmunt, son homme taillable, avec tous ses droits et ses héritiers. — Fermon reçoit 25 livres du Prieur pour cet hommage, promettant de lui obéir comme un homme lige noble le doit à son Seigneur.

C’était pour le Prieur l’acquisition d’un petit arrière fief par l’hommage d’un franc alleu. La liberté était périlleuse lorsque la force ne l’accompagnait pas, et on prenait volontiers pour suzerain un voisin puissant 200 .

La piété superstitieuse du temps favorisait l’accroissement des possessions du Couvent. Un long différend, par ex., existait entre les religieux et les Seigneurs de Montricher et de Syvirier au sujet de la possession d’une dixme dite de la Vernaz (entre Apples et Clarmont). Une fois, pendant que le décimateur du prieuré voulait y faire son office, deux hommes armés de /77/ glaives parurent; néanmoins la dixme fut levée. Une autre fois, après débat, cette dixme fut remise au Prieur Henry de Syvirier, qui dit aux Seigneurs: vous êtes assez riches, laissez ce qui appartient à l’Eglise 201 . Enfin en 1422 202 , les Syvirier et les Montricher, pensant à leur salut, donnèrent leurs droits au couvent, et en échange on leur promit des messes.

Les traits principaux de la position politique et sociale d’Apples, nous sont connus par un Plaid général tenu en 1327. Quarante trois preud’hommes, hommes ou femmes, d’Apples ayant souvent requis leur Seigneur, Willierme Prieur de Romainmotier de tenir le Plaid général d’Apples suivant l’ancienne coutume, celui-ci assigne un Dimanche. Le jour est accepté. Le Prieur donc séant dans sa maison de Apples et ayant assigné sa cour suivant l’usage 203 , devant des témoins, et tous ceux qui doivent d’après le droit ou la coutume prendre part ou assister (sedere aut interesse) au dit Plaid général; le Prieur disons nous, fit publier (bannire) son Plaid général. Lors les preud’hommes le requirent de nommer deux amiables compositeurs, qui joints à deux autres de leur choix à eux mêmes et aux Jurés (cum personis juratis) du Plaid général, eussent pouvoir de rapporter sur serment toutes les dreytures, jurisdictions, franchises et usages, soit pour le Prieur et son Eglise, soit en faveur des hommes d’Apples; promettant /78/ fidéle observation du tout. Le Prieur accorde cette demande 204 .

Voici ces usages identiques en partie avec ceux du Plaid général de Romainmotier 205 .

Le Plaid doit avoir lieu chaque année: Après l’appel de chaque preud’homme le Prieur doit ordonner à l’un de ses serviteurs (uni de familia sua), de publier (bannire) le Plaid général 206 . Chacun peut alors mieux qu’en tout autre temps replaciter sa terre, ou l’abandonner, (pour héritage ou départ, sans doute, et à cause de la condition mainmortable v. s.) 207 . /79/

Les ressortissants du Plaid général sont hommes libres du Prieur et de l’Eglise. — Preuve remarquable que la condition des serfs mentionnés dans la donation de Rodolphe, de 1009, avait changé.

Comme à Romainmotier celui qui voulait aller demeurer hors de la seigneurie du Prieur, devait en demander licence, et en faisant honneur à ses affaires, elle devait lui être accordée 208 , et le Prieur devait le faire conduire lui et tous ses biens meubles, un jour et une nuit. Mais les immeubles demeuraient au Prieur. Toutefois l’héritier le plus proche pouvait les replaciter, suivant l’antique coutume 209 . — Tout cela en vertu de la condition mainmortable des propriétés.

Chacun pouvait par nécessité vendre, aliener, accenser, ou engager son héritage en tout ou en partie à son pair c’est-à-dire à un homme du Prieur et non autrement (videlicet homini prioris et non aliter). — Sorte de droit général établi dans les possessions du prieuré.

Puis venaient les aydes. Si quelque Evêque traînait en cause le Prieur ou son Eglise, sur sa jurisdiction (dominium) spirituelle, ou quelque Seigneur séculier, sur sa jurisdiction temporelle, et que la grandeur des dépenses obligeât l’Eglise à demander secours, Apples était tenu de l’accorder miséricordieusement, suivant ses moyens. Comme aussi lorsque le Couvent par tempêtes ou incendies 210 souffrait disette de victuailles, /80/ pourvu toutefois que ces désastres, ou autres semblables, eussent respecté le dit village.

Mais Apples ne devait d’aides ni pour acquérir de nouveaux revenus, ni pour racheter quelque possession engagée du consentement commun, comme cela avait lieu à Romainmotier.

Nul ne pouvait contracter mariage avec une femme libre d’Apples (de la jurisdiction du Prieur), à moins d’être de même condition que les autres preud’hommes d’Apples (sauf permission), ou bien, l’héritage de la femme retournait au Prieur.

Item nul ne devait faire bourgeoisie, ou garde (custodiam), ou prêter serment à quelque cité, bourg, village ou château, sans l’aveu du Prieur, ni demander quelque protection contre le droit de l’Eglise; et si après l’avoir fait il ne venait à résipiscence dans le terme de 40 jours, il devait sortir de la seigneurie du Prieur, et perdre son héritage 211 .

En outre, on devait au Prieur 212 : 3 sols pour un coup de poing donné. 5 sols pour avoir frappé quelqu’un avec un pieu (de percussione palinæ). 10 sols pour un coup de pied. 10 sols pour avoir dit par injure, pugnex. 60 sols pour avoir frappé du glaive injurieusement (« injuriose » par opposition aux combats judiciaires). 10 sols pour avoir appelé quelqu’un par injure mesel ou avoutro.

Les causes mues à Apples, devaient s’y poursuivre et s’y terminer, à moins de difficultés extrêmes, ou d’appel, au curé de Romainmotier 213 . /81/

Nul ne doit enlever les gerbes de son champ qu’elles n’aient été comptées par le nonce du Prieur.

Enfin plusieurs autres choses 214 , dont il n’est pas fait mention, seront observées à l’avenir comme par le passé. Et si quelque contest s’élevait, la concorde devrait être rétablie par ceux qui doivent fidèlement reconnaître le Plaid général 215 .

Ce même plaid fut ratifié et accepté en Janvier 1355, par trente-trois hommes ou femmes d’Apples, qui reconnurent qu’ils devaient être placés sous le joug de la servitude (sub jugo servitutis et oneris) qui pesait sur leurs prédécesseurs; promettant par serment et sous obligation de tous leurs biens, de servir et d’obéir à leurs très-chers Seigneurs (les religieux de Romainmotier) comme de vrais hommes libres et fidèles (veri homines liberi et fideles) sont tenus de le faire d’après le droit, la loi et la coutume de la patrie et du lieu, et sans jamais y contrevenir, en tous cas où un homme libre est obligé envers son Seigneur 216 .— Bizarre alliance des mots servitus et libertas! Ce qui est plus original encore, c’est qu’on ne peut échapper à la conclusion que les femmes faisaient partie du Plaid général, soit à Apples, soit même dans la Terre de Romainmotier. Elles avaient part à cette sorte de landsgemeinde!!!

En 1430, se trouve un différend du Prieur avec quelques preud’hommes, au nom de toute la communauté d’Apples 217 .

D’après le Prieur, la dixme du chanvre mâle (masculi) laissé pour semens, après extraction du chanvre femelle, devait lui /82/ appartenir. Les preud’hommes s’en défendaient, pour beaucoup de raisons, et surtout, disaient-ils, parce qu’on ne l’avait jamais payée jusques là. Enfin le Prieur leur accensa perpétuellement son droit sur cette dixme, pour 4 sols annuels, et de plus, en vue du bien commun du prieuré 218 et des preud’hommes, il donna à ceux-ci une source d’eau pour abreuver le bétail, ou tout autre usage selon leur bon plaisir.— Concession à l’amiable, complément de la cense demandée. — Remarquons de plus cet instinct populaire pressentant, au 15me siècle, les découvertes de Linnéus, sur le sexe des plantes.

Il y avait aussi des offices privilégiés, des Franchises à Apples, mais toutes n’étaient pas égales.

En première ligne se plaçait le Villicus, ou Mayor.

En 1293, Richard, villicus de Apples, et sa femme Agathe reconnaissent tenir en hommage lige (ligie) des religieux de Romainmotier, la mayorie, des terres et des censes 219 , et avoir vendu irrévocablement le tout pour 40 livres, en s’en réservant à vie l’usufruit, etc. 220 .

En 1328, Pierre, Mayor de Apples, pour beaucoup de bienfaits reçus du Couvent 221 , comme aussi en restitution de plusieurs choses enlevées injustement aux religieux, leur donne tous ses biens meubles, et tous les droits auxquels il peut prétendre à Apples et dans son territoire, en vertu de sa franchise de Mayor, ou autrement. Et ce, sous des conditions diverses 222 . Or la /83/ moitié de ses immeubles devait revenir à son fils et à sa fille pour leur part.

Ainsi la Mayorie, bien qu’héréditaire, pouvait être donnée ou vendue, nonobstant l’existence d’enfants. Mais il y avait pour ceux-ci une légitime.

Autre franchise: celle des deux Serviteurs (duo famuli) qui devaient faner (fenare) les prés du Prieur à Apples, « les Andens essanchiez » * , et garder le foin, aux frais du Prieur.

Si quelqu’un était trouvé fauchant, ou moissonnant, ou cheminant dans les récoltes du Prieur ou dans ses « condemines », de manière à causer du dommage, il payait 3 sols.

Autre franchise: quatre Forestiers (forestarii) 223 .

Ce nombre de quatre était déjà un antique usage en 1293 224 .

En 1331, sur la plainte des preud’hommes un différend s’émût entre le Prieur Willerme de Montricher, et les 4 forestiers de son bois de Saint Pierre.

La cour (du Prieur) se tint dans l’Eglise d’Apples, par devant des personnes de poids 225 . — On exposa donc: que de vrais forestiers devraient fidèlement garder les forêts du Prieur et /84/ de ses preud’hommes, et non les vendre et dévaster. Première cause de confiscation.

De plus cette Foresterie est à Apples un genre de Franchise, qui, à la mort d’un titulaire, passe à son premier-né. — Or un de ces aînés demeurant dès longtemps en dehors des possessions du Prieur, sa part de Foresterie et ses autres biens doivent écheoir à celui-ci (v. s.). — Un autre Forestier est trop chétif, trop faible de corps pour exercer cet office 226 . — Enfin les deux frères restant ont cette franchise au préjudice de leur sœur ainée 227 et de son mari. Mais ces derniers ayant refusé le serment d’hommage au Prieur, et de fidélité aux coutumes d’Apples, et étant entrés dans l’hommage du sire de Montricher, en abandonnant tout ce qu’ils tenaient du Prieur entre les mains de son nonce (nuncii) François de Colombier, il doit aussi y avoir confiscation.

Après cet exposé, les Forestiers se soumirent à la merci du Prieur.

Les femmes héritant de franchises, par droit d’ainesse et de préférence aux hommes! L’hommage refusé en renonçant à des biens! Tout cela ne cadre point avec les idées de plusieurs sur le moyen âge 228 . /85/

Une fois l’an, dès la saint Michel à la Toussaint, les Forestiers devoient une réception (facere unum receptum) au Nonce du Prieur accompagné d’un Garçon (garcione) et d’un cheval; ainsi qu’au Curé, au Mayor et aux deux serviteurs d’Apples.

Autre franchise: douze « Colengiarii » 229 . On ne peut en préciser la nature. Ils possédaient des terres, et en 1293 déjà, le Plaid général devait règler et proportionner ce qui les concernait 230 ; et si quelque terre « de colongiis » restait vacante, les religieux pouvaient la faire cultiver, ad interim, sans que la redevance de l’avouerie, liée à ces terres par conséquent, diminuât. Or pour cette avouerie, qui concernait l’administration de la justice 231 , Apples payait annuellement quatre livres aux religieux, sauf ceux qui d’ancienneté en étaient francs, et la répartition devait s’en faire équitablement entre tous les habitans, par deux idoines, choisis par le village et accompagnés du Nonce du Prieur.

Les « Colengiarii » devaient, une ou deux fois l’an, s’aider à charrier et battre les blés du Seigneur à Apples 232 .

Cependant toutes les terres n’étaient pas comprises dans ces « Colengiarii ». Il y avait une réserve pour le Prieur, de deux /86/ abergemens de 12 poses chacun, avec prés, cheseaux, et oches. Et en cas d’amodiation, inféodation, etc., les possesseurs d’iceux ou leurs héritiers devaient « solvere usagia » du village comme les autres 233 .

Les 12 Colengiarii, le Mayor, les 2 Serviteurs, le Curé avaient l’usage du bois de construction (pannicis), et de charronage, et leur affouage dans les bois morts 234 . Ils avaient encore la pâture (passonagium) de leurs porcs dans les forêts d’Apples 235 .

Toutes ces franchises étaient héréditaires, mais toujours l’héritier en ligne directe devait replaciter l’office, et une parenté éloignée ne liait point le Prieur. Les Colengiarii payaient pour cette reprise de fief 15 deniers; les Forestiers 18 deniers; les deux Serviteurs 15 sols; le Mayor enfin 25 sols 236 . /87/


PAMPIGNY.

 

En 1284, surgit un différend: Jaques sire de Montricher refusait au Prieur Gaufred le droit de lever la taille (talliam), sur ses hommes de Pampigny. Des arbitres lui donnèrent tort, tout en lui reconnaissant le pouvoir de conseiller ces hommes au sujet de cette taille, dans la cour du Prieur 237 : ce qui semble indiquer une sorte d’avouerie.

En 1405, quatre frêstes seulement de Pampigny, soumises à Romainmotier, payaient la cense des Clées.

Ce village était presque, au moyen âge, un carrefour de jurisdictions diverses.


BARLENS (BALLENS).

 

Après des dons divers 238 à Barlens, le prieuré y construisit en 1257 un moulin. Il reçût 100 sols à son sujet du moine Pierre de Pontarlier; et il fut statué que l’usufruitier du moulin payerait dix sols chaque année au Couvent, pour un repas, à l’anniversaire de la mort du donateur 239 .

Un différend survint avec Nicholas de Mont, chevalier, qui ne /88/ voyait pas cette construction de bon œil; mais revenant à une bonne conscience, il se désista de son opposition par le conseil d’hommes prudens 240 .

Neuf frêstes de Ballens payaient la cense des Clées (1405).

 

La maison des lépreux de Goylies, est mentionnée dans un acte (1257), comme voisine d’un moulin situé entre Barlens et Morlens. — Nous placerons donc ici une donation du commencement du 12e siècle, de Humbert de Goiles, qui céde à Dieu et à Saint Pierre de Romainmotier une femme nommée Walda, sa sujette par droit de servage (subdita servitutis jure), et son fils Toringus, ainsi que tous ceux qui pourraient naître d’eux dans la suite 241 .


MORLENS (MOLLENS).

 

En 1272, un différend s’éléve sur l’avouerie de ce village, entre le Prieur Aymon, à qui elle était donnée en gage pour 15 livres, et Jean fils de Nicolas de Mont, chevalier, qui la réclamoit. Enfin celui-ci promit de ne rien demander aux hommes de Romainmotier, de Morlens, à ce sujet. Deux fidéjusseurs, Humbert de Trelay, chevalier, et Jaques, coseigneur d’Aubonne, promirent de leur côté par serment de tenir des otages à leurs frais à Saint Prex, ou de donner des gages susceptibles de transport, si Jean des Monts (de Montibus) troubloit les religieux, ou retirait quelque chose dans cette engagère (in /89/ dicta gageria) de l’avouerie: le tout jusqu’à l’entière satisfaction des ceux-ci, dans le mois qui suivrait leur requête 242 .

Nous verrons d’autres exemples de ce curieux moyen de suppléer à la force publique au moyen âge.

Un arrangement définitif paraît s’être conclu en 1280. Girard et Jean des Monts (v. s.), fils de feu Nicolas, donnèrent, pour leur salut, en aumône perpétuelle aux religieux, leurs droits, et les prétentions (calumpniam) de leurs antécesseurs sur les possessions de Romainmotier à Mollens; et reçurent en revanche 14 livres de Genève 243 .

En 1405, dix frêstes de Mollens payaient la cense des Clées. Le nombre des familles soumises à Romainmotier était, peut être, plus considérable que celui des frêstes prolongées sans doute sur plusieurs maisons (v. s.), non seulement à Mollens, mais encore à Ballens, Pampigny, Apples et Moëryer, pour alléger la cense des Clées. Celle-ci moins lourde toutefois qu’en la Terre de Romainmotier 244 . Un autre acte nous fournira un exemple de l’observation des lois au moyen âge. /90/

En 1291, treize chefs de famille de Mollens se reconnaissent hommes taillables, pour leurs héritages, des religieux, et confessent que sous peine de les perdre, ils ne doivent faire serment de bourgeoisie, ni prêter hommage où que ce soit; sauf permission du Couvent 245 .

Ce n’étoit pas sans raison que cette reconnaissance d’hommage avait été demandée, et que, quelques années plus tôt (1285), le Prieur avait sollicité déjà des hommes d’Apples l’engagement de ne pas, à l’avenir, jurer bourgeoisie à quelque bonne ville, et de n’invoquer d’autre protection que celle du Comte de Savoie. — C’est qu’alors Morges venait de s’élever et de se ceindre d’une cuirasse de remparts. Et que d’attraits dans cette existence municipale nouvelle, dans ces franchises étendues, dans cet appui d’une combourgeoisie nombreuse, dans cette aisance fruit d’une industrie qui pouvait sans crainte s’exercer à l’abri des murailles de la bonne ville! Quel mouvement dans tout le voisinage sous un souffle de liberté, précurseur d’une ère nouvelle!

De fait, plusieurs sentant trop leur faiblesse 246 , cédèrent au désir de se joindre à la nouvelle cité, encore qu’ils ne fussent pas de condition servile.

Aussi en 1293, un débat s’élève entre le Couvent et Louis de Savoie; celui-là se plaignant que quelques-uns de ses hommes taillables, francs, et censitaires 247 avaient juré bourgeoisie à /91/ Morges; et que sous ce prétexte, il était privé des tailles, services et même des hommages qui lui étaient dûs.

Bientôt un arbitrage 248 décide: que ceux de ces hommes qui n’ont pas de maison à Morges seront rendus par Louis de Savoie aux religieux, en faisant simplement dédire leur bourgeoisie. Qu’en revanche les possesseurs de telles maisons, resteront bourgeois de Morges, mais payeront aussi à Romainmotier les tailles, censes etc., qui leur incombent. S’ils abandonnaient toutefois les possessions qu’ils tiennent de religieux, ils seraient affranchis de cette obligation et demeureraient hommes du sire de Waud. — Enfin les religieux donneront 60 livres à celui-ci et 20 aux bourgeois de Morges 249 .

Les hommes du prieuré étaient en général de condition libre, mais leurs propriétés mainmortables. Ils pouvaient quitter la jurisdiction de Romainmotier avec leurs biens meubles, mais en abandonnant les immeubles. Nul d’ailleurs ne devait jurer bourgeoisie à quelque ville, sous peine de perdre ses biens, à moins de venir à résipiscence dans un temps fixé. Ce prononcé des arbitres, est donc remarquable par sa fidèle observation des usages du prieuré; l’humanité même y est respectée. /92/

Nous comprendrons maintenant le sens de la promesse de Louis de Savoie de ne jamais recevoir de sujets de Romainmotier au nombre des bourgeois de quelque bonne ville, excepté les hommes de Jolens 250 .


JOLENS

 

Etait un village paroissial considérable soumis au prieuré, mais qui fut si bien absorbé par la cité nouvelle de Morges, bâtie, peu s’en faut, sur son territoire, que le nom de son emplacement le rappelle seul aujourd’hui.

L’accord arbitral (v. s.) touchait de près les hommes de Jolens.

En 1284, un différend s’était élevé entre Jaques sire de Montricher et le Prieur Gaufred au sujet de l’avouerie (advocaciam seu advoieriam) de Jolens. Des arbitres 251 décidèrent, que le Prieur aurait souveraineté et omnimode jurisdiction sur les hommes de Jolens 252 . Que chaque feu devrait annuellement au sire de Montricher, une coupe d’avoine et un chapon, sans plus, à cause de l’avouerie; et que Montricher tiendrait cette /93/ redevance sans charge d’hommage, mais en plein fief (in planum feudum), du Prieur. Enfin qu’en échange de cette redevance, ceux de Jolens auraient l’usage (uti) des pâturages du sire de Montricher suivant la coutume 253 .

Les hommes de Jolens étaient dans la même situation politique que les autres sujets du prieuré. Cela est prouvé par l’arbitrage ci dessus, et confirmé par plusieurs actes (de 1318), où des bourgeois de Morges se reconnaissent hommes libres et francs des religieux de Romainmotier, confessant tenir d’eux leurs possessions, situées dans le territoire de Jolens, et ne devoir les aliéner ou vendre sans leur permission, sauf à leurs pairs 254 .

L’un d’eux, Jean Joyet, après 255 une longue spécification de terres, censes, dixmes etc., dans le territoire de Jolens, y compris deux maisons dans la « villa » de Morges, institue les religieux ses héritiers, s’il vient à mourir sans enfant, de sa /94/ femme, épousée légitimement en face de l’Eglise, et suivant ses clefs 256 ; et ce, en reconnaissance de leurs bienfaits et bons offices envers lui et ses prédécesseurs, et à condition que les religieux l’enseveliront dans le cimetière de Romainmotier, et que s’il veut résider dans le Cloître, il aura droit à une prébende de moine, en vivres et habits.

Déjà alors cette prébende n’effrayait pas trop par sa frugalité. C’était aussi un repos d’esprit dans la vieillesse. Enfin en donnant essor à sa reconnaissance, et en se soumettant à une régle monastique, on pensait se placer sur la voie royale du salut.

Il y avait à Jolens un Mayor ou villicus.

Il y avait aussi une famille féodale du nom de Jolens 257 .

Le prieuré conserva, paraît-il, ses possessions à Jolens, jusqu’à la fin 258 .


VUFFLENS LA VILLE.

 

L’origine des possessions de Romainmotier dans ce village, peut se trouver dans la donation du roi Rodolphe (en 1011), de neuf manoirs (soit domaines, mansos. v. s.), à Vuolflinges 259 ; en lui refusant le pouvoir de les aliéner de sa jurisdiction.

A cette donation s’en joignent d’autres fort anciennes 260 . /95/

« Au nom de Dieu, Harduinus fils de Wuitgerius donne à Dieu, aux saints Apôtres Pierre et Paul, et au monastère romain 261 tout son héritage avec serfs et serves (cum omnibus servis et ancillis); savoir à Volflens, un lunatique (unum lunaticum), avec le cheseau, etc. 262  »

Il fait ces dons pour remède à son âme et de son frère Engunzon et de sa mère Adalinude, afin que le Tout-Puissant leur pardonne leurs péchés. Et si quelqu’un voulait calomnier cette donation qu’il soit anathême avec Datan et Abiron qui ont été engloutis vivants dans l’Enfer.

C’est à ces possessions qu’Uldric sire de Cossonay et autres de sa famille promettent paix et tranquillité en 1096; sans /96/ doute parce que Vufflens la ville était renfermé dans cette baronie 263 .

Autre donation. — Willierme Seigneur de Volflens confirme aux religieux vivant à Romainmotier sous la protection de Jésus Christ, l’aumône faite par le noble Seigneur Reymund son père pour guérison de son âme, savoir, Aurant et son héritier, et la Terre de Turonbert, et un pré 264 .

Bientôt Willierme de Wolflens la vila, chevalier, confirme à ses derniers moments un testament fait par lui avec joie (hylaris) dans le temps de sa vigueur (sanus). Après divers legs à ses parents, il y donne en aumône à l’Eglise de Romainmotier tout son héritage, mais pour en jouir seulement après la mort de sa femme Jordane 265 . Il donne aussi Girard de la fontaine et ses héritiers, et leur ténement 266 . Or les religieux ne peuvent exiger /97/ de celui-ci ni de ses héritiers, pour taille, terrage, tout usage et tout service, que 15 sols de cense.

Un homme pouvait donc être donné avec ses héritiers, dans le style du tems, sans être serf, ni même taillable à miséricorde, mais simplement soumis à une redevance fixe et à la jurisdiction 267 . La langue insolite du moyen âge nous est encore bien étrangère, en voilà un exemple remarquable. Nous jugeons mal cette époque.

Jordane, veuve et usufruitière de Willerme de Volflens la vila, avait, en secondes noces, épousé Henry de Chabye donzel, et en 1278, les religieux demandèrent à Jaques leur fils, les immeubles, don de Willerme. Après quelques difficultés, Jaques confessa tenir en fief lige des religieux 268 soixante poses à Wufflens, l’avoinerie de Vilar bozun et douze poses à Chabye 269 . Promettant que si les religieux étaient inquiétés au sujet de ce fief, il leur restituerait toute perte, en lieu équivalent sinon meilleur 270 . /98/

Toutefois cet hommage fut longtemps perdu de vue 271 , car, en 1429, nouveau débat entre Jean de Seyssel, Prieur, et Nycod de Chabye, de Vouflens vila, donzel. Le Prieur demandait l’hommage et les possessions reconnues par Jaques de Chabye, son bisayeul (proavum seu attavum). Nycod invoquait la prescription, au bout de six ou sept vingt ans. Le Prieur la niait parce que Nycod descendait en ligne directe de Jaques et qu’il devait garantir (ferre guerentiam) ces biens, encore qu’il ne les possédât plus intégralement.

Après beaucoup d’altercations, une médiation amiable ramena la paix 272 . Nycod fit hommage aux religieux de Romainmotier tenant ses mains placées (infixis) entre celles du Prieur, avec intervention du baiser d’alliance selon la forme des hommages nobles. — Et le Prieur paya, en augmentation de fief « à son fidèle », 80 florins. Puis Nycod de Chabye promit de reconnaître les anciens biens en litige tels qu’il les possédait, ainsi que trente solidées de terre de son propre alleu; ou bien d’en acheter de pur et franc alleu, à cet effet 273 . /99/

Ces cinq ou six générations écoulées sans renouvellement d’hommage nous étonneront moins après lecture d’un acte du Prieur Arthaud Alamand, qui reconnaît, en 1359, que le secours accordé par les preud’hommes de la Terre de Romainmotier, pour la réemption de ce village de Wufflens, aliéné par ses prédécesseurs, est un secours gratuit (in quo nobis minime tenemini), pour lequel il donne un acte de non préjudice 274 .

Le Couvent de Romainmotier n’était pas, malgré l’étendue de ses propriétés, seul possesseur de Wufflens la ville, car il existait une famille féodale de ce nom, puis les sires de Cossonay revendiquaient la suzeraineté en vertu de leur Baronnie 275 .

En 1385, le Prieur Jean de Seyssel, après avoir tenu plusieurs fois chapitre au son de la cloche, et noble et puissant Seigneur, Louis, sire de Cossonay et de Berchier, chevalier, après conseil diligent, terminent comme suit et par amour de la paix un ancien dissentiment, sur le fait de la jurisdiction et de la souveraineté (merum et mixtum imperium) des hommes et possessions de Voufflens vila. /100/

Le Seigneur de Cossonay doit avoir mère mixte impère et omnimode jurisdiction à Wufflens, dans son territoire, ses chemins et ses pâturages, excepté sur les hommes et possessions de la mouvance des religieux. Le Couvent doit toujours avoir sur celles-ci, lods et vendes, bans, clames, saisines (sasinas), barres, injures (injurias) et amendes encourues par ses hommes.

Si l’un de ceux-ci commettait un méfait (delictum) pour lequel il dût être mis à mort, ou subir mutilation de membres, le nonce des religieux devrait l’appréhender au corps 276 et s’enquérir personneliement du délit 277 . Et lors du jugement, il appellera le nonce du sire de Cossonay pour ester (ad essendum), et après le jugement il lui remettra incontinent le coupable en chemise (in camisia) pour exécuter la sentence, soit pour faire selon sa volonté 278 . — Si le nonce de Cossonay ne se rendait pas à cet appel, celui des religieux devrait garder le coupable, sans dol ni fraude, dès le prononcé du jugement au coucher du soleil; plus tard les religieux n’en sont plus responsables. — Et si le sire de Cossonay renvoyait impuni le délinquant, celui-ci ne pourrait résider à Wufflens, sinon à la requête des religieux. — Il va sans dire qu’il y avait saisie de ses biens 279 .

280 Item. S’il y avait des chemins (devias) à faire dans le /101/ village, le territoire ou les pâturages de Wufflens la ville, nous (Seigneur prédit) devons les faire, après proclamation dans l’Eglise, selon la coutume de Lausanne, et en présence du nonce des religieux 281 .

Item. Si quelqu’un provoquait (appellaret) un homme des religieux, ou, si un de ceux-ci en provoquait un autre, son pair, et qu’un combat judiciaire dût s’en suivre d’après la coutume de Lausanne, les religieux doivent avoir la connaissance et la décision de cet appel au combat, en mandant au jugement le nonce de Cossonay. Puis le combat étant accordé (duello adjudicato), le nonce des religieux est tenu de remettre incontinent les champions (pugilles) 282 à celui de Cossonay pour surveiller la bataille, soit pour agir à la volonté du Baron 283 . — Et s’il mettait en liberté le champion vaincu et condamné (par jugement de Dieu!) 284 , il ne pourrait plus résider à Wufflens, sinon par la volonté des religieux; mais ses immeubles et ses biens meubles seraient confisqués 285 .

Item. Si quelqu’un des hommes des Cossonay, ou quelque étranger, suscitait procès (litigaret) à quelque homme des religieux, ou l’un de ceux-ci à son pair, en la cour du nonce des religieux à Wufflens et touchant les possessions de leur mouvance, et que l’acteur ou le rée se tint pour grevé de la sentence, l’appel se ferait à Romainmotier et non à Cossonay, s’il s’agissait de possessions mouvantes d’antiquité (ab antiquo) des religieux. /102/ Mais, en revanche, il se ferait à Cossonay par devant le Châtelain, s’il s’agissait d’acquisitions nouvelles du Couvent.

Lorsque tous les hommes du mandement viendront travailler aux fortifications de la ville et du Château de Cossonay, les hommes des religieux, de Wufflens, devront y venir aussi.

Ils sont, en échange, francs de tous subsides dûs aux sires de Cossonay aux cas accoutumés, suivant les usages de Lausanne.

Cependant les religieux devront toujours célébrer l’anniversaire du dit Seigneur, par une messe en musique (cum nota), pour le bien de son âme et de ses ancêtres.

Enfin les hommes des religieux de Wufflens doivent suivre la chevauchée, avec tous les autres hommes de la Terre de Cossonay et non autrement 286 .

Ces détails sur le combat judiciaire méritaient d’être sauvés de l’oubli. Il n’avait pas lieu pour tous les différends, mais probablement pour ceux où l’honneur était intéressé. — Le combat judiciaire était l’ayeul du duel.

Bientôt cette transaction dut être invoquée.

Les Religieux de Romainmotier exposent au Prince, en 1414, que depuis si longtemps qu’il n’y a mémoire du contraire, ils ont eu omnimode jurisdiction et seigneurie sur tous les hommes liges de Vouflens la ville et sur leurs possessions; aucun droit n’ayant été retenu sur eux par le Baron de Cossonay, que le travail aux fossés 287 et de suivre la chevauchée; puis dernièrement encore la punition des criminels. Mais dans ce cas la prise de corps, la connaissance et le jugement du crime sont réservés aux religieux.

Or les recteurs de la ville de Cossonay forcent ces hommes /103/ liges à payer 2 florins par feu, de la somme qu’ils ont accordée au Prince, tant à cause d’une concession de franchises, que pour secours régalien (auxilii regalis). Tandis que ces hommes liges devraient suivre la nature des hommes de la Terre de Romainmotier et que jamais, au temps passé, ils n’ont contribué à quelque subside pécuniaire ou gîte (gietum), avec les hommes de la Châtellenie de Cossonay; suppliant qu’ordre soit donné de cesser cette violence et de rendre les gages levés.

En réponse, Amédée, Comte de Savoie, ordonne que les gages soient rendus sans retard et assigne les syndics de Cossonay à comparaître le 19 du même mois par devant le Conseil suprême, avec toutes les informations à leur décharge, pour y attendre sa sentence 288 .

Les droits de suzeraineté du sire de Cossonay sur les possessions des Seigneurs de Wufflens la ville sont clairs 289 . Ils sont moins marqués et de plus fraiche date sur les possessions des religieux. En 1414, c’était une nouveauté que cette réserve de la punition des criminels 290 par le Baron et la clef s’en trouve dans les acquisitions des religieux à Wufflens. De là cette clause sur les appels, qui devaient se faire, tantôt à Romainmotier, tantôt à Cossonay, suivant qu’il serait question de leurs propriétés anciennes ou de date récente. Le sire de Cossonay ne voulait pas laisser usurper sur ses dreytures antiques et Romainmotier en agrandissant ses possessions perdit de son indépendance primitive. /104/

Wufflens payait la cense des Clées au sire de Cossonay. Bien avant 1405, les Comtes de Savoie la lui avaient vendue 291 .

Les religieux n’avaient à Wufflens que des hommes liges; ainsi les serfs et serves, dont il est question dans les anciennes chartes, étaient devenus libres de condition. Et l’on peut présumer d’un mot que leurs propriétés n’étaient pas mainmortables, mais soumises aux lods 292 .

Il y avait aussi un Mayor à Wufflens.


VILLARS-BOSON.

(PRÈS DE L’ISLE).

 

Leutfroy du Château de Fruence (Liefredus de Castello Frieuvenciæ) donne, en 1095, au Couvent de Romainmotier, ce qu’il posséde à Villars (Boson) sous Quarnens 293 .

Voilà sans doute l’origine des possessions de Romainmotier dans ce village.

Nous avons vu aussi Jaques de Chabye reconnaître, en 1278, comme partie du fief qu’il tenait des religieux, l’avoinerie (avenariam) de Wilar bosun.

D’après un acte, de 1330, sa dixme se partageait entre les feudataires de Cossonay, les religieux de Romainmotier et l’Eglise de Chabye. /105/

En 1425, les religieux de Romainmotier prétendaient lever la moitié de tous les bleds de dixme de ce village et disaient que depuis 10, 20, 40, 50 ans, et presque depuis si longtemps qu’il n’y avait pas de mémoire du contraire, les Prieurs avaient usé de ce droit * .


ASLENS.

(PRÈS COSSONAY.)

 

La dame Amize de Aslens, donne à Dieu à ses bienheureux Apôtres Pierre et Paul et aux moines consacrés au service de Dieu à Romainmotier, une terre, avec arbres et vignes, cultivée par Sinzo. Elle donne encore Sinzo lui-même avec toute sa postérité 294 .


LULLY.

(PRÈS ESTAVAYER.)

 

Le roi Rodolphe avait, en 1011, donné à Romainmotier cinq manoirs (mansos) à Lully, dans le Comté du Vully. /106/

En 1377, nous trouvons encore 100 sols environ de cense payables annuellement sur diverses terres, sous peine d’une cense double 295 .


CHANVENT.

 

Romainmotier avait aussi à Chanvent, depuis les Rodolphiens, un domaine féodal; cinq manoirs entiers est-il dit.

En 1307, sous le Prieur Jaques, eut lieu un accensement de toutes les terres du Couvent en cette localité, soit au moins 40 poses, sur lesquelles se levaient dixmes, terrages et censes en argent, et ce, pour quatre muids annuels de froment et 6 livres 10 sols d’entrage 296 .


CRISSIER.

 

En 1315. Trois frères de Crissier reconnaissent qu’ils sont hommes liges des religieux de Romainmotier et qu’ils tiennent d’eux en fief lige, diverses possessions dans le territoire de Crissier, contre une cense de 15 sols.

Reconnaissant encore ne pouvoir jurer bourgeoisie, ou faire alliance, ni recourir à quelque garde, autre que celle des religieux, sous peine de perdre leurs biens 297 .

Ils étaient de condition libre. /107/


MONTAGNY.

(PRÈS YVERDUN.)

 

En 1287, Hugo, dit Gaschet d’Orbe, chevalier, considérant les bienfaits des religieux, leur donne pour le bien de son âme quatorze coupes de froment de rente annuelle; dont quatre sur la dixme de Montagny près Yverdun, et dix sur celle de … 298 .


HYENS (YENS).

 

Mais Romainmotier avait dans cette localité des possessions plus anciennes, car, en 1257, il eut un différend avec deux frères, dits Pelier de Yens, donzels, qui tenaient de lui plus de 60 poses de terre et un moulin, sans payer ce qui est juste. — Enfin l’aîné prit en fief du couvent le tout, y compris le moulin et un bois de chataigners, sous redevance de trois muids annuels de blé 299 .

C’est sans doute la souche de l’hommage suivant.

En 1391. Marguerite fille de Jaques de Gumuens, donzel, femme de feu Jean de Yens, donzel, et mère tutrice de ses fils Guillerme et Jean, reconnait que son mari et ses prédécesseurs 300 , /108/ ont été hommes liges du Prieur de Romainmotier et ont tenu de lui en fief diverses possessions; et fait pour ses enfans hommage à Jean de Seyssel, confessant être son homme lige (hominem ligiam) et promettant de desservir hommage comme les autres feudataires.


TORCLENS.

 

Romainmotier avait dans ce village des possessions étendues, qu’il cèda, en 1265, aux Seigneurs de Montricher, en échange de l’avouerie d’Apples 301 .


ESCHAGNENS (ECHANDENS.)

 

Romainmotier y possédait des terres, franches de dixme, abbergées à certains hommes de Romainmotier.

L’un d’eux, en 1481, dit avoir appris de ses ancêtres et de ses voisins, que de tout temps (ab ævo), on les appelait terres de Saint Pierre de Romainmotier et que la directe seigneurie appartenait à ce Couvent. — Ces terres payaient des redevances de froment, avoine et vin 302 . /109/


CHAVANNES SUR LE VEYRON.

 

En 1491, il est fait mention de terres de ce village, situées auprés de la Maladière, qui sont du fief et de la directe Seigneurie du Couvent de Romainmotier.


MONT LA VILLE.

 

Là aussi Romainmotier avait un domaine féodal, dont l’origine est peut-être une vente faite par les enfans de Pierre « de Ponte », en 1275, pour 60 sols.

En 1417, l’emphytéote de ce domaine donna au Couvent tous ses biens, se réservant d’être enseveli soit dans l’église du Prieuré, soit dans le cimetière de Mont-la-ville, au choix des religieux.

Après sa mort, tous ses biens furent donnés (en 1423) sous hommage lige et directe seigneurie, pour 52 sols de cense et 50 florins d’entrée 303 .


VALIÈRES (VALLEYRES SOUS RANCES).

 

En 1272, Jocerand de la Baume, Châtelain des Clées, donne raison à Romainmotier contre les enfans des frères Uldric, /110/ Girard et Willelm, dits Pelous, de Valières, hommes de Romainmotier, qui, en dépit de l’ancien usage, refusaient de lui payer la taille 304 .


LIGNIERULES (LIGNEROLLES).

 

En 1282, Hugo de Lignierules, dit Fossar, voulant avoir une part dans les prières de l’Eglise de Romainmotier, lui donna en aumône un homme, avec les services et hommages qu’il devait, selon le droit, ou d’après la coutume 305 .

Le Couvent avait encore des possessions dans ce village au 16e siècle.

 

Le Monastère avait de plus quelques droits à Ballaigue, Bavois, Dizy, Jougne 306 .

Il y a aussi plusieurs donations de Rodolphe dont nous ignorons le sort. — Le village de Ferreyres, par ex., un manoir à Senarclens, un à Penta, d’autres à Glans, à Giez, à Munnens, Mornens, etc. 307 . Enfin sans nul doute plusieurs autres possessions féodales du prieuré, dans l’Evêché de Lausanne, ne nous ont point jusqu’ici été révélées par les documens. /111/


II.

POSSESSIONS DANS LE PAYS DES EQUESTRES SOIT DANS L’EVÊCHÉ DE GENÊVE

 

SUZERAINETÉ D’UNE PARTIE DE LA CÔTE.

Les collines de la Côte se prolongent sur une étendue de plusieurs lieues, comme un ouvrage avancé, un rempart de la chaîne du Jura, dont les sépare une vallée haute, boisée et peuplée de villages. La vue qui se découvre du sommet de ces collines, a été placée à juste titre par le fameux Tavernier au nombre des plus magnifiques du monde. — La nappe limpide et azurée du Léman s’y déploie dans sa plus grande largeur, dominée par le géant des Alpes, le Mont Blanc, dont la cîme vient se mirer dans ses ondes, tantôt ardente aux derniers rayons du soleil et comme rougie toute entière par des feux souterrains, tantôt se dessinant par sa blancheur, presque livide, sur un ciel d’opale, à l’approche des ombres.

Au milieu de ces collines s’élevaient les manoirs de la Baronnie des Monts. Ses vastes domaines, limités, dans la haute vallée dont nous avons parlé, par ceux de l’Abbaye de Bonmont et de /112/ la Baronnie d’Aubonne, s’étendaient sur le versant méridional de ces côteaux couverts de pampres renommés et dans la plaine embellie de la riche végétation de noyers et de châtaigniers au feuillage semi-méridional, qui les sépare du Léman.

Or dès le treizième siècle les sires de Mont étaient vassaux de Romainmotier, pour quelques terres.

En 1276. — Yblion, sire des Monts (de Montibus) 308 , vend au Prieur Aymon et aux religieux de Romainmotier, pour trente livres de Genève, tout ce qu’il posséde 309 dans les villages de Vinsye, Gillie, Saint Vincent, Brussins, Britinier et dans leur territoire, y compris les censes, avoueries et seigneuries; et spécialement tout ce qui se trouve dans les vaux et bois de Gillie (Gilliacum) et la moitié du territoire de Champagny 310 . — Yblion des Monts reconnaît de plus avoir reçu tout cela en fief, du Monastère romain 311 , le soumettant aux coutumes féodales, promettant d’observer tout ce à quoi le Vassal est tenu envers son Seigneur et lui faisant hommage 312 .

Chose étrange, qu’un dynaste vassal d’un autre dynaste et Romainmotier se trouvant suzerain d’un Seigneur d’arrière fiefs!

Cette vassalité persista 313 . /113/

En 1392, Arthaud sire de Mont, chevalier, refusait de prêter cet hommage lige à Jean de Seyssel 314 ; on choisit pour arbitre la Comtesse Ysabelle de Neuchâtel, d’après l’esprit chevaleresque du temps. Elle prononça: qu’Arthaud devait prêter hommage au Prieur; que celui-ci donnerait en augmentation de fief, à Arthaud, dix livrées (libratas) de terre 315 , mais pour lui et ses enfans seulement; et si, ce qu’à Dieu ne plaise, il n’avait pas de postérité, ces dix livrées reviendraient au Prieur 316 . Elles seront de plus toujours rédimables pour 200 livres, et dans ce cas, des terres allodiales de cette valeur devront être jointes, par Arthaud, au fief qu’il tient du Prieur.

Ce compromis ayant été accepté des deux parts et agréé par le Couvent assemblé en chapitre; Seyssel et Arthaud de Mont, se présentèrent dans l’église du Prieuré de Corcelles, près Moûtiers, au Comté de Neuchâtel 317 ; et là, le chevalier fit hommage lige au Prieur, tenant ses mains entre les siennes, selon la forme des hommages nobles, avec intervention du baiser de /114/ paix; reconnaissant tenir tout ce que dessus en fief lige, avec promesse sur les Saints Evangiles d’être obéissant et fidèle. Et le Prieur investit le chevalier de ces possessions par la tradition d’un bâton qu’il tenait à la main, et promit sur sa bonne foi, la main placée sur la poitrine, d’observer le tout 318 .

Il paraît qu’Arthaud de Mont n’eut pas d’enfans.

Après sa mort le château de Mont, et tout son ressort, passa à noble et puissant Seigneur Aymon de Lassaraz, et avec lui la vassalité en question 319 .

Il reconnut, de plus, tenir en fief de Romainmotier les dixmes qu’il possédait à Gillier, Saint-Vincent, Brussins, Brutignier, Dullict, Brussinel et Verney; et reçut pour cette reconnaissance nouvelle, la somme de deux cents livres; puis fit hommage lige de la main et de la bouche, en fidèle vassal 320 .

Grande était la joie et du Prieur et d’Aymon, de la conclusion de cette affaire; aussi un combat de générosité s’établit entr’eux. D’abord Aymon reconnut avoir reçu, en augmentation de fief, du Prieur,les mêmes dix livrées de terre de revenu annuel (v.s.) 321 ; et pleinement satisfait par les deux cents livres reçues, il laisse faculté de ne plus lui payer, non plus qu’à ses héritiers, ce revenu dont il donne quittance. — Mais Jean de Seyssel n’accepta point ce /115/ généreux sacrifice; et touché de l’affection et de la fidélité (amorem et fidelitatem) d’Aymon envers lui et son Eglise, il ne voulut point modifier la reconnaissance déjà faite; il y fit insérer, nommément, les dix livrées de terre, et renonça même à la clause de leur retour à défaut de postérité, consentant, par grâce spéciale (de gratia speciali), à ce que les héritiers d’Aymon, quels qu’ils fussent, jouissent toujours de cette assignation de dix livrées de terre de revenu, en restant toutefois hommes liges du Prieuré.

Aymon de Lassaraz, sire de Mont-le-Grand, eut un fils, Claude. Celui-ci épousa Jaquéte (ou Jaquemette) de Seyssel, la fit son héritière et elle devint vassale de Romainmotier, aux mêmes conditions qu’Aymon.

En effet, en 1446, Jaquemette de Seyssel, noble et puissante Dame de Mont-le-Grand, reconnut être homme lige (hominem ligiam) du Seigneur de Romainmotier Jean de Juys 322 , et prêta incontinent cet hommage, sans être, en vertu de son sexe, dispensée du cérémonial 323 des hommages nobles; promettant d’être obéissante et fidèle au Prieur et à ses successeurs canoniques, de procurer l’avantage de l’Eglise et d’éviter son dommage de tout son pouvoir, et de desservir hommage au besoin. /116/

Jaquéte de Seyssel était à cette époque veuve, non-seulement de son premier mari Claude de Lassaraz, mais encore de noble et puissant Anthoine Seigneur de Saint-Trivier. — Mont-le Grand passa d’elle aux Saint-Trivier. — Et en 1518 Dame Claude de Saint-Trivier, veuve d’Adrien le dernier Bubemberg (légitime), et sans enfans, fit cession à Charles Duc de Savoie de la Terre de Mont-le-Grand, y compris Rolle, etc., et ce, sous diverses conditions.

Ainsi plusieurs des premières familles du pays, les de Mont, de Lassaraz, de Seyssel, de Saint-Trivier, furent vassales de Romainmotier, si même en droit le Duc de Savoie ne l’était pas depuis 1518.— Au reste ce genre de vassalité, qui n’était point rare au moyen âge, était plutôt une offrande qu’un acte de sujétion. — On nommait ces fiefs oblats, parce qu’on faisait oblation de ses biens aux saints Apôtres Pierre et Paul patrons du Couvent 324 .


BRUSSINS (BURSINS) ET VERNEY. *

Une charte du roi Rodolphe, de 1011, donne à Romainmotier l’Eglise consacrée à Saint Martin, et le village de Bruzinges, au Comté Equestre, en lui refusant le droit de l’aliéner 325 . /117/

Le Couvent ne jouit pas de ce don sans vicissitudes.

Il paraît, chose inattendue, que les terribles sires de Joux (en Bourgogne), Landri et Amaury, son fils, élevaient des prétentions sur les possessions des religieux à Brussins; mais qu’ils les abandonnèrent à Dieu et à St. Pierre de Romainmotier, sous le Prieur Lambert (vers 1110), en promettant la paix; et pour celle-ci reçurent, Amaury, un cheval, et, Louis, son frère, dix sols 326 .

En 1270, Jean, sire de Prangins, vend au Prieur Aymon et aux religieux de Romainmotier, pour 12 livres, tout ce qu’il posséde à Brussins 327 .

En 1280, le même Prieur fait don au Couvent d’une coupe de vin annuelle à cause de l’acquisition d’une vigne à Brussins.

Bientôt (1284) Aymon, sire de Prangins, soulève un différend contre le Prieur Gaufred, au sujet d’un fort (fortalicium) construit par son prédécesseur (à Gaufred) dans la maison de Brussins, et qui lui portait ombrage. — Il s’agissait aussi de certaines terres que les religieux avaient obtenues du Seigneur Willelm de Pleasie, chevalier, et qu’Aymon de Prangins disait être de son fief. Enfin, à la suite d’un arbitrage, Aymon renonçaà ses prétentions, moyennant cinq chars de vin (pro 5 carratis vini). /118/

Si la construction d’un fort étonne dans la vie d’un Prieur, que dire de la guerre, et avec un Evêque encore! C’est pourtant ce que nous révèle une charte de 1284.

Jean de Duluyna 328 , donzel, se trouve en difficulté avec Gaufred, sur des possessions près de Brussins: le Prieur les disait données en aumône au couvent par ses prédécesseurs 329 ; Jean de Duluyna, se fiant aux paroles des religieux, abandonne ses réclamations, mais expose: qu’Aymon, jadis Prieur de Romainmotier, prédécesseur de Gaufred, avait eu guerre contre Henry jadis Evêque de Genève 330 ; et qu’à sa requête son frère le sire Willerme de Pleasie, père de lui Jean, l’aida dans cette guerre, non sans éprouver, ainsi que les siens, des maux graves 331 dont il demande d’être indemnisé. — Après médiation, les religieux lui donnèrent 40 livres, dont il dût acheter 40 solidées de terre 332 , ou les prendre dans son alleu, pour en faire hommage et les recevoir en fief des religieux, et ce, avant deux ans.

Ce fort construit par Aymon à l’époque où Yblion, sire des Monts, lui céda la suzeraineté de quelques biens, ne fut point, au reste, élevé à la légère, mais devint le centre d’un ressort étendu, et l’appui de possessions considérables quoique éparses. Il se forma une Châtellenie de Brussins.

Le Château d’Aymon s’élevait, chose bizarre, à côté d’une maison religieuse de l’ordre de Cluny. /119/

En 1326, Pierre, Abbé de Cluny, mande au Prieur de Saint Victor (à Genève); qu’au dire du Prieur de Romainmotier, ses ressources sont insuffisantes, sans le revenu de la maison de Brussins, qui lui est immédiatement soumise 333 . — Il lui enjoint donc de se transporter sur les lieux et de s’enquérir de l’état des choses.

Or cette enquête dura deux ans! Enfin en 1328, Henri, Prieur de Saint Victor, s’adresse à son très-cher Seigneur, l’abbé de Cluny, avec humble déférence et obéissance dévouée jusqu’à la mort 334 . Il lui fait savoir: qu’ensuite de son mandat, il s’est transporté à Romainmotier et à Brussins, en toute diligence, et a pris information des conventuels et d’autres personnes expertes et dignes de foi 335 ; et que tous assurent par serment, que les ressources de la maison de Romainmotier, sans le revenu de la maison de Brussins, ne sont pas au niveau de ses charges.

En suite de cette lettre, Pierre, Abbé de Cluny, nomme des mandataires 336 , pour prononcer l’union de ces revenus, si elle leur paraît convenable. — Voici leur rapport:

337 Ayant reçu ce mandat avec le respect convenable; après avoir vu l’enquête du Prieur de Saint Victor, et sur la déposition analogue de beaucoup de voisins de l’une et de l’autre maison, soit ecclésiastiques, soit séculiers; considérant que néanmoins le même nombre de moines peut demeurer à Brussins, et /120/ surtout, que cette maison ayant appartenu autrefois à l’Eglise de Romainmotier, comme cela nous a paru évident par d’anciennes lettres d’un certain Roi Rodolphe, il est raisonnable que chaque chose retourne à sa propre nature: — Nous annexons cette maison de Brussins, avec tous ses droits, à la mense commune des religieux de Romainmotier, pour être gouvernée par le Prieur; pourvu, toutefois, que le culte divin et les autres œuvres de piété, ne soient du tout pas en souffrance à Brussins.

On se rappelle ici l’union du Prieuré de Vallorbes à la mense de Romainmotier: une différence cependant; Vallorbes ne pouvait subsister à cause de sa pauvreté, Brussins est uni à Romainmotier à cause de sa richesse. - Mauvais économes devaient être nos religieux, pour ne pouvoir vivre, malgré leurs grands revenus, sans absorber celui d’autres maisons de leur ordre. — D’autre part des moines durent continuer à vivre à Brussins, et non à Vallorbes: on voulait les appauvrir et non les anéantir.

« Il est raisonnable que chaque chose retourne à sa propre nature »: vraie parole du moyen âge. Sa fixité 338 était indocile aux contrats, aux chartes; et chaque chose tendait à reprendre son ancien état, comme une plante vigoureuse lorsque la main qui la comprimait s’éloigne.

Par l’union ci-dessus, Romainmotier, suzerain, en quelque sorte, ou plutôt, supérieur de la maison religieuse de Brussins, en était devenu le propriétaire, et ses possessions étaient grandes.

Les droits du Prieur à Brussins n’étaient cependant pas isolés, car il y avait au moyen âge un entrelacement, une mosaïque de jurisdictions incroyables; aussi des différends s’élevèrent, dans /121/ lesquels se trouva enveloppé un village voisin de Brussins, celui de Verney, qui aujourd’hui n’existe plus 339 .

En 1290, Humbert, illustre 340 sire de Thory et de Villars, cède pour 12 deniers genevois, annuels, payables par chaque feu, un gîte (contribution) que les hommes du village appelé Verney, situé sous Brussins, étaient tenus de lui payer annuellement.

En 1399, Girard de Rossilion, donzel, sire de Alamant, reconnaît que lui, et ses prédécesseurs, percevaient sur chaque feu du village de Verney, près Dullit, 12 deniers de Genève, 2 coupes d’avoine et 2 pains blancs, et qu’il cède le tout au Prieur de Romainmotier, Jean de Seyssel, pour 20 livres 341 . — Impôt Thory Villars accru.

Ce droit n’était donc pas encore acquis par le Prieur lors d’un différend qui s’éleva en 1374.

Bonne de Bourbon, Comtesse de Savoie, rappelle qu’ensuite de ce différend Henri de Syvirier, Prieur de Romainmotier, et Galleis de Viry, donzel, comparurent devant elle; ce dernier comme représentant de sa mère, Luque de la Baume (de Balma), dame de Mont. — Le Prieur se plaignait de ce que les officiers de sa partie adverse avaient incarcéré un homme sur lequel il avait jurisdiction, et l’avaient tellement travaillé (construxisse), qu’il avait dû confesser hommage à Dame Lucque.

Item, qu’un autre homme du Prieur avait été par eux tenu longtemps en prison, et tellement torturé que remis d’office /122/ entre les mains du Bailli de Vaud, il était mort! — Grand préjudice du Prieuré qui aurait du rendre la justice à son sujet.

Que, de plus, le Châtelain de Mont avait tenu sa cour à Brussins, dans le cimetière, dépendant de la jurisdiction omnimode du Prieur; autre dommage et de conséquence.

Qu’enfin le même Châtelain, avec une suite nombreuse, avait fait irruption à Brussins dans la maison du Prieuré, détruisant plusieurs ornements (garnimenta) et meubles, frappant et blessant plusieurs personnes, au milieu de leur labeur, une surtout 342 jusqu’au sang. — Le Prieur avait porté plainte de ces violences à Girard de la Molière, Vice-bailli de Vaud, qui assisté de plusieurs bourgeois de Moudon et coutumiers (consuetudinarii) de la patrie de Vaud, donna au Prieur un passement montant à 1300 livres contre le dit Châtelain 343 .

Galleis, de son côté, niait d’avoir donné les mains à tous ces désordres, et réclamait à Brussins les mère mixte impère et omnimode jurisdiction à cause du Château de Mont, et les déniait au Prieur, ne voulant lui accorder qu’une faible part de jurisdiction: aussi en avait-il appelé au Comte son Seigneur, de la sentence de Moudon.

Enfin, après de longues médiations, ils se soumirent d’un commun accord à la décision de celui-ci, lui donnant plein pouvoir 344 de prononcer. — Jusque là tout devait rester en suspens 345 ; et le Prieur devait faire relever le Châtelain et les officiers de Mont de l’excommunication fulminée contre eux. /123/

Des commissaires nommés par le Comte Amedée 346 firent donc une enquête sur les droits du Prieur à Brussins. Il en résulte: qu’il avait sur ses gens omnimode jurisdiction tant à Brussins qu’à Verney et que les nonces du Prieur tenaient souvent leurs assises à la vue des envoyés du Châtelain de Mont; qu’ils établissaient des messiers, donnaient des tuteurs aux pupilles et orphelins, faisaient poser des bornes à la réquisition des parties, recouvraient les bans (bannos) jusqu’à 40 sols; que le Prieur devenait propriétaire des objets trouvés; qu’il punissait à Romainmotier les coupables de Brussins, les pendant à ses fourches; qu’enfin il y avait appel des assises de Brussins à la cour de Romainmotier.

Quelques anecdotes des dépositions ne révèlent point un âge d’or.

Un clerc, nommé frère Jean, par ex., qui avait blessé de son épée Perronet de dessous l’Eglise (de subtus ecclesiam) à Brussins, fut pris par le Châtelain de Mont et conduit à Rolle; cependant le Prieur Arthaud Allamand en obtint la recréance, et le fit conduire et enfermer à Romainmotier, puis à Vallorbes, jusqu’à la guérison du blessé.

Un nommé Perret de Grens avait tué un homme à Brussins et s’était enfui, et cependant à la prière de plusieurs et surtout de noble Dame Catherine de Savoie, le Prieur Arthaud Allamand lui fit grâce, et ce Perret vint à Romainmotier se mettre sous la main du Prieur, après s’être passé une corde au col 347 . /124/

Un autre encore, sonnant une nuit les cloches de Brussins, ouït un voleur qui rompait une arche dans l’Eglise et qui s’enfuit laissant, en icelle, une grande épée. Cependant ne comparaissant point après trois citations des nonces du Prieur, il fut condamné et ses biens confisqués, etc.

Ensuite de cette enquête, le Prince prononça 348 : que les villages de Brussins et Verney seraient séparés du Mandement de Mont; et que Galleis de Viry et sa mère abandonneraient entièrement tous leurs droits de supériorité territoriale et de haute jurisdiction sur ces deux villages, sans réserve aucune 349 . En échange le Prieur devait leur donner une valeur égale à ce qu’ils auraient abandonné, suivant la taxe légitime des commissaires 350 .

Il remettrait encore une somme égale (iteratus valor) à sa partie adverse 351 .

Payerait de plus 300 florins de bon or 352 ; et ne pourrait /125/ réclamer le passement de 1300 livres obtenu à Moudon. — Enfin il ferait ratifier l’accord par son Couvent, puis par l’Abbé de Cluny.

Luque de la Baume dame de Mont ratifia d’abord le compromis « touchant les mère mixte impère et omnimode jurisdiction, fiefs et arrière fiefs nobles et non nobles, droits, hommes taillables et censitaires, abbergataires, sujets, prés, bois, vignes, eaux, avoueries, seigneuries, etc., qui lui appartenaient dans les villages de Brussins et Verney avant l’accord, et qui à présent, dit-elle, appartiennent au Prieur irrévocablement et sans réserve 353

Puis le Couvent de Romainmotier, considérant l’utilité du Monastère, ratifie aussi l’accord (21 août 1375), avec prière à Jaques, Abbé de Cluny, d’en faire autant; et celui-ci n’a garde d’y manquer (3 septembre 1375), en considérant que cet accord est très-avantageux à sa maison de Romainmotier.

Sans ces déclarations répétées, nous aurions facilement pû croire que le Prieur avait été sacrifié dans cet arbitrage, mais non. Une jurisdiction sans mélange était un avantage hautement apprécié en dépit de tels sacrifices. C’est que le mère et mixte impère comprenait, à peu près, les droits souverains 354 .

Félicitons surtout les habitants de ces villages de la solution de ce nœud de jurisdictions entrelacées, qui ne leur était sûrement pas favorable.

Le Prince arbitre ne s’était pas oublié. /126/

Tous les biens remis par le Prieur, y compris ceux allodiaux achetés avec les 300 florins, devaient demeurer du fief et de la directe seigneurie du Comte. Ils devaient en même tems être de l’omnimode jurisdiction de Galleis de Viry et de sa mère. La suzeraineté appartenait donc à ceux-ci. — Et, peut-être, faut-il voir dans cette disposition du Prince un exemple de cet artifice curieux de la politique féodale, qui, pour affaiblir un vassal puissant, engageait le suzerain à recevoir de lui des terres en fief. En effet un suzerain puissant devenu vassal de son vassal, ne pouvait facilement être forcé par lui à remplir les obligations féodales 355

Or, en vertu de ce compromis, Guillerme Mestral de Mont donzel, qui exerçait la Mistralie à Brussins et Verney comme dans les autres bourgs et villages de la Châtellenie de Mont, considérant que tout s’écoule de la mémoire des mortels comme une eau courante, Guillerme, disons-nous, du mandat exprès de Dame Luque, de Bonne de Seyssel et d’Amédée de Viry son fils, Seigneurs de Mont, abandonne irrévocablement au Prieur de Romainmotier, Jean de Seyssel, cette Mistralie dans ces deux villages, avec tout ce qui en dépend 356 .

Titre notable sur une famille encore existante dans la Patrie de Vaud 357 . /127/

L’office de la Mistralie était, peu s’en faut, identique avec celui de la Mayorie. Cette identité est démontrée, sous quelques diversités locales, par la comparaison des fonctions du Mayor de Romainmotier et des Mestraux de Rue, Romont et Orbe 358 . Mais on trouve surtout les Mayors dans les /128/ seigneuries ecclésiastiques et les Mestraux dans les seigneuries laïques 359 .

Il y avait plusieurs seigneuries de Mont: Mont-le-vieux (mons vetus) — Mont-le-Grand (mons magnus) — Mont-le-neuf (mons novus), qui n’étaient pas toujours dans les mêmes mains. De là une complication de leurs rapports avec Romainmotier.

Voici par exemple un différend de Jean de Seyssel, Prieur, avec Arthaud, sire de Mont, chevalier, en 1388; et ce dernier paraît n’avoir été pour rien dans la vente de Luque de la Baume, dame de Mont, au Prieuré.

Un homme avait commis de nombreux délits dans une maison de Mont-le-vieux; arrêté près de Brussins, il fut remis au Châtelain de Mont-le-vieux, pour en connaître, sous condition d’être ensuite livré pour l’exécution de la sentence au Châtelain de Brussins, à teneur d’un ancien compromis. — Mais lors de cette remise, Nicod de Gimel, Châtelain d’Arthaud à Mont-le-neuf (montis novi), réclama de droit cette exécution, le délinquant étant sujet d’Arthaud.— Or Mermet d’Alamant, Procureur /129/ de Vaud prit l’homme en litige, pour éviter un plus grand mal. Un plaidoyer s’en suivit à Moudon par devant le Bailli de Vaud 360 : mais les deux parties désirant, à cause de leur parenté, éviter la discorde, font choix d’arbitres 361 ; avec clause que s’ils ne pouvaient s’entendre, le Bailli de Vaud tiendrait conseil avec des habiles et prononcerait. — Ainsi dit, ainsi fait; discord des arbitres, conseil du Bailli qui donne raison au Prieur, et ordonne que le Procureur de Vaud remette le délinquant, sous trois jours, au Châtelain de Brussins, en la place où il l’a reçu. Et ce, non en personne, car le patient est mort à la fin de sa détention, mais au moyen d’une figure convenable, faite avec une chemise remplie de paille, en forme d’homme, ayant une corde au col, afin qu’elle soit pendue 362 .

Les hommes de Brussins étaient hommes liges et censitaires du prieuré, et il n’est fait à leur égard aucune mention, ni de la mainmorte * , qui était remplacée par les lods, ni d’affranchissement de la condition taillable qui paraît n’y avoir pas existé, au moins dans les temps dont les documens nous restent. — Ces hommes de condition libre, outre la dixme et des censes sur leurs diverses possessions, devaient encore cuire au four, et moudre au moulin du Seigneur, suivre la chevauchée, et appeler, le cas advenant, de la sentence du Châtelain de Brussins, au Châtelain de Romainmotier 363 .

En 1489 364 , le Prieuré avait à Brussins une vingtaine /130/ d’hommages liges. * Il en avait bien davantage dans les temps antérieurs.

Quatre de ces hommages étaient des hommages nobles. L’un est original. Honnête homme Anthoine Evrard, bourgeois et barbier (barbitonsor) de Lausanne, fils de feu Mermet Evrard, donzel de Brussins, voulant suivre à la nature de ses prédecesseurs, se reconnaît homme lige, feudataire et noble, pour des possessions inféodées par le Prieur Jean de Seyssel à son père Mermet, à cause de son mérite (suis exigentibus meritis). — Et prétend à l’exemption des tailles (a talleis) et subsides qui pourraient être imposés par les Seigneurs de Romainmotier, ainsi que d’autres servitudes qui doivent céder à la noblesse (quæ cedere debent nobilitati) 365 .

L’état d’Evrard prouve, au moins, que dans la patrie de Vaud un noble pouvait, au moyen âge, exercer un métier sans déroger. Il n’en était pas de même, dit-on, en France 366 .

Noble Jean de Compois, était aussi homme lige et noble de l’insigne prieuré de Romainmotier à Brussins 367 .

Hugonin de Gland, donzel, l’était encore, qui tenait en fief noble, entr’autres, une certaine dixme, don de Jean de Seyssel à ses ancêtres (en 1391) et qui s’étendait jusqu’au Jura /131/ (usque ad Juriam), au travers du territoire de Brutignier et de Longiro.

Enfin, noble Pierre Beney ou Benoît.— Or, bien que la féodalité ne soit pas précisément en faveur aujourd’hui, on peut suivre avec intérêt des transactions féodales, ne fût-ce que pour se faire une idée exacte et froide d’un temps déjà bien éloigné. Voici donc le cérémonial de la transformation d’un hommage rural en hommage noble.

En 1498, le Prieur Michel de Savoie et le Couvent 368 , attentifs aux bons offices que Pierre Benoît, de Brussins et ses prédécesseurs ont rendus aux religieux, et voyant la profonde affection (affectionem intimam) qui le pousse chaque jour à servir l’Eglise; réduisent volontiers en fief et hommage noble, sa maison, sa grange et ses diverses possessions tenues jusqu’ici en hommage rural, sous certaines censes annuelles; et, vu l’ingénuité de sa personne 369 , ils reçoivent le dit noble Pierre comme vassal et feudataire. — Et, afin de rendre ses possessions plus réellement féodales 370 , on les décharge de censes, en argent et graines, qui devront être assignées, en échange, sur d’autres possessions, actuellement de pur alleu (quas tenet de puro allodio), et que Benoît tiendra désormais du fief de Romainmotier.

De plus, pour accroître son zéle à obéir au prieuré, on lui donne: a) la directe seigneurie (directum dominium) sur ses /132/ nouvelles possessions féodales; b) le droit d’avoir un four en sa maison, sa vie durant 371 ; c) enfin la dixme des blés et légumes d’une pièce de terre qu’il veut défricher (quam exertare interdit) et ce, pour 25 ans.

Puis, en présence du Couvent, le dit noble Pierre à genoux, ses mains placées entre celles du Prieur commendataire, promet fidélité lige et fait hommage, avec intervention du baiser d’alliance; et l’investiture de ces diverses possessions lui est donnée par la tradition d’un poignard nu dans sa main.

Quant aux hommes de Verney, taillables et mainmortables dans l’origine, ils avaient été affranchis par le vénérable Prieur Jean de Seyssel, d’heureuse souvenance 372 , et par le Couvent (en 1403).

Mais las! tel fut le malheur des temps, qu’en dépit de cette mesure bienfaisante, le nombre des habitans de Verney fut loin d’augmenter. « Aussi, disait un commissaire (en 1489), comme l’esprit prend plaisir aux récits des défunts et surtout à considérer leurs faits et gestes, pour acquérir de la prudence, nous joignons ici, à l’instar d’un tisserand, les noms et la place des maisons qui existaient à Verney, afin que chacun apprenne par là que le monde tend à sa fin 373 ». Ce qui excitait la verve philosophique du bon Aymonet Pollens 374 , cuisinier des religieux en /133/ même temps que notaire, c’est que Verney, qui naguères comptait encore une dizaine de ménages, n’en avait plus alors qu’un seul, celui du meunier. Et les religieux déchargèrent celui-ci (1499), pour 25 ans, de 5 coupes de froment de cense pour son moulin, parce que non-seulement à Verney, mais encore à Brussins et Dulict, une grande quantité de feus étaient éteints 375 . Puis il se reconnut leur homme lige 376 .

Les religieux étaient Seigneurs immédiats de ce moulin.

Un autre moulin bâti sur l’eau de la Dulive, aussi dans le territoire de Verney, nous fournira quelques traits de mœurs.

Nicolet, fils naturel et nourri (« nutritus », illégitime), de feu le frère Girard de Dulict, était entré dans l’hommage lige du Prieuré et avait reconnu tenir en fief de lui diverses choses, y compris ce moulin 377 . Le Prieur Willerme de Montricher et le Couvent ne voulant pas (en 1335) être repris du vice d’ingratitude, accordent au frère de Nicolet une prébende de moine à Romainmotier, dont il jouira en habit séculier et à vie, ou du moins, jusqu’à-ce qu’il soit pourvu d’un bénéfice, qu’il veuille accepter.

Cette transaction avec le fils illégitime d’un moine ne pourrait elle faire croire que la bonhomie bourguignonne se mélangeait même au désordre des mœurs?

Si maintenant nous suivons le sort de ce moulin, nous finirons par nous retrouver en pays de connaissance. /134/

Après la mort de Nicolet de Dulict, le Prieur Arthaud Allamand l’inféoda à Hugonet de Dullict, donzel 378 (1360). Puis, après plusieurs hommages prêtés 379 , une héritière des donzels de Dulict l’apporta, avec d’autres possessions, dans la famille féodale de Senarclens. — Or en 1497, un différend s’éleva: bien que les moulins fussent une possession féodale importante, noble Pierre de Senarclens de Dulict refusait de prêter cet hommage, objectant, qu’encore que ses prédécesseurs l’eussent fait, il ne pouvait en supporter la charge pour une si mince valeur. — On entra en composition, et le Vicaire du Prieur accrût son fief de pensions à Dullict et de la directe seigneurie sur les possessions qui les devaient. — Alors le noble Pierre jura entre ses mains, sur les saints évangiles, en touchant des deux mains les saintes lettres, d’être fidèle aux religieux et de défendre de tout son pouvoir les droits du Prieuré. Et, comme il se trouvait déjà astreint ailleurs à un hommage lige, on lui concéda de faire desservir celui-ci par son fils aîné 380 .

Or le 13 janvier 1511, François de Senarclens (fils de Pierre) se présenta devant illustre Michel de Savoie, le Prieur, pour prêter hommage et jura, à genoux devant lui, d’être un fidèle vassal; et Michel de Savoie lui donna l’investiture et le retint pour vassal, par la tradition d’une épée nue qu’il lui mit dans la main. Après quoi le noble François, en signe de vraie fidélité, embrassa le Prieur au visage. /135/

Ce moulin était donc un arrière-fief de Romainmotier, qui y avait omnimode jurisdiction; mais la directe seigneurie appartenait à François de Senarclens. Celui-ci usait du moulin sans payer « d’émine »; et celui qu’il rencontrait dans le dit moulin, en allant faire moudre, n’en payait point non plus! 381 .


DULLICT.

 

Le Prieuré avait jurisdiction omnimode, mère mixte impère et totale seigneurie sur une partie, au moins 382 , de Dullict et de son territoire. Cette jurisdiction s’étendait même jusqu’au lac. Aussi, en 1433, le Prieur Jean de Juys fit condamner Guillerme de Senarclens, donzel, à un ban de 60 sols, parce que de sa propre autorité et sans en avoir reçu mandat, il avait barré 383 une barque chargée de vin, dans le port dit de la Dulyvaz, au-dessous de Dullict; s’y arrogeantl’exercice de la jurisdiction, qui appartient au seul Seigneur de Romainmotier, à cause de son Château de Brussins. — Guillerme de Senarclens n’objecta pas et se soumit à la merci (marciacioni) du Prieur.

L’eau de la Dulyve formait la limite entre la jurisdiction du Prieur et la Baronnie de Prangins. En effet, en 1512, surgit un différend entre Michel de Savoie, Prieur, et noble, puissant et courageux (strenuum) chevalier, Urbain de Compois, sire de Grancour, Prangins et Gland, au sujet de certaines fourches /136/ patibulaires que celui-ci avait fait élever près de l’eau (fluvium!) de la Dulyve, non loin de Dullict. La jurisdiction du Château de Brussins s’étend jusque-là, disait le Châtelain Hugonin de Gland; de plus la Dulyve a changé de cours et c’est justement en son ancien lit que les fourches ont été placées, en sorte que si le cours de l’onde changeait de nouveau, les fourches se trouveraient sur la seigneurie de Brussins; en tout cas leur position est mauvaise, car leur ombre atteint la rive opposée. Le Prieur demandait donc qu’elles fussent arrachées et plantées ailleurs.

Comme on voulait, des deux parts, demeurer en bonne harmonie, on convient enfin: que puisque le corps d’un malfaiteur est déjà suspendu à ces fourches, on les laissera subsister, mais que lorsqu’elles se dégraderont, on les reculera.

Cependant à Dullict même, le Prieur n’était pas seul à réclamer des droits de jurisdiction, car en 1505, noble Hugonin de Gland, Châtelain de Brussins, détenait un homme de Cluse, pris à Dullict, et noble Amey Martinaz, Châtelain de Mont-le-vieux, pour noble et puissant Amyed, Baron de Viry, réclamait en son nom le prisonnier, comme ayant la haute jurisdiction sur les étrangers. — Le Châtelain de Brussins répondait: que le Seigneur de Romainmotier a totale seigneurie et justice mère mixte impére, sur tous ses hommes de Dullict et sur ses fiefs; et est en possession, de temps immémorial, de l’exercer sur les chemins, même sur les étrangers; et que le prisonnier ne serait remis qu’en payant un ban de 60 sols. — Or, pour que les deux Seigneurs demeurassent amis « et pour éviter iniquités qui pourraient insurgir », les Châtelains appointèrent ainsi que suit. Celui de Brussins remit en liberté le prisonnier, moyennant 60 sols, et incontinent le Châtelain de Mont-le-vieux le saisit sur la voie publique, pour faire son procès et le punir de ses méfaits. Le tout, dirent-ils, en laissant intacts les droits de l’un et de l’autre Seigneur « et tant seulement pour éviter noises et pour ce que le dict prisonnier ne doibve plus attendre d’être puni ». /137/

Le Prieur était, de fait, possesseur à Dullict de la haute juridiction, que, en droit, le sire de Mont réclamait. La position parait avoir été la même qu’à Brussins et Verney, avant l’accord de 1374 (v. s.) 384 , qui donna décidément au Prieur le mère et mixte impére sur ces deux villages.

Romainmotier avait à Dullict des hommes liges et censitaires. En 1490, noble Pierre de Senarclens y avait aussi des hommes liges et justiciables; et tenait plusieurs possessions en fief de Romainmotier, dans ce village 385 ; dont quelques-unes avaient été naguères confisquées, à cause du crime d’hérésie de leur possesseur ou usufruitier 386 .

Jean de Dullict, donzel, reconnut aussi tenir (1490) plusieurs possessions à Dullict; soit par héritage, soit par abandon, à lui fait, par son neveu, vénérable Pierre de Dullict, Prieur de Cossonay, lorsqu’il se fit moine (cum intravit religionem).


GILLIE.

 

Romainmotier y possédait censes, directe seigneurie et omnimode jurisdiction mère mixte impére, sur environ trente-cinq poses de terrain. /138/


VINZEL.

 

Le Prieuré y avait fief, directe seigneurie et censes, sur une douzaine de poses de vignes, que tenaient noble Jean Champion, Seigneur de Romanem, noble Jean de Pietignie, Jean de Dullict, donzel; nobles Glaude Gavit et Benoît Jenodi, citoyens de Genève; spectable maître Jean Wichit, dit l’allemand, médecin ducal, résidant à Genève, etc. Quelques-unes de ces vignes étaient de l’omnimode jurisdiction du Prieuré.


SARRAU ESPINOUX.

(AU DESSUS DE BRUSSINS.)

 

(1489). Guillerme de Claren, donzel, tenait à cense une vingtaine de poses à Sarrau, du fief, de la directe seigneurie et de l’omnimode jurisdiction du Prieuré.


BRUCTIGNYE (BURTIGNY).

 

Soixante et dix poses environ, à Bructignye, étaient du fief et de la directe seigneurie de Romainmotier 387 . /139/


GEMELS (GIMEL).

 

En 1285, Jaques, Curé de Gimel, fit don à Romainmotier de tous ses biens situés dans la paroisse de Gimel et Saint Oyens; et, en outre, de dix livres pour qu’on célébrât toujours son anniversaire 388 .

Les possessions du Prieuré à Gimel étaient considérables. — Outre les droits de four et de moulin; sept maisons, deux cheseaux de maison et une grange, deux hommages liges, diverses pensions et au moins deux cents poses de terrain, tenues à cense par plus de vingt personnes, étaient du fief et de la directe seigneurie de Romainmotier 389 .


SAINT-OYENS, SAINT-GEORGE, SAUBRAZ.

 

Quelque peu de terrain, tenu à cense, était du fief et de la directe seigneurie de Romainmotier 390 , dans ces villages. /140/


MONTERO.

 

Au moins cinquante cinq poses, prés, champs et bois, tenus à cense de Romainmotier, et de son fief et directe seigneurie.


LONGIRO.

 

Environ quatorze poses étaient du fief et de la directe seigneurie de Romainmotier et tenues à cense. De plus (1490), Aymon de Divone, Prothonotaire du Saint Siège et Abbé commendataire de Bonmont, ainsi que son Couvent, reconnaissent tenir à cense de Romainmotier, de son fief et de sa directe seigneurie, à cause du Château de Bursins, une part de dixme à Longiro.


BOUGIE-MILLON ET CHANOZ.

 

Fief et directe seigneurie sur quelques vignes, tenues à cense d’argent et à tiers vendange 391 .


ALLAMAND.

 

Environ huit poses champs et bois, du fief et de la directe seigneurie de Romainmotier, tenues à cense. /141/


PERRUEYS (PERROY).

 

Un hommage lige, dû en commun par deux personnes 392 ; pour un assez grand nombre de possessions, maisons, prés, oches, pensions, vignes et aussi pour le terrage 393 de 14 à 15 poses de vigne. — Le tout du fief et de la directe seigneurie de Romainmotier.


GERMAGNYE.

(PRÈS ROLLE.)

 

En 1278, Jaques de Chabye, outre diverses possessions à Vufflens-la-ville (v. s.), avait reconnu tenir des religieux 12 poses à Chabye, promettant que s’ils étaient inquiétés au sujet de ce fief, il donnerait ailleurs des possessions équivalentes. Bientôt après, en effet, il leur céda tous ses droits à /142/ Germagny 394 . Or, en 1498, Romainmotier avait encore le fief, la directe seigneurie, voire l’omnimode jurisdiction, sur quelque terrain de ce hameau 395 .


A BRUSSINEL.

 

Quelques terres étaient du fief, de la directe seigneurie et de l’omnimode jurisdiction du prieuré, outre la dixme et l’Eglise.


CHENGIN (CHANGINS).

 

Enfin Romainmotier avait même à Chengin (près Nyon), censes, fief et directe seigneurie sur quelque terrain, à cause du Château de Brussins, dont le patronage s’étendait au loin 396 comme on le voit.

Sur toutes ces possessions éparses, énumérées, le Prieuré, /143/ outre des censes, devait avoir les lods en cas de vente, à cause de la directe seigneurie.

Et il est bien entendu que toutes ces possessions sont entièrement distinctes de celles pour lesquelles les sires de Mont étaient vassaux et qui étaient non du fief, mais de l’arrière fief de Romainmotier.

Par fois le Prieuré sentait le besoin d’une protection efficace pour ses possessions de la Côte; aussi trouvons-nous en 1284, une charte d’Aymon, sire de Prangins, qui reçoit dans sa garde 397 les religieux de Romainmotier et tous leurs biens où qu’ils soient; et promet de les défendre avec bonne foi, envers et contre tous, pendant quatre années consécutives. Et, en échange, les religieux s’engagent de lui donner chaque année un char (carratam) de vin aux vendanges 398 .

Il est remarquable que cette protection fut demandée aux Prangins plutôt qu’aux sires de Mont. Les Prangins qui appartenaient à la famille des Barons de Cossonay étaient, du reste, de hauts et puissants Seigneurs. Nous ignorons si l’accord fut renouvellé.

Disons encore que le Prieuré de Romainmotier possédait un vignoble à la Côte de près de 70 poses 399 , qu’il tenait en domaine, /144/ soit à ses mains; et de plus la dixme du vin en divers lieux, qui rapportait environ quarante setiers par an.

« Notez ces deux points-cy » 400 .

Nous ne quitterons pas la Côte, sans rechercher quelle était la culture de la vigne, au moyen âge.

En 1413, l’Abbé de Filly 401 et son Couvent, donnent en fief et emphitéose perpétuelle une pose de vigne à Brussinel. L’Abbergataire devait la cultiver convenablement, c’est-à-dire la tailler (putare) chaque année; faire suffisamment de provignures (propaganos facere condecenter); de deux ans l’un, la fossoyer (fodere) trois fois et l’année suivante deux fois seulement; l’effeuiller (effoliare) chaque année selon l’usage du pays. — Il devait aussi vendanger fidèlement dans la saison et placer la vendange dans une cuve (in una tina), dans la vigne. Enfin il devait avertir les religieux de Filly quatre jours avant la vendange, afin qu’ils pussent y envoyer quelqu’un. Or l’Abbergataire avait pour sa peine les deux tiers du vin, et les religieux l’autre tiers à cause de leur droit de propriété. L’Abbergataire devait livrer un setier de vin d’entrage. Puis l’Abbé lui donna l’investiture corporelle de cette vigne, par la tradition d’un roseau manuel, selon la coutume 402 .

C’était un abbergement emphithéotique heréditaire, une demi possession, ce n’était pas, à proprement parler, une ferme, comme de nos jours.

En 1492, une vigne existait au clos de Brussins du nom /145/ expressif de Vide grenier, qui, dès longtemps délaissée, tant à cause de la froideur du terrain (propter frigiditatem fondi), que de sa stérilité, ne permettait que difficilement de rentrer dans les avances de sa culture. - Or ces trois poses ne pouvant être remises en bon état sans grand labeur et dépenses, Michel de Savoie et le Couvent les abbergent, ou plutôt les donnent en emphitéose et en culture perpétuelle, au tiers vin, au Curé; sous condition d’y faire des provignures, de les peupler de chappons, ou autrement, le mieux et le plus promptement que faire se pourra (advineare eandem de capponibus seu alias, etc.), de les cultiver de la main et de la bêche (ligone et manu). Or le cultivateur (colonus) aura, pour sa peine, les deux tiers de la vendange, et devra faire transporter la part du Seigneur à son pressoir.

Comme dès longtemps, est-il dit encore en 1496, le haut du clos de Brussins est inculte, en sorte que buissons et arbres y ont crû déjà, qui gagnant toujours du terrain, augmentent le sol improductif; comme aussi les eaux descendant des bois et de la Côte (costa) lui causent de grands dommages: on proclame, à diverses reprises, dans le Temple de Brussins ce terrain couvert de broussailles, où l’on n’a rien récolté depuis 30 ans; et on l’abberge au plus offrant à tiers fruit, mais, des deux tiers, à lui restant, il payera la dixme comme de coutume. — La cense sera de 12 deniers annuels. — Et si ce terrain se vendait, le Prieur en aurait les lods (laudes). Enfin on réserve le passage et la faculté de conduire l’engrais (fimum) dans le reste du clos.

Il n’y a guères qu’un mot technique qui ne se rencontre pas dans les actes cités, c’est celui d’échallats; et la culture de la vigne au 15e siècle se rapprochait assez, on le voit, de la culture actuelle. Mais le vin était jadis plus cher qu’aujourd’hui parce qu’il était moins abondant; c’était un frein salutaire. Au reste, il ne paraît pas que l’on doive prendre en pitié le vin du moyen /146/ âge 403 ; et nous nous tromperions beaucoup en pensant qu’on ne tenait pas alors à sa qualité. 404 /147/


III.

POSSESSIONS DU MONASTÈRE ROMAIN DANS LA HAUTE BOURGOGNE.

 

La vie de notre Prieuré fut, pendant un temps, plus Franc-Comtoise encore que Vaudoise 405 .

Dès le 11e siècle il avait de riches possessions à Bannens, Sainte-Colombe, Chaffois, Bulle, la Rivière, Dampierre, etc., villages renfermés pour la plupart dans la Chau d’arlie, plaine étendue, à l’extrémité de la quelle s’élève Pontarlier, l’ancienne Ariarica. Ces divers villages unis par une domination commune, l’étaient encore par l’anxiété qui leur faisait rechercher à l’horizon les signes précurseurs de l’orage. Souvent en effet deux puissantes familles féodales, les sires de Salins et ceux du Château de Joux, sous ombre de quelques réclamations de /148/ droits, venaient fondre sur eux à main armée, et se faisaient cruellement justice à eux mêmes, par des dévastations.


BANNENS ET SAINTE-COLOMBE.

 

Bannens est au nombre des plus anciennes possessions de notre monastère. — Vers 1001, un chevalier Fredoïnus, se présentant à Orbe devant le Marquis (Marchio) Adalbert, dans les plaids royaux 406 , rend à Romainmotier et à Saint Marcel, martyr de Châlons, des possessions 407 à Banninges (Bannens), où il ne peut faire sa demeure, poursuivi qu’il est de la haine des fils du Comte Waucher. Il reçoit en échange quatre livres des moines, et, si les circonstances changent, il pourra reprendre, à vie, ces possessions 408 .

En 1008, sur la demande d’Odilon, Abbé de Cluny, le Roi Rodolphe III et l’Archevêque (de Lyon) Borchard, concédent au monastère romain le service (servicium) de quelques personnes dans son (au monastère) village de Bannens, avec pouvoir d’en disposer en toute propriété et sans contradiction 409 . /149/

Ici commencent les tribulations du fait de ses terribles voisins * .

Vers 1040, Gaucher (I), chevalier (miles) 410 de Salins, usurpe l’avouerie de Romainmotier à Bannens, Bretsendens (Sainte Colombe), etc., prétendant y avoir droit par don des Abbés de Cluny Saint Mayeul et Saint Odilon. Il envahit encore diverses prestations dues à Romainmotier, à Dampierre et dans toute la Chau d’arlie, et se permet plusieurs autres concussions. — Mais les torts de Gaucher étant devenus trop nombreux et insupportables 411 , Odilon fulmina une excommunication redoutable contre lui. — Or le Comte Renaud I avait coutume de rendre justice à tout venant, à Besançon, à la fête de Saint-Etienne, premier martyr. Odilon, étant arrivé au pays, voulait s’y rendre lui-même, mais il tomba malade et envoya deux délégués qui attestèrent par des serments redoutables (cum sacramento), que ces prétentions étaient injustes. Lors Gaucher fléchit et fit même des dons au Couvent 412 .

Or durable fut l’impression de l’excommunication du saint Abbé. Elle demeura comme une menace mystérieuse émanée d’en-haut, et, en quelque sorte, comme un sombre nuage précurseur de la foudre divine.

Aussi une charte, de 1085 environ, apprend à tous les fidèles présens et à venir, que le Comte Raymond engagea, comme cela était juste, le sire Gaucher (II) chevalier de Salins, fils de l’autre Gaucher, à abandonner entièrement ses prétentions sur toutes les terres de St. Pierre et sur les serfs de la Chau d’arlie; et cela, soit par respect pour la cour de justice /150/ du comte, soit à cause de la renonciation faite du temps de Saint-Odilon, en présence du Comte Renaud, et dont une vieille charte témoigne; soit enfin à cause de l’excommunication prononcée par le saint homme sur lui et ses ancêtres 413 .

A peu près à cette époque (1084), le même Gaucher, fils de Gaucher, fils de Humbert, par la grâce de Dieu avoué du bourg de Salins, considérant la grandeur de ses méfaits, et surtout la fréquence des spoliations faites par ses serfs et en son absence et en sa présence, dans les possessions de St. Pierre à Bannens, abandonne à Romainmotier une chaudière de sel à Salins.

Ses descendants même semblèrent poursuivis encore du sentiment de leurs torts envers le Prieuré 414 .

Mais tandis que cet ouragan dévastateur semblait se calmer, il se releva plus terrible du côté de la forteresse des redoutables sires de Joux.

Dans un exposé de ses déprédations 415 , le Couvent accuse Amaury (de Joux) d’avoir enlevé: à Bannens, 31 pièces de gros bétail, 4 chevaux et 7 porcs; à Sainte-Colombe, 7 livr. 8 sols en argent, 16 pièces de gros bétail, 2 muids d’orge, etc. Une pauvre femme ainsi dépouillée tomba à ses pieds implorant sa pitié, mais il la repoussa brutalement du poing. Saisi cependant d’une sorte de remords (in se tamen reversus), il dit à cette misérable veuve (mulierculæ viduæ) de lui donner 3 sols, et qu’il lui rendrait son butin. Elle les chercha, les donna; mais déjà la compassion avait disparu; elle perdit et son argent et ses dépouilles.

A Chaffois, Amaury avait donné plusieurs hommes de /151/ St. Pierre en fief à ses guerriers (militibus), en sorte que l’autorité du Prieur sur eux était annulée 416 .

Et par ces maux et autres semblables, on ne peut exprimer, disent les moines, combien d’hommes nous avons perdus, qui préférant l’exil à ces violences, ont fui pour ne plus revenir.

Enfin, ajoutent-ils, Amaury a fait placer 20 chiens dans notre village de Chaffois, et ravir de la nourriture pour eux et pour ses gens.

Cet échantillon de la vie du 11e siècle n’est, en vérité, pas séduisant! Mais quelle que fût la brutalité des mœurs, ces dévastations devaient avoir quelque raison plausible. Et en effet une charte du Cartulaire (de 1057 à 1060) nous révèle, qu’Amaury (I) de Joux prétendait astreindre les hommes de Romainmotier, de Bannens et Bertsendens (Sainte-Colombe) à contribuer aux réparations de sa forteresse de la Cluse; à le suivre à la guerre; aux coupes de bois nécessaires aux chemins publics (sylvæ evertendæ ad vias); ou à payer une taille en échange de ces travaux; le tout à l’instar de ce qui se pratiquait sous ses prédécesseurs Narduin, Warin et Aldric 417 .

Enfin, comprenant qu’il avait agi peu sagement (inconsulte) à l’égard des terres de l’Eglise, et sur les exhortations de Hugues, l’Archevêque de Besançon, et du Comte Guillaume, appuyés du Prevôt de Payerne Gaufrid; il renonça à toutes ses prétentions et promit qu’il ne causerait plus ni tourment ni dégat 418 . Et afin que ce désistement (abrenunciatio) ou déguerpissement (werpitio) subsistât, Amaury reçut 5 livres /152/ du Comte Guillaume et 5 de Gaufrid (au nom de Romainmotier) 419 .

Cependant après bien des années (vers 1070 à 1075), la querelle se ranima au sujet de la reconstruction de la Cluse, et Amaury jura qu’un combat judiciaire le forcerait seul au silence (nisi probaretur campo). Ayant donc attendu l’arrivée du Prince, les témoins du monastère se disposèrent au combat en champ clôs (campus firmatus a testibus nostris). Enfin, après divers débats, le Prieur Etienne, persuadé par ses amis, arrêta cette querelle en donnant encore 11 sols à Amaury.

Autre témoignage de mœurs.

Amaury 420 (III) fils de Landric (II) ayant souvent causé des maux graves dans les possessions de Romainmotier, sa suite fit un jour une irruption violente à Bannens, blessa plusieurs hommes et tua le Prévôt de l’endroit.

Lors, sur l’interpellation des moines, le comte Rainauld (III) tint un plaid à Jougne, et força Amaury à réparation (emendare). Il donna pour l’homme tué une terre aux confins de Bannens 421 , et quatre arpents (jugeres) aux confins de Chaffois 422 .

Quant aux autres différends, si nombreux et de telle nature qu’ils ne pouvaient être réparés entièrement 423 , on décida: /153/ qu’Amaury donnerait huit ôtages (obsides), qui s’engageraient par serment, à maintenir la paix vis-à-vis de tous les biens de St. Pierre. Et s’il faisait tort pour plus de 20 sols à Romainmotier, ces ôtages, à la première requisition du Couvent, viendraient demeurer à Pont (arlier) sans en sortir, sauf permission du Prieur, jusqu’à ce que tout le mal fut entièrement réparé, ou puni (propitiata) au gré du Prieur ou du patient 424 . Amaury donna encore sept cautions, chargées de surveiller le tout 425 . — Remarquons dans cet acte l’esprit du gouvernement purement féodal. A défaut de force publique, le comte recourait à la puissance de seigneurs particuliers pour ramener quelque ordre. Tous les débats ne pouvaient être applanis, mais Amaury devait à l’avenir rester en paix; sinon ses huit ôtages, dépendant de lui en tout ou en partie, ne bougeraient de Pont, jusqu’à réparation entière. Et si les ôtages ou Amaury faussaient leur foi, les fidéjusseurs pris parmi les seigneurs influents et les parents d’Amaury, seraient chargés de les ramener au devoir.

La cause de ces déprédations était toujours la même. Aussi fut-il arrêté (definitum), quant aux choses qu’Amaury paraissait réclamer d’après une ancienne coutume: qu’il ne troublerait point la paix au sujet de celles dont les hommes de St. Pierre, pourraient, par le témoignage de leurs coparoissiens (convicanos), prouver qu’à tort cette paix serait rompue. /154/

Rien de plus usité que les dons à l’occasion de l’entrée au Couvent.

Le Seigneur (dominus) Mainard de Bannens, par exemple, quand il offrit son fils Ponce à Saint Pierre pour être moine (ad ordinem monachatus), donna, pour le bien de son âme et de ses antécesseurs, ses possessions à Ste.-Colombe et dans le voisinage, et de plus un serf nommé Pierre et une serve (ancillam).

De même, en 1084, sous le Prieur Etienne et le doyen Salierius, Emmo de Chaffois voulant à cause de grands torts se faire moine, donne à Romainmotier la terre de Saint Marcel près Bannens, et le champ qui est à côté de l’Eglise, abandonnant tout différend juste ou injuste au sujet de serfs; il fait don encore d’un nommé Morell.

Une multitude de dons ou de déguerpissemens vinrent encore confirmer ou accroître les possessions du Couvent à Bannens et Sainte-Colombe, plusieurs même du fait des sires de Joux 426 . Ainsi sous le Prieur Etienne (vers 1100 environ), Landric du Château de Joux, donne à Romainmotier une terre auprès de Ste.-Colombe, dont Bérenger, fils de Rotbert de Bovonens 427 , réclamait une part; mais enfin, sur l’avertissement du Prieur, il y abandonna toute prétention, pour le bien de son âme 428 . /155/

Aux yeux des moines, des donations à leur monastère étaient les œuvres les plus méritoires.

Une 429 coutume très-sainte, dit le Cartulaire, à prévalu dès les anciens fondateurs (institutoribus) de monastères, c’est que chaque noble sans postérité 430 transmit son héritage à l’Eglise 431 . Or Pierre, très-noble primat 432 du Château de Ceys, mourant jeune encore et sans enfants, remit, pour le salut de son âme, à Romainmotier, une meix (mansus) à Bannens, dite la meix Thierry; à savoir le père qui y faisait demeure avec ses fils et ses filles, puis des moulins, un pré, etc. Pierre avait fait ce don librement (ex omni voluntate), à son lit de mort, en présence de parents 433 et de beaucoup d’autres illustres personnages. Mais un chevalier nommé Narduin, surnommé le brun 434 , qui prétendait la tenir de lui en fief (jure fevi), méprisant cette donation, affligeait les hommes du village (villa) à l’accoutumée « quasi invasores sui honoris. » Et après des plaintes des frères de Romainmotier, répétées plusieurs années, il déclara enfin qu’à moins d’un dédommagement convenable (congruo precio) il ne cesserait point. Thietbert, beau-frère du noble Pierre, tenait le même langage. Enfin on composa. Le Prieur Etienne donna à Narduin six livres d’argent, et trois à Thietbert, pour confirmer la donation 435 . Alors Narduin se présentant, /156/ posa le don sur l’autel de St.-Pierre à Romainmotier, à la vue des frères 436 .

Cette très-sainte coutume, était fort peu sainte assurément; l’expression même dénote un culte des moines à leur couvent, qui n’était pas de l’esprit de Christ.

La donation de Pierre de Ceys fut encore (vers 1130) l’objet de différends avec Lambert de Châtillon (de Castellione) 437 . Lors, le Prieur Lambert et les moines se réunirent à Besançon, et là, par le conseil d’hommes de bien, Châtillon se désistant de sa réclamation injuste 438 , finit pour l’amour de Dieu la querelle. Il demanda même à Humbert de Salins d’être, à cet égard, le protecteur des moines, soit contre lui Lambert, soit contre d’autres. — Ainsi ces fiers Seigneurs se défiaient quelquefois d’eux-mêmes, et cherchaient des garants de la durée de leurs impressions religieuses et équitables 439 .

En 1276, se présente une transaction importante entre le Monastère et le Comte de Bourgogne. Alix de Savoie et de Bourgoigne, Comtesse Palatine, prétendait avoir à Bannens et Sainte-Colombe « toutes manières de seignorie et de justice, et les gistes (impositions) à sa volunté. Contanz (différend) fut donc avec Romainmoûstier. A la fin pour loyauté conserver et l’Eglise tenir en paix, on accorde ainsi: Bannens payera chaque année à la comtesse Alix 25 livres, et Sainte-Colombe six quartiers d’avoine sans plus; saulve qu’à la Comtesse appartiendront entièrement la seignorie et la justice dans les trois cas de meurtre, vol et combat en champ clos (la bataille dou champ fermé) dans les deux villages, mais Romainmoûstier aura la /157/ moitié de toutes les issues (profits) de cette justice, et des héritages qui pourront échoir 440 . Et ces deux villages remanent (restent) de la garde de la Comtesse, qui doit les défendre comme ses autres biens. Saulve à l’Eglise de Romainmotier ses raisons en toutes choses, « à qui nous entendons que ces deux villes soient (dit Alix) saulve ce que nous y retenons» 441 .

En 1466, autre acte plus explicite. Messire Jean Loys de Savoie, commendataire perpétuel du Prieuré de Romainmotier, réclame sur les habitans de Bannens et Sainte-Colombe haute, moyenne et basse justice 442 ; ses prédécesseurs ayant, de temps immémorial, eu dans ces villages Chastellain, Maire, Sergent, Recepveur, Messiers et autres officiers. Le Châtelain, à son dire, a connaissance de toutes causes, sauf les trois cas 443 réservés à Monseigneur de Bourgonigne, à cause de son chastel de Pontallié. Le Prieur ajoutait que ceux de Bannens étaient ses hommes liges; et ceux de Sainte-Colombe ses hommes taillables, qui donnaient sur leurs meix, terres et héritages taillables 13 livres (stephanenses) par an, etc.

Les habitants de Bannens et Sainte-Colombe se prétendaient en revanche « hommes liges, subjects et justizables, en toute /158/ jurisdiction, haute, moyenne et basse, mère mixte et impère, sans moyen (sans intermédiaire), de Monseigneur de Bourgonigne seul, à cause de sa seignorie de Pontaillié. — Etant contribuables aux impôts et gectz (contributions) levés par le Comte sur ses hommes subjects sans moyen. » — Ils ne voulaient reconnaître au Prieur qu’un Maire avec basse jurisdiction 444 . Et ceux de Sainte Colombe n’étaient à leur dire point taillables, encore qu’ils payassent 13 livres par an « qu’ils ne croissaient ne décroissaient » .

On recourut à un arbitrage du pays, devant le quel comparut honorable homme et saige Messire, Jean Chappuis, docteur en loi et en décret, pour Messire Jehan Loys de Savoie 445 ; puis des preud’hommes de Bannens et Sainte-Colombe. On donna raison au Prieur, avec réserve des droictures du Prince, et on régularisa toutes les redevances.

Soit à Bannens — 1o Chaque maison séparée où il y a un ménage, quatre émines d’avéne. — 2o La rente appelée sovigne, soit un quart de trois émines d’avéne. — 3o Chaque feu, trois sols pour la rente appelée plait général, et se aulcun habitant tient plusieurs feuz en communion, non séparés, il ne doit que les dits trois sols. — 4o Sept florins à Pâques. — 5o Item les corvées de charrue, et sera le Prieur tenu de les soigner raisonnablement (de leur fournir une nourriture convenable). — 6o Le four et le moulin seront bannaux, mais s’ils n’étaient maintenus en bon état, on pourrait en rechercher d’autres, etc.

A Sainte-Colombe — 1o 15 livres de taille chaque année. — 2o Puis les corvées de charrue, de faux, de ratel, mais le Seigneur les soignera. — 3o Les moulin et four seront bannaux comme à Bannens, etc. 446 /159/

Le Comte de Bourgogne semble évidemment avoir été suzerain de Bannens et Sainte-Colombe 447 . Or la vassalité de Romainmotier n’était pas du goût de ces preud’hommes, qui avaient fait des sacrifices d’argent inutiles pour être immédiatement soumis à la Bourgogne 448 .

Un mot sur ce moulin de Bannens.— En 1096, Richard fils de Lambert de Pont (arlier), pour son salut et celui de ses antécesseurs, abandonne toutes les réclamations qu’il faisait aux moines, et leur donne un moulin, à Bannens, qu’il tenait en gâge, et ce, contre une redevance à vie.— Le tout fait en présence du sire Burcard de Goumoëns (le vidame), et des témoins Otton de Chavornay, Teymerus d’Orbe, Beroard de Agyz, etc.

Or, en 1416, Jean de Seyssel, Prieur, et ses religieux associent, pour une moitié indivise, Jean Duc de Bourgogne et ses successeurs à la propriété d’un moulin qu’ils projettent de reconstruire à Bannens sur la rivière du Drugeon, sur l’em placement d’une précédente usine actuellement détruite, ou ailleurs; à l’effet de percevoir en commun et de partager les profits de ce moulin; à condition que le Prince obligera ses hommes de Bouloz, Chaffois * et de Granges, à y moudre, ce qu’ils feront eux mêmes pour leurs sujets de Bannens et Sainte Colombe. La jurisdiction et les amendes dans ce moulin sont /160/ réservées au monastère, qui sera maintenu dans la jouissance de tous ses droits antiques en ces deux villages.

Romainmotier avait un Maire à Bannens 449 . En 1405 450 , dans la cour (in aula) de l’habitation du Prieur Jean de Seyssel, Guillerme dit Meyrez 451 de Bannens, lui fait hommage lige à genoux, tenant ses mains entre celles du Prieur, avec intervention du baiser de paix, et cela pour la Mayorie (villicatura), et des biens à Bannens 452 . — Il s’acquittera fidèlement et à ses dépends de son office 453 . — De plus, le premier-né de Guillerme, et de ses héritiers, possédera toujours la Mayorie de Bannens et l’exercera à ses frais. — Enfin il ne peut faire bourgeoisie, ni rechercher la garde de quelque Seigneur, château, cité ou bonne ville que ce soit sans le consentement du Prieur, sauf l’antique garde de Pontarlier (Pontis alie). — Puis le Prieur donne à Guillerme l’investiture du tout 454 , par la transmission d’un roseau selon l’usage 455 . Et Guillerme promet par serment d’être obéissant et fidèle, comme le doit un homme lige et un bon vassal à son Seigneur, etc. /161/


BULLE (BULLO, MONSTORE, THUREY).

 

Vers 1075, Fréderic, par la grâce de Dieu, évêque de Genève, réfléchissant à la fragilité de l’homme et recherchant le bien de son âme et de ses antécesseurs, donne, par la main de son avoué Algod, son alleu à Monstoris (Bulle), soit habitations (casis) et cheseaux (casalibus), prés, champs, forêts, arbres fruitiers et autres, cours d’eaux et aussi serfs et serves; il le donne à l’autel de St.-Pierre de Romainmotier, et aux moines qui y servent assidûment Dieu et St.-Pierre. De telle façon que tous conservent son souvenir durant sa vie, et après sa mort célébrent son anniversaire comme celui d’un de leurs frères 456 .

Puis Fréderic prie et invite de la part du Roi le Comte Guillaume, de garder et conserver à Romainmotier cette donation faite de son alleu (alaudi), et qui sans doute était considérable.

L’Evêque Fréderic avait accompagné, en 1049, le Pape Léon IX, dans sa visite à Romainmotier 457 .

Autre donation. /162/

Richard, du Château de Naisey (de Nasiaco castro), avec ses frères et sœurs, et de concert avec leur oncle Manno, donnent à Romainmotier tout ce qu’ils possédent dans la Chau d’arlie (in pago qui dicitur arlie), soit dans le village de Monstore (Bulle), et ce, pour le bien de l’âme de leur père Rodbert qui s’est fait moine à Romainmotier et y a été enseveli, et pour leur mère Arenburge et afin que Dieu pardonne aux donateurs tous leurs péchés 458 .

La donation était probablement considérable.

On trouve encore une donation du prêtre Fuldrade, de ses possessions à Bullo, à savoir un cheseau et 12 journaux de terre 459 .

Enfin, en 1211, après un différend, Etienne, Prieur de Romainmotier, abandonne à Odon, Doyen du Chapître de Sainte Marie (Madelaine) de Besançon, tous les droits de son couvent sur trois hommes et toute leur famille, la meix qu’ils habitent et leurs ténemens, situés dans la Chau d’arlie près Monstoris 460 . Avec clause que si quelque femme de cette meix, s’unit par mariage à un homme du Monastère romain, Sainte-Marie les possédera et leurs héritiers sans opposition, et vice versâ, Romainmotier aura droit aux héritiers de toute femme, sa sujette, qui épousera un sujet du chapître. — Celui-ci donnera de plus à notre couvent cinq sols de cense dans le synode d’automne et reçoit les Prieurs dans une fraternité spirituelle (in spiritualem fraternitatem). /163/


CHAFFOIS (CAFFEIACUS).

 

Aimeric demande à Constantin et Walchis leur sœur en mariage (in uxorem). Ils refusent, alléguant le service qu’il doit à Narduin Carbonel, de Chaffois 461 . Ne voulant pas toutefois renoncer à son projet, Aimeric obtient de son Seigneur Narduin d’être donné à Saint-Pierre de Romainmotier en cense de cire de deux deniers 462 . Et Narduin, se présentant devant l’autel de Saint-Pierre, lui donne, en présence des moines, Aimeric avec toute sa postérité 463 . — Ainsi la passion d’Aimeric parvint à dénouer les liens de la féodalité, quelle que fût leur force.

En 1108, Landric (II) de Joux, sur la démarche du Prieur Etienne, donne à Saint-Pierre de Romainmotier la terre de Warin de Chaffois et de son frère, qu’il leur avait enlevée, la disant sienne. Et aussitôt le Prieur la restitue à Warin et à son /164/ frère contre trois sols annuels de cense 464 . — La quotité de la cense pouvait ne pas répondre à l’importance de la terre, car l’intention du Prieur était d’accomplir une mesure d’équité.

Les possessions de Romainmotier à Chaffois étaient assez étendues pour que les religieux pûssent appeler ce village notre 465 .


 

Bien d’autres dons au Monastère romain se rencontrent dans la Chau d’arlie.

Vers 1014. — L’Abbé Odilon et les frères donnèrent à vie à Arembert, à sa femme Facema et à leur fils Salierius, une meix (mansus) au confins de Pont (arlier) lieu dit Frorcens, sous cense de 10 sols durant 2 années, et de 5 durant les 2 suivantes, avec trois repas honorables (tres receptis honorabiles) aux frères 466 .

Il y avait probablement une idée de fraternité, de communion dans ces sortes de repas.

Vers 1024. Don à Romainmotier de huit journaux de terre arable, in comitatu Arlia 467 , pour le salut de plusieurs.

Vers 1065. Aldo donne à Romainmotier tout son alleu à Arlie, parce qu’ayant été longtemps malade à Romainmotier, il a été soigné par les frères 468 . /165/

En 1111, Amaury, fils de Landric de Joux, son frère Louis et sa mère donnent, pour l’âme de leur père, un pré à Arlie, au lieu nommé Belmont (Bellusmons), que les moines tenaient en gage, dès le temps de Landric, pour 55 sols prêtés par le moine Vivian. Ils cédent le surplus à Saint-Pierre en renonçant à d’autres querelles 469 .


WAUT, CHANTEGRUE, DAMPIERRE, ET LA RIVIÈRE.

 

En 1126, Humbert de Salins, pénétré d’horreur pour ses torts, abandonne au Monastère romain ce que celui-ci a occupé (investituras suas) dans le lieu nommé Wau (Waut), ou autrement la vallée Tlen (sive alio nomine valis Tlen); et dans le désert du mont des fours (in heremo in monte de furno) qu’il s’était approprié par droit de premier occupant, suivant la coutume du Jura 470 . Humbert fait cet abandon après avoir d’abord inquiété le Couvent à ce sujet.

Ce fut l’origine de possessions notables.

Wau et la vallée Tlen devinrent, au 13e siècle, l’Abbergement de Waut et Chantegrue, non loin du Lay Damp Waultier /166/ (aujourd’hui le lac Saint-Point). Et les « investiturae » du Monastère, allèrent croissant en nombre et en importance, comme le prouve la charte suivante.

« Nos, Jehan Cuens de Borgoigne, sire de Salins, feçons savoir à tous ces qui verront les présentes lettres, que nous aurions donné et oultrée en pure et perpétuelle aumône à Dieu et à Saint-Pierre et à Saint-Pol, et à Priour et à Couvent de Romainmotier, ce que en Waut prés dou Lay Dampvaultier … » (nous appartient) « et laisé (laissé) retenir à dit Priour et au Couvent tant d’aberiours (abbergataires) comme il lour wendra» (viendra); « les quels aberiours leur quittons de tot en tot, saulve notre garde et notre avoerie, et la justice corporal, sans l’avoir » (les biens des condamnés) « que doit demorer à dit Priour et à Couvent » 471 .

Deux ans plus tard, en 1557, le Couvent mit fin à des contestations au sujet de limites avec le Monastère du Mont Sainte Marie, autre voisin du Lay Damp Waultier.— Or ce Monastère peut être considéré comme un rejeton de notre Prieuré, car son origine remonte à cette prise de possession, par droit de premier occupant, du désert du Mont des fours, que nous avons vue. Cette solitude, où l’on construisit ce que plus tard on a appelé le village des fours, servit de retraite à une colonie de Romainmotier composée de frères convers voués à la vie ascétique, et qui avaient à leur tête un Chapelain ou Pasteur (capellanus, pastor animarum), choisi indistinctement parmi les religieux de Mont Benoît, du Lac de Joux et de Romainmotier. — Ils ne suivaient aucune régle monastique particulière, /167/ lorsqu’en 1199 Gaucher (IV), sire de Salins, répandant sur eux ses libéralités, convertit leur modeste habitation en une Abbaye soumise à l’ordre de Citeaux, qui prit le nom de Mont Sainte Marie. Dès cette date à l’an 1243, le Monastère, situé dans une horrible solitude (in loco valde horrido ac remoto a gentibus), fut transféré sur un emplacement moins austére. Cette translation était déjà effectuée en grande partie en l’an 1230, où l’Abbé du lac de Joux intenta une action à celui de Sainte-Marie, motivée sur ce que les bâtiments du nouveau Monastère étaient érigés sur terre de Joux. Ce dernier consentit à payer, à ce titre, une indemnité de 35 livres. — Puis vint, en 1257, l’accord avec Romainmotier mentionné plus haut, et dès lors ces trois congrégations vécurent dans la meilleure intelligence 472 .

Quant à l’Abbergement de Waut et Chantegrue: en 1289, Jean de Châlons, sire d’Arlay, et Hugues son frère, font un échange avec les religieux de Romainmotier. — Ceux-ci cédent tout ce qu’ils possédent à La Rivière et à Dampierre, en hommes, meix, censes, terres, etc.; et les Châlons donnent, en revanche, tout ce qu’ils possédent dans l’Abbergement de Chantegrue, et en Waut 473 ; plus 12 livres de rente assignées sur un puits de sel à Salins, avec acte de revers 474 . — Les Châlons donnent enfin aux habitans de Waut et Chantegrue un pâturage 475 et l’usage en des forêts, pour construction, charronnage, et pour « lour besognies », mais non pour en vendre ou donner.

A Waut et Chantegrue les religieux de Romainmotier ont, par le même accord, toute seigneurie et jurisdiction, sauf /168/ l’exécution des condamnés à mort, que les Châlons se réservent pour la garde; mais le jugement en appartient aux religieux; et, dans les trois jours après leur requête, le Chastellain de Noserey doit recevoir le délinquant tot nu, sans avoir rien à réclamer à ses biens meubles ou héritage. — Si après les trois jours le condamné s’échappe, on n’en peut faire un grief aux religieux ni à leur nonce. Et toutes les fois que le malfaiteur s’échappera, soit avant, soit après le jugement, si le maire des religieux veut, lui quatrième, jurer que c’est sans leur coulpe, on en croira le serment, et à plus ils ne pourront être menés 476 .

Cette transaction n’est que le développement explicite de la donation de 1255 (v. s.).

Cette seigneurie plus complète que celle de Bannens et Sainte-Colombe, rappelle l’accord de Romainmotier avec les Cossonay sur Wufflens la ville.

L’effet de cet accord fut durable 477 .

Nous ne connaissons pas les possessions de Romainmotier à Dampierre, mais celles de la Rivière étaient considérables, car, en 1280, le Couvent y avait un Mayor ou receveur, chargé d’y percevoir la taille, des revenus divers, des censes 478 . /169/


SALINS.

 

Déjà sous l’Abbé Odilon (mort en 1049), Raynauld (?) avait donné à Romainmotier deux vignes et un cheseau à Salins; posant sa donation sur l’autel à la vue des moines 479 .

On se rappelle les tribulations de notre Monastère avec les sires de Salins (v. s.). Or, en 1084, Gaucher (II), par la grâce de Dieu, avoué du bourg de Salins, marri de ses iniquités et surtout de toutes les spoliations faites par ses serfs à Bannens, soit en son absence, soit en sa présence: abandonne à Saint Pierre de Romainmotier une maison vacante (casam desertam), jadis destinée à une Chaudière de sel 480 et qu’Isingerius, son préposé, tenait en fief (in fevo tenebat). Gaucher donne encore à Romainmotier deux chars annuels de foin excellent 481 ; et en général tout ce qu’il tenait du Comte Guillaume dans les terres du Couvent.

Si les hommes du siècle, dit un autre acte du même temps, font des chartes pour leurs héritiers charnels, à combien plus /170/ forte raison les ecclésiastiques pour leurs successeurs spirituels 482 . — Or en présence de Willelm, troisième comte des Bourguignons 483 , se traita un différend sur une certaine chaudière de sel que les frères de Romainmotier avaient possédée, puis perdue. La mémoire de cette possession subsistait bien chez les serfs (servis) de Saint-Pierre et autres de Salins, quoique sans utilité, parce que le moment voulu de Dieu n’était pas arrivé encore. Mais au tems propice, le fidèle Prieur Etienne 484 se rendit à Salins, lorsque s’y trouvait le Prince 485 , pour lui exposer prudemment le tout, en présence du Vicomte (de Salins), Humbert de Monnet, qui revendiquait la possession de cette chaudière. Enfin, après beaucoup de paroles et une résistance de quelques jours, car un seul ne suffit point à terminer le débat, les Juges et témoins comprenant que le tort était de son côté, ordonnèrent la restitution. Le Vicomte y consentit 486 . Et le Prieur, pour détruire dans sa racine toute opposition future, fit à Humbert un présent de 50 sols.

Or Hugues, Abbé de Cluny 487 , établit que le revenu des deux chaudières (de sel) que le Prieur Etienne avait acquises au Monastère romain, devait être fidèlement employé à l’ornement de cet établissement religieux 488 . Sauf que lorsque ce très fidèle gouverneur (provisor) du Couvent aurait fermé les yeux /171/ (de hac luce migraverit), on célébrerait avec cette cense son anniversaire, avec un repas commun pour les frères (v. s.) 489 .

Une dernière charte sur cet objet est d’Humbert (III) fils de Gaucher (II) de Salins, le même qui avait voulu empêcher Romainmotier d’étendre ses possessions dans le Jura 490 . Frappé de Dieu, près de mourir (divino verbere attritus mortique jam proximus) et considérant tous les maux qu’il a fait à Romainmotier, il renonce entièrement à la chaudière de sel qu’on dit appartenir 491 à ce monastère, ainsi qu’à tous les droits qu’il s’était injustement arrogé sur les Terres du Couvent, et enjoint à son fils Gaucher d’en faire autant, suppliant même son Seigneur l’Archevêque de Besançon de maintenir cette aumône, et de ne pas mettre son fils en possession de son fief avant qu’il l’ait confirmée 492 .

Cet acte peut être fixé à 1135 environ, où Humbert, parti en 1132 pour Terre Sainte, revint mourir à Lausanne. — Son fils accomplit ses dernières volontés en présence de Pierre (le vénérable), Abbé de Cluny, et renouvela sa confirmation à Romainmotier où son père fut enseveli 493 .

Plusieurs chartes de la fin du 11e siècle doivent encore être mentionnées. /172/

Les Terres de Romainmotier à Salins avaient été usurpées par diverses personnes 494 ; le Prieur (rector) Etienne réclama justice auprès du Comte Renauld sur le mandat (ex jussu) de Guillaume son père; or il fut décidè que l’état de ce différend serait prouvé par le combat de deux hommes (ut duorum virorum certamine probaretur hujus causæ status). - Exemple positif, mais presque unique, d’un combat judiciaire soutenu pour le Couvent; en général on voyait avec répugnance l’Eglise recourir à ce moyen.

Aussi la même année un autre débat s’étant élevé sur des Terres à Salins, on n’avait pas de titre (paginam) à cause de la pauvreté de ce monastère en chartes, mais la mémoire de cette possession subsistait. On pensa d’abord au combat judiciaire, puis le Prieur mieux inspiré (altiori consilio), termina à l’amiable le différend. — Nous ne nous serions guères doutés aujourd’hui de cette disette de chartes (indigentiam scriptorum) 495 .

Gaucher (II) de Salins voulait réduire à l’état de servage une femme nommée Pontia; mais celle-ci ayant été, par le témoignage de ses parens, reconnue serve de Sainte Pierre, pour une cense de cire d’un denier, elle fut laissée à Romainmotier pacifiquement 496 . — Une conséquence importante ressort de chartes /173/ semblables: c’est que alors déjà le servage de la glébe n’était plus l’esclavage au sens propre. Le témoignage d’un esclave n’a, en effet, aucune valeur judiciaire: le planteur de la Louisiane ne voudrait pas, sans doute, soumettre le fait de la possession d’un esclave au témoignage des parens de celui-ci 497 .

Il paraît aussi évident par cette charte et par beaucoup d’autres analogues, que les charges des serfs n’étaient point variables suivant l’arbitraire de leurs Seigneurs, mais fixées par la coutume.

Enfin, en 1247, Jehanz, Cuens (Comte) de Borgogne et sire de Salins, pour le remède de l’arme (âme) de son père, et de la sienne et de la Comtesse, et de leurs antécessors, donne à Romainmotier dix charges de grand sal (sel), à prendre chaque année à Salins; et contre obligation 498 de faire leur anniversaire chaque année.


LONS LE SAULNIER.

 

En 1218, Guillaume, comte de Macon, donne aux religieux de Romainmotier une charge de cheval de sel à prendre annuellement à Lons (le Saulnier), pour le bien de son âme et de /174/ ses antécesseurs, et aussi pour l’âme de Gaucher, fils de Rodolphe de Monnet, qui étant mort à son service auprès d’Orbe, a été enseveli honorablement par les frères dans leur Eglise 499 .

En 1247, autre donation toute sembable d’Odon de Belregart 500 .


GIVRIACUS.

 

Hugues, chevalier ou guerrier (miles) du Château nommé Châtillon (Castellon), donne à Romainmotier, avec le consentement de sa mère Pontia et de ses frères Goderan, Wauchier et Guillaume: une meix (mansum), dite la meix Maynard, dans le village de Givriacus sous le Château (sus nommé), avec bâtiments (casis), cheseaux (casalibus), champs, prés, eaux courantes; et cela pour le bien de l’âme de son frère, qui s’est fait moine à Romainmotier 501 . Il fait ce don par la main de Rodolphe (de Monnet?).

Malheureusement on ne peut préciser la situation du Château de Châtillon (de Castellione), et Givriacus n’a pas laissé de traceS. /175/


MEGIS (MIEGES).

 

Mainerius, serf de Romainmotier prit pour femme dans le village de Megis une serve (ancillam) de Saint-Pierre « monte vivini » 502 . Or Etienne, le chevalier, qui tenait cette femme en fief (in beneficio) du Comte Rainauld 503 , engagea son mari Mainerius à donner 60 sols pour que la moitié de ses enfants demeurât à Saint-Pierre de Romainmotier. Et Etienne renonça à perpétuité à ses droits sur eux, et ordonna d’en écrire une petite charte (cartulam) qu’il confirma de sa propre main 504 .

On sait que les enfants suivaient souvent la condition de la mère (v. s.) 505 . /176/


IV.

RAPPORTS DU MONASTÈRE ROMAIN AVEC L’EMPIRE, LA BOURGOGNE ET LA SAVOIE

 

Grandes étaient les prétentions du Couvent de Romainmotier! Elles se trouvent résumées dans une phrase d’un acte du 15e siècle 506 . Il se disait soumis, sans intermédiaire, au Pape et à l’Empereur, tant à cause du privilège de Cluny, que par suite des concessions des souverains Pontifes et des Empereurs eux-mêmes. — Il déclinait ainsi nettement la suzeraineté de la maison de Savoie et l’autorité Episcopale, et prétendait former une souveraineté indépendante au temporel et au spirituel.

Ces prétentions élevées n’étaient pas sans titres probants 507 . /177/

Pour trouver la racine des droits du Prieuré à la mouvance immédiate de l’Empire, il faut creuser, peut-être, jusqu’à sa fondation par le roi des francs Flodovée 508 ; ou du moins jusqu’à sa consécration par Etienne, et sa restauration par Adélaïde de Bourgogne.

Le Pape voulait qu’il fût libre de tout pouvoir de Roi, Evêque, Comte ou autre (v. s.); et la Comtesse Adélaïde, qu’il ne fût soumis à aucun pouvoir temporel, pas même à la majesté royale (nec fastibus regiæ magnitudinis).

Citons encore une charte de 1178 509 . L’Empereur Fréderic (Barberousse) se trouvant à Pontarlier, Waucher, Prieur de Romainmotier, vint au devant de lui, lui montrant tous les actes qui attestaient la bonne volonté des Pontifes romains, et des Rois et Empereurs, et demanda de sa part une protection semblable. Or, acquiescant, pour le bien de son âme, aux requêtes du Prieur, il prit sous sa protection impériale ce Prieuré et toutes ses appartenances, comme choses de son fisc.

C’est une confirmation précise des droits de Romainmotier, mais ce n’est qu’une confirmation.

Enfin, dans une charte moins reculée, l’Empereur Albert, qui bientôt devait trouver la mort sous la lance parricide de son neveu, Jean de Souabe, dont il retenait l’héritage injustement, Albert 510 , disons-nous, rappelle qu’en s’occupant de la prospérité des lieux voués au culte divin, il croit travailler à son bonheur temporel et éternel; et qu’en conséquence poursuivant d’une faveur spéciale le Prieur et les frères de Romainmotier qui sont célèbres par leur profession religieuse 511 , ainsi que ce monastère fondé et magnifiquement doté par la munificence des Empereurs et des Rois ses prédécesseurs, il les prend sous sa /178/ protection et celle de l’Empire, avec toutes leurs possessions actuelles ou futures.

Toutes ces chartes plaçaient sans doute le Monastère romain dans une position élevée; et, de fait, il jouissait d’une grande indépendance 512 : mais comme nous avons pu le voir, rien ne contrebalançait suffisamment durant les troubles et violences du moyen âge à son origine, l’absence de force. Or quelque riche que fût notre Prieuré, son territoire était bien exigu pour un état indépendant; et forcé comme il l’était de recourir à une protection séculière efficace, l’ombre de l’arbre dont il demandait l’appui, devait lui nuire nécessairement quelque peu.

Le Monastère romain suivit d’abord la voie battue. Il eut un Avoué (advocatus, defensor), dans la personne du Franc Comte Guillaume le grand.

Trois chartes font mention distincte de cette avouerie.

a) La donation de Fréderic, Evêque de Genève, de son alleu à Monstoris, soit Bulle (vers 1073), où il prie et invite de la part du Roi 513 (rogo et ex parte regis invito), le Comte Guillaume, de garder cette donation faite à Romainmotier (ut eam custodiat et servet). — Ce qui indique une avouerie royale ou supérieure.

b) Une autre charte, sur l’envahissement d’une chaudière de sel, n’est pas moins explicite. Le Prieur Etienne alla à Salins, y est-il dit, lorsque s’y trouvait le Prince Guillaume, qui était alors par le vouloir de l’Abbé (Hugo de Cluny) avoué de Romainmotier (qui hujus loci tunc advocatus jussione domini Abbatis erat). C’était en 1083.

c) Enfin dans un diplôme de 1084 (anno secundo romanæ /179/ obsidionis), Gaucher de Salins donne à Romainmotier une maison vacante d’une chaudière de sel, et cette aumône est faite par la main du Comte Guillaume, qui doit être le défenseur de cette donation, comme il l’est de toute l’Eglise (de Romainmotier), et son fils après lui (ut ipse, sicut totius ecclesiæ ita et meæ donationis actor sit et defensor, filiusque ejus post eum) 514 .

Muller connaissait cette avouerie: « La libre Abbaye de Romainmotier, dit-il, autrefois heureuse de la protection bourguignonne, se crut en sureté sans elle tant que vécut le Duc de Zaeringen » 515 .

Or, s’il est patent que le Comte Guillaume a été l’avoué impérial de notre monastère, son fils lui a-t-il succédè dans cette charge? Il n’en existe pas de preuve claire quoique le fait soit probable. — Et ceci n’est point contredit par l’acte de déguerpissement (werpitionis) du bourg d’Orbe, fait par le Comte Renaud en faveur de Romainmotier, sur la demande et avec l’approbation de Borcard de Goumoëns, le vidame (vers 1098); car le siècle retentissait de plaintes des Seigneurs ecclésiastiques, qui auraient eu besoin, souvent, d’être protégés contre les envahissements de leurs protecteurs.

Borcard de Goumoëns, vidame (vicedominus) ou avoué (advocatus) du bourg d’Orbe, était, selon nous, avoué inférieur du Couvent 516 , et tenait en fief de lui cette Vidamie ou ce Vidomnat, exactement comme le Comte de Savoie tint plus tard en fief, de l’Evêque, ce Vidomnat de Genève, source de tant d’amertume pour les Genevois. /180/

Un siècle plus tard, se rencontre une curieuse alliance offensive et défensive, entre notre Couvent et les Comtes de Bourgogne 517 .

Béatrix, auguste Impératrice de Rome, pour éviter l’oubli de la postérité et son mauvais vouloir, confie aux lettres la forme de l’association avec le Monastère romain, à la quelle ses bien-aimés frères de Cluny l’ont admise à jamais, elle et les Comtes de Bourgogne, ses successeurs.

Elle aura la moitié de la cense des habitations dont elle a pourvu le mont de Romainmotier, et des amendes infligées aux habitants qu’elle y a placés. De plus une meix ou ferme (area) y est réservée pour son séjour; Romainmotier s’en réservant une pareille.

Dans toute la Terre ou prévôté (potestas), le seul bourg de Romainmotier excepté, Béatrix aura encore la moitié des droits de la justice, à cause de la garde des chemins; et percevra en conséquence, de chaque maison, une coupe annuelle de froment et deux d’avoine. — Le prévôt (præpositus) sera nommé par le Comte, mais par l’avis et avec l’approbation du Prieur, et à son entrée en office, il jurera fidélité à l’un et à l’autre 518 .

La Prévôté armée suivra le Comte, soit pour ses propres injures, soit pour celles de l’Eglise, jusqu’à Chillon, le pont de Genève 519 , Avenches, le pont d’Orbe et Jougne.

Appelé par l’Eglise, le Comte sera défrayé par elle le soir de son arrivée et le lendemain au matin, mais ensuite il vivra à ses frais (vivat de proprio).

Il ne pourra, enfin, ni transmettre en fief, ni alièner d’aucune autre manière la part qui lui est faite par cette association; et /181/ s’il voulait la donner en aumône, le seul Monastère romain, qui lui a fourni la matière de cette largesse, serait apte à la recevoir 520 .

On voit par la teneur de cette transaction remarquable 521 , qu’il n’y est nullement question d’une mouvance quelconque, ni d’aucune espèce de suzeraineté donnée au Comte de Bourgogne. C’est une association, et non une reconnaissance d’hommage féodal. Cet acte n’est donc point en contradiction avec celui antérieur de trois années (1178), dû à l’Empereur, époux de Béatrix, qui prit Romainmotier sous sa protection comme immédiat à son fisc 522 .

Cette association paraît s’être maintenue près d’un siècle sous cette première forme; puis elle passa en d’autres mains, avec quelques modifications, sous Philippe, Comte de Savoie et de Bourgogne, frère et successeur du petit Charlemagne et mari de la Comtesse Palatine Alix.

Il possédait, à la lisière de la Prévôté, un château important, les Clefs du pays, comme son nom l’indique, et qui, vu sa position, était chargé surtout d’exécuter le contrat. Ses ruines couronnent encore une éminence, qui se détache du fond d’une vallée sauvage et profonde, où la rivière de l’Orbe coule en se blanchissant d’écume dans son lit étroit de rochers.

A la vue de ces épaisses murailles, de ces débris de /182/ créneaux où se donnérent jadis maints grands coups d’épée, où plusieurs de nos pères scellérent de leur sang leur fidélité à leur pays et à leur prince, l’âme se prend à rêver du temps jadis, de son côté brillant, poétique, chevaleresque, comme aussi de son côté sombre. — En effet, plus d’une fois, sous un prince faible, les chevaliers placés dans ce château pour la protection du pays, trop voisins encore d’un temps de barbarie où la guerre et le pillage étaient seuls en honneur, furent réduits à fausser leur mandat 523 .

En 1272, se rencontre un compromis entre Philippe, Comte de Savoie et de Bourgogne, d’une part, le Prieur Aymon et les religieux de l’autre, non pas pour établir cette antique garde des Clées, dont lui et ses prédécesseurs ont joui, mais pour mettre fin à un différend 524 .

On convient donc: que le Prieur et les religieux ont mère mixte impère et omnimode jurisdiction, haute, moyenne et basse, spirituelle et temporelle 525 sur leurs hommes. Cependant ces droits ne pourront point être transférés, par le Prieur, en quelque main étrangère.

Le château des Clées exercera dans la Terre de Romainmotier jurisdiction sur les étrangers à icelle, et cela sur les voies publiques, sauf le cas où des hommes du Prieuré se prendraient là de querelle; et tout objet trouvé sur ces chemins devra appartenir au château des Clées.

Les hommes de la Terre seront chargés des réparations d’une nécessité évidente pour le dit château 526 . /183/

Mais, clause singulière, si le Châtelain des Clées requis une ou deux fois par les religieux, punissait négligemment un malfaiteur, homme de Romainmotier, sous prétexte du présent convenant, les religieux ne pourront faire de réclamations à ce sujet, ni crier à l’injustice 527 ; pourvu toutefois que le dit Châtelain ne retienne absolument rien des biens du malfaiteur puni, mais les mette à la disposition du Prieur.

Le Châtelain ne devra pas défendre les hommes de la Terre contre le Prieuré, aussi longtemps qu’ils voudront continuer à habiter dans ses possessions.

Enfin le Comte devra percevoir la cense accoutumée, et en conséquence défendre le Prieuré dans les choses justes, envers et contre touS.

Les moines prétèrent serment en posant leurs mains sur leurs poitrines à la manière des religieux, et les hommes de la Terre en touchant les Saints Evangiles 528 .

Cette cense était un chapon, une coupe de froment, et deux coupes d’avoine, de tout homme ayant maison à frêste, c’est-à-dire couverte d’un toit à deux pentes. Et de tout homme n’ayant qu’une Caborne, c’est-à-dire une petite maison avec toit à une seule pente, un chapon seulement 529 . /184/

Cet accord fut suivi d’un orage (1272). Les religieux demandaient une subvention de 200 livres pour les dépenses qu’ils avaient faites en maintenant les immunités de la Terre de Romainmotier contre Philippe, et les hommes de la Terre ne voulaient pas les payer. Alors le Châtelain des Clées, Jocerand de la Baume, chevalier, ayant appelé le Prieur de Vaulx (de vallibus), camérier d’Allemanie, envoyé ad hoc de Cluny à Romainmotier, et aussi les Prieurs de Payerne, de Valcluze (vallis cluse), de Haute-Pierre (Altæ petræ), de Bevez, de Corcelles, de Vallorbes, du Lay damp Waultier, etc., traita avec eux de cette difficulté, et il fut jugé que le Prieur et les religieux de Romainmotier étaient dans leur droit; et en effet un article du Plaid général, leur donnait évidemment gain de cause 530 .

Mais la ténacité du moyen âge ne permit pas aux condamnés la soumission, et 75 d’entr’eux, par une impulsion sinistre (sinistro motu ducti), firent serment de soumission au château des Clées, croyant follement (inconsulte) pouvoir ensuite invoquer son patronage contre les religieux. Ceux-ci, cependant, poursuivirent les droits de l’Eglise, d’autant que, d’après une convention récente, le Comte de Savoie ne pouvait soutenir leurs sujets contre eux, ni leur donner refuge quelque part; aussi longtemps, du moins, qu’ils voudraient continuer à habiter la Terre de Romainmotier. A la fin ces hommes, par un retour de conscience (ad conscientiam revertentes), se dédirent unanimément de leur serment en présence du Prieur et des religieux 531 .

Les droits du Prieur et du Châtelain des Clées, /185/ s’enchevêtraient d’une manière étrange, et le même principe reçut de nouveaux développements lorsque Louis de Savoie, Seigneur de Vaud, concéda, en 1323, l’établissement d’un marché à Romainmotier chaque samedi, et d’une foire par an, selon les us et coutumes de Moudon. — Il promit de conduire et protéger à ses propres frais les arrivans et les partans (étrangers à la Terre). Et si, dans ces jours de marché et de foire, il y avait un appel à un combat judiciaire (duellum); le jugement de cet appel et le combat lui-même devaient avoir lieu auprès de Romainmotier et par devant le nonce du Prieur, si les champions étaient ses sujets; ou aux Clées s’ils étaient étrangers: si l’un des champions était de la Terre et l’autre étranger, on mandait à Romainmotier le Châtelain des Clées pour garder avec le délégué du Prieur le champ du combat. Il va sans dire que les biens (bona) du vaincu étaient confisqués par le Châtelain ou le Prieur suivant leur jurisdiction.

Et, pour ces concessions, celui-ci devait payer chaque année soixante livres de cire 532 , outre soixante livres payées d’entrée 533 . /186/

Or, une fois (1399), Romainmotier dut être protégé contre son défenseur 534 .

Pierre de Murs, docteur ès-lois et chevalier, étant Bailli de Vaud, Jean de Seyssel, Prieur de Romainmotier, et Althaud, Champion, Vice-châtelain des Clées, comparaissent en la Cour de Moudon. Seyssel se plaint qu’Althaud a fait, de porte en porte, citer environ deux cents hommes de la Terre de Romainmotier à comparaître devant lui aux Clées; et cela, à l’instigation de l’Abbé et du Couvent de Joux, à qui il a donné ensuite un certain jugement contre ces hommes. Or le Prieur assure avoir sur ses sujets omnimode jurisdiction, et il demande pour chaque homme cité un ban de 60 sols, soit mille livres; alléguant en preuve de ses droits, les lettres du compromis des Clées, confirmées par plusieurs princes de Savoie 535 .— Althaud, Champion, ainsi incriminé, demande qu’on lui assigne un jour pour amener son patron, soit son conseil 536 . — Ainsi fait: les parties comparaissent derechef devant la cour de Moudon, et Althaud n’allégue rien pour sa défense. Le Prieur demande, donc que son arrêt soit déclaré nul: il pose cette question à la connaissance et au jugement de la cour, puis se retire ainsi que sa partie adverse: et il est jugé par les nobles Amédée de Viry, seigneur de Mont le vieux, Guy de Daillens, coseigneur de /187/ la Molière, Richard de Villiens, Nycod et Rodolphe Cerjat, Henri de Glane, Jaques de Glane, Aymonet de Byonens, Anthoine Lunynaulx, Jean Ranerat, Nycolas de Gimel, Thomas Lucens, Pierre d’Avenches, Girard Gimel, jurisconsulte (juris peritum), Edouard Punanaz, vidame de Moudon (vicedominum de M.), et par plusieurs autres dignes de foi, siégeant et jugeant ce jour-là avec nous (Bailli) en la Cour: que sur le silence d’Althaud, son arrêt devait être annullé; et que dès l’instant où le Prieur trouverait dans sa jurisdiction (dans la Terre de Romainmotier), le nonce du Vice-Châtelain des Clées, il pourrait lui-même le citer à Romainmotier, pour faire raison (ad faciendum rationem) sur les bans exigibles en vertu de la jurisdiction omnimode du Prieur et du Couvent sur leurs sujets. Et cet arrêt est prononcé par le Bailli 537 .

L’inimitié de l’Abbaye du lac, profitant de l’inexpérience du Vice-châtelain des Clées pour lui faire faire une fausse démarche, était peut-être une vieille rancune du fait suivant:

En 1364, plusieurs hommes de la Terre se rendirent armés à l’Abbaye du lac de Joux, forcèrent les portes de ce monastère, ainsi que celles de plusieurs maisons, frappèrent et blessèrent plusieurs personnes, et se retirèrent en emmenant beaucoup de bestiaux et un butin considérable. — Grande rumeur! L’abbé de Joux, Louis de Synarclens, demande d’abord une indemnité de mille florins; cependant la médiation des conseillers d’Amédée, Comte de Savoie, et celle du noble sire (nobilis homo) Guillaume de Grandson, appaisèrent le différend. Les coupables payèrent 80 florins à l’Abbaye, et 200 florins d’or à Amédée, /188/ qui déclara que, touché de leurs supplications, il voulait bien user de ménagement, et remettre aux délinquants, moyennant cette somme et par grâce spéciale, les peines et bans par eux encourus. Jean, coseigneur de Blonay, alors Bailli de Vaud, corrobora de son sceau l’acte.

Ces 200 florins payés à Amédée rappellent tout-à-fait le fredum des nations germaniques, payé pour éviter les représailles d’une offense 538 .

Depuis Philippe, successeur du petit Charlemagne, cette garde des Clées, que l’on ne trouve jamais nommée avouerie, appartint à la maison de Savoie jusqu’à la réforme. — Elle concernait particulièrement la Terre de Romainmotier proprement dite, quoique d’autres villages y fussent aussi compris.

Mais bientôt le Vicariat impérial accordé à la maison de Savoie « éleva sa puissance au-dessus des autres maisons princières » 539 . L’Empereur ordonna, le 12 mai 1365, aux prélats, /189/ aux gentils hommes et aux villes des 12 Archevêchés et Evêchés de ce pays et des pays voisins, de rendre au Comte de Savoie l’hommage dû à l’Empire, et de reconnaître dans sa personne l’autorité impériale; lui donnant les droits régaliens et la suprême jurisdiction. Et malgré des modifications nominales, le Comte de Savoie continua d’exercer ce Vicariat, comme irrévocable, partout où il était le plus fort.

Ce fut un nouveau et grand danger pour la mouvance immédiate de l’Empire, de notre Couvent. Trop puissants étaient ses adversaires, pour qu’il pût toujours lutter avec avantage. Son immunité ne fut pas brisée, mais plia quelque peu, pour se relever ensuite, douée qu’elle était d’une vitalité remarquable.

Voici les péripéties connues de cette guerre.

Dans une supplique de Romainmotier (en 1453), on expose au Prince de la part de son illustre fils, le Prieur Jean Louis de Savoie 540 : que par droit divin et humain et par accords faits avec lui et ses antécesseurs, et observés intacts jusqu’ici, les Prieurs et leurs sujets sont en possession et en droit 541 , de ne point contribuer dans les subsides, dons personnels, ou autres, sauf la garde (des Clées), qui n’est pas peu de chose, mais rapporte tous les ans plus de 200 florins 542 . Cependant les officiers de Morges, Moudon, etc., s’efforcent de leur faire payer certains subsides, en prenant des gages aux /190/ récalcitrants. Cela énerve la liberté de ce Prieuré et c’est une oppression pour ses hommes.

On promet donc au Prince de prier pour sa prospérité s’il met un terme à cet abus.

Dans sa réponse, Louis, Duc de Savoie, Prince du Saint Empire romain et son vicaire perpétuel 543 (ce qu’il n’avait garde de passer sous silence), rappelle que pour la dot de sa fille, la Dauphine de Vienne, et autres charges, un subside a été imposé ou accordé 544 , de trois florins par feu sur les hommes de sa jurisdiction immédiate et sur ceux des ecclésiastiques selon la coutume 545 , et de moitié sur ses hommes médiats. Et qu’on a convenu de payer pour Romainmotier, seulement 100 florins. Le Duc reconnaît que c’est un effet de la pure libéralité de son fils, qui ne doit point tirer à conséquence, ni porter préjudice aux franchises des hommes du Prieuré; encore que pour ce subside il y eût eu à payer une plus forte somme, mais qui avait été reduite à ces 100 florins 546 .

Jean Louis de Savoie se contenta d’un mezzo termine; il obtint une réduction notable 547 , et crut sauver les franchises du Prieuré par un acte de non-préjudice. Cette méthode ne réussit qu’à demi.

En effet: Michel de Savoie, commendataire de Romainmotier, expose 548 : que ce Prieuré a, déjà, en 1178, été affranchi par l’Empereur Fréderic de la suprématie de quelque personne que ce soit, comme on le voit par le double du privilège /191/ impérial 549 . Et que dès lors, soit par ce privilège, soit par la convention avec Philippe de Savoie et de Bourgogne qui ne permet de lever en la dite Terre que la cense des Clées, elle a été franche des contributions de la Patrie de Vaud, où elle se trouve en un lieu stérile 550 , et exempte de subsides, tailles et impositions: cette cense n’étant point due pour quelques fonds, mais remplaçant les tailles et subsides ducaux.

Néanmoins, les officiers du Prince chargés de percevoir le subside de trois florins par feu, dernièrement concédé par la Patrie de Vaud, s’efforcent d’en faire payer sa part au Seigneur commendataire, par des levées de gages. Et il supplie de laisser le Prieuré dans son immunité, vu surtout, que ses hommes sont astreints à de très-grandes charges annuelles, outre la pesante cense des Clées.

Une seconde pièce, de la chambre des comptes de Chambéry, est annexée: « Illustrissime Prince, ayant reçu avec le respect convenable les lettres accompagnant les présentes, nous avons fait perquisition sur quelques comptes des trésoriers et receveurs des subsides, où nous avons découvert qu’on a compté autrefois pour les subsides des hommes du Prieuré, comme cela est contenu dans le papier 551 que nous transmettons à votre altesse. Et nous n’avons pas pour le moment poursuivi cet examen 552 . » /192/

Le Prieur parlait du droit, le Prince faisait rechercher le fait. Mais encore: les régales devaient être payées au Vicaire Impérial (v. s.), et les autres subsides avaient, sans doute, été concédés comme dons gratuits et sans conséquence, mais ne laissèrent pas de porter préjudice: au moins nulle charte ne fait foi que le Prince ait cédé.

Quelquefois aussi ces immunités rencontraient meilleur accueil:

François de Savoie, commendataire perpétuel du Prieuré de Romainmotier, expose 553 au Duc de Savoie: que les nobles et syndics des villes de la Patrie de Vaud, ont imposé le Prieuré de 116 florins et 8 sols; mais que celui-ci est, d’ancienneté, distinct et en dehors du ressort et de la coutume de la Patrie de Vaud 554 , et franc de tout gîte. Il supplie donc le Duc de mander à Jean de Dullit, et autres exacteurs, de cesser leurs poursuites.

Le Prince fit droit, d’abord, à cette requète, mais bientôt, sur de nouvelles plaintes, il demanda un rapport exact sur le tout 555 .

Une enquête se fit donc aux Clées et à Cossonay par spectable, noble et puissant Claude de Menthon, sire de Rochefort, coseigneur d’Aubonne et Bailli de Vaud. /193/

Un homme des Clées, assermenté, dit avoir été plusieurs fois à Moudon, et n’avoir jamais vu ceux de Romainmotier assister ni contribuer avec ceux de Moudon. — De plus, le Seigneur de Romainmotier a dans sa Terre toute jurisdiction, et ses hommes n’ont point à contribuer ailleurs, ni ne ressortent d’ailleurs.

Une autre, ayant été à Moudon dans les Trois Etats, n’y vit cependant pas ceux de Romainmotier.

Un autre dépose: qu’il n’a jamais vu contribuer ceux de Romainmotier avec quelques étrangers (straneis), ni avec ceux de Moudon, parce qu’ils ne sont sujets d’aucun autre que du Seigneur de Romainmotier 556 .

A Cossonay, le résultat de l’enquête fut moins explicite 557 .

De son côté François de Savoie, en protestant de l’immunité de son Prieuré pour les impositions et tailles futures, expose au Duc qu’il n’a pas dû être compris dans la susdite contribution, par les nobles et syndics de la Patrie de Vaud: a) attendu qu’on ne trouve pas dans l’enquête du Bailli que l’exposant, ou ses antécesseurs et sujets, aient jamais fait une contribution avec la Patrie de Vaud, et aussi ne sont ils du tout point compris dans le ressort du Ballivat de Vaud: b) si même les nobles et syndics de la Patrie, ont fait un don au Duc, ce n’est pas un pur don gratuit, mais il est fait en vue de la reconfirmation de leurs coutumes et libertés, dont il ne revient à l’exposant ni à ses hommes aucun avantage. Tout ceci étant notoire, il ne doit pas être préjudiciable à l’exposant, ni aux siens, que ses prédécesseurs soient dits avoir quelquefois accordé un subside, /194/ ou avec plus de vérité 558 un don gracieux, selon cette régle, que ce que l’un concéde gratuitement, ne doit pas, par d’autres, être pris en exemple indu 559 . Il recourt donc avec raison à la source de la justice suppliant, etc.

En effet, le Duc Charles mande au Bailli, etc., qu’ensuite des suppliques et informations ci dessus, et autres droits mentionnés, et mu par de louables motifs, il défend sous peine de 100 livres de molester, au sujet de ce subside,les hommes du Prieuré, à moins d’un commandement exprès de sa part 560 .

Ce fut une grande victoire de l’indépendance du Prieuré, que cette exemption entière du subside.

Toute cette affaire jette du jour sur la position de la Terre, et sur les dons gracieux. On comprend qu’il était délicat au Prieuré, placé sous la sauvegarde Ducale, de mettre trop d’apreté à défendre ses privilèges vis-à-vis du Vicaire perpétuel de l’Empereur. Le moyen d’espérer une protection efficace du Château des Clées, si l’on s’était montré intraitable au sujet des subsides? Aussi louvoyait-on quelquefois.

Un facheux résultat de cette prétention de relever nuement de l’Empire, était de tenir le Prieuré à l’écart de la Patrie de Vaud, et de rendre sa participation aux Etats, indécise 561 . Le Prieuré voulait échapper aux subsides votés par eux; il craignait que sa participation ne lui imposât de nouvelles charges; et il se disait étranger au Ballivat de Vaud!

Qu’il soit cependant permis de faire un rapprochement, qui /195/ ne saurait être futile vu l’importance de son objet dans l’histoire de la Patrie. M. de Grenus 562 résumant son vaste et précieux travail, indique l’année 1489, comme celle où commença la dénomination d’Etats pour les assemblées représentatives de Vaud, mais déjà en 1485 (v.s.), les Trois Etats étaient organisés. - Reculons donc de quelques années cette dénomination patriotique, en attendant de nouvelles découvertes, qui se feront sans nul doute 563 .

Une autre confirmation de la sujettion immédiate à l’Empire se présente. — Il n’y avait pas d’appel, dans les causes, au delà du Prieuré. De la cour des Mayors, en effet, il y avait appel à l’audience du Châtelain de Romainmotier et à Romainmotier; du Châtelain au Juge des appels, et du Juge des appels au Seigneur dans sa chambre; et les causes ne devaient point sortir de la cour du Seigneur, mais les plus grandes causes des sujets devaient y prendre fin 564 . Dans ces paroles, un peu obscures il est vrai, nulle mention n’est faite de Moudon ou de Chambery.

Nous avons vu sans doute un procés à Moudon, à l’instance du Prieur, mais c’était pour porter plainte du Châtelain des Clées, qui ne respectait pas les franchises du Prieuré. C’était une plainte adressée au représentant du Prince, contre un officier de ce dernier qui n’observait pas les contrats 565 . /196/

Un dernier symptôme de cette dépendance immédiate de l’Empire, se trouve dans l’existence du corps des Francs de la Terre, dont nous avons parlé. Il parait qu’il n’en existait de tels, que dans les Couvens soumis immédiatement à l’Empereur 566 .

A quoi l’on pourrait ajouter encore, les actes où le Prieur tranche du souverain: par exemple, dans les anoblissemens de fonds 567 . Mais jusqu’ici aucun vestige du droit de battre monnaie, ne s’est rencontré à Romainmotier 568 .

En résumé: cette prétention à la dépendance immédiate de l’Empire, fondée en droit, mais quelque peu froissée par la puissante main du Vicaire Impérial, ne cessa jamais de donner quelques signes de vie. Et, chose remarquable, ce furent des Prieurs de la maison de Savoie, qui la soutinrent avec le plus de vigueur contre les Ducs leurs parents.

Remarquons, enfin, qu’au moyen âge les immunités ecclésiastiques étaient mieux garanties que les immunités séculières, au moins dans la Patrie de Vaud. Tous les dynastes séculiers, en effet, y fléchirent sous l’ascendant de la Savoie, même les Grandson et les Comtes de Gruyère, qui durent se reconnaître vassaux; tandis que l’Evêché de Lausanne conserva son indépendance jusqu’à la conquête Bernoise, et que le Prieuré de Romainmotier ne perdit point entièrement ses franchises.


 

NOTES:

 

1 Cartulaire de Romainmotier. C’est le Pape Grégoire qui rappelle cette origine à Odilon abbé de Cluny en 1002. Il dit simplement le roi Flodoveus, ou Clodoveus. — Or Clovis Ier ne régna jamais sur la Bourgogne; il ne peut donc être ici question que de Clovis II, fils de Dagobert, roi de Neustrie et de Bourgogne de 630 à 635. Cette origine est de beaucoup préférable à la tradition rapportée par Ruchat, de la fondation de Romainmotier par Saint Romain. — Il n’existe en effet aucune raison de repousser l’autorité du Cartulaire.
1o Apparemment qu’au dixième siècle on connaissait mieux l’origine du Couvent qu’au dix-huitième et si cette tradition était reçue dans le couvent à cette époque, pourquoi ne pas la préférer à une tradition plus récente?
2o On ne peut d’autre part raisonnablement supposer que si le couvent avait été fondé par Saint Romain, aucune mention n’eût été faite de lui, dans le nombre énorme de chartes sur ce Monastère qui nous sont parvenues et il n’y est seulement pas nommé.
3o Bien plus, comment au milieu de la multitude de chapelles fondées dans L’Eglise du monastère, sous le vocable de Saint-Antoine, St.-Eloi, St.-Sébastien, St.-Sigismund, St.-Quintin, St.-Fabien, etc. etc. etc., n’y en aurait-il pas eu une à l’honneur du Saint Fondateur du couvent, ni une messe dite en sa mémoire?
4o On ne peut non plus soupçonner ici de l’amour propre monastique, car un couvent aimait bien autant rattacher son origine à un Saint, qu’à un Prince.
5o Enfin cette tradition est étroitement liée à l’étymologie de Romainmotier donnée par Ruchat (Romani monasterium), et celle-ci est décidément fausse, nous le verrons; on peut dire hardiment que Ruchat eut abandonné cette tradition que rien n’appuie s’il eût eu entre les mains le Cartulaire.
Une autre tradition, veut que Romainmotier ait été fondé par Ramnelene Duc de la Haute Bourgogne au commencement du septième siècle et placé sous la règle de St. Colomban — Voyez Dunod, d’après Jonas, Vie de St. Colomban — Mais nous donnons la préférence à l’autorité du Cartulaire. [retour]

2 On voit que l’étymologie de Ruchat « Romani monasterium, » le monastère de Saint Romain, est dénuée de fondement. L’étymologie que nous adoptons n’étant pas fondée seulement sur ce mot du Cartulaire, mais sur de nombreuses chartes, est la véritable sans nul doute. [retour]

3 Voyez Cuizot, cours d’hist. moderne. [retour]

4 Voici la caractéristique de l’architecture Lombarde d’après le Conversations-Lexicon. « Aux Eglises des Lombards on voyait à l’extérieur un demi-cercle de petites colonnes et des piliers montans qui venaient se ranger sous la corniche ; dans l’intérieur, des piliers massifs qui s’unissaient par des cintres en demi-cercle; habituellement les colonnes, les chapiteaux et les voûtes étoient couverts de figures en pierre insignifiantes; le plus souvent elles avaient pour toit un planchéiage fait avec des poutrelles et des madriers qui plus tard fut transformé en voûte, ce qui nécessita l’emploi d’arcs boutans. Leurs monuments les plus marquans sont du VIIe siècle.» Tous ces caractères conviennent à Romainmotier. Il faut y remarquer aussi des ogives extérieures surmontées d’animaux bizarres.
Faut-il le dire, naguères une rumeur vague annonçait que le terme de l’existence de ce monument vraiment national était arrivé! Mais une telle perte serait irréparable. Assez d’actes de vandalisme sont à notre charge. Porter atteinte à ce qui rappelle quelque souvenir est plus grave qu’il ne semble, car c’est porter atteinte à la vie d’un peuple. Il doit y avoir un respect des ancêtres, chez les nations, comme chez les individus. [retour]

5 « qui locus a malis hominibus et ab importunis vicinis destitutus extitit donec Adeleydis Comitissa … in priorem statum restituendum Sto Oddoni, sub … privilegio romanæ sedis in perpetuum contradidit » Cartul. [retour]

* Charte datée 4 Ides de Juin, Indit. 6, an 888. Dunod, comté de B. II. 96. Voy. aussi Muller, t. 1. p. 231, n. 33. — Et Conservateur suisse. Orbe au moyen âge. [retour]

6 Odilon était le 5e abbé de Cluny. Le premier fut St. Berno, de 910 à 927. St. Oddon lui succéda jusqu’en 942, puis Aymar, puis St. Maïolus, qui mourut en 994, enfin Odilon qui gouverna l’ordre jusqu’en 1049. Sur tout ceci voyez les notes accompagnant l’extrait du Cartulaire de Romainmotier qui se trouve dans le Schweizerische Geschichtforscher, dritter Band. [retour]

7 Guizot, Tableau des principaux événemens religieux de la Gaule du 5e au 10e siècle dans son Cours d’hist. [retour]

8 Voy. le Cartul. — Quelles profondes ténèbres obscurcissaient alors la lumière de l’Evangile! — Quelle ignorance du texte sacré! et qui reconnaîtrait dans ces paroles la promesse divine du salut par Christ!! [retour]

9 Guillaume le pieux, Duc d’Aquitaine, Comte d’Auvergne, fondateur du Monastère de Cluny en 910, lui avait donné tous ses biens. [retour]

10 Monachi vero in ibi consistentes modum conversationis istius quæ nunc ad informandum illos, qui futuri sunt, de Cluniaco transfertur ita conservent ut etc. [retour]

11 Voyez des formules toutes pareilles d’excommunication et de malédiction; — Muller, Nouv. trad. v. I. p. 251; et dans le Conservateur suisse, la Charte de fondation du prieuré de Payerne. [retour]

* On se représente quelque Seigneur dégoûté du monde quittant la cour de Bourgogne, pour chercher dans le Monastère romain un abri contre la tourmente de ses passions. On se le représente après avoir gravi le flanc de la vallée solitaire, laissant de quelque rocher, couronné de la verdure des chênes, errer ses regards sur la ville et les tours du Château royal d’Orbe, doré par le soleil à son déclin. Le bruit des fêtes, la pompe de la cour, arrivent presque jusqu’à lui; trop et de trop douloureux souvenirs se réveillent! Mais cette nature si belle qui l’entoure, cette riche verdure, ces lacs majestueux, cette ceinture d’Alpes lointaines richement colorées par le soleil, ramènent le calme dans son cœur par leur charme indéfinissable. Bientôt la cloche du monastère se fait entendre, et l’appelle à célèbrer l’office du soir. [retour]

12 Neuf entre Chanvent et Mornens, un à Munnens (Monnaz?), deux « ad fontanes lunaticos » (Fontanezier?) etc. — On pourrait aussi traduire Mansus, par domaine.
L’acte est daté 15 Kalendas aprilis, de l’an 1011, la 19e année du roi Rodolphe. [retour]

13 Quasdam res ad Romanum monasterium pertinentes … reddimus. [retour]

14 Lully près Estavayer. [retour]

15 In villa Tavellis quam alio nomine Urbam vocant 5 mansos, 3 de Alboldo, et 2 de Bérigero? La Charte est datée d’Orbe en 1011. — Toutes deux sont dans le Cartulaire. La première existe en original aux archives cantonales. Et il existe de la seconde qui n’a point échappé à Muller (tom. I. p. 290. Nouv. trad.) une copie à Bursins avec quelques variantes: nous y reviendrons.
Essayons de préciser le sens du mot mansus. Lors de l’établissement des Burgunden un partage de terres et d’esclaves eut lieu entre ces nouveaux venus et les anciens habitans, qui dut nécessiter une division du pays entier en domaines, ou parts, de grandeur égale. Chacun d’eux renfermait une certaine étendue de terre, annexée aux bâtimens d’exploitation rurale, et probablement (au moins dans l’origine) ceux-ci étaient habités par les serfs qui fertilisaient la glèbe de leurs sueurs. Ajoutons l’idée de jurisdiction, qu’attachait le moyen âge à toute possession territoriale un peu étendue. On pourrait définir le mansus, un domaine féodal pur sang.
Charlemagne avait donné une signification précise au Mansus qui impliquait le service militaire; il était de soixante Journaux de terres labourées, avec des prés, bois et pâturages à proportion. (Voir les Capitul. et DuCange gloss. (Note de M. de Gingins.)
Quant au mot Villa, il se trouve appliqué également à Orbe, ville importante du Royaume de la petite Bourgogne, à Cossonay jadis plus considérable que de nos jours, et à de très-petits villages. Son sens originel serait-il voisin de celui de l’Italien, Villa, et désignerait-il une habitation ou une métairie du Seigneur, autour de laquelle venaient se ranger les cabanes des serfs, ou des hommes liges? Si celles-ci étaient en petit nombre, villa restait village, dans l’inverse, ville, et bientôt celle-ci se ceignait de murs et devenait burgum. [retour]

16 Voyez Mémoires de la soc. Ie livraison p. 155. — Ferreyres, Moërier, Ornyer, Eclepens, Chamvent etc. [retour]

17 Antique déjà en 1049! [retour]

18 Mémoires de la soc. Ie livraison p. 153. Ratio exterminii quam intulit Adalbertus et sui monasterio romanensi. [retour]

19 Videlicet 5 mansi pleni et condamina centum jugerorum. [retour]

20 Et super omnia mala predam istam appellat rectitudinem suam. [retour]

21 Cartul. de Romainmotier, préface. [retour]

22 Subgerente Abbate qui presenserat terminos undique per circuitum quos unquam predatores transgredi non auderent. — Ib. [retour]

23 Fait l’année où le Pape dédia l’Eglise de Saint-Etienne « in vertice » de Besançon, le 5 des Kalendes d’Octobre 1049. [retour]

24 Voyez mémoires de la soc. livr. I., p. 161 et 162. [retour]

* M. Duvernois croit qu’il s’agit de Waucher de Salins. [retour]

25 Mémoires de la soc. livr. I. p. 164. « Occasione calumpniarum quas faciebant de quibusdam hominibus in potestate licet injuste « Calumpnia ne peut dans beaucoup de chartes être traduit par calomnie. C’est plutôt uue prétention de droit. On trouve Calumpniabat quasi juste. [retour]

26 Voy. Mémoires de la S. livr. I. p. 169 et 170. [retour]

27 Le V des Calendes de Janvier 1125. C’est-a-dire le 28. Décembre 1124. [retour]

28 Mémoires de la soc. liv. I. p. 171. [retour]

* Il était trop difficile de conserver quelque unité de récit, au milieu de faits si divergens par leur nature. On ne pourrait présenter une vue commune de tous les faits contemporains, sans faire perdre à ceux-ci toute vie, et toute importance par leur isolement. Ils ne pourraient pas plus alors nous donner une idée de la vie et du développement du Monastère Romain que quelques brins de verdure ne nous donneraient l’idée d’un riche paysage. Pour ne pas s’égarer dans ce labyrinthe, nous aurons donc besoin d’un fil conducteur et en considérant à part chaque pièce de cette grande mosaïque, chaque ordre de faits, nous le trouverons peut-être.
Nous examinerons donc d’abord l’existence civile, politique et féodale de Romainmotier; ses jurisdictions seigneuriales, sa richesse, la condition de ses sujets, ses rapports avec la Savoie et avec l’Empire; puis ensuite nous parlerons de son existence ecclésiastique, nous passerons en revue les bulles des Papes, l’intérieur du Couvent, les fondations pieuses etc. Ainsi du moins aurons-nous une idée générale assez exacte de cet antique monument de la Patrie de Vaud, lorsqu’il sera abattu par l’orage du 16e siècle qui couvrira le sol de ses débris. [retour]

29 Un manoir et demi à Agyz, six manoirs à Bofflens. [retour]

30 Le rocher à la descente d’Orbe, Pompaples, la fontaine de Moërier et le pont des Clées sur l’Orbe. — La Terre de Romainmotier conserva ces mêmes limites tout le tems de son existence, c. a. d. jusqu’au seizième siècle et plus tard encore. [retour]

31 In viis; situé au carrefour de deux chemins. [retour]

32 Villagium de Cruce; plusieurs chemins s’y croisent. [retour]

33 Land frey, village voisin de Romainmotier, aujourd’hui détruit. [retour]

34 Juriensis, village situé sur la pente du Jura. [retour]

35 Autrefois Prumier, nom patois d’un arbre à fruit. [retour]

36 Prata, les prés. [retour]

37 Vaul, val, lyon, nom de plusieurs ruisseaux et torrents, par imitation de leurs ravages, à peu près comme Drance de Draco. [retour]

38 Vallis urbæ, val de l’Orbe. [retour]

39 Y aurait-il quelque rapport à la race celte ou Bretonne? Ce village est très ancien d’après la tradition. [retour]

40 Bofflens, se trouve écrit quelquefois Volflens et aurait alors la même étymologie que Wufflens, Wolflingen pays de loup. Souvent en effet le V et le B s’échangeaient au moyen âge, Muller en fait la remarque (t. I. p. 259 Note 164) d’après Ducange — Chavannes-sur-le-Veyron se trouve écrit par ex: Cabanis supra loz Veyron. — Toutefois dans la Charte de Rodolphe, Wufflens et Bofflens sont bien distingués. [retour]

41 Ce mot désignait jadis des armes, et on en exhume beaucoup dans son voisinage où une bataille paraît s’être donnée. [retour]

42 Agyacum, Azyacum, — On trouve « unam Agiam nemoris»: mais quel sens? [NB: ce passage a fait l'objet d'une rectification dans les Rectifications et Additions, p. 893] [retour]

43 Et aliorum vicinorum militum ejusdem regionis — Temoins Pierre et Cono du Château de Goumöens en 1097. [retour]

44 Les Grandson exceptent le fief d’Etienne de Ferreyre (de ferreria) (v. s. la plainte contre Adalbert)— Mais « pacem fecerunt de luco de Cassanea » (Chassagne près Orbe) « et omnibus aliis querimoniis ». Parmi les témoins Louis de Gomoëns, qui pouvait appartenir à la famille existante. [retour]

45 Donationem suam per lapidem unum super altare miserunt. Parmi les témoins Cono puer monacus, Pierre et Helias de Aziaco. Cono de Grandson, et aussi Jean le tailleur (sartor) de la maison du Prieur (famulus Prioris). Cono fils d’Eubalus vivoit à Lasarraz , Falco fils de Philippe vivoit à Grandson, Eubalus et Philippe étoient frères. [retour]

46 Sur Breton de Bretoneris par ex: sur Aymon le velu (Aymonem pilosum) etc. etc. [retour]

47 Il donne Marie femme de Cumisius de Bofflens, son fils et sa fille par ex: la femme (uxorem) de Berard de Bonel, nommée Russa, ainsi que ses fils et ses filles, le frère de Russa, nommé Martin de Viis (de Envy?) et ses fils et ses filles. - « feminas dominatus sui que conjunctæ erant hominibus Sti. Petri. » [retour]

* D’après le principe de droit romain: partus ventrem sequitur. [retour]

48 On trouve un différend entre Witfred prieur et Cono de Grandson au sujet de droits sur quelques personnes habitant les terres de Romainmotier (au douzième siècle prob.) Le prieur « accepto consilio » se rendit avec Cono et autres en grand nombre dans la maison d’Albert de Vilar et là ayant ouï « querimoniam » il donna 4 livres à Cono, qui pour le bien de son âme et de ses antécesseurs, renonça particulièrement (vuerpivit) à six familles y compris sœurs, neveux, et nièces (nepotes et neptas) et à leur postérité, et à tous les autres habitant dans la jurisdiction de Saint Pierre, sauf trois exceptions. [retour]

49 In recompensationem, malorum que eidem ecclesiæ pluries intuli, racione calumniæ quam habebam contra etc. Il s’agissait d’une terre qui fut jadis du sire Elye et du sire W. frères défunts, chevaliers de Agyz - Avril 1256. — Cart. [retour]

50 Il avait donné un mansus et demi à Agyz. — (1098) Le Comte Renaud reçut du Prieur une mule de grand prix pour une meix à Agyz. [retour]

51 Il fait cet hommage « salva fidelitate duorum dominorum », dont sans doute il tenait des fiefs ailleurs.
Il fait hommage à Romainmotier pr. « omnia que habeo jure hereditario seu racione excasuræ matris meæ, in tota villa etc. » Il excepte sa part dou boschet, de son franc alleu (de libero alodio meo). [retour]

52 Une belle ruine de cette indépendance primitive des d’Arnay était l’affranchissement de leurs possessions de la condition mainmortable et presque de toutes dixmes et redevances. Exception unique dans toute la terre de Romainmotier. Cette très-ancienne famille doit exister encore. [retour]

53 Ce Plaid général de 1266 se trouve rapporté plusieurs fois textuellement dans divers actes des Archives de Romainmotier; il se trouve aussi dans le Cartulaire de Romainmotier. [retour]

54 Un acte du Cartulaire de 1263 parle d’un différend existant entre les religieux et la Terre « super quibusdam devestituris », dont les religieux se disaient dépouillés. Il s’agissait de « capones, gerbariam et quartariam et subsidium denariorum. » — Plusieurs témoins avaient ouï appeller ces réclamations injustes. Le Plaid général de 1266 finit sans doute ce long différend. [retour]

55 Villicis suis, nous verrons l’office des mayors. [retour]

56 Dominus hospicii. — D’après l’extension de ce mot, on se demande si les femmes assistaient au Plaid? Voyez ci-après. [retour]

57 Et celui qui serait absent, sauf pour la garde commune, ou qui n’aurait pour excuse la nécessité de la terre, ou qui appelé trois fois ne répondrait pas, payera 3 Sols d’amende. [retour]

58 Nous reviendrons sur ce fait important. [retour]

59 Excepté les terres de l’Allod de la noble famille d’Arnay, qui furent toujours franches de cette servitude. Excepté encore Lapraz dont en échange le territoire était laodé au 6e denier (payait 1/6 de droit de mutation). [retour]

60 Lorsque dans le 16e siècle, le dernier mayor de Romainmotier mourut, il avait des parens collatéraux divis et cependant Berne en vertu de la mainmorte hérita de ses biens, encore qu’il fût de haute noblesse. [retour]

61 Si aliquis vel aliqua ex hominibus dictæ terræ et potestatis Romani monasterii contraxerit matrimonium cum aliquo vel aliqua qui vel quæ non sit liber vel libera … a dominio Romani monasterii debet recedere, et hereditas ejusdem excheta debet reportari per juratos ut supra. [retour]

62 Voyez un traité sur la ghilde (ou banquet à frais communs) et son influence, dans le discours préliminaire des Récits Mérovingiens de M. Thierry. - Voici l’article du Pl. gén.: nemo potest facere quamcunque burgensiam, vel juramentum, aut confederationem alicujus villæ, castri, civitatis, vel oppidi, nec se ponere in salva gardia alicujus principis, vel domini, aut patrocinium invocare, sine licentia domini, saltem in prejudicium ecclesiæ et contra dominos ejusdem, etc. [retour]

63 Tous ces articles étaient au 16e siècle envisagés comme ayant leur source dans la mainmorte. — Cela est dit dans l’acte d’affranchissement de cette servitude accordé par Berne en 1591. « Les affranchissons à perpétuité de la condition mainmortable et aides qui en dépendent, comme procès, tempêtes, aquisitions, réemptions, sortie de la terre pour aller résider ailleurs et jurer bourgeoisie. » Mais la mainmorte n’entraînait pas toujours les aides, preuve en soit Vallorbes. [retour]

64 Si même les immeubles avaient déjà été vendus par le Seigneur, le droit de replaict existait, en échange du prix d’achat. [retour]

65 Furent présens: le Prieur de Vallorbes; Huldric, doyen de Romainmotier; le sire Humbert Suchet de Festerne, chevalier, alors Châtelain des Clées; le sire Hugo dit Gaschet d’Orbe, chevalier; Pierre Rochet. — Ce compromis de 1266 fut accepté par le Prieur Aymon et le Couvent, puis par la Commune de la Terre. (Universitas hominum potestatis predictæ.) [retour]

66 Cartul. — Dans le Plaid de 1266 une phrase plus générale remplace celle-ci: « aut si gravatur ecclesia pro causis que tractentur coram domino Papa, aut imperatore, aut rege, » etc. L’Empereur était roi des Bourguignons, mais ici autre est le roi, autre l’Empereur. S’agirait il des Rodolphiens? [NB: ce passage a fait l'objet d'une rectification dans les Rectifications et Additions, p. 893] — De plus en 1263 la Terre doit subside d’argent: « pro liberandis possessionibus si de majorum et familiæ dictæ domus consilio fuerint obligatæ » en 1266: c’est « ad redimendum si gageria facta fuerit de Communi consilio », que l’on doit subside. [retour]

67 On paie 24 S. pour le salaire des charpentiers et maçons qui ont été avec le drapeau à Ste. Croix pour y faire le service pour Nyon ainsi qu’il avait été statué par ceux de Vaud. (Grenus p. 30 et 31.) [retour]

68 On paye 37 S. pour les frais de ceux qui ont été à Moudon et Rue où toutes les Communautés de Vaud étaient convoquées pour déterminer de combien chaque ville aiderait le Seigneur Girard d’Estavayer dans sa cause contre le Seigneur Othon de Grandson. (Grenus p. 32.) [retour]

69 Muller, nouv. édition, t. IV, p. 16, prétend que Guillaume était frère d’Othon, et que sans aucun égard à ses droits, la Savoie saisit tous les biens d’Othon, après sa mort. [retour]

70 Un acte du 15me siècle servira ici de complément au Plaid général. arch. de Romainmotier. [retour]

71 On les devait au Prieur: a) en cas de procès sur sa jurisdiction; b) en cas de grand dommage des récoltes du prieuré, pourvu que celui-ci n’eût pas atteint les hommes de la Terre; c) Pour achat de quelque terre ou revenu; d) Pour faire la réemption de quelque partie du domaine de l’Eglise engagé par le Prieur du consentement commun. [retour]

72 Par chef de famille on entendait non seulement père ou mère, mais oncle ou tante, frère ou sœur, belle-mère même, si elle dirigeait la maison. Chaque conjoint devait ce droit. Si la femme mourait avant son mari celui-ci payait l’aumône pour elle, et plus tard ses héritiers la payaient pour lui. On redoutait l’abus qu’on pouvait faire de cet usage. (Acte de 1492.) [retour]

* Le Decanus, ou Decumanus (Decimateur) existait déjà chez les Romains. Plus tard dans l’Eglise on appeloit decanus celui qui présidait à 9 cénobites. Les frères étaient divisés en décuries - (note de M. Hisely.) [retour]

73 La dixme des graines était de 1 gerbe sur onze par toute la Terre sauf Lapraz qui devait dixme et terrage (2 gerbes sur 11), ainsi que Vallorbes (2 sur 14).
La dixme du vin à Agiez (un 13me) et à Arnex (un 15me) était évaluée à cinq muids par an. - Celle des pailles à 50 flor. Agiez en était exempt. - Celle du chanvre à 50 brasses (ulnas). La dixme de la Maressaulvaz (?) levée sur un certain coin de terre, rapportait quatre coupes de blé. - Le muids avait à Romainmotier douze coupes et la coupe 4 quarterons. - Nul ne pouvait serrer blé, chanvre, légumes, ou vin, que la dixme ne fut prise, sous peine de 60 S. par voyage; sauf en cas de pluie (v. s.) Le blé devait être amené dans les granges du Seigneur, à Brethonières, Arnex, etc. puis après avoir été battu il devait être amené à Romainmotier et à chaque char étaient dues quatre miches de pain. De même pour le légume.
La dixme de la laine était une obole par agneau. Celle du bétail naissant: 4 deniers pour poulain, 1 denier pour un veau, 1 obole pour un cabri; et pour un petit porc, 4 deniers suivant les uns, 1 denier suivant les autres. - L’infirmier, le Camérier et les Curés les percevaient. [retour]

74 Nous y reviendrons. [retour]

75 Pour un poulain ou cheval, par ex., 4 deniers, pour chaque cabri, mouton et agneau 1 obole. — Nous ne disons rien des Clames et bans qu’on ne peut mettre au nombre des impositions. — Les Clames valent 12 deniers, celles des jours de foires et marchés 3 Sols. Celles des mayors 6 deniers de Lausanne. Nous ne parlons pas non plus de la messeillerie ou garde des terres par la même raison. [retour]

76 A chaque char sont dues quatre miches de pain de ménage pour chaque voyage, et si l’on passe Pierraz fully (Petra felix) 6 miches. [retour]

77 Par ex., près de Romainmotier en Praël; chaque feu de Brethonières devait une journée de faux; chaque feu de Romainmotier une de faneur; enfin chaque attelage d’Envy, Croy et Romainmotier le transport du foin, sous l’inspection du mayor, et en échange de la nourriture comme de coutume. [retour]

78 Le four de Romainmotier était amodié 10 florins; celui de Juriens, 10 florins; de Vaullyon 8 florins; d’Arnex 28 coupes de froment; d’Envy, Premier, Brethonières, Bofflens, une coupe froment par feu, et l’entretien; Agiez 1 coupe par feu; Croy, 1 bichet par feu. [retour]

79 Il y en avait 5 en la terre. [retour]

80 Elle subsiste encore. [retour]

81 Plus de 70 poses de champ, 4 poses de vignes, et environ 100 seyturées (espace qu’un ouvrier peut faucher en un jour) de prés donnant par l’amodiation d’une partie, 70 florins en argent et 56 coupes de blé.
La grange de Praël. - Le Collombier, placé au-dessous d’Envy dans l’endroit encore ainsi nommé. Les pigeons employaient par an 12 coupes de poisettes. - L’aîle (ala) ou la Halle de Romainmotier, bâtiment du marché. - Le Château d’Arnex avec ses fossés et appartenances. — Le Pressoir du dit lieu. [retour]

82 Celui d’Arnex. L’autre était dans un petit vallon, embranchement de celui de Romainmotier vis-à-vis de Croy. Un pré voisin s’appelle encore eys moennoz. [retour]

83 Y compris les bois de Forel, Faël, grand et petit Chasney, La Rispa, La Goetettoz et la Bougeris, de la Foule etc., jusqu’au rocher du bec à l’aigle. [retour]

84 Apples, Jolens, wufflens-la ville, Yens, Pampigny, Bursins, Mollens, Ballens, Torclens, etc. etc. etc. [retour]

85 Archives de Romainmotier. [retour]

86 Etant situés en pays fort stérile (acte de 1473). - Vos pauvres sujets, disent ceux-ci, dans une supplication à Michel de Savoie, prieur (fin du 15e s.).
Les pestes et les tempêtes désastreuses de cette époque nous sont connues par d’autres titres; la première moitié du 15me siècle fut calamiteuse pour la Terre de Romainmotier. [retour]

87 En 1499. Une redevance nommée vulgairement deniers mendaux de 4 deniers pour quelques ménages, de 2 pour d’autres, de rien pour quelques-uns, qui se payait à la Cène du Seigneur; redevance non écrite, mais connue de quelques collecteurs seulement, récemment défunts, est modifiée par le couvent et fondue dans les extentes nouvellement faites par Aym. Pollens. — Il y a un Parfum de loyauté dans cet usage de collecteurs ayant seuls la connaissance d’un impôt! [retour]

88 Il y a peu d’années on voyait encore une semblable frêste, à l’entrée du village de Croy. — Mais plus d’une fois cet expédient joint aux bardeaux des toitures rendit les incendies terribles, par ex., à Juriens en 1811. [retour]

89 Pièce de bétail à la mort du chef de famille. [retour]

90 C’est-à dire un droit de mutation de 1/8. [retour]

91 Il y avait quelquefois des fermiers ou amodiateurs des revenus du Prieuré, qui ne pouvaient causer que des vexations de détail; on craignait cependant leur ignorance des usages de la Terre, comme le témoigne une supplication de la Commune de la Terre, adressée à Michel de Savoie et qui eut bon effet. — On ne trouve pas de sous-fermiers ou sous-amodiateurs qui auraient cherché à jouer le rôle de vampires dans la Terre. [retour]

92 Un grand nombre sont mentionnés: par ex., en 1377, du Prieur Hy. de Siverier pour assistance des h. de la Terre qui dans un moment pressant allèrent fossoyer les vignes de Brussins.— En 1340, d’Isabelle de Châlons, dame de Vaud, pour 50 charrois de pierres pour les escaliers du Château de Morges, faits par grâce spéciale depuis Lassaraz. - En 1342, de Louis de Savoie pour don de 100 livres, etc. [retour]

93 Ils ne payaient pas le bichet de fromment de la maréchaussée, ni le chapon à Noël, et n’étaient pas tenus à faire les charrois pour réparations au Château des Clées, soit aux 6 deniers annuels qui les avaient remplacés. [retour]

94 Vaullion était franc de la maréchaussée et du bichet de froment de l’aumosnier, des fagots, de la coupe du bois, des corvées de bêche, de la messellerie due en la paroisse de Romainmotier, de la dixme du Chanvre, de l’attente du Décimateur et du charroi de la dixme.
Lapraz aura un article séparé. [retour]

95 Les Chapelains étaient exempts de la chaponnerie, de la gerbe de la moisson (et pour cause, étant célibataires), des fagots, des corvées de faux, etc. [retour]

96 Ceux de Romainmotier (Nicolas de Romainmotier), de Brethonières, de Croy, de Agiez, de Arnex, de Vallorbes, de Lapra. A teneur d’un ancien compromis, ils exerçaient pour le compte du Châtelain des Clées, la jurisdiction sur les étrangers à la Terre, qui la traversaient. Le mayor de Romainmotier devait encore recevoir les épouses et les conduire (conducere) et cela pour les salaires accoutumés. Un mot de Kuenlin explique un peu cet usage. « A chaque noce solennelle on devait remettre au mayor (de Bulle) le premier mets placé devant l’épouse avec un quarteron de vin ou 3 sols, mais il la conduira » est-il dit. [retour]

97 Il doit officier pour le Châtelain de Romainmotier s’il le faut, faire les assignations comme nonce du Seigneur, veiller aux récoltes d’un pré, recueillir à la place du mayor de Romainmotier, et comme son subalterne, les corvées dues au Châtelain des Clées. [retour]

98 Il doit obéir au Châtelain de Romainmotier pour amener les malfaiteurs, et l’assister, avec ses envoyés, dans l’exécution de la Justice. [retour]

99 Ils doivent conserver les bois du Seigneur, gager ceux qui coupent et emmènent des bois défendus, faire les assignations devant le Châtelain et comme sergens et cliens lui obéir dans l’exécution des passemens. [retour]

100 En voyage il était défrayé de tout. [retour]

101 Il devait encore dans la semaine sainte, pourvoir « de tabussetis (?) quatuor ad tabussandum » le Jeudy saint, au lieu de cloches suivant la coutume. [retour]

102 Il gardait la porte antérieure et devait la fermer de nuit, de telle façon qu’on ne pût rien sortir ou entrer par la force. C’était, je pense, celle de la tour de l’horloge. La seconde était celle du Battoir où l’on voit encore des vestiges d’un pont levis. La tour carrée qui se remarque auprès de la grange de la torture faisait partie des murs d’enceinte de la maison forte. A l’orient étaient des fossés. Triste position militaire dominée de partout. [retour]

103 Son office est de cuire et de préparer les alimens dans la cuisine du couvent, de soigner les sauces, de faire par lui-même ou autre, boucherie pour le couvent, assisté et servi par le solliard ou serviteur de cuisine, dont l’office était au bon plaisir du Prieur, le tout selon l’ancien usage. [retour]

104 A chaque forestier 6 setiers (de 32 pots chaque) de vin par an; au portier 6 setiers; aux autres 3 setiers. — De plus à chacun 2 pots dans le Cellier du Seigneur, à la Toussaint, à Noël, à Carême prenant. Au marrillier sa prébende de pain et vin quand on fait la procession. [retour]

105 Sauf en cas de nécessité, alors pour 3 tonneaux, outre 3 pots de vin on leur doit cinquante miches de pain: ils peuvent s’exempter pour 12 sols. Et ils pouvaient avoir deux charrues attelées, en ne payant que pour une. [retour]

106 Ils étaient francs aussi de la messeillerie qui se payait dans la paroisse de Romainmotier pour la garde des récoltes. [retour]

107 « Debentur pro represia sexaginta solidi quando videlicet mutatur (officium) per alienationem vel in personam devenit alienam. » Acte du 15me siècle. Arch. de Romainmotier. [retour]

108 Aymon Pribelli, maréchal au nom de sa femme, fille de Jaq. Jaquinet d’Arnex. Blaise maior forestier, au nom de sa femme nièce et héritière de Jean de Lanffrey; elle était sans doute indivise. [retour]

109 Jean Bessonis nommé aussi Pollens et Mayor possédait la mayorie d’Arnex, la franchise du cuisinier, et le droit de réachept sur la franchise de la maréchallerie tenue alors (1re moitié du 16me siècle) en gage par deux hommes d’Agiez. [retour]

110 Voici les aventures de la succession d’une de ces franchises.
En 1454, les Jurés de la terre rapportent que la moitié de l’office de la Porterie, est échue par mainmorte au Couvent, par la mort du possesseur (Henry Coschet). Tenue quelque temps sous la main du Seigneur (c’est-à-dire exercée immédiatement par lui ou plutôt ses serviteurs), cette moitié fut vendue à Aymon Aymonod, égrége docteur de l’un et l’autre droit, pour lui, son père, leurs femmes et leurs héritiers; pour la somme de 60 florins. Or en 1462 un débat s’était élevé entre Aymon et la veuve de Nicod Coschet, usufruitière des biens de son défunt mari, et qui demandait que l’office de la Porterie, dont elle avait la moitié, lui fut remis en entier sa vie durant pour certaines raisons — refus d’Aymonod — Arbitrage — sans résultat. En 1474 la dite veuve de son plein gré cède aux religieux cet usufruit de la moitié de la franchise de la Porterie. Aymon Aymonod était déjà défunt en 1467: son fils Pierre avait été reçu en reprise et réintégration de sa franchise moyennant 61 sols, et ce à la requête de la mère de Pierre, de son grand-père etc. Or le Prieur, désirant (en 1474) tant pour le bien de l’Eglise de Romainmotier que par dilection pour Pierre, que cette franchise appartint en entier à un seul Franc, plutôt que d’être divisée, vend à Pierre la moitié cédée par la veuve, pour 40 florins, outre la cession de quelque terrain. [retour]

111 De Pré, par ex., Arnod Donzel, Mayor de Romainmotier, Mayor d’Arnay, Thomasset, d’Arnay etc.: à l’exception des derniers dont les biens étaient francs de la mainmorte et de certaines dixmes, et qui n’occupaient aucune place de franc, je n’ai trouvé d’immunités pour les nobles que celles de quelques corvées. [retour]

112 Les nobles Monod ou Aymonod par exemple qui possédaient la Porterie depuis la 2me moitié du 15me siècle, et s’éteignirent à la fin du 16me siècle, ne sont qualifiés nobles que depuis cette possession. — De même les mayor de Romainmotier etc. Les Thomasset étaient qualifiés avant d’avoir acquis la mayorie d’Agyez, dans la 2me moitié du 15me siècle; et les d’Arnay de toute antiquité, leur franc alleu nous fait peut-être remonter à une époque antérieure à la féodalité même. [retour]

113 « Consuetudine aliorum famulorum » Cartul. [retour]

114 Donation de Landric du Château de Joux. — Cartul. [retour]

115 Archives de Romainmotier. [retour]

116 Casatus vassal, appartenant à la famille, à la maison d’un Suzerain. Casamentum, Chazement, ce qui compose le fief en terres, droits et autres possessions (note de Mr. Dr.) Le titre de cet acte en écriture du 15me siècle est « l’homaige de Perrotin de Romainmôstier ». — Archiv. de Laus. - Cartul.
Casatus est traduit par Muller, une fois, attenant du Clergé, (à Genève) nouv. trad. t. I. p. 357; une fois habitant de la contrée (en Vallais) p. 359. 360. — Ces deux sens ne suffisent point à la charte ci-dessus. [retour]

117 Henri de Sivirier, aumôsnier du Prieuré, et Thomas Mestral de Lassaraz décident que l’héritier de Guillerme qui, après sa mort, voudra tenir l’office de mayorie, devra le replaciter du Prieur, et payera pour le replaict 60 sols. De plus il payera l’aumôsne du defunt comme les autres, seulement ses chevaux et cavalles en seront exempts. [retour]

118 Ce qui ne peut se rapporter qu’à Lapraz. [retour]

119 Les arbitres étaient: noble Seigneur Humbert Alamand, de bonne mémoire, sire d’Aubonne, Aymon des Monts Prieur de Corcelles et le Seigneur Pierre de Gumoëns, chevalier. Voici l’arbitrage. - 1o Le mayor est franc du charriage des dixmes, sauf le cas ou les religieux n’admodieraient ou vendraient pas les quartes (?) soit dixmes des blés de la Terre de Romainmotier. 2o Il n’a à retirer des biens des délinquans que 5 s. Lausan. et 2 de ces quatre ustensiles, savoir: houe (ligonis), quoquependum, hache (securis) et trâyn ferri. — 3o Il doit prendre les délinquans, les amener à la maison des religieux et les transmettre à leur nonce. [retour]

120 Il ne devait signer sans émolument que les mesures des religieux; il ne pouvait réformer une mesure fautive sans le nonce des religieux, et percevait 6 deniers dans les bans de 3 sols encourus par ce fait. [retour]

121 Il y a lieu de croire qu’il s’agit de mutation de personne, même de père à fils, dans l’exercice de l’office. — Le fils du mayor devait aussi replacitare ad misericordiam l’office de son père (v. s.) [retour]

122 Jus in marescallia seu in appendenciis et villis totius terre. Arch. Cant. [retour]

123 En 1314, Jean, fils de Pierre dict Maréchauz, donne en gage au Prieur son droit en la Maréchauci de la Terre de Romainmotier pour la somme de 7 liv. 6 sols; et les religieux percevront, durant cette engagère, tout le bled, les revenus et autres choses, qui sont du ressort de cette marechauci (in bladis, fructibus sive aliis rebus mihi competentibus, etc.) Mais l’office fut dégagé, car sa veuve et ses enfans furent au nombre des vendeurs ci-dessus. - Archives Cantonales. Cop. Rr I no 138 et 146. [retour]

124 M. Sainte-Beuve. - Plusieurs de ces minimes détails nous seront utiles plus tard. [retour]

125 Reconnaissance de 1499. Ils devaient tenir leurs cours en leurs mayories le samedi au matin (acte de 1411 ci dessous). [retour]

126 C’est une requête adressée par la commune de toute la Terre de Romainmotier au vicaire du Prieur, pour redressement d’abus. [retour]

127 In duobus foris. [retour]

128 L’office de Châtelain n’était point héréditaire comme celui de mayor. [retour]

129 Archives de Romainmotier; deux doubles de l’acte, un français et un latin. [retour]

130 C’est-à-dire à une heure de l’après midi. [retour]

131 Peut-être on voulait diminuer par là les querelles trop fréquentes. Le samedi était le jour du marché. [retour]

132 Sous Berne encore, le Parlier était un juré membre du corps de la Justice, qui portait la parole pour une des parties. (note de M. Correvon de Martines.) [retour]

133 Comme si l’on avait voulu que tous pussent assister aux cours de Justice. [retour]

134 On trouve des preud’hommes employés à vérifier les limites de la Terre en 1499, et aussi faisant la reconnaissance des usages et des droits du Prieuré et s’engageant au nom de tous et pour leurs héritiers. (Ibid.) [retour]

135 Archives de Bofflens. — L’acte est de 1393, encore sous Jean de Seyssel. [retour]

136 Etienne Aymonod prieur de Corcelles près Neuchâtel, nobles, Jean de Seyssel, Jean Gaudi Châtelain de Romainmotier, Jean de Romainmotier, et Jean Houlard, clerc et bourgeois d’Orbe. [retour]

137 « Maturo et diligenti consilio cum peritis et sagacibus patriæ et loci habito prius ». [retour]

138 Et payait la dixme du bétail naissant au curé de cet endroit. [retour]

139 5/8 environ à l’Infirmier; 1/8 à la Pitance du Couvent par don de Jaquet de Envy; le reste appartenait partie à l’Abbaye de Joux, partie aux héritiers de Pierre de Mont. (fin du 15me siècle. Domaine de Lapraz dans les archives de Romainmotier.) [retour]

140 Requête du 16e siècle. — Arch. Canton. [retour]

141 Au 15e siècle. — En voici le préambule: Que la postérité n’ignore pas qu’un débat s’étant élevé sur ce que le Prieur voulait avoir un hommage lige de chaque homme de Lapraz aux conditions d’une certaine reconnaissance. Tandis que les Preud’hommes niaient cette obligation, sous ombre qu’ils ne descendaient pas des hommes qui l’avaient faite, et n’étaient ni leurs héritiers, ni possesseurs de leurs biens, etc. Enfin comprenant qu’il n’est pas à propos qu’il y ait différend entre le Seigneur et les sujets, une médiation rétablit la concorde, en la forme suivante. Que sincère dilection demeure à toujours, comme il est convenable (ut decet) entre le sujet et le Seigneur; ensorte que nous Prieur nous traitions nos hommes comme probes et loyaux sujets. Et nous preud’hommes nous considérions notre sire comme notre très-cher et amé Seigneur, etc.
Il y a de nos jours plus d’égalité, mais moins de loyauté dans les actes.
Des deux parts on abandonne toute réclamation de frais. — Et le prieur renonce à tous les lods qui pouvaient lui être dus à Lapraz jusqu’à l’accord, etc. [retour]

142 Concedimus quod unus possit succedere alteri ab intestato ratione pro ximitatis. [retour]

143 Concedimus quod dicti homines de Prata possint donare et legare de bonis suis cuicumque voluerint, sub ea tamen conditione quod sint astricti per eorum recognitiones. [retour]

144 Ratione manus mortue, nul ne peut vendre ou engager qu’à son pair, et le partant doit demander la permission du Prieur, ou subir échûte de ses immeubles. — Reconnais. gén. de 1499. [retour]

145 Concedimus … quod contemplatione matrimoniorum liberorum suorum … possint eisdem … assignare in dotem, et portionem, de eorum possessione dum maritentur infra dominium Romanimonasterii.
Le Prieur n’avait plus aucun droit, (non habeamus sequelam personalem etc.) sur celui de ces hommes qui sortait de la jurisdiction de Romainmotier, ni sur ses descendants. — Voici un article obscur « nos (probi. hom. de P.) submictimus quod nobis recedentibus cum tota familia nostra de loco de Lapra, pro nobis redeundo bona nostra sint comissa prioratui. » Faut-il lire pro nonbis redeundo pour n’y pas revenir, et traduire comissa par confisqués, ou bien traduire que s’en allant pour revenir leurs biens seraient confiés au prieuré. On ne pourrait traduire confisqués dans ce 2e cas, pour ne pas faire leur condition pire que celle des mainmortables. Les terres incultes appauvrissaient le prieuré. [retour]

146 Lapraz était exempt 1o De la gerbe de la moisson, impôt pesant d’une demi coupe de froment pour tout homme marié ou veuf, et de demi coupe d’avoine de toute femme mariée ou veuve. 2o Des trois corvées de labourage soit 10 sols, comme aussi de la corvée d’amener les fagots dus par attelage; et semblablement des corvées de cognée et de bèche pour ceux n’ayant charrue. 3o Du bichet de froment dû pour l’aumôsnier, et de celui dû pour la maréchaussée par chaque frêste. Enfin Lapraz n’était pas tenu à attendre le Décimateur pour serrer ses récoltes, ni au charroi des graines de la dixme dans les granges du Seigneur. [retour]

147 En 1139, dans une bulle du Pape Innocent II, la chapelle de Vallorbes est mentionnée, mais non le prieuré. [retour]

148 Subprior - Ruchat, (abrégé d’Hist. eccles.) s’est trompé en le nommant Prieur. Le Prieur était Willerme de Montricher. [retour]

149 Devotam usque ad mortem. — Le Prieur de Vallorbes était alors Jaques de Dizy; avant lui vivait le Prieur Willerme dit Charpil, et antérieurement encore Willerme de Brussins. [retour]

150 Paternitas — en pourvoyant le prieur du dit lieu, de quelque bénéfice ou en le rappelant spontanément au Cloître. [retour]

151 Alamaniæ et Lotorengiæ, sous son sceau et celui du couvent. — L’acte se termine par ces paroles. « Bien soit à votre paternité dans le Seigneur Jésus Christ qui vous garde et vous conserve. » - Fait à Romainmotier le lendemain de la fête des SSts. Pierre et Paul, 1321. — Arch. Cant. Nous lisons dans Muller Liv. I Ch. II p. 220 et note. « Louis roi des Francs orientaux et Charles le Chauve, roi de France, qu’il nomme Carlingie, se partagèrent l’héritage de Lothaire, roi de Lorraine. Bien des pays ont été nommés d’après d’anciennes familles souveraines etc. » — C’est que tout fait trace dans la jeunesse des sociétés, la mémoire est plus docile que dans leur âge mûr. - Les événemens se succédent aujourd’hui presque sans laisser de trace. Il n’ya point eu de Napoléonie, pas même pour la grande armée! [retour]

152 Salutem in eo qui est omnium vera salus, etc. Donné à Avignon, VI Kalendas de février 1321 . — Archives Canton. [retour]

153 Grosse Allamand, Arch. de Vallorbes. — Les censes dues sur le territoire de Vallorbes ne montaient qu’à cinq livres. [retour]

* Il n’y a pas à douter, par ex., que les hommes de Vallorbes n’eussent la liberté légale de changer de Seigneur en abandonnant leurs immeubles: liberté refusée à un serf. [retour]

154 Voyez Guizot, Cours d’histoire, etc. [retour]

155 Il y en a 22 nommés, et parmi eux peu de noms actuels. [retour]

156 « Pro 40 franchis boni auri » et … ils payeront les 20 livres en même temps que les autres censes dues avant la confection de cet acte, non moins que les corvées, charriages, etc. — 10 Decembre 1403; sceaux des religieux et de la cour de Romainmotier. — Arch. Cant. [retour]

157 Dantes … dictis … et successoribus … plenam potestatem et mandatum speciale agendi, petendi, deffendendi, pacisci, contrahendi et omnia alia et singula faciendi … quæ homo ligius sui juris effectus agere, contrahere, petere, deffendere et exercere potest et debet. [retour]

158 2 syndics du village et de la communauté, et 12 autres, de Velley, Jaillet, Palliard, Glardon, Bastard, Gl. de Franquefort ferrier (ferrerius); Amey, autrement Beccelin, George, Bagnon, Grobet, autrement Grant etc. - Arch. Cant. [retour]

159 Ne propter hostium insultus et alios sinistros eventus quæ plurimum contingere solent … per nimiam contractionem maxime cum de eodem fidem facere diversis in locis forent necessarii, etc. [retour]

160 Leur demande fut accordée cela s’entend: « Nous donc annuans … premièrement avons reçu de la main de leurs sindics le dit instrument, nous l’avons ouvert, palpé, nous avons vu qu’il était signé de la main de Nycod de Valeres et muni des sceaux de Jean de Seyssel et de son couvent, comme aussi de la cour commune de Romainmotier, en cire verte, et nous l’avons fait transcrire en forme de vidimus lui donnant toute foi. » La guerre aussi leur avait enlevé la limitation de la mayorie, ou de leurs biens communs. [retour]

161 Ils tenaient toutes leurs « possessions de ipsius ecclesiæ allodio, et antiqua proprietate », et elles étoient soumises à la condition mainmortable. — Ils pouvaient les vendre et échanger aux hommes de la Terre de Romainmotier seulement. — Ils ne pouvoient s’unir par mariage à quelque personne qui ne fut pas de condition libre, ni jurer bourgeoisie ou faire quelque alliance au détriment du Prieur, ni quitter la Terre par orgueil ou sans en demander permission au Seigneur. — Chez eux existait aussi le droit de parenté pour le replaict des héritages. - Enfin on usoit à Vallorbes comme dans le reste de la Terre, de la Coutume de Moudon. — (Sur tous ces points voyez plus haut le Plaid général de Romainmotier.) [retour]

162 Les clames du Mestral de Vallorbes valaient douze deniers. [retour]

163 En 1397. Environ 5 livres de censes pour tout le territoire. — Grosse Allamand. [retour]

164 Ce curé Jean « de villa dei » chanoine « montis Jovis » (le St. Bernard), fait cette confirmation étant pleinement informé que les religieux de l’ordre de Cluny ont reçu du Saint Siège le privilége de percevoir à l’avenir les dixmes qu’ils ont jusqu’ici (hactenus) perçues. (?) Arch. Cant. [retour]

165 Pour les aumôsnes et les vendes, ainsi que pour la moisson et la dixme du bétail naissant dont il sera parlé, voyez le Plaid général de Romainmotier. [retour]

166 De chaque charrue entière, une corvée au printems, ou en échange 3 sols 6 deniers. — En échange des corvées de faux et de râteau, chaque homme marié et faisant feu payait 3 sols par an, et chaque feu de veuf ou veuve 18 deniers. — D’ordinaire plusieurs ménages vivaient réunis, mais ne payaient pas pour cela plus de 3 sols, entre eux tous. [retour]

167 « A côté et au-dessous de l’Eglise paroissiale là ou était autrefois la maison du prieuré », est il dit en 1530.
La maison carrée se louait chaque année environ 4 florins. [retour]

168 32 falcatas amodiées 14 florins. [retour]

169 11 poses. [retour]

170 Amodiée à Maître Etienne dez Franquefort, autrement Matthey, avec 5 falcatas de pré et 9 poses de terres contigües pour 20 florins par an, en 1530. [retour]

171 168 poses arables, 504 falcatas, c’est-à-dire 504 fois l’espace qu’un homme peut faucher en un jour, de prés (possessions particulières et non commungs). [retour]

172 Frères Glaude de Livron, Prieur de Bevex et Vaultravers, Glaude Michaudi grand cellérier de Romainmotier et Prieur du Lay damp Wauthier, et Pierre Chablet notaire et bourgeois de Romainmotier. [retour]

173 De quatuordecim arcomis duos arcomos. [retour]

174 Il y eut 40 S. à peu près, pour 80 poses environ, soumises jadis au terrage. - Ce changement fait d’abord pour 20 ans, pouvait persister, avec l’agrément des deux parties.
Le mandat fut donné aux commis le 2 Janvier 1487, et l’acte signé le 20 Juin 1488. Celui-ci est un parchemin des Archives de Vallorbes coté A, no 2, assez effacé, mais non de manière à jeter du doute sur sa teneur. [retour]

175 Au 16e siècle. [retour]

176 « Or, quand ce n’est préjudiciable, la communaulté lâsche pour extirper, moyennant récompense, avec lectres portant Maintenance, qui est bien raisonnable ». — Manuscrit de Vallorbes coté A, no 1 . [retour]

177 Arch. Cant., Prononciation de Michel de Savoie.
En 1530, la Ferrière faisait partie encore du domaine du Seigneur, et était amodiée pour 20 florins (v. s.). [retour]

178 En 1285, Cartul. « 20 S. super raisiam (une raisse) que nous avons faite à Vallorbes ». — En 1530, la commune tenait du Seigneur « rassiam », sous cense annuelle de 18 deniers. [retour]

179 A Michel et Glaude Grobet. — Elle était située au Chatellard près de la Jognynaz. [retour]

180 Lieu dit au Vivier. [retour]

181 Au-dessous du pont de l’Orbe. [retour]

182 Ad fondendum et forgiendum ferrum. [retour]

183 Baptorium ad Rubat. [retour]

184 Pour faire « laudaria » qui devront être faits par le censier à ses frais, à l’ordre du Prieur, deux de suite et le 3e après la construction de ses forges. [retour]

185 1529. Computus de gieto pro expensis factis contra illos de Melduno petentes terræ pro quolibet foco 12 S. etc., sunt in Romainmotier 31 foci, Croy 5 foci, Bofflens 12 foci, Arnex 20 foci, Agie 19 foci, Brethonières 16 foci, Premyer 10 foci, Vallorbes 12 foci, Vaullion 20 foci, Juriens 26 foci, Envy 4 foci, Lapra 6 foci. - Papyrus communitatis. — Il est vrai que plusieurs ménages vivoient réunis, et ne formaient qu’un feu ou une frêste (v. s.). [retour]

186 Dix muids soit 120 coupes de quatre quarterons chacune. - Les 3/8 restant se partageaient entre le baron de Lassaraz, les de Villars et Nycolas de Romainmotier. [retour]

187 3 de alboldo et 2 de berigero (?) [retour]

188 Mémoires de la Soc. I p. 158. — Nous devons au tact érudit de M. Duvernois le sens historique de cette charte importante. - Le Vidame (vice-dominus) étoit en général l’avoué inférieur, le lieutenant d’un Seigneur ecclésiastique. - D’après la teneur de cette charte et d’autres il est naturel de considérer Borcard comme Vidame du Couvent, plutôt que du Comte (loc. cit. p. 159, note 3). Sa famille nous est révélée dans une de celles- ci. — Nous reviendrons sur cette Vidamie. [retour]

189 Le Comte reçut du prieur Etienne une mule de grand prix pour une meix à Agyz, et au sujet de charrues, dont ses affidés (ministri) s’emparoient induement à Bofflens et Agyz, pour le labourage des terres du bourg de Tavel. [retour]

190 Mémoires de la soc. I, p.204. [retour]

191 Continuation de J. de Muller, par M. Vulliemin, tome XII p. 39. [retour]

192 Videlicet, oblationes, decimas, sepulturas, justiciam. [retour]

193 Avec champs, vignes, prés, bois, pâturages, chemins, eaux, terres, arbres, etc. [retour]

194 Fait à Payerne (in villa Paterniaco) en Mars 1009, la dix-huitième année du règne de Rodolphe. Cartulaire de Romainmotier. [retour]

195 Cartulaire. — Montricher, voisin d’Apples, appartenait aux Grandson. [retour]

196 Cartulaire. [retour]

197 Village qui n’existe plus. [retour]

198 6 coupes de froment, 2 1/2 d’avoine, 2 « comblos » d’avoine, 4 sols et deux pains blancs, annuels, vendus pour dix livres. — Un seul homme nommé Poncet, devait 4 coupes de froment et 2 d’avoine.
En 1292, Amaury vend à Romainmotier mennagium, et tout son héritage ou ténement pour 17 livres et 4 coupes de froment.
En 1328, quatre personnes vendent à François de Colombier, Donzel, chargé d’affaires (vices gerenti) des religieux à Apples, et à ses héritiers, un moulin sur la Morgyz, pour 24 livres. [retour]

199 Sa maison, son four, 12 poses de terre.
Il réserve la féauté et l’hommage de son très-cher Seigneur de Voufflens le Chastel, dont il tenait des possessions ailleurs, sans doute, et ne rendait hommage au Prieur que pour ses possessions à Apples, et il y avait pour celles-ci, la condition de les faire maintenir perpétuellement de son propre alleu à lui Nicolet. Il promettait aussi de faire tout ce qui se doit en cas « evictionis ». [retour]

200 Arthaud Allamand, Prieur accense aussi perpétuellement à Perrod de Apples, dit Dorenloz en 1347, 21 pièces de terre pour une cense de 22 coupes de froment, parce, dit-il, qu’il est entré dans notre hommage, et est homme censitaire du prieuré, suivant la coutume des autres preud’hommes d’Apples. Autre exemple d’hommage, mais non noble à ce qu’il paraît. Ce Dorenloz avait sans doute renoncé à ce qu’il tenait d’autres Seigneurs, et le Prieur l’en dédommageait. Arch. Cant. [retour]

201 « Vos estis satis divites, dimittatis jus ecclesiæ. » Henry de Syvirier était Prieur dans la 2me moitié du 14me siècle, le débat dura fort longtemps. [retour]

202 Sous Jean de Seyssel Prieur; Guillaume et Henri Seigneurs de Montricher, et Jean fils de feu Humbert de Syvirier. Ces deux maisons féodales avaient à Romainmotier leur sépulture de famille. — Arch. Cant. [retour]

203 Présens: Jean Seigneur de Mont chevalier, frère Girard de Duluz, Rodulphe de Verdes, alors Châtelain de Morges, Jean Moschet Donzel, Jean Mestral des Clées, Rodulphe et Aymon de Apples Donzels, et plusieurs autres dignes de foi. Présens aussi et appelés par le maior d’Apples, les forestiers, les serviteurs « et colengiariis suis » et toutes autres personnes qui doivent, etc. [retour]

204 Le Prieur nomme frère Robert, de Arbosio (Arbois?), Prieur du lac dou Vancer (damp Walter) et frère Girard de Duluz. Et les preud’hommes, Willierme, curé d’Apples et François de Colombier Donzel. [retour]

205 Le Prieur a omnimode jurisdiction sur les preud’hommes d’Apples, et les habitants, qui sont de sa seigneurie. Il doit annoncer le Plaid général une fois l’an pendant trois Dimanches ou jours de fête, dans le temps qu’il voudra, après cet avis nul ne doit s’absenter, sauf avec permission du Prieur, ou pour affaires urgentes, ou pour la garde du village. Celui qui appelé 3 fois, ne répond pas, paye 3 sols.
Quand il s’agit de reconnaitre les droits du Plaid général, le Seigneur est tenu d’envoyer le Curé, le Mayor (villicus) et les deux serviteurs (famuli) d’Apples; et si ces « missi » veulent un conseil supérieur, le Prieur devra le choisir entre les hommes d’Apples les plus experts dans ces droits. Voilà sans doute les Jurés du Plaid général (v. s.). [retour]

206 Personne ne doit quitter sa place, ou parler sans autorisation, ou exciter quelque querelle préjudiciable au Prieur, ou qui entrave le Plaid général sous peine de 3 sols. [retour]

207 Mais « percepto placito generali » si quelque difficulté surgissait pour les chemins ou les pâturages, nul ne doit rien changer, jusqu’à la tenue du Plaid général, et que le Seigneur ait placé ses bornes s’il veut en poser, et ce sous peine de 3 sols. Le Prieur doit viare (faire les chemins temporaires de dévestiture) et délivrer les pâturages (les ouvrir en temps opportun), à sa volonté, ou requis par Apples. Et cette « via et deliberatio » doit être faite par les jurés du Plaid général et les anciens du village. Arbitrage de 1293. Ceci se liait au parcours, aux jachères, etc. [retour]

208 « Debet licentiam petere (a priore), ita quod si ipse aut alius habuerit agere cum eodem, faciendo jus et recipiendo, debet eidem dare licentiam recedendi. » Il pouvait avoir des dettes. [retour]

209 Celui qui aura été poussé à ce départ par orgueil ou à cause de ses richesses ne pourra ni ses héritiers procréés de son corps qu’il aura emmenés avec lui, réclamer aucun droit dans son héritage, sauf concession du Prieur. Le contraire aurait lieu si la pauvreté, les guerres ou telle autre disgrâce évidente étaient la cause de cet éloignement. [retour]

210 Igne aut tempestate. [retour]

211 Le terme fixé, de 40 jours, distingue seul cet article de celui du P. g. de Romainmotier. [retour]

212 3 sols de plana clama; 9 sols de devestituris (?) [retour]

213 Aut provocationem. Pourquoi appel ou provocation à lui plutôt qu’à tout autre? [retour]

214 Chaque charrue devait annuellement 3 corvées. Acte de 1293. [retour]

215 Sceaux de la cour de Lausanne et du Curé d’Apples, en mars avant l’Annonciation 1327. — L’acte parle aussi des offices francs d’Apples, nous y deviendrons. [retour]

216 Sceau de la cour de l’official de Lausanne apposé sur la demande d’Apples relatée par domp. Nicholas de Agie prêtre juré de cette cour. - Arch. Cant. [retour]

217 Nomine totius communitatis villæ de Apples. [retour]

218 Pro bono communi. La source sortant du marais de la Planchetaz. [retour]

219 3 1/2 seytorées de pré, 3 oches, 19 poses de terre, 4 coupes d’avoine, 4 pains blancs, etc. [retour]

220 Et en recevant à vie le four d’Apples, et 4 coupes de légumes de la dixme. — L’Abbé de Joux et l’official de Lausanne scellent l’acte. [retour]

221 En reconnaissance de services « et curialitatum plurium ». [retour]

222 Il aurait à vie 4 muids annuels de froment; un muids de vin aux vendanges ou 40 sols à son choix, ce qui nous donne le prix du vin à cette époque: « 8 ulnas pani nigri vel grisi » à son usage et de sa femme, ou en place 20 sols, It. 2 vaches nourries à Apples aux frais du Couvent, ainsi que les frais de sa sépulture. Et on payerait immédiatement 16 livres à sa femme et à celle de son fils pour leurs dots. — Sceaux du Doyen d’Outre Venoge et du curé d’Apples.
En 1339, le même Pierre de Apples, autrefois « villicus » de ce village, fit d’autres conventions avec les religieux. - Arch. Cant. [retour]

* C’est-à-dire, étendre le foin des andains. [retour]

223 Ils devaient sur leur serment garder les bois d’Apples, rendre au nonce du Prieur les objets pris en gage et lui « reportare » les bans. [retour]

224 Où on décida, par arbitrage, que si ces 4 forestiers étaient en désaccord sur leur office, les religieux pouvaient disposer de celui-ci, jusqu’au rétablissement de la concorde: moyen sommaire d’abréger les différends. [retour]

225 Jean coseigneur d’Aubonne, Martin dit de Promentou, François de Colombier, donzels, le curé d’Apples et plusieurs autres dignes de foi: le Châtelain de Morges, Rodulphe de Everdes, apposa le sceau à l’acte.
Jean dit Mossu, bourgeois de Morges, portait la parole pour le Prieur. [retour]

226 En 1337, ce forestier échangea son droit contre, « unum casale », 4 poses de terre et 1/2 seytorée de pré. [retour]

227 « Avinata omnium liberorum patris » et qui avait sa part dans les biens de celui-ci. [retour]

228 En 1333, le Prieur et les de Syvirie eurent différend sur la forêt de St. Pierre, située entre Apples, Pampignie et Syvirie. Le Prieur en réclamait la possession, soit comme don royal (de Rodolphe), soit par prescription légitime; et ne reconnaissait aux dits nobles que quelque usage. D’après le vœu de Louis de Savoie, chaque partie nomma 12 témoins qui furent examinés par devant des commissaires spéciaux, qui réglérent cet usage. La jurisdiction et les bans furent confirmés à Romainmotier. Dans chaque coupe, le Prieur avait la moitié, les Syvirie la 9me part de la 2me moitié, et les usagers tant de Severy que d’Apples, le reste. Nul ne pouvait durant trois ans y faire pâturer du bétail, et les Syvirie ne pouvaient couper les gros chênes. Il n’est pas clair, si la coupe était 1/5 de la forêt par an, triste aménagement sans doute, ou un 1/5 de ce 1/5 soit 1/25 du tout, ce qui serait mieux entendu. [retour]

229 Je ne sais comment traduire ce mot. [retour]

230 Et illi colongerii se habeant et proportent in futurum prout ordinatum est sive ordinabitur in placito generali. — Différend terminé par arbitrage. [retour]

231 Il est ajouté incontinent salvis et reservatis … religiosis, bannis grossis et minutis, latronum et malefactorum justicia et exchetis. — Elle avoit été rachetée des Montricher en 1265 (v. s.). [retour]

232 « Juvare se ad carrugianda blada domini … (à Apples) tempore messium si necesse fuerit, et peronibus (?) si voluerint excutere blada in grangia prioris, pro excosura sua. Et si prior voluerit, tenentur excutere omnibus modis, salvis suis excosuris ». [retour]

233 Aussi bien que les étrangers quelsconques, tout le temps de leur séjour ou de celui de leurs héritiers. Sur cette réserve seigneuriale avaient peut-être été prises les terres accensées à Dorenlot (v. s.) [retour]

234 Mais les 12 colengiarii, « pro suis sepibus tantum » et les autres sans cette clause. Nul ne doit esserter (excerpare seu exertare) dans les bois bannaux sans la permission du Prieur, sous amende de 3 sols. [retour]

235 Les autres hommes du Plaid général devaient pour cette pâture 2 deniers par porc. Item, deux deniers de cense pour leur affouage. Cette cense était recueillie par les forestiers qui en prélevaient la dixme, pour leur peine. [retour]

236 Nos renseignemens ne permettent pas, jusqu’ici, d’apprécier la position des preud’hommes d’Apples; elle n’était cependant pas sans quelque liberté. [retour]

237 « Potest consulere in curia prioris, si dicti homines … vellent aliquid supra dicta tallia proclamare, quod facere debent dicti homines et tenentur in curia Prioris » — Décembre 1284. Cartul. [retour]

238 De Willerm dit Pastor de Ballens entr’autres. — Cartul. [retour]

239 « Pro reficiendis fratribus die anniversario obitus sui ». [retour]

240 « De prudentium virorum consilio revertens ad bonam conscientiam, etc. » . — Cartul. — Cette famille de Mont paroit être celle des Barons de Rolle. [retour]

241 Charte communiquée par M. de Gingins. [retour]

242 « Tenere ostagia ad sumptus nostros apud sanctum Prothasium … seu reddere vadia ducibilia aut portabilia … quousque religiosis ad arbitrium bonorum virorum infra mensem … esset plenarie satisfactum » mai 1272. – Cartul. [retour]

243 1280 février sceau de l’Abbé de Joux. — Il s’agissait de unum gustagium (seu gistagium), seu unam procurationem quam aut quod nobis debebat prior de Mollens, seu ille qui res Romanimonasterii in Mollens possideret. - Cartul. Qui était ce prieur de Mollens?
En 1284 il y eut encore un échange de terres à Mollens entre le même Jean de Mont et Romainmotier. [retour]

244 Chaque frêste payait une coupe annuelle de froment et deux d’avoine, mais était franche de la redevance d’un chapon et six deniers à Noël. - De plus une femme n’ayant pas d’attelage dans sa maison (non habens operarium ad rotam in sua domo) était franche du tribut entier. — Arch. de Romainmotier. Recognois. Chalvini de 1405 et Morattel de 1590. [retour]

245 C’était une taillabilité des propriétés, et non personnelle, ce n’était pas le servage de la glébe. Ils pouvaient renoncer à l’hommage du Prieur, en renonçant à ses possessions, comme à Vallorbes. — Dans le nombre des hommes de Mollens était Raynauld de Vallorbes, et Pierre de Goilles de Mollens (v. s.) [retour]

246 Donation de 100 sols faite à Romainmotier par la dame Poncia de Jais (Gex) et son fils Etienne, en réparation des dommages et injustices du sire Amédée, à Apples et ailleurs. — Cartul. Acte prob. du 13e s. — Parmi les témoins « Stephanus venator ». [retour]

247 « Talliabiles, francos et censuales ». [retour]

248 Jofred de Grandmont donzel bailli de Vaud et Oddon de Pontarlier (de Ponte allie) chevalier, Châtelain d’Yverdun. [retour]

249 Pour les murs à construire et pour la peine de ceux qui devront dédire leur bourgeoisie. Louis de Savoie ratifie le prononcé en 1294. Le sire Amédée « de Valle transversa » était Châtelain de Morges. Si les hommes niaient être hommes du Prieur, on devait croire le serment du dit et de deux personnes de sa suite (sequentibus) dignes de foi, fait devant Louis de Savoie; ou s’en tenir à la preuve faite déjà par devant Guillerme de Montagny alors Bailly de Vaud, Pierre de Pont, Chevalier lors Châtelain de Romont, et Borcard de Fonz. Et si les dits hommes, les bourgeois de Morges ou autres résistaient, le Prince devrait maintenir le prononcé.
Apples avait pris engagement (en 1285), de ne faire serment aucun de bourgeoisie à l’avenir. sous peine de la perte des maisons et autres immeubles tenus des religieux, et quant aux biens meubles sous peine de 60 sols. [retour]

250 Dans la ratification du transact des Clées entre Philippe de Savoie et Romainmotier, en 1286. L’accord ci-dessus n’existait donc pas encore; l’affaire resta sans doute en suspens, quelques années, et un mode de vivre provisoire s’était établi.
Jolens est mentionné au Cartulaire de Lausanne comme paroisse et Morges est passé sous silence, il n’existait pas encore. Le Cartulaire est de 1228. - En 1318, l’Eglise et le Cimetière de Jolens sont encore nommés. [retour]

251 Soit amiables compositeurs, savoir Rodolphe, Abbé de Joux, et Girard de Compeys, Châtelain des Clées. [retour]

252 Merum et mixtum imperium et omnimodam jurisdictionem habet, etc. [retour]

253 En cas de non payement, Montricher ne peut que les « vadiare de avena et capone ». — Décembre 1284. — Cartul. [retour]

254 « Les hommes de Romainmotier de Jolens peuvent par coutume ancienne, se vendre l’un à l’autre leurs immeubles sans cette permission » est-il dit.
En 1318, 14 personnes au moins, bourgeoises de Morges, font cette reconnaissance, promettant de payer les censes indiquées, en froment, vin, argent. Sceau de Girard de Dizy Châtelain de Morges, chevalier, et d’Etienne, Doyen d’Outre Venoge. - L’un d’eux, Jean Morel, voulant, en 1328, être agréable aux religieux comme il convient (plaudere ut decet), assure mieux sur des terres sa part de cense. — En 1355 un terrain de Jolens est reconnu mouvant de l’Eglise de Romainmotier et « laudimium » devrait lui en appartenir s’il venait à se vendre. [retour]

255 Acte de 1318, reconnu intact en 1356 par l’official de Lausanne. — Il spécifie 12 vignes, 14 pièces de terre, 2 oches, un pré; 44 sols de cense, 3 coupes d’avoine, 4 bichets de froment, 4 buccella (?) de cense; et des dixmes à Jolens. Pour le tout il devait une coupe de froment de cense et 2 1/2 setiers de vin, « per clos ». - Il fait ce don « pro multis serviciis, obsequiis, gratiis, auxiliis, curialitalibus » et aussi pour son utilité évidente, dit-il. [retour]

256 In facie ecclesiæ legitime desponsata et secundum claves ecclesiæ. [retour]

257 En 1242, par ex., Gui de Ogo, chevalier, mari de Dame (dominæ) Petronille fille de Ricard chevalier de Jolens, abandonne à Romainmotier des droits sur un Cheseau (casalis) à Jolens. — Cartul. [retour]

258 En 1496, Pierre Viguerosi, chapelain de l’autel de St. Jean-Baptiste dans l’Eglise de Morges, reconnait tenir de l’insigne prieuré de Romainmotier des possessions dans le vignoble et territoire de Jolens. [retour]

259 In villa Vouflinges, mansos novem. [retour]

260 J’en place une en note, ne sachant si c’est à Wufflens qu’elle se rapporte, quoique placée dans les Régistres des Archives Cantonales, sous ce chef. - Tolbertus et sa femme Erchimberga donnent à Dieu et à St. Pierre de Romainmotier tout leur acquis (omne conquestum) et ce qu’ils ont acheté dans la ferme (villare) appelée Wolferio, soit 112 sols de capital et un char de vin. — Donation faite pour remède à l’âme et pour que Dieu pardonne les péchés. — Et si quelqu’un voulait s’en emparer par violence, qu’il soit excommunié et anathématisé de la part du Dieu Tout-Puissant, de Sainte Marie, des Saints Apôtres Pierre et Paul et de tous les saints de Dieu; et que sa part soit dans les profondeurs de l’Enfer, avec Judas qui trahit le Seigneur.
Charte fort antique par sa teneur, mais sans date. [retour]

261 Ad locum Romanimonasterii ubi dominus Hubo Abbas praesse videtur. [retour]

262 Il fait ces donations du laud de sa mère et de sa femme. Il donne aussi à Romainmotier la moitié de l’Eglise de Saint-Etienne dans le Comté de Vaud; « omnia in villa Dalletis », soit un lunaticum avec ses appendances; et à Firiroles tout ce qui doit lui revenir. — Témoins Adalric du Château de Grandson (de castro Grancione) et ses frères Philippe, et Chono, Adalbert et Witbert. La Charte est sans date antique, mais paraît du 11me siècle. L’Abbé de Cluny Hugo (Hubo) vécut de 1049 à 1109. Et les Grandson cités, connus par d’autres Chartes, sont aussi de cette époque. La date moderne de ce titre 1230 est absurde. — Arch. Canton.
Un lunatique était le terrain que deux bœufs pouvaient labourer pendant une lune. — Du Cange, Gloss. [retour]

263 Donation de l’Eglise de Cossonay à Romainmotier: « promitto eandem pacem tenendam perpetuam in obedientiam de Wolflens, quam et in supra dicta ecclesia » (de Cossonay). Arch. Cant. [retour]

264 De Vaute, sauf « costumia », que cette Terre de Turonbert doit annuellement au dit Willerme, sire de Wolflens, un vendangeur en temps utile, et un pain, avec une certaine coupe d’avoine. Temoins: Henry le moine qui a écrit; les Chapelains d’Apples, de Rivirola, de Wolflens; après eux, Humbert, Willierme, Crassus, chevaliers de Wolflens; Pierre, Chevalier de Sivirie, Cono, Chevalier de Chervona; Willierme clerc « nepos aurant » (v. s.) Willierme « filius maioris ».
Pour rendre le tout inviolable il fait apposer le sceau de Jean dit de Cossonay en 1223. [retour]

265 Sauf 20 poses dont Jordane disposera à son gré. - Témoins Etienne de Chesaus, Willierme de Grancie, Girard d’Esclépens, et Willierme le jeune d’Esclépens, chevaliers. Pierre Derria, Jaques dit Apia, « Johannes de Clausu » . Le trésorier de Lausanne Willierme, à la demande de Willerme et de Jordane, appose son sceau, l’an de l’incarnation 1246. — Il n’est pas dit que ce Willierme soit le même que celui de l’acte précèdent. [retour]

266 « Girardus de fonte, cum heredibus, et tenemento eorumdem ». Ténement, portion de terre concédée sous service et redevances. [retour]

267 Prenons pour point de comparaison le prix d’une journée de charrue à Romainmotier qui dans le 15me siècle, c’est-à-dire, au moment où l’argent avait le plus de valeur (avant la découverte des mines de l’Amérique) se payait 3 sols 1/3, et nous trouverons que ces 15 sols, pouvaient valoir de 40 à 45 francs de notre monnaie. — Or en joignant l’impôt militaire à l’impôt foncier d’une petite possession de nos jours, etc. etc., on dépasse bien facilement cette somme! — Arch. Cant. [retour]

268 Et leur devoir hommage lige; sauf les droits du sire de Cossonnay et d’un autre, dont il tenait sans doute aussi des possessions. [retour]

269 Une partie du village de l’Isle s’appelle encore Chabye.
En 1217, on trouve, comme témoin, dans un acte passé à Sivirie pour mettre en harmonie l’Abbaye du lac et le sire Humbert de Volflens sur des donations, Willierme, chevalier de Chabye, c. à. d. possesseur de ce fief, pour le quel il devait le service militaire. — Il pourrait être la tige de cette maison. [retour]

270 Le Couvent devait agir à l’égard de Jaques comme un Seigneur est tenu de le faire vis-à-vis de son vassal, et Jaques devait à la mutation « tenentis » (du tenant fief je pense), quelques « cerotecas novas (?) » au Prieur. Novembre 1278. — Le même mois il assigne en fief aux religieux, ses possessions à Germagny (à la Côte près Rolle), et ce en exécution de sa promesse au lieu des 12 poses à Chabye. — Cartul. [retour]

271 En 1350. Jeannot et Reymond, fils de Jean de Chabye, donzel, demeurant à Volflens la ville, partagent les biens paternels y compris la sixième part de la grande dixme de Vouflens la vila, en blé, avoine et vin. Or Jean devait supporter pour lui et son frère la charge de l’hommage envers le Seigneur de Cossonay et percevoir pour cette charge 2 muids de vin de cense annuelle, à eux vendus par le sire de Cossonay pour 50 livres et par lui redimables à ce prix. [retour]

272 Composée des religieux Jaques de Dyvone, camérier, Etienne Aymonod, doyen, Jean de Sinarclens et Jaques de Agie; puis aussi de Jean Maioris, de Jean et Anthoine de Seyssel alias (autrement) perruta frères, de Bastard de Clarmont et de Jean de Galera, donzels et conseillers du Prieur. [retour]

273 Nycod réserva sa féauté envers le sire de Cossonay et un autre.
28 Janvier 1429. Arch. Cant. Comme cet acte et le précédent se contrôlent l’un l’autre! — 30 solidatas terræ, c. à. d. des terres du revenu de 30 sols. [retour]

274 27 avril 1359. Wufflens la ville n’était pas de la Terre de Romainmotier et ainsi non compris dans les Aydes dues au prieuré pour réemption d’un revenu, engagé du consentement commun. - Mais par cette aliénation la clause de la donation de Rodolphe (v. s.) n’était-elle pas en souffrance? Le Prieur avait-il obtenu une dispense ecclésiastique? [retour]

275 En 1350, par ex., un différend s’éleva entre les Cossonay (Aymon et Jean son neveu) qui prétendaient avoir en vertu du droit commun (de jure communi) et comme Seigneurs supérieurs (tamquam ad dominos superiores) mère mixte impère et omnimode jurisdiction sur les hommes et les possessions des Seigneurs de Wufflens, dans ce village. Ceux-ci objectaient. Des arbitres (Girard de Cuarnens et Willierme de Pampynie chevaliers) décidérent: que la connaissance des délits commis par les hommes des sires de Wufflens et leur punition appartiendrait aux Cossonay, mais les biens des délinquans aux Wufflens.
Si en revanche quelque étranger commettait délit sur les possessions des Wufflens, le jugement, l’exécution et la moitié des biens du délinquant seraient aux Cossonay, et l’autre moitié seulement aux Wufflens etc. 18e février 1350 . - Arch. Cant. [retour]

276 Et secundum consuetudinem lausann. lonsengire (?) et distinguere et per personam etc. [retour]

277 Faire la première enquête probablement. [retour]

278 Ad ipsum delinquentem seu malefactorem executandum seu faciendum voluntatem dicti domini de Cossonay. [retour]

279 Bona mobilia et hereditates delinquentis moventes à dictis religiosis, ipsis debeant remanere, alia bona vero mobilia quæ essent penes nos dominum, nobis perpetuo remanere debeant. [retour]

280 Si les hommes des religieux encouraient « banna seu barras ructas » dans les chemins et les pâturages de Wufflens, les religieux les percevraient, en dédommageant toutefois la partie offensée, selon la coutume de Lausanne. — Encourues sur terres mouvantes des sires de Cossonay, elles seraient perçues par ceux-ci. — Et vice versa, encourues par des hommes des sires de Cossonay sur terres des religieux, elles leur appartiendraient. [retour]

281 Afin que si les hommes des religieux encouraient offenses, ou bans, touchant des possessions de la mouvance des religieux, adjacentes (tangentes) aux chemins et pâturages de Wufflens, ils pussent les percevoir. [retour]

282 Pugil, c’est proprement un Athlète qui se bat à coups de poing et de ceste!! [retour]

283 Ad dictum duellum faciendum seu ad libitum nostræ voluntatis. [retour]

284 « Victum et Condempnatum ». [retour]

285 Par le Couvent et le Baron; voyez note 279. [retour]

286 L’acte réserve que les religieux pourront construire sur leurs possessions de Wufflens un moulin et un battoir, mais pour leurs hommes seulement.
Des deux parts on promet fidèle observation du tout. - Le 11 Juillet 1385. — Archives de Cossonay. [retour]

287 « Fossaliare ». [retour]

288 Le 14 Décembre 1414. Arch. de Romainmotier.
A ce titre ne se trouve point annexée de sentence favorable au Couvent, et nous ignorons la fin de cette affaire. [retour]

289 Voy. note 275. — Pourquoi les de Wufflens ne sont-ils pas mentionnés en 1385; étaient-ils éteints à cette époque? — Les titres de nobilis et dominus qui leur sont donnés dans d’anciennes chartes dénotent une haute noblesse « nobilis Reymundus dominus de Volflens 1223 ». [retour]

290 Dernièrement le Seigneur de Coss. a retenu encore, etc., l. c. [retour]

291 « In villa de Voufflens la villa dominus Comes, seu ejus predecessores, illud jus (la cense des Clées) domino quondam de Cossonay titulo venditionis perpetuæ alienavit seu alienaverunt, jam diu est ». — Recognaiss. Chalvini 1405. — Arch. Romainmotier. [retour]

292 Souvent les lods remplaçaient la mainmorte; à Lapraz, par ex. [retour]

293 Témoins Cono, dit Blanc, de Bassins, son frère, « Marinus de Villa Quarnensi ». — Cartul. [retour]

* Dans un différend. - Le Prieur se plaignant qu’on lui avait pris 12 gerbes sur cette dixme et qu’on refusait de les rendre, soit, pour leur valeur, 2 coupes de froment et 3 d’avoine, selon l’estimation commune; 5 coupes soit 20 quarterons pour 12 gerbes! — Le rée, Gorgo de l’Isle, nomme pour garant (caution) Girarde, fille de feu François Frelon, donzel, femme d’Oddet de St.-Loup; il fut condamné. [retour]

294 L’acte est probablement du 12me siècle. Communiqué par M. de Gingins. [retour]

295 Arch. Canton. [retour]

296 Dans ce titre, rappelé encore en 1363, se voyent sans doute les débris des 5 mansi pleni et condamina 100 jugerorum. Mémoires de la soc. I. liv. Charte II. [retour]

297 Arch. Canton. [retour]

298 Arch. Canton. Hugo Gaschet fait ce don du lod de son fils Nicholas. [retour]

299 Cartul. [retour]

300 Le père de Jean s’appellait Richard de Yens. L’acte se trouve aux Arch. Canton. [retour]

301 Mais en se réservant l’Eglise et la dixme. — Nous y reviendrons. [retour]

302 Il y avait, outre des vignes, au moins 40 poses de terres arables. Il n’est pas douteux d’après les noms de lieux voisins, Lonay, Préverenges, Escublens, par ex., cités dans l’acte, que Eschagnens ne fut Echandens près Morges. [retour]

303 Cartul. Arch. Cant. [retour]

304 Cartul. [retour]

305 Cum jure, servicio, usagio, homagio, in quibus, de jure aut consuetudine tenebatur. — Cartul. [retour]

306 Qui fit, jusqu’en 1425 environ, partie de l’Evêché de Lausanne. [retour]

307 Cartul. et Arch. Cant. v. s. [retour]

308 Du consentement de sa femme Alays, et de ses enfans Jean, Henri, Rodulphe, Ysabelle et Agnès. [retour]

309 Quid quid possideo … vel alius nomine meo possidet … in hominibus et tenementis ipsorum cum serviciis prædictorum et terris cultis et incultis, nemoribus cum fondo ipsorum, vineis, arboribus, censibus, avœriis et dominio omnium prædictorum et singulorum in villis, etc. [retour]

310 Excepté la grande dixme de Gillie. — Champagny, territoire entre Gilly et Bursinel. [retour]

311 Cum dominio rerum prædictarum, directo dominio rerum prædictarum, dicto priori et suo conventui reservato. [retour]

312 Yblion appose son sceau et fait apposer le sceau de Conon Abbé de Bonmont à l’acte, en Octobre 1276. [retour]

313 En 1295, l’acte en fut vidimé par l’official de Lausanne. [retour]

314 Arthaud prétendait encore à la dime de demi-pose de vigne du clos du Prieuré de Romainmotier de Bougel, et de plus au droit de tenir des assises (assisias) dans les chemins publics de Brussins, pour administrer la justice à ses hommes de Brussins. [retour]

315 C’est-a-dire un revenu de dix livres assuré sur des terres, « videlicet super personatum de Brussenel », et le Prieur devra, « ipsum personatum facere valere una cum decem libris dictæ monetæ per Receptorem de Brussins dicto Arthaudo et suis solvendum ». Et si le personat (ou patronage) de l’Eglise de Bursinel vaut plus, le surplus restera au Prieur.
Item, l’h. du Prieur, delinquant dans la seigneurie de Mont sera remis au Prieur et vice versa, et ce, pour bien de paix. Enfin si Arthaud et ses successeurs peuvent prouver leur droit sur cette dime et cette tenue d’assises, on le respectera. [retour]

316 Mais les héritiers d’Arthaud n’en seraient pas moins hommes liges du Prieuré. [retour]

317 Prieuré sous l’autorité directe de celui de Romainmotier. [retour]

318 Témoins Père en Christ Jordan de Escublens, Archevêque de Nasareth (Nazarenensis); Girard bastard de Neuchâtel, et Vauthier de Colombier, chevaliers; Pierre de Seyssel, sire de Saint-Cassin, et Nicod de Divone, donzels, et Mermet de Alamant, procureur de Vaud.
Avec sceau du bailli de Vaud, Louis de Bière, chevalier. — 13 Juillet 1392. Indiction I. [retour]

319 Y compris cent poses de bois au dessus de Bursins. [retour]

320 Le 2 Juin 1403, en présence de Jean, Mayor de Romainmotier, et Jean, bastard de Clarmont, donzels, et des religieux Aymon de la Molière, doyen, et Rodolphe Chalanger, aumôsnier de Romainmotier. [retour]

321 Assignées sur le patronage de l’Eglise de Bursinel, toujours rédimables pour deux cents livres, et reversibles au Prieur à défaut de postérité. Ce qui avait eu lieu par la mort d’Arthaud de Mont sans enfans. [retour]

322 Pour les dimes de vin et blé qu’elle posséde: à Gillier, Saint Vincent, Brussins, Brutignier, Dulict, Brussinel et Verney. Item pour tout ce qu’elle posséde, ou autre à son nom, dans les villages et territoires de Vinsiez, Gillier, Saint-Vincent, Brussins et Brutignier et dans les vaux et forêts qui sont au dessus des villages de Gillier, Brussins et Saint-Vincent; bois dans lesquels le Seigneur de Romainmotier a l’affouage pour sa maison de Brussins. [retour]

323 Tenant ses mains dans les mains du Prieur, avec intervention du baiser d’alliance (osculo fæderis interveniente).
Présens, les curés de Mont-le-Grand et de Romainmotier, nobles Jean Maioris de Romainmotier, Etienne de Lucinge, Jean de Seyssel, Anthoine de Montagny, Etienne de Senarclens, Jean Gaudil, Guillaume Mistralis de Brussins, etc. — Avec sceau du Bailli de Vaud, Guillerme de Genève, sire de Lullin, chevalier. [retour]

324 Renseignement de M. de Gingins. [retour]

* Notons bien que les possessions dont nous allons parler n’ont aucun rapport avec la suzeraineté dont il a été question jusqu’ici. [retour]

325 Une version dit: « Et in comitatu equestrico villam Brussini et ecclesiam in honore, etc. — Grosse d’Egr. Grineri de 1578 à Brussins. » J’ai, dit-il, de mot à mot, inséré la teneur des escripts anciens ». — Toutefois il n’y avait pas alors de grandes connaissances historiques car l’acte qui nous occupe est intitulé. « Don faict par Rodulphe Roy des Romains »!!! — Dans le Cartulaire il y a: « in villa Bruzinges in comitatu equestrio, ecclesiam, etc. » — A quelle version donner la préférence? Il faudrait connaître l’original, — Il n’est pas douteux qu’il n’y ait quelques inexactitudes dans le Cartulaire. [retour]

326 « In Brucino et Balgeello » (Bougel, clôs de vignes près Brussins). Témoins Philippe de Grandson, et Pierre de Pontarlier. - Charte communiquée par M. Duvernois, et tirée des Arch. Canton. — Nous reviendrons sur les sires de Joux. [retour]

327 Avec faculté de le reprendre pour le même prix. Témoin Wouchet de Arnay. — Cartul. [retour]

328 Dullit est appelé quelquefois Dulut. — Jean de la Dulyve (?) [retour]

329 Ce sont les mêmes possessions qu’Aymon de Prangins prétendait être de son fief (v. s.). [retour]

330 Pro clauso de Bugez (Bougel). — Vraie pomme de discorde! [retour]

331 Dampna ac gravamina gravia incurrerunt. [retour]

332 Solidatas, revenu de 40 sols assuré sur des terres.
Pour ces 40 livres (de capital), lui, et après lui, l’un de ses héritiers, devaient successivement être hommes des dits religieux, « salva amissione terræ ». — Cartul. [retour]

333 Absque emolumento domus de Brussins, etc. — 9 avril 1326. [retour]

334 Perpetuam et devotam usque ad mortem. [retour]

335 Savoir les prud’hommes curés, ou recteurs de Romainmotier, Arnay, Agie, Brethonières, Valorbes, Brussins, Brusenay (Bursinel), Arsie et plusieurs autres. — Fait à Romainmotier, mardi avant la fête de St.-Jean Baptiste 1328. [retour]

336 22 Mai 1329. [retour]

337 Genève 21 Juin 1329. [retour]

338 Les extrêmes se touchent, preuve en soient les tribulations sans cesse renaissantes de Romainmotier avec les Grandson au sujet des donations de Rodolphe. [retour]

339 Un moulin, seul de ce nom, se voit encore. [retour]

340 Nos vir illustris. — Fait en février 1290, — payables à Aubonne. Les sires de Thory et de Villars étaient Barons d’Aubonne. [retour]

341 Fait dans le cimetière de Gillier en présence des nobles Amédée, sire de Viry et du dit Mont le Vieux (montis veteris): Amédée de Rossilion, frère de Girard, Guillerme Mistralis de Mont, Aymon de Lucinge, Humbert de Lucinge, Nycod bastard dit de Glant, etc. [retour]

342 Aliquem e progenie prioris!! [retour]

343 Ce Châtelain s’appelait Jaquemet de Magnye. [retour]

344 Dederunt … plenam potestatem … arbitrandi et pronuntiandi. [retour]

345 On ne tiendra point d’assises au lieu en contest. - Les accusés n’entreront point à Brussins — les gages enlevés seront rendus. — Thonon 10 avril 1374 .— Présens Aymon de Chalant, Prieur de Burget, et G. de Roverea. [retour]

346 Gui de Prangins, professeur de l’un et l’autre droit, « proponitus lausannensis » (le même qui fut Evêque), et Anthoine Champion, Châtelain de Morges. Ils examinèrent les dépositions de divers témoins sur une série de questions, dont malheureusement nous n’avons que les réponses, et encore souvent les témoins se contentent de dire que le fait est vrai, sans l’indiquer. [retour]

347 Capistro ponito in collo suo (capistrum. C’est proprement, un licol, ou une muselière). — Un autre témoin avance sur ouï dire que par cette raison ce Perretus avait fait hommage à Catherine. — Un autre article analogue pour un personnage accusé de la mort d’une fille de Brussins. — Un autre, homme lige du Prieur, rompit une lettre dans la seigneurie de Mont, dans une vigne qu’il cultivait pour Bonmont et le Prieur recouvra « bannum » de ce délit. [retour]

348 Le 9 mars 1375 an pris à la nativité du Seigneur. [retour]

349 Droits et jurisdiction exercée à cause du Château de Mont et autrement, soit sur leurs propres hommes, soit sur ceux du Prieuré, soit sur les étrangers. [retour]

350 Et cette valeur serait assignée sur les possessions du Prieur dans le Mandement de Mont, en dehors de Brussins et Verney, si possible, et sur icelle Galleis et sa mère auront omnimode jurisdiction. [retour]

351 Soit des biens du Prieuré en dehors de ces deux villages et dans le mandement de Mont, soit en numéraire. [retour]

352 Surtout à cause « du merum et mixtum imperium » sujet du débat, et de la jurisdiction omnimode que Galleis et sa mère avaient sur tous les étrangers, délinquans ou habitant dans ces villages; jurisdiction abandonnée par eux, et dont il n’y a pour le Prieur, aucune autre « recompensatio » à faire. — Le Prieur n’aura point de fourches patibulaires dans ces deux villages, mais les délinquans seront punis à Romainmotier, comme ci devant. — Si un homme du Prieur est délinquant dans le mandement de Mont, Galleis et sa mère, ou leurs successeurs, en auront connaissance, mais pour le Prieur, et vice versa. [retour]

353 En échange le Prieur à remis certains hommes du prieuré et des revenus à Gillie Vinsie, et autres villages du mandement de Mont; plus 300 florins pour la jurisdiction et le mère et mixte impère; plus 220 florins pour « iteratus valor » de la cession de Dame Luque, et celle-ci se tient pour contente. [retour]

354 Nous y reviendrons. [retour]

355 « Quae bona seu propria allodia … unacum aliis quibuscumque bonis per priorem tradendis sint et perpetue maneant de feudo et directo dominio nostro » dit le Comte.
Voyez Hallam, histoire de l’Europe au moyen âge. [retour]

356 Dame Luce ou Lucque de la Baume, était veuve de noble et puissant Amedée de Viry, sire de Mont.— « Quid quid juris, actionis, racionis, dominii, usagii, possessionis, dreyturæ, et proprietatis habet in eisdem (villis) racione Mistraliæ. » Et cela « pro bona et sufficienti satisfactione per dictum Guillermum Mistralem exinde per dominam Lucam, Bonam de Seyssello et Amedeum predictos facta, in recompensationem Mistraliæ prædictarum villarum et territoriorum eorumdem. » — Arch. Canton. [retour]

357 De Mestral Aruffens. [retour]

358 Les fonctions des Mestraux de Rue et Romont nous sont connues par Kuenlin, celles du Mestral d’Orbe par un manuscrit de M. Olivier, de Saint Cierge. - L’ancienne famille de Mestral de Rue existe encore.

MESTRAL.

Le Mestral de Romont, avait le droit de marquer les mesures de graines, vins, huiles, ainsi que les poids et les aunes, c’était l’étalonneur de nos jours — (1368).
A Orbe. « Le Mestral doit trancher toutes les mesures, être appellés les gouverneurs de la ville, et les signer du signet du Seigneur » (1405).

Orbe. « Si quelqu’un se sentait pour agravé en aucune sentence, il doit appeller de la sentence du Mestral au Châtelain d’Orbe ».
Le Mestral de Rue (d’après une enquête de 1287) « doit tenir audience et rendre coignaissance (prononcer) sur toutes clâmes (plaintes), nonobstant le Châtelain, moyennant appel à lui. »

De plus il doit percevoir le 10e denier des échûtes et des bans (amendes); une coupe d’avoine de tous les ténemens taillables; le 10e denier des lods de cette condition; l’or et l’argent de tous les délinquans condamnés à mort et remis à lui pour l’exécution, et la dixième partie de leurs autres biens existans rière le mandement de Rue; pour cette exécution il a les taillables à son commandement.

MAYOR DE ROMAINMOTIER.

Le Mayor de Romainmotier doit signer (signare) et sceller (sigillare) les mesures du blé et du vin dans la Terre de Romainmotier. (14e siècle).
Il doit justifier les poids et mesures de toute la Terre. (15e et 16e siècles.)

La Mayor de Romainmotier doit ouïr les causes devant sa maison. — Il ne peut donner sur les immeubles qu’un premier avis, et ne juge les causes de biens meubles que jusqu’à la valeur de 40 sols, renvoyant les autres au Châtelain de Romainmotier. — Il y a appel de la sentence du Mayor à la cour du Châtelain.

Le Mayor de Romainmotier est franc du charriage des dixmes. — Il doit prendre les délinquans, les amener à la maison des religieux et les transmettre à leur nonce; il a sous lui un officier subalterne. — Il n’a à retirer des biens des délinquans que 4 sols laus. et 2 ustensiles. — Il a droit à 6 deniers dans les bans de 3 sols encourus pour mesures fautives, etc. [retour]

359 Cependant il y avait à Vallorbes un Mayor et un Mestral, et même, appel de la cour du Mayor à celle du Mestral. — Il y avait aussi à la Vallée du lac de Joux des Mestraux de l’Abbaye. — Du reste comme il y avait des Mayors de diverses catégories, depuis celui d’un petit village, Croy ou Lapraz par exemple, jusqu’au Mayor, chef des quatre paroisses de Lavaux, nommé de Lustrier; de même il y avait des Mestraux de toute taille. [retour]

360 Rodolphe, sire de Langin, chevalier. [retour]

361 Le Prieur choisit Otton de St. Martin, Prieur de Villars les moines, et Arthaud, Nicolas coseigneur de St. Martin chevalier. [retour]

362 « Figuram condecentem … factam in una camisia plena paleis … habentis capistrum in collo, etc. » — Le Bailli termine par une réserve des droits d’Arthaud qui montre qu’il n’était pas lui même très-sûr de la justice de sa sentence, tant les diverses jurisdictions se croisaient. [retour]

* Des propriétés. [retour]

363 C’était le Châtelain de Romainmotier seul, qui infligeait la punition corporelle des crimes, bien que le jugement pût se faire à Brussins. [retour]

364 Grosse Pollens. [retour]

* D’autres personnes se reconnaissent justiciables du Prieur, aussi longtemps qu’elles résideront à Brussins. [retour]

365 La même réserve est faite pour les autres hommages nobles.
Ceci n’est point en contradiction avec l’absence de la condition taillable dont nous avons parlé, comme le reconnaîtront ceux qui sont occupés de ce sujet obscur encore. Les tailles dont il est ici question étaient des prestations d’argent dues en certains cas particuliers, et dont la valeur était probablement fixée; une sorte de contribution extraordinaire. [retour]

366 Après la mort d’Anthoine Evrard, Aymon Evrard, donzel de Nyon, fit hommage au Prieur pour ses biens en 1497. [retour]

367 Pour des biens qu’il tenait par succession de noble Salucia, sa mère, fille de feu Glaude de dessous l’Eglise. [retour]

368 Alzeacius de Taraux, Sous Prieur, Aymon Maioris, doyen, Hugonin de Cholao, Camérier, Glaude Michaudi, grand Célerier, Anthoine de Cholao, Sacristain, François Durand, Aumônier, Philibert de Lugrin, Infirmier, Hugonin de Murs, Chantre, Pierre Thorench, Pierre de la Ravoire, George de Livron, Nicod Musard, Anthoine de Bignyn, Louis de Bellegarde, Pierre de Dullit, Louis Cuender, Pierre Nicod, Jean de Livron, et Etienne de Saint Saphorin, conventuels. [retour]

369 « Actenta ingenuitate ejus personnæ. » Ingenuitas signifie une condition libre. [retour]

370 Ut efficacius feodales efficiantur. [retour]

371 Mais seulement pour son usage, sinon cette concession lui sera retirée. [retour]

372 Homines dicti loci de Verney esse solebant talliabiles et manus mortuæ sed tamen fuerunt affranchiti per venerabilem et felicis recordie dominum Johannem de Seyssello tunc priorem et etiam per conventum insignis prioratus Romani monasterii ut constat instrumento … dato apud Romanum monasterium die 28 mensis Decembris anno domini 1403. — Grosse Pollens à Bursins. [retour]

373 Cum animus jocundetur relatu defunctorum, gesta videlicet eorum scrutendo, unde providus efici potest; placuit … quæ fuerunt in Verney nomina et loca casarum scribendo, ad modum textoris, huic adjungere operi, ut ex hoc discat quisque mondum labere. [retour]

374 De la famille des Mayors d’Arnex, Cuisinier du Couvent, etc. - Voy. Revue suisse, t. III, p. 132. [retour]

375 Etiam in Brussino et Dulicio magna quantitas focorum ruit. [retour]

376 L’acte fut passé « publice in campis » de Verney. [retour]

377 Un moulin à Verney, une vigne entre Vinzel et Luyns, un pré à Brussins. Il avait fait cet hommage en 1331, du consentement de sa mère et de son frère Mermet. Celui-ci avait alors cédé à son frère, qui le méritait bien (bene merito), toute sa part à ces biens, et Nycolas avait reconnu qu’en cas de décès sans postérité ceux-ci devaient retourner au Prieur. — Témoins François de Colombier, Hugonet de Dulict, donzels, « dominum Henry Civis de Brussins », etc. [retour]

378 Non plus nourri mais membre légitime de cette famille. [retour]

379 1363, par Willierme fils d’Hugonet à Arthaud Allamand. En 1367, Henry de Siverier Prieur, permet à Pierre de D. donzel de transférer ailleurs le moulin de Verney. — En 1377, Jean de Dullict prête hommage au même Prieur. Témoins Louis de Cossonay sire de Berchie, chevalier, Humbert de Colombier Bailli de Vaud, sire de Willerens, Pierre de Siverier donzel, Jean de Senarclens donzel. [retour]

380 Fait à Romainmotier, sous le réfectoire, près du Cloître le 4 Juin 1497. — Senarclens, Sonarclens, Synarclens, Sunarclens se trouvent également et sont synonymes. [retour]

381 In quo potest molere dictus de Sonarclens sine emina et post eum quem inveniet molentem in eodem molendino. [retour]

382 On dirait d’après la Grosse Pollens que c’était sur tout le village et son territoire; la même expression est employée que pour Brussins et Verney. [retour]

383 Sur la clâme de Jean Vullierme de Sarraul. [retour]

384 En 1445, noble Olivier Mistralis, Châtelain de Brussins, fit payer un ban de 60 sols au Vice Châtelain de Rolle, pour avoir voulu exercer quelque jurisdiction à Dullict. — Tous actes tirés de la Grosse Grineri à Brussins. [retour]

385 Je n’ose dire qu’il tenait en fief de Romainmotier toutes ses possessions à Dullict, la chose n’est pas claire. [retour]

386 Ob crimine heresis appertum in Joh. Gex et de quo convictus, in persona et bonis adjudicatus fuit. — Il fut mis à mort. [retour]

387 Parmi les censitaires, Girard Bichet, colon (colonus) de Nicod de Sergier, donzel, — dom Hugues Des vignes (de vineis), vicaire de Bructigny, etc. etc. [retour]

388 Sceau de Rodulphe, abbé du lac de joux. Cartul. — Nous ne disons rien des biens ecclésiastiques de Romainmotier à Gimel, nous y reviendrons. [retour]

389 Du nombre Louis Debonneville, Jean Marugley (marrilier? voyez les offices des francs de Romainmotier) Claude de la Porte (de Porta) donzel de Bougie, la confrérie du Saint Esprit, de Gimel, etc.
Les fiefs d’Aubonne, du Comte de Gruyère et du sire de Rochefort (de Menthon), coudoyaient à Gimel le fief de Romainmotier. [retour]

390 Saint Oyens, 5 poses de terre, une oche, une part de maison. — Saint George, 4 ou 5 poses de pré. — Saubraz, pré, terre arable et 15 deniers de pension. [retour]

391 Cinq poses environ. [retour]

392 Jean Challet donzel, et Jaquemaz fille de Nicod du Clos femme de noble Guillerme Monestier, qui reconnait à sa place, attendu qu’elle ne pouvait « ad præsens comode ambulare ». — Ils devaient en commun payer le gardien du clos de vignes de Bougel.
Il y avait à Perrueys un fief du sire de Coudrée. [retour]

393 Impôt en nature assez semblable à la dixme. [retour]

394 Deux poses de vignes, devant terrage (v. s.), étaient en 1490, tenues par les enfans de Guerric de Germagnie et du Seigneur Girard de Chabbie. [retour]

395 Glaude Jaillet, de Givrin tenait de Romainmotier des vignes à cense, d’autres à mi-vin. - Nicod dou Crest en tenait à tiers vin. - Noble Guillerme de Alinge, bourgeois de Rolle, tenait de Romainmotier une oche et un cheseau de maison, etc. [retour]

396 Environ 6 poses. — Tout ce que dessus d’après la Grosse Pollens Arch. de Bursins. [retour]

397 Recipio in guarda mea et tutela, salva garda Comitis Sabaudiæ. [retour]

398 Aymon reconnait en avoir déjà reçu un pour la première année. Sceau de Prangins. — Cartul. [retour]

399 En 1489, et quatre pressoirs. — Le clos de Brussins, 31 poses, le clos de Combes 9 poses, — en Milluen 5 poses — de la domp Williemaz 2 poses. - En la Jonchieriz 4 poses — à Dullict 2 poses — le clos de Brussinel 7 poses — le clos de Bougel 7 poses, etc. Quelques unes cultivées au tiers vin, d’autres à mi-vin.
Le domaine du prieuré à la Côte comprenait encore: 19 seyturées de pré. - Treize poses de bois.— L’affouage de la maison de Brussin, dans les bois de Mont-le-grand, que le sire de Mont tenait en fief de Romainmotier. Les dixmes, les patronages d’Eglises, etc. [retour]

400 Nous verrons pourquoi. [retour]

401 « Berthetus de Charreriis ». Ces actes concernant le Couvent de Filly (en Chablais) et ses possessions à Bursinel, se trouvent on ne sait pourquoi dans les Registres Copies des actes du ci-devant Balliage de Romainmotier. [retour]

402 Per tradicionem unius calami manualis ut moris est. — On peut aussi traduire une plume à écrire. [retour]

403 On employait, selon toute apparence, beaucoup moins d’engrais qu’aujour d’hui, et l’on connaît son effet. [retour]

404 Deux hommes tenaient en emphitéose, en 1429, de l’Abbé de Joux 2 poses de vigne à Gillie, sous cense de six setiers de vin de la dite vigne, ou autre d’égale valeur (aut alio æquipollente). Si la teneur de cette emphitéose était la même que de celle de Brussinel, les 2 poses de Gillie auraient dû produire, en moyenne, 18 setiers de vin par an. - L’Abbaye de Joux avait une maison et des vignes à Tertignyn. [retour]

405 Il nous est doux de témoigner ici à M. Duvernois notre reconnaissance; explication des chartes du Cartulaire, chartes nouvelles dues à ses investigations, dates, renseignements de tout genre, il a tout mis à notre portée, avec son obligeance habituelle. [retour]

406 « In mallis sive in causis regalibus » et en présence de beaucoup de nobles. Fait en juin, la huitième année du roi Rodolphe, Pontius étant Prieur. — On compte ordinairement les années du règne de Rodolphe depuis le mois d’Octobre 993; quelques chartes, cependant, les comptent dès 991. [retour]

407 Precarias — soit en don à l’Eglise avec faculté d’en jouir sa vie durant. — Il devait en cas de retour donner à Romainmotier 5 livres, et après la mort de Frédoïnus, ces possessions devaient revenir au Couvent. [retour]

408 La dix-septième année du roi Rodolphe, Anselme, Evêque, et Lambert, comes, présents — Lambert serait le dernier comte de Vaud, laïque, de la maison de Grandson, office qui allait être transporté à l’Evêque de Lausanne. [retour]

409 « Habeant potestatem de ipsis faciendi quidquid voluerint sine ullo contradicto ». — Donation plus autocratique, peut-être, dans la forme que dans le fond, car souvent le service était une manière de lettre de rente, changeant plutôt de main que de valeur. [retour]

* Voyez aussi les griefs de Romainmotier contre Adalbert de Grandson, p. 18. [retour]

410 Nous traduisons ici selon l’usage miles par chevalier, ce qui donne pourtant une idée peu juste; la « militia » n’était pas au 11e siècle ce qu’elle devint dans les 13e et 14e siècles. [retour]

411 Multa erant nimis et portare non poterant. — Cartul. [retour]

412 Dans cette même Chau d’arlie, présent, Cuno de Montfaucon. [retour]

413 Les témoins et confirmateurs de cette charte furent, sur la demande de Gaucher: Etienne Joret, Roger de Mulneth (Monnet), Narduin de Strabone, Gaucher de Châtillon, Falco, fils d’Adalgod de Grandson, etc. - Suit une formule d’imprécation. [retour]

414 Nous y reviendrons en parlant de Salins, de Wau, etc. [retour]

415 Cette pièce, découverte par M. Duvernois dans les Archives Cantonales, est sans date, mais peut se fixer entre 1057 et 1066. [retour]

416 Il avait aussi enlevé à Chaffois 314 sols, 7 pièces de gros bétail, 11 brebis (fetas) et 4 porcs. — Et à Monstorerius (sans doute Monstoris, Bulle) 60 sols, 44 pièces de gros bétail, 7 muids d’orge et 3 de froment. [retour]

417 Les sires de Joux, Narduin et Warin, vivaient au dixième siècle, et Aldric dans la première moitié du 11e. — Amaury prétendait de plus avoir le droit de poursuivre les larrons qui se réfugiaient sur les terres du Monastère. [retour]

418 Nihil tortitudinis inlaturum ulterius prelibatis hominibus sive terris. [retour]

419 Et le Comte décrète: que si les hommes de ces villages se prenaient de querelle avec ceux d’Amaury, celui-ci ferait plainte (proclamationem) et que bonne justice serait faite, « qualis fieret exempli causa prolato (prelato?) Hugoni de Siley vel huic Hugoni consimilibus ». Mais que si cette justice était déniée, il se la ferait lui-même. Témoins: Henry et Guy de Ceys, Richard de Montfaucon, Warin d’Usie, Ulric d’Orbe, Waucher de Salins, Letalde de Salins, son frère, Hugues, chancelier et chantre de Saint-Etienne (devenu, en 1067, archevêque de Besançon.) [retour]

420 On peut placer cette charte en 1109 ou 1110 selon M. Duvernois. [retour]

421 Nommée ad spinam. [retour]

422 Un moine Vivianus lui avait déjà prêté 60 sols sur un pré mis en gages. Et il fit le serment de maintenir à jamais ces donations, et d’abandonner toute prétention sur ces terres. [retour]

423 Ad integrum emendari non possent. [retour]

424 Parmi ces ôtages, Lambert du Val de Travers (de Valle Transversa), et Pierre Cuisinier (cocus) de Usiaco (Usie), Ricard et Wicard, Benoît de Pont et Lambert, Fulchard et Landric. — Six otâges furent envoyés (missi sunt) dans ce même plaid. — Deux manquaient, pour lesquels Amaury promit sur sa foi, au Prieur, d’être lui même ôtage avec ses chevaliers Etienne et Morgon, jusqu’à leur envoi, ou s’il ne le pouvait, jusqu’à l’envoi de trois autres de sa maison, au choix du Couvent. [retour]

425 Dalmatius de rupe, Waulcher son oncle, le Seigneur Amédée, Dodon, etc. Fait sous le Prieur Lambert (vers 1109 ou 1110). [retour]

426 Par exemple: Abandon (werpitio) fait par Landric, des fils d’Esemburga, après les avoir vexés longtems sous prétexte qu’ils devaient lui appartenir, enfin reconnaissant que cette conduite était injuste, il les laisse à Dieu et à Saint Pierre de Romainmotier, sous le Prieur Artaud (1092 à 1096).
Ainsi encore, Landric possesseur du Château de Joux, donne à St. Pierre la terre qu’il avait « in arliaco » au lieu de Ste.-Colombe, contre des anniversaires et des présens, et pose le don sur l’autel à la vue de toute la congrégation; « Audientibus, Humberto de Bieria, Garino de Sto. Vincente, et Rodulpho de Brucins. » etc. [retour]

427 Aujourd’hui Bouverens. — Témoins Rotbert et Mainard son frère, Pierre clerc, et Rotbert villicus. [retour]

428 On trouve aussi des dons à Ste.-Colombe, de Rotbert, chevalier (miles) de Bannens, sous Etienne, et de Pierre, chevalier de Pontarlier, à Bannens. [retour]

429 Mos sanctissimus. [retour]

430 Fideles quique nobilium filiis carentes. — Cartul. 1084. [retour]

431 Ut in futurum eis securiter uti traderent. [retour]

432 Petrus vir nobilissimus et seculari honore et progenitoribus magnificus castri quod dicitur Cegias princeps.
La famille de Ceys ou Says, existe encore. [retour]

433 Témoins Wilence fils de Beroard son cousin, et les fils de Wido de Ceys. [retour]

434 Miles vocabulo Narduinus, cognomine brunus. [retour]

435 Laudaverunt donationem, Narduinus et Vivianus filius ejus, Thietbertus et Pontia uxor ejus, Rainaldus Comes (Guillaume l’Allemand), Willelmus filius, Walcherius Salinensis. [retour]

436 Le jour des Kalendes de Mars l’an de l’incarnation 1084, dans le temps du siège (coactionis) de la ville de Rome par le roi Henry, fils d’Henry. [retour]

437 Il réclamait aussi un serf nommé Duranus. [retour]

438 De injuste calumnia resipiscens. [retour]

439 Nous passons beaucoup d’autres donations citées par le Cartulaire (elles sont au nombre de plus de vingt), nous verrons pourtant la donation des Eglises plus tard. [retour]

440 « Si héritage est échu, il doit être payé, et de ce prix la dite Eglise doit à nous rendre la moitié et le héritage lui demoure ». [retour]

441 Pontherlie l’an mil dous cenz sexante saze — avec scel de la comtesse et de son chier signor Philippe de Savoie et Borgoigne, Comte Palatin, son mari. Cartul. Arch. Cant.
Dans l’acte de 1466, que nous allons voir, il n’est parlé que de 5 livres à Bannens au lieu de 25, et de 6 quartiers avène à Ste. Colombe. [retour]

442 Mère et mixte impère. [retour]

443 La justice sur meurtre, vol, et combat en champ clos, et dans ce cas partage des émoluments (v. s.).
Feu le noble homme le grant Jaques de Vatraveurs (Vautravers), au tems qu’il estait Chaistellain de Pontallié pour Monseigneur de Bourgogne, estait aussi juge et Chaistellain des prédécesseurs de l’impétrant (J. L. de Savoie), à Bannens et Sainte-Colombe. [retour]

444 Avec connaissance des amendes de 3 sols seulement, etc. [retour]

445 Protonotaire apostolique, administrateur perpétuel de l’Evéchié de Genêve, et commendataire perpétuel des Abbayes de Saint-Bellin et de Payerne, et des Priourés de Nantua et de Romainmotier. [retour]

446 A Bannens était un pré de 20 seyturées, appartenant à l’Eglise, où étaient dues ces corvées de faux, etc. Il était à cette époque (1466) tenu en fief par nobles Jehan Chevalet et Jehan Goudan.
Les deux parties jurèrent sur l’Evangile d’observer fidèlement cette transaction. [retour]

447 Le Bailli d’Aval, au Comté de Bourgogne, rappelle que barre avait été mise sur les revenus des religieux de Romainmotier à Bannens et Ste.-Colombe, et cela pour deffault de fied non faict, mais que cette main est levée. — 26 août 1407. Une copie de l’acte de 1276 accompagne cette déclaration. [retour]

448 Jean Loys de Savoie dit « quelque contribution qu’ils aient faite de leurs voluntés au deceu de l’impétrant ne luy doibt préjudicier. » [retour]

* Est-ce qu’à cette époque le Couvent avait perdu ses possessions en ces villages? — Charte communiquée par M. Duvernois. [retour]

449 Le Prieur disait (en 1466) que d’ancienneté il avait appartenu à ses prédécesseurs « de taillier et eschantillier toutes mesures de blez et vin, armoyer de leurs armes ». C’était l’office du Maire ou Mayor. [retour]

450 Le 6 juin, l’an 11 du Pontificat de Benoît XIII. [retour]

451 Meyre, Maire, Mayor, Meyer. [retour]

452 Une maison de pierre avec le cheseau, 45 1/2 journaux de terre, 40 seyturées de pré, grange, 12 deniers de cense; le tout pour 25 sols payables annuellement aux religieux. [retour]

453 Percevant eependant pour sa peine et son droit 18 deniers steph. dans les amendes de trois sols, et trois sols dans les amendes excédant cette somme. [retour]

454 De la mayorie et des possessions susdites sauf, toutefois, le droit de fief. [retour]

455 Per traditionem unius calami, ut moris est. — (Faudrait-il traduire calamus par une plume?) — Témoins Wauthier, bastard de Neuchâtel, Pierre de Mollion, Jean, Mayor de Romainmotier, Jean Perrica, donzel, et plusieurs autres dignes de foi. [retour]

456 Puis viennent des excommunications. — Fait à Genève, l’an 17 du règne d’Henry le jeune (juniore, c’est Henry IV). Ce qui porte à 1073. — Une difficulté se rencontre. Lévrier (Chronologie historique des Comtes de Genevois) fixe la mort de l’Evêque Fréderic au huit des Kalendes de septembre 1063 ou 1064 après avoir siègé 37 ans. Il fait succéder à Fréderic Bosard, mort vers 1070, puis Gui, qui gouverna 50 ans. [retour]

457 Ainsi que l’Archevêque de Lyon et celui de Besançon. — Pourquoi l’Evêque de Lausanne n’assistait-il pas à cette visite faite dans son diocèse? [retour]

458 Puis vient un anathême.
Charte sans date, mais probablement assez voisine de la première.
Le Château de Naisey, dont les Seigneurs étaient vassaux de la maison de Montfaucon, ne présente plus que des ruines. [retour]

459 Plus deux serfs à Bannens. — L’acte est sans date, mais postérieur aux précédents. — Cartul. On se rappelle les plaintes sur les dégats d’Amaury de Joux « in Montetorerio » (v. s.). [retour]

460 « Sitis in riveria de Erlia apud Monstoris »: riveria, signifie ici contrée, comme l’allemand revier; note de M. Duvernois. [retour]

461 Noluerunt imputantes ei servicium quod debetur Narduino, etc., sed a proposito desistere nolens etc. [retour]

462 In censu cerae duorum denariorum. [retour]

463 Au temps de Roclenus, Prieur, et de Salierius, doyen, c’est-à-dire au milieu du 11e siècle (entre 1049 et 1060 environ).
Dans un autre acte passé sous le Prieur Guigue et en présence du Comte Renaud (c’est-à-dire la fin du 11e siècle ou vers le milieu du 12e), trois personnes témoignent par serment qu’une femme est serve (ancilla) de Romainmotier pour une cense de cire d’un denier.Cartul. C’est aussi l’opinion de M Duvernois, que cette « ancilla », non plus qu’Aimeric, n’étaient pas chargés d’autres prestations, sauf, peut-être, celles toutes personnelles comme les corvées. — Celles en cire étaient fort communes au moyen âge, où l’on en consommait beaucoup pour le service des autels. — Il est vrai que l’argent avait alors une très-grande valeur. [retour]

464 Fait le 17 des Kalendes de Novembre l’an de l’incarnation 1108, à la dédicace de l’Eglise (de Sainte-Colombe), sous Hugo Abbé de Cluny et Hugues IV Archevêque de Besançon. Cartul. [retour]

465 « In villam nostram Caffeiacum immisit 20 Canes » Clamationes de Amaldrico (v. s.). [retour]

466 Arch. Cant. communiquée par M. Duvernois. — Fait à Romainmotier, le jeudi des nones de mai la 20e année du roi Rodolphe. [retour]

467 La 30e année de Rodolphe. [retour]

468 Sous le Prieur Humbert et le doyen Salierius. [retour]

469 « In quodam homine Enguizone de Morlens. » — Témoins: Rodulphus et Cono, Monachi, Walcherius et Philippus de Crantione (Grandson), Rotbertus de Ciesio (Ceys), Ebrardus de Arguel. — Novembre, l’an de l’incarnation 1111. Etienne, Prieur. [retour]

470 « Quae sibi quasi de franco jure occupasse et vindicasse sicut se habet jurensis consuetudo confidebant (monachi) ». Cartul. - Histoire des sires de Salins, I, 36. [retour]

471 « En témoignage de laquelle chose nous avons mis nostre scel pendant en ces présentes lettres. Ce fut fait l’an de l’incarnation Jésus-Christ, que corait par mil et IIe cinquante et cinq ou mois de may.
Cette charte de Jean de Châlons, dit l’antique, tirée des Archives de la maison de Chalons (coté 52, copie du commencement du 16e siècle), m’a été communiquée par M. Duvernois. [retour]

472 Totius abbatiæ suæ habitaculum transferre volebant et jam pro magna parte transtulerant, en 1230.
Tous ces détails ont été puisés par M. Duvernois aux sources originales. [retour]

473 Spécialement un pré appellé le Cumon de la Rivière. [retour]

474 A défaut de ce payement, ce que les religieux donnent en échange lour demoreit obligie. [retour]

475 Jusqu’à la fontaine de Berot où ni eux (les Châlons), ni les leurs ne peuvent faire pasturer. [retour]

476 Oddes Arcevesques de Besançon scelle de son sceau pendant en témoignage de vérité à la requête des deux partis. — 1289. [retour]

477 L’acte est laudé par Othes, Cuens (Comte) Palatin de Borgonie, et sire de Salins, neveu de Jean et Hugues de Ch. sus dits. - En 1320, l’official de Lausanne le confirme par son vidimus. — En 1431, Philippe duc de Bourgogne donne ordre que l’on paye, après 16 ans d’interruption, les 12 livres assignées « sur la saulinère de Salins provenant d’échange, par Loïs de Châlons, Prince d’Orange et Seigneur d’Arlay »: sans doute il avait confirmé l’acte de Jean et Hugues. — Une chapelle paroissiale fut élevée à Waut: nous y reviendrons. [retour]

478 Mais le « dominus » de La Rivière était alors Guillerme de la Baume (de Balma).
Une famille Meytes de la Rivière reconnait: que si leurs ancêtres ont eu des droits sur la Mayorie et « reciveria seu receptione » de la taille, cense etc., des religieux de Romainmotier à La Rivière, ces droits n’existent plus; reconnaissant tenir ces charges des religieux qui peuvent les leur ôter à volonté, et choisir d’autres mayors et receveurs. — Arch. Canton. 1280. [retour]

479 Sous peine de cinq livres d’or au contrevenant: R. ajoute: « accipio autem a senioribus loci 3 libras de vinea eo quod in conguadio erat » (?) [retour]

480 Quam rustici vulgariter nuncupant Michonem de Wuidric. — Or Isingerius a reçu du Prieur Etienne un cheval et a laudé le tout. [retour]

481 Duo plaustra feno optimo onusta, l’an de l’incarnation 1084, sous le règne de Henri, fils de Henry, la 2e année « romanæ obsidionis ».— Aumône faite « per manum Willelmi, filii Raynaldi, filii Willelmi, Comitum Burgundionum, ut ipse sicut totius ipsius ecclesiæ ita et meæ donationis actor sit et defensor filiumque ejus post eum ». Cartam levaverunt Richardus de Grantione, etc. Cartul. [retour]

482 Quorum auctoritas tanto felicior quanto diuturnior (?) [retour]

483 « Burgundionum » fils de Rainauld, fils de Willelm. [retour]

484 « Sicut et in aliis multis quæ ibidem, deo per illum operante, nobilissime adquisivit. » [retour]

485 Qui hujus loci (Romani monasterii) tunc advocatus jussione domini Abbatis (cluniac.) erat. — Il était Avoué supérieur. [retour]

486 Fait en Mars, en Carême, dans le temps du siége de la ville de Rome, en 1083. Le Comte Willelm, Rainauld, fils de Willelm, le Vicomte Humbert, Rigald, le Vicomte Pontius, signent. [retour]

487 Charte à peu près contemporaine de la précédente et sur laquelle nous reviendrons à l’occasion de quelques remarquables paroles religieuses. [retour]

488 « In utilitatem ornamenti ejusdem ecclesiæ fideliter convertatur. » [retour]

489 Ita sane ut fratribus nostris inibi deo vacantibus pleniter refectio fiat. — Ceci s’accorde avec un mot de la charte précédente qui nous fait connaître le revenu de la chaudière reconquise sur Humbert de Monnet. « Magnum procul dubio munus 40 scilicet solidos et unam præclaram juxta morem loci refectionem annuatim representantem ». [retour]

490 Voyez acte de 1126 plus haut, sur Waut, la vallée Tlen, le Mont des fours. [retour]

491 Caldariam quæ juris Romani monasterii esse dicitur ex toto dimitto. [retour]

492 Filio non antea feodum tribuat quam elemosinam ut feci tribuat. — Fait à Lausanne, en présence de Bartholomeus, alors Prieur de Romainmotier. Il adresse une requête semblable au Comte (de Bourgogne) par Lambert Mayor d’Orbe. [retour]

493 En présence de Humbert de Vienne, Jordan de Salins, Lambert de Bannens, Pierre de Longevelle. — Voyez, sur la mort d’Humbert III, Béchet, histoire de Salins, I, 96. — L’acte est aux Arch. Canton. [retour]

494 Cette terre, nommée le champ Wauttier avait été usurpée par Bonfils, et un certain Bernard, surnommé Balais, en tenait de lui une partie. - Avril 1087, l’année de l’invasion des Espagnes du tems de leur roi Alphonse. Témoins. Humbert (de Monnet) le Vicomte, Tetbold de Frasne. Charte communiquée par M. Duvernois. [retour]

495 Autre sans date, Beroard et son frère Henry abandonnent à Romainmotier des Terres à Salins, avec serfs (cum servis), et cela pour la guérison de leur âme. Et les moines leur donnent deux chars de vin et un cheval. [retour]

496 « Pontia quam in servitutem meam redigere volebam, sed testimonio consanguineorum suorum ancillam esse sancti Petri cognitam, etc. » - Sous le Prieur Guiguon. — Témoins le Comte Renaud, Richard de Montfaucon, Maynard de Bannens, Turumbert de Bovonans, Albert, son fils, Mainier de Pont. — Cartul.
Dans un autre acte trois personnes témoignent par serment, en présence du comte Renaud, qu’une femme est « ancilla » de Romainmotier pour une cense de cire d’un denier. Aussi sous le Prieur Guigon, c’est-à-dire vers 1089 à 1090, comme la précédente. [retour]

497 voyez la note sur l’esclavage aux Etats unis dans l’ouvrage de M. de Beaumont intitulé Marie. [retour]

498 A la nativité nostre dame — scelée de son scel, l’an de l’incarnation mil dox cenz et quarante set. - Novembre. [retour]

499 Mémoires de la société d’Histoire t. I p. 206. [retour]

500 Une charge annuelle de sel pris auprès de Lons, pour le repos de l’âme de ses antécesseurs et surtout de son oncle, enseveli honorablement dans l’Eglise de Romainmotier par les frères. Janvier 1247. — Cartul. [retour]

501 Chaque année, à l’anniversaire du donateur, celui qui l’occupera (métayer, meix tenant?) donnera 10 sols à Romainmotier. C’était le revenu fixé, la ferme de la meix. - Anathème, maranatha aux infracteurs de cette donation. M. Duvernois en fixe la date entre 1050 et 1060. [retour]

502 « Mons vivinus » n’a point laissé de traces, à moins que ce ne soit le Vuilluin actuel, dans le Canton de Pontarlier, ce qui est douteux (note de M. Duvernois). [retour]

503 Hanc feminam tenens Stephanus miles de Comite Rainaldo in beneficio, hic autem requirente seniore superdictæ mulieris, etc. [retour]

504 Manu propria firmavit. Les enfans rachetés par le père étaient Tedaldus, et une fille nommée Heldeharde. Puis (en postscriptum) le dit chevalier a renoncé encore, pour l’amour de Dieu, à ses droits sur un mien enfant nommé Hunaldus.
Mainerius fut il dédommagé par le Couvent, d’un sacrifice fait, semble-t-il, dans son intérêt seul? [retour]

505 Ici se terminent les possessions féodales et civiles de Romainmotier, dont sans doute plusieurs nous ont échappé encore. Nous parlerons bientôt de ses nombreuses possessions ecclésiastiques. [retour]

506 « Tam ex privilegio cluniaci … quam ex indultis per summos pontifices imo etiam Imperatores collatis … nullo medio dictis summis pontifici et regi subjectum est (Romanum monasterium) » acte de 1489. Archives de Romainmotier. [retour]

507 Nous parlerons plus tard du privilége de Cluny. [retour]

508 Il est probable que le monarque se réserva l’autorité immédiate sur le monastère qu’il avait fondé. [retour]

509 Voy. mémoires de la soc. d’histoire, I liv. p. 200, charte XXVII. [retour]

510 Donné à Engesheim, nona Junii, indicione secunda, l’an 1305, l’année six de son règne. — Arch. Canton. Il périt en 1308. Voy. Muller. [retour]

511 Quos vitæ celebris insignit religio. [retour]

512 C’est l’impression que laisse le Cartulaire. — En 1125, par ex., c’est directement à l’Empereur et point à quelqu’un de ses vassaux, que le Prieur Arthaud s’adresse pour être protégé contre Ebal de Grandson. — Un fragment de la forme primitive du Plaid général, parle d’aide due au Prieur dans les causes qui se jugent par devant le Pape, l’Empereur, ou le Roi, sans aucune mention de personnages moins élevés, etc. etc. [retour]

513 L’Empereur n’était que Roi de Bourgogne. [retour]

514 Je dois la connaissance de cette avouerie à M. Duvernois. [retour]

515 Nouv. édition, tom. I, p.383. Il cite en note la charte de 1083. [retour]

516 Le Monastère romain eut plusieurs de ces avoués inférieurs; les Montricher étaient encore les avoués de Jolens, en 1284. Les religieux rachetèrent d’eux l’avouerie d’Apples en 1265; elle avait appartenu jadis aux sires de Wufflens, qui en 1222 l’avaient donnée en gage au Couvent. — En 1272, le Couvent avait aussi pris en gage celle de Mollens à Jean de Mont, etc. [retour]

517 Je dois à l’obligeance de M. Duvernois cette charte précieuse tirée du Cartulaire de Bourgogne, aux Archives du Doubs f. 92 Vo — Elle est de 1181. [retour]

518 L’Eglise excepte de cette association et se réserve en entier les dixmes, oblations, fours, moulins, la justice sur sa maison et ses officicrs, la pêche, etc. [retour]

519 Celui de l’Aubonne, limite de l’Evêché? [retour]

520 Société faite du consentement, et de l’avis de Theobard, vénérable Abbé de Cluny, du Prieur Berard et de tout le Chapitre. — Et pour que le tout demeure ferme « omni ævo » on fait munir cette charte « feliciter » du sceau du Chapitre de Cluny. — Donné dans la maison du Temple ou des Templiers, (apud templum) à Dôle IX Kal. d’aoust l’an de l’incarnation 1181. Indiction 14. [retour]

521 Que dire de cette métairie (area) réservée pour la demeure du Franc Comte souverain de Bourgogne. [retour]

522 Dans les Mémoires sur Poligny de Chevalier, cette charte se trouve, mais erronée et souvent même dénuée de sens. On peut la considérer comme inédite encore, et elle paraîtra dans les pièces justificatives. — Tout ce que dessus à l’approbation de M. Duvernois. — La citation: Mémoires de la société, vol. I, p. 92, est faite d’après Chevalier. [retour]

523 Cette cause avait fait détruire ce château sous Guy de Marlanie, Evêque de Lausanne. [retour]

524 Le Châtelain des Clées prétendait que les hommes de la Terre devaient charrier ses blés, vins, foins et bois; faire ses travaux; et aussi que lui et ses prédécesseurs avaient l’habitude d’en punir les délinquans. [retour]

525 Merum mixtum imperium et omnimodam jurisdictionem … pleno jure, etc. [retour]

526 En 1323, un différend s’étant encore élevé au sujet des corvées, Louis de Savoie et le Couvent, ayant Dieu devant leurs yeux, le terminèrent par arbitres dont l’un était Willelme de Orons, donzel de Bossonens, chevalier, Châtelain des Clées; un autre Jean de Montricher, doyen, etc. [retour]

527 « Si homo prioris adeo malefactor esset sic quod esset corporaliter pugniendus, si Castellanus (Cletarum) nobis (Priori) prius semel vel secundo requisitus negligenter malefactorem puniret pretextu conventionis presentis, reclamare non possumus nec dicere quod nobis injuria inferatur. » — Le Prieur avait les fourches patibulaires. [retour]

528 Le Châtelain des Clées se nommait « Jacaudus de Balma »: suivent les signatures du Comte, des religieux, d’Aymon par la grâce de Dieu Evêque de Genève etc. — On trouve quantité de confirmations de ces dreytures en 1286, 1329, 1399, etc., etc. [retour]

529 Toutefois une caborne de dix-huit pieds de large, payait comme maison à frêste. Nous avons vu que cette cense, évaluée 200 florins, était fort pesante pour la terre, et qu’on l’allégeait au moyen de frêstes soit toitures prolongées sur plusieurs maisons. [retour]

530 « Si ecclesiam Romii contigeret trahi in causam ad instantiam … alicujus principis, et ita gravetur expensis quod nequiret substinere, et tunc homines dictæ terræ tenentur subvenire de facultatibus suis, etc. » [retour]

531 Cartulaire. [retour]

532 Les Prieur et Couvent auront, en ces jours de foire et de marché, mère mixte impère et jurisdiction omnimode sur tous leurs hommes et abbergataires, selon l’usage; mais le sire de Vaud, exercera ces droits sur tous les étrangers. Or le Nonce du Prieur sera aussi celui du Baron, en ces jours seulement: réminiscence de l’accord de 1181 (v. s.).
En 1499, j’ai trouvé, outre la foire mentionnée ici au jour de Saint Pierre et Saint-Paul (à qui l’Eglise et le monastère étaient consacrés, comme si dans l’origine les foires eussent eu quelque liaison avec une fête religieuse), une foire à la Saint-George (23 avril), et une à la Saint-Clément (23 novembre), sans avoir vu le moment où elles s’étaient établies. [retour]

533 Des réglements faits, en 1356, par le Prieur Artaud Allamand, les religieux et les preud’hommes sur le marché et les foires, sont bien étrangers à l’esprit du jour, mais témoignent d’un régime constitutionnel dans la Terre de Romainmotier.
Il devra se trouver aux marchés et aux foires une personne de chaque feu sachant acheter et vendre les denrées sous amende de trois sols aux délinquans. Item, nul homme ou femme ne devra porter quelques denrées hors de la Terre pour les vendre, avant de les avoir présentées quatre fois au marché de Romainmotier, sous peine de confiscation et de trois sols d’amende. Quatre surveillants, établis ad hoc, devaient avoir la moitié des confiscations. Ce n’est pas le laisser faire des économistes modernes. [retour]

534 Voyez dans la Revue Suisse, t. III, p. 150, l’antique garde des Clées mise en jeu, dans le jugement intervenu contre le recteur des écoles d’Orbe, qui s’était rendu coupable de graves voies de fait envers le Mayor d’Arnay, au commencemeut du 15e siècle. [retour]

535 D’après ce compromis, le Prieur avait en effet sans aucune contradiction, jurisdiction omnimode, haute, moyenne et basse sur les hommes de la Terre; et le Châtelain des Clées n’avait jurisdiction que sur les étrangers à la Terre, et cela encore, sur les voies publiques seulement; ainsi il était dans son tort. [retour]

536 Ad adducendum suum patronum, seu consilium. [retour]

537 Fait le Jeudi après la Saint-Nicolas d’hyver, 1399. L’arrêt prononcé, tous ceux qui ont pris part au jugement demandent l’apposition du sceau commun du Ballivat de Vaud à l’acte qui en fait foi. — Archives Cantonales. — Ici encore comment concilier cette phrase « et par plusieurs autres dignes de foi siégeant ce jour là avec nous », etc., avec une nomination des membres de la cour par le Prince. Cette formule est l’expression d’un fait curieux et inaperçu. [retour]

538 Voy. Esprit des lois, Liv. 30, chap. XX. — Archives de Romainmotier.
Guillaume de Grandson, juge d’un acte de violence en 1365, est-il le même que le déprédateur du Prieuré en 1393? On pourrait peut-être lier toute cette affaire et l’équipée de 1364, et les expéditions de Guillaume, et deux procès de 1400 contre Lassaraz, en un seul faisceau de discordes, en y voyant une recrudescence des différends avec les Grandson, fondateurs, Patrons, Avoués et Gardiateurs de l’Abbaye de Joux.
Au reste l’Abbaye de Joux et le Monastère romain ne vécurent pas toujours en mésintelligence, et le procès de 1399 est d’autant plus étrange qu’à Louis de Senarclens succédèrent, dans l’Abbaye du lac, trois Abbés de la maison des Mayors de Romainmotier, Pierre, Henry et Jean. — Cartul. de l’Abbaye.
Nous ne citons des deux procès de 1400 qu’un fait inouï, c’est un gâgement de plus de deux milles bêtes (de duobus millibus et quingentis bestiis, tam equis, equabus, bobus, vachis, castronibus, ovibus, capris, quam aliis minutis animalibus), fait à tort par Lassaraz, au seul village de Juriens; dommage qu’ils n’eussent, disent-ils, pas voulu souffrir pour 200 livres de bonne monnaie. La cour condamna Lassaraz à de très-grands dommages en 1400. [retour]

539 Muller, t. III, p. 154 et sqq. — Confirmé par Maximilien en 1503, puis en 1518. [retour]

540 Il était alors fort jeune. [retour]

541 « In possessione vel quasi plena juris libertate ». Les choses incorporelles, les droits ne sont, d’après le droit romain, susceptibles que d’une quasi possession. [retour]

542 D’autre part ces hommes sont chargés de fardeaux multipliés et presqu’insupportables vis-à-vis du Prieuré, est-il dit, et tant à cause de pestes et d’années mauvaises très-multipliées, que par suite de leurs charges et de la stérilité du pays, ils sont chaque jour annihilés en sorte que leur nombre a diminué de plus de moitié. « Minuti et annihillati sunt ita ut vix sit media pars eorum qui esse solebant temporibus retrofluxis ». — Les pestes et tempêtes sont constatées, mais la pesanteur extrême des charges nous est suspecte (v., p. 41). [retour]

543 sacri imperii romani princeps vicariusque perpetuus. [retour]

544 « Impositum sive concessum » (par les Etats). [retour]

545 Super hominibus et juridiciariis nostris immediatis et ecclesiasticorum ut moris est. [retour]

546 « Licet … maior summa veniret exsolvenda per dictos homines », etc. Thonon, 10 Octobre 1453. — Arch. de Romainmotier. [retour]

547 Il y avait plus de 16 villages, et 3 florins à 10 feus, seulement, par village feraient près de 500 florins. [retour]

548 Je n’ai pu lire l’année exacte, fin du 15e siècle. — Arch. de Romainmotier. [retour]

549 Ici était annexée la copie vidimée de la charte de Fréderic, copie que nous possédons seule. Voyez Mémoires de la société, I, p. 92. [retour]

550 « In qua consistunt loco sterili degentes ». [retour]

551 « In cedula papiri ». [retour]

552 Voici ce papier.
1o Les hommes du Prieuré de Romainmotier ont payé, pour la régale due, 240 flor.
2o It. en 1458, 86 flor.
3o It. pour subside accordé en 1439, 100 flor.
4o It. It. en 1451, 100 flor.
5o It. It. en 1452, 100 flor. [retour]

553 Acte de 1484, antérieur à celui que nous venons d’examiner. — Arch. de Romainmotier. [retour]

554 « Exempti et immunes a resorto et districtu et consuetudine patriæ Vaudi ». [retour]

555 Défense de Charles de Savoie, sous peine de 100 livres, de molester à ce sujet les hommes de son illustre oncle (patruus) François de Savoie, à moins d’avoir une juste raison d’en agir autrement, ce qu’on devrait lui faire connaître dans l’espace d’un mois. — 18 février 1484.
Nouvelles plaintes de François de Savoie, qu’en dépit des lettres de son Altesse, on le trouble encore.
Mandat du Duc au Châtelain des Clées et au Bailli de Vaud de faire rapport avant le mois d’août sur la présente supplique, et défense de rien exiger en attendant. — 14 mai 1485 (an pris à l’incarnation, sans doute). [retour]

556 Quatorze dépositions de la Terre des Clées, soit, des Clées, Rances, Glignirolles, l’Abergement, Vallières (le 24 juillet 1485), portent en substance le même témoignage. [retour]

557 Les nobles, syndics et bourgeois, assermentés par le Bailli de Vaud (le 25 juillet) sur les Evangiles, disent unanimement savoir, que dans le dernier gîte, ou don gratuit, ceux de Romainmotier ont été appelés à Moudon avec les autres ecclésiastiques, mais qu’ils ne savent s’ils ont payé et s’en rapportent à ceux de Moudon. [retour]

558 Ymo verius. [retour]

559 Trahi in exemplum. [retour]

560 Genève 25 octobre 1485. Le 27 suivant, ces lettres ducales furent présentées avec triomphe par Glaude Michaudy, grand célérier de Romainmotier, à Pierre Chevallay receveur du gîete et Vice Bailli de Vaud, qui reçut ces lettres à Aubonne, et s’offrit à leur obéir. [retour]

561 Voyez ci-dessus l’enquête faite aux Clées, et à Cossonay. Je trouve encore en 1485, un gîte de quatre sols par feu, imposé par ceux de Moudon. Puis en 1529, des dépenses faites contre ceux de Moudon qui demandaient 12 sols de chaque feu de la terre. — Toujours la même indécision! [retour]

562 Introduction p. 23. [retour]

563 L’action des Etats se voit avec évidence dans un mot de la réponse du Duc, au Prieur Jean Louis de Savoie, son fils, qui réclamait une exemption d’impôt, en 1453, « subsidium … super hominibus nostris … fuit generaliter impositum sive concessum » etc. [retour]

564 Ab audientia villicorum appellare debetur ad audientiam castellani Romani monasterii et ad Romanum monasterium; et a Castellano appellatur ad Judicem appellationum, et a judice appellationum ad dominum in ejus camera; nec solent causæ exire a curia domini sed ibi sunt terminandæ maximæ causæ subditorum. Reconnaissance générale. — Appliquées à la Savoie, ces dernières paroles seraient inexplicables, et tout à fait forcées; dominus sans désignation c’est le Prieur et nullement le Comte de Savoie. [retour]

565 Ainsi, de nos jours, un Roi a pu porter plainte auprès d’un tribunal vaudois, pour l’offense d’un journal vaudois: cela ne prouvait pas, apparemment, que ce Roi fut vassal du Canton de Vaud. [retour]

566 Ceci d’après un livre allemand classique, sur les Ministériaux; dont malheureusement nous ne connaissons qu’une analyse. [retour]

567 Un exemple à Brussins, dans la famille de dessous l’Eglise, (de subtus ecclesiam) à la fin du 14e siècle. — Un autre aussi à Bursins à la fin du 15e siècle dans la famille Beney ou Benoît. [retour]

568 Payerne, Saint-Maurice, Saint-Oyens, le possédaient. [retour]


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