Mémoires et documents de la Société d’histoire de la Suisse romande
Edition numérique
Frédéric de GINGINS-LA-SARRAZ
Mémoire sur le Rectorat de Bourgogne
Dans MDR, 1838, tome 1 première partie, p. 11-211
© 2018 Société d’histoire de la Suisse romande
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MÉMOIRE SUR LE RECTORAT DE BOURGOGNE
par
M. Fréd. de Gingins.
« Pro res Burgunda, et pro libertate suorum. » (Gollut, Lib. IV. capt. VII).
INTRODUCTION.
de l'an 1032 à l'an 1057 .
L'extinction de la lignée masculine des rois Transjurains, dans la personne de Rodolph III (décédé sans postérité légitime le 6 septembre 1032 1), ouvre une ère nouvelle et importante dans l'histoire de l'Helvétie Romane.
Conrad II, surnommé le Salique, époux de Gisèle de Souabe, l'une des nièces du dernier roi, ayant recueilli son héritage, le royaume des deux Bourgognes, dont les contrées resserrées entre les Alpes et le Jura avaient primitivement formé le noyau, se trouva par le fait réuni à l'Empire Germanique. Les monarques Teutons cessèrent bientôt de considérer ce royaume comme un Etat séparé, légalement indépendant de la couronne impériale, et s'arrogèrent le droit de porter atteinte à son intégrité en détachant de son territoire des provinces entières pour les conférer, /12/ sous le titre de fiefs impériaux, à divers princes étrangers. Mais les seigneurs du pays refusant de reconnaître leur suzeraineté, il naquit de ce conflit de prétentions opposées et soutenues de part et d'autre avec des chances très variables des dissentions intestines qui désolèrent les provinces Juranes pendant plus de deux siècles.
Dès le commencement du XIe siècle, une bonne partie du territoire de l'Helvétie Romane se trouva partagé entre les évêques de Lausanne, de Genève et de Sion, les abbés ou prieurs des monastères de St. Maurice, de Romainmôtier, de Payerne et de St.-Claude, et un petit nombre de chefs-de-famille ou dynastes devenus puissans par l'étendue de leurs terres patrimoniales, par le nombre de leurs vassaux, ainsi que par les emplois élevés qu'ils occupaient dans l'Etat. Ces grandes familles, subdivisées en plusieurs branches, adoptèrent plus tard des noms-propres dont l'illustration est devenue historique dans la Transjurane, et qui forment ainsi les anneaux d'une chaîne de traditions populaires liant le passé au présent.
Aussi-tôt que la vieillesse du dernier des Rodolphiens annonça l'extinction de cette race royale, les Magnats des deux Bourgognes se prononcèrent d'avance pour ou contre les divers prétendans qui convoitaient le trône de Bourgogne. Ils s'efforcèrent de réunir autour de leurs bannières le plus grand nombre possible de partisans du candidat dont ils soutenaient les prétentions. Tous les vassaux du second ordre, tous les hommes libres, ainsi que les petits propriétaires, en se soumettant à leur patronage, y cherchèrent en revanche abri et protection pour leurs personnes et pour leurs biens contre les maux d'une guerre civile qui paraissait imminente.
C'est ainsi que, soit comme grands propriétaires fonciers, soit comme hauts fonctionnaires de l'Etat, soit comme chefs /13/ et patrons d'une nombreuse clientèle, les Seigneurs de la Bourgogne transjurane devinrent les représentans effectifs de tous les droits et de tous les intérêts privés et publics de la nation.
On se tromperait fort néanmoins si l'on envisageait ces Seigneurs comme autant de petits despotes féodaux tranchant du souverain dans leurs vastes domaines; à la vérité ils représentèrent aux yeux des prétendans à l'héritage de leur roi la force résumée du Pays, mais les anciennes coutumes et les lois nationales s'opposèrent absolument à la durée ou à la consolidation d'un pouvoir qu'ils ne durent qu'aux nécessités du moment. Ces lois, quoique comprimées par les circonstances, avaient jeté de trop profondes racines dans le cœur des peuples Bourguignons pour ne pas ressaisir promptement tout leur empire lorsque des temps plus heureux le permettaient.
Il est certain que si cette espèce d'Oligarchie créée par la force des choses eut un inconvénient passager, elle empêcha néanmoins des maux plus grands et plus durables. Elle opéra la concentration de toutes les forces et de toutes les volontés de manière que, même après avoir triomphé de tous ses compétiteurs, le nouveau monarque se trouva en présence d'un corps de nation compact et uni sous des chefs aussi intrépides qu'expérimentés, qui, divisés pendant la lutte, s'associèrent après le combat pour le maintien des institutions nationales et de l'intégrité territoriale de la commune Patrie, et unirent leurs forces pour s'opposer à toute entreprise tendant à leur imposer un joug étranger.
Ce fut par une juste prévision des suites inévitables de la réunion des deux couronnes sur le front des Rois de la race Franconienne que les Magnats des deux Bourgognes refusèrent longtemps de reconnaître cette dynastie jugée par eux trop puissante pour ne pas opprimer, tôt ou tard, leur /14/ indépendance. Ils soutinrent d'abord les prétentions d'Ernest, duc de Souabe, puis celles d'Eudes, comte de Champagne, dont les droits étaient pour le moins aussi fondés, et qui, bien qu'aussi puissans pour maintenir l'obéissance au sceptre royal, ne l'étaient point assez pour entreprendre de gouverner sans le concours des grands vassaux. Cependant, la fortune et les armes de Conrad le Salique en décidèrent autrement. Après avoir vaincu tous ses rivaux et forcé les plus puissans seigneurs Transjurains à lui rendre hommage, il fut proclamé et généralement reconnu comme seul héritier de la couronne Rodolphine. Il n'abusa point de sa victoire et ne chercha point à anéantir la nationalité Bourguignonne; au contraire, il reconnut formellement son indépendance, en se soumettant à la formalité de l'élection dans l'assemblée des prélats, des grands et du peuple, et en se faisant proclamer à Payerne, le jour de la purification (2 février) de l'an 1033 2.
Cet exemple fut imité par Henri, qui, du vivant du roi Conrad son père fut proclamé roi de Bourgogne par l'assemblée générale (Colloquium generale) de la nation (primatibus regni, cum universo populo laudantibus) réunie à Soleure, dans l'automne de l'an 1038 3; cérémonie solennelle, où le peuple mêlait aux accens de sa vive allégresse un dicton latin qui signifiait à peu près, « que la paix succéderait à la paix, si le roi régnait avec l'empereur »4 et qui décèle la confusion qui s'était déjà répandue dans les idées populaires sur l'indépendance de la couronne Bourguignonne. /15/
Conrad le Salique porta plus loin encore les ménagemens réclamés par les susceptibilités nationales de ses nouveaux sujets; au lieu de les assujétir au régime purement féodal qu'il venait d'imposer à l'Italie, et pour lequel il avait une telle prédilection qu'elle lui valut le surnom de Salique, il s'attacha à faire revivre dans la Transjurane les anciennes lois et coutumes particulières à ces contrées qui semblaient étouffées sous le poids des discordes civiles 5.
On pourrait même supposer que la haute prudence de l'empereur se servit de ce moyen pour affaiblir graduellement la prépondérance excessive des grandes familles indigènes, généralement opposées à tout régime étranger, en les obligeant à rentrer dans la ligne du droit commun.
L'institution Bourguignonne se distinguait essentiellement du régime Salique (ou féodal) par le mode de transmission des héritages fonciers, patrimoniaux ou féodaux.
Le régime féodal, appelé aussi Teutonique, basé sur les principes saliques, excluait les femmes de toute participation à l'héritage des biens territoriaux (terræ salicæ) et des fiefs (feuda; beneficia.) La coutume Bourguignonne ou Romane, dérivée de l'ancienne loi fondamentale des Burgondes, consacrait la transmission héréditaire des fiefs et de tous les autres biens fonciers (alodia) en ligne directe, sans exclure les femmes, qui héritaient préférablement aux agnats des lignes collatérales 6.
La différence de ces deux principes de succession héréditaire était fondamentale, car quoique dans la Transjurane le droit romand (jus Romanum) ne se trouvât séparé du droit teutonique (jus Teutonicum) que par les limites /16/ d'un faible ruisseau 7, le temps ne les fit point se confondre et cette différence contribua puissamment à maintenir l'individualité de l'Helvétie Bourguignonne. Aussi, quand, par suite du développement du régime féodal dans d'autres contrées, la majeure partie des propriétés foncières furent converties en fiefs, la loi salique opéra peu à peu la concentration de toutes les terres entre les mains des grands vassaux et des hauts Seigneurs, tandis que la coutume Bourguignonne ramenait incessamment la division des propriétés et le démembrement des fiefs. En sorte que la réunion d'un vaste domaine appartenant à un seul seigneur, ou à une seule race ne fut en Bourgogne qu'un fait exceptionnel promptement détruit par l'impitoyable loi des successions.
Le haut clergé et les principaux seigneurs ultra-jurains (Principes regni; Seniores; Domini), de même que ceux des états voisins, jouissaient cependant de prérogatives et de pouvoirs consacrés par les coutumes et les lois nationales tellement étendus que dans leurs terres, relevant pour la plupart immédiatement du souverain, ils n'admettaient que rarement l'intervention de l'autorité royale ou de ses mandataires. Cette grande indépendance fut encore accrue par l'éloignement prolongé du souverain. Les Empereurs Teutoniques retenus soit par des guerres étrangères, soit par des soulèvemens intérieurs, ne visitaient que rarement les contrées Juranes. Quand des circonstances plus favorables leur permettaient de s'y rendre ils ne manquaient point de chercher énergiquement à rétablir la paix publique en réprimant l'audace des grands vassaux, en faisant cesser les guerres privées, en redressant les griefs de l'opprimé /17/ contre l'oppresseur, et en forçant par les armes les plus indociles à se soumettre aux sentences royales. Mais cette action bienfaisante de la présence du souverain n'était que momentanée; ses arrêts n'avaient de force que pendant la durée de son séjour et celui de l'armée dont il était constamment accompagné, et son départ devenait le signal de nouvelles collisions intestines et du retour des anciens abus.
L'origine de ces continuelles divisions dans les provinces Juranes remontait fort haut, et provenait principalement des libéralités excessives dont le dernier monarque Rodolphien avait comblé l'Eglise et le haut clergé. Il enleva aux comtes provinciaux et aux seigneurs laïques revêtus des premiers emplois de la couronne la juridiction sur les biens et les vassaux de l'Eglise: plusieurs évêques furent même déclarés comtes supérieurs d'une portion de leur diocèse 8, tandis que d'autres obtinrent une supériorité temporelle sur leurs villes épiscopales et sur les terres appartenant à leurs églises 9. Les plus illustres familles du royaume se trouvèrent ainsi dépossédées de la prépondérance dont elles jouissaient dans le gouvernement de l'Etat. Aussi les seigneurs profitèrent-ils avec empressement de toutes les occasions favorables pour ressaisir leur autorité, et pour forcer les vassaux de l'Eglise à déserter la crosse des prélats pour se ranger sous la protection de leur épée. /18/
Cette violente opposition et cette rivalité sans cesse renaissantes entre ces deux ordres puissans mirent perpétuellement le trouble dans le pays.
Les souverains de la maison de Franconie semblent avoir persévéré dans une politique qui consistait à balancer le pouvoir des seigneurs par l'autorité temporelle des prélats. Aussi le haut clergé, tout dévoué aux intérêts de la nouvelle Dynastie, députa, en 1042, auprès de l'empereur Henri III, dit le Noir, qui présidait alors un grand synode provincial à Constance, pour implorer sa protection contre les entreprises des seigneurs et pour le supplier de venir en Bourgogne. La harangue que ces députés adressèrent au monarque, conservée en substance dans un poème contemporain, peint sous les plus vives couleurs l'état déplorable de la Transjurane.
« O Roi! (disaient les Envoyés) lève-toi et hâte-toi d'accourir, Burgundia te réclame! ces contrées nouvellement ajoutées à ta couronne sont troublées par la longue absence de leur maître! ta présence seule a naguère valu à Burgundia une tranquillité bienfaisante quoique passagère. C'est pour cela que ton peuple t'appelle, comme la source de toute paix, et qu'il désire repaître ses regards attristés de la vue de son Roi! »10
Henri se rendit dès l'hiver suivant aux vœux des prélats. Il vint en Bourgogne, et y tint diverses assemblées (colloquia). Il obligea plusieurs seigneurs qui avaient négligé de lui porter les présens d'usage, lors de son avènement au trône de Germanie, à s'acquitter de ce tribut et à lui rendre hommage 11. /19/
Néanmoins deux des plus puissans feudataires de la couronne, Réginold I, comte de la haute Bourgogne (Franche-Comté), et Gérold, comte de Genevois, se refusèrent à reconnaître le roi Henri, sous le prétexte qu'il ne convenait point à la dignité de princes qui, comme eux, comptaient des rois parmi leurs ancêtres, de s'abaisser au rang de vassal d'un monarque étranger, à l'élection duquel ils n'avaient point concouru 12.
Les domaines de Réginold s'étendaient dans le pays d'outre-joux sur la vallée de l'Orbe, depuis Jougne à Yverdon 13; et ceux du comte de Genevois embrassaient les deux rives de l'extrémité occidentale du lac Léman, et particulièrement le territoire des Equestres, ou de Nyon. 14
La résistance de ces deux princes trouva écho parmi la vaillante jeunesse de la Transjurane et plusieurs coururent se ranger sous leur bannière; l'un des principaux fut Adalbert, primat du château de Grandson, qui s'empara de la terre de Champvent, appartenant à la couronne.15
Cependant, les deux illustres chefs ayant été vaincus par Louis, comte de Montbéliard, l'un des capitaines de l'empereur, ils furent réduits à se rendre à Soleure auprès du /20/ Roi Henri et obligés de lui prêter serment de fidélité (1045).16 Cette soumission rétablit momentanément la paix dans la Transjurane.
Ce fut durant cette époque de troubles incessans, dont nous avons essayé de tracer un rapide tableau, que les peuples Transjurains livrés aux maux qu'enfantaient tant de désordres, dociles à la voix de leurs pasteurs, adoptèrent l'usage de la trêve de Dieu (treuga Dei), sorte de suspension d'armes temporaire et périodique entre la crainte de la Justice Divine et la perversité humaine. Née dans l'Aquitaine, cette institution salutaire se répandit de proche en proche dans les pays voisins, et jusques dans la Transjurane. Ce fut Hugues, Evêque de Lausanne, qui eut la pieuse gloire de l'établir dans ces Provinces.
Ce saint prélat assembla un synode à Romont, vers l'an 1037 ou 1038, où se réunirent les Archevêques de Vienne et de Besançon, les Evêques de Genève et de Sion, et un grand nombre de prélats de divers ordres. Il y convoqua aussi les principaux seigneurs du pays, « dans le but de remédier en commun aux maux qui affligeaient la patrie. » - A la voix du pieux Evêque, vénéré des plus puissans, non seulement à cause de ses hautes vertus, mais aussi parcequ'il était le beau-fils (privignus) du dernier roi Rodolphien, vint encore se joindre la voix du peuple accouru en foule, les mains pleines de rameaux verts, et criant: « Pax! pax, Domine! » 17
La trêve de Dieu reçut d'abord plus ou moins de durée, et fut réglée de différentes manières. Elle défendait expressément, sous peine de fortes amendes pécuniaires et de /21/ l'excommunication, toute infraction à la paix publique, toute vengeance personnelle, et même toute exaction privée, soit levée-de-gages à main armée, pendant les jours consacrés, qui comprenaient à peu près les trois quarts de l'année.18
Quoique cette institution tirât sa plus grande force de la ferveur aux croyances religieuses, on doit y reconnaître cependant une mesure de haute politique reposant sur une juste appréciation des idées dominantes du siècle. Son effet moral fut de contraindre la force physique à ployer sous l'empire naissant des influences intellectuelles, et elle eut pour résultat matériel de diminuer d'une manière sensible les calamités publiques.
Vers les mêmes temps, ou un peu plus tard, s'établit dans la Transjurane une autre coutume, purement politique, mais destinée à concourir avec la trêve de Dieu à la pacification intérieure du pays: ce fut la Cour-des-Sénieurs. Les magnats de chaque province qui ne reconnaissaient aucun autre supérieur que le souverain, et qui, en son absence, se trouvaient absolument indépendans de toute juridiction séculière, avaient institué entr'eux un tribunal arbitral, composé de deux (ou plusieurs) seigneurs choisis librement dans l'assemblée de leurs pairs (inter pares), c'est-à-dire entre tous ceux qui possédaient la prérogative de relever immédiatement de la couronne, et qu'on qualifiait de sénieur, ou sire (senior, dominus). Ces arbitres, ou amiables compositeurs, que les chartes nomment en latin principes provinciæ, principes laïcorum 19, ou encore primates, furent sans doute /22/ choisis parmi les plus puissantes familles du pays, afin d'assurer aux décisions de ce tribunal l'appui des forces et de l'ascendant personnel de ses membres. Ces primats remplaçaient en quelque sorte les anciens Comtes du Palais (Comites palatii, Palatini) des rois de Bourgogne, et suppléaient à l'absence d'un pouvoir permanent émané de la couronne. Les monarques teutoniques tolérèrent cette institution, qui s'établit particulièrement dans les provinces bourguignonnes astreintes au régime temporel des comtes ecclésiastiques, tels que: l'évêque de Lausanne, comte du Pays de Vaud, l'évêque de Sion, comte du Valais, et l'abbé de St.-Maurice, comte de la province d'Agaune, ou vieux Chablais.
En effet, une pareille coutume n'aurait pu s'introduire que difficilement dans les contrées qui obéissaient de fait et de droit à des comtes suzerains, comme l'étaient: l'archicomte de la Haute-Bourgogne, les comtes de Genève, de Maurienne et d'Uchtland (Bargen), etc.
Il est à regretter que les traces de cette justice arbitrale soient trop peu nombreuses pour qu'il soit possible d'en apprécier tous les développemens; cependant les documents qui nous restent suffisent pour constater son existence et son résultat le plus essentiel, qui fut de diminuer le nombre des querelles et des guerres privées entre les seigneurs.20 /23/
Cet ordre de choses se prolongea en Bourgogne jusques à la mort de l'empereur Henri III, décédé dans la force de l'âge, le 5 octobre 1056, ne laissant qu'un fils de six ans, qui devint le célèbre Henri IV, et qui succéda à son père, sous la tutelle de sa mère l'impératrice Agnès 21.A peine cette princesse fut-elle en possession du pouvoir suprême qu'elle oublia la réserve prudente qui avait dirigé l'empereur dans ses rapports avec les Grands de la Bourgogne. Elle crut pouvoir réduire la Transjurane en province de l'empire, sans réfléchir, peut-être, au coup décisif qu'elle portait à la nationalité Bourguignonne.
Agnès venait de fiancer sa fille Mathilde, âgée de douze ans, à Rodolph, surnommé de Rheinfelden, comte d'une partie du territoire qui s'étend à la gauche du Rhin (dans le Frikthal) jusqu'à Bâle. Ce seigneur, dont l'origine, quoique des plus illustres, est encore incertaine, malgré le rôle éclatant, qu'il joua à cette époque, se trouvait allié par le sang aux plus puissantes familles de la Germanie, de la Lorraine et de l'Helvétie 22. Jeune, intrépide, rempli d'une prudence et d'une sagesse précoces, la régente ne pouvait se choisir /24/ un appui plus ferme et plus utile contre ceux qui menaçaient de lui disputer l'autorité pendant la longue minorité de son fils. Aussi elle le combla de biens et d'honneurs. Non contente de lui donner l'investiture du duché de Souabe, au mépris des promesses formelles de l'Empereur défunt à Berthold de Zæringen, comte en Brisgau, elle y ajouta encore le gouvernement de la Bourgogne Transjurane, avec le titre de Duc (Dux Burgundionum) 23, dignité inconnue jusqu'alors dans ces contrées, où le rang de comte comprenait un pouvoir et des prérogatives tout aussi étendus 24. Ce nouveau duché embrassa tous les pays renfermés entre le Jura et les Alpes, depuis le pont du Rhône à Genève, jusqu'aux bords de la Reuss (Ursa), c'est-à-dire: la partie du diocèse de Genève située au nord du lac Léman et qui formait le décanat d'Aubonne, la totalité du diocèse de Lausanne, et en outre la portion du diocèse de Constance qui, anciennement (aº. 924), avait été détachée du grand duché d'Alémanie et réunie au royaume des deux Bourgognes. Cette dernière province, resserrée entre l'Aar et la Reuss, avait pris dès-lors les noms de Bourgogne alémanique et de /25/ Bourgogne mineure, ou petite Bourgogne (Burgundia minor, Burgundella).25
Au-delà de la Reuss, le grand comté de Thurgovie dépendait du duché de Souabe et de l'empire. Ainsi Rodolph régnait dès 1057 sur la totalité de l'Helvétie, soit comme Duc de Bourgogne, soit comme Duc de Souabe. C'est en cette dernière qualité que, dans l'année 1063, il termina, au nom de l'Empereur Henri IV, le grand différend qui s'était élevé entre les monastères de St.-Felix et de Regula, de Zurich, et celui de St. Hilarius, d'Uri, au sujet des bornes de leurs pâturages limitrophes.26
Quant à l'autorité exercée par Rodolph de Rheinfelden dans l'Helvétie Bourguignonne, il en reste des preuves trop authentiques pour ne pas faire remonter jusques à lui la période du Rectorat de Bourgogne, que les historiens suisses ne font guère commencer qu'à l'avènement de la maison de Zæringen, qui ne fut réellement que l'héritière de celle de Rheinfelden 27. A la vérité la suite chronologique des Recteurs de Bourgogne éprouve, à diverses époques, quelques interruptions; mais, elles s'expliquent plus naturellement par les troubles qui agitèrent les contrées soumises à leur domination que par une suppression effective de cette dignité. /26/
RODOLPH DE RHEINFELDEN
Premier Recteur ou Duc
de la
Bourgogne Transjurane.
de l'an 1057 à 1077.
C'est dans le mémorable diplôme de l'empereur Henri IV de l'an 1079, en faveur de Burchard, évêque de Lausanne et comte du Pays-de-Vaud, auquel nous reviendrons bientôt, que se trouve la preuve générale de l'exercice réel du pouvoir supérieur de Duc ou Recteur dans l'Helvétie Bourguignonne, par Rodolph de Rheinfelden. L'empereur y donne à l'évêque toutes les terres confisquées sur le duc Rodolph entre le Jura et les Alpes du mont Joux (St.-Bernard), depuis la Sarine jusqu'au pont du Rhône près de Genève. Les lieux spécifiés dans ce diplôme, tels que: Morat et Lugnores, dans le Vully, Chexbres, Corsier et Lutry, dans le Pays de Vaud, étaient des domaines de la couronne (fisci regii) que Rodolph ne pouvait posséder qu'à titre de bénéficier héréditaire du Duché ou Rectorat de Bourgogne.
A cette preuve viennent se réunir d'autres témoignages plus spéciaux qui concernent différentes localités de la /27/ Transjurane. Tel est, entr'autres, la charte de l' empereur Henri IV donnée à Worms le 27 mars 1075 en faveur du prieuré conventuel de Riggisberg dépendant primitivement de l'abbaie de Cluny. Ce prieuré, situé au diocèse de Lausanne, dans le territoire d'Ufgau, du comté de Bargen (ou d'Oltingen), venait d'être fondé par un seigneur du pays, nommé Lutbold de Rümelinga (Rümlingen), sous l'autorité du Duc Rodolph (sub … Duce Rodulfo), et en présence de son fils Berthold, qui, par l'ordre exprès de son père (patre ipso Duce jubente),le remplaça en qualité de son lieutenant au plaid public tenu à cette occasion. L'Empereur confirma cette fondation à la prière du Duc Rodolph (Rodulfi Ducis precibus), et y ajouta le don d'un vaste territoire désert et boisé, situé entre le Schwarzwasser et la Sense (affluens de la Sarine), qui fut appelé depuis le pays de Güggisberg ou Montcuchin, à la condition que les religieux du nouveau monastère y feraient des défrichemens et y appelleraient des colons en nombre suffisant pour mettre ces terres en pleine valeur. Le Duc Rodolph, en qualité de Recteur du pays ou de lieutenant du souverain, fut chargé d'investir la communauté de cette propriété et de veiller à l'exécution des obligations imposées aux moines. 28
Rodolph exerça le rectorat dans l'Helvétie Bourguignonne pendant près de vingt années. Son pouvoir s'étendait comme celui d'un Vice-Roi sur tous les comtes provinciaux de la Transjurane, qui paraissent avoir exercé leur emploi sous sa domination. On voit en effet les Dynastes de la maison d'Oltingen (ou de Neuchâtel), qui gouvernaient à titre de comtes, plusieurs territoires (pagi) dans l'Uchtland, (sur la rive gauche de l'Aar, depuis le mont de Vully jusques vers /28/ Nidau), conserver leur dignité sous la régence de la maison de Rheinfelden 29. Il en est de même des comtes de Froburg, dans le territoire de Soleure, des comtes de Rore (ou de Lentzbourg), et de Habsbourg, dans l'Argovie, ainsi que de plusieurs autres comtes laïques de l'Helvétie orientale. Il en fut de même de la plupart des comtes ecclésiastiques, tels que: les évêques de Lausanne, de Sion, et celui de Bâle, qui était comte de l'Augstgau 30, et l'abbé de St.- Maurice, comte du vieux Chablais. 31 Cependant il n'est pas aisé de déterminer le degré de soumission de chacun d'eux envers le Recteur. Il est probable qu'elle se bornait à un simple aveu de suzeraineté, du moins la suite des événemens démontre que ces grands vassaux n'attendaient que le moment favorable pour rejeter une suprématie si contraire à leurs habitudes, et ils semblent ne l'avoir tolérée qu'aussi longtems que subsista la bonne harmonie entre Henri IV et le Duc de Rheinfelden.32
Lorsque la grande querelle des investitures eut éclaté entre la cour impériale et la cour de Rome, le Duc Rodolph embrassa le parti du pape Grégoire VII, qui (on le sait) lança les foudres de l'excommunication contre Henri et tous ses /29/ adhérens. Ce monarque ayant été déposé dans l'assemblée solennelle tenue à Forscheim le 13 mars 1077, Rodolph de Rheinfelden fut élu à sa place Roi de Germanie 33. Il paraît même qu'il prit aussi le titre de Roi d'Arles, ou de Provence, quoiqu'il soit douteux qu'il ait jamais été reconnu en cette qualité dans ce royaume 34.
Les légats du pape Grégoire assistèrent à l'élection de Rodolph et l'approuvèrent tacitement, puisqu'il se bornèrent à demander que, pour consommer ce grand acte politique, on attendît l'arrivée du Souverain Pontife, qui s'était mis en route pour la Germanie 35. Le pape, espérant toujours que l'empereur Henri se soumettrait aux dures conditions qu'il lui avait imposées, exigea que Rodolph prît l'engagement de ne point considérer la couronne de Germanie comme héréditaire dans sa famille, afin qu'après lui le droit d'élection restât libre et entier 36. Rodolph donna pour caution de cet engagement son propre fils et son neveu (né de sa soeur Agnès et de Berthold de Zæringen), qui, ainsi que le duc Welph de Bavière, s'était dévoué au succès de sa cause. 37
Tandis que ces choses se passaient en Germanie, l'Empereur fut forcé par ses fidèles de faire lever la sentence /30/ d'excommunication lancée contre lui, laquelle aux yeux des peuples équivalait à une déchéance. Il s'achemina à cet effet vers l'Italie, accompagné de Berthe sa femme, dans l'automne de l'an 1076, passant par la haute-Bourgogne et la Transjurane 38. Il choisit cette route parceque les ducs Rodolph, Welph, et Berthold tenaient tous les passages qui conduisaient directement en Lombardie. Il célébra les fêtes de Noël à Besançon, où il fut reçu avec une magnificence royale par le comte Guillaume-le-Grand, cousin germain de l'impératrice Agnès sa mère 39. Ce prince l'escorta jusqu'aux limites du pays d'outre-Joux. Henri vint ensuite à Vevey (Viviscum), où il se rencontra avec Amédée II, comte de Maurienne, et Adélaïde, marquise de Suse, dont l'un était frère, et l'autre mère de Berthe. Tous deux régnaient de l'un et de l'autre côté des Alpes, non-seulement par leur puissance territoriale et leur illustre naissance, mais aussi par leur influence sur le parti ultramontain, et ils étaient maîtres des passages de la Savoie et du Vallais, par lesquels seuls l'Empereur pouvait espérer de pénétrer en Italie. Ils reçurent le monarque avec tous les égards dûs à son rang et aux liens de proche parenté qui les unissaient.
Cependant la marquise de Suse, mère aussi d'Adélaïde, seconde femme de Rodolph de Rheinfelden, voulut garder une sorte de neutralité entre les deux partis. Elle profita des embarras de l'empereur pour exiger de lui la cession du vieux Chablais et du bas-Vallais, formant la province d'Agaune (provincia agaunensis), en faveur de son fils Amédée. Cette province s'étendait de Vevey à Martigni; elle avait jusqu'alors formé l'apanage des abbés royaux de St.-Maurice, /31/ dont les comtes de Maurienne devinrent dès lors commendataires ou gardiens (advocati) héréditaires. 40
Peu après cette cession l'Empereur passa le mont Joux (S.-Bernard) en janvier, au cœur de l'hiver et par un froid si rigoureux que sa suite et les robustes guerriers qui l'accompagnaient en souffrirent beaucoup, et que l'on fut obligé d'envelopper l'impératrice et ses dames dans des peaux de bœufs nouvellement écorchées et de les traîner ainsi au bas de la montagne. Henri se rendit en hâte au château de Canosses (Lombardie), accompagné de la marquise de Suse et du comte de Maurienne qui furent les principaux médiateurs de sa réconciliation avec l'orgueilleux Grégoire. 41
C'est pendant ce voyage que l'empereur reçut la nouvelle des actes de l'assemblée de Forscheim et de l'usurpation du duc Rodolph. Ce nouveau monarque, couronné à Mayence le 26 mars 1077, avait aussitôt parcouru le Palatinat du Rhin et la Souabe pour rassembler ses partisans et s'opposer au retour d'Henri. S'étant avancé en armes d'Augsbourg à Constance, il en avait chassé l'évêque Otton, remplacé, ainsi que les abbés de Rheinau et de St.-Gall, par des adhérens du parti ultramontain. Il vint ensuite à Zurich, dont les habitans lui étaient dévoués, et là, entouré des comtes de Nellenbourg, de Kybourg et de Toggenbourg, qui dominaient la Rhétie et la Thurgovie 42, il investit son fils aîné, Berthold, du duché de Souabe et du Rectorat de l'Helvétie Bourguignonne; et comme ce prince était encore fort jeune, /32/ il lui donna pour tuteur Berthold II de Zæringen, mari d'Agnès sa fille aînée. 43
Outre les bénéfices royaux (beneficia), dont le Duc Rodolph jouissait à titre de haut-feudataire de la couronne, il possédait en propre dans la Transjurane plusieurs domaines allodiaux qui le plaçaient au rang des plus grands propriétaires territoriaux de l'Helvétie; telles étaient: les terres de Hüttwyll, de Seeberg et de Herzogenbuchsee dans l'Emmenthal. Quant aux fiefs héréditaires, ou bénéfices royaux, nous connaissons positivement ceux d'Arconcie, d'Illens, de Farvagny et de Sales dans la vallée de la Sarine; de Morat, Laupen et Lugnores dans le Vully; de Chexbres, Corsier, Lutry et Corbeyrier à La-Vaux, sur le lac Léman. La plus grande partie de ces fiefs situés dans le Pays Romand furent plus tard enlevés à sa maison 44.
Tandis que Rodolph parcourait l'Helvétie et s'avançait même jusques à l'Aar pour affermir l'autorité de son fils, l'Empereur Henri, rentré au mois de Juin en Allemagne par les Alpes Carniennes, était arrivé jusqu'à Ulm sans rencontrer d'obstacle. Il y tint en Juillet une Diète dans laquelle les Ducs Rodolph de Souabe, Welph de Bavière et Berthold de Zæringen furent déclarés criminels de lèse-majesté, jugés et condamnés à mort, et tous leurs biens /33/ confisqués au profit de la couronne et bientôt après distribués aux partisans de l'empereur 45. Alors commença entre les deux compétiteurs et leurs adhérans une guerre acharnée qui dura près de trois années presque sans interruption. La Souabe et l'Helvétie orientale en furent le principal théâtre. Chaque donjon, chaque couvent et jusqu'aux moindres villages devinrent tour à tour la proie de l'un ou l'autre parti. La Transjurane cependant eut moins à en souffrir parce que les Impériaux y conservèrent un ascendant plus décidé. /34/
BERTHOLD DE RHEINFELDEN
Second Recteur ou Duc
de la Bourgogne Transjurane
de l'an 1077 à 1093.
Dès le commencement de la querelle des investitures, Otton évêque de Constance, Burkard évêque de Basle, Burchard évêque de Lausanne et Hermenfried évêque de Sion, avaient encouru l'excommunication du Pape Grégoire VII pour avoir refusé de se soumettre aux nouveaux décrets de ce Pontife qui proscrivaient le mariage des prêtres 46. Burchard évêque de Lausanne, fils de Bucho (Burchard) Comte de Bargen et Seigneur d'Oltingen de même que l'évêque de Constance et beaucoup d'autres prêtres, avait une femme légitime dont le nom n'est pas connu; quoiqu'on lui attribue plusieurs fondations pieuses à Lausanne et à Marsens 47. Il refusa de s'en séparer et déclara qu'il aimait /35/ mieux faire divorce avec le sacerdoce qu'avec l'épouse qu'il s'était choisie!48
Il fut soutenu par sa riche et puissante parenté; les comtes d'Oltingen ses frères, les comtes de Fenis (Neuchâtel) ses cousins et leurs nombreux vassaux: par les Dynastes de Grandson qui comptaient dans leur clientèle plus de quarante chevaliers (milites) et par beaucoup d'autres seigneurs transjurains, qui tous étaient dévoués à la cause de l'empereur excommunié. L'évêque de Genève et les comtes de Genevois, les Sires de Faucigny et leurs nombreux clients, semblent avoir suivi l'exemple des comtes de Maurienne et gardé une sorte de neutralité entre le Pape et l'Empereur; d'autant plus naturelle qu'ils avaient, dit-on, contracté des alliances de famille avec Rodolph de Rheinfelden pendant son gouvernement sur la Transjurane 49.
Les évêques excommuniés auxquels se joignirent les comtes de Lenzbourg et de Habsbourg prirent les armes pour soutenir la cause de leur souverain légitime. Ils repoussèrent les efforts de Berthold de Zæringen qui s'avançant jusqu'au cœur de l'Helvétie, cherchait à délivrer son pupille le jeune Duc de Rheinfelden et la Duchesse Adélaïde assiégés dans leurs châteaux par les Impériaux. Il n'y parvint qu'après plusieurs tentatives plus ou moins heureuses; la /36/ Duchesse et son fils se retirèrent d'abord à Zurich, puis au château de Twiel (Duello) sur les bords du lac de Constance où cette princesse mourut aº 1079 50.
La ligue des Impériaux se trouva alors entièrement maîtresse dans toute l'Helvétie Bourguignonne. Ce signalé service méritait sans doute de la part de l'Empereur, une ample récompense à l'évêque de Lausanne, d'autant plus que pour subvenir aux frais de la guerre il avait aliéné beaucoup de biens de son Eglise 51. Aussi Henri IV dans un diplôme daté de Spire, lui accorda pour lui et ses successeurs l'investiture des domaines (proedia) de Morat (Muratum) Lutry (Lustriacum), Corsier (Corsier), Chexbres (Cubirasca), Lugnores (Luginares), et de tous les autres biens confisqués au Duc Rodolph et à sa famille qui se trouveraient situés entre la Sarine et le Jura; le pont du Rhône et les Alpes du mont Joux (St. Bernard) 52.
Cette charte célèbre dans les annales de l'Eglise de Lausanne est datée de la 2e Indiction de la 25e année de l'ordination de Henri IV, roi de Germanie et de la 23e année de son règne; ce qui correspond exactement avec l'an de notre Seigneur 1079. Ce diplôme fut confirmé par plusieurs des successeurs de ce prince dans les mêmes termes, notamment en 1145 53 par Conrad III roi des Romains. A la vérité cet acte ne fait mention que des domaines et de la juridiction /37/ attachée alors à la possession des grandes terres, sans y joindre aucune concession relative à la Souveraineté du territoire où ils étaient situés: néanmoins il remettait les évêques de Lausanne en possession des principaux apanages du Comitat de Vaud (Comitatus Waldensis) qui avait été conféré à leur Eglise en 1011 par le roi Rodolph III 54. Il dut leur rendre aussi la supériorité temporelle immédiate attachée à ce Comitat; car la bulle du pape Alexandre (de 1179) qui rappelle formellement le diplôme de l'Empereur Henri, ne permet pas de douter que sa donation ne comprît les droits régaliens dont les évêques n'ont cessé dès lors de jouir sur toute l'étendue des terres de leur Eglise 55.
Cette dignité de comte de Vaud, à laquelle il ne faut pas donner une trop grande importance, avait eu pour effet principal de soustraire les domaines de l'Eglise à la juridiction séculière des anciens Comtes du pays et notamment de Lambert de Grandson, le dernier des Comtes laïques; mais elle ne leur acquit aucun pouvoir sur les terres et les vassaux des Seigneurs qui relevaient immédiatement de la couronne, ni sur le temporel des monastères qui avaient chacun leur advoué (advocatus) ou gardiateur particulier.
Après six combats livrés à l'Empereur Henri par l'anti-César Rodolph, ce dernier fut blessé à mort par le célèbre Godefroi de Bouillon dans une bataille livrée près de l'Elster en Thuringe le 15 octobre 1080; il y remporta la /38/ victoire et mourut le lendemain 56. Sa mort mit fin au gouvernement de sa maison dans l'Helvétie Bourguignonne. Son fils Berthold vécut encore une douzaine d'année sous la protection de son beau-frère, Berthold de Zæringen; il se maintint en possession du Duché de Souabe dont les feudataires l'avaient reconnu malgré la donation faite par l'Empereur de ce duché à Fréderic de Stauffen. Le vaillant Duc de Zæringen ne cessa de guerroyer contre le compétiteur de son pupille 57, qu'à la mort prématurée de ce jeune Prince arrivée au mois de mai 1093 58. /39/
PARTAGE DU RECTORAT.
BERTHOLD II DE ZÆRINGEN.
GUILLAUME III ET GUILLAUME IV.
Comtes de Bourgogne.
de l'an 1093 à 1127.
Agnès fille de Rodolph de Rheinfelden avait épousé vers l'an 1077 Berthold II de Zæringen: elle fut l'unique héritière des grands domaines allodiaux que son père et son frère avaient possédé dans l'Helvétie Bourguignonne 59. C'est ce que prouve la charte de 1108, dans laquelle elle prend le titre de fille de Rodolph roi d'Arles et mère du Duc Berthold III de Zæringen. Elle y concède an monastère de St. Pierre dans la Forêt noire, la terre de Herzogenbuchsée; comprenant les paroisses de (Herzogen) - Buchsée de Séeberg et de Huttwyl, situées dans la Bourgogne Alémanique: domaines qui faisaient partie de ses biens propres (quæ ipsa jure proprio possederat) 60. /40/
Agnès porta en outre en dot à son mari Berthold II, toutes les prétentions de sa famille sur le Rectorat de la Transjurane et sur le Duché de Souabe.
Effectivement les Seigneurs de la Souabe attachés à la famille des Rheinfelden, et animés par les conseils de Gebhart Evêque de Constance, frère de Berthold de Zæringen élurent Duc ce dernier, dans une assemblée tenue à Ulm en 1093, et par opposition à Fréderic de Stauffen, auquel Henri IV avait, comme nous l'avons dit plus haut, donné l'Investiture de ce duché en lui accordant sa fille en mariage 61.
Berthold maître de la Thurgovie et de la Souabe fit la guerre à son compétiteur avec des chances diverses jusqu'à la fin de 1097, où eut lieu la paix générale que l'Empereur conclut avec le parti ultramontain. Il fut obligé d'abandonner la Souabe Alémanique jusqu'au Rhin, mais il conserva héréditairement le vicariat impérial sur la Souabe Helvétique qui comprenait la Thurgovie, le territoire et la ville de Zurich avec l'advouerie de ses deux monastères. Il reçut le titre (honoraire) de Duc sous la mouvance directe de l'Empire 62. Ce fut alors que l'Alémanie Helvétique renfermée entre la Reuss et le Rhin fut définitivement détachée du Duché de Souabe et forma une province séparée.
La charte de donation de Herzogenbuchsée, faite par la Duchesse Agnès en 1108 et confirmée en 1112 par ses deux fils Berthold et Conrad 63 sans l'intervention d'aucune /41/ autorité supérieure semble prouver que les Ducs de Zæringen entrèrent immédiatement en possession du pouvoir rectoral attribué à la maison de Rheinfelden dans la Bourgogne Alémanique (entre l'Aar et la Reuss) et leur domination paraît dès lors avoir été reconnue dans toute la portion du Diocèse de Constance située dans l'Helvétie. Il n'en fut pas de même des contrées entre l'Aar et le Jura qui ressortissaient du Diocèse de Lausanne; mais avant de le démontrer il est nécessaire de reprendre les événemens de plus haut et de se reporter à l'inféodation de cette partie de la Transjurane faite par l'Empereur Henri en 1079 à l'évêque Burchard d'Oltingen.
Ce prélat belliqueux, mieux fait pour brandir une arme de guerre que pour manier la crosse pastorale, n'avait cessé de combattre pour son souverain et bienfaiteur. Il fortifia Morat et releva les murs ruinés de l'antique Cité d'Avenches pour défendre le pays du côté de la Bourgogne Alémanique 64. Il accompagna l'Empereur dans la guerre de Thuringe, portant devant le monarque le labarum ou lance sacrée du Grand Constantin, et il fut enfin tué à ses côtés sous les murs de la petite ville de Gleichen la veille de Noël 1089 65.
Il eut pour successeur au siège épiscopal de Lausanne Lambert, fils de Lambert, comte patrimonial de Grandson.
L'évêque Lambert dut sa nomination au chapitre de Lausanne et prêta entre les mains de Hugues III, archevêque /42/ de Besançon, le serment ordinaire de ne point diminuer les biens de son Eglise. Il prêta en outre serment de fidélité à l'Empereur, à cause de la souveraineté temporelle et du titre de Comte attachés à son siège, et s'engagea à ne point aliéner les grands domaines royaux sans l'autorisation du Souverain 66. Cependant comme Lambert avait reçu l'ordination du Pape schismatique Guibert (Clément III), intronisé par le parti impérial, il fut excommunié par Urbain II, élu Pape par le parti Guelfe 67. Cette interdiction ne l'aurait point empêché de se maintenir sur son siège épiscopal s'il ne s'était bientôt après brouillé avec son clergé. Les Chroniques de l'Eglise de Lausanne reprochent à ce Prélat d'en avoir spolié les biens pour enrichir ses parens, et entr'autres d'avoir donné (prestavit) à son neveu Walter (ou Vaucher, Vauthier) surnommé de Blonay, la Seigneurie de Corsier, qui comprenait alors une portion de la ville de Vevey 68. Les Chroniqueurs ajoutent que Lambert, touché d'un grand repentir d'avoir enfreint le double serment qu'il avait prêté à l'Eglise et à l'Empereur, se déroba furtivement du palais épiscopal de St.-Maire, dès la seconde année de son épiscopat, et se retira dans une solitude ignorée, où il mourut en 1101. La superstition populaire s'empara de cette fuite clandestine et on répandit le bruit qu'il avait été saisi et emporté par le Diable 69. Mais l'histoire fait justice de ces traditions mensongères, et comme pendant son administration Lambert n'avait fait qu'imiter l'exemple de son prédécesseur, qui ne fut nullement blâmé pour avoir concédé à son propre frère (le Comte Conon, Seigneur d'Oltingen) /43/ les grandes seigneuries (curias) de Ressudens et de Lugnores (en Vully 70), presque dans le même temps où l'Empereur venait d'en faire don à l'Eglise de Lausanne, il faut chercher un autre motif à la proscription de cet Evêque. L'illustre famille à laquelle il appartenait était à la tête du parti bourguignon ou romand. Elle seule balançait par sa richesse territoriale l'ascendant toujours croissant de la maison de Neuchâtel, autour de laquelle se groupait le parti teutonique. Il est vraisemblable que l'élection de Lambert de Grandson due aux efforts du parti romand, qui avait momentanément repris le dessus, inspira de la jalousie aux Impériaux et qu'à force de récriminations exagérées et d'intrigues bien ourdies ils parvinrent à contraindre le prélat à résigner son siège en faveur de Conon fils d'Ulrich comte de Fenis (Neuchâtel), cousin germain de Burchard, prédécesseur de l'Evêque Lambert. Conon de Neuchâtel fut en effet immédiatement élu à sa place en 1091 71. Au reste, l'espèce de réprobation dont la mémoire de l'Evêque Lambert resta frappée semble une suite naturelle de la réaction qui s'opéra dans les esprits après la mort de l'Empereur Henri IV en 1106. Son fils, Henri V, réconcilié avec l'Eglise de Rome, à laquelle il abandonna les investitures par le traité de Sutri (9 février 1111), ne se réservant que les droits régaliens sur le temporel du Clergé, déclara l'Evêque Lambert schismatique et coupable de félonie et annula la donation qu'il avait faite à son neveu Walter de Blonay 72, quoique le malheureux Prélat n'eût /44/ réellement commis aucun autre crime que celui de vivre dans un temps de trouble et de confusion générale.
L'élection de Conon (ou Conrad) au siège épiscopal combla la mesure des grandeurs de la dynastie neuchâteloise. Déjà en 1082, un autre Conon, son cousin germain, fils et successeur de Bucco dans le comté d'Oltingen 73, avait obtenu de l'empereur Henri IV l'investiture du Comté de Thyr, comprenant les grandes seigneuries d'Arconciel, d'Illens, de Farvagny et de Sales sur les bords de la Sarine, 74 confisqué, comme nous l'avons vu plus haut, sur le Duc Rodolph. Ainsi dès le commencement du XIIe siècle la maison (ou Chéseau) de Neuchâtel était divisée en plusieurs branches qui portaient alors les divers noms d'Oltingen, de Thyr ou Seedorf, de Fenis (Vinelz) ou Hasenburg 75, et qui dominaient sur toute la rive gauche de l'Aar, formant ce que l'on appelait l'Inselgau, aujourd'hui le Séeland; sur les riches coteaux du territoire de Neuchâtel que l'on nommait alors la Terre Rouge (terra rubea); sur le Vully et sur le cours inférieur de la Sarine. — Néanmoins, selon l'ancienne coutume bourguignonne, « tous les domaines et les fiefs démembrés pour former la part d'héritage ou l'apanage des puînés d'une même famille restaient /45/ soumis perpétuellement à la mouvance de l'aîné » 76. En conséquence le Comte Conon d'Oltingen, chef de sa race, avait la suzeraineté sur tous les domaines et les fiefs de sa maison, quoique plusieurs branches cadettes fussent parfois décorées du titre honorifique de Comte. A lui seul appartenait l'exercice de la justice souveraine et des droits régaliens, notamment sur la totalité de la rive gauche de l'Aar, qui depuis fut appelée le Comté provincial ou Landgraviat de l'Aar (Landgraviatus circa Ararim 77).
Quoique le territoire de Neuchâtel (terra rubea) proprement dit fut peut-être dans l'origine un franc alleu (alludium) plutôt qu'un fief il n'était point exempt de cette mouvance primordiale, comme on le verra par la suite. — Le territoire de la Neuville et du Landeron, ou le Val-de-Neureu (Nugerol) avec le Val-de-Saint-Imier, le Val-de-Moustier (l'Erguel) et le territoire de Sainte-Ursanne, (Sornegaw) appartenait au temporel à l'évêque de Bâle; Bienne et la montagne de Diesse (Tessen) était une réserve de la couronne (reservata imperii), et le Saltzgaw (Salis gaudia), ou la prévôté de Soleure, relevait de l'église collégiale de Saint-Urs de cette ville, qui en inféoda bientôt une bonne partie à la maison de Neuchâtel 78.
On a vu plus haut quelle était l'étendue du pouvoir temporel de l'évêque de Lausanne; mais quoique, d'après les termes de l'investiture de 1079, il dût s'étendre depuis le Saint-Bernard au pont de Genève, cependant les Comtes de Maurienne étaient suzerains dans la province d'Agaune /46/ jusqu'à la Veveyse, et les Comtes de Genève dans le pays des Équestres ou de Nyon jusqu'à l'Aubonne.
C'est aussi vers cette époque que commence à paraître dans les hautes vallées de la Sarine la domination pastorale des Comtes d'Ogô (Hoch-gau ou pays-d'enhaut), qui régnèrent plus tard sous le nom de Comtes de Gruyère.
Guillaume 1er fonda en 1085 le prieuré de Rougemont; il en augmenta la dotation en 1115 en partant pour la croisade. Les domaines de cette famille s'étendaient depuis les glaciers du Sanetsch jusqu'à Bulle, où ils touchaient aux terres de l'évêque de Lausanne et des Comtes de Thyr 79.
Vers le Jura, les dynastes de Grandson rivalisaient avec la maison de Neuchâtel et dominaient presque souverainement depuis Boudri à Montricher. Divisée en plusieurs branches, cette famille était sous la mouvance directe du chef de la race, feudataire immédiat de la Couronne. Leurs vastes possessions étaient coupées en deux par la vallée de l'Orbe, appartenant aux Comtes de la Haute-Bourgogne. Entre la Venoge et l'Aubonne on trouvait les seigneuries de Cossonay, de Wufflens, de Mont et d'Aubonne qui, comme on l'assure, appartenaient à des Seigneurs de la même origine 80.
Tel était alors, généralement parlant, l'état politique de la Transjurane et la manière dont son territoire se trouvait partagé entre les grands vassaux ecclésiastiques et laïques. Le Landgrave Conon d'Oltingen mourut vers l'an /47/ 1107 81, ne laissant qu'une fille nommée Régine, mariée à Rainaud II, Archi-Comte de Haute-Bourgogne 82.
La mort de Conon arrêta brusquement la puissance toujours croissante de la dynastie de Neuchâtel et fournit un exemple remarquable des obstacles que la loi d'hérédité bourguignonne opposait à la durée des grandes seigneuries. Tous ses domaines patrimoniaux, tous les fiefs qu'il tenait de la munificence de l'empereur passèrent dans la maison des comtes de la Haute-Bourgogne et échurent à Guillaume III, fils de Rainaud II et de Régine 83.
Guillaume III, que son aïeul maternel avait élevé auprès de lui à Oltingen, ce qui lui valut le surnom d'allemand (alemannus) 84, succéda héréditairement au Comte Conon dans le Landgraviat de l'Aar et dans ses droits à la mouvance directe des apanages de toutes les branches de la maison d'Oltingen (ou Neuchâtel.) C'est en cette qualité qu'en 1107 il donna à l'abbaie de Cluni Belmont, près de Nidau, et l'Ile Saint-Pierre, dans le lac de Bienne, appelée l'Isle des Comtes (insula comitum). Le Comte de Bourgogne fit cette donation pour le repos de l'âme du Comte Conon son aïeul (avus) et son père nourricier (nutritor) 85.
Guillaume l'allemand se trouvant à Salins en Bourgogne y stipula un acte de donation en faveur du Sire de Beaujeu qu'il fit attester selon l'usage par les chevaliers de sa /48/ suite, dans le nombre desquels se trouvaient: Ulrich de Pelpa (Belp, près de Berne), Hupold de Laupen, Hugues de Villars-Walbert (Villaubert), qui appartenaient à la Transjurane 86.
La Bourgogne alémanique, située à la rive droite de l'Aar, et particulièrement la Haute-Argovie, qui s'étendait depuis la source de cette rivière jusqu'au pont d'Arvangen, (canton de Berne), et qui dès lors prit le nom de Landgraviat de la petite Bourgogne, appartenait au Duc Berthold de Zæringen, en vertu du traité conclu en 1097 entre lui et Fréderic de Stauffen, nouveau Duc de Souabe. Sa mouvance aurait dû s'étendre également sur la rive gauche de l'Aar; mais le Comte Guillaume l'allemand ayant épousé Anne de Zæringen, fille de Berthold II 87, ce mariage donna vraisemblablement lieu à un accommodement (dont les clauses ne nous sont pas connues) par lequel le Duc de Zæringen semble avoir momentanément abandonné toutes les prétentions qu'il aurait pu former en qualité de Recteur sur les terres ultra-juranes de la mouvance du Comte Guillaume; /49/ il n'est pas présumable d'ailleurs que celui-ci se soit volontairement soumis à la suzeraineté du Duc. La domination de l'Helvétie bourguignonne se trouva donc par le fait partagée entre les Ducs de Zæringen et les Comtes de Haute-Bourgogne par le cours de l'Aar.
Guillaume l'allemand, en prenant possession de ses nouveaux domaines, amena à sa suite plusieurs Chevaliers de la Cisjurane auxquels il distribua des terres considérables; tels furent: les Seigneurs de Glanna (Glane) issus, dit-on, des anciens Comtes de Vienne et alliés aux Comtes de Bourgogne 88. Ulrich de Glane (marié à une Dame du pays nommée Richlande (Rilenta), qui était peut-être de la famille des Seigneurs de Villars-Walbert 89 mentionnés un peu plus haut parmi les vassaux du Comte Guillaume, fut investi par lui, sous la mouvance directe des Comtes de Haute-Bourgogne, d'une partie du Vully et des grandes terres d'Arconciel et d'Illens qui, avec les dépendances de Farvagny et de Sâles, embrassaient toute la vallée qu'arrose la Glane et une partie des eaux inférieures de la Sarine 90. De son mariage avec Richlande de Villars-Walbert /50/ (Walperswyll) Ulrich de Glane eut deux fils nommés Pierre et Philippe.
Guillaume III, dit l'allemand, mourut de mort violente et mystérieuse en l'an 1125 (ou 1126), au retour d'un voyage à Strasbourg, où il s'était rendu, avec l'Archevêque Anséric de Besançon, l'Evêque Gérold de Lausanne et les principaux Seigneurs de l'Alsace et de l'Helvétie, pour y recevoir l'Empereur Henry V, et où il se trouvait encore le 8 janvier 1125 91. Les Traditions bourguignonnes racontent qu'au milieu du festin de la Pentecôte un inconnu le fit appeler hors de la salle du banquet et que dès-lors on ne le revit plus 92. Il laissa un fils unique du même nom qui devint son héritier universel de l'un et de l'autre côté du /51/ Jura, et qui fut surnommé l'Enfant (puer) parce qu'il atteignit à peine l'âge de l'adolescence 93. Il ne survécut qu'une ou deux années à son père. Un complot fut ourdi contre sa vie par des gens de son entourage particulier (a suis) qui, se sentant coupables du meurtre secret du père, attentèrent à la vie du fils, afin de se soustraire aux justes châtimens qui tôt ou tard devaient les atteindre lorsque celui-ci aurait atteint l'âge viril.
Guillaume IV, dit l'Enfant, dont la jeunesse avait été confiée à la fidélité des Sires de Glane, résidait habituellement dans la Transjurane, et selon la pieuse coutume des tems il s'était retiré à l'Abbaie de Payerne pendant le carême pour s'y préparer aux solennités religieuses de Pâques. Les conjurés saisirent le moment où il se trouvait en oraison devant l'autel pour assassiner traîtreusement leur jeune maître, le mardi premier mars de l'an 1127. (Nouveau style 94.) /52/
Pierre et Philippe de Glane, ainsi que d'autres fidèles Chevaliers de la suite du prince, périrent misérablement en voulant le défendre ou le venger, et leurs restes furent ensevelis avec ceux de leur jeune chef dans le prieuré de l'île /53/ de St.-Pierre au lac de Bienne, fondé par le Comte son père 95.
Rainaud III, Comte de Mâcon, cousin germain de Guillaume l'allemand, son plus proche parent du côté paternel, lui succéda dans la souveraineté de la Haute-Bourgogne, et hérita aussi de la suzeraineté sur les territoires transjurains qui lui venaient du côté maternel. Loin d'abandonner ses prétentions sur la mouvance des fiefs de la maison de Glane et sur ceux de la maison de Neuchâtel, les descendants de Rainaud les firent valoir avec succès vers la fin du siècle suivant. /54/
CONRAD DE ZÆRINGEN
Troisième Recteur ou Duc
de la
Bourgogne Transjurane.
de l'an 1127 à 1152.
Berthold II de Zæringen, recteur impérial dans l'Helvétie alémanique, était décédé le 12 avril 1111 96. Son fils Conrad en lui succédant ne renonça point à l'espoir de ressaisir le rectorat de l'Helvétie bourguignonne. Il profita des circonstances dès qu'elles lui parurent favorables pour réussir dans cette entreprise. La dynastie des Empereurs et Rois de Bourgogne de la maison de Franconie s'était éteinte le 23 mai 1125 par la mort d'Henri V. — Lothaire de Suppelenbourg, Duc de Saxe, avait été couronné roi de Germanie, à Aix-la-Chapelle, le 13 septembre de la même année. Le nouvel Empereur cita le Comte Rainaud à comparaître devant lui pour lui faire hommage de son comté et des fiefs qu'il possédait dans les deux /55/ Bourgognes. Mais Rainaud refusa, alléguant que ses dignités et ses fiefs ne relevaient que du royaume de Bourgogne et que l'Empereur Lothaire ne descendant pas de la maison de Franconie, héritière des anciens rois Rodolphiens, il n'était pas en droit d'exiger l'hommage des feudataires de cette couronne. Il soutenait même que, par l'extinction de la race de ses rois légitimes, la couronne était devenue élective et qu'en attendant il se trouvait par le fait indépendant, ne relevant ainsi que de Dieu et de son épée 97.
Lothaire prétendit au contraire que le royaume de Bourgogne étant depuis un siècle uni de fait à la couronne de Germanie il l'était aussi de droit en vertu de la prescription. Sur ce fondement contestable l'Empereur réunit une diète à Spire à laquelle assistèrent un grand nombre de hauts-feudataires du royaume de Bourgogne; Rainaud y fut déclaré forfait et déchu de son droit à l'héritage de son parent. En conséquence il fut mis au ban de l'Empire et tous les fiefs de l'un et de l'autre côté du Jura adjugés à Conrad de Zæringen, frère d'Agnès, mère de Guillaume l'Enfant, qui se trouvait le plus proche parent de ce dernier du côté maternel 98. Conrad de Zæringen fut en outre investi du rectorat de la Cisjurane et de la Transjurane avec le titre de Duc de Bourgogne (Dux Burgundiæ) et chargé par l'Empereur de l'exécution de la sentence de proscription prononcée contre Rainaud 99. /56/
Le nouveau recteur rencontra la plus forte opposition de la part des Evêques et des hauts-feudataires des deux Bourgognes, chez lesquels l'exemple du Comte Rainaud avait réveillé des sentimens d'indépendance et de nationalité. La plupart se rallièrent à sa cause. Avec leur appui Rainaud livra plusieurs combats au Duc Conrad, dans lesquels il remporta la victoire, mais ensuite il fut vaincu à son tour, fait prisonnier et conduit à Strasbourg devant l'Empereur. Loin d'être humilié par sa défaite, Rainaud plaida sa cause et défendit ses droits avec autant de noblesse que d'énergie. Il rappela l'illustration de sa race, issue des anciens rois d'Italie; il représenta qu'en Bourgogne le titre de Comte supérieur équivalait à celui de Duc dans d'autres états; que sa cause devenait ainsi celle des princes même auxquels il s'adressait, et qu'en le forçant à s'abaisser au rang de vassal de son vainqueur ils compromettaient leur propre dignité. Sa fière apologie entraîna les suffrages unanimes des grands de l'empire, qui lui rendirent aussitôt la liberté et s'affranchirent de toute espèce de vasselage, sous la réserve de la simple allégeance, dont aucun feudataire de la couronne ne pouvait être dispensé 100
Ce fut dès lors que la haute Bourgogne prit le nom de Franche-Comté, parce que cette province était le seul comitat de l'Empire qui ne fut pas soumis à la suzeraineté intermédiaire d'un Duc 101.
L'Empereur Lothaire mourut le 4 décembre 1137. — L'élection de Conrad III de la maison de Stauffen, qui par /57/ Agnès sa mère était petit-fils d'Henri IV et descendant des anciens rois de Bourgogne, porta un coup fatal à la fortune et à la puissance du Duc Conrad de Zæringen, qui ne tendait à rien moins qu'à s'emparer de la suzeraineté de tout le royaume de Bourgogne et d'Arles. Il avait embrassé le parti d'Henri-le-Superbe, Duc de Bavière, gendre de Lothaire et compétiteur de la maison de Stauffen 102. Fréderic Barberousse, fils du Duc de Souabe et neveu du nouveau roi de Germanie, entra en Thurgovie en 1138; il enleva au Duc Conrad l'avouerie impériale (Reichs-vogtei) de Zurich et y établit, sous l'autorité du duché de Souabe, Wernher de Lenzbourg, Comte de Bade, en qualité de lieutenant ou préfet (praefectus) 103. Puis il repassa le Rhin, envahit les domaines patrimoniaux de la maison de Zæringen dans le Brisgau, s'empara même du château de ce nom, réputé imprenable, et força le Duc à se rendre à la diète de Bamberg (mai, 1138) pour implorer la grâce du roi de Germanie. Celui-ci le reçut avec indulgence: il lui rendit le titre de Duc de Bourgogne (Dux Burgundiae) ainsi que tous les honneurs et les biens qui lui avaient été momentanément enlevés 104. Dans le nombre se trouvaient le gouvernement du territoire (comitatus) de Zurich et l'avouerie impériale de la ville de ce nom; mais le Duc de Zæringen dut laisser au Comte Wernher la préfecture ( Kast-vogtei, praefectura) de cette cité et de ses deux monastères 105. Quant au /58/ Landgraviat de la petite Bourgogne à la droite de l'Aar, Conrad y exerça, comme avant sa disgrâce, tous les droits attachés au rectorat; c'est ce que prouvent:
1º La fondation du monastère de Frienisberg (mons aurora) de l'ordre de Citeaux (près d'Arberg) faite par le Comte Udelhard (de Thierstein), surnommé de Seedorf, (ou de Laupen) de l'année 1131, laquelle est datée Ducatum Burgundiae nobiliter regente Duce Conrado (de Zæringen). 106
2º La donation de Trüb (dans l'Emmenthal), qui est à peu près du même tems (anni 1127) et datée dans les mêmes termes. 107.
3º La donation de la forêt d'Insentwald (sur le lac de Brientz), de Shönegg et de la vallée de Grindelwald, faite au monastère d'Interlacken par le Duc Conrad de Zæringen en l'an 1146 108. Ces terres, situées dans le Diocèse de Lausanne, étaient du fisc, ou domaine royal, dont le Duc avait l'usufruit comme Recteur. Cet acte prouve aussi que Conrad était Avoué du monastère d'Interlacken.
4º Enfin, l'oblation qu'Eglolf, Seigneur d'Opelingen, fit en 1146 au monastère de Frienisberg de divers biens qu'il possédait en propre avec son frère à Neureu (Nugerol ou Landeron), dans le Diocèse de Lausanne, en présence du Duc Conrad, qui tenait les Assises publiques à Worb (près /59/ de Berne) accompagné de ses deux fils Berthold et Albert. La charte est datée: Primatum Burgundiae obtinente Duce Conrado 109. On voit par ces mots qu'on donnait à Conrad le titre de Duc et de Primat plutôt que celui de Recteur, qui ne fut employé que plus tard, pour distinguer le Duché de la Bourgogne Helvétique de celui d'outre-Saône, grand fief de la couronne de France.
Il y a toute apparence que ce fut le Duc de Zæringen qui investit les seigneurs de Bûchegk du titre de Comte ou Landgrave de la petite Bourgogne (entre l'Aar et la Murgeten), dignité que cette même maison a exercée héréditairement depuis le XIIe siècle sous la mouvance des Recteurs 110. Quant aux dynasties de la maison de Neuchâtel, les annales de cette grande famille prétendent que le Comte Rodolph II, devenu par l'extinction de la branche d'Oltingen chef de sa maison et Landgrâve de l'Aar (circa Ararim), garda une sage neutralité entre le Comte Rainaud et le Duc Conrad; mais elles attestent aussi que dès ce moment les Comtes de Neuchâtel furent constamment attachés au parti des Recteurs de la maison de Zæringen 111, pour se préserver de la suzeraineté des Comtes de Bourgogne qu'ils ne voulaient point tolérer parce qu'elle les rabaissait au rang de Comtes-vassaux d'un autre Comte.
Il est évident que lorsque Conrad ratifia, déjà en 1146, la donation faite au monastère de Frienisberg d'une terre qui se trouvait près du Landeron, au centre des possessions du /60/ Comte Rodolph de Neuchâtel, le Duc était considéré comme suzerain de la contrée et que son approbation était nécessaire pour rendre valide l'aliénation d'un domaine fiscal 112.
Vers le même temps la lignée masculine des Seigneurs de Glane s'éteignit dans la personne de Guillaume, fils unique de Pierre de Glane, traîtreusement assassiné avec son prince dans l'église de Payerne 113. Les vastes possessions de cette riche maison n'avaient pas cessé de s'accroître; elles formaient comme une petite souveraineté entourée des terres des maisons de Neuchâtel et de Gruyère entre le mont de Vully et le mont Pèlerin dans le Jorat 114. Guillaume de Glane, privé de postérité et dégoûté du monde, avait fondé en 1137 la vénérable abbaie d'Hauterive. Elle fut bâtie sur les bords escarpés de la Sarine dans un lieu désert avec les propres pierres du château de Glane, situé, à une demi lieue de là, au confluent de la Glane et de cette rivière 115. Il y appela des moines de l'ordre de St. Bernard de Clairvaux tirés de l'abbaie de Cherlieu en Bourgogne, dota richement son nouveau monastère et y mourut sous l'habit de frère-convers le 7 février 1142 116. /61/
Les grands domaines de cette maison furent alors partagés entre ses quatre sœurs 117, suivant la loi bourguignonne. Emma, l'aînée, mariée à Ulrich III, fils du Comte Rodolph II de Neuchâtel, lui porta Arconciel et Illens, l'avouerie héréditaire de l'abbaie d'Hauterive et les terres du Vully 118. Itta, femme d'Aymon II, Comte de Genève, enrichit son fils Amédée Ier de plusieurs terres autour du mont Pélerin dans le Jorat, entr'autres de celles de Palézieux, Peney, la Dausaz, Essertes, et de forêts considérables, dont il abandonna plus tard l'usage à l'abbaie d'Hautcrêt (en 1162) 119. Guillaume, fils d'Amédée Ier, ayant hérité de ces mêmes seigneuries en prit occasion /62/ d'ajouter à son titre de Comte de Genevois celui de Comte des Vaudois (Comes Gebenensium et Valdensium) 120. Juliane, troisième sœur du sire de Glane, épousa Guillaume de Montsalvens 121, puîné de la maison de Gruyère; elle fut mère de Pierre de Montsalvens, auquel elle laissa les terres de Pont en Ogô, de Cottens sur Autignie, ainsi que la seigneurie de Fonts, sur la rive orientale du lac de Neuchâtel, où domine encore la tour dite de La Molière 122. Enfin, la quatrième, nommée Agnès, mariée à Rodolph, Comte en Ogô, ou de Gruyère, eut pour sa part, entr'autres, Sâles et le Val-de-Charmey, dont le Pré-de-l'Essert (arenaria de pratellis) est le plus ancien pâturage, ainsi que les domaines situés dans la Gruyère inférieure 123.
Conrad de Stauffen, roi de Germanie, avait, depuis son avènement au trône, sommé plusieurs fois le Comte Rainaud de Bourgogne de s'acquitter envers lui de ses devoirs d'allégeance. Il lui réitéra encore cette sommation en 1147, avant son départ pour la croisade, « mais le Franc-Comte trop confiant dans la justice de sa cause, ou livré à l'indolence naturelle à son caractère, négligea de se rendre à la cour du roi 124. » Le monarque offensé usa envers lui du droit /63/ rigoureux de l'empire en le proscrivant une seconde fois et en confisquant tous ses fiefs, qu'il rendit de nouveau au Duc Conrad de Zæringen en le chargeant de l'exécution de la sentence royale. Les hostilités, qui n'avaient, à vrai dire, jamais entièrement cessé entre les deux rivaux, recommencèrent aussitôt avec un nouvel acharnement.
Après avoir épuisé leurs ressources dans plusieurs combats, enflammés d'une inimitié mortelle, ils en vinrent à se rencontrer dans un duel corps à corps qui n'eut cependant aucun résultat décisif 125. « Néanmoins le Franc-Comte qui combattait pour les intérêts bourguignons et pour la liberté de son pays (pro re burgunda et pro libertate suorum 126 » ) resta le maître dans ses états héréditaires. Conrad, qui s'était retiré dans le pays allemand pour y rassembler de nouvelles forces contre Rainaud, se préparait à l'attaquer de nouveau lorsqu'il reçut la nouvelle de sa mort, arrivée le 20 janvier 1148 127. Cet événement imprévu semblait devoir assurer au Duc de Zæringen une prépondérance définitive sur toute l'Helvétie, mais la mort en le frappant bientôt vint aussi mettre un terme à ses ambitieux projets. Il mourut le 8 janvier 1152 128, léguant à son fils aîné, Bertold IV, ses titres et ses prétentions à la souveraineté de l'Helvétie.
Conrad, roi de Germanie, suivit de près le Duc de Zæringen dans la tombe: il mourut le 16 février 1152. Son neuveu, le célèbre Fréderic Barberousse, lui succéda et fut couronné à Aix-la-Chapelle le 9 mars de la même année.
BERTHOLD IV DE ZÆRINGEN
Quatrième Recteur ou Duc
de la
Bourgogne transjurane.
de l'an 1152 à 1180.
/64/ Rainaud III ne laissant qu'une fille, nommée Béatrix, son frère Guillaume, Comte de Vienne et de Mâcon, s'empara d'abord de l'héritage de sa nièce et la retint dans une étroite captivité 129. Le roi de Germanie irrité d'une conduite aussi déloyale se montra d'autant plus incliné à écouter les prétentions que Berthold IV formait sur le rectorat que lui-même, comme descendant des anciens rois de Bourgogne par Agnès de Franconie son ayeule, était bien résolu à ressaisir sur le royaume de Bourgogne et d'Arles l'autorité que les troubles de l'empire avaient rendu presque /65/ illusoire 130. En conséquence il conclut avec le Duc de Zæringen un traité particulier, où il fut stipulé:
1º que Fréderic Ier (qui n'était encore que roi de Germanie) investissait dès ce moment le Duc Berthold de la lieutenance générale (ou du rectorat) des deux Bourgognes et de la province d'Arles, se réservant toutefois le gouvernement suprême de ces états tant qu'il y séjournerait en personne.
2º Les archevêchés et évêchés relevant immédiatement de la couronne (quæ ad manum Domini Regis pertinent) furent formellement exceptés de cette inféodation générale; toutefois les prélats de la cisjurane qui avaient coutume de recevoir l'investiture de leur temporel du Comte Guillaume de Mâcon ou de tout autre prince laïque devaient la recevoir désormais exclusivement des mains du Duc.
3º Le roi de Germanie s'engageait à entrer en personne dans les provinces bourguignonnes à la tête d'une armée à laquelle le Duc devait se joindre accompagné de mille cavaliers cuirassés (Equites loricatos) et à mettre ce dernier en possession réelle (bona fide) de l'autorité rectorale complète, au jugement des princes de sa suite.
4º Le Duc s'engagea à faire justice des usurpations du Comte Guillaume et à remettre la jeune Béatrix en possession de son héritage, en se conformant à cet égard à la sentence que les princes devaient prononcer contre le coupable.
5º Quand le roi marchera en Italie pour y faire reconnaître sa suprême autorité, le Duc l'accompagnera à la tête de 500 casques et de 50 arbalétriers bien équipés.
6º Le roi Fréderic remettait au Duc comme gage de ses promesses (in pignore) son propre alleu (allodium), savoir: /66/ le château de Teck (en Souabe) avec tous les domaines et les vassaux qui en dépendaient.
7º Enfin, le roi devait entrer avec son armée en Bourgogne au plus tard le jour des Kalendes de juin suivant (indiction XV), c'est-à-dire le premier juin de l'an 1152 131.
A dater de ce traité, on remarque plusieurs chartes de Fréderic Ier, des années 1152, 1153 et 1154, où Berthold de Zæringen se trouve mentionné au nombre des princes de sa suite avec le titre de Duc ou de recteur de Bourgogne, ce qui prouve que cette convention mutuelle reçut un commencement d'exécution 132. Effectivement Berthold entra en Bourgogne par le territoire de Montbéliard et fit une guerre acharnée au Comte Guillaume de Mâcon 133. Fréderic Barberousse le suivit bientôt en personne et vint à Besançon au mois de février 1153 134. Il y reçut la soumission du Comte Guillaume, qui, par cette démarche et en remettant sa nièce Béatrix au pouvoir du monarque, paraît avoir échappé à la sentence de proscription qui allait être prononcée contre lui. L'Empereur mit la jeune Comtesse de Bourgogne sous la garde du preux et vaillant Comte Ulrich de Lenzbourg 135. Il réunit ensuite un synode à Constance /67/ au mois de mars suivant, où il fit prononcer pour cause de parenté la dissolution de son mariage avec Adélaïde de Vohburg, dans le projet sans doute d'épouser l'héritière de Bourgogne dès qu'elle aurait atteint l'âge convenable 136.
Berthold de Zæringen, fidèle à ses engagemens, le suivit en Italie accompagné des hommes-d'armes de la Transjurane 137, et lui rendit des services signalés se trouvant auprès du Monarque à Rivarola au mois de janvier 1155, peu de mois avant son couronnement comme Empereur à Rome (18 juin 1155 138 ). Le Duc étant en Italie céda en qualité de Recteur du royaume de Bourgogne et d'Arles (divina favente clementia Dux Burgundiæ) et avec l'approbation de son Souverain (coram domino Romanorum Rege) à Guy André, Comte d'Albon, toutes ses prétentions sur le comté de Vienne, au préjudice de Guillaume de Mâcon, dont les droits sur ce comitat se trouvaient engagés depuis 50 ans, pour une forte somme d'argent, à l'archevêque de Vienne 139. Berthold prenait en même tems l'engagement de faire la guerre au Comte Guillaume jusqu'à ce qu'il eût mis Guy d'Albon en pleine possession du Viennois. En revanche celui-ci s'engageait à aider le Duc dans toutes ses entreprises et à tenir en tous tems la ville de Vienne ouverte à son commandement. L'Empereur Fréderic, après avoir triomphé au midi des Alpes, revint en Germanie, et au mois de juin de l'an 1156 il épousa à Wurtzbourg la jeune et riche /68/ héritière du Comte Rainaud III de Bourgogne 140. Ce mariage, en confondant les droits patrimoniaux que la Comtesse Béatrix apportait en dot à son mari avec ceux que Fréderic tenait déjà de sa naissance, changea totalement la position réciproque de l'Empereur et du Duc. Le traité de l'an 1152 qui avait investi ce dernier de la régence de Bourgogne ne pouvait plus subsister puisque la Majesté Royale s'opposait absolument à ce que le Duc Berthold conservât aucune suprématie sur les domaines et les vassaux de l'épouse de son Souverain. Aussi le Duc de Zæringen dut-il s'estimer heureux d'accepter du Monarque tout-puissant une transaction honorable et qui semblait lui offrir quelque compensation aux grandeurs qu'il avait entrevues. Il est à regretter que le texte même de cette transaction conclue en 1153 ne nous ait pas été conservé en entier; mais les historiens contemporains en ont rapporté les clauses les plus importantes 141. En premier lieu Berthold de Zæringen dut renoncer en faveur de l'Impératrice Béatrix à toutes ses prétentions sur les provinces du royaume de Bourgogne situées au couchant du Jura, depuis Bâle jusqu'à l'Isère, de même que sur le royaume d'Arles (ou de Provence), que l'Empereur reprit sous son autorité immédiate et dont il disposa peu après d'une autre manière 142. Quant aux /69/ territoires transjurains qui appartenaient en propre aux Comtes de haute Bourgogne, comme la vallée d'Orbe 143, ou qui en avaient relevé à titre de mouvance, comme les fiefs des maisons de Neuchâtel et de Glane, il est certain qu'ils furent tous également compris dans cette renonciation. Plusieurs documens auxquels nous aurons à revenir plus tard semblent l'attester relativement à la vallée de l'Orbe en particulier 144. Mais comme les droits de Fréderic en qualité de /70/ souverain et d'époux de Béatrix se trouvaient confondus, la solution de cette question demeure incertaine, et il n'est pas possible de déterminer nominativement lesquels des territoires situés entre le Jura et l'Aar furent abandonnés ou réservés par ce premier article de la transaction. En second lieu l'Empereur confirma au Duc de Zæringen à titre de grand fief de la couronne la possession héréditaire: 1º de l'avouerie impériale (Reichs-vogtei) de la ville et des monastères de Zurich, avec le territoire (Comitatus Turicensis) assez étendu qui dépendait de cette cité; 2º le landgraviat de la petite Bourgogne (Burgundia minor), renfermé entre l'Aar et la Murgeten (canton de Berne), y compris le district de Willisau (canton de Lucerne).
Quant aux comtés de Rôre ou de Lenzbourg et de Baden (Argovie inférieure), ils appartenaient à la maison de Lenzbourg en toute suzeraineté. Enfin, comme dédommagement des provinces cisjuranes que le Duc Berthold abandonnait à l'Empereur, celui-ci lui conféra l'avouerie impériale et l'investiture des régales (advocatia cum investitura regalium) 145 dans les trois cités épiscopales de Genève, Lausanne et Sion, y compris leurs territoires respectifs entre le Jura et le St.-Bernard (tres civitates inter Jurum et montem Jovis) 146. Cette transaction destinée à fixer définitivement les droits de la maison de Zæringen, /71/ semblait devoir éteindre toutes les querelles intestines qui depuis un siècle entier désolaient la Transjurane, mais, loin de là, elle ne fit que les ranimer et en rendre la solution plus difficile.
Uniquement occupé à dégager les droits de Béatrix, l'Empereur négligea de prendre en considération ceux que des titres antérieurs et non moins réels assuraient aux feudataires immédiats de sa couronne ainsi qu'aux Evêques et monastères des contrées ultrajuranes. Effectivement les prélats des villes sus-mentionnées se trouvaient tous, depuis un tems plus ou moins long, investis dans leurs diocèses respectifs d'une autorité temporelle qui n'admettait aucune autre suzeraineté que celle du monarque. Ils protestèrent donc hautement et unanimement contre cette spoliation de leurs droits; mais chacun d'eux, entraîné ou par sa position particulière ou par son caractère personnel, ayant employé des moyens différens pour repousser ou neutraliser l'autorité usurpatrice des Ducs de Zæringen, il devient indispensable de retracer l'histoire abrégée des démêlés de chacune de ces villes avec le recteur de Bourgogne, pour reprendre ensuite le récit des faits qui embrassent le rectorat en général.
GENEVE.
Dès les tems les plus reculés, les droits temporels des Evêques de Genève se trouvaient mêlés avec ceux des Comtes de Genevois, et cette circonstance avait donné lieu à plusieurs compromis entre ces deux souverainetés rivales. Le plus connu, daté de l'an 1124, avait réglé les limites et les attributions respectives de chacune de ces autorités 147. /72/ Dès la seconde année de son règne, l'Empereur Fréderic Ier avait confirmé l'Evêque Ardutius de Faucigny dans tous les droits et privilèges temporels de son église, sans faire aucune réserve, soit pour le rectorat, soit pour les régales 148. Par suite de cette confirmation, le même Evêque avait conclu à Seyssel avec Amédée Ier, Comte de Genevois, un nouveau traité supplémentaire daté du VI Kal: de mars 1155, dans lequel les droits respectifs étant fixés, l'Evêque reconnaissait le Comte Amédée comme avoué (advocatus) héréditaire ou haut-justicier laïque (Kast-vogt) 149.
Le traité de Seyssel fut confirmé par une bulle du pape Adrien IV, datée du 12 Kal: de juin 1157 150. Une autre bulle du même pontife et de même date confirme en outre à l'Evêque Ardutius tous les droits régaliens, dedans et hors la ville que l'Empereur Fréderic lui avait concédés en 1153 par un diplôme spécial, dont la teneur est rappelée dans une bulle de l'an 1162, à laquelle nous reviendrons. Ces traités entre l'Evêque et le Comte de Genève concernaient uniquement l'avouerie épiscopale (Kast-vogtey), qu'il ne faut point confondre avec l'avouerie impériale (Reichs-vogtey) soit le vicariat. La première relevait de la mouvance de l'Evêque et s'exerçait en son nom et sous son autorité. La seconde, émanait de l'Empereur, s'exerçait en son nom et donnait le droit de conférer l'investiture des régales (investitura regalium), elle procurait donc à celui qui en était revêtu une suzeraineté réelle sur le domaine temporel des cités épiscopales et sur tous les vassaux qui en dépendaient. /73/
Aussitôt que le Duc de Zæringen eut été investi par l'Empereur de cette dignité éminente, il se mit en devoir d'en prendre possession; mais prévoyant qu'il éprouverait une forte résistance non seulement de la part de l'Evêque, mais aussi de la part du Comte de Genève, il chercha d'abord à se rendre celui-ci favorable. Amédée Ier, souverain Seigneur dans le pays de Gex et dans le territoire de Nyon (comté des Equestres), devenu puissant dans le Jorat par sa mère Itha de Glane, et qui en outre avait des prétentions sur la Cité de Lausanne, se présentait comme adversaire formidable ou allié puissant: il importait bien plus au Duc Berthold, dont la fierté dynastique souffrait de passer dans l'empire « pour un Duc sans duché (Duces nullum Ducatum habentes) » 151, de faire reconnaître sa suprématie en droit que de l'exercer de fait. Il se décida donc à traiter avec le Comte de Genève et à lui céder, à prix d'argent, ses droits d'avoué ou vicaire impérial sur le temporel de l'Evêque de Genève 152. Après avoir mis fin à cette transaction, il marcha contre Genève avec le Comte Amédée pour mettre celui-ci en possession réelle du vicariat impérial. Les deux princes s'emparèrent de tout le domaine temporel de l'Evêque Ardutius, mirent garnison dans ses châteaux et s'approprièrent les régales. « Episcopatum gebenensem violenter invaserunt et regalia omnia injuste /74/ abstulerunt » 153. Cette invasion doit avoir eu lieu à la fin de 1158 ou au commencement de l'année suivante, lorsqu'après la paix de Milan (septembre 1158), le Duc Berthold eut ramené ses bandes d'Italie en passant par le St.-Bernard 154; on voit en effet par une bulle du Pape Victor, fulminée contre le Comte Amédée de Genève, que celui-ci était en possession des régales en 1160 155. Cependant le Comte Amédée trouva dans l'Evêque de Genève, soutenu par une nombreuse et puissante famille, un adversaire résolu et bien décidé à ne point se dessaisir de la supériorité temporelle qu'on cherchait à lui enlever.
Après la prise de Milan, l'Empereur Fréderic était venu à St.-Jean de Lône sur la Saône; Ardutius se rendit aussitôt auprès de lui. Il le trouva entouré d'un grand nombre de prélats et de magnats du royaume de Bourgogne et de l'Empire; le Duc de Zæringen et le Comte de Genève furent assignés à y comparaître. L'Evêque Ardutius représenta au monarque qu'il n'avait pu investir le Duc de Zæringen du vicariat et des droits régaliens sans contrevenir aux privilèges que les Rois ses prédécesseurs avaient accordés à son église: il mit sous ses yeux la bulle, datée de la seconde année de son propre règne, par laquelle il avait reconnu à l'Evêque et à ses successeurs tous les droits impériaux (omnis juris imperialis) dans la ville et le territoire de Genève, ainsi que sur les forts et châteaux appartenant à l'Evêque.
L'Empereur se rendit aux réclamations du prélat; il lui confirma la possession de tous les droits temporels de son église, avec le consentement formel du Duc de Zæringen et du Comte de Genève qui, tous deux, en sa présence, /75/ demandèrent pardon à l'Evêque de leur injustice (veniam petierunt ipsi Episcopo); il déclara de nouveau l'Evêque et ses successeurs princes de l'Empire et Seigneurs immédiats de la Cité et du territoire de Genève, sauf la suzeraineté des saints apôtres et de l'Empire. Il en fut expédié à l'Evêque une bulle, dite la Bulle d'Or, datée du VII des Ides de septembre de l'an 1162 156. Par un second arrêté du même jour, l'Empereur, conformément au jugement rendu par les prélats et les princes assemblés, révoqua et annula la concession des régales et autres droits conférés précédemment au Duc de Zæringen 157, et par un troisième acte non daté, mais évidemment du même jour, il cassa et annula aussi le transfert que le Duc de Zæringen en avait fait au Comte de Genevois 158. Cette éclatante justice rendue à l'Evêque Ardutius mit fin à toutes les prétentions de la maison de Zæringen au vicariat et à l'avouerie impériale sur la ville de Genève.
LAUSANNE.
La question du rectorat fut bien plus longue et plus compliquée dans le diocèse de Lausanne, à cause d'une suite de circonstances dont quelques-unes remontent plus haut que l'établissement de cette dignité dans les provinces Transjuranes.
Rodolphe III, dernier roi de sa dynastie, avait investi Henri de Lentzbourg, Evêque de Lausanne, et ses /76/ successeurs à perpétuité du titre et des pouvoirs de Comte provincial du pays de Vaud (comitatus Waldensis), comprenant la partie du diocèse de Lausanne renfermée entre la Sarine et la Veveyse à l'Est, l'Aubonne à l'Ouest, le Jura au Nord et le lac Léman au Midi 159. Quoique cette importante donation eut éprouvé une grande résistance de la part des grands feudataires dont les domaines se trouvaient enclavés dans les limites de ce comitat, néanmoins Lambert de Grandson fut le dernier Comte laïque du pays de Vaud 160, et ce titre fut dès lors inséparable de celui d'Evêque de Lausanne. Les Empereurs successeurs des rois de Bourgogne, confirmèrent l'autorité temporelle de ces prélats par de fréquentes investitures, notamment par les diplômes de Henri IV en 1079, de Conrad III, roi de Germanie, en 1145, et enfin de l'Empereur Fréderic Ier lui-même en 1155, qui en nommant l'Evêque St.-Amédée de Hauterive, chancelier du royaume de Bourgogne, lui accorda le droit important de conférer et de révoquer les bénéfices, d'accepter les fiefs offerts (feuda oblata), de confirmer les donations et de citer devant sa cour (curia), non seulement les ecclésiastiques, mais aussi les barons laïques (barones), en qualité de vicaire impérial (cui vices nostras... commisimus) 161. /77/
Ces titres et ces prérogatives élevaient les Evêques de Lausanne an rang de grands feudataires ou de vassaux immédiats de la couronne. Cependant, comme l'exercice personnel de l'autorité temporelle était souvent incompatible avec le sacerdoce, ces prélats étaient dans l'usage de se choisir parmi les Seigneurs laïques voisins un protecteur (Defensor, Consul) capable de défendre les privilèges et les biens de leur église. Ce protectorat confondu dans d'autres diocèses avec l'avouerie (Kast-vogtey) resta, dans l'Evêché de Lausanne, une charge tout-à-fait distincte et exceptionnelle.
Gérard de Faucigny, Evêque de Lausanne, avait choisi pour défenseur (Consul) d'abord son propre neveu Rodolph II, sire de Faucigny, auquel il inféoda en cette qualité les péages (pedagium) de Lausanne 162; puis son cousin Aymon II, Comte de Genève.
C'est à celui-ci que l'Empereur Henri V adressa à la fin de l'an 1124 un rescrit pour l'exécution d'une sentence rendue au tribunal de l'Evêque contre Ebald II, sire de Grandson, au sujet des grands démêlés qui existaient alors entre ce puissant Seigneur et le couvent de Romainmôtier 163.
L'Evêque Amédée de Clermont de Hauterive 163bis confia le protectorat de son église à Amédée Ier, Comte de /78/ Genève, comme l'atteste une charte de 1154, par laquelle ce prélat confirme toutes les donations faites à l'abbaye de Haut-Crêt, et qu'il date du règne de l'Empereur Fréderic et d'Amédée de Genève, consul. (Frederico Imperatore et Amedeo gebenensi, Consule, regnantibus 164.) Si l'Evêque de Lausanne était incontestablement Seigneur souverain dans les limites de l'ancien comté de Vaud, il ne pouvait en revanche refuser de reconnaître la supériorité temporelle du recteur dans la partie allemande de son diocèse (Vaudum teutonicum), qui s'étendait sur la rive gauche de l'Aar, depuis Morat jusqu'à la Siggeren au-dessous de Soleure 165, et depuis le Teutschbach (près de Fribourg) jusqu'à Interlacken, où les limites du diocèse de Lausanne venaient s'égarer dans les glaciers. L'exercice réel du rectorat dans ces territoires par la maison de Zæringen est attesté par un grand nombre de Chartes en faveur des monastères de Hauterive, de Rüggisberg, d'Interlacken, et de l'église collégiale de Soleure, données par les Ducs de Zæringen en qualité de recteurs ou datées de leur rectorat 166. Telle est aussi la fondation mémorable des deux villes libres de Fribourg et de Berne qui, pour le spirituel, relevaient du diocèse de Lausanne. /79/
Ce conflit de pouvoirs rivaux dut amener entre le Duc et l'Evêque, (ce dernier appuyé par son défenseur le Comte de Genève), les plus graves collisions, et la haute prudence d'Amédée de Hauterive ne pût les éviter qu'en partie.
Soit que le Comte de Genève revendiquât le protectorat de l'église de Lausanne pour son propre compte, soit qu'il agît dans l'intérêt du Duc de Zæringen, il essaya de se rendre maître de la Cité de Lausanne. Il fit fortifier le manoir qu'il possédait au-dessus de cette ville à l'extrémité des hauteurs du Jorat, et y fit élever une haute tour dominant toute la cité qu'elle était destinée à subjuguer. Ce ne fut qu'à grand' peine que l'Evêque, usant plutôt de son ascendant moral que de la force des armes (non tam armis quam prudentia) parvint à l'expulser de ce retranchement formidable, qu'il fit aussitôt raser jusqu'au niveau du sol 167. Il se hâta ensuite d'entamer avec le Duc Berthold des négociations qui se terminèrent heureusement par un compromis dont le cartulaire de Lausanne nous a conservé la substance 168. Ce traité qui se trouve formellement rappelé dans une bulle du Pape Alexandre III, de l'an 1179 169, portait ce qui suit: « le Duc s'engageait à ne gêner en rien la libre élection de l'Evêque et à ne point recevoir dans son hommage ceux qui tenaient leurs fiefs de l'église de Lausanne; il promettait au contraire d'aider le prélat à recouvrer les biens qui en seraient aliénés. Le Duc ni les gens de sa suite ne devaient prendre gîte dans les bourgs, villages et manoirs appartenant à l'Eglise, ou séjourner /80/ dans le palais épiscopal ou dans les habitations des chanoines, non plus que dans les maisons fortes des vassaux (milites) de l'Evêque. »
« Quant aux droits dûs au souverain à chaque mutation d'évêque pour Chexbres et Lutry 170, il fut stipulé que le Duc y renonçait pour lui et ses successeurs et qu'il en ferait l'abandon gratuit à l'Evêque, ainsi que des autres droits régaliens auxquels il prétendait. »
« En revanche, le clergé, les vassaux de l'Eglise, les bourgeois (burgenses) et le peuple s'engageaient à recevoir le Duc dans la Cité de Lausanne en procession et avec tous les honneurs dûs à son rang, à lui offrir la double bienvenue (duas procurationes), laquelle devait lui être remise, de la part de l'Evêque, par les officiers de sa maison (familiares) accompagnés de deux notables bourgeois de la Cité. »
Ce traité, dont le cartulaire ne fixe pas la date doit néanmoins se rapporter à la fin de l'an 1158 ou au commencement de l'année suivante 171.
Amédée de Hauterive mourut le 27 septembre 1159 172. Il eut pour successeur Landric de Durne (Durnach), qui s'appliqua à observer fidèlement le compromis fait par son prédécesseur, comme le prouve; 1º une charte en faveur de l'abbaye de Haut-Crest de l'an 1165 173, datée du règne /81/ de Fréderic Ier Empereur et de Berthold Recteur de Bourgogne. 2º Celle du Duc Berthold lui-même par laquelle il prend sous sa protection l'abbaye de Haut-Crest (Alta Crista) et la garantit, au nom de l'Empereur, des suites pernicieuses qu'aurait pu avoir pour ce monastère le schisme qui alors désolait l'Eglise 174.
Ce fut ainsi que le Duc de Zæringen fût reconnu, sous certaines conditions, comme Recteur et avoué impérial dans tout le diocèse et même dans la Cité de Lausanne; mais aussi il renonça positivement, dans le pays romand, à l'exercice réel des pouvoirs que lui donnait le titre de Recteur qui devint ainsi purement honorifique.
Cependant Berthold, dont le courage n'était surpassé que par une rare prudence et par sa persévérance dans les revers, n'abandonna point entièrement le projet de se ressaisir de l'autorité effective sur le temporel de l'Evêque de Lausanne; dans ce but il chercha à réunir à son titre honoraire d'avoué impérial la charge, moins élevée, mais plus lucrative, d'avoué épiscopal, qui se trouvait alors dans la maison des Sires de Gärenstein, auxquels elle avait été concédée en fief héréditaire par l'Evêque St.-Amédée; comme le prouve la charte d'affranchissement de certains péages accordée en 1157 à l'abbaye de Hauterive par le Duc Berthold (Bertholdus Dux et Rector Burgundiæ) en présence de cet Evêque et d'Emmo de Gärenstein advocatus Lausannensis 175.
Emmo de Gärenstein eut pour successeur Otton et Vuillelme de Gärenstein auxquels l'Evêque Landric confirma /82/ l'investiture de l'avouerie épiscopale. Les Seigneurs de Gärenstein se trouvant vassaux directs du Duc de Zæringen, il leur persuada facilement de lui céder, à prix d'argent, leurs droits à l'avouerie épiscopale de Lausanne, au mépris de la défense et des protestations formelles de l'Evêque 176.
La réunion entre les mains du Duc des deux prérogatives si distinctes de l'avouerie épiscopale (Kast-vogtey) 177 et du vicariat impérial (Reichs-vogtey) changea totalement la position respective des pouvoirs. Se présentant comme avoué d'un prélat investi des régales, il prétendit les exercer seul, en sa double qualité et annula ainsi de fait le compromis passé avec l'Evêque Amédée: d'un autre côté, mettant en avant son titre supérieur de vicaire impérial, il refusait de rendre aux Evêques de Lausanne l'hommage qu'il leur devait pour la charge inférieure 178.
L'Evêque Landric, homme pacifique et dont tous les efforts tendaient à maintenir dans son diocèse la tranquillité publique (semper laboravit pro pace totius episcopatus) 179 , menacé, non seulement par les nouvelles prétentions du Recteur de la Transjurane, mais aussi par le schisme qui divisait l'Eglise romaine, évita une rupture ouverte avec ce suzerain trop puissant. Il se contenta de protéger ses vassaux, contre les déprédations incessantes des gens du Duc, en munissant ses châteaux de bonnes garnisons, en faisant ceindre de murs les bourgs de son territoire; /83/ entr'autres celui de Curtilles sur la Broye, et en édifiant de l'autre côté de cette rivière le donjon de Lucens. Il fit aussi bâtir le fort de Puidoux sur Lutry et la haute tour de Rive ou d'Ouchy sur les bords du lac Léman; entourant ainsi la Cité de Lausanne d'une ligne de défense au Sud et à l'Est. Il compléta ces précautions en faisant élargir et fortifier l'enceinte même de la ville du côté de Couvaloup 180. Cette conduite prudente, loin d'obtenir à l'Evêque l'approbation qu'elle méritait à juste titre, mécontenta le chapitre ainsi que les vassaux de l'Eglise, qui souffraient impatiemment les grandes dépenses que nécessitaient ces constructions.
Landric fut accusé de prodigalité, d'incapacité dans l'administration des biens de l'Eglise et même de dérèglement de mœurs; ces censures exagérées décèlent dans le clergé de Lausanne un esprit de parti et un dissentiment intérieur qui prenait sans doute sa source dans le schisme de l'Eglise. L'Evêque Landric, espérant conjurer l'orage formé contre lui, se rendit en Italie auprès du Pape Alexandre III pour justifier sa conduite 181 Mais il en fut mal reçu et se vit obligé de résigner son évêché entre les mains du pontife, sur la fin de l'année 1174 182. Celui-ci nomma aussitôt à sa place Roger sous-diacre du St.-Siége et son légat apostolique dans la province métropolitaine de Besançon 183.
L'Evêque Roger issu de la maison de Neuchâtel, mais /84/ élevé en Italie 184, professait les maximes ultramontaines; il résolut de rendre à son église son ancienne prééminence et tous les droits temporels. S'étant rendu au synode de Strasbourg, présidé par l'Empereur Fréderic et par Henri Evêque de cette ville, il se plaignit hautement de la grave atteinte que portait à sa dignité la concession des droits de régale faite par l'Empereur au Duc de Zæringen ainsi que la suzeraineté qu'il avait conférée à ce prince sur le pays romand (romania terra). Ces concessions, contraires aux privilèges antérieurs de son Eglise, étaient, ajoutait-il, frappées de nullité, puisque l'Evêque siégeant à Lausanne à l'époque de ces concessions, n'avait point été légalement assigné par l'Empereur, ni présent ou consentant; comme il aurait régulièrement dû l'être lorsqu'elles avaient été promulguées. Il fit encore à l'assemblée du synode le tableau affligeant des molestations et des dommages graves dont les gens du Duc Berthold se rendaient journellement coupables envers les vassaux de son Eglise.
Avant d'aborder la question fondamentale, l'Empereur observa que le Duc était absent et n'avait point été appelé à comparaître, il soumit en conséquence à la décision de la diète la question préalable de savoir s'il pouvait ou non faire droit, séance tenante, aux griefs de l'Evêque. L'Archevêque de Besançon et les Evêques de Spire, de Strasbourg, de Bâle et de Genève prononcèrent: « Que relativement aux plaintes portées par l'Evêque à l'Empereur contre les actes même du monarque, il pouvait légitimement y faire /85/ droit, nonobstant l'absence du Duc, mais qu'en ce qui touchait les griefs allégués contre le Duc personnellement, celui-ci devait être préalablement assigné et entendu dans sa justification. L'Evêque de Bâle ajouta, que, dans son opinion, l'Empereur n'avait pu concéder légalement au Duc les droits régaliens, qui appartenaient antérieurement à l'Eglise de Lausanne, mais que, comme le Duc de Zæringen s'en disait régulièrement investi, la concession ne pouvait être révoquée qu'autant que le Duc serait présent ou déclaré contumace » 185.
Ce jugement sans date, mais qui parait se rapporter au mois d'octobre de l'an 1179 186, fut approuvé par les Seigneurs laïques qui assistaient à la diète; néanmoins il est incomplet puisqu'il ne dit point si l'Empereur révoqua ou non la concession des régales du diocèse de Lausanne. Mais on doit s'en rapporter à cet égard à la bulle du Pape Alexandre III, accordée le 17 octobre 1179 à l'Evêque Roger, dans laquelle le serment fait à l'Evêque Amédée, par le Duc Berthold, à la suite du compromis de 1158, se trouve formellement rappelé. Le Pape y fulmine les anathèmes de l'Eglise contre le Duc et ses successeurs s'ils se permettaient d'enfreindre ce serment 187. Cette bulle semble donc prouver que l'Empereur ne révoqua point la concession de l'avouerie impériale et de l'investiture des régales faite au Duc en 1157 et qu'il laissa les choses au point où le compromis de 1158 entre ce dernier et l'Evêque Amédée les avait mises. L'avouerie épiscopale resta aussi, au moins nominalement, entre les mains du Duc de Zæringen. /86/
SION.
Quant au diocèse de Sion, son Evêque possédait la souveraineté temporelle sur le Haut-Valais à titre de Comte relevant immédiatement de l'empire. Cette souveraineté provenait d'une donation faite par le dernier des Rodolphiens en 999 à l'Evêque de Sion du comitat du Valais (comitatus Vallensis) avec tous les honneurs et les droits attachés à cette dignité (cum omnibus quæ ad commitatum appendere.... videntur) 188. Le domaine temporel de ces prélats s'était encore accru dans le siècle suivant (aº 1077) des dépouilles de l'anti-César, Rodolphe de Rheinfelden qui, en qualité d'abbé commandataire (abbas comes) ou laïque de l'abbaye de St.-Maurice, possédait dans le Haut-Valais les terres royales de Loëche et de Naters. L'Empereur Henri IV récompensa le dévouement de l'Evêque Hermenfroi: en donnant ces deux territoires à l'église de Sion à titre de fief de la couronne 189. Mais les Comtes de Maurienne, qui avaient été investis par ce monarque du Bas-Valais et du Vieux-Chablais, avec le titre /87/ d'abbés laïques héréditaires de l'abbaye de St.-Maurice, revendiquèrent ces mêmes seigneuries de Loëche et de Naters comme appartenant à cette abbaye depuis sa fondation. Ces prétentions opposées donnèrent lieu à de sérieux différens entre l'Evêque Guérin et le Comte de Maurienne, Amédée III, qui s'en était emparé et qui voulait obliger le prélat à les reprendre de lui en arrière-fief. L'arrière-fief était la propriété directe retenue par le suzerain sur le fief qu'il avait remis à son vassal.
Enfin le Comte Amédée, touché des vertus de St.-Guérin, abandonna cette prétention et restitua ces terres à l'église de Sion vers l'an 1139 190. Dès lors les Evêques de Sion jouirent sans partage de la souveraineté temporelle dans toute l'étendue du Haut-Valais.
Les Seigneurs de la Tour-Chatillon remplissaient les fonctions d'avoué épiscopal (majoria) sous le titre équivalant de grand-majeur (major) et sous la suzeraineté de l'Evêque dont ils portaient la bannière (1177) et qu'ils remplaçaient dans les grands plaids en qualité de juges laïques. Cette famille tenait en fief de l'Evêque le donjon de Châtillon (Gestellenbourg) dans le Haut-Valais qui commandait les passages importans du Gries, de la Furka et du Grimsel 191.
Les Comtes de Maurienne, abbés titulaires et souverains de l'abbaye de St.-Maurice, qui dépendait du diocèse de Sion, la gouvernèrent par l'intermédiaire d'un prévôt (prepositus) 192 tantôt laïque, tantôt ecclésiastique jusqu'à ce /88/ que le Comte Amédée III vers l'an 1112, céda son titre d'abbé d'Agaune à son frère Rainaud, se réservant toutefois la nomination de cette dignité ecclésiastique et du prévôt, l'avouerie et la souveraineté temporelle (comitiva) du domaine de l'abbaye, qui s'étendait depuis le mont St.-Bernard au sud, jusqu'à la Veveyse au nord 192bis. Cependant le Comte Amédée ayant été obligé de révoquer son frère Rainaud (aº 1128), à cause des désordres de sa conduite, il rétablit dans cette abbaye la clôture monastique et lui donna pour abbé Hugues, qui en était alors prévôt 193. Depuis ce temps, ce monastère eut des abbés régulièrement élus par le chapitre. En 1143, le Comte Amédée, partant pour la croisade (où il mourut en 1149), lui rendit aussi le droit d'élire son prévôt, ne retenant que les prérogatives de la souveraineté temporelle (quae ad comitatum pertinent) 194. Humbert III, Comte de Maurienne son fils et successeur, conclut peu d'années après un traité avec l'abbé de St. Maurice, dans lequel les droits de ce prince, comme Comte et suzerain (quod pro regali et comitatu comes... habere debeat) sont expressément réservés et distingués du domaine utile, engagé (impignoratus) à l'abbaie 195. Lors que Berthold IV eut été investi par l'Empereur Fréderic (aº 1157) du titre d'avoué-impérial dans les trois diocèses de la transjurane, il céda au Comte Humbert, qui était son /89/ beau-frère (ayant épousé Anna de Zæringen 195bis), tous les droits que lui conférait ce Vicariat sur le temporel de l'Evêque de Sion, et notamment celui de l'investiture des régales 195ter. Cette cession importante et bénévole du Duc en faveur du Comte de Maurienne peut s'expliquer par la puissance que ce dernier exerçait sur la grande Vallée du Rhône, dont il pouvait à volonté ouvrir ou fermer les passages. Pendant quelques années (per aliquod tempus), le Comte Humbert jouit de cette concession et exerça le droit de conférer les régales aux Evêques et aux vassaux-laïques de la Couronne dans le Diocèse de Sion; néanmoins ce privilège donna lieu à plusieurs démêlés analogues à ceux qui avaient troublé les Cités de Lausanne et de Genève.
L'Archevêque de Tarantaise parvint en 1179 à ménager un accommodement entre l'Evêque Conon et le Comte Humbert III, en vertu duquel ce dernier conserva la prérogative de conférer aux Evêques l'investiture des régales 196. Peu après (aº 1184), le Comte Humbert ayant pris parti pour le Pape Alexandre III contre l'Empereur fut mis au Ban de l'Empire, et mourut à Chambéry en 1188 sans avoir été relevé de sa disgrâce 197. Henri VI, Roi des Romains, fils de l'Empereur Fréderic et son Lieutenant dans l'Empire pendant la croisade où ce grand monarque trouva une mort /90/ prématurée (aº 1190), révoqua le Ban prononcé contre le Comte Humbert, et rendit au Comte Thomas de Savoie, son fils unique, tous les honneurs et les biens patrimoniaux dont il avait été momentanément privé; cependant le Marquis Boniface de Montferrat, tuteur du jeune Prince, renonça volontairement au nom de son Pupille à la suzeraineté que son père avait exercée sur le Haut-Vallais 198. Henri VI, pur une bulle, datée de Bâle du 7 Mai de l'an 1189, où toutes les circonstances qui précèdent se trouvent relatées, rendit à Guillaume, Evêque de Sion, tous les droits régaliens attachés au titre de Comte du Vallais, et replaça ce Comitat dans la mouvance immédiate de l'Empire (ad manum Imperii), réserve qui annulait et les prétentions des Comtes de Savoie, et celles que pouvaient former les Ducs de Zæringen comme Recteurs de la Bourgogne ultra-jurane 199.
Le comte Thomas de Savoie et ses successeurs conservèrent néanmoins la Suprématie territoriale sur le Bas-Vallais, le Vieux-Chablais et l'Avouerie de St. Maurice, comme l'attestent plusieurs documens de cette époque, tels, entr'autres, que l'enquête faite en 1198 par les Evêques de Genève et de Sion relativement aux droits respectifs du Comte et de l'Abbé sur la Vallée-de-Bagne, où il est dit: que, le Comte étant présent, c'est à lui qu'appartient le jugement des appels portés devant son plaid (quando Comes presens est, justitias clamorum, quæ coram eo levantur levat) 200, ce qui suppose l'exercice de la Haute-jurisdiction sur /91/ les fiefs de l'Abbaye, soit à titre de Comte, soit à titre d'Avoué. Les Comtes de Savoie conservèrent aussi le droit de battre monnaie appartenant à cette Abbaye royale. 201
On voit par tout ce qui précède que la maison de Zæringen n'exerça, de fait, le Rectorat sur aucune portion du Haut ou du Bas-Vallais, ni du Chablais.
LES MONASTERES.
Quant aux monastères répandus dans la Transjurane, ceux d'Hauterive, de Payerne et d'Haut-crêt, dans le Pays-Romand, sans dépendre directement de son autorité, jouirent néanmoins de la haute protection du Recteur, qui leur accorda plusieurs privilèges importans 202. En revanche, il s'était réservé la garde et l'administration supérieures des Prieurés-Conventuels d'Interlacken et de Rüggisberg, dans le Pays Allemand, dont le Duc et ses successeurs augmentèrent les possessions par de nouvelles dotations en terres 203. Mais le Prieuré de Romainmôtier, situé au pied du Jura, et qui avait des domaines considérables dans la Haute-Bourgogne 204, se trouvait, dès les tems les plus anciens, /92/ sous la sauvegarde immédiate des Empereurs Rois de Bourgogne 205, et Fréderic Ier lui-même octroya à ce monastère une bulle datée de Palma de l'année 1178, par laquelle il confirma les immunités qui lui avaient été accordées par ses prédécesseurs, et le prit de nouveau sous sa protection, comme faisant partie du propre domaine de sa couronne (tamquam res fisci nostri) 206. Néanmoins, dès la seconde année qui suivit cette confirmation, ce couvent se mit volontairement sous la protection et la mouvance directe des Comtes de Haute-Bourgogne, en associant l'Impératrice Béatrix, qui gouvernait ce Comté en Souveraine, à la moitié de la juridiction et des revenus de l'Eglise et de la terre de Romainmôtier, dont elle avait fait reconstruire à ses frais le bourg-supérieur (Burgum in monte). Cet acte est daté du palais (templum) de Dôle, le 24 Juillet 1181 207.
Après avoir esquissé l'histoire abrégée du Vicariat-Impérial dans les territoires temporels des Evêques de Genève, de Lausanne et de Sion, nous revenons à celle du Rectorat en général.
Si le Duc Berthold IV de Zæringen éprouva de la résistance pour faire prévaloir le pouvoir rectoral sur le temporel des Prélats de la Bourgogne-Transjurane, l'opposition des grands feudataires laïques ne fut ni moins vive ni moins persévérante. Les Seigneurs transjurains mettaient toujours un /93/ haut prix à la prérogative de relever immédiatement de la Couronne et à n'obéir qu'à la personne du Monarque. La domination du « Lion de Zæringen » compromettait cette unique sauvegarde de leur indépendance. A ce motif venait encore se joindre l'antipathie nationale pour une race étrangère dont les vues ambitieuses tendaient à leur abaissement et à la destruction des vieilles coutumes du pays. Fréderic I, plus occupé de consolider la grandeur de sa dynastie et d'affermir sa propre autorité qu'à favoriser la maison de Zæringen, contribua à ranimer contr'elle l'esprit d'hostilité des Seigneurs transjurains en se faisant proclamer Roi des deux Bourgognes par les Prélats et les Grands assemblés à Besançon au mois d'octobre 1157 208. Il se fit plus tard couronner à Arles, le 30 Juillet 1178 209. Par ces actes solennels l'Empereur remettait en question l'incorporation du Royaume de Bourgogne à l'Empire Germanique, et la légalité des pouvoirs conférés au Duc de Zæringen contrairement aux antiques privilèges des grands vassaux de ce Royaume.
Au nombre des plus fiers ennemis de la Suprématie des Recteurs, les traditions contemporaines placent les Seigneurs de Grandson, descendans directs des anciens Comtes supérieurs du Pays de Vaud, et chefs naturels du parti Bourguignon.
Ebald IV du nom sire de Grandson et de La-Sarraz, qui à cette époque, était le chef de cette puissante maison, obtint de l'Empereur Fréderic un diplôme, daté de Mulhausen, du 25 août 1187, par lequel, en présence de l'Evêque /94/ Roger de Lausanne le monarque confirma Ebald de La-Sarraz, sire de Grandson (Ebaldus de Sarrata Dominus Grandissoni), dans la possession de ses vastes domaines, qui comprenaient alors les mandemens de Grandson, Ste-Croix, Montricher, La-Sarraz, et la Vallée-du-Lac-de-Joux, où son aïeul avait fondé une abbaye vers l'an 1140 210. Au moyen de ce diplôme, Ebald de la-Sarraz se maintint dans sa prérogative de feudataire-immédiat de la Couronne, qu'il avait, ainsi que le dit l'acte, héritée de ses ancêtres (jure hereditario ab antiquo), et échappa ainsi à la mouvance du Recteur. Dans le même but, le Sire (Dominus) de Cossonay vendit, à peu près à la même époque, à l'Evêque Roger, les terres qu'il possédait dans le Vully, afin de ne pas être forcé de reconnaître la Suzeraineté du Recteur et de pouvoir se déclarer au besoin vassal de l'Evêque de Lausanne 211.
Guillaume, Seigneur de Wufflens-le-Châtel, moins puissant ou moins heureux, mais tout aussi résolu à ne pas plier sous le joug du Recteur, se déclara vassal de la Ste. Vierge et de l'Eglise de Lausanne en l'année 1175. Il remit son Châtel de Wufflens à l'Evêque Roger qui le fit occuper pendant quelques semaines par Bauduin, chanoine de Lausanne et par ses hommes d'armes, et le rendit ensuite en fief-lige et sous l'hommage perpétuel de l'Evêque, à Guillaume, sire de Wufflens et à ses fils, en présence d'Ebald, sire de Grandson et de plusieurs chevaliers 212.
D'autres Seigneurs de fiefs, quoique originairement investis des mêmes prérogatives, mais dont les circonstances particulières exigeaient plus de ménagemens, se /95/ maintinrent en bonne intelligence avec le Duc de Zæringen: tels furent, Wauthier, sire de Blonay, dont les terres étaient enclavées dans la souveraineté du Comte Humbert de Maurienne, beau-frère du Recteur, Conon, sire d'Estavayer, et Rodolph, sire de Montagny, dont les fiefs avoisinaient les domaines particuliers du Duc dans l'Ucht-land 213.
Ulrich III, sire de Neuchâtel, chef de sa puissante maison, et Comte-provincial (ou Landgrave) en deçà de l'Aar, Avoué de l'abbaye d'Hauterive, et Seigneur d'Arconciel et d'Illens, était l'ami personnel du Duc de Zæringen, et la tradition de ce dévouement détermina la ligne politique que ses descendans suivirent dès-lors invariablement. Au lieu de se déclarer contre le Recteur Ulrich arbora franchement sa bannière 214. Il suivit le Duc Berthold dans les campagnes d'Italie, où ils accompagnèrent l'Empereur Fréderic. Ce monarque récompensa généreusement le sire de Neuchâtel en lui concédant (en 1169) à titre de fief de l'empire le Val-de-St.-Imier, la montagne de Diesse, avec le territoire de Neureu (Nugerol) ou Landeron et l'avouerie héréditaire (Kast-vogtey) de Bienne et de son territoire 215. Cette donation fut encore confirmée à Besançon (en 1178), en présence du Duc Berthold 216. Les domaines ainsi concédés étant des réserves de la couronne (reservata Imperii), cette charte ne suffit point pour décider si le Comte de Neuchâtel fut, ou non, soumis féodalement à la /96/ mouvance directe du Recteur, d'autant moins que dès la seconde année qui suivit cette concession (aº 1180), le Comte Ulrich reprit des mains de l'Evêque Roger tous les fiefs qu'il tenait de l'Eglise de Lausanne, soit dans la partie allemande (in Terra Teutonica), soit dans la partie Romande (in Terra-Romanica) du diocèse, reprise qui eut lieu sans aucune intervention du Recteur 217. Cependant, lorsqu'en 1181 le même Comte acquit, à titre de fief de l'Eglise de St.-Urs de Soleure, les terres prévôtales de Selsach et de Betlach, il crut devoir faire ratifier cette inféodation par le Duc Berthold, en qualité de Recteur du pays (Rector terrae) 218, et le compromis effectué l'année suivante (aº 1182) entre Ulrich, sire de Neuchâtel, fils du Comte Ulrich III, et l'abbaye de Frienisberg, au sujet de certains biens donnés à ce monastère par les vassaux de son père, sans l'aveu de celui-ci, est daté de la régence du Duc Berthold, (Regente Rectore Burgundiae Bertholdo) 219; d'où l'on doit conclure avec les feudistes les plus estimés du comté que les Comtes de Neuchâtel reconnurent implicitement la suzeraineté des Recteurs de la Transjurane, mais qu'à cause des relations de parenté et de bon voisinage qui s'établirent entre les deux maisons, les Ducs de Zæringen n'exigèrent jamais explicitement l'hommage qui leur était dû.
Autant le pouvoir du Recteur était réduit dans le /97/ Pays-Romand à un titre honorifique et à la simple suzeraineté féodale sur la rive occidentale de l'Aar et de la Sarine, autant son autorité était complète et incontestée de l'autre côté de ces deux rivières. Les contrées situées à l'orient de leurs eaux se divisaient en deux territoires juridictionnels séparés. Le premier, embrassant toute la rive droite de l'Aar depuis Thoune 220 jusqu'à Arvangen 221 avec la Vallée de l'Emmen 222, formait le Landgraviat de la Petite-Bourgogne (die Landgrafschaft) 223, où les Comtes de Büchegk exerçaient héréditairement les fonctions de Landgrâve ou haut-justicier sous la mouvance directe des Ducs de Zæringen 224. Le second comprenait la portion de l'Uchtland resserrée entre la Sarine inférieure et la Singine, ainsi que l'Ufgau 224bis, territoire alpestre situé entre la Singine et l'Aar, où les Ducs exerçaient en personne tous les droits de seigneur-direct et de suzerain. Ces vastes domaines, dont la majeure partie étaient en /98/ grandes forêts et en pâturages incultes, provenaient du patrimoine d'Agnès, fille et héritière de Rodolph de Rheinfelden, et ayeule de Berthold IV de Zæringen. Ils formaient une souveraineté héréditaire et allodiale (franc-alleu) transmissible par les femmes en ligne directe, suivant la règle fondamentale du droit bourguignon 225. De nombreuses chartes contemporaines témoignent de la réalité de cette souveraineté et de sa nature patrimoniale:
1º L'Empereur Fréderic Ier, en confirmant au monastère d'Interlacken par diplôme de l'an 1173, ses privilèges et ses biens, dont une partie provenait de la libéralité des Ducs de Zæringen, et en lui accordant en outre le droit de se choisir lui-même un avoué laïque, réserva formellement le haut patronage du Recteur (Rectoris Burgundiae), qui avait renoncé à l'exercice personnel de l'avouerie que le Duc Conrad son père s'était réservée 226. L'Empereur confirma de nouveau ces privilèges par une charte datée de Constance du 25 juin 1183, avec le consentement du Duc Berthold IV, qui se trouvait présent 227.
2º Une charte plus explicite encore que celle que nous venons de citer est celle par laquelle le Duc Berthold donne au Prieuré conventuel de Rüggisberg le domaine de la Suselmatten, dans le vallon inférieur du Gotteron (près de Fribourg). Par ce document, daté du 7 octobre 1175 228, passé en présence de son fils Berthold V, de son frère Hugues d'Ulmbourg, de Landric, Evêque de Lausanne, d'Ulrich, Comte de Neuchâtel, d'Arnold, comte de Büchegk, /99/ et d'un grand nombre de Seigneurs Bourguignons (baronibus Burgundiæ), avec une pompe qui parait destinée à donner une haute idée de la puissance et de la libéralité du Duc, on peut juger de l'étendue de ses domaines dans ces contrées en observant les noms des Vassaux que l'acte mentionne comme témoins attachés à la suite du Recteur. A l'exception du Maréchal et du Sénéchal (dapifer) de la cour du Duc, qui seuls étaient étrangers, tous appartenaient à la Bourgogne-Alémanique; on y voit les seigneurs vassaux de Laupen, de Sulgen-bach, de Belp, d'Oberhofen, de Thoune, d'Heimberg, de Strättlingen, de Siebenthal, de Weissembourg, de Kien, d'Utzisdorf, de Signau, de Burgdorf, de Jäggisdorf, de Wyle et de Gränchen. Les terres dont ces feudataires portaient le nom embrassaient, comme on le voit, la totalité du Landgraviat de la Petite-Bourgogne et de l'Uchtland, dans lesquels les Ducs de Zæringen tenaient en propre les vastes seigneuries ou mandemens de Laupen, d'Oltingen, de Grasbourg, de Diesbach, de Munsingen, de Landshut et de Willmeringen, comme la suite le démontrera.
3º Nous ferons aussi mention de l'acte de fondation de la Commanderie de München-Buchsée (près de Berne), faite en 1180 par Cunon de Buchsée, qui donne aux chevaliers de St.-Jean de Jérusalem, outre Buchsée, Wangdorf et Worblaufen, à la droite de l'Aar, des vignes sur les bords du lac de Bienne et à Montillier, près de Morat 229. La charte expédiée à cette occasion par l'Evêque Berthold de Constance est datée du Pontificat du Pape Alexandre III, du règne de l'Empereur Fréderic I et du Duc Fréderic-de-Souabe, son fils 230, ainsi que de la régence de Berthold, /100/ Duc et Recteur, et d'Arnold de Büchegk, Landgrave de la Petite-Bourgogne, (Regente Bertholdo Burgundiæ Rectore; et Arnoldo Comite). Cette charte est remarquable en ce qu'elle indique la surbordination respective des pouvoirs dans ces contrées, savoir: l'Empereur, le Duc ou Recteur et le Comte-provincial. Mais la preuve la plus manifeste de la souveraineté des Recteurs se trouve dans la fondation mémorable des villes de l'Helvétie Bourguignonne, qui doivent leur origine à la maison de Zæringen et qui sont toutes situées dans les quartiers de ce pays qui appartenaient, soit en propre, soit à titre de fief, à cette illustre maison.
Il est plus difficile qu'on ne pense de se rendre compte des motifs qui déterminèrent les Ducs de Zæringen à entreprendre la fondation d'un aussi grand nombre de villes murées. On a dit que leur principal but avait été de donner de la force aux petits tenanciers des terres impériales qui, en même temps, étaient vassaux des Recteurs, en les réunissant dans les remparts de ces villes, et de les mettre par là à couvert de l'oppression des grands-feudataires dont ils se voyaient entourés 231. Mais cette explication, imaginée après coup parce que les seigneurs voisins s'opposèrent effectivement à une innovation qui leur causait préjudice et dont les petits féotiers recueillirent par le fait tous les avantages, ne se trouve nullement exacte quand on essaie d'en faire l'application aux villes de la Forêt-Noire où l'autorité toute-puissante des Ducs de Zæringen n'éprouvait aucune des résistances qui, dans la Transjurane, tenaient leur pouvoir en échec. Ils avaient déjà fondé, sur la rive droite /101/ du Rhin, Fribourg en Brisgau, Willingen, Offenbourg et Neubourg. Or il n'est guère probable que des établissemens formés sur le même plan et dotés d'institutions identiques aient été entrepris dans des vues totalement différentes. Si l'on étudie l'esprit qui domine dans les chartes octroyées à ces nouvelles cités, on y remarquera l'attention particulière donnée à tout ce qui concerne les péages, les revenus des foires et des marchés, le forâge, etc., en un mot, à tous les objets qui touchaient de plus près aux intérêts fiscaux des fondateurs; on pourrait en conclure que les Ducs de Zæringen, dont les inclinations vénales se décèlent en maintes occasions, ont eu pour objet principal dans la fondation des villes, d'augmenter leurs propres revenus en attirant dans certaines localités de leurs domaines tout le trafic des pays environnans.
Quoi qu'il en soit, ce fut vers l'année 1178, pendant ses démêlés avec l'Evêque Roger de Lausanne, que le Duc Berthold IV entreprit la fondation de la ville de Fribourg en Uchtland 232. Le point culminant de la nouvelle cité, au-dessus des rochers escarpés qui bordent la Sarine, était occupé par le château de Tyr (Tirensis), ancienne résidence des comtes du pays, et, à ce qu'on croit, le berceau de la maison de Thierstein 233. Suivant la coutume, le /102/ Duc avait commencé par faire construire l'Eglise dédiée à St.-Nicolas, mais il se trouva que cette Eglise et le cimetière environnant étaient fondés sur un terrain qui avait été donné plus anciennement au monastère de Payerne. Les vassaux du couvent tentèrent de s'opposer par les armes aux travaux entrepris, mais ils furent repoussés par les travailleurs. Plusieurs seigneurs du pays, tels que le Comte Amédée de Genève, Vauthier de Blonay, Conon d'Estavayer et Rodolph de Montagny se portèrent médiateurs entre le Duc et les Religieux de Payerne, auxquels le Recteur restitua, par l'acte de 1178, la propriété de ce quartier de la nouvelle ville, y compris les édifices qui y avaient déjà été construits 234.
Soit que d'autres voisins élevassent des réclamations semblables, soit que Fribourg eut déjà à combattre des ennemis déclarés, la naissante cité dut entretenir à ses frais un corps de mercenaires armés pour protéger les travailleurs contre les attaques du dehors. C'est à la suite d'une agression de ce genre que le Duc adressa, en 1182, à Hugues, curé de St.-Nicolas, et à Diétrich de Monstral, premier Avoyer (Scultetus) de Fribourg, un rescrit commençant par ces mots: « Salut! et victoire sur nos ennemis (Salutem et victoriam de innimicis) » 235. Nonobstant toutes ces difficultés, la fondation de Fribourg en Uchtland s'acheva rapidement, et le Duc lui octroya la même constitution (handfeste) qui avait été donnée à Fribourg en Brisgau 236. /103/
Dans le même temps, le Duc Berthold, reconnu suzerain et vicaire-impérial dans la ville et prévôté de Soleure, y jugeait (de 1182 à 1185), assisté de ses propres vassaux (ministeriales), un différent élevé entre le Chapitre de St.-Urs et les bourgeois de cette ville. Sa sentence est scellée d'un grand sceau, où se voit le Lion de Zæringen entouré d'une légende portant: « Bertholdus Dei gratia Dux et Rector Burgundiæ » 237.
Cependant l'Impératrice Béatrix, qui avait continué à gouverner elle-même ses pays héréditaires, en qualité de Comtesse souveraine de Bourgogne, mourut à Spire, le 15 novembre 1185, et l'Empereur désigna son troisième fils, le Comte Otton, pour héritier universel des domaines maternels de l'un et l'autre côté du Jura 238. Otton était déjà, depuis l'an 1173, en possession du Comté de (Rôre ou) Lenzbourg, en Argovie, et de l'Avouerie de Seckingen, sur le Rhin, que son père lui avait donnés en toute propriété, sous la ligiété de l'Empire, après l'extinction de la race des Comtes de Lenzbourg 239. Cette famille illustre, qui avait, dans le siècle précédent, donné des Evêques aux sièges de Lausanne et de Sion 240, et dont les richesses territoriales étaient renommées (comes /104/ prædives de Lenzbourg) 241, s'était divisée en deux branches, dont l'aînée avait pour unique représentant Ulrich IX, ami dévoué, confident intime et frère-d'armes de l'Empereur. Il mourut sans postérité, le 8 octobre 1172 242, après avoir fait à son souverain une donation générale de ses fiefs et de ses domaines patrimoniaux 243. Arnold VIII, Comte de Baden en Argovie, dernier mâle de la branche cadette, mourut la même année qu'Ulrich, laissant pour unique héritière de ses biens sa sœur Richenza, femme d'Hartmann de Kybourg, Landgrâve de Thurgovie. Arnold avait été Bailli, ou Avoué-local héréditaire (Advocatus loci; Kast-vogt), des deux monastères de la ville de Zurich, dans laquelle le Duc de Zæringen exerçait en même temps les fonctions de Vicaire, ou Avoué Impérial (Imperialis ... locum tenentis, ou Reichs-vogt) 244.
Fréderic I, en remettant à son fils Otton le gouvernement de la Haute-Bourgogne, y ajouta le titre de Comte-Palatin (palatinus), qui devait lui assurer la supériorité sur les Comtes des maisons de Vienne et de Châlon feudataires en Bourgogne 245. Il lui donna, en outre, le titre de Régent du Royaume d'Arles (Archi-solio arelatensi sublimato), dignité à laquelle le Duc Berthold avait dû renoncer en 1157 246. Ce titre, purement honorifique et sans revenu (sine fructu, tantum honoris nomine), procurait néanmoins au fils de l'Empereur la suprématie du rang au-dessus des plus grands seigneurs ecclésiastiques et séculiers /105/ de la Cis-jurane et de la Provence. Cette prérogative était supposée s'étendre tout le long du bord oriental de la Saône et du Rhône, jusqu'à la mer de Provence 247; néanmoins sa mouvance directe était bien plus limitée, et ne s'étendait que sur le Comté de Mâcon, grand fief du Duché de Bourgogne 248, sur le Vicomté d'Auxonne, et sur la Franche-Comté. Dans cette dernière, les domaines propres d'Otton, entremêlés avec ceux des Comtes ses parens maternels, occupaient principalement le pays de la montagne (ancien comté de Varasque), depuis Dôle et Poligny, villes où le Comte-Palatin résida fréquemment 249.
Au revers oriental du Jura, les territoires d'Orbe, d'Yverdon et une partie de celui d'Echallens 250, la Brévine et le Val-de-Travers 251 étaient aussi soumis à la mouvance du Comte-Palatin 252. Enfin, il eut encore en partage des biens situés dans le Diocèse de Constance 253, et particulièrement /106/ l'Avouerie du pays de Glaris, qui dépendait de l'abbaye de Seckingen, en Souabe 254, et, à en juger par des actes postérieurs, lui et ses descendans semblent avoir conservé quelques vagues prétentions sur les biens de la maison de Glane, échus à celle de Neuchâtel, et notamment sur le haut-patronage de l'abbaie d'Hauterive 255.
Fondé sur les divers apanages dont il se trouvait titré, le Palatin Otton Ier aurait pu revendiquer, pour la majeure partie de l'ancien Royaume de Bourgogne, la souveraineté indépendante en faveur de laquelle son aïeul le Franc-Comte Rainaud avait si vaillamment combattu, et si l'on avait dit de ce dernier qu'il agissait en « roi superbe » (regemque superbum agebat) 256, on disait de son petit-fils qu'il était douteux si l'on devait l'appeler « Roi ou Comte » ( dubium ... dici rex ne comes ne velis) 257.
Le Duc Berthold de Zæringen survécut peu à l'Impératrice Béatrix et à l'élévation du Comte-Palatin, qui balançait dans les contrées Juranes l'ascendant de sa maison; il mourut le 11 septembre 1186 258, dans un âge avancé, usé /107/ par son activité guerrière et politique, et se consolant (disent les chroniqueurs), dans la contemplation de ses grandes richesses, des grandeurs auxquelles il avait dû renoncer.
De sa femme Helvige de Frobourg, de la maison des Landgrâves de Büchsgau et de Sissgau (Jura soleurois), il laissa un fils, Berthold V, et deux filles, dont l'une, Agnès, était mariée à Egon, Comte de Hohen-Urach, ou de Furstemberg, et l'autre, Anna, avait épousé Ulrich, Comte de Kybourg 259. /108/
BERTHOLD V DE ZÆRINGEN
Cinquième et dernier Recteur ou Duc
de la
Bourgogne-Transjurane.
de l'an 1186 à 1918.
Berthold V fut de tous les Ducs de Zæringen celui qui porta le plus haut la fortune et la grandeur de sa maison. Les richesses pécuniaires qu'il hérita de son père, augmentées par sa propre parcimonie, lui valurent le surnom de Riche et la réputation d'Avare 260. Doué par la nature de formes colossales, avec des traits d'une rudesse presque sauvage 261, son caractère emporté et son excessive sévérité, poussée quelquefois jusqu'à la cruauté, le faisaient redouter même par ses proches. Par un contraste fort ordinaire dans ce siècle reculé, il était dominé par la terreur des censures de l'Eglise « qui transformaient soudainement le lion rugissant en un lièvre timide. » » 262. Mais ces taches, qui ternissent la /109/ renommée de cette grande figure historique, étaient accompagnées d'une prudence et d'une habileté politique qui lui assignèrent l'un des premiers rôles dans les événemens de son temps 263.
L'antipathie des seigneurs transjurains pour sa dynastie se changea contre lui personnellement en haine profonde et déclarée, et ils lui suscitèrent de constantes oppositions. La fondation récente de la ville de Fribourg en Uchtland, les privilèges inconnus jusqu'alors dans ces contrées dont Berthold IV avait doté la cité nouvelle, et le projet avoué par son fils d'étendre ces mêmes privilèges à beaucoup d'autres bourgades du pays, donnaient aux seigneurs des territoires voisins l'attitude d'une défense personnelle et légitime, puisque ces nouveaux établissemens ne pouvaient s'accroître et prospérer qu'en attirant à eux les petits féotiers d'alentour, qui désertaient les terres de leurs seigneurs et abandonnaient la culture des champs pour exercer une industrie ou un métier dans leur enceinte 264. C'est ainsi que les villes du Duc enlevaient tout trafic aux marchés des campagnes et concentraient tout le commerce dans leurs murs. On ne parlait dans le pays que d'innovations oppressives, de droits méconnus , de libertés rendues dérisoires et d'exactions tyranniques. Ces mécontentemens allaient croissant d'année en année, et finirent par gagner aussi les masses populaires, premières victimes de la résistance des Seigneurs et de la colère du Recteur 265. Tandis que Berthold suivait l'Empereur Fréderic Ier dans sa dernière expédition en Palestine, ou peut-être pendant qu'il se préparait à rejoindre /110/ l'armée des croisés 266, la Transjurane vit éclater un complot destiné à renverser son autorité et à ruiner ses plans de fondations urbaines. Mais, le Duc Berthold ayant bientôt appris la mort imprévue de l'Empereur (11 juin 1190), se crut libre d'abandonner une expédition à laquelle il n'avait pris part qu'à regret. Il revint en Brisgau , où il fut promptement informé du soulèvement qui se préparait dans la Transjurane. Sans perdre un moment, il rassembla ses hommes d'armes de la Forêt-Noire, en même temps que le Comte Albert de Habsburg levait pour lui les vassaux du territoire de Zurich. Ces derniers joignirent le Duc sous les murs du château de Berthoud, dans l'Emmenthal. Puis, ayant rallié à ses drapeaux les vassaux du Landgraviat, dont la fidélité semblait prête à s'ébranler, il franchit l'Aar, au pont romain d'Oltingen (près d'Aarberg), et marcha sur le Pays-Romand 267.
La ligue des Seigneurs Transjurains avait pour principaux moteurs l'Evêque Roger de Lausanne 268, et Guillaume Ier, Comte de Genève, qui, à cause des domaines et des fiefs qu'il possédait dans le Jorat, affectait de s'intituler Comte des Vaudois (Gebennensium et Valdensium Comes) 269. Les vues ambitieuses de ce dernier s'alliaient /111/ momentanément à la résistance des Seigneurs Transjurains qui sentaient le besoin de se donner un chef capable de faire taire les rivalités du commandement. Ceux-ci furent surpris par le retour imprévu du Recteur, qu'ils croyaient retenu au loin et qui leur apparut avant qu'ils se fussent concertés avec les mécontens des terres teutoniques, et même avant qu'ils eussent réuni la totalité de leurs propres forces; néanmoins ils firent bonne contenance, et attendirent le Duc, qui les atteignit entre Avenches et Payerne, les battit et les mit en déroute vers la fin de l'année 1190 270. Poursuivant aussitôt son succès, Berthold remonta la vallée de la Broie, prit en passant et brûla le château de Lucens, qui appartenait à l'Evêque Roger; puis, il vint faire halte à Moudon, au pied d'une colline sur laquelle le Duc Conrad, son ayeul, avait jadis jeté les fondemens d'une grosse tour, nommée Tour-de-Broie 271. Ce lieu n'était alors qu'une petite bourgade, bâtie sur l'emplacement de l'ancien Minnodunum des Romains, mais qui possédait l'avantage d'être placée sur un sol régalien 272. Le Duc résolut de faire de Moudon, sinon une ville municipale, au moins un gros bourg fortifié, au centre même des domaines de l'Evêque, et assez fort pour assurer sa domination sur tout le Jorat. En conséquence, il fit rebâtir et élever la tour de Broie, ferma de murs le bourg qui est à ses pieds et y plaça une bonne /112/ garnison 273. L'Eglise de Lausanne avait l'usage de la majeure partie des forêts ou des pâturages déserts du Jorat, dont le fonds appartenait au Souverain 274. Le Duc en chassa les veneurs, les colons et les troupeaux de l'Evêque; il interdit le parcours de ces forêts, en y mettant le ban royal, au préjudice du chapitre de Lausanne, mais au grand profit des bois, dont l'accroissement fut rapide 275. Après avoir fortifié Moudon, le Duc Berthold parcourut en armes tout le Pays-Romand; il força les Seigneurs à se disperser et à se retirer dans leurs châteaux forts; il releva les murs d'Yverdon (l'ancien Castrum Ebrodunense), et descendit même jusqu'aux rives du Léman, où il désigna un lieu, nommé Morges, qui dépendait du village paroissial de Joulens (alors considérable) 276, pour y faire construire un château fortifié en regard du magnifique donjon de Vufflens, qui, comme nous l'avons vu, était devenu un fief de l'Eglise de Lausanne.
Tous ces événemens, réunis dans un même récit par les vieilles traditions, doivent évidemment embrasser plusieurs années successives (de 1190 à 1208), mais toujours est-il certain que, depuis la défaite de la ligue transjurane (1190), /113/ le Duc de Zæringen acquit dans le Pays-Romand une prépondérance décidée, et qu'il rattacha à sa mouvance, de gré ou de force, plusieurs grands vassaux de ces contrées, auxquels il inféoda des terres régaliennes vacantes ou confisquées sur les rebelles; telles furent les forêts et les montagnes du Marchairu (Martzairu, Marches-es-Ruz), dans le Jura, que les trois frères Guerric, Pierre et Jaques, Sires d'Aubonne reprirent en fief du Recteur, le 4 avril 1208 277. C'est aussi vraisemblablement à cette époque que plusieurs hauts-feudataires du Pays-de-Vaud entrèrent volontairement dans la mouvance du Comte Otton, Palatin de Bourgogne, pour se soustraire à celle du Recteur.
Se voyant forcés par les circonstances de subir l'humiliation d'une suzeraineté intermédiaire, ils durent préférer de se soumettre à un prince de la dynastie impériale qu'à la maison de Zæringen, qu'ils abhorraient. De ce nombre furent les Sires de Grandson, de La-Sarraz et de Montricher 278. D'autres, tels que les Seigneurs de Mont, de Prangins et de Gingins 279, offrirent l'hommage de leur /114/ franc-alleu aux Archevêques de Besançon, sous la réserve de leur féauté envers le Comte de Genève, souverain du pays des Equestres, ou de Nyon.
Après la soumission des Seigneurs Romands, le Duc Berthold s'était hâté de revenir dans l'Emmenthal, où, pour raffermir la fidélité douteuse des vassaux du Landgraviat, il érigea la petite ville de Berthoud, dont le nom français rappelle celui de son fondateur. A cet effet, il réunit dans une même enceinte de murs le hameau de Holzbrunn et le village de Burg-dorf, situés au pied de l'ancien château ducal du même nom, et il fit placer sur la porte principale une inscription latine portant: « Bertholdus, Dux Zæringie, qui vincit Burgondiones, fecit hanc portam », afin de perpétuer la mémoire de sa récente victoire sur les transjurains et pour servir d'avertissement aux feudataires remuans de la Bourgogne Teutonique 280. A peu de distance de Berthoud, en descendant le cours de l'Emme vers Soleure, le Duc fit encore construire le Donjon de Lands-hut; car, en même temps que le Recteur créait des villes libres et commerçantes pour emplir ses trésors, il bâtissait des châteaux-forts, munis de bonnes garnisons, afin, comme l'indique le nom de celui de Landshut, de garder le pays, et de contenir l'esprit turbulent et envahisseur des bourgeois des nouvelles cités dans les bornes des Franchises qu'il trouvait à propos de leur /115/ octroyer. Ces nombreuses fondations, entreprises presqu'à la fois sur les points les plus opposés de la Transjurane, n'empêchaient pas l'ambitieux Duc de saisir toutes les occasions de réaliser d'autres projets d'agrandissement. - Nous avons vu que l'Empereur Henri VI, en révoquant en 1189 le ban impérial lancé contre le Comte de Maurienne et en recevant en grâce son jeune fils, le Comte Thomas s'était néanmoins réservé la souveraineté immédiate du Haut-Vallais, et qu'il avait rendu à l'évêque de Sion l'investiture des régales, sans égard à l'acte par lequel l'Empereur Fréderic avait antérieurement concédé ces prérogatives aux Ducs de Zæringen. Après la mort de Fréderic tous les liens de subordination se relâchèrent et Berthold, qui d'ailleurs était mal avec Henri VI, son fils et son successeur 281, ne craignit point de recourir aux armes pour ressaisir cette suzeraineté. Il résolut de surprendre les Valaisans avant même que les passages des montagnes fussent entièrement débarrassés des neiges de l'hiver. Dès les premiers jours d'avril 1191, il détacha un corps de gens-d'armes pour faire une fausse attaque par la Gemmi, tandis que lui-même se dirigeait directement avec le gros de son armée sur Sion, par les gorges de la Lenk 282. Néanmoins les habitans du Haut-Vallais, soutenus par les vassaux du Comte Thomas accourus du Bas-Vallais à leur secours, se postèrent avantageusement sur les hauteurs qui dominent les passages /116/ étroits du Râwyl, et firent rouler sur leurs ennemis de telles masses de rochers et de gros arbres que le Duc et les siens n'échappèrent qu'avec beaucoup de difficulté, par une retraite périlleuse et précipitée 283. Après cet échec, le Duc Berthold ajournant sans y renoncer ses projets sur le Vallais, se contenta de se rendre maître des hautes vallées et des nombreux passages qui y conduisent. Il profila habilement du besoin d'argent des Seigneurs de Thoune pour se faire céder par eux un terrain patrimonial sur le bord oriental de l'Aar, à l'endroit où cette rivière sort du lac appelé alors Wendelsee (et de nos jours lac de Thoune). Il y fit construire un fort et vaste château, dont une bonne partie est encore debout et qui, placé au sommet d'une colline, domine toute la contrée. De là il pût surveiller et contenir l'esprit indépendant des vassaux d'alentour, qui revendiquaient aussi la mouvance immédiate de l'Empire et supportaient impatiemment le joug du Recteur 284.
Pour s'assurer mieux encore la fidélité de ses vassaux, il maria les héritières des deux plus puissantes familles de l'Oberland à deux vaillans chevaliers Thurgoviens qui lui étaient tout dévoués. Les Sires de Wädiswyl et d'Eschembach furent unis (dans les dernières années du XIIe siècle) aux filles uniques des Sires d'Unspunnen et d'Oberhofen 285. Leur descendance se soutint avec éclat et renommée dans ces hautes vallées jusqu'à ce qu'elle se vit enveloppée dans la proscription qui atteignit (en 1308) les meurtriers d'Albert de Habsbourg, Roi des Romains 286.
Toutes ces villes et bourgades créées ou affranchies par /117/ le Duc de Zæringen, sans en excepter Fribourg, n'étaient que des villes municipales et sujettes (Landstädten) appartenant au Duc comme Seigneur direct (allodial) et ne relevant que médiatement de l'Empire 287. De Lausanne à Bâle, on ne rencontrait que deux villes impériales immédiates, savoir: Bienne et Soleure 288. Aussi le Duc devait-il prévoir que la couronne n'aurait aucun intérêt fiscal ou politique à maintenir les privilèges de ces communautés urbaines contre les plaintes et les réclamations persévérantes des Seigneurs voisins. C'est pourquoi il résolut de consolider leur existence par la fondation d'une ville-impériale (Reich-stadt), qui, située au centre des territoires de sa domination, pût devenir, par la protection des Empereurs, un point d'appui à ces nombreux établissemens municipaux répandus sur toute l'Helvétie bourguignonne. On peut aumoins vraisemblablement supposer que ce fut là le motif qui engagea Berthold à fonder la ville de Berne.
A l'extrémité d'une presqu'île allongée que l'Aar forme dans les replis de son cours tortueux et séparée du pâturage adjacent par un profond ravin (naturel ou artificiel) appelé autrefois Ruwenthal, existait déjà un manoir domanial, nommé Nydegk, qui dominait le hameau de Berno 289, appartenant à la Plébanie de Könitz 290. Cet emplacement était voisin de Pipinnant (aujourd'hui Bumplitz); lieu célèbre, qui dans le IXe siècle avait donné son nom à toute la contrée et servi depuis de résidence aux Rois /118/ Rodolphiens 291. C'est de cela que la presqu'île, le manoir et l'immense forêt (der Forst), qui s'étendait au couchant jusques vers Laupen étaient réputés sol régalien (Reichsgrund) 292 et inaliénables, le Duc n'en ayant la jouissance qu'à titre de Recteur. Vers l'an 1190, Cuno de Bubenberg, maréchal (mar-schalk) du duc de Zæringen, reçut de celui-ci la mission de faire entourer d'un mur d'enceinte la presqu'île de Berne. Sous cet abri s'élevèrent bientôt de nombreuses habitations 293. Le Duc accorda à cette nouvelle création les mêmes lois municipales et les mêmes franchises dont jouissait la ville de Fribourg, sa sœur ainée, à laquelle il l'unit par une étroite confédération 294. Quoique fondée, comme nous venons de le voir, sur un terrain régalien, le Duc en fut, dans les premières années, considéré comme le Seigneur direct (Dominus); les circonstances critiques dans lesquelles il se trouva bientôt engagé, l'ayant empêché de la déclarer immédiatement ville impériale 295.
Le Duc de Zæringen avait depuis peu encouru la disgrâce de la cour impériale en refusant à l'Empereur Henri VI de l'accompagner dans la campagne d'Italie de l'an 1196. Le monarque irrité avait envoyé contre lui Conrad, Duc de Souabe, son frère, à la tête d'un corps de troupes pour s'emparer de ses domaines et le punir de sa résistance à ses /119/ ordres. Pris au dépourvu et menacé d'une lutte disproportionnée, Berthold n'échappa à cette extrémité que par la mort inopinée et violente du Duc de Souabe 296. La mort de l'Empereur Henri suivit de près celle de son frère (28 septembre 1197). Ce double événement, en délivrant le Recteur du plus grand danger que sa fortune ait eu à courir, fit naître le grand schisme de l'empire, durant lequel le Duc Berthold de Zæringen 297 fut proposé par le parti des Guelfes et du Pape Innocent III pour successeur à la couronne impériale, et où il donna aux peuples étonnés l'étrange exemple d'un trône refusé par cupidité et par des considérations vénales.
Il transigea avec Philippe de Souabe, son compétiteur (couronné, le 15 août 1198, à Mayence, par l'Archevêque de Tarentaise) 298, au préjudice de son neveu Fréderic II, Roi de Sicile, fils et héritier de l'Empereur Henri, dans le même temps qu'à son défaut le parti Guelfe proclamait à Aix-la-Chapelle, le 12 juillet 1198, Otton IV de Brunswik. Ce schisme politique eut peu de retentissement dans l'Helvétie, où Philippe de Souabe fut reconnu généralement comme le Souverain légitime 298bis. Le Duc de Zæringen, quoique intérieurement porté pour le Guelfe Otton, persévéra dans une apparente fidélité envers son compétiteur; soit qu'il craignit en l'abandonnant de s'aliéner ses vassaux de la Souabe et de l'Helvétie, soit qu'il se fit scrupule de manquer à ses sermens 299. Sa constance fut mise néanmoins /120/ à de rudes épreuves, comme nous allons le voir. Le Comte Thomas de Savoie avait prêté momentanément l'appui de ses armes au parti Guelfe en Italie, afin de le gagner à lui; Philippe, dont il était parent (consanguineus), lui promit de lui donner Tortone et Quiers, en Italie, ainsi que la ville de Moudon, au Pays-de-Vaud. Le Comte Thomas s'étant effectivement rendu à Bâle pour lui faire hommage, ce Monarque, qui y était entouré des Prélats et des Grands de la Bourgogne et de l'Alsace, lui donna l'investiture des fiefs héréditaires qu'il tenait de l'Empire, selon l'ancienne coutume des trois Bannières (tribus vexillibus), privilège des Princes de l'Empire (more principum), ainsi que le porte le diplôme authentique qui en fut expédié et daté de cette ville, le 1er juin 1207 300. Il lui confirma expressément la donation de la ville forte (castrum) et du territoire de Moudon à titre de fief Impérial, s'engageant à l'y maintenir envers et contre tous; oubliant ainsi que le Duc Berthold avait relevé à ses dépens les murs ruinés et peuplé la solitude de cette ville, et que, même en la considérant comme fief-impérial, elle était néanmoins sujette à la mouvance du Recteur et ne pouvait donc lui être aliénée sans une grande injustice.
Philippe de Souabe étant mort assassiné dès l'année suivante (21 Juin 1208), la haine secrète du Duc de Zæringen contre la maison de Souabe le porta à se déclarer ouvertement pour Otton de Brunswik 301. Dès ce moment, les plus funestes divisions régnèrent dans les contrées Helvétiennes, comme dans le reste de l'Empire germanique. /121/ L'Helvétie-Teutonique tout entière, entraînée par l'exemple du Duc de Zæringen, reconnut pour souverain Otton IV, que le Pape Innocent III couronna à Rome le 4 octobre 1209. L'Helvétie-Romande se partagea en deux factions: le Haut-Clergé, soumis à l'esprit ultramontain du vieil Evêque Roger, qui lui-même était soutenu par Bernard, Evêque de Genève, se déclara pour l'Empereur Otton 302, tandis que les Comtes de Savoie et de Genève, appuyés par tous les Seigneurs laïques des deux Bourgognes-Juranes, ne voulurent reconnaître pour souverain légitime que le jeune Roi de Sicile Fréderic II, auquel le Saint-Siège refusait sa sanction.
Le Comte Thomas de Savoie, qui songeait peut-être dès-lors à supplanter la maison de Zæringen dans le Rectorat de la Transjurane, profita habilement de ces divisions intestines pour s'établir dans le Pays-Romand, en se déclarant le Champion de la Dynastie de Souabe contre la faction Guelfe 303, et en se mettant en possession de la ville de Moudon, que le Recteur ne semblait plus en mesure de lui disputer.
Cependant, l'Evêque de Lausanne, plus alarmé des calamités qu'amènerait sur le pays et sur son Eglise une guerre intestine entre les deux maisons rivales de Zæringen et de Savoie que préoccupé du maintien des droits de tel ou tel /122/ prétendant à l'Empire, voulut s'opposer à l'entrée des troupes du Comte Thomas sur les terres de l'Evêché, mais ce dernier força la Tour-de-Rive à Ouchy, et, après l'avoir fait raser, marcha directement sur Moudon, nonobstant les réclamations de l'Evêque, qui prétendait y avoir autant de droits que le Duc de Zæringen 304.
Berthold n'était pas homme à se laisser impunément dépouiller; il réunit à la hâte un corps de gens-d'armes, avec lequel il s'avança contre son ennemi dans le but de se ressaisir de Moudon. La longue vallée de la Broie et tous les lieux circonvoisins devinrent alors le théâtre d'une guerre de rapine et de dévastation dont l'histoire a conservé quelques traces sans en recueillir les détails 305.
On ne saurait douter que bon nombre de Seigneurs transjurains prirent une part active à cette lutte et se rangèrent sous l'une ou l'autre bannière rivale; il est même vraisemblable que la plupart de ceux du Pays-Romand prirent parti en faveur de l' Aigle Savoyard 305bis. Leur vaillante coopération fut cause que le Comte Thomas put se maintenir dans le Jorat et conserver Moudon 306. Le Duc Berthold, forcé de se retirer de ce côté, tenta une diversion utile à ses intérêts en essayant une nouvelle campagne contre les Vallaisans. En 1211, accompagné des Seigneurs de l'Oberland, il remonta la source de l'Aar pour gagner par le Grimsel les glaciers du Rhône, d'où il fondit à l'improviste sur le village d'Ulrichen, dans le Haut-Vallais. Il fut cependant repoussé par les habitans, qui avaient été avertis des mouvemens du Duc par les Seigneurs transjurains, et forcé /123/ d'abandonner son entreprise 307. Une croix commémorative, placée sur le lieu même où cette victoire fut remportée par le Landsturm vallaisan, portait cette inscription en allemand: « Im Jahr 1211 ward Herzog Berthold von Zæringen geschlagen » 308. Ce fut vers ce temps que le Duc, accablé des coups les plus cruels, perdit le dernier de ses fils, qu'il avait eu de Mathilde, sa première femme 309. Ce fils, nommé Berthold comme son père dont il était l'espoir et l'héritier présomptif, fut enseveli dans l'Eglise de St.-Ours de Soleure, à côté de son jeune frère Fréderic, qui l'avait précédé de quelques années dans la tombe. Jusqu'à la Réformation, on célébrait, le premier Janvier de chaque année, dans l'église paroissiale de la ville de Berne, une messe solennelle pour le repos de l'âme du jeune Berthold, fils du Duc de Zæringen fondateur de cette ville 310.
Cette grande infortune, ajoutée aux revers successifs de ses armes, dompta enfin l'inflexibilité naturelle du Recteur; en même temps, ses ennemis le voyant privé d'héritiers et convoitant chacun une part de sa riche succession, furent moins acharnés à sa poursuite.
L'Evêque Roger s'empara de cette disposition des esprits pour proposer un accommodement, qui fut conclu le 18 octobre de la même année 1211 à l'abbaye de Haut-Crêt 311, /124/ et qui mit fin à la guerre. Cette paix fut le dernier acte important de l'administration difficile et orageuse de l'Evêque Roger. Courbé sous le poids des ans et des infirmités (senio confectus et infirmitate), ce Prélat résigna le sacerdoce le 7 janvier 1212 312, entre les mains de l'abbé de Haut-Crêt et du Prieur de St.-Maire, délégués du Pape. Il vécut encore huit ans comme simple Chanoine et mourut on 1220, survivant ainsi au Duc Berthold de Zæringen, contre lequel il avait combattu toute sa vie avec les armes spirituelles et temporelles. Roger eut pour successeur à l'Evêché Berthold, Trésorier du Chapitre, qui était le fils cadet d'Ulrich III, Comte de Neuchâtel, mort en 1209. Rodolph III, fils aîné de ce Comte, avait succédé à son père comme Landgrave de la rive gauche de l'Aar; mais, étant décédé bientôt après (en 1213) des suites d'une blessure reçue à la guerre 313, ce fut à son frère puîné Ulrich IV qu'il remit en mourant la tutelle de Berthold son fils mineur et l'exercice des fonctions de Comte-provincial ou Landgrave, jusqu'à la majorité de ce dernier 314.
Ulrich IV avait épousé, vers l'an 1202, Jolande de Hohen-Urach, nièce de Berthold de Zæringen, et en faveur de ce mariage le Recteur lui inféoda les terres qui formèrent depuis le Comté patrimonial d'Aarberg 315.
Ce sage et prévoyant chef du Chezaul de Neuchâtel /125/ resta attaché par plus d'un lien à la maison de Zæringen, et, sans suivre le Duc dans tous les écarts de son ambition, il sut, comme lui, profiter avec empressement de toutes les occasions d'assurer la prospérité de sa race et celle des nombreux vassaux qui lui étaient soumis.
L'émancipation des villes et bourgs de ses domaines lui parut propre à remplir ce double but, et il résolut d'affranchir la ville de Neuchâtel, siège principal de son gouvernement. Mais cette cité toute Bourguignonne était entourée de petits possesseurs de francs-alleux jaloux de conserver leurs usages nationaux, et en outre le Comte Ulrich n'ignorait point l'antipathie des peuples Romands contre les formes germaniques, même lorsqu'elles tendaient à augmenter leurs libertés, aussi, au lieu de prendre pour modèle le code municipal de Fribourg, il octroya à la ville de Neuchâtel les franchises et coutumes de Besançon (Bisuntii consuetudines) par une charte solennelle datée du mois d'avril 1214 316. L'Evêque, frère du comte, le Chapitre de Lausanne et celui de la Collégiale de Neuchâtel furent conjointement nommés garants perpétuels des franchises octroyées à la ville de Neuchâtel et désignés pour juges des différens qui pourraient s'élever entre les Bourgeois et leur Seigneur, avec faculté de mettre en interdit les domaines du Comte lorsque celui-ci ne se soumettrait pas à leur sentence; ils furent investis du même droit à l'égard de la ville dans le cas où les Bourgeois refuseraient obéissance au comte ou manqueraient eux-mêmes au serment de fidélité qu'ils devaient lui prêter pour le maintien des coutumes 317. /126/
Quelques années plus tard, Ulrich fonda la petite ville d'Aarberg, mais, comme elle était en pays Teutonique, il lui accorda sagement les lois municipales et les libertés de Fribourg en Uchtland (libertate et jure quo Friburgum in Ocht-landon stat ) 318.
Cependant le désir de laisser un héritier direct de ses grands biens et un rejeton de son illustre race avait engagé le Duc Berthold de Zæringen à se remarier. Fidèle à ses relations politiques, il épousa Clémence, fille d'Etienne III, Comte-feudataire de Bourgogne et d'Auxonne 319, qui était alors en guerre ouverte avec Otton II, devenu Comte-Palatin de Bourgogne par son mariage avec Béatrix de Souabe, fille unique et héritière du Comte-Palatin Otton I, mort le 13 janvier 1200 320. Pendant la seconde période de cette guerre intestine, à laquelle les Seigneurs transjurains prirent plus ou moins de part, Guillaume II de Vienne, Comte-feudataire de Mâcon 321, agissant soit pour son propre compte, soit au nom du Comte Etienne, traversa en armes les gorges du Jura et s'empara de vive force de la ville et du territoire d'Orbe, dont la mouvance directe appartenait au Comte-Palatin, quoique le domaine utile dépendit en partie du monastère de Romainmôtier. Le fait de ce coup de main hardi est indiqué dans un acte postérieur de quelques années, par lequel Guillaume II de Mâcon donna (anno 1218) à ce monastère une charge de sel à prendre annuellement dans les salines de Lons-le-Saunier, pour le repos de l'âme de Messire Gaucher, fils de Rodolph, Sire de Monnet, mort à son service à Orbe (in obsequio /127/ nostro apud villam Orbam Defunctus), et honorablement enseveli en présence du Comte dans l'église de Romainmôtier 322.
On ne sait si le Duc Berthold soutint son beau-père, le Comte Etienne dans cette guerre contre le Comte Palatin, mais en général depuis la paix de Hautcrêt (en 1211) dont nous avons parlé, Berthold semble avoir ajourné tous ses plans d'agrandissemens pour se renfermer dans une attitude de prudente expectative, d'autant mieux motivée que le Pape Innocent III s'était brouillé avec l'Empereur Otton IV, et que, après avoir fulminé contre lui une bulle d'excommunication, il prononça un peu plus tard la déchéance de ce monarque guelfe, pour reconnaître enfin Fréderic II, Roi de Sicile, qui fut proclamé de nouveau Roi des Romains à Francfort, le 6 Décembre 1212 323.
Le Duc de Zæringen, qui connaissait la haine que lui portait ce jeune Prince, refusa constamment de se déclarer pour lui. Le Pape, aigri par ce refus, critique indirecte de ses propres tergiversations, accueillit plus volontiers les accusations réitérées portées au pied du trône pontifical contre la tyrannie et la cupidité du Duc par les membres de sa propre famille 324. Il est vraisemblable qu'elles auraient fini par lui porter un coup funeste si la mort du Pape, arrivée le 17 Juillet 1216, ne l'eût délivré de ce puissant ennemi. Honorius III, son successeur, se montra mieux disposé en sa faveur, car dans une bulle, donnée à l'église de Bâle en /128/ l'an 1217 325, il le nomme son cher fils (dilectum filium).
Le Duc Berthold, tantôt en visitant ses domaines héréditaires en Brisgau, tantôt en résidant dans ses châteaux de l'Helvétie, surtout à Berthoud, sut maintenir les prérogatives et l'autorité de son rang dans la Bourgogne-Teutonique, et s'attirer le respect et la considération des Seigneurs voisins de ses états. On se souvient que l'abbaye de Frienisberg avait été fondée dans le siècle précédent (1131) par le Comte Udelhard de Thierstein-Seedorf. Quoique les descendans de ce Seigneur se fussent depuis transportés dans le Sissgau (territoire de l'Evêché de Bâle), dont ils étaient Landgraves héréditaires, et qu'ils y eussent bâti le nouveau château de Thierstein, dont les ruines dominent encore le vallon de la Lusselle, ils avaient néanmoins conservé leurs anciennes propriétés patrimoniales dans le Landgraviat de la Petite-Bourgogne et leur château-fort dans Fribourg. Le Comte Rodolph de Thierstein et son fils du même nom augmentèrent, en 1208, les donations de Frienisberg (cujus parentes abbatiam de Frienisberg ... fundaverunt) en cédant aux religieux des terres et des bois qui avoisinaient le couvent; cette donation est datée de la régence du Duc Berthold, Recteur de Bourgogne (Ducatum Burgundiæ potenter regente Duce Bertholdo) 326.
Peu d'années après (1212), le même Comte de Thierstein se trouvant en différent avec l'Abbaye de Beynwyler, dont il était l'avoué héréditaire, au sujet de l'échute (fall) des biens des sujets de cette Abbaye morts sans héritiers, les deux parties, d'un commun accord, choisirent le Duc de Zæringen pour arbitre de leur différent, qu'il jugea effectivement à leur mutuelle satisfaction 327. Ce fait prouve /129/ la considération dont il jouissait même au dehors de ses états, car le Diocèse de Bâle ne relevait aucunement de l'autorité du Recteur.
Berthold de Neuchâtel, Evêque de Lausanne, avait puisé à l'école de son prédécesseur une haine d'autant plus fondée contre le Duc de Zæringen que ce dernier s'était abstenu de lui prêter l'hommage lige qu'il lui devait pour l'avouerie (Kast-vogtey) de Lausanne; cependant il demeura fidèle à la politique de sa famille, et ne refusa point de concourir avec le Recteur à certains actes propres à maintenir la paix publique et la justice dans la Transjurane. Une preuve officielle de cette bonne intelligence se trouve dans une Charte contemporaine, qui atteste, en outre, que, même dans ces temps de désordre, les lois n'étaient pas absolument méconnues. Conon de Thiele (Theil), châtelain (miles) de la maison de Neuchâtel 328, avait enlevé au monastère de Frienisberg 25 bêtes à cornes et 2 chevaux sur un pâturage auquel il prétendait avoir exclusivement droit. Les religieux ayant porté leur plainte devant le Duc, leur protecteur naturel, il condamna le châtelain de Thiele à leur abandonner, à titre d'indemnité, une propriété qu'il avait à Weingarten, dans le voisinage du couvent. Conon se trouvant homme lige de l'Evêque Berthold 329, et en même temps vassal du Recteur, pour son franc-alleu de Weingarten situé dans le Landgraviat, l'acte de cession exigeait, pour être valide, le concours du Prélat et du Duc, qui tous deux, en effet, assistèrent à sa stipulation, /130/ et le scellèrent de leur sceau, le jour de la St.-Martin 1216 330.
Peu après cette restitution, dernier acte officiel par lequel le Duc Berthold ait signalé sa présence dans l'Helvétie Bourguignonne, il se retira dans ses Etats du Brisgau et laissa la garde de ses domaines de Bourgogne, soit aux Comtes de Büchegk, qui administraient en son nom la haute-justice dans le Landgraviat de la rive droite de l'Aar, soit à ses nombreux vassaux de l'Emmenthal, de l'Oberland et de l'Uchtland, chacun d'eux étant dans le ressort de son fief ministérial ( ministerialis ), soit officier militaire, civil et domanial (miles, minister, villicus) pour le Duc, soit enfin aux chefs municipaux des villes et des bourgs murés, portant le titre d'Avoyer ou de Schültheis (Advocatus, Sculletus), qui, par leur serment de fidélité, étaient obligés de maintenir leur ville dans l'obéissance du Duc, et de la défendre contre tout autre seigneur 331.
Mais, avant de confier à ses agens une part de sa puissance, le Duc jugea prudent de mettre ses domaines des deux rives de l'Aar à l'abri d'un coup de main, qu'il pouvait craindre surtout de son nouveau et dangereux voisin le Comte Thomas de Savoie. A cet effet, il acheva de garnir les frontières méridionales de l'Uchtland d'une ligne de défense, dont la ville de Fribourg devint le centre, protégée à l'est par le château de Grasbourg 332, et à l'ouest par celui d'Oltingen. Il donna des ordres pour clore /131/ de murs le bourg et le château de Laupen 333, ainsi que pour relever l'enceinte ruinée de Morat, qu'il éleva au rang de bonne ville en lui accordant des libertés et des coutumes particulières (libertates et consuetudines sive mores ... ville de Morat) 334. Cette petite ville était, comme celle de Berne, bâtie sur un sol régalien 335, et jouissait par ce fait d'une sorte d'inviolabilité que le Duc aurait souhaité étendre sur toutes les cités de la Transjurane; cependant ce dernier acte de sa sage prévoyance resta sans exécution, et les murs de Morat ne furent reconstruits qu'après sa mort 336.
Retiré dans le château de Fribourg en Brisgau avec sa femme, la Duchesse Clémence, dont il n'avait pas d'enfant, le Duc Berthold n'y trouva point la tranquillité dont il espérait y jouir: témoin passif des défaites du parti Guelfe, auquel il était attaché, et des succès décisifs de Fréderic II, Roi des Romains, chef de la maison de Hohenstauffen rivale de la sienne, il se vit encore, avec une profonde amertume, privé d'héritiers directs et entouré d'avides collatéraux qui convoitaient d'avance leur part de sa riche succession; aussi son caractère devint-il de plus en plus irrascible et implacable, et ses derniers jours restent entachés d'actes inspirés par l'injustice, la colère et la vengeance qui ternissent l'éclat de sa renommée, et justifient en quelque sorte les accusations mensongères et les fables /132/ absurdes dont la peur et la superstition cherchent à revêtir cette grande et noble destinée 337.
Ce Prince riche et puissant mourut, âgé de plus de 70 ans, à Fribourg en Brisgau, le 14 Février 1218 338; année mémorable dans les annales de l'Helvétie-Bourguignonne, en ce qu'elle termina la domination de la maison de Zæringen dans cette contrée, sur laquelle elle avait règné près d'un siècle, avec plus ou moins de bonheur. Les restes mortels du Duc Berthold V furent portés (le 18 Février) dans l'église principale de Fribourg, et ensevelis en grande pompe dans le chœur, derrière le maître-autel; « sa lance et son bouclier » furent placés dans la tombe à ses côtés, symbole de l'extinction de cette illustre dynastie qui finissait en lui pleine de gloire et d'une juste renommée. /133/
Partage de la succession
de
Berthold V de Zæringen
Dernier Recteur ou Duc
de la
Bourgogne-Transjurane
La nouvelle de la mort du Duc Berthold se répandit avec rapidité des bords du Rhin aux rives du Léman, et excita partout une agitation extraordinaire. Les uns, confians dans leur force, songèrent à secouer toute espèce de dépendance suzeraine; les autres, se sentant faibles et dépourvus d'appui, se hâtèrent d'en rechercher un dans la bourgeoisie des villes; le plus grand nombre attendit avec anxiété le nouveau maître qui devait leur échoir.
Plusieurs héritiers à titres divers se présentaient pour prendre leur part à l'immense héritage de la maison de Zæringen; ils se fondaient soit sur les droits du sang, soit sur des principes d'hérédité plus ou moins compliqués. Le récit des sanglantes discussions qu'amenèrent ces prétentions dans la Souabe et le Brisgau est étranger à l'histoire du Rectorat de Bourgogne, et d'ailleurs il a été /134/ suffisamment développé par les auteurs qui se sont spécialement occupés de cette illustre maison 339. Nous nous bornerons à en donner un aperçu succinct.
En première ligne venaient les deux sœurs de Berthold V mariées, comme nous l'avons vu plus haut, savoir: Agnès, l'aînée, à Egon, Comte de Hohen-Urach (dans la Forêt-Noire), et la seconde, Anna, à Ulrich, Comte de Kybourg, le plus puissant seigneur de l'Helvétie par delà la Reuss. Leurs droits étaient évidens sur tous les domaines allodiaux et sur les fiefs susceptibles de transmission par les femmes.
Ensuite venait la veuve de Berthold, la Duchesse Clémence de Bourgogne, qui réclamait le douaire que le Duc son époux lui avait constitué sur le château de Berthoud et sur d'autres terres dans la Petite-Bourgogne 340.
D'autre part se plaçaient les agnats de la maison de Zæringen, composés des deux branches collatérales de Baden-Hochberg et de Teck; ils revendiquaient les fiefs masculins de la Souabe et du Brisgau.
A l'exception des titres et des prérogatives de Landgrâve de Brisgau, qui passèrent au Margrâve Henri Ier de Hochberg 341, tous les domaines patrimoniaux et la majeure partie des fiefs de la Forêt-Noire échurent aux Comtes d'Urach, soit de droit, soit par cession de l'Empereur Fréderic II, qui, en qualité de Duc de Souabe, avait acquis à prix d'argent les prétentions des Ducs de Teck 342.
L'épisode le plus dramatique des discordes qu'engendra la succession de Zæringen est la longue captivité de l'infortunée Duchesse Clémence, qu'Egon le Jeune, Comte /135/ d'Urach, retint pendant plus de 17 ans dans une dure prison, sans que l'histoire ait pu soulever le voile qui couvre les motifs de cette iniquité; elle ne paraît se rattacher à l'Helvétie Bourguignonne que par les prétentions que le Comte d'Urach forma, dans le même temps, sur le château et la seigneurie de Berthoud, qui cependant avaient déjà passé entre les mains des Comtes de Kybourg avant la délivrance de la Duchesse Clémence 343.
La portion d'héritage laissée par le Duc de Zæringen dans l'Helvétie n'offrit pas les mêmes difficultés que celles d'outre-Rhin. Elle se composait:
1° Des domaines allodiaux (Eigen) et des fiefs héréditaires (Erb-lehen);
2° Des fiefs impériaux (Reichs-lehen), des droits régaliens (Regalia) et des prérogatives souveraines attachées au titre de Recteur. La nature patrimoniale des domaines et des fiefs de la première section, situés sur la rive gauche de l'Aar, suivirent la loi d'hérédité bourguignonne, tandis que ceux de la rive droite se trouvèrent également transmissibles par les femmes, puisqu'ils provenaient de l'héritage d'Agnès de Rheinfelden 344, et ainsi tous les obstacles /136/ qui auraient pu s'élever contre les droits d'Anne de Kybourg furent applanis. L'histoire atteste, en effet, que les Comtes de Kybourg héritèrent immédiatement et sans conteste de tous les domaines, tant allodiaux que féodaux. Quoique les documens contemporains n'en donnent pas une nomenclature complète, ils font cependant mention du plus grand nombre: particulièrement de la ville de Fribourg en Uchtland, avec un territoire de 3 lieues à la ronde, composé de 34 paroisses (die alte Landschaft) que le Comte Hartmann de Kybourg reconnut à cette ville l'an 1249 345; des châteaux et bourgs murés de Laupen 346, d'Oltingen 347, de Thoune 348, et de Berthoud 349, avec leurs mandemens respectifs; Des châteaux et mandemens d'Oleyres, de Grâsbourg, de Diessbach, de Münsigen, et de Landshüt, des manoirs de Jegistorf, d'Utzisdorf, et de Herzogenbuchsée 350, ainsi que de beaucoup d'autres /137/ localités moins importantes situées dans les bassins de l'Aar et de l'Emme 351.
Ces fiefs, disséminés sur toute la surface du Landgraviat de la Bourgogne-Mineure, semblent prouver que les Comtes de Kybourg héritèrent l'intégralité de ce territoire ainsi que des nombreux vassaux qui en dépendaient; mais la suite des événemens démontre que les comtes de Buchegk, investis depuis quelques générations par les Ducs de Zæringen du titre et des attributions de Landgraves, rentrèrent, après la mort du Recteur, dans la mouvance immédiate de /138/ la couronne. Pour concilier cette apparente contradiction, on peut supposer que les Comtes de Kybourg firent un compromis avec le Comte Pierre de Buchegk, par lequel la haute-juridiction de ce Landgrave fut circonscrite dans la partie la plus voisine de l'Aar, qui dès-lors conserva seule cette dénomination de Landgraviat 352; appelée parfois aussi le Comté de Buchegk 353, tandis que la partie orientale de l'Emmenthal, qui prit le nom de Comté de Berthoud (Burgdorf), demeura à la maison de Kybourg à titre de franc-alleu et libre de toute juridiction supérieure, hormis celle de l'empire 354.
L'Empereur Fréderic II, convaincu du danger de laisser dans d'autres mains un pouvoir prépondérant et exceptionnel qui ne pouvait que devenir rival de sa propre maison et affaiblir l'attachement héréditaire que lui conservaient les populations helvétiques, se hâta de faire valoir les droits de retour à la couronne de tous les fiefs et domaines régaliens qui formaient l'apanage des Recteurs de Bourgogne. Déjà (17 mars 1218) 355, il avait repris l'avouerie de la ville et des monastères de Zurich et déclaré leurs bien inaliénables de l'Empire; il en fut de même de la ville et prévôté de Soleure, dont l'avouerie fut confiée (1218) /139/ au Comte Pierre de Buchegk 356. Ces deux villes furent ainsi placées au rang des cités impériales.
L'Empereur accueillit aussi avec faveur les députés de la ville de Berne qui s'étaient rendus en toute hâte auprès de lui pour solliciter la confirmation des franchises accordées à leur ville par son fondateur, et il leur octroya la célèbre Bulle-d'or (Handveste), datée de Francfort, du 15 Avril 1218 (17 kal. maii), qui déclarait Berne ville libre et impériale et l'affranchissait de toutes les charges qui jusqu'alors avaient pesé sur elle (qua oppressi fuistis), à l'exception seulement du cens foncier de 12 deniers pour chaque maison, qui restait comme le gage des droits de l'Empire sur la propriété du territoire occupé par la ville 357. C'est sans fondement qu'on a prétendu faire remonter plus haut l'affranchissement de cette nouvelle ville impériale; car le terme dont se sert l'Empereur en parlant du dernier Duc de Zæringen, qu'il nomme Seigneur de Berne (quondam dominus vester) 358, prouve que cette charte seule assura son indépendance et devint la première base de sa prospérité future.
Fréderic II réserva également à la couronne (reservata imperii) le Bourg de Morat et les Seigneuries de Gümmenen (Condamina) et de Lugnores, sur les confins des terres teutoniques, qui avaient passé, on ne sait comment, du domaine temporel de l'Eglise de Lausanne dans la dépendance du Recteur.
La communauté pastorale du Hasly et les hauts-seigneurs /140/ de l'Oberland secouèrent toute autre suzeraineté que celle de la Couronne 359. Les monastères d'Interlaken, de Rüggisberg et de Payerne, assis sur un sol régalien, rentrèrent sous la protection immédiate de l'Empire et se choisirent librement des Avoués particuliers 360. Enfin, pour enlever tout espoir aux héritiers du Duc Berthold, l'Empereur conféra le titre de Recteur de Bourgogne à son fils aîné Henri VII (Rector Burgundiæ anno 1219) 361, qui fut élu Roi des Romains le 26 Avril 1220. Il lui adjoignit dans l'exercice de cette dignité des Baillis-impériaux qui, sous les titres divers d'Avoués (advocati), de Juges-délégués (Imperialis Aulae legati) et de Procurateurs-impériaux (procuratores Burgundiæ), administrèrent temporairement (pro-tempore constituti) la justice-suprême et les domaines du Fisc 362.
Le Comte Thomas de Savoie était resté eu possession de Moudon; il s'accommoda avec l'Evêque de Lausanne au sujet des prétentions que cette Eglise conservait sur cette place 363. Le Comte revendiqua à son beau-frère le Comte Guillaume de Genève, Romont et Rue, qui avaient fait partie de l'héritage de la maison de Glane et qu'il prétendait être d'anciennes dépendances de la terre de Moudon 364, /141/ préludant ainsi à la création de ce Comté de Romont qui fut le premier échelon de la domination, sans cesse croissante, de la maison de Savoie dans le Pays-de-Vaud. L'accroissement de territoire que la succession des Ducs de Zæringen procura à la maison de Kybourg la plaça en contact immédiat avec les Comtes de Savoie, et ces deux antiques dynasties furent forcées de s'unir pour ne pas s'entre-détruire; semblables à deux chênes séculaires dont les fortes racines s'entrelacent pour puiser la vigueur dans un sol commun.
Berthold, Comte de Neuchâtel, dont les seigneuries d'Arconciel et d'Illens séparaient les terres des Comtes de Kybourg et de Savoie, et Guillaume, Sire d'Estavayer, dont le patrimoine touchait aux domaines des uns et des autres, paraissent avoir été les principaux négociateurs du traité qui unit les deux puissances rivales 365. Dans une assemblée solennelle, tenue à Moudon le 1er juin 1218, composée du Comte Ulrich de Kybourg, de la Comtesse Agnès de Zæringen sa femme, de leurs deux fils Hartmann et Werner, du Comte Thomas de Savoie, de ses fils Amédée et Humbert, d'Albert de Habsbourg, (père de l'Empereur Rodolphe I), des Comtes Rodolph de Thierstein et Berthold de Neuchâtel, et, en outre, d'une multitude de nobles Seigneurs (multorum nobilium) de l'Helvétie-Teutonique ou Romande, Margueritte de Savoie, fille du Comte Thomas, fut fiancée à Hartmann, fils aîné du Comte Ulrich de Kybourg 366.
Les Seigneurs des diverses branches de la maison de /142/ Neuchâtel flottaient incertains entre la mouvance toujours menaçante des Comtes de la Haute-Bourgogne et celle de l'Empire, dont ils tenaient le titre de Landgraves de la rive gauche de l'Aar 367. Le Comte Ulrich, tuteur de son neveu Berthold I, avait acquis en 1218 par échange de Gérard de Vienne, second du nom, fils de Guillaume II, Comte de Mâcon, la seigneurie du Val-de-Travers, y compris les Verrières de Joux et la Brévine, qu'il réunit au Comté de Neuchâtel 368. L'empereur Henri IV avait autrefois donné au monastère de Payerne l'Eglise du Val-de-Travers, et inféodé son territoire à divers Seigneurs laïques; c'était un arrière-fief de la maison de Châlons, dont les Princes, devenus Comtes-Palatins de Bourgogne, unirent la mouvance aux autres prétentions qu'ils formaient à la suzeraineté du Comté de Neuchâtel, et qu'ils parvinrent, avant la fin du même siècle, à conquérir définitivement 369. /143/
Les Comtes-Palatins conservèrent leur mouvance sur les seigneuries du Pays-Romand voisines du Jura, et entr'autres sur les terres de Grandson, le château des Clées et le monastère de Romainmôtier. Orbe leur appartint jusqu'à l'échange qu'ils en firent avec les Sires de Montfaucon, qui tenaient déjà d'eux Yverdon et Echallens 370. Ils exerçaient aussi un patronage sur l'Ile de St. Pierre et sur l'Abbaye d'Hauterive, qui dérivaient de leur ancienne suzeraineté sur la maison de Glane 371.
Nous avons vu que le Duc Berthold de Zæringen avait réuni le double titre d'Avoué-impérial et épiscopal de l'Eglise de Lausanne, ce qui était devenu une source interminable de discordes entre lui et l'Evêque. Aussi, peu de temps après la mort du Duc, l'Evêque Berthold de Neuchâtel, laissant un libre essor à sa haine comprimée, tint une assemblée publique du clergé et du peuple sous le porche (in vestibulo) de l'Eglise de Notre-Dame, le 22 janvier 1219 372, dans laquelle il accusa le Duc « d'avoir tourné contre l'Eglise l'arme destinée à la protéger, de s'être rendu coupable envers elle de rapines, d'incendie, d'homicide et de mutilation, non seulement envers des laïques, mais aussi envers des prêtres et des clercs et, pour chasser à jamais du bercail les loups dévorans et empêcher qu'un exemple aussi damnable ne fût imité par d'autres, » le Prélat fit à l'autel de la Ste. Vierge Marie l'offrande solennelle de l'Avouerie épiscopale de l'Eglise de Lausanne, retombée de droit (de jure) entre ses mains /144/ par la mort du Duc, que Dieu avait privé de ses enfans « à cause de ses méchantes actions (malitiae suas meritis) ». Il fit prêter au chapitre le serment de ne jamais aliéner cette Avouerie, à moins qu'il n'y fût contraint par une force supérieure (nisi per equitatem inevitabilis judicii). Ceci s'appliquait évidemment aux prétentions douteuses des Comtes de Kybourg à l'Avouerie épiscopale, acquise à prix d'argent par le Duc de Zæringen, et qui semblait ne pouvoir leur être enlevée sans indemnité, mais l'Evêque de Lausanne refusa tout accommodement, se fondant peut-être sur le rescrit de l'Empereur Fréderic I, (1180) qui autorisait chaque Evêque à réunir à la manse épiscopale l'Avouerie de son Eglise lorsqu'elle viendrait à vaquer par la mort du titulaire 373. Quoi qu'il en soit, les Comtes Hartmann et Vernher, fils d'Anna de Zæringen, vendirent peu après à Aymon II, Sire de Faucigny, dit le Courtois, l'Avouerie de l'Eglise de Lausanne (advocatiam Lausannensem), que les Comtes de Kybourg tenaient par droit d'hérédité (jure hereditario) de leur oncle (avunculus) le Duc Berthold. Cette vente se fit pour le prix de 300 marcs d'argent, outre 30 marcs imputables à leurs conseillers (eorum consiliarii), promettant au Sire de Faucigny de le maintenir dans cette possession de tout leur pouvoir et devant tout tribunal (in omni curia). Cet acte fut stipulé en l'année 1225, devant le grand pont d'Oltingen, en présence des trois fils d'Ebald, Sire de Grandson, surnommé l'antique (grandævus) savoir: Gérard, Henri et Pierre, qui sont la souche des trois branches de La Sarraz, de Grandson et de Champvent; furent aussi présens: Conon d'Estavayer, Ulrich de Wippens, Conon de Prés et Guillaume de Crissie ( Grissach) 374. /145/
Le Sire de Faucigny recourut à la force pour faire valoir les droits qu'il venait d'acquérir: il ravagea les terres de l'Evêché et se serait porté sans doute à d'autres violences si l'Archevêque Jean de Besançon n'eût envoyé une députation du chapitre métropolitain chargée d'amener un accommodement. L'Evêque Guillaume d'Ecublens, qui gouvernait alors l'Eglise de Lausanne avec autant de sagesse que de fermeté, se détermina à transiger avec Aymon de Faucigny; il lui accorda une indemnité de 320 marcs d'argent en échange de ses prétentions, le tenant quitte des dommages (dampna) que ses armes avaient faits à l'Eglise 375. Cette transaction fut signée le jeudi 18 juin 1226 dans la forêt de Biert près de Préverenges, en présence des deux parties contractants, d'Aymon de Grandson, Evêque de Genève, de Conon d'Estavayer, prévôt de l'Eglise de Lausanne, de l'Abbé de Haut-Crêt, de Hugues, prieur de Payerne, du prieur de Lutry, et des Chanoines députés de l'Archevêque de Besançon, nommés Ponce de Cicon et Paris du Temple.
Le Dimanche suivant (21 juin), l'Evêque Guillaume convoqua à l'église de St.-Maire de Lausanne le clergé et le peuple, et du consentement de tous, les cierges allumés, il fulmina une sentence d'excommunication contre quiconque oserait à l'avenir séparer l'Avouerie de Lausanne de la Manse épiscopale, soit par inféodation soit par toute autre espèce d'aliénation, et contre tous ceux qui y contribueraient, soit de leurs conseils, soit de leurs actes. Ainsi fut définitivement rétablie l'indépendance de l'Eglise de Lausanne et sa suprématie immédiate sur tous les domaines et /146/ fiefs qui en dépendaient, laquelle fut successivement confirmée aux Evêques subséquens, comme Princes de l'Empire, par tous les Empereurs qui régnèrent dès-lors.
CONCLUSION.
En résumant l'influence générale exercée par le Rectorat sur les destinées de la Transjurane, on peut observer que ce pouvoir exceptionnel créé, à ce qu'il semblait, pour fonder sur les ruines de la monarchie bourguignonne une nouvelle principauté féodale, à l'égal des grands-fiefs de l'Empire Germanique, n'est point parvenu à accomplir cette destination politique. — Cependant, en achevant la dissolution du dernier royaume de Bourgogne, il servit à incorporer définitivement les provinces Ultra-Juranes à l'Empire.
La longue lutte qui se maintint entre un pouvoir toujours contesté et une opposition persévérante, assez influente pour tenir ce pouvoir en échec, mais trop faible pour l'expulser entièrement, brisa l'unité politique de la Transjurane, sans avoir pu détruire ses mœurs et ses coutumes nationales. Dans ce conflit, le sentiment d'une indépendance commune dut céder aux exigeances plus pressantes d'une défense personnelle: les Seigneurs Transjurains, cessant de revendiquer une liberté politique collective, se retranchèrent dans le maintien de leurs prérogatives individuelles. De ce changement dans le principe de l'opposition nâquit la division des esprits et le morcellement du territoire. /147/
La race teutonique, moins opposée au joug de la maison de Zæringen, se sépara d'une manière plus tranchée de la race romande, dont toutes les susceptibilités nationales étaient blessées par sa domination. — Le Pays-Romand se fractionna ensuite lui-même et chaque petite souveraineté chercha au-dehors des protecteurs qui, bien qu'étrangers, présentaient une communauté d'origine, de mœurs, ou d'intérêts politiques.
Les quartiers voisins du Jura passèrent sous la suzeraineté des Comtes de Haute-Bourgogne; le centre, ou Pays-de-Vaud proprement dit, s'isola sous la protection des Sires de Faucigny et des Comtes de Genève, et prépara ainsi la domination de la maison de Savoie qui, résumant bientôt en elle les droits et les prétentions de tous ses prédécesseurs, réunit peu à peu les membres épars du royaume fondé par la race auguste des Rodolphiens à laquelle elle se rattachait par plus d'un lien.
Mais c'est évidemment par la fondation de plusieurs villes municipales que l'époque du Rectorat reçut un cachet indélébile. Quel que soit le but que se fussent proposé les Ducs de Zæringen par la création de ces établissemens, le fait en lui-même occupe une place d'autant plus marquée dans l'histoire que les institutions données aux nouvelles cités devinrent le germe fécond d'un ordre social entièrement neuf: de là date pour la Transjurane l'ère bienfaisante des libertés communales qui servirent d'acheminemens aux codes législatifs de la société moderne!
F. DE GINGINS.
Lausanne, Avril 1838.
Notes
1 Chronic. Cartul. Lausann. MSC. - Wippo in vita Conradi Salici apud Pistorium, p. 438.[retour]
2 Wippo in vita Conradi Salici apud Pistorium, p. 438. [retour]
3 Wippo l. c. p. 442. Par le peuple (Populus) il faut entendre la masse des petits propriétaires libres, cliens (fideles) des grands. - Les droits civiques étaient inséparables de la propriété foncière.[retour]
4 Wippo l. c. p. 442. « Populo clamante et dicente quod pax pacem generaret, si Rex cum cæsare regnaret. » [retour]
5 Wippo l. c. p. 442.« et diù desuetam atque pene deletam legem tunc primum Burgundiam prælibare fecerat. » [retour]
6 Lex Gundobada Tit XIII. § 1. et 2. et Boive Journ. Helvét. Mars 1747. p. 273 et suiv. [retour]
7 Le Chandon, qui coule près d'Avenches vers l'ouest, et le ruisseau de Plafayon, (ou Teutschbach) à l'est, forment, de ces côtés, la limite des deux langues.(A. L. de Watteville : MSC. à la bibl. de Berne). [retour]
8 L'Evêque de Lausanne Henry de Lenzbourg fut investi du comitat de Vaud (Comitatus Waldensis) par le roi Rodolph III aº 1011. (Sinner, voy. dans la Suisse occid. II, 173). Hugues, évêque de Sion, reçut l'investiture du haut-Vallais avec le titre de comte, du même monarque, par acte daté de Cudrefin de l'an 999. (MSC. de la bibl. royale, Paris, vol. cotté nº 114, p. 61, concernant le Vallais, ex-Rivaz Diplom. de Bourgogne. MSC.) [retour]
9 L'Evêque de Genève. (Voy. Lévrier hist. des Comtes de Genevois I, 7º). [retour]
10 Hermann contract. ap. Bouquet. T. XI, 19; - chron. Saxon, l. c. p. 215; - Wippo in Panegyr. Henrici, l. c. p. 8. note B. [retour]
11 Hermann contr. l. c. p. 19. [retour]
12 Dunod, hist du Comté de Bourge. T. II. p. 147. [retour]
13 Donation faite au couvent de Romainmôtier, par le comte Raynaud II, d'un maix à Agy et à Bofflens, et de l'usage dans la forêt royale (Sylva regali) rière Orbe, contre une mule de grand prix (vers l'an 1084). (arch. de Lause. Romainmôtier. litt. A.). [retour]
14 Soit le Pays de Gex et le Décanat d'Aubonne du diocèse de Genève. L'archevêque de Besançon partageait avec les comtes de Genève la suzeraineté de ces quartiers; on ne connaît pas bien l'origine de la mouvance de ce prélat. [retour]
15 Ratio exterminii quam tulit Adalbertus au monastère de Romainmôtier, griefs adressés au pape Léon IX., aº 1049. (archiv. de Lausanne litt, A.) [retour]
16 Hermann cont. ap. Bouquet XI, 19, 22. [retour]
17 Voy. Mille hist. de Bourge. III, 134. note 102. - Rod. Glaber, apud Bouquet X. p. 48. - Ruchat, hist. ecclésiast. page 28. -, Bridel, Conservateur Suisse. V. p.346. [retour]
18 Bridel, l. c. Le synode de Romont se place entre les années 1033 et 1039; cependant la trêve de Dieu ne fut complètement établie dans nos contrées que plus tard. [retour]
19 Nous avons deux chartes authentiques qui attestent l'existence de cette institution: 1º l'une est un plaid public tenu à Orbe par Walcherius et Cuonon de Grandson Principes Provinciæ, qui conjunxerunt colloquium de Prudentibus hominibus, pour juger les plaintes élevées par le prieur Lambert de Romainmôtier contre Philippe de Grandson, lequel avait enlevé des serfs à ce monastère, S. D. dernière moitié du XIe siècle. (Arch. de Laus. litt. n. B.) La 2e charte est la fondation de l'Abbaie d'Abondance aº. 1108, où Amédée de Blonay et Boson d'Alinge paraissent comme Principes laïcorum. (Guichenon, hist. Savoie, Preuves). [retour]
20 C'est de là peut-être que l'usage de soumettre les procès au jugement d'arbitres libres choisis par les parties est demeuré très-fréquent dans le pays romand. [retour]
21 Art. de vérif. les dates T. II. p. 16. [retour]
22 Rodolph était fils de Cunon, comte de Rheinfelden; il descendait par les femmes de l'empereur Otton I.; son père était frère utérin de Théodoric, Duc de haute-Lorraine, de Wernher Ier. Evêque de Strasbourg, et de la célèbre Itta de Habsbourg, fondatrice de l'Abbaie de Mury en Argovie.- Généal. de Mury; - Hergott I. p. 299. - Wieland Vindiciæ actorum. Murensium p. 139 et seq. - Voilà ce qui est diplomatiquement prouvé. - Mais plusieurs généalogistes ont pressenti que Rodolph devait se rattacher par les liens du sang à la dynastie Royale de Bourgogne. Un auteur anglais (Egerton Bridges, Anglo-Genevan Journal, T. II. p. 484) suppose que Conon de Rheinfelden, père de Rodolph, était fils de Conrad, Duc de Carinthie (mort aº 1012), et de Mathilde de Souabe, fille de Gerberge, soeur de Rodolph III, dernier roi de Bourgogne. — Mais cette filiation n'est fondée que sur une prétendue identité de Conrad, Duc de Franconie, cousin et compétiteur à la couronne Impériale de Conrad le Salique, mort aº 1039, et Cunon de Rheinfelden, mort aº 1027; identité qui est contraire à toutes les données historiques à nous connues.
Peut-être serait-on plus heureux en cherchant dans le Duc Rodolph, frère du roi de Bourgogne Conrad-le-Pacifique, qui fit un établissement en Alsace, l'ancêtre de l'anti-César Rodolph de Rheinfelden; origine qui, si elle était prouvée, deviendrait féconde en considérations historiques et politiques et rattacherait la chaîne du Rectorat à la Dynastie royale de Bourgogne. [retour]
23 Herman contrat. l. c. ad am 1057. - Otton de Schweinfurt, Duc de Souabe, mourut le 28 septembre 1077 (Art de vérifier les dates). - La nomination de Rodolph est donc de la fin de cette année. [retour]
24 Ditmar, lib. 7 ad am 1027.— « in his partibus nullus vocatur Comes nisi is qui Ducis possidet honorem. » [retour]
25 Cette dénomination a été souvent appliquée dans un sens plus large à l'Helvétie Bourguignonne toute entière; cependant les chartes la circonscrivent positivement à la rive droite de l'Aar. Cette région s'étendait vers l'Est jusqu'à Willisau, canton de Lucerne. [retour]
26 M. Gerbertus, monasterii et congregationis sancti Blasii in Sylva nigra abbas. p. 154. [retour]
27 M. Levade, dans son excellent Dictionnaire du Canton de Vaud, pag. 269, commence aussi la série des Recteurs Transjurains par Rodolph de Rheinfelden. [retour]
28 Voyez Schöpflin hist. Zaeringo-Badensis T. IV pr.. p. 22. — Riggisberg est dans la préfecture de Schwarzenburg, canton de Berne. [retour]
29 Charte de Bucco, comte de Bargen et Seigneur d' Oltingen, en faveur de l'Eglise de Lausanne du 28 octobre aº 1072. — Zapf, Monumenta p. 78; — et Cartul. de Laus. fº. 44, copie fº 368. [retour]
30 Le comté de Herchingen, ou le Buchsgau, fut confisqué sur le duc Rodolph et donné à l'évêque de Bâle par l'empereur Henry IV. Avant cette donation le Rectorat, ou Duché de Bourgogne-helvétique, comprenait donc aussi, le Jura Soleurois. (Voy. Ildef. d'Arx. hist. du Buchsgau.) — L'Augstgau comprenait le Sissgau, ou canton de Liestal, et le Baselgau. [retour]
31 Voyez Cibrario et Promis, Documenti et Sigilli. page 21. [retour]
32 Lorsqu'Henry IV livra bataille aux Saxons aº. 1075, Rodolfus, Dux Suevorum ... « arma rapit, secum quos patria misit ... Ararim Rhodanumque bibentes » ... pour aller au secours de ce monarque. (Anonymes, apud Reuberi Scriptor: III, 211.) [retour]
33 Gerbertus, de Rodolfo Suevico p. 42. [retour]
34 Aucun acte connu du royaume de la Cisjurane ne fait mention du Duc Rodolph comme souverain: Guinimann, archevêque d'Embrun, et Léger, archevêque de Vienne, datent une charte de l'an 1060: « J. C. regnante et terreno rege exspectante » — Cartul. du chapitre de Romans, en Dauphiné; apd. Rivaz, Dipl. Bourgogne. — Cependant Agnès, Duchesse de Zæringen, donne à Rodolph son père le titre de Rex de Arles dans une charte de l'an 1108. (Gerbertus l. c. p. 158)., et le mot Ararim dans le verset cité, (Voy. note 32 ), ne peut guère s'appliquer qu'à la Saône. [retour]
35 Gerbertus l. c. p. 126. [retour]
36 Gerbertus l. c. p. 45. [retour]
37 Gerbertus l. c. p. 126. [retour]
38 Lambertus d'Aschaffenbourg. apd. Bouqt. XI p. 67. [retour]
39 Agnès de Poitiers et Guillaume avaient l'un et l'autre pour ayeul Otton-Guillaume, comte de Bourgogne. (V. Dunod, Table généalogique.) [retour]
40 Lambertus Schaffnabs l. c. A la vérité, celui-ci ne nomme pas la province cédée; mais M. Cibrario a assez prouvé que c'est le vieux Chablais. (Cibrario, Documenti, etc.) [retour]
41 Guichenon, hist. de Savoie. [retour]
42 Jean de Müller, Hist. des Suisses traduite par MM. Monnard et Vulliemin T. I p. 311. [retour]
43 Schoepflin hist. Zæringo-Badensis, tome I p. 72 [retour]
44 Les domaines de l'Emmenthal sont mentionnés dans la charte de donation d'Agnès de Rheinfelden en faveur du monaste. de St.-Pierre dans la Forêt-Noire. (Gerbertus in Rodolf. Suev. pr. page 158.) — Hattwyll faisait partie de la grande seigneurie de Willisau. — Herzogenbuchsée était au XIe siècle le lieu principal de l'Emmenthal, qui appartenait ainsi tout entier au Duc. — Les domaines du canton de Fribourg sont énumérés dans la donation d'Henry IV au comte Conon d'Oltingen (Soloth. Wochenblatt), et ceux du Vully, avec les 4 paroisses de La-Vaux dans la Charte du même Monarque en faveur de l'Eglise de Lausanne. (Gerbertus l. c. p. 156.) [retour]
45 Bernoldus Constant. p. 54. (Hergott II. 128.) J. Bader, der Zaeringische Löwe, Fribourg en Brisgau, 1837. 8º. p. 23, 24, 25. [retour]
46 (Gerbertus l. c. p. 42.) Lambert d'Aschaffenbg. p. 213. [retour]
47 (Chron. Cartul. Laus.) — (Ruchat, hist. Eccles.) [retour]
48 Lambert d'Aschaff., p. 201. — « Qui se non continet nubat; melius est nubere quam Uri. » — « Malle se sacerdotium quam conjugium deserere. » [retour]
49 Les généalogistes des Sires de Faucigny assurent que Thiedberge, femme en premières noces de Gerold II, comte de Genève, et en secondes noces de Louis I, Sire de Faucigny, était fille de l'anti-César Rodolphe de Rheinfelden. (Voy. Généal. de la maison de Faucigny, imprimée à Paris, chez Cosson, p. 5). Si cette alliance, d'ailleurs très vraisemblable, était prouvée, elle expliquerait plusieurs circonstances historiques encore très obscures. [retour]
50 Hermann contr.: codex murensis, apd. Gerbertus l. c. p. 123. Elle fut ensevelie à St.-Blaise dans la forêt noire. [retour]
51 Chron. Cartular. Laus. [retour]
52 Charte de l'empereur Henri IV, en faveur de l'église de Lausanne. (Gerbertus de Rodulpho anti-cæsare, p. 156). Chacune de ces localités était alors le chef-lieu d'un territoire plus ou moins étendu, dont les démembremens ont formé depuis plusieurs seigneuries importantes. [retour]
53 Gerbertus l. c. p. 157. [retour]
54 La charte de l'empereur Henri IV, donnait à l'évêque de Lausanne un territoire temporel bien plus étendu que celle du roi Rodolphe III, puisqu'elle y ajoutait le pays situé entre l'Aubonne et le pont du Rhône; à moins qu'il ne faille entendre par pontem genevensem, le pont d'Allaman , à la limite du diocèse de Genève. D'un autre côté, l'empereur avait déjà donné le vieux Chablais; depuis la Veveyse jusqu'au Mont-Joux, ou St.-Bernard, au comte de Maurienne, son beau-frère. [retour]
55 Schöpfl. hist. Z. B. T. IV, 120. — « Sicut et alia regalia ». [retour]
56 Gerbert. l. c., p. 78. Albert, argent, in Chron. ad aº. 1080. [retour]
57 Lambert d'Aschaff. apd -Bouquet, T. XII. p. 25). Ici tout devient plus ou moins confus, et l'on ne peut saisir dans les historiens que l'ensemble des faits. [retour]
58 (Bernold. Constant., p. 143.) (Ekchard Uraugiensis, 573), et Chron. August., 505); placent sa mort sous l'an 1093. (Voy. Bader l. c. p. 29). [retour]
59 Schopfl. l. c. p. 68. [retour]
60 Gerbert. de Rud. append. p. 158. [retour]
61 Dans l'automne de l'an 1093. Bernold. Constant 157. Goldast in Constit. Imp. I. 246. Il y eut alors une trêve de 2 ans entre Berthold et les partisans de Fréderic de Stauffen. [retour]
62 Bader l. c. p. 31. [retour]
63 Voy. Charte d'Agnès dans Gerbert, de Rudol. app. p. 158; de l'an 1108, et une autre de Berthold et Conrad, dans Schopfl. II. Z. B. IV, 43; où le Roi (ou duc) Rodolph est appelé « Catholicæ veritatis sectator.... » [retour]
64 Chronique du Cartulaire de Lausanne. C'est le seul indice qui nous soit connu de la possession réelle de Morat par les évêques de Lausanne. [retour]
65 Dodechinus, apud Pistorium. — Guillimann. Helv. lib. 1. — Chronique du Cartulaire de Lausanne. [retour]
66 Chronique du cartulaire de Lausanne. [retour]
67 Chron. Cartul. — Ruchat. hist. Ecclésiastique. [retour]
68 Chron. Cartul. Laus. [retour]
69 Chron. Cartul. Laus. [retour]
70 Chron. Cartul. Laus [retour]
71 Chron. Cartul. Laus [retour]
72 Chron. Episcop. Laus. Msc. de Moudon cité par Ruchat (hist. Ecclésiast). Corsier, l'une des 4 paroisses de Lavaux, revint à l'Eglise de Lausanne... mais les Seigneurs de Blonay y conservèrent néanmoins des droits utiles, entr'autres l'avouerie d'une portion de Vevey. [retour]
73 Bucco Seigneur d'Oltingen était comte de Bargen; il mourut peu après la restitution faite aº 1072 à l'Eglise de Lausanne (Zapf, monum. p. 78. [retour]
74 Soloth. Wochenblatt aº 1827. pag. 452. La seigneurie d'Arconciel comprenait encore au 13e siècle Arconciel, Illens, Treyvaux, Favargnier, Escuvillens, Magnedans et Corpâtour (Hommage de Guillaume, comte d'Arberg à Louis de Savoie aº 1281 (loc. cit. 1828, p. 448.) [retour]
75 N. Fr. de Mulinen, avoyer de Berne, Msc. sur l'origine de la maison de Neuchâtel, communiqué par Mr son fils. [retour]
76 Otton Frising, de Gestis Freder. 1. Lib. 2. cap 29.— Dunod, hist. du comté de Bourge. II. p. 159. [retour]
77 Peut-être faut-il entendre Citra au lieu de Circa (voy. plusieurs chartes dans le Soloth. Wochenblatt.) [retour]
78 Voy. J. de Müller passim. [retour]
79 Conservat. Suisse de M. Bridel. III, 397. [retour]
80 C'est l'opinion de feu le Baron d'Estavayer, auteur d'une hist. Msc. de la maison de Grandson et de ses branches. (Bibl. de M. de Mulinen). [retour]
81 N. Fr. de Mulinen généalogie Msc. de la maison de Neuchâtel. [retour]
82 N. Fr. de Mulinen l. c. — Quoique Dunod ait recueilli la Charte de 1107 (hist. du Comté, II. 162), il attribue néanmoins à Régine une origine absolument imaginaire (p. 159.) [retour]
83 N. Fr. de Mulinen l. c. — Dunod, l. c. p. 163, cherche dans le pays de Liège ce qui était dans la Transjurane. [retour]
84 Charte de Guillaume III en faveur de Cluny (Dunod. l. c. p. 162.) [retour]
85 Dunod. l. c. p. 162. [retour]
86 Gollut. Liv. 6 chap. 1. p. 345. On trouve dans le Cartul. du Cluny (Rivaz, Diplomat. de Bourge.) une Charte de l'an 1080 par laquelle Girald de Villars et son frère Rodolphe clerc, donnent à l'Eglise de Cluny tout leur alleu à Villars dans le Diocèse de Lausanne (Villars-les-moines, près Morat?), où il y avait un prieuré de l'ordre de Cluny, témoins Rodolphe de Courgevaux et Burchard, Turumbert et Anselme de Grissach (Crissey). Cependant Walperswyll, où il y avait un château ruiné au 13e siècle, est nommé dans le Cartul. de Lausanne Villar-Walbert et formait au commencement du même siècle une des paroisses du Décanat de Soleure (Cartul. Laus. fº 20.). Ce même Hupold de Laupen, Vodalricus de Belpa et ses fils Burchard et Conrad paraissent plus tard comme vassaux du Duc Conrad de Zæringen dans une charte (sans date) du monast. de St. Pierre dans la Forêt-Noire. (Voy. Liechtlen's Zæring. p. 80) [retour]
87 Schöpflin, Hist. Zäringo-Badensis, T. I, p. 85. [retour]
88 Voy. Dunod l. c. p. 164. On trouve au Cartulaire de Cluny coté nº 63 une donation de Bernardus miles, cognomento de Glana, avec ses fils Bernard, Humbert et Bérenger, propriétaires dans le Chalonnais l'an 1085, et probablement vassaux (milites) des sires de Glane. Ceux-ci étaient alliés à la maison de Molprey (molliprato; morpraz) en Bourgogne. Hugues et Pierre de Molprey, frères, cédèrent a° 1188 au monastère de Hauterive toutes leurs prétentions in Allodio et Castellatu de Glana. (Liber Donationum Altæripæ.) [retour]
89 Cartul. d'Hauterive (sub aº 1078): Uldricus Pater Domini Petri de Glana nupsit Rilentam de Villar-Walbert. [retour]
90 Ce fait est prouvé par le Liber donationum d'Hauterive et par les possessions que cette famille transmit à ses héritiers. [retour]
91 Hergott, Habsb. T. II. p. 139. (Parmi les témoins on lit Willelmus comes Burgundiæ.) [retour]
92 Dunod a déjà distingué (Hist. du comté T. II. p. 162 à 165) Guillaume III, qui se qualifiait lui-même du surnom d'Alemannus (Gollut, Libro VI. cap. 1. p. 345.) de Guillaume IV son fils, que Gunther (in Ligurino) nomme puerum, et qui fut assassiné à Payerne aº 1127. Mais l'époque précise et les circonstances de la mort de Guillaume l'Allemand sont encore très obscures... Guillaume l'Allemand parait 1º dans une Charte de l'an 1102 environ en faveur de Guichard de Beaujeu, rapportée par Gollut (l. c.).. 2º Dans celle de l'an 1107 rapportée par Dunod, (l. c. p. 162.) en faveur de l'Abbaie de Cluny. 3º Dans deux diplômes de l'Empereur Henry V datés de Strasburg, — l'un du 28 décembre 1124 (Hergott, Habsburg: T. II. p. 141.), l'autre du 8 janvier 1125. (l. c. p. 139.); dans le dernier il est nommé Willelmus comes Burgundiæ. Il est vraisemblable qu'il fut tué par trahison peu de tems après en revenant de l'assemblée tenue à Strasburg par l'Empereur, où il avait paru avec l'archevêque Anséric de Besançon et Gérold Evêque de Lausanne, et que le mystère dont sa mort prématurée resta enveloppée donna lieu aux fables que les Chroniqueurs, et entr'autre Albéric (ad annum 1190) débitèrent sur ce crime secret. M. Levade (Dict. du Cant. de Vaud, au mot Recteurs) croit qu'il fut assassiné à Payerne, aussi bien que son fils. [retour]
93 On prétend que Guillaume l'enfant se maria et que sa femme se nommait Pétronille et sa fille Sybille; celle-ci fut, dit-on, une espèce de Clorinde qui courut le monde faisant des miracles. Elle se trouvait à Dole en 1157. (Note communiquée par M. Duvernois anc. magistrat de Montbéliard.) Si le fait est vrai, Pétronille n'était que l'épouse morganatique de Guillaume l'enfant; c'est pourquoi sa fille Sybille ne succéda pas aux domaines de son père. [retour]
94 Voici les autorités sur lesquelles se fonde la date de la mort de Guillaume IV. dit l'enfant: 1º Dodechinus, le continuateur de Marianus Scotus, écrit sous l'an 1127: (apud Pistorium Script. Germ. T. I.) « Aº millesimo centesimo vicesimo septimo, Rex (Lotharius) nativitatem Domini Coloniæ celebravit, ... Guillielmus princeps Burgundiæ occiditur a suis. Carolus comes Flandriæ super omnes sui temporis principes justitiæ mirabilis sectator, coram allari ... a suis hominibus occiditur... Rex Paschæ Goslariae celebravit... Conradus de Zeringa coram plerisque Burgundionum optimatibus principatu Burgundiæ apud Spiram civitatem sublimatur... Rex Pentecosten Merseburgi ... » 2º Anselme de Gembloux, le continuateur de Sigebert de Gembloux, raconte sous l'an 1197 le meurtre du Comte de Flandre, puis il ajoute: « Unus atque idem satanas uno eodemque die simile nefas præsumit in Burgundia. Damnatitii quidam, dum diffidunt suæ saluti, ut pote rei majestatis, dominum suum Guillielmum comitem sedunensium (lege Salinensium) gladiis confodiunt in quadam ecclesia ante altare orantem. Actum secunda hebdomada quadragesimæ, feria III. ... Kal. Martii. » 3º Alberic de Trois-fontaines, sous la même année 1127, s'exprime depuis le mot « Damnatitii » dans les mêmes termes, excepté qu'il place la virgule que Anselme avait mise entre sedunensium et gladiis entre comitem et Sedunensium; de manière qu'il semblerait que le Comte Guillaume aurait été massacré par les Vallaisans; mais ce déplacement de la virgule donne à la phrase d'Albéric un sens forcé, ce qui prouve que ce n'est qu'une faute d'impression. 4º L'ancienne épitaphe d'Hauterive, rapportée par Gottlieb Walther (Urspr. des Bern. Stadtrecht. II. p. 77.; et A. L. de Watteville (Msc. à la Bibl. de Bern), que ces auteurs avaient vue, et qui diffère en quelques points de celle que l'Abbé Girard lui a substituée indique la mort du Comte Guillaume sous l'an 1126. 5º L'Annaliste Saxon, et la Chronica Regia S. Pantaleonis placent cet événement sous l'an 1127. Toutes ces données s'accordent parfaitement entr'elles et forment une masse de témoignages sans réplique. Alberic et Anselme indiquent non seulement le 1r mars (Kal. Martii) mais encore le jour de la semaine, savoir le mardi (feria IIIa.) de la seconde semaine du carême. Or en l'année 1127 la lettre dominicale fut B et le nombre d'or 7; conséquemment le 1r mars tombe sur le mardi, Pâques sur le 3e avril, et le 2d. Dimanche de carême (Reminiscere) sur le 27 février, synchronie qui ne se rencontre dans le cours du XIIe siècle que sur l'an 1127. (nouveau style). L'ancienne épitaphe d'Hauterive, qui, selon l'usage du Diocèse de Lausanne, prenait le commencement de l'année au 25 mars, à dû mettre sous l'an 1126 (vieux style) un événement arrivé le 1r mars, ce qui revient à l'an 1127 du calendrier Grégorien. [retour]
95 Voy. l'ancienne épitaphe d'Hauterive dans Gottlieb Walther's urspr. des Stadtrecht. T. 1. C. II. p. 77. — Dunod, Hist. II. p. 164 appelle par erreur le fondateur de cette abbaie Philippe au lieu de Guillaume. [retour]
96 Schöpflin l. c. 1., 82. [retour]
97 Otton Frising de Gestis Frederici 1. lib.I. c. 9.— Gunther Ligurin, Lib. V. — Dunod, Hist. du Comté de Bourgogne, Tome II, p. 169. [retour]
98 Art de vérifier les dates II 501. La lignée paternelle se trouvant exclue, la lignée maternelle prenait sa place de plein-droit. [retour]
99 Otton Frising l. c. et lib. II. c. 29. — Gunther Ligurin, l. c. — Dedechinus ad am. 1127 « Conradus Dux de Zeringen coram plerisque Burgundionum optimatibus principatu Burgundiæ, apud Spiram sublimatus » entre le 3 avril et le 22 mai. (Ex Bohmers Regesta.) [retour]
100 Gunther Ligurin l. c. — Radericus in gestis, page 485. — Art de vérifier les dates II, p. 501. [retour]
101 Voy. la dissertation de D. Berthod dans le Journal Helvét. mars 1764. p. 294. Les Comtes de Bourgogne étaient exempts des services et devoirs de vassaux, mais non de l'hommage lige, envers le souverain. [retour]
102 Schöpflin I. 115. — Burcardus, de Casibus Sti-Galli p. 123. [retour]
103 Wernher de Lenzburg n'était pas Reichs-Vogt, mais Lieutenant du Bailli-Impérial. (Voy. Got. de Mulinen: Geschicht-forcher IV. p. 149, et p. 150 note 348, qui distingue fort bien le Reichs-Vogt du Præfectus, ou Kast-vogt.) [retour]
104 Otton Frising, de gestis Frederici 1, tomi I c. 26. [retour]
105 Bader, Zæring Löwe, p. 143, prétend que Conrad ne recouvra pas l'avouerie de Zurich, mais il se trompe (Voyez la Charte de l'an 1145 dans Hottinger speculum Tiguri,p. 232.) [retour]
106 Schöpflin H. Zær. Bad. IV. p. 75. — Mr. N. Fr. de Mulinen dit, d'après le Nécrologue de Frienisberg, que le Comte Udelhard, dit de Seedorf, était positivement de la race des Comtes de Thierstein (Msc). [retour]
107 Charte de fond: de Trüb (Soloth. Wochenblatt 1828, p. 151). On trouve déjà parmi les signataires de cette Charte Hugo, Comte de Bûchegk. [retour]
108 Schöpflin I. c. IV, 89 [retour]
109 Soloth. Wochenblatt, 1829. p. 156.— Opelingen est dans la paroisse de Wichtrach, préfect. de Konolfingen canton de Berne. [retour]
110 Hugo, Comte de Bûchegk, signa avec le Duc Conrad la Charte de fondation du monastère de Trüb dans l'Emmenthal aº 1197. (Voy. note 107.) [retour]
111 Montmollin, mémoire du Comté de Neuchâtel T. II. p. 37. Neuchâtel 1831. [retour]
112 Voy. note 109 « campum regium in Nugerols » (c. à. d. le Landeron), où se trouvait l'église paroissiale de St. Michel de Nugerol dont parlent encore les Chartes de l'an 1297. (Haller, Bibliothèque.) [retour]
113 Voy. note nº 94. [retour]
114 Outre les terres qui entourent l'abbaie d'Hauterive, Guillaume de Glane donna à ce monastère: les faverges, vignoble près de St.-Saphorin à Lavaux et des terres allodiales à Pully, près Lausanne. Nombre d'autres domaines dans les quartiers indiqués ci-dessus sont mentionnés dans plusieurs Chartes comme provenant de la maison de Glane. (Voy. Zapf, monumenta, anecdota, etc. p. 84, 91 et 102. ) [retour]
115 Abr. hist. de la fond. d'Hauterive, Journal Helvét. février 1764, p. 194 (par un anonyme). On voyait encore à cette époque les ruines du château de Glane au confluent de la rivière de même nom et de la Sarine. [retour]
116 Epitaphe d'Hauterive, et Journal Helv. Ier cahier, p. 195. [retour]
117 Codex donationum Altæripæ. Msc. « Petrus Dominus de Glana quatuor filias habuit, que sibi hereditatem patris in quatuor partes diviserunt. » 1º « Emma, mater Uldrici Di. Arconcie. 2º Itta maritavit in Taranthesia. 3º Juliana ... 4º Agnes, uxor Comitis in Ogo. « Guillielmus de Glana, fundator Altæripæ, avunculus erat Uldrici de Novo-Castro. » [retour]
118 Zapf, monumenta, anecdota, etc. p. 105 nº 10. [retour]
119 Les historiens des maisons de Genève et de Savoie disent qu'Itta, femme d'Aymon II, Comte de Genève et mère d'Amédée I. était fille de Louis, sire de Faucigny, mais sans en apporter aucune preuve. La succession des domaines de la maison de Glane parvenus à la maison de Genève prouve que cette prétendue Itta de Faucigny n'était autre qu'Itta de Glane. — Aº 1139 Amédée I, Comte de Genève, donna des terres à l'abbé d'Hauterive, en présence du fondateur, Guillaume de Glane (son oncle) et de Turing et Joran de Gruyère (ses cousins). (Zapf, l. c. p. 92.) — Aº 1142. Amédée I, Comte de Genève, donna à l'abbaie de Montheron dans le Jorat des terres voisines de ce monastère. (Charte de Guido, Evêque de Lausanne, en faveur de Montheron, aux archives de Fribourg.) — Aº 1155, Garnier de Paleysieux fit une donation à l'Abbaie d'Hautcrêt datée « Regnante Frederico Imperatore, Amedeo Episc. Lausan. et Amedeo comite Genevensium. » (Cartul. d'Hautcrêt aux Archives de Lausanne.) — Aº 1162 Amédée Comte de Genève donna à Hautcrêt ce qu'il avait à la Dausaz, Essert, Peney, Villars, « et omnia usuaria de Jorat » Cartul. d'Hautcrêt.) [retour]
120 Charte de 1192. Voy. Jn. de Müller hist. de la Suisse I, 356 nº 56. [retour]
121 Bridel, hist. des Comtes de Gruyère Msc. Aº. 1221.— Rodolph, Comte de Gruyère, confirme une donation de vignes, faite par le Major de Chexbres, qui provenaient « de feodo de Glanâ, quod mihi contingit jure hereditario » (Arch. de Lausanne, Inventaire analytique, paquet nº 463.) [retour]
122 Zapf, monum. p. 102 aº 1162. - p. 106, nº 17, aº 1162. - p. 190. aº 1169. — p. 110. aº 1172. [retour]
123 Zapf. monum. p. 103 et 106. Il faut observer que les Chartes citées ne parlent que des terres de l'héritage de la maison de Glane que ses héritiers aliénèrent, et qu'elles ne mentionnent point toutes celles qui restèrent dans leurs maisons. [retour]
124 Otton Frising in gestis Fred. I, lib. I. c. 29. — Bader, Zæring Leve, p. 44. [retour]
125 Otton Frising, l. c. [retour]
126 Gollut, liv. VI. c. 7. [retour]
127 Dunod, II.p. 170. [retour]
128 Schöpflin I, 118. — Suivant Otton Frising, il mourut après le 15 février 1152, qui fut le jour de la mort du roi Conrad III. (Voy. Chron. lib. 7, cap. ultimo.) mais la Tabula defunctorum de Muri met son décès au 8 janvier 1152. (Voy. Hergott. T. III, p. 835. ) [retour]
129 Baumer's, Hohenstauff. II. 58.- Le traité de 1158 de l'Empereur Fréd. I avec Berthold IV (voy. note 131), fait allusion aux usurpations du Comte Guillaume de Mâcon sur les terres de sa nièce Béatrix. Dunod a omis cette circonstance importante dans l'histoire de Béatrix. [retour]
130 Otton Freis. l. c. [retour]
131 Scheidius, Origines Guelficæ, T. II. 183. Cet acte mémorable se place entre le 9 mars et le 1er juin 1152. [retour]
132 Voy. Charte de Fréd. I datée d'Ulm, 29 juillet 1152 (Soloth. Wochenblatt 1824. p. 263.) - Voy. aussi Schöpflin I. 125 et 126, note F.) [retour]
133 Voy. Schöpflin l. c. p. 127. — C'est à cette guerre que l'inscription de la tour de Brissach fait allusion. [retour]
134 Schöpflin A. D. I. 239. et Guichen. Bibl. Sebus. C. II. N 80. Charte pour Payerne, en présence de Willelmus Comes Matisconensis (quindecimo Calendas martias). [retour]
135 Gunther Ligur. L. V. (Beatrici) « quæ sibi per quasdam nuper traducta fideles. » Ulrich de Lenzbourg fut l'un des députés que l'Emp. Fréd. envoya de Besançon à Dijon auprès du Roi de France Louis VII. (Radevicus. Lib. I. C. XI.) [retour]
136 Gunther Ligur. Lib. V. [retour]
137 Gunther Ligur. Lib. II.
« Allobrogumque Ducem, cujus sub jure fatigat, »
« Lenis Arar placidus Rhodano quas commodat undas; »
« Huic nomen Bertholdus erat ... » (Le poète parle ici du siège de Tortone.) [retour]
138 Otton Freis. Lib. 16. 20. 24. [retour]
139 Chôrier, hist. du Dauph. XI. 321. — Schöpflin, hist. IV. p. 104. [retour]
140 Art de vérif. les dates. II. p. 501. [retour]
141 Otton Freis. Lib. I. C. 29. Otto St.-Blaise. p. 475. [retour]
142 L'Empereur investit du temporel et des régales dans leur territoire respectif; — les Archevêques de Vienne aº 1153 et 1157, et d'Arles aº 1177; — les Evêques de St.-Paul trois-châteaux aº 1154; — d'Avignon, aº 1157; — de Gap, aº 1177. Il créa l'archevêque de Lyon Exarque et l'archevêque de Vienne Archi-chancelier du royaume de Bourgogne, aº 1157. Il donna les régales dans leur ville aux Evêques d'Avignon, de Gap et de Belley, aº 1175. Le Dauphin Guigues d'Albon fut investi des mines d'argent du Dauphiné, aº 1155. Le Comte Raymond de Barcelone fut fait Comte de Provence et de Forcalquier et Seigneur d'Arles, aº 1162-1174. (Voy. Bohmers Regesta. Francfort 1831.) [retour]
143 Par la vallée de l'Orbe nous entendons le territoire qui s'étend depuis Jougne dans le bassin de l'Orbe jusques et y compris Yverdon. Jougne, Metabief, Hôpitaux et Longeville en Franche-Comté étaient 4 paroisses du diocèse de Lausanne (Hall Bibl. III. 336, ex Chifflet. msc.) D'un autre coté, le prieuré de Montbenoit, près Pontarlier (fondé par les Sires de Joux vers l'an 1100) possédait les Eglises de Goumoëns, de Penthéreaz, de Charlens (Echallens) et terram de Orba cum vineis, qui étaient du fief des Sires de Joux, vassaux du Comte Palatin. (Voy. Droz, hist. de Pontarlier pr. p. 252 et la Charte Nº 35.) [retour]
144 On a vu que le Comte Rainaud II de Bourgogne céda, aº 1084, une partie de la Seigneurie d'Orbe à l'hôpital que le monast. de Romainmôtier avait à Orbe (note 13). Les comtes Palatins, ses successeurs, inféodèrent la moitié de ce qui leur restait à Orbe, rappelé dans la Ch. de l'an 1255 (cotté O 26 et O 27 Arch. de la Préfecture du Doubs), ainsi qu'à Bioley-Orjulaz (Orjola), aux Sires de Montfaucon, qui en étaient déjà en possession au commencement du 13e siècle, comme le prouve la donation de l'usage dans les bois de Bioley-Orjulaz faite à l'abbaie du lac de Joux, par Richard Ier, Comte de Montbéliard, et Gautier de Montfaucon, son frère (avant l'an 1199, où celui-ci passa en terre sainte). Cette donation est rappelée dans une enquête faite par Girard de Goumoëns, entre l'an 1228 et 1230. (Arch. de Laus. Rom. Nº 323.) Hugues de Châlon, Comte Palatin, donna l'autre moitié d' à Amé fils puîné de Richard de Montfaucon, comte de Montbéliard (aº 1255), (Arch. de la Préfect. du Doubs, cotté O 26, note communiquée par M. Droz, Conseiller à la cour royale de Besançon.) et lui vendit la ferme des péages d'Orbe, aº 1259. (Müller II. p. 48.) Cet Amé possédait aussi Yverdon (qu'il vendit à Pierre de Savoie, aº 1260). (Arch. de Turin, note communiquée par M. Vulliemin.) Il acquit, en 1279, des Seignrs de Goumoëns et, en 1273, de Pierre de Cheseaux, ce qu'ils avaient à Echallens (note communiquée par M. Duvernois de Montbéliard, anc. magistrat). [retour]
145 Otton Freis. Lib. I. C. 29, et Otton de St.-Blaise, p. 475. Ce dernier nomme expressément Sedunum Sion. [retour]
146 « Civitas signifie ici diocèse ou territoire, sans quoi les mots: Inter Jurum et montem Jovis » n'auraient point de sens. [retour]
147 Spon, Hist. de Genève II. Pr. nº 1. [retour]
148 Spon, l. c. nº II. aº 1153. [retour]
149 Spon, l. c., nº III [retour]
150 Spon, l. c., nº IV. [retour]
151 Otton Frising, de gestis frederici I, lib. 1, c.9. [retour]
152 Cette cession même prouve deux choses: 1º que l'avouerie impériale, ou le vicariat, était très-différente de l'avouerie épiscopale, qu'on appelait en allemand Kast-vogtey, en italien Castaldia, ou Guastaldia (voy. Hergott, Habsburgiaca, T. II, p. 202; 211, 217 et 220), et chez nous vidomnat; 2º que les Comtes de Genève n'avaient auparavant que l'avouerie épiscopale (Kast-vogtey), soit le vidomnat (advocatia), dans la ville de Genève. Quant au droit du glaive, ils le tenaient à titre d'anciens Comtes provinciaux (LANDGRAVES). [retour]
153 Termes de la bulle impériale de 1163; apud Spon, l. c., nº VIII. [retour]
154 Radevicus, de gestis Frederici I, Lib. 1, cap. 25 et cap. 44 [retour]
155 Apud Spon, l. c., nº VI. [retour]
156 Apud Spon, l. c., nº VII. [retour]
157 Apud Spon, l. c., nº VIII. [retour]
158 Apud Spon, l. c., nº IV. [retour]
159 Donation de Rodolph III à l'Evêque de Lausanne, aº 1011 (Sinner, Voyage dans la Suisse occidentale, Tome II, page 173). - Le canal de la Broie et la Biberen formaient la limite au Nord, entre le lac de Neuchâtel et la Sarine. [retour]
160 Lambert I de Grandson paraît encore comme Comte dans une Charte de l'an 1010 (Cibrario, Documenti, etc., p. 13), et il est rappelé comme Comte du païs de Vaud dans une autre charte de l'an 1013. (Cibrario, l. c., p. 19.) Lambert II, son fils, est encore mentionné dans le Chron. Cartul. Laus., avec le titre de Comte; mais c'est comme Comte patrimonial ou honoraire (comes fundi), et non pas comme Comte provincial (comes fisci) ou Landgrave. [retour]
161 Chron. Cartul. Lausan. — Ruchat, histoire Ecclés. Archives de Lausanne. — Schöpflin, hist. Zær. Bad. T. IV, p. 86. [retour]
162 Chron. Cartul. Lausan. — Ruchat, histoire Ecclés. [retour]
163 Cartul. de Romainmôtier, fº 23. (Archives de Fribourg.) — Le Diplôme de l'Empereur Henri V en faveur du monastère de Romainmôtier étant daté de Strasbourg du 28 Déc. 1124 (l. c. fº 22), le Rescrit en question doit être du même jour. [retour]
[retour] 163bis St.-Amédée, né au Château-Chaste, en Dauphiné, était fils d'Amédée de Clermont-Tonnerre, Sire d'Hauterive, et de Pétronille, sœur de Gui VII, Comte d'Albon. (Voyez Haller, bibl. Suisse, T. III, p. 339.) [retour]
164 Archives de Lausanne, Régistrat, T. I, nº 8 de Lausanne (Zapf, monumenta, etc., p. 97.) La Charte de Garnier de Palésieux, de l'an 1155, citée plus haut, nº 119, prouve que le titre de Consul s'applique au diocèse de Lausanne et non à la cité de Genève. [retour]
165 Limite du Diocèse de Bâle et du Buchsgau. (Voy. d'Arx, hist. du Buchsgau.) [retour]
166 Lettre adressée par Berthold IV à l'Abbaie de Cluny, pour l'inviter à ne plus nommer un étranger au Prieuré de Rüggisberg, et pour lui recommander le Doyen de cette congrégation. (Guichenon, Bibl. Sébusienne, cent. II, nº 64.) — Voyez aussi les Chartes dans Schöpflin, T. IV, p. 106, 107, 114, 124, et celles dont il sera fait mention plus tard. [retour]
167 Chron. Cartul. Laus., etc. — Ruchat, hist. Ecclés. [retour]
168 Schöpflin, hist. Zær. Bad, T. IV, p. 105. (Ex Chron. Cartul. Laus. fº 98.) [retour]
169 Schöpflin, l. c. p. 120, qui met l'acte sous l'an 1178, mais l'indiction XII tombe sur l'an 1179. [retour]
170 Chexbres et Lutry étaient des fiefs régaliens. — Le Seigneur devait une finance d'entrage au vicaire de l'Empereur à chaque mutation d'Evêque. [retour]
171 Il fut fait du vivant de l'Evêque St.-Amédée, comme on le voit par la Bulle du Pape Alexandre III de l'an 1178, qui supplée au laconisme du Cartulaire. [retour]
172 Voy. Haller, Bibl. Helv., T. III, p. 339. [retour]
173 Archives de Laus., Hautcrêt. (Ruchat, histoire de la Suisse (msc.),T. V, p. 38). [retour]
174 Schöpflin, hist. Zær. Bad, Tome V, page 101. [retour]
175 Schöpflin, l. c. T. V, p. 106. Ceci prouve que le Protectorat (consulatus), qui, aº 1154, était entre les mains du Comte de Genève, était différent de l'avouerie (Kast-vogtey) que tenaient les Gärenstein. [retour]
176 Cartulaire de Lausanne, fº 8. [retour]
177 Dans la bulle papale de 1178 (voy. nº 169) cette avouerie est appelée majoria, comme à Sion. [retour]
178 Voy. la Charte de Berthold, Evêque de Lausanne de 1219 (Schöpflin, l. c. p. 150.) [retour]
179 Chronique du Cartulaire de Lausanne. [retour]
180 Ibidem - Ruchat, hist. Ecclés. — L'Evêque Landric signa comme témoin la Charte de donation de Berthold IV au couvent de Rüggisberg de la Suselmatten, du 1er octobre 1175. (Soloth. Wochenblatt, aº 1827, p. 454.) [retour]
181 Il fut fait prisonnier dans ses voyages de Rome par les gens-d'armes de l'Empereur, qui était alors en guerre ouverte avec le Pape Alexandre. (Chron. Episcoporum Laus., msc. de Moudon.) [retour]
182 Chron. Cartul. Laus. et Ruchat, l. c. [retour]
183 Voy. Chifflet, Vesuntio civitas, pars II, fº 249. [retour]
184 M. Stängly, Commissaire du Prince de Neuchâtel, prétend que l'Evêque Roger était de la maison de Neuchâtel. — M. d'Estavayer assure qu'il s'appelait Curzaudi ou Curchaud, et qu'il était de la maison d'Avenches (msc.); mais ce nom de Curzaudi paraît n'être qu'un sobriquet (curtus). — Le Cartulaire dit seulement qu'il naquit au château de Vico-Pisano, en Toscane. [retour]
185 Voyez Schöpflin, l. c., T. IV, p. 117. [retour]
186 Cette date se vérifie par les Régestes de l'Empereur Fréderic I. (Böhmer, Regesta Imper. Frederici I.) [retour]
187 Schöpflin, l. c. p. 120. [retour]
188 Charte de Rodolph III, datée de Cudrefin (Curte-fin) en faveur de Hugues, Evêque de Sion, de l'an 999 (msc. concernant le Vallais à la Bibliothèque du Roi à Paris, fonds Brienne, cotté nº 44, p. 61). [retour]
189 Louëche et Naters, dans le Haut-Vallais, ainsi que Lutry et Corsier, à La-Vaux, avaient été donnés (aº 1010) par le Roi Rodolph III à l'Abbaie de St.-Maurice. Ces terres passèrent ensuite à l'anti-césar Rodolph de Rheinfelden et à son fils Berthold, sur lesquels elles furent confisquées par l'Empereur Henri IV. - On a vu que Lutry et Corsier passèrent à l'Evêque de Lausanne (voy. nº 52); Louëche et Naters furent donnés, dans le même tems, à l'Evêque Hermenfroi de Sion. (Archives de St.-Maurice, msc. de l'Abbé Charletti.) [retour]
190 Cibrario, Documenti, etc., p. 46. [retour]
191 Jean de Müller, T. I, p. 359. —Traité entre l'Evêque de Sion et Guillaume de la Tour de Gestellenbourg aº 1177. (Gallia Christiana, Tomi XII, p. 493.) [retour]
192 « Amedeus Comes ... Aymonem de Briançonem... Preposituram Abbatie Agaunensis contulit... (l'Abbé Charletti, msc.) Hugo (Clericus), Prepositus Agaunensis, aº 1143 (Cibrario, l. c. p. 60.) [retour]
192bis. L'Eaufroide, torrent qui vient du mont Arniaulaz (district d'Aigle), et qui coule dans le lac Léman, près de la porte occidentale de Villeneuve, séparait jadis les diocèses de Lausanne et de Sion. - Villeneuve était du ressort de celui de Lausanne; Noville appartenait à celui de Sion. [retour]
193 Gallia Christiana, T. XII, p. 430. [retour]
194 Cibrario, Documenti, p. 60. [retour]
195 Guichenon, hist. de Savoie, Preuves, p. 40. [retour]
195bis Schöpflin, hist., T. I, p. 122. On la nommait en Savoie Germaine, à cause de son origine germanique. [retour]
195ter Jean de Müller, T. I, p. 358, nº 64. — cette conjecture de notre célèbre historien se vérifie effectivement par l'ensemble des faits subséquens; mais Humbert III était beau-frère, et non gendre, de Berthold IV. (Voy. Schöpflin, l. c.) [retour]
196 Cibrario, Documenti, etc., p. 79. [retour]
197 Les actes de confiscation de la cité de Turin sur le Comte Humbert III par l'Empereur sont datés des années 1184 et 2 septembre 1185, (Monumenta Historiæ Patriæ, Turin, T. I, nº 601 et 608.) [retour]
198 Guichenon, l. c., p. 244. [retour]
199 Gallia Christiana, T. XII. Preuves, p. 433. [retour]
200 Cibrario, Documenta, etc. p. 110. — Voyez aussi le Traité du 4 juillet 1219, entre le Comte Thomas et l'Abbé Aymon. (Monumenta Historiæ, T. I. p. 1258.) [retour]
201 Le Jus Cudendi monetam est formellement réservé par le Comte Amédée de Savoie dans la cession du Bourg de St.-Maurice faite à sa sœur Marguerite, Comtesse de Kybourg. (Voy. Guichenon, Histoire de Savoie, p. 63). [retour]
202 Voy. les Chartes dans Schöpflin, T. IV. p. 106, 107 et 124. et Guichenon, Bibl. Sébus, Cent. II. nº 83. [retour]
203 Voy. Schöpflin, T. IV. p. 114, et Donation au Couvent de Rüggisberg de la Suselmatten, 1er octobre 1175. (Solothurner Wochenblatt, aº 1827 p. 454). [retour]
204 Les églises de Bannens et de Ste.-Colombe, près Pontarlier, avaient été données au monastère de Romainmôtier par Anséric, Archevêque de Besançon (Cartul. de Romainmôtier aux archives de Fribourg.) [retour]
205 Les empereurs Conrad II. (aº 1038), et Henri IV. (aº 1078) avaient accordé à ce monastère des Bulles de protection qui sont rappelées dans celle de l'Empereur Fréderic I. (Ruchat, msc.) [retour]
206 Archives de Romainmôtier nº 1, vidimus signé Pollens, communiqué par M. Fréderic de Charrière. [retour]
207 Chevalier, hist. de Poligny, T. I. p, 325. [retour]
208 Radevicus, de Gestis Frederici (I. Lib. I. c. 8. 9. 10. et 11. — Il nomma l'Archevêque Heraclius de Lyon Exarque, et Etienne, Archevêque de Vienne, Archi-chancelier du royaume de Bourgogne Cisjurane. [retour]
209 Gallia Christiana, T. I. p. 87. [retour]
210 Archives de Lausanne. - Titres de l'abbaie du lac de Joux. [retour]
211 Plantin, msc. à la Bibl. cantonale de Lausanne. [retour]
212 Registre des fiefs de l'Evêché de Lausanne, Archives de Lausanne, nº 41. [retour]
213 Ces seigneurs sont tous nommés comme attachés à la suite du Duc de Zæringen dans la charte en faveur de Payerne de l'an 1178. (Voy. Guichenon, Bibl. Sébus. cent. II nº 83. [retour]
214 Montmollin, mémoire sur le comté de Neuchâtel, T. II. p. 78. [retour]
215 Montmollin l. c. T. II. p. 81, Morel, Evêché de Bâle, p. 44. [retour]
216 Montmollin l. c. p. 81 sous l'an 1177; mais c'est en 1178 que l'Empereur fut à Besançon. [retour]
217 Charte dans Ruchat, msc. p. 61. à la Biblioth. de Lausanne. Les fiefs teutoniques devaient X livres Lausannoises d'entrage à chaque mutation du feudataire; les fiefs Romands ne devaient rien que l'hommage, et étaient ainsi fiefs-francs. — Du reste, les fiefs teutoniques étaient tantôt masculins, tantôt féminins, selon leur origine. [retour]
218 Hergott, Généal. T. II p. 194. [retour]
219 Charte dans le Solothurner Wochenblatt, aº 1838 p. 207. nº 2. [retour]
220 Depuis la Zülg, dans le bailliage de Stäffisbourg, canton de Berne et même, plus anciennement, depuis le promontoire du bord oriental du lac de Thoune appelé Die Nase. [retour]
221 Jusqu'à la Murgeten, qui prend sa source prés de Willisau, ou, selon d'autres, jusqu'au pont d'Arvangen. [retour]
222 Nous disons la Vallée de l'Emmen, parce que, vers l'Est, la limite de la Petite-Bourgogne s'égarait dans les montagnes de l'Entlibuch, canton de Lucerne. [retour]
223 Le Landgraviat comprenait donc anciennement le district de Willisau (canton de Lucerne), et une portion de la préfecture actuelle de Stæffisbourg, celles de Wyl, de Langnau, de Trachselwald, de Berthoud, de Fraubrunnen, de Wangen, et d'Arvangen (dans le canton de Berne), la portion du canton de Soleure située à la droite de l'Aar, et les quartiers des préfectures de Buren et d'Arberg qui se trouvent au levant de cette rivière. [retour]
224 Voy. ci-devant note 107. [retour]
224bis L'Ufgau répondait à peu près à la préfecture de Schwarzenbourg, canton de Berne. [retour]
225 Savoir: « que les biens suivent la ligne dont ils sont mouvans. » (Dunod, histoire du Comté T. II. page, 166). [retour]
226 Schöpflin, Hist. Zær. Bad. Tomi. IV. p. 114, charte datée du château de Lenzbourg, en Argovie. [retour]
227 Solothurner Wochenblatt, aº 1829 p. 558. [retour]
228 Ibidem, aº 1827. p. 454. [retour]
229 Schöpflin, Hist. Zær. Bad. T. IV. p. 125. [retour]
230 La Charte fait mention du Duc Fréderic de Souabe, parce que l'Evêque de Constance, qui stipule l'acte, relevait de ce Duché pour ses fiefs en Souabe. [retour]
231 Schöpflin, l. c. T. I. p. 145 [retour]
232 Jn. de Müller, Tome. 1. p, 364. nº. 94. [retour]
233 L'Evêque de Lenzbourg, (anecdotes Fribourgeoises msc.) et l' Avoyer N. Fr. de Mülinen (msc. sur la maison de Neuchâtel) assurent que l'ancien château des comtes de Thyr était celui qu'on appelait anciennement la Seigneurie, lequel a été démoli aº 1464 et remplacé par l'Hôtel-de-Ville. Mais il paraît plutôt que le château de Thyr était le même que celui que les comtes de Thierstein conservèrent à Fribourg jusqu'au 15e. siècle, et qui occupait l'emplacement actuel de l'Hôtel-de-Zæringen, à l'entrée du grand pont suspendu. (Voy. Revue Suisse, T. 1. p. 523 et 528). [retour]
234 Guichenon, Bibl. Sébus. Tome. II. p. 83. [retour]
235 Soloth. Wochenblatt, aº 1824, p. 415. [retour]
236 Voy. Walthers, Stadtrecht, einleit II. p. 82. a et la Charte de Fribourg l. c. pr. nº. 1. La Charte de Fribourg en Brisgau est publiée dans Schreiber, Urkunden der Stadt Freiburg, T. 1. p. 3 et Suiv. [retour]
237 Soloth. Wochenblatt, aº 1824 p. 415. Voy. aussi, l. c. aº 1831. p. 189, une donation à l'Eglise de St.-Urs de Soleure, faite en présence et sous le sceau du Duc Berthold « ne ab heredibus commutari posset. » - Ce même sceau est gravé dans Leichtlens Zæringeren. [retour]
238 Art de vérifier les Dates, T. II p. 24, et p. 501. et 502. Chifflet, Béatrix de Châlon, ch. p. 86. [retour]
239 Gotfr. de Mülinen, hist. des comtes de Lenzburg. Schweiz Geschicht- forscher, T. 4. p. 140. [retour]
240 Henri I, dit le saint, Evêque de Lausanne dès l'an 985 à 1019, était fils du comte Ulric II de Lenzbourg (voy. Gotfr. de Mülinen l. c. p. 60), et Aymon I, Evêque de Sion dès l'an 1037 à 1053, était neveu d'Ulrich V, comte de Lenzbourg (l. c. p. 65.) [retour]
241 Hergott, Habsburgiaca, T. II, nº 242. [retour]
242 Gotfr. de Mülinen, l. c. p. 135. [retour]
243 Ibidem, p. 139. (Ottonis Sti Blasii, Chron. cap. 24.) [retour]
244 Ibidem, p. 50, et 162 note 372. (Hergott, Habsburgiaca, Tomi II. p. 201 et 202.) [retour]
245 Dunod, hist. du Comté, Tome II, p. 183. [retour]
246 Otton de St. Blaise, cap. 21. [retour]
247 Otton Frising, de gestis Frederici, Lib. I, c. 29. — Gunther Ligurin, L. 3. [retour]
248 Le Comté de Mâcon relevait en même temps de quatre seigneurs qui étaient subordonnés les uns aux autres, savoir: 1º Eudes, Duc de Bourgogne-outre-Saône, Souverain du Mâconnais. - 2º Le Comte Palatin Otton II, Comte-feudataire de Mâcon. - 3º Le Comte Etienne II d'Auxonne, Comte-vassal de Mâcon, sous la mouvance du Palatin. - 4º Le Comte Guillaume II de Vienne, Comte de Mâcon, arrière-vassal de son cousin le Comte Etienne II, comme issu d'un puîné. (Voy. l'hommage du 8 octobre 1217 dans Gollût, p. 385 et 386.) [retour]
249 Voy. Dunod, T. II, p. 190, et Chevalier, histoire de Poligny, T.I, p. 113 et 117. [retour]
250 Voy. ci-devant note nº 144. [retour]
251 Voy. plus loin note nº 369. [retour]
252 Le Val-de-Travers relevait de la maison de Châlon, qui le tenait en fief, sous la mouvance du Palatin. [retour]
253 Voy. la Charte de donation de l'Eglise de Root, près Lucerne (aº 1223. Ex Lutz, Helv. gesch.), rappelée dans celle d'Elisabeth de Châlon, Comtesse de Kybourg, en faveur de l'abbaye d'Hauterive, septembre 1261. (Archives d'Hauterive.) [retour]
254 Hergott, l. c. T. II, p. 205, Charte de 1196. [retour]
255 Charte de 1253, par laquelle Hugues, Comte Palatin de Bourgogne, vu l'éloignement de sa résidence, remet à Hartmann le jeune, Comte de Kybourg, son gendre, la gardienneté de l'abbaye d'Hauterive. (Cartulaire d'Hauterive. Ex. Haller's, Bibl. T. III, p. 405.) Les Comtes de Kybourg avaient aussi des droits sur Cerlier (Voy. les titres de la maison de Châlon cotés C, de 1 à 23, aux Archives du Département du Doubs), et même sur l'Inselgau, (Iselgau, Siselgau) ou le Seeland, comme on l'appelle aujourd'hui, y compris l'Ile de St. Pierre. (Voy. la Charte de l'Evêque de Constance du 28 octobre 1314, Soloth. Wochenblatt, 1829, p. 214.) et plusieurs chartes l. c. aº 1827, p. 306 et suiv. [retour]
256 Gunther Ligurin, Lib. V. [retour]
257 Gunther Ligurin, Lib. I . v. 90. [retour]
258 Schöpflin, l. c. Tome I, p. 147. [retour]
259 Schöpflin, l. c. Tome I, p. 147.— (Albéric, in Chron. ad a.m 1186). — Bader, Zæring Löwe, p. 67. [retour]
260 Bader, ibidem p. 57. [retour]
261 Bader, l. c. p. 64.- Tillier, Geschichte Bern's, T. I, p. 47. [retour]
262 Schöpflin, l. c. T. IV, p. 142, ex Codice Tennebach. [retour]
263 Raumers, Hohenstauff. T. III, p. 104. - Jn. de Müller, T. I, p. 245. nº 71. [retour]
264 Voy. Jn. de Müller, T. I, p. 371. nº 144. [retour]
265 Bader, l. c. p. 57. [retour]
266 Les historiens ne sont pas d'accord sur ce point: Ryhiner, Schweiz-Geschicht-forscher, Tome VIII,p. 381, adopte l'opinion qui fait participer le Duc de Zæringen à cette croisade, et admet la possibilité de son retour en Helvétie avant la fin de l'an 1190. — D'autres prétendent qu'on a confondu, mal à propos, le Duc de Zæringen avec Berthold Duc de Méranie. Nous ne pensons pas que Berthold V ait pu se soustraire ouvertement à l'obligation de suivre un monarque aussi absolu que Fréderic I, mais il se sera retranché dans des délais qui lui auront permis de revenir sur ses pas avant l'embarquement de sa troupe. [retour]
267 Voy. Ryhiner, I. c. [retour]
268 On lui attribue une lettre adressée à un Seigneur de Spietz pour réclamer son secours contre le Duc. [retour]
269 Ici, comme l'observe Jn. de Müller, tout est obscur; on ne peut s'appuyer que sur la coïncidence des temps et sur l'analogie des circonstances: l'Evêque Roger rebâtit Lucens après la guerre. (Chron. Cartul. Laus.) [retour]
270 Justinger, p. 7. — Tschudi, T. I, p. 94. — Guillimann. — Ryhiner, l. c. p. 381. [retour]
271 Chron. Cartul. Laus. — Ryhiner, l. c. [retour]
272 Voy. la donation du Roi Philippe au Comte Thomas, de l'an 1207. [retour]
273 Voy. Levade, Dictionnaire du Canton de Vaud, qui se fonde sur la tradition. [retour]
274 Zapf, monumenta, etc., p. 37. [retour]
275 Cartulaire de Lausanne, fº 25, et apographe fº 187: « Post guerram Ducis Bertholdi et Thomæ comitis Sabaudiæ crevit nemus quod dicitur Truncus (les Troncs). » Ici la conjonction et parait plutôt disjonctive que copulative; elle semble indiquer deux faits-d'armes distincts rapportés comme corrélatifs à l'Eglise de Lausanne. [retour]
276 Schöpflin, l. c. Tome I, p. 189.— Jolens, ou Joulens, (hameau au-dessus de Morges) est mentionné, avant le 13e siècle, comme paroisse au Cartulaire de Lausanne, fº 94. p. 741, et fº 123, p. 1067. Morges qui n'y est pas mentionné n'existait donc pas aº 1228, date de ce Cartulaire. [retour]
277 Reprise de fiefs faite par les frères Guerric, Jaques et Pierre, seigneurs d'Aubonne, des monts Marchairu et Salla, des mains du Duc Berthold V de Zæringen datée du Jeudi 4 Avril 1208, rappelée dans une transaction de l'an 1301 entre les Abbés de Bonmont et de St-Claude et le Sire de Villars, seigneur d'Aubonne. (Recueil de Bonmont par le commissaire Gaudard, fº 111, aux Archives de Lausanne.) [retour]
278 On trouve des reprises de fiefs en faveur des comtes de Bourgogne pour: Orbe, Echallens, Grandson, Montagny, Champagne, Provence, Fontaines, Belmont, Oulens, Champvent, Bonvillars, Concise, et le Val-de-Travers. (Inventaire des titres de la maison de Châlon aux archives départementales de Besançon) [retour]
279 Voy. Gollût, Lib. II, C. XII, p. 81. (et Dunod, T. II. p. 286, qui cite les titres. ) — Voyez aussi le Traité de l'an 1212 entre Bernard, Abbé de St.-Claude, en qualité d'administrateur temporaire de l'Archevêché de Besançon, et Aymon, sire de Gingins, rappelé dans des titres des Archives de Bonmont.— Jean, Evêque de Lausanne, déclare que son frère Humbert, sire de Cossonay et de Prangins, tient en fief de l'Archevêque de Besançon la ville de Nyon et le territoire entre le lac et le Jura, depuis le canal de Bursins jusqu'à la pierre de Mottai, sauf la féauté du Sire de Gex et du Comte de Genève pour ce qui est depuis le Nant de Prangins jusqu'à la fontaine du Ballon aº 1246, St.-Barnabé (Nyon aux Archives de Lausanne et de Besancon). [retour]
280 Schöpflin, T. I. p. 189. — Justinger, p. 7. — Ryhiner, l. c. p. 381. [retour]
281 Il avait refusé de le suivre à Rome, aº 1196. (Voy. Bader, Zæringen- Löwe, p. 59). [retour]
282 Justinger, p. 8, a confondu cette prise-d'armes contre le Vallais avec celle de l'an 1211, qui s'effectua par le Grimsel. — Tschudi, T. I. p. 94, parle d'une défaite des seigneurs révoltés de l'Oberland, essuyée dans la vallée de Grindelwald; peut-être ceux-ci avaient-ils fait cause commune avec les Vallaisans. — Voy. Ryhiner, l. c. p. 382. — Simler, Valesia, p. 134. [retour]
283 Voy. Ryhiner, l. c. [retour]
284 Ces circonstances sont rappelées dans une Charte de 1250. (Solothurner Wochenblatt, 1830, p. 58.) [retour]
285 N. Fr. de Mülinen, Schweiz-geschicht-forscher, T. I, p. 13. [retour]
286 Jn. de Müller, T. II, p. 251. [retour]
287 Walther's, Stadtrecht. [retour]
288 Bienne fut remis, aº 1169, à Ulrich II, Comte de Neuchâtel, à titre d'Avouerie (advocatia), ou Bailliage Impérial, héréditaire. (Jn. de Müller, T. II, p. 38, nº 159.) [retour]
289 Voy. Tillier, histoire de Berne, p. 40 et 41. [retour]
290 Cartulaire de Lausanne. [retour]
291 Charte de Rodolph III de l'an 1016: actm Pinpeningis (in Scheidii Origin. Guelficis, T. II, p. 149.) — Comitatus Pinpinentis ( in Annalibus mettensium, ad am 859.) [retour]
292 « De fundo Imperii. » (Charte de l'Empereur Fréderic II. Voy. Schöpflin, T. IV. p. 146.) [retour]
293 Tillier, l. c. p. 41. [retour]
294 Tillier, l. c. p. 41. — Lorsque, l'an 1271, Berne et Fribourg renouvelèrent leur alliance, ils rappelèrent l'union intime qui existait entr'eux du vivant du Duc de Zæringen. (Walther's, Stadtrecht, appendix, nº V.) [retour]
295 Voy. plus loin note nº 358. [retour]
296 Bader, Zæring-Lewe, p. 59. [retour]
297 Raumer's Hohenstauf, T. III, p. 104. [retour]
298 Raumer's, l. c. p. 107. [retour]
298bis Voy. les Chartes de 1199 dans Besson, Mémoires sur les 4 Diocèses, p. 373, pour la Savoie, le Viennois et le Dauphiné. — Et pour le Vallais, voyez Rivaz, Diplomatique de Bourgogne, T. II, p. 697. [retour]
299 Raumer's, l. c. p. 121. [retour]
300 Guichenon, histoire, Preuves, p. 48. — Monumenta historiæ Patriæ, (Turin), T. I, p. 1137. [retour]
301 La Charte de Berthold V en faveur de Zurich, de l'an 1210, est datée du règne d'Otton. (Schöpflin, T. IV, p. 135.) [retour]
302 L'an 1210, le 31 Août, les Evêques Roger de Lausanne et Bernard de Genève concilièrent un différent élevé entre le Chapitre de Lausanne et la veuve de Guillaume, sire de Blonay, au nom d'Henri son fils, et datèrent la Charte d'Evian, du règne de l'Empereur Otton. (Cartulaire de Lausanne, fº 113, p. 931.) [retour]
303 Le Comte Thomas I de Savoie ne fut nommé Vicaire Impérial au-delà des monts qu'aº 1226.— Cependant Thomas parait déjà comme Impérialis aulæ legatus dans une Charte de Turin de l'an 1193. (Monumenta historiæ Patriæ, T. I, p. 1003.) Ce pourrait-il que ce fût un autre Thomas que le Comte de Savoie, auquel l'Empereur Henri VI venait (aº 1189) de rendre Turin? [retour]
304 Chron. Cartulaire de Lausanne et de Lenzbourg in Lausanna Christiana. (Msc. à la Bibliothèque de Lausanne) [retour]
305 Voy. la note nº 275. [retour]
305bis Les premiers Comtes de Savoie portaient un aigle sur leur Ecu. [retour]
306 Voy. le traité entre lui et l'Evêque Berthold de Lausanne, du mois de Juillet 1219. (Guichenon, T. 1, p. 248.) [retour]
307 Simler, Valesia, p. 135. [retour]
308 Simler, l. c.— Et M. le Doyen Bridel, msc. [retour]
309 Art de vérifier les dates, T. III, p. 342, dont le système concilie assez bien les opinions opposées des auteurs. [retour]
310 Necrologus Ecclesiæ Bernensis. — Schweiz Geschicht-forscher, T. I. p. 14. — Sur l'empoisonnement prétendu des enfans du Duc, voy. Tillier, histoire de Berne, T. I, p. 45, note. — Schöpflin, T. 1, p. 165-169. [retour]
311 Cartulaire de Lausanne, fº 95, p. 746: « Anno Incarnationis Dominicæ MCCXI, XVº Kalendas Novembres, pacificati sunt Dux Bertholdus et Comes Maurianæ Thomas, juxta cænobium de Alcrest. » — Suivant Schöpflin, T. I, p. 157, le Duc Berthold V abandonna le parti d'Othon IV après l'excommunication de celui-ci (1er Novembre 1210), ce qui coïnciderait à peu près avec la paix de Hautcrêt. [retour]
312 Chronique du Cartulaire de Lausanne, apud Ruchat, msc., et l' Histoire Ecclésiastique du même. [retour]
313 Montmollin, T. II, p. 85. [retour]
314 Montmollin, l. c. p. 89. [retour]
315 Montmollin, l. c. p. 83.— Jn. de Müller, T. II, p. 37, note 151. [retour]
316 Montmollin, T. II, p. 89 et suiv., et la Charte, p. 271, nº 4, en français. — Voyez aussi l'excellent traité de M. Matile, Institutions de Neuchâtel, p. 11 et suiv. [retour]
317 Montmollin, l. c. — C'est peut-être comme successeur de l'Evêque de Lausanne que le Gouvernement de Berne devint garant des franchises de Neuchâtel. [retour]
318 Rénovation de la Charte d'Ulrich III par Ulrich d'Arberg, son fils (aº 1271) dans Walther's Stadtrecht, appendice nº IV. [retour]
319 Schöpflin, hist. T. I, p. 163. [retour]
320 Chevalier, histoire de Poligny, T. I, p. 112. [retour]
321 Voy. ci-devant note 248. [retour]
322 Archives de Lausanne, Romainmôtier, nº 7. — Guillaume II, Comte de Vienne et de Mâcon, tint peut-être Orbe sous la mouvance d'Etienne II, son cousin, qui fut la tige de la maison de Châlon, comme il en tenait Mâcon. (Voy. note nº 248.) [retour]
323 Raumer's, Hohenstauff, T. III. p. 165, 176, 179 et 180, note 1. [retour]
324 Voy. le Rapport de l'Abbé de Tennebach dans Schöpflin, T. IV, p. 142. [retour]
325 Schöpflin, T. IV, p. 145. [retour]
326 Schöpflin, T. IV, p. 132. [retour]
327 Hergott, Habsburgica, prob. II, p. 215. — Compromis fait à Bâle aº 1212, et le jugement du Duc dans le Soloth. Wochenblatt, 1824, p. 271, sans date. [retour]
328 Ou Conon de Pheit, selon une autre copie. [retour]
329 Voy. Partage des vassaux de la maison de Neuchâtel. (Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 474.) [retour]
330 Soloth. Wochenblatt, 1828, p. 502. [retour]
331 Walther's Stadtrecht, p. 26-72. [retour]
332 Grasburg ayant passé à la maison de Kybourg, il paraît hors de doute qu'il existait déjà du temps des Ducs de Zæringen. (Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 389.) [retour]
333 Laupen passa aussi à la maison de Kybourg. (Voy. la Charte d'Hartmann le jeune pour les dîmes de Könitz, aº 1253, Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 394.) [retour]
334 Voy. Walther's Stadtrecht, p. 88, note C. [retour]
335 C'est ce que prouve la Charte de l'Empereur Conrad IV. (Walther's Stadtrecht, p. 91a.) [retour]
336 Walther's Stadtrecht, p. 91. [retour]
337 Bader, Zæringen-Löwe, p. 64 et suiv. [retour]
338 La Bulle de l'Empereur Fréderic II en faveur de Berne, datée du 15 Avril 1218, faisant mention de Berthold V comme déjà mort (quondam), il faut adopter la date du 14 Février que porte l'épitaphe du Duc dans l'église de Fribourg en Brisgau (Schöpflin, T. 1, p. 160), et rapporter le jour de la sépulture au 18e du même mois (XII. Kal. Martii), selon le Rôle (urbar) de Tennebach (apud Leichtlen's, Zæringern, p. 92.) [retour]
339 Schöpflin, T. I, p. 223 et suiv. [retour]
340 Charte d'Henri VI, datée de Berne 28 Décembre 1223. (Soloth. Wochenblatt, 1829, p. 629.) [retour]
341 Schöpflin, T. I, p. 338. [retour]
342 Schöpflin, T. I, p. 223. [retour]
343 La Duchesse Clémence était encore captive aº 1235. (Voy. la Charte de Fréderic II, apud Schöpflin, T. IV, p. 198 ). Cependant on a une Charte d'Hartmann de Kybourg en faveur du monastère de Trüb, datée du château de Berthoud, du 31 Mars 1229. (Schweiz. Geschicht-forscher, T. I, p. 354, note 23); ainsi l'observation de Jn. de Müller, T. II, p. 32, note 127, n'est pas exacte. Les Chartes Impériales nomment expressément le château (castrum) de Berthoud. Il nous paraît plus probable que le Comte d'Urach avait abandonné Berthoud aux Comtes de Kybourg, en compensation de quelques prétentions formées par ceux—ci sur les domaines d'outre-Rhin, peut-être sur le Comté de Rheinfelden, qui était un fief-féminin provenant d'Agnès de Rheinfelden. [retour]
344 Nous avons déjà remarqué plus haut, note 227, que les fiefs de la Bourgogne-Teutonique, quoique régis par le Droit-Teutonique, étaient tombés en quenouille. Cette altération ne concernait que les fiefs de la maison de Rheinfelden; les autres suivaient ordinairement le régime salique. [retour]
345 Kuenlin, Dictionnaire du Canton de Fribourg, T. I. p. 241. [retour]
346 Voy. note 333. — Ce fut l'Empereur Rodolph I qui éleva Laupen au rang de Ville Impériale, en lui accordant les privilèges de Berne, aº 1275, mais il lui confirma en même temps ... Consuetudines quas ... hactenus tenuerunt. (Charte dans Walther's l. c. nº VI). Elle formait donc déjà une Communauté municipale (Landstadt). — Aº 1263, 29 Septembre, la Comtesse Elisabeth confirme la donation faite par le Comte Hartmann le jeune de Kybourg à l'Ordre Teutonique de Könitz des dîmes de Laupen. (Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 394.) [retour]
347 Contrat de mariage d'Hartmann le vieux de Kybourg, du 1er Juin 1218. (Soloth. Wochenblatt, 1828, p. 502.) [retour]
348 Voy. ci-devant note 284. [retour]
349 Voy. ci-devant note 343. [retour]
350 Oleires (Oleiris), Diessbach (Ticebach), Munsigen (Munsenges) et Jegisdorf (Hieguestorf), sont nommés dans le contrat de mariage d'Hartmann de Kybourg du 1er Juin 1218, ainsi que Ripolcens que Guichenon a cru être Wippens; mais Wippens ne se trouve nulle part écrit Wipolcens en latin, et d'ailleurs cette terre avait alors des seigneurs particuliers. Ripolcens ne serait-il point une altération de Rapoltz-Haus, maison forte dans la ville de Thoune, où le Comte Eberhard do Kybourg tenait ses assises aº 1334? (Voy. Haller, Collection Diplomatique, T. XIII, p. 54.) Dans ce cas, le Comte de Kybourg aurait donné en dot à Marguerite une portion de la ville de Thoune, ce qui est très-vraisemblable. — Au reste, on trouve encore une autre localité qui pourrait se rapporter à Ripolcens, savoir: Rupolsried, qui, aº 1322, était un bourg (villa) (Voy. Haller, T. XII, 695.) — Landshut, Herzogenbuchsèe (Villa-Buxe) et Utsisdorf sont mentionnés dans le contrat de mariage d'Hartmann le jeune de Kybourg du 27 Janvier 1254. (Soloth. Wochenblatt, 1828, p. 517), dont la copie nous a été communiquée par M. Duvernois, qui a eu la complaisance de la lever pour nous sur la Charte originale qui se trouve aux Archives de Besançon; Laupen, dont la seigneurie s'étendait sur toute la forêt appelée encore der Forst, jusque vers Könitz, et Grâsburg, dont le mandement comprenait tout le Güggisberg, appartenait positivement à la maison de Kybourg. (Voy. les Chartes de 1253 et 1263 dans le Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 389 et p. 235., Charte de l'an 1309.) [retour]
351 Rapherswyl, Dieterswyl, Biezwyl, Affoltern, Wengi, Koelckofen, Grâchwyl et Schüpfen (Bailliages d'Arberg et de Fraubrunnen, Canton de Berne), formèrent plus tard une partie du douaire de la Comtesse Elisabeth, veuve d'Hartmann le jeune de Kybourg. (Vente du 4 Janvier 1264, Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 46.) [retour]
352 Le Landgraviat de Burgundelle (Die Landgrafschaft), dans son sens le plus restreint, ne s'étendait alors qu'entre l'Aar et l'Emmen, depuis la Murgeten près d'Arvangen jusqu'à la Zülg, Préfecture de Stäffisbourg, Canton de Berne. (A. L. de Wattenville, msc.) [retour]
353 Müri près Berne était in Comitatu comitis de Bouchegga, aº 1239. (Soloth. Wochenblatt, 1829, p. 124.) La partie voisine de Soleure s'appelait aussi das Landgericht Wangen, la Juridiction de Wangen ( Tillier, histoire de Berne, T. I. 208.) [retour]
354 Les Comtes d'Habsbourg-Kybourg rachetèrent la juridiction du Landgraviat des Comtes de Buchegk, entre le 1er Août et le 1er Novembre 1313. (Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 465.) [retour]
355 Schöpflin, Alsatia Diplomatica, T. I. p. 333. [retour]
356 Tschudi, T. I. p. 117. [retour]
357 Schöpflin hist. IV. p. 146. [retour]
358 L. c. p. 148. Le préambule de la Charte, où il est parlé de la confirmation de l'Empereur Henri VI, ne détruit pas notre argument; une loi de l'Empire défendait d'accorder de nouvelles franchises aux villes sans une permission impériale. (Walther's, Stadtrecht p. 25-30). [retour]
359 N. Fr. de Mülinen, Geschicht-forscher, T. I. p. 14. [retour]
360 Interlacken choisit les Seigneurs d'Eschenbach (Geschicht-forscher, T. I. p. 355,). — Ruggisberg, les Comtes de Kybourg (Charte de 1254, Soloth. Wochenblatt, 1827, p. 378). — Payerne, les Seigneurs de Montagny. (Charte de 1226, nº 11, aux Archives de Lausanne, Payerne. [retour]
361 Ryhiner, Schweiz. geschicht-forscher, T. I. p. 347. [retour]
362 Voyez Jn. de Müller, histoire de la Suisse, T. II. p. 18 note 75. [retour]
363 Traité entre le Comte et l'Evêque pour Moudon, du mois de Juillet 1219. (Guichenon, T. I. p. 248.) [retour]
364 Jn. de Müller attribue ce fait au comte Pierre de Savoie, (T. II, p. 55, note 256), mais celui-ci prit, dans le commencement de sa vie publique, le titre de Comte de Romont. [retour]
365 Ces deux Seigneurs paraissent dans le traité comme plaiges ou cautions, pour les deux parties. [retour]
366 Voyez le contrat de mariage dans le Soloth. Woch., 1828, p. 502), dont le texte, plus exact que celui de Guichenon, ne l'est cependant pas entièrement. [retour]
367 De Tillier, histoire de Berne, T. I, p. 35. « Rodolphus, Comes Novi-Castri, Dominus de Nidawe, Judex, seu Landgravius, circa (citra) Ararim ... coram nobis, tanquam authentica et publica personna, sedentibus pro tribunali. (Charte de l'an 1307, Soloth. Wochenblatt, 1823, p. 231.) [retour]
368 Montmollin, mémoire sur le Comté de Neuchâtel, T. II, p. 49 et 97. — On donne à ce Gérard de Vienne le titre de Seigneur de Grandson, mais il n'était que suzerain médiat de Grandson, (qui appartenait à Ebald, Sire de Grandson), sous la mouvance soit de la branche de Châlon, soit du Comte Palatin. — Gérard mourut avant son père, qui décéda aº 1223. (Voy. De Chazot, généalogies de Bourgogne, Table XXIII.) [retour]
369 Vers l'an 1093, l'Empereur Henri IV donne à Hugues, Abbé de Cluny, et à Etienne, prieur de Payerne, l'Eglise du Val-de-Travers ( Vallis Transversa in Episcopatu Lausannensis), avec toutes ses dépendances, excepté les terres inféodées à certains Seigneurs laïques. — Ulrich d'Eppenstein, patriarche d'Aquilée, qui fut élevé à cette dignité aº 1086 et mourut aº 1121, ainsi que Wernher de Lenzburg, Marquis d'Ancône, (vivant de l'an 1093 à 1119)) paraissent dans la Charte. (Zurlauben, Stematographia, T. 90, p. 13, extrait de l'Abbaie de Cluny, S. D.) [retour]
370 Voyez ci-devant notes 144 et 277. [retour]
371 Voyez ci-devant notes 253 et 255. [retour]
372 Charte dans Schöpflin, T. IV, p. 150. [retour]
373 P. Ochs, histoire de Bâle, T. I, p. 264. [retour]
374 Charte originale aux Archives royales Turin, copie communiquée par M. le Chevalier Cibrario. [retour]
375 Dirempta lis ob Advocatiam Lausannæ. (Apud Ruchat msc. 58, et Cartulaire de Lausanne, fº 8, Apographe de Lausanne, fº 63 et 64.) [retour]
Pièces justificatives concernant le mémoire sur le rectorat de Bourgogne.
I.
Page 17, note nº 8, et p. 86, nº 188.
Investiture du Comitat du Vallais faite par Rodolph III, Roi de Bourgogne, à Hugues, Evêque de Sion, datée de Cudrefin de l'an
999.
(Extraite d'un manuscrit de la Bibliothèque royale à Paris, fonds Brienne, cotté nº 44, fº 61, concernant le Pays-du-Vallais.)
In nomine Sancte et individue Trinitatis et filii et Spiritus Sancti. Amen.
Rodulfus Serenissimus Rex. — Regni nostri creditur status summumque et nominis et honoris nostri dignoscitur decus, si in restaurandis augmentandisque mei ecclesiis plurime operam demus. Inde notum sit omnibus tam præsentis hominibus quam futuri temporis fidelibus, qualiter Agildrudis Reginae consortis nostræ amantissime, fratrisque nostri Burchardi Lugdunensis ecclesiæ Archiepiscopi, nec non Hugonis venerandi Genevensis ecclesiæ Episcopi petitionibus consentientes, devotis etiam /152/ Hugonis Sedunensis ecclesiæ Episcopi servitiis semper fideliter nobis impensis tallionis viam reddere cupientes, Comitatum Vallensem integriter, cum omnibus suis utilitatibus que juste et legaliter, ex antiquis seu etiam modernis constitutionibus, ad et ecclesiæ comitatum appendere videntur et sicut usque modo nostro patrisque nostri concessu fideles nostri vestiti fuerunt, Sanctæ Mariæ Sanctoque Theodulo Sedunensi, cujus tamen studio primum eo loci acquisitus erat, donavimus, Hugonemque ejusdem episcopum presentem episcopatus potestativum ad habendum fecimus ejusque posteris ad linquendum. Tamen tenore ut alienandi ab ecclesia Dei sancteque Mariæ non habeant potestatem. Hæc autemut a nobis facta credantur et nunquam a nobis seu posteris nostris frangantur manu nostra corroborari et sigillo nostro jussimus insigniri.
— Signum ... Regis invictissimi. Actum Curte-fin. — Anno dominice DCCCCXCVIIII. Regni vero Rodulfi ... feliciter. Amen.
La prétendue Charte octroyée, dit-on, par Charlemagne à l'Evêque St.-Théodule est indirectement rappelée dans celle-ci et plus explicitement encore dans le diplôme de Charles-Quint de l'an 1521, qui en revanche ne fait aucune mention de celle de Rodolphe III. Cependant l'histoire prouve que c'est de l'investiture du dernier Rodolphien de l'an 999 que date de fait la souveraineté temporelle de l'Evêque et Comte de Sion, laquelle se soutint, sauf les courtes interruptions que nous avons signalées p. 89), jusqu'à la fameuse déclaration des droits de l'an 1613, par laquelle le Vallais se constitua en état représentatif, en abolissant ces Chartes d'investitures, qui y sont toutes trois formellement mentionnées. (Voyez Gallia Christiana, T. XII, p. 737, 756, et preuves p. 456 et 461.)
II.
(Page 19, Nº 15 et p. 37.)
Griefs du monastère de Romainmôtier contre Adalbert de Grandson et ses chevaliers, adressés au Pape Léon IX, lorsque ce pontife visita ce monastère, le (V. kal. d'octobre) 27 septembre 1049.
Aux archives de Lausanne, Invent. Anal, Litt. A.)
Ratio exterminii quam intulit Adalbertus et sui 1 monasterio romanensi. Caput nostræ reclamationis. Clementissime Papa. per Dominum omnipotentem qui te sublimavit in chatedra servorum precamur ut patienter audias. nobisque secundum statuta canonum. et locum querimoniæ dones. et iuxta consuetudinem Sanctæ romanæ ecclesiæ iudicii libram iusti decernas.
— Est quedam villa in possessione monasterrii sita. quæ dicitur ferrarias in cujus pertinentia nemorosa silva rupem quandam castelli munitione aptam includit 2. quam senior Adalbertus absque concessione abbatis. et loci monachorum violenter invasit. eamque edifitio castri munivit. Ex quo quanta mala exierunt nobis quantaque cotidie perveniant. et ventura sint. dicere non possumus. tam ut pauca per clementia nostra audiatis. — primum silvam et in medio eius caslellum in querimoniam perducimus et vastationem tocius ville, et molendinum 3 quod ex toto nobis abstulit. Deinde cuidam servo sancti Petri. henrico. centum solidum injuste abslulit. alio cuidam constantino /154/ semiliter centum solidum extorsit. Iterum duranno quinquaginta solidos. et carratam de vino valente IIIIor libras. — Iterum bonifilio. IIas carratas vini octo libras valentes. — Item alii bonifilio. IIos boves et unam vaccam et IIas molas XIIIor solidos comparatas cum ipso ferro violenter abstulit. — In aziaco 4 sex boves. — Hæc in vita domni Odilonis abbatis facta et nunquam emendata. — Terra de Chavento 5 hoc sunt V mansi pleni et condamina centum iugerorum. — circa mortem domni Odilonis 6 invasit. sed tamen fruges inde minime retinuit. — post mortem vero illius iterum invasit. et fruges et servitium terræ violenter accepit. — Idcirco domnus Hugo 7 abbas ante imperatorem reclamationem fecit. et justitia convictus. terram reddidit. postmodum ad propria reversus, justitiam imperatoris parvipendens. terram invasit et fruges terræ cum omni servitio sibi vindicavit. — Dolore etiam nostræ reclamationis commotis servientes sibi. per omnem potestatem monasterii pervagantes in vitinia sua positam. nullam dimisere domunculam ex qua IIIIor aut tres non extraherent garbas. similiter et homines nepotis sui. et super omnia hec mala. predam istam appellat rectitudinem suam. — Domnus Otto filius eïus. cum omni comitatu suo iacuit in villa nostra banens 8. unum diem et unam noctem. rusticorum servitio usus ut placuit sibi. quicquidem frugum presenti anno ibi collegimus totam dispendidit. — Rodulfus etiam qui tenet castellum super terram nostram posilum quod vocatur Monsricharii 9 quicquid habere debuimus in tribus villibus omnino nobis potestate iniuste tollit. — De his omnibus, clementissime summorum apostolorum successor. obnixe rogamus ut misericorditer tractes, qualiter locus iste in dei permaneat servitio. — Nam huïus querimoniæ nostræ suspicamur calumpniam sustinere. nisi auctoritas nostra impunitatem nobis dignetur obtinere 10. /155/
III.
(Voyez page 48, nº 86).
DONATION faite par Girald de Villars et Rodolphe son frère à l'Abbaye de Cluny de l'Eglise de Villars-les-Moines au diocèse de Lausanne.
(19 février aº 1080)
Extraite de son original existant aux archives de Cluny, par M. de Rivaz.
Notum sit omnibus hominibus tam presentibus quam futuris quod ego Giraldus de Villars et frater meus Rodulfus clericus recognoscentes enormitatem peccatorum nostrorum parentorum nostrorum patris vel matris et pompam hujus seculi nihilo habentes, donamus domino Deo et sanctis ejus apostolis Petro et Paulo et loco cluniaco ubi domnus hugo abbas magis videtur prodesse quam preesse et fratribus in predicto cenobio Deo servientibus ego giraldus supra scriptus et frater meus Rodulfus donamus omnem allodium quem habemus in villa Villars 1 videlicet in episcopatu de Losana, idest ecclesiam in honore sanctæ trinitatis constructam et omnia quæ habemus in eadem villa sive in aliis locis hoc est in servis ancillis in pratis in vineis in campis in silvis in molendinis in piscariis in arboribus /157/ sive cultis sive incultis totum ab integro donamus supra dicto loco extra novem diurnales boum et unum casalem . facimus autem istud donum tali tenore ut si voluntas nobis venerit derelinquendi seculum recipiant nos ad habitum sancti Benedicti tamen si non venerimus, donum nostrum firmum sit et stabile in perpetuum, ultimo autem duodecim denarios censum solventes . si quis autem hanc nostram donationem infringere voluerit dum ad satisfactionem veniat sit anatema maranata. facta sunt hæc apud cluniacum XII kalen. martii gubernante Romanam ecclesiam domno gregorio VII regnante Rege Philippo in Francia anno XXII 2 testibus his Rodulfo de Curgivol, Burcardo de Crissey Turumberto et anselmo fratre eorum anno verbi incarnati MLXXX ind. III. 3 /158/
IV.
(Voyez page 19, N° 13.)
DONATION d'une partie du Bourg d'Orbe, faite par Rainaud II, Comte de Bourgogne, au monastère de Romainmôtier.
(Sans date, entre l'an 1087 et l'an 1105.)
(Archives de Lausanne. Invent. Anal. Litt. A.)
Notitia Werpitionis quam fecit comes Rainaldus, filius willelmi iunioris 1, Sto. Petro romanensis monasterii et Stephano priori 2, in presentia domni Burchardi vice domni illius, de Vico qui vocatur Urba 3, laudante et rogante eo Burcardo. Et accepit a supra dicto priore mullam unam obtimam magni precii pro uno manso qui iacet in Aziaco et de carrucis quas ministri ei iniuste accipiebant in villa Aziaco et in Bofflens et ducebant eas in vico qui dicitur Tavel ad arandum. Idem comes dedit domno Deo usantia in silva regali ad pauperes calefaciendos quantum eis sufficiat in hospitale 4.
Huius rei testis est Buchardus. T. Dalmatius. T. Aalgodus T. (sic) Lambertus. T. Walcherius frater eius. T. /159/
V.
RESTITUTION faite au monastère de Savigny en Lyonnais, par l'Empereur Henri IV du Prieuré de Lutry au Pays-de-Vaud. Datée de Vevey, du 13 septembre 1087.
Extraite d'une copie authentique des archives de Savigny, par M. de Rivaz.
In nomine sanctæ et individuæ Trinitatis. Henricus divina favente clementia Romanorum imperator augustus. Omni professioni sanctæ legem suam servare et corruptam reintegrare nos debemus qui legem dare et servare a Deo potestatem in terra accepimus. Inde clamorem lustriacensis ecclesiæ /160/ compescere curamus, reddentes ei quam injuste amiserat legem libertatis quam dedit ei primus fundator ejus nomine Anselmus. Notum sit ergo, omnibus Christi notisque fidelibus tam futuris quam presentibus qualiter ad interventum filii nostri Conradi, Burchardi lausanensis episcopi et cancellarii Italiæ cæterorumque fidelium nostrorum præfatam ecclesiam lustriacensem 1 ab Anselmo prefato fudatam et savigniacensi 2 monasterio in proprium traditam sed vi quorumdam inde alienatam eidem monasterio savigniacensi in honorem sancti martini constructo in integrum restituimus cum universis appendiciis suis, idest utriusque sexus mancipiis arreis, edificiis, pratis, pascuis, terris cultis et incultis, viis et inviis, silvis venationibus, aquis aquarumque decursibus, molis molendinis, piscationibus, exitibus et regressibus quesitis et inquirendis ac cum omni utilitate quæ vel scribi vel nuncupari poterit in lege et ratione ut si qua persona magna vel parva hec instituta nostra imperialia ullo modo infringere vel minuere temptaverit centum libras auri purissimi componat et reddat medietatem monasterio saviniacensi et medietatem cameræ nostræ, et ut hoc firmum et inconvulsum omni ævo permaneat, hanc cartam jussimus conscribi et ut videtur manu nostra corroboratam sigilli nostri impressione jussimus insigniri.
Signum domni Henrici III (Monogr.) Romanorum imperatoris augusti
Erminfredus cancellarius recognovit.
Placuit etiam conscribi laudimentum quod Burchardus episcopus lausanensis fecit monasterio sancti Martini 3 de quadam femina nominata gisla cum filiis suis et filiabus in perpetuum possidendis. Datum Jdibus septembris anno dominicæ incarnationis millesimo LXXXVII indictione X anno autem domini Henrici IVti romanorum imperatoris augusti regni XXXIII, imperii IV. Actum Vivis, in nomine domini J. C. Amen. /161/
L'indiction 10e et la 4e année du règne de l'Empereur Henri IV, conconcourent avec l'an 1087. — On ignorait que cet Empereur eut visité une seconde fois le Pays-de-Vaud, depuis son passage à Vevey, aº 1077 (voyez p. 30.)
Le Prieuré de Lutry avait été fondé en l'an 1025, par un pieux Seigneur du Pays nommé Anselme, sous la dépendance de l'Abbaye de Savigny, en Lyonnais. ( Voyez la Charte de fondation dans les monumenta Historiae Patriae de Turin, T. I, p. 447.)
VI.
Donation de Lambert, Evêque de Lausanne, à l'Abbaye de Romainmôtier.
(Sine data.)
(Inv. Analit. Litt. B. Archives de Lausanne.)
Notum sit omnibus hominibus tam presentibus quam futuris, quod ego Lambertus Lausonensis episcopus et frater meus Vldricus, laudantibus fratribus nostris Philippo et Conone, et nepote nostro Amedeo, damus deo et Sancto petro Romani Monasterii unam ancillam nomine Litburgam, cum filiis suis et filiabus, et omnibus qui de illis sunt processuri, pro animabus patris et /162/ matris nostræ, ut deus illis et nobis donet remissione peccatorum. Facta est hæc donatio tempore Siguino prioris. Testibus Bencelino de Grancione. Asmerade de Lustriaco. Pagano diluino, et Ermenoldo. Et si quis ex nostris hanc donationem delere voluerit, alienus sit a consorcio cristianorum.
Lambert de Grandson, Evêque de Lausanne, succéda à Burchard (qui fut tué au siège de Gleichen en Saxe) en 1089, la veille de Noël. Il ne tint ce siège épiscopal que peu de temps, on croit qu'il disparût déjà aº 1092. Ainsi l'acte ci-dessus est de l'an 1090 ou environ. — C'est la seule Charte émanée de ce Prélat qui nous soit connue, c'est pourquoi nous la publions ici.
VII.
(Page 142, Nº369.)
L'Empereur Henri IV donne l'Eglise du Val-de-Travers au monastère de Payerne.
(Entre 1093 et 1105.)
(Zurlauben Stematographia, T. 90, p. 13, à la bibliothèque d'Arau.)
In nomine sanctæ et individuæ Trinitatis. Henricus imperator augustus 1 quoniam nostram novimus esse salutem et Romani decus Imperii ... propter Deum et anime nostre remedium consilio aquilejensis Patriarche 2, Guarnerii marchionis 3, /163/ Burchardi similiter marchionis, aliorumque nostrorumque fidelium, et humili ac salutari petitione Hugonis Cluniacensis abbatis 4, et Stephani monachi, per hanc preceptalem paginam, jure perhenni Pærnensi 5 concedimus monasterio sancte Marie locum qui vulgo Vallis Transversa 6 vocatur et in episcopatu Lausannensis Ecclsie constructus esse noscitur, cum omnibus appendiciis suis, exceptis his que de manu nostra quidem laïci tenent 7.... (Sine data) 8.
(Monogramma Hci. Impris.)/164/
VIII.
(Voyez p. 21, nº 19.)
Plaid tenu à Orbe par Walcherius et Conon de Grandson, Principes provincae, en faveur du monastère de Romainmôtier.
(Sans date, vers l'an 1100.)
(Arch. de Lausanne, Invent. Analyt. vert Paquet. Litt. B.)
Noticiæ fidelium tradimus quod domnus Philippus de grautione 1 et filii ejus Falco. Cono. Walcherius. 2 faciebant multa mala in potestate Sti-Petri predanis iniurias violentiasque faciendo priores placitis etiam provocando . occasione calumniarum quas faciebant de quibusdam hominibus in potestate . licet iniuste: de Constantino de Arniaco 3 et de progenie eiusdem constantio de giroeno et fratribus eius et de filiis et filiabus Rainboldi de vilaris et de plurimis aliis. — Tandem domnus Lambertus prior in tantum conquestus est erga principes provinciæ domnum Walcherium Salinis domnum Cononem de grancione. quod illi apud Urbam 4 coniunxerunt colloquium de prudentibus hominibus clericis et militibus, domnum Guigonem priorem de paterniaco 5 fecerunt venire tam illi quam prior, qui audientes ex utraque parte raciones determinaverunt quod domnus Philippus et filii ejus ... et firman pacem teneant in antea erga monacos de omnibus calumniis, et pro hoc condonarent eis /165/ monachi omnis hominibus quas ipsis erant. et insuper darent eis VIIIto libras denariarum. Sic quod factum est et auctatum ex utraque parte et quam hoc consilium factum est ab omnis hominibus et sapientibus. fuerunt confirmatores et testes huius placiti ipsi principes qui hoc fecerunt. domnus Walcherius et domnus Cono. domnus Guigo prior. de clericis domnus Lodovicus de glanis. — Geraldus decanus Scto Anatoile. Uldricus de Campanias de militibus domnus Dalmacius de rupe. — domnus Ludovicus de Jure-Castro 6 Savaricus de Jvonant. — hugo de binvilar 7. Sicardus de Cavorniaco 8. — Bucardus de betensie 9. Ramundus de gisio. de famulis Osbertus maïor. — Valerius. — Berno. — Iohannes Beroardus. /166/
IX.
ACCORD entre Girard de Faucigny, Evêque de Lausanne, et Ponce, Abbé de Savigny, (en Lyonnais), touchant le Prieuré de Lutry, au Pays-de-Vaud.
(Du 13 Décembre 1111.)
(Extrait du Cartulaire des Archives abbatiales de Savigny, nº 941, par feu M. de Rivaz.)
Noverit omnis Ecclesia quod ego Geraldus Episcopus Lausannensis, et domnus Pontius abbas Saviniacensis 1 nostra ammonitione convenientes et quicquid questionis habuimus in medium proferentes post multimodam disceptationem in hunc diffinitionis terminum consensimus ut si Lustriacensis 2 ecclesia aliquid de allodio sanctæ Mariæ 3 dono seu vadimonio susceperit heredes primo rei liberam redimendi facultatem haberent, si autem heredes deficerent ego ipse seu canonici nostri idem facere possent et hoc hactemus de cetero autem non habeat jus quicquam de allodio sanctæ Mariæ quoquo modo suscipiendi absque consensu et laude nostra atque capitulini. hec autem difinitionis parte nosmetipsos eadem lege constringimus. De servis autem, hoc promulgavimus et quicquid lustriacensis ecclesia possedit, eorum videlicet qui ex parte matris de familia /167/ Sancti Martini 4 et a parte patris de familia sanctæ Mariæ nati sunt, sicut usque nunc tenuit sic perenniter libera et absque calumpnia teneat; deinceps autem, non sic sed æque, in omnibus divisio fiat et nos quoque in hac parte eadem lex coerceat. Si quis vero de familia sanctæ Mariæ in territorio sancti Martini manet, illum admodum cambiendi quandocumque voluerit concedimus facultatem, quod si concambire non potuerit, in exactionibus nostris circa illos servabimus moderationem.— Ego Geraldus Episcopus cum capitulo nostro cum consensu clericorum nostrorum hæc omnia confirmavi et scribi jussi. — Signum Hugonis Decani testis. — Signum Vuitgerii testis. — Signun Amaldrici testis, et aliorum clericorum et laïcorum. Actum est hoc Lausannæ; anno ab incarnatione Domini MCXI, feria IIII, natalis sanctæ Luciæ, luna X. — De sociis domini Abbatis in testes affuerunt: Girinus decanus, Vigo miles, Stephanus miles, Stephanus, Gauzerannus, et frater ejus Petrus; de lausannensibus autem, adhuc isti: Amaldricus testis, Turumbertus testis Burchardus testis et alii multi videntes et audientes.
Cet accommodement entre l'Evêque de Lausanne et l’Abbé Ponce de Savigny était nécessité par la restitution du Prieuré de Lutry au monastère de Savigny, faite par l’Empereur Henri IV aº 1087. (Voyez ce diplôme, ci-devant nº V) L’Abbaye de Savigny, en Lyonnais, dépendait, au temporel comme au spirituel, des Archevêques de Lyon, et par cela même, le Prieuré de Lutry, quoique situé dans le domaine temporel et spirituel de l’Evêque de Lausanne, échappait à l’autorité de ce dernier Prélat.
X.
DONATION faite par le Chevalier Bernard de Glana au monastère de Cluny.
(Sine data.)
(Extraite de l'ancien cartulaire de Cluny, cotté A p. 20, Nº 63, par M. de Rivaz.)
In Christi nomine, ego Bernardus miles, cognomento de Glana, dum in infirmitate gravi laborarem, venire feci ad me monachos de Cluniaco et petii ab eis misericordiam ut me reciperent in suam societatem, quod et ipsi gratanter et honorifice fecerunt, ego quoque donavi eis aliquid de hereditate mea, annuentibus filiis meis Berengario, Humberto, et Bernardo; est autem hoc quædam vinea quæ est in parrochia Sti-Johannis, in villa quæ dicitur Hestriniacus 1 in pago cabilionense. Jacet autem ipsa vinea in colle montis prædictæ parrochiæ, in superiori parte predictæ ecclesiæ; et terminatur a mane terra Sti-Petri; a duabus autem partibus sic jacet in lungum terminatur duabus viis publicis superiori et inferiori, nam a quarta parte terminatur terra francorum 2 continet autem ipsa vinea duas raissias, etc. (absque data 3) /169/
XI.
(Voyez page 77, nº 163.)
Sentence rendue par l'Evêque de Lausanne (Gérard de Faucigny), au sujet des querelles existantes entre Ebal II, Sire de Grandson, et les Religieux de Romainmôtiers.
(Vers l'an 1124.)
(Archives de Lausanne. Invent. Analytique vert Litt. B.)
Placitum de domno Eubolo, quod fecit in manu domni Guigonis prioris. Iniurias et depredationes faciebat domnus Eubolus in potestate Sti-Petri multas, pro calumpniis quorumdam /170/ hominum de quibus factum fuerat judicium in curia lausonensi. Unde in tantum insecutus est eum domnus Guigo prior quod de rebus monasterii dedit ei Scilicet duodecim libras denariorum pro quorum precio dedit sex bucias vini. tali conditione ut sicut promulgatum fuerat judicium in curia lausonensi de hominibus Stae-Mariæ et Sti-Petri, ita illud tenerent prior et domnus Eubolus.—Fuit autem in prefata lausonensi curia hoc modo promulgatum iuditium, ut cuius æcclesiæ essent matres in possessione secundum antiquas investituras, eius essent et infantes. æcclesiastico iuditio. — Talique pacto domnus Eubolus possessionibus rebusque omnibus monasterii pacem firmam in omnibus tenendam promisit. — Cuius rei obsides. quorum hæc sunt nomina: — Milites. Witbertus. — Littardus. — Poncius. — Hugo. — losbertus et Martinus promissus est ad mittendum. Dictum est etiam quod mitterentur quatuor milites. qui cogerent vernaculos tenere fidem obsidii, vel ex parte sua tenerent. — Milites autem hi sunt: — Oliverius et Achinus frater eius. — Soldanus. — Girardus de longavilla. Et pro his mittendis missi sunt aliis obsides: — domnus Aymo. — Rodbertus. — Mainerius de graliaco. — Ugo de bonovilare et Burchardus frater. — Et omnes hi obsides tali pacto missi sunt: ut si aliquis eorum moriatur, postquam ceteri moniti fuerunt, obsidium teneant donec vivus pro mortuo mittatur. (Sine data.)
Ebal de Grandson refusa d'abord de reconnaître la juridiction de l'Evêque de Lausanne en matière temporelle; mais le Prieur de Romainmôtiers s'étant rendu auprès de l'Empereur Henri V à Strasbourg, en obtint la confirmation des privilèges de son monastère (28 Décembre 1124), et un rescrit adressé: 1º à l'Evêque de Lausanne, Gérold de Faucigny; 2º à Aimon II, Comte de Genève, et à Amedée III, Comte de Savoie, (cartul. de Romainmôtiers, manuscrit fº 12), pour leur enjoindre de faire exécuter à tout prix le jugement ci-dessus, rendu contre Ebal; sur quoi ce dernier s'y soumit, comme le prouve la Charte suivante:
XII.
(Voyez p. 77, N° 163.)
Désistement d'Ebald II, Sire de Grandson, en faveur du monastère de Romainmôtiers.
(Vers l'an 1124.)
(Archives de Lausanne, Inventaire. Analytique vert, Litt. B.)
Noverint omnes tam futuri quam et presentes. quod domnus Eubolus de grantione pro multis injuriis quas faciebat in terra Sti-Petri corde compunctus dedit Sto-Petro 1 quod iuste vel iniuste habebat in lamberto pelletario. laudante uxore sua et filiis suis. — Quod donum posuit super altare presente domno Narduino priore et ceteris monachis. Unde dedit testes Rainaldum de Cavorniaco. — Hugonem de Bonovillare. — Stephanum de Ferrariis, et de famulis monachorum Valerium et Aymonem. (Sine data.) /172/
XIII.
(Page 94, Nº 210.)
Charte de fondation de l'Abbaye du Lac de Joux, par Ebal II, fils de Falcon, Seigneur de Grandson.
(aº 1140)
Extrait de la grosse des fondations et droits de l'Abbaye du Lac, cotté Nº 29, (du 16e siècle) aux Archives de Lausanne.
Reperitur in eadem abbatia scriptura antiqua cujus tenor sequitur, et fuit de anno millesimo centesimo quadragesimo.
— Quoniam genus humanum primi parentis trangressione deffective memoriæ vicium contraxit placuit predecessoribus nostris ut quidquid ratum tenere vellent fideli litterarum custodiæ commendarent.
— Notum igitur tam presentibus quam futuris esse volumus quod Ebalus, Falconis de Grandi-sono filius, per manus Cospertj edifficatoris hujus loci 1 dedit huic loco, qui prius Leona, postea Domus-Dej 2 vocatus est, et fratribus hic deo servientibus, quidquid in piscina 3 in pratis vel in Lacu seu in sylva vel in omnibus usamentis habebat, totum ad integrum possidendum in perpetuum tradidit, huic autem dono interfuerunt Vldricus /173/ de Grandissono Marinus de Cuarnens et fratres ejus scilicet Milo Stephanus et Anselmus, et omnes isti ibidem dederunt quidquid in silva dare potuerunt, hoc autem donum postea Ebalus Lausannæ confirmavit presentibus canonicis, Hugone decano, Vuigerio, Ludovico, Alberto et duobus militibus Renaldo et Bocardo. /174/
XIV.
Donation de Guy, Evêque de Lausanne, à l'Abbaye du Lac de Joux.
(8 mars 1140.)
Archives de Lausanne. Registrature du Bailliage de Romainmôtiers T. II, Nº 323.
Cum in gremio Sanctæ matris ecclesiæ multi ceteris prædivites foveantur et eos lex fidelium sustentare minus habentes ammoveat Ego. Guido Lausannensis Episcopus quosdam dei servos scilicet abbatem de Iaco et concanonicos suos quibus meæ possessiones impartiri particulam elegi. Noscant tam præsentes quam futuri quod ego locum quemdam qui bella-vuarda vocatur in jurat 1 ad ædificandam abbatiam eis dono transfundo et eorum voluntati alligo et astringo, omnem et enim cultum sive incultam tam in terra quam in aquis et silvis quod in usu proprio ibi possidebam vel alii de me tenebant sicut mons gurgii et mons guberti 2 pendent et aquas jaciunt scilicet quod vulgo dicitur forest illuc usque ubi quidam rivus cadit in aquam granet 3 liberum et ab Omni exactione absolutum eorum facio. Concedo quomodo in prædicto loco omnibus qui voluerint, exceptis nominatim excommunicatis, libram et absolutam sepulturam. Factum est autem hoc donum octavo jdibus martii /175/ Lausannæ in capitulo beatæ mariæ ipsius ecclesiæ, canonicis concedentibus et laudantibus et subscriptorum testimonio confirmatum. Arducius gebennensis Episcopus et lausannensis præpositus testis, Moïses abbas 4, testis, Richardus prior et Vuillelmus monachus et canonici Ermenradus decanus, Geroldus Cantor, Petrus de ponte, Algoldus, Uldricus de Corbeire, Petrus et Petrus atab ..., hugo de Jolens, testes; Ludovicus decanus qui quicquid parrochialis vir infra suprascriptos terminos habebat ibidem coram prænominatis testibus ipsi abbati concessit et dedit. Amedeus dominus de Blonay quicquid in eodem loco sive in advocatia sive in decimis possidebat et insuper nominatam deciman de Poysdor 5 in manu mea ad opus eorumdem fratrum deseruit et reddidit et hoc scripto restituari rogavit. Ego Guido episcopus testis Emerardus decanus et Uldricus (Udalricus) de Corsi et Richardus prior et Boso sacerdos, Valcherius de Poysdor. /176/
XV.
Confirmation de la fondation de l'Abbaye du Lac de Joux, par Guy, Evêque de Lausanne.
(aº 1141.)
(Archives de Lausanne. Layettes de Romainmôtiers, Nº 430.)
In Nomine domini, ego Guido divina miseratione Lausannensium humilis Episcopus, tam presentibus quam futuris, cum omnibus qui mihi sunt commissi, maxime tam eis qui propria relinquentes, Christi pauperes sunt effecti, diligenter debeo providere; ut quod mea vel aliorum munificentia sunt adepti, posterorum versutia seu violentia temere non invadat. Igitur vestrae omnium dilectioni notum fieri volo, quod possessio æcclesiæ de Lacu, ipse Lacus est, et terra adjacens undique lacuj, infra ambitum maiorum montium, qui dependent et aquas iaciunt versus lacum. Æeclesia etiam de Quarnans 1 et decima eiusdem villæ, et terra quam in eadem villa possidet: Molendinum in eadem villa: Terra in Valle-Molonis 2 et alia terra in Montevilla 3 — Terræ et vineæ quas habet in Columberio 4 et in Villario 5 et in Ferrariis 6 et Betanis 7 et in Vilar-Luceum 8 et in Subsilva 9. In Mastod 10 — Terra et vineæ in Rivurio 11 . terra in Trivelino 12 et vineæ quas vel a monachis Lutriensibus emit, vel domna Fina 13 donante obtinuit. Terra in Jurat 14, quam ego ei contuli: sicut Mons Gurgij et /177/ Mons-Guberti 15 pendent, locusque ubi quidam rivus cadit in aquam granet 16. Æcclesia Sti-Symphoriani 17 quam ei contuli. — Actum anno Incarnati Verbi Mo Co XLI. Domno Innocentio Romano Pontifice.
Regnante Conrado rege. /178/
XVI.
Donation d'Ardutius de Faucigny, Evêque de Genève et Prévôt de l'Eglise de Lausanne à l'Abbaye du Lac de Joux.
(aº 1141)
(Archives de Lausanne, Registr. du Baill. Romainm., T. II, Nº323.)
Ardutius Sanctæ gebennensis Ecclesiæ minister humilis omnibus in Christo renatis in perpetuum sacratis deo virginibus quæ sub habitu Religionis pro opera sanctitatis Christo suo ac benefactoribus suis assiduis vigiliis et orationibus eidem commendare student beneficiis subvenire et eas obnoxias nobis facere non modicæ felicitatis est. lnde est quod ego Ardutius gebenensis Episcopus illam medietatem censuum casualium pratorum quam in potestate de Chebri 1 a domino lausannensi Episcopo tenui pro remedio animæ meæ et antecessorum meorum liberaliter donavi et contradidi sanctæ mariæ et sororibus de Rivorio 2 tam præsentibus quam futuris et earum usibus in perpetuum profuturum Hæc autem Donatio celebrata est in manu domini Theoderici abbatis de lacu ad eius abbatiam et ad claustrum de Rivorio pertinere dignoscitur annuente et concedente domino Vuydone Episcopo lausannensi. Huius doni testes fuerunt Emeradus decanus et Giroldus Cantor lausannenses canonici, Petrus major de Chebri et filius eius Reymondus Galcherus conversus Petrus de Dompero Ulricus et Johannes /179/ filius eius de Poydoux, Aymo prior de Rivoria. Actum est hoc anno ab lncaroatione domini millesimo Centesimo quadragesimo primo Indicione IV, tempore Clementis papæ, Regnante Lutherio Imperatore 3.
Aº 1193, le 1er avril, l'Evêque Roger de Lausanne donna à N... abbé du Lac de Joux pour la maison des religieuses de Rivaz, un bois situé entre le chemin qui mène de Saint-Saphorin à Publoz, et celui qui mène de Puidoux à Rivas: actum in Palatio Lausannensis.
XVII.
Reconnaissance d'Etienne, Abbé du Lac de Joux, relative aux fondateurs de son Abbaye,
de l'an 1149.
(Grosse de l'Abbaye du Lac de Joux, cotté Nº 29, fº 6 et 7, Archives de Lausanne).
In nomine Sancte et Individue Trinitalis, Ego Stephanus, per dei patientiam dictus Abbas Lacus Cuarnensis 1 quum ceca rerum ambitio corda mortalium impretermisse solicitat, /180/ successibus alienis inhianter aspirat et propria parvipendens ad aliena plerumque manus rapaces violenter extendit; eminus lividorum calumpniis obviantes, utile duximus beneficia nobis collata quæ decursu temporum et labilis memoriæ defectu cogimur oblivisti. — Notum ergo esse volumus instantibus et futuris, Quod Ebalus de Grandissono benigne favore Uxoris et liberorum suorum, Rodulfusque et Milo de Cuarnens, nichillominus laudantibus uxoribus et liberis suis, qui jure hereditario in communi territorio ejusdem ville, in ilvis, in pascuis, in aquis currentibus et in omnibus usamentis, et in lacû Cuarnensi et circa ipsum lacum, in pratis et nemoribus, in piscina supra lacum constructa 2, mediam partem possidebant; eandem partem quam in omnibus memoratis possessionibus habebant, et appenditia circa lacum, sicut montes pendent et jaciunt aquas in ipsum lacum, omnia deo et ecclesiæ Mariæ Magdalene et fratribus, secundum tenorem regulæ beati augustini et institutionem præmonstratensis ordinis apud lacum Deo famulantibus respectu dei libere contulerunt. — Willelmus de Corberes 3 et Lietodus frater ejus, Uldricus de Villar 4 et Christianus de Cuarnens, hy quatuor in predictis possessionibus, residuam mediam partem habebant; Ceterum Vuillelmus et Lietodus de Corberes, quorum juris erat tercia pars mediæ partis omnium predictarum possessionum et familia multa in Cuarnens et Villa quæ Mons 5 dicitur, quidquid in possessionibus, et familia in totiis dictis locis habebant; prorsus absque ulla retentione, præfatæ ecclesiæ donaverunt. — Ut autem hæc donationes perpetue rate permaneant, præsens scriptum ymagine communis nostri corroborari, et testium subscriptione munirj decrevimus. — De dono Ebali testes fuerunt Uldricus Sacerdos de Campania 6 et alter Uldricus, Hugo de Binvillar 7; Stephanus Gayus, Borcardus de Bectens 8, Lambertus de Montagniaco 9, Rodolfus de Cuarnens, Hugo Minister, De dono Vuillermi de Corberes testes fuerunt Anselmus presbiter de Marsens, Petrus de Corberes, Euchagerius de Cuarnens, De dono Lietodi, testes fuerunt Milo de Cuarnens, Hugo de Bornul 10, Marinus de Gland, Berrardus de Monte 11 et fratres /181/ Sui, Berterius et Milo, — De dono Rodolphi testes fuerunt, Uldricus, canonicus Lausannensis, et Uldricus et Milo de Cuarnens, Buccardus de Bectens, Huguo de Benvillar, Stephanus Gayus, Ebalus de Grandissono, Lambertus de Montagniaco, Hugo minister. — Actum Divinitate Incarnationis, Millezimo, Centesimo, Quadragesimo Nono.
XVIII.
Arrêt prononcé par l'Archevêque de Tarantaise et l'Evêque de Lausanne, entre l'Abbaye de St-Claude et celle du Lac-de-Joux, au sujet du Lieu, jadis habité par l'hermite Ponce et ses successeurs.
aº 1155.
(Grosse des droits de l'Abbaye du Lac-de-Joux, cotté Nº 99, aux Archives de Lausanne.)
In nomine sancte et individue Trinitatis. Petrus Dei gratia Archiepiscopus Tarentasiæ, Amedeus eadem Gratia /182/ Lausannensis Episcopus. Quoniam hominum brevis est vita labilisque memoria, scripto placuit commendari quod dignum est memoria retineri; proinde notum sit tam futuris quam presentibus quod cum inter Ecclesiam de Lacu juriensi et fratres qui in loco Dompni Poncii hermite 1 commorantur aliquamdiu causa fuisset agitata, tandem ex mandato summi Pontificis Nobis est commissa sive concordia sive judicio terminanda, itaque tam nobis quam hiis qui nostro interfuere consilio, visum est in eum modum providere et ne iterum eadem controversia repullulare possit scripto committere: statutum est ut fratres qui in eodem Loco commorantur, nullum alium recipere possint quamdiu ex eis decem super fuerint; hiis autem descendentibus usque ad decem, quatuor scilicet Cornatos et sex Laiicos conversos habere poterunt, qui Episcopo Lausannensis obedientiam facere debebunt, alterius Ecclesiæ Monachum, Canonicum vel conversum nunquam recipient, sed tales qui de habitu seculari ad conversionem venerunt, si autem de hiis qui ibi modo commorantur aliquem non legitime ibi esse constituerint, ab Episcopo Lausannensis erit auriendus; animal nullum penitus habebunt. In Lacu una tantum nocte et die in hebdomada cum sagena aliis vero retibus quando placuerit, piscari poterunt; altare tamen et cimisterium Episcopus consecrare poterit; si vero, fratribus deficientibus Locus desertus fuerit, Ecclesiæ de Lacu in perpetuum remanebit. Alii vero Ecclesiæ vel monasterio Locum illum assignare non poterint. Hæc conventio ab utraque parte in manu nostra confirmata est; ne possit oblivione deleri vel in dubium revocari scripto eam placuit commendari et sigillorum nostrorum appositione testium quoque sub notacione roborari. Signum Rodulphi Abbatis Sancti Mauricii. — Signum Magni Abbatis Altecrestensis. — Signun Johannis Abbatis de Tela. — Signum Liverandi, Beroldi, Nantelmi decanorum et canonici Lausannensis. — Signum Uldrici et Anselmi canonici. —Signum Bartholomei. — Signum Ludovici — Signum Dalmacii. — Signum Ottonini et alterius Ottonini. — Signum Amedei ei Lamberti de Cuarnens. Actum Lausannæ, anno Incarnationis divinitatis Millesimo /183/ Centesimo Quinquagesimo quinto, Indictione quarta, concurrente quinta, Epacta vigesima sexta 2.
XIX.
Arrêt prononcé par Etienne, Archevêque de Vienne et Légat apostolique, sur les droits respectifs des Abbayes de St-Claude et du Lac-de-Joux, dans le territoire de la Vallée.
aº 1157.
(Grosse des droits de l'Abbaye du Lac-de-Joux, cotté Nº 29, aux Archives de Lausanne.)
Quia necesse est ut ea que pacis intuitu concorditer gesta sunt Ecclesia Dei ad memoriam transferat, posterorum et hiis qui pacem oderunt malignandi prorsus tollatur occasio, idcirco /184/ Ego Stephanus Dei miseratione Viennensium dictus Archiepiscopus, apostolicæ sedis Legatus, unacum Domino Petro venerabili Tarentasiensis Archiepiscopo et aliis quam plurimis sapientibus viris, Controversia quæ erat inter Abbatem Sancti Eugendi et Abbatem de Lacu Juriensi, quam ex mandato domini Pape audiendam suscepimus, amicabili judicio terminavimus et sigilli nostri munimine roboravimus concordiæ cujus modum atque tenorum in sequentibus duximus exprimendum. Abbas siquidem Sancti Eugendi Locum in quo Abbatia de Lacu sita est, quem juris sui esse dicebat, libere et quiete possidendum, quamdiu ordo premonstratensis ibidem viguerit, Abbati de Lacu et canonicis suis perpetuo jure concessit: ita tamen quod si fratres illius ordinis in distrane migraverint vel Locum penitus deseruerint, Abbas Sancti Eugendi qui sui juris sint ibi non amictat; pro piscina et pratis, fratres de Lacu in dedicatione Ecclesiæ Sancti Eugendi, centum sexaginta truitas prefate Ecclesiæ annuo censu persolvant. Locum autem quem Poncius hermita cum suis incoluit, Abbas Sancti Eugendi Ecclesiæ de Lacu libere et quiete possidendum concessit, ita tamen ut fratres de Lacu tres solidos Lausannensis monetæ et tres libras Cere die prenominato singulis annis per solvant; incolæ autem illius Lacus in tribus ejusdem lateribus quantum voluerint continuere excolere poterunt, præterquam grangias vel aliqua alia edificia ad manendum in illis tribus lateribus edificare vel construere nullatenus debent; in quarto autem latere versus Mutuam quantum iter in longum balista jacere poterit, et ultra juxta terminos quos Abbas Sancti Vicentii et Abbas Corneolensis prefixerunt, eis extirpandum et excolendum permittitur. De cetero autem quod ad utriusque partis spectat utilitatem, ab utraque parte fixum est et provisum; ut spatium quod est inter Mutuam et locum predicti hermite Poncii aliquibus personis ad habitandum nullatenus debeat concedi. Hæc concordia facta est in presentia multorum sapientium virorum; si quis itaque contra eam temere attemptaverit, omnipotentis Dei iram incurrat et a communicatione corporis et sanguinis Domini alienus fiat, et nos, /185/ auctoritate apostolica et nostra, perpetuo subdimus anathemati donec resipiscat. Sit pax diligentibus eam, Amen. — Hujus pacis testes sunt: Abbas Corneolensis, Abbas de Bonomonte canonici Gebennensis, Almadricus decanus Wullielmus Alborici decanus, Savaricus de Trivillino. Factum est hoc anno ab incarnato Domino millesimo centesimo quinquagesimo septimo, inditione quinta, manu Andreœ, canonici Sancti Ruphi, archiepiscopi, cancellarii.
XX.
Bulle de confirmation du Pape Alexandre III en faveur de l'Abbaye du Lac-de-Joux, des possessions et privilèges de cette Abbaye, datée de Venise, du 29 septembre 1177.
(Grosse des droits de l'Abbaye du Lac-de-Joux, cotté Nº 29, aux Archives de Lausanne.)
Confirmatio Alexandri.
Alexander episcopus servus servorum Dei dilectis filiis Gualtero Abbati Ecclesiæ Sancte Mariæ Magdalene de Lacu Juriensi ejusque confratribus tam presentibus quam futuris. Regularem vitam proffessis imperpetuum religiosam vitam eligentibus apostolorum convenit adesse præsidium, ne forte cuiuslibet temeritatis precursus, ante eos expositus revocet aut rebus (quod absit) sacre religionis infringat; ea propter dilecti in domino filii vestris justis postulationibus clementer /186/ annuimus, ei prefatam Ecclesiam in qua divino mancipati estis obsequio sub beati Petri et nostra protectione suscipimus et presentis scripti privilegio communimus. Imprimis siquidem statuentes: ut ordo canonicus qui secundum Deum et beati Augustini regulam atque constitutionem premonstratensium fratrum in eodem loco constitutus esse dignostitur, perpetuis ibidem temporibus inviolabiliter observetur; prœterea quascumque possessiones, quecumque bona eadem Ecclesia in prœsenciarum juste et canonice possidet aut in futurum concessione Pontificum, largitione Regum vel Principum, oblacione fidelium seu aliis justis modis præstante domino poterit adipisci, firma vobis vestrisque successoribus illibata permaneant, in quibus hæc propriis duximus exprimenda vocabulis; Lacum ipsum et totam vallem in qua Abbacia vestra sita est omni parte, sicut montes versus Lacum pendent et aquam jaciunt, cum ipso Lacu et piscaria, a superiori piscina usque ad montem Risum 1, Ecclesiam de Cuarnens cum terris et decimis et justiciis et familiis quas ibi possidetis, terram de Vallem-Leonis 2, et terram quam habetis in Montevilla 3, Ecclesiam Sancti Simphoriani 4, cum vineis terris et decimis quas in eadem villa et adjacentibus villariis possidetis, terras et vineas quas in Columberio 5 et in Lonay 6 et in Echichen 7 et in Trivillin 8 et in Alamand 9 et in Balgez 10 possidetis, terras et vineas et familias quas contulit vobis bonæ memoriæ Albertus de Bectens 11, terram quam habetis apud Bructignie 12 et apud Villars-Luczon 13 et apud Villars-Odon, locum cum vineis de Rivorio 14, quem habetis ex dono bone memorie Guidonis quondam Lausannensis Episcopi cum decima ejusdem terre, Ecclesiam de Ornys 15 cum omnibus appendiciis suis, terram et vineas quas Ludovicus de Monte-Castro et filii ejus in Castanerio 16 Ecclesiæ vestrae contulerunt, terram et decimas quas habetis in loco qui dicitur Subsylva 17, Allodium de Montericherii 18, quod Aymo de Augusta tenebat a domno Dalmacio, de eodem Montericherii usamenta, et pastura de toto dominatu de Vufflens, sicut ea racionabiliter possidetis, terram quoque quam dominus ejusdem castri ad construendam domum libere vobis concessit /187/ pascus de Lantifer, quæ vulgus calcem de Jura vocat, quam vobis huguo de Grandissono in elemosinam dedit, terram quam habetis apud Oulen 19, et terram et familias quas habetis apud Bectens 20, locum qui dicitur Sancta Crux 21 et duo molendina ejusdem loci, et terram quadam de Esserto, terram et vineas quas habetis apud Bremblens 22 et apud Sanctum Germanum 23, tres solidos et novem nummos censuales quos habetis apud Vullierens 24 et alios census nummorum quos habetis in diversis locis, terram et vineas de Luins. Paci quoque et tranquilitati vestrae, paterna diligencia proinde volentes, authoritate apostolica prohibemus ut infra claustrum locorum seu grangiarum vestrarum, nullus violentiam facere, furtum seu rapinam aut ignem opponere, vel homines capere seu interficere audeat; sepulturam quoque ipsius loci liberam esse decernimus, ut eorum devotioni et extremæ voluntati qui se illic sepeliri deliberaverint, nisi forte excommunicati vel interdicti sint, nullus obsistat; salva tamen justicia illarum ecclesiarum a quibus mortuorum corpora assumuntur; cum autem generale interdictum terre fuerit, liceat nobis clausis januis, exclusis excommunicatis et interdictis, non pulsatis campanis, submissa voce divina officia celebrare. Sane novalium vestrorum quæ propriis manibus aut sumptibus colitis sive nutrimentorum vestrorum animalium, nullus a vobis decimas presumat exigere decernimus; ergo ut nulli omnino hominum liceat prefatam Ecclesiam temere perturbare aut ejus possessiones auferre vel ablatas retinere, minuere, seu quibuslibet vexacionibus fatigare, sed illibata et integra conserventur eorum pro quorum gubernatione et sustentacione concessa sibi usibus omnibus pro futuris, salva sedis apostolice aucthoritate et diocesis Episcopi canonica justicia. Si qua igitur in futurum ecclesiastica secularisve persona hanc nostræ constitucionis paginam scienter vel ignoranter infringere aut contra eam temere venire temptaverit, secundo tertiove commonita, ni præsumptionem suam digna satisfactione correxerit, potestatis honorisque sui dignitate careat, reumque se divino judicio existere de perpetrata iniquitate cognoscat, et a sacratissimo corpore et sanguine Dei et Domini redemptoris /188/ nostri Jesu Christi aliena fiat, atque in extremo examine destrictæ ulcioni subjaceat. Cunctis autem eodem loco sua jura servantibus sit pax Domini nostri Jesu Christi continua; hic fructum bone actionis percipiant et apud districtum judicem præmia æterne pacis inveniant, Amen. Datum Venecii in Rivo-Alto, per manum Graciani, Sancte Romane Ecclesiæ subdiaconi et notarii, tercia kalendarum Octobris, Indicione undecima, Incarnationis dominice Anno Millesimo Centesimo Septuagesimo Septimo, Pontifficatus vero domini Alexandri Pape tercii, Anno decimo nono. /189/
XXI.
Bulle de l'Empereur Frédéric Ier, confirmant les privilèges et possessions de l'Abbaye du Lac-de-Joux, datée de Mulhouse,
(Du 26 Août 1186.)
(Grosse des droits de l'Abbaye du Lac-de-Joux, cotté Nº 29, aux Archives de Lausanne.)
Fredericus Dei Gratia Romanorum Rex Imperator semper Augustus. Imperatoriam decet majestatem circa suorum negotia fidelium eam adhibere diligentiam ut ea quæ de Principibus suis ab arbitris sive judicibus legitime diffiniantur auctenticæ commendet memoriæ, ne vel diffinita malignantium astucia in questionem retorqueat ne vel antiquitatis oblivio a posterorum memoria quod factum est aboleat. Ea propter cognoscat tam presens ætas fidelium Imperii quam successiva posteritas quod nos, moti divine pietatis intuitu, concordiam illam quam Stephanus pie recordationis Viennensis Archiepiscopus, unacum felicis memoriæ Petro venerabili Tarenthesis Archiepiscopo aliisque quam pluribus sapientibus viris constituit et in auctenticum scriptum redegit, super controversia quæ olim vertebatur inter Abbatem Sancti Eugendi et Abbatem de Lacu Juriensi, super loco in quo Abbatia de Lacu sita est et super loco quem Pontius hermita cum suis incoluit, sicut in instrumento dictorum Archiepiscoporum rationibus suis et finibus determinata continetur, /190/ eandem approbamus et approbatam imperiali authoritate confirmamus, statuentes et eadem aucthoritate sancientes ut nulla omnino persona parva vel magna secularis vel ecclesiastica hanc majestatis nostræ confirmationem audeat infringere nec aliquibus injuriis seu perturbationibus presumat actentare, quod si fecerit in ulcionem temeritatis suæ componat centum libras Viennensis monetæ dandæ cameræ nostræ et reliquam injuriam passis. Ut autem majestatis nostræ pagina rata consistat et omni ævo inconcussa permaneat, eam conscribi jussimus et sigillo nostro communiri, hujus rei testes sunt: Martinus Viennensis Episcopus, Rogerius Lausannensis Episcopus, Nantelmus Gebennensis Episcopus, Comes Ludovicus de Sarre-Verde, Cono Damel, capellani nostri. Datum apud Mulehusen, anno dominicæ Incarnationis Millesimo Centesimo octuagesimo sexto, inditione quinta, septima kalendarum septembris.
XXII.
(Voyez p. 94, Nº 210.)
Diplôme de l'Empereur Frédéric Ier en faveur d'Ebald IV, Sire de La Sarraz, datée de Mulhouse,
(Du 20 Août 1186.)
Grosse de l'Abbaye du Lac-de-Joux, cotté Nº 29, aux Archives de Lausanne.
Fredericus Dei gratia Romanorum Imperator et semper Augustus. Imperatoriam decet majestatem circa suorum negotia /191/ fidelium eam adhibere diligentiam ut ea quæ de Principibus suis ab arbitris seu judicibus legitime diffiniuntur auctentice commendet memoriæ, ne vel diffinita malignandum astucia, in questionem retorqueat; ne vel antiquitatis oblivio a posterorum memoria quod factum est aboleat. Ea propter, cognoscat tam presens ætas fidelium Imperii quam successura posteritas. — Quod nos moti pietatis intuitu concordiam illam quam Stephanus pie recordationis Viennensis Archiepiscopus unacum felicis memorie Petro venerabili Tarenthesiæ Archiepiscopo alliisque sapientibus viris constituit et in auctenticum redegit super controversia quæ olim vertebatur inter Abbatem Sancti Eugendi 1 et Abbatem de Lacu-Juriensi; super loco in quo Abbatia de Lacu sita est et super loco quem Pontius hermita cum suis incoluit sicut in instrumento dictorum Archiepiscoporum rationibus suis et finibus determinata continetur, approbamus et authoritate imperiali duximus confirmandam. Nostræ tamen intentionis existit quod per hoc viri dilecti fidelis nostri Ebali de Sarrata, domini Grandissoni fundatoris dictæ Abbatiæ de Lacu, in nullo derrogetur, declarantes, statuentes et eadem authoritate sancientes quod dictus Ebalus de Sarrata habet et habere debet jure hereditario ab antico et sibi authoritate Imperiali actribuimus et confirmamus et suis successoribus castrum et villam Sarratæ 2 tenentibus successive, merum et mixtum Imperium et omnimodam juridicionem in predictis locis et eorum territoriis ubicumque, et in illis partibus de Neiros-Joux 3, quas a nobis prefatus Ebalus tenet in feudum et a nostris predecessoribus ab antico, videlicet: a loco dicto Pierra-fuly 4 usque ad unam Leucam vulgarem prope lacum Quinssonez 5 secundum Vuaudi patriam limitandam, et a monte nuncapato Risso 6, qui est de versus Moutos 7, usque ad montem dictum Mont-Tendroz 8, qui pendet a partibus de Vuaudo sicut aquæ currunt et pendent a dictis montibus versus dictam Abbatiam et Lacus dictæ Abbatiæ, et versus aquam dictam Orbam 9, quam egressum suum habet a dicto Lacu Quinssonez 10, incedendo ad Lacum dictæ Abbatiæ 11. Statuentes in super, et eadem authoritate sancientes, quod predictus Ebalus et sui successores /192/ predicti possint et valeant ædifficare, levare seu construere in predictis locis et territoriis et limitibus ubicunque sibi placuerit, tanquam in rem suam, villam seu villas, domos, castra, fortalicia seu alia ædifficia, unum vel plura, et ea in solidum vel in parte reassumere vel recognoscere se teneri ab uno alio domino, salva et promissa duntaxat fidelitate nostra. Sancientes eadem authoritate: ut nulla omnino persona parva vel magna, secularis vel ecclesiastica hanc majestatis nostræ declarationem sancionem et confirmationem audeat infringere, nec aliquibus injuriis seu perturbationibus presumat actemptare. Ut autem hæc nostræ majestatis pagina rata consistat et in omni ævo inconcussa permaneat, eam conscribi fecimus et jussimus et sigillo nostro communiri. Hujus rei testes sunt: Martinus Viennensis Episcopus Rogerius Lausannensis Episcopus, Nantelmus Gebennensis Episcopus, Cono Damel Cappellanus noster. Datum apud Mülenhûsen, anno incarnacionis millesimo centesimo octuagesimo sexto, Indicione quinta, septima kalendarum septembris.
Cette Charte a servi plusieurs fois de document pour fixer la délimitation de la Suisse et du Canton de Vaud avec la France.
XXIII.
Transaction entre B., Evêque de Belley, Abbé de St-Claude, et Humbert, Abbé du Lac-de-Joux, par laquelle la redevance de 160 truites est convertie en un cens de 45 sols de Genève.
(Datée du 6 Janvier aº 1219)
(Grosse des droits de l'Abbaye du Lac-de-Joux, cottée Nº 29; aux Archives de Lausanne.)
Orta questione inter Ecclesiam Sancti Eugendi ex una parte et domum de Lacu de Cuarnens ex parte altera, pro centum et sexaginta truitis quas domus et canonici de Lacu annuatim Ecclesie Sancti Eugendi debebant, asserentibus canonicis se dictas truitas nulla ratione posse reddere pro et quod lucii in lacum a suis missi ita truitas consumpserant ut raro ibidem vix paucissime truite capi poterant, unde censum debitum penitus reddere non valebant, monachis vero pisces suos habere volentibus more solito et debito, tandem inter B. Bellicensem Episcopum et Abbatem Sancti Eugendi ac Humbertum Abbatem de Cuarnens de consensu monachorum Sancti Eugendi et monachorum de Lacu, mediantibus A. Priore de Alione et nobili viro Yblone de Montibus, compositio intersit et intercessit quod abbas et canonici de Lacu, pro centum et sexaginta truitis, quadraginta quinque solidos gebennensis monete abbati et conventui Sancti Eugendi annuatim et perpetue solvant censu /194/ quinque solidorum pro loco dompni Poncii et societate inter utramque domum firmata sicut in cartis utriusque partis continetur in suo statu et robore permanentibus, ita quod quinque solidi loco dompni Poncii et quadraginta quinque solidi pro aliis Abbati Sancti Eugendi et conventui in octabus Sancti Dionysii a dictis Abbate et canonicis de Lacu apud Sanctum Eugendum annuatim et perpetue solventur. Prœterea in amplioris caritatis et concordie signum et firmamentum hujus, inde est a partibus compromissum: ut neque Ecclesia Sancti Eugendi domui de Lacu vel suis, vel domus ipsa similiter Ecclesiæ Sancti Eugendi vel suis, aliqua causa nisi in sua propria se opponant, sed potius sibi invicem auxilium impendant. Hanc compositionem ego B. Bellicensis Episcopus et Abbas Sancti Eugendi totusque ejusdem Ecclesiæ conventus laudavimus; similiter Humbertus Abbas totusque conventus ejusdem Ecclesiæ de Lacu eam nihillominus laudaverunt. Hæc dictæ compositionis carta est per alphabetum divisa et pars quæ penes Sanctum Eugendum remansit Domini Lausannensis et Abbatiæ de Lacu sigillis est communita; pars vero illa quam Abbas et canonici de Lacu habent nostro et conventus Sancti Eugendi nihillominus insignita. Actum est hoc anno Graciæ millesimo ducentesimo decimo nono mensis Januarii, die Epiphaniæ. /195/
XXIV.
Lettre reversale donnée par B., Evêque de Belley et Abbé de St-Claude, en faveur d'Ebal, Seigneur de La Sarraz, pour garantie de ses droits sur l'Abbaye du Lac-de-Joux.
(Du 6 Janvier 1219.)
(Grosse des droits de l'Abbaye du Lac-de-Joux, cottée Nº 29, aux Archives de Lausanne.)
Nos B. Bellicensis Episcopus et Abbas Sancti Eugendi totusque conventus ejusdem loci notum facimus universis presentibus et futuris quod cum venerimus ad finalem concordiam cum Abbate et canonicis de Lacu de Cuarnens, mediantibus A. Priore de Alione et nobili viro Yblone de Mont, super centum et sexaginta truitas quas a dictis religiosis de Lacu de Cuarnens annualiter petebamus ad quadraginta quinque solidos gebennensis monetæ et pro loco dompni Poncii hermite ad quinque solidos nobis apud Sanctum Eugendum censualiter et annuatim solvendos per religiosos predictos, non per hoc volumus juribus quæ habent dicti religiosi et dominus Ebalus dominus de Sarrata fondator Abbaciæ de Lacu predicto in juriis et terminis dictæ Abbaciæ in aliquo derogare, confitentes et recognoscentes quod nos non habemus nec habere debemus aliquam juridicionem vel aliquod jus meri et mixti imperii in juriis et confinibus dictæ Abbaciæ nisi tantum per unam leucam vulgarem /196/ secundum Vuaudi patriam computandam ultra Lacum dictum Quincsonez, et a terminis dictæ leucæ prout Lacus de Cuarnens et aqua dicta Orbas se gerunt, et a Lacu et aqua predictis versus montem dictum Riso, et econtra ab alia parte versus montes de versus Vuaudi debet religiosis et fondatori predictis et suis successoribus omnimoda juridicio remanere in illis locis prout se gerunt per unam leucam vulgarem secundum Vuaudi patriam computandam. Nichil juris et juriditionis in juriis et terminis dictæ Abbatiæ superius limitatis Nobis et sucessoribus nostris retinentes, salvo nobis et nostræ Ecclesiæ perpetuo censu nostro predicto. In cujus rei testimonium nos Abbas et conventus Sancti Eugendi prenominati sigilla nostra apposuimus huic scripto. Datum anno Graciæ millesimo ducentesimo decimo nono, mense Januarii, die Epiphaniæ.
XXV.
(Voyez page 80, Nº 173.)
Donation de Landric, Evêque de Lausanne, au monastère de Haut-Crêt d'une cense à Chexbres.
(aº 1165)
(Archives de Lausanne, Inventaire Analytique vert, paq. Nº 181.)
In nomine Sanctæ et Individuæ Trinitatis. Ego Landricus de Gratia Dej Lausannensis Episcopus dilectis fratribus de /197/ Alcrest. Rei gestæ veritatem in perpetuum res et possessiones Pontificum recte tunc ordinantur cum in usus pauperum distribuantur; ideoque Ego Landricus Lausannensis Episcopus donum et elemosinam quam fecit domui de Alcrest fratribusque ibidem Deo servientibus predecessor meus bonæ memoriæ Amedeus Lausannensis Episcopus laudo et concedo, scilicet: tredecim annuales solidos quos Uldricus minister noster Bonifilius de Chebra annuatim, remota omni frustratoria occasione de officio ministerii sui, tamdiu reddere debetur, usque dum censum quem eidem Uldrico predicti fratres debent duorum modiorum frumenti et avene duorum modiorum alibi persolvendorum. Et ut hoc ratum et inconcussum permaneat, sigillo domini Petri Papiensis Episcopi et Legati Romani et impressione nostri sigilli munio et corroboro. Actum hoc solempniter in logia quæ est ante domum meam Lausannæ, presentibus et laudantibus dapiferis meis Lodoïco et Dalmatio et Petro d’Escublens, qui hujus rei testes sunt. Præter istos sunt adhuc testes: Petrus predictus Legatus et Johannes Abbas de Tela et Stephanus Monachus de Alta-Comba, Anno vero Dominicæ incarnationis 1165, Indictione tertia decima. Hoc autem factum est regnante Frederico Imperatore, Bertulfo rectore Burgundiae.
A l'occasion de l'intervention du Légat apostolique dans cet acte, nous donnons ci-après un arrêté Synodal émané de ce même légat, pour la réformation de l'Eglise troublée par le schisme du trône et de l'autel.
XXVI.
(Voyez p. 83.)
Charte de Pierre, Evêque de Pavie et Légat du siège apostolique, pour la restauration des Eglises du diocèse de Lausanne. (Ruchat, manuscrit Nº 39.)
(aº 1165.)
Petrus Papiensis Episcopus atque Sedis apostolice legatus, Lausannensisque episcopus, atque Gebennensis episcopus, audientes lapidationem persecutionemque ecclesiarum quæ sunt in Lausannensi episcopatu, ad hæc mala corrigenda insimul convenerunt, atque in nomine Sanctæ et individuæ Trinitatis perceperunt: ut quicunque septæ abbatie seu ecclesiarum violenter introierint excommunicentur, nec absolvantur quousque dampno, si quod intulerint, resarcito, auctoritate et arbitrio episcopi, apostolico se conspectui repentent et quemadmodum olim statutum est de his qui in personas clericorum, manachorum vel religiosorum, violentas manus injecerint. — De his autem qui substancias clericorum, monachorum vel religiosorum rapiunt, precepimus: ut ad quecunque loca predo vel preda devenerint, quousque ibi manserint, in illa tota /199/ parrochia divina officia non celebrentur et qui scienter eos vel predam receperit, post eorum etiam discessum, quousque dampnum restituat, ex officio divino excludatur. Si forte receptaculi illius ad quod predo vel preda devenerit unus sit dominus ad cujus potestatem ceteri spectent, ut predictum est, universi divino officio careant; si vero plures, ille solus excludatur cum suis ab ecclesia in cujus potestatem predo vel preda devenerit. Si quis predictorum infirmitate peroccupatus fuerit, et petenti et penitenti, Eucharistia in extremis non negetur; Verumtamen Christianorum careat sepultura quousque dampnum resarciat et condignam satisfactionem exhibeat.— De sacerdotibus vero et clericis qui premonstratam formam justicie exercere neglexerint, precipimus: ut ipsi dampna pro posse restituere cogantur et post restitucionen, condignam satisfactionem, secundum arbitrium episcopi et decani, XL dies ab officio suo suspendantur. Si quis vero canonicorum regularium et monachorum prememoratam districtionem justicie violaverint, ecclesie quam episcopatu possident, quousque ipsi ei dampna restituant et episcopo satisfaciant, a divino officio compellantur. Similiter et de administratoribus. Hospitalium observari jubemus. — (ex Ruchat, aº 1165.)
XXVII.
(Voyez page 92, Nº 206.)
Diplôme de l'Empereur Frédéric Ier, en faveur du monastère de Romainmôtier, daté de Palma.
aº 1178.
Fredericus Dei gratia Romanorum Imperator Summus Augustus. Cum essemus apud Pontalliam protulit nobis dilectus vir venerabilis Prior Romani-Monasterii Walcherius scripta Romanorum Pontificum et predecessorum nostrorum Regum et Imperatorum, quibus ostendebatur scriptis et benevolentia antecessorum virorum locus ille ad Dei servicium fuit fundatus et actus et protectus et in bono statu confirmatus. Et petiit a nostra celsitudine dictus prior ut nos quoque pari gratia eamdem ecclesiam fore et tuheri dignaremus.— Noverint quoque omnes Imperii romani fideles, tam presentes quam futuri, quod nos prefati Prioris congruis postulationibus, pro remedio autem animæ nostræ, benigne acquiescens prenominatum Romani Monasterium, quod est in Episcopatu Lausannensi situm, in nostram Imperialem tuitionem adeo clementer speciali gratia suscepimus ut ipsum loci illius Priorem et universos /201/ fratres de eodem monasterio et homines et universas ipsius Ecclesiæ pertinentias ab omni deinceps injuria ei violentia, tamquam res fisci nostri, salvos et securos et illæsos consistere volumus sub nomine pacis et protectionis aucte. — Confirmamus etiam eidem ecclesiæ, secum priori et monachis, omnia juria et possessiones quas actenus legitimo titulo tenet et possidet et ad tempora nostra eadem ecclesia improduxit et in futurum juste acquirere poterit, et sub pœna et periculum grande statuentes: ut nulla unquam persona magna vel parva presumat personas aut res ipsius monasterii et pertinentiis ulla rapina aut violentia vel exactione indebita vel injuriarum modo aut guerrarum perturbare. Ad cujus rei memoriale indicium, presentem Chartam fecimus conscribi et majestatis nostræ sigillo roborari. Datum apud Palmam, Aº Dominicæ incarnationis 1178.
(Double de l'acte: signé Pollens.)
XXVIII.
(Page 96, Nº 217.)
Traité de Roger, Evêque de Lausanne, avec Ulric, Comte de Neuchâtel, pour les fiefs qu'il tenait de son Eglise.
aº 1180.
(Bibliothèque cantonale de Lausanne, Ruchat, manuscrit tiré des Archives de Wufflens-le-Château.)
Rogerius Dei gratia Lausannensis Episcopus et Sedis apostolice Legatus, nobili viro Uldrico de Novo-Castro fideli suo, /202/ salutem. — Cum pro feudo quod est in Theutonica-terra 1 sæpe ad nos accessisses, ut illud tibi reddi sicut de more est, instanter postulares, nos, habito consilio cum fratribus et familiaribus nostris, illud secundum jus et consuetudinem Theutonicæ terre tibi reddimus, ut videlicet in mutatione personæ quæ debet feudum recipere decem libras Lausannensis monete nobis et successoribus nostris sine contradictione in perpetuum solvant, omnibusque de eodem feudo rationem petentibus in curia nostra respondebis, pro quo etiam tam tu quam successores tui ligii homines nostri et successorum nostrorum postmodum eritis, etc ... Aliud vero feudum, quod est in Romania-terra, secundum jus et consuetudinem Romane terre tibi pariter reddidimus.— Acta Lausannæ, ab incarnatione domini Anno Mo Co LXXXo, Indictione XIIIa, Epacta XXIIa, concurrente secunda, Alexandro Summo Pontifice, Frederico romano Imperatore. — Testes: Otto de Crissie, Nantelmus de Scublens, Theodoricus de Novo-Castro, Lausannenses Canonici et decani.
XXIX.
(Voyez page 69, Nº 144).
Enquête faite par Girard, Sire de Goumoëns, sur certaines donations faites par Richard de Montfaucon, Comte de Montbéliard, à l'abbaye du Lac-de-Joux.
Du XIIe siècle.
(Archives de Lausanne, Romainmôtier, T. II, Nº 323.)
Nobili viro Domino suo reverendo Aymoni domino de Montefalcone 1, Girardus dominus de Gumoyns 2 salutem et promptum ad omnia famulatum.— Novit nobilitas vestra quod, sicut precepistis michi, recipi et examinavi tres testes viros antiquos et fide dignos quos abbas et conventus de lacu produxerunt coram me et coram multis bonis viris super usamento quod habent in nemore nostro de Oriola 3, qui testes jurati concorditer dixerunt quod præsentes fuerunt, viderunt et audierunt quod Richardus, Comes de Mont-beliard, laudante Galchero fratre suo 4, dedit et concessit in elemosinam abbati et Conventui de lacu usamentum nemoris sui de Oriola ad opus grangiæ suæ de Oulens 5 et usamentum pascuorum in terra sua ad opus ecclesiæ de Lacu, et hæc donatio fuit facta apud /204/ Olleyns 6. Et, quia sigillum proprium non habeo, sigillum prioris Romanimonasterii præsentibus litteris feci apponi.
XXX.
(Voyez page 69, Nº 144.)
Déclaration de Hugues de Châlons, Comte palatin de Bourgogne, qui constate que le Sire Amé de Montfaucon tenait de lui en fief toute la châtélenie d'Orbe.
aº 1255.
(Archives de la Préfecture du Doubs, à Besançon, cottée O, Nº 26.)
Nos Hugues cuens Palazin de Bourgoigne et Nos Aliz comtesse Palazine façons savoir à tous ces qui verront ces présentes /205/ lettres que voirs (vrai) est que nostre féaux Ameys Sire de Montfaucon tenoit de nos en fye et en chasement ligement la moitié d’ Orbe et des appendices et l'autre moitié nos li avons donné en fye ligeet en chasement, si que il tient le tout d'Orbe et les appendices de nos ligement et il nous a quitté tote la raison et tot le droit que il avoit en Chastoillon nostre Chastel de les Boisençon et les appendices par raison de ces de Dhevroz et par quelconque autre raison. — Et aprez nos li avons donné en fye lige et en accroissance dou fye lige qu’il tient de nos Roulans nostre chastel et les fyes de Roulans, quanque nos y avons. Et totes ces choses devant dites il tient de nos ligement et les doit tenir de nos hoirs, il et sui hoirs, sauve notre raison à autres fyez que ci ne sont nommez que il tient ou doit tenir de nos ... En témoignage de ces choses nos avons fait sceller les présentes lettres de nos scels l’an de l’Incarnation de Jhesu-Crist 1255.
La maison de Montfaucon tenait une moitié d’Orbe dès la fin du XIIe siècle, au plus tard; le Comte palatin lui donne ici l’autre moitié en échange des droits qu’il avait à Châtillon, rière Besançon.
XXXI.
(Page 127, Nº 322.)
Donation de Guillaume II, Comte de Mâcon, en faveur du couvent de Romainmôtier, d'une charge de sel à Lons-le-Saunier.
aº1218.
(Archives de Lausanne, Romainmôtier Nº 7.)
Ego Wilhelmus comes Matisconensis 1 notum facio presentibus et futuris me dedisse fratribus deo et beato petro apostolorum principi in ecclesia que romanum monasterium dicitur servientibus pro remedio anime mee et antecessorum meorum, pro remedio etiam anime Galcheri filii Rodulfi de Monnet 2 quantum equus portare potest salis annuatim apud Lons in berua quam heredes Filiberti Rufi tenent. — Prefatus enim Galcherus in obsequio nostro apud villam que Orba dicitur defunctus fuit et in presentia nostra in supra memorata ecclesia a supradictis fratribus honorifice tumulatus. — Huius donationis testes sunt: Henricus filius meus 3, Petrus domnus de Cis 4, Johannes de Monnet, Guido, frater eius, et alii quamplures nobiles viri. Wilhelmus Marescalus noster. Actum anno incarnati verbi MoCCoXVIIIo. (1218.)
(Le sceau manque.)
XXXII.
(Page 144, Nº 374.)
Cession de l'Avouerie de Lausanne faite par Wernher et Hartmann, Comtes de Kybourg, à Aymon, Sire de Faucigny.
aº 1225.
(Archives royales de Turin.)
Notum sit omnibus tam presentibus quam futuris quod Comites de Chiburhe 1 Wernherus et H. 2 vendiderunt domino Haymoni de Fuciniaco advocatiam Lausannensem et omnia que pertinent ad eamdem, quam habuerunt jure hereditario a domino Duce /208/ Bertoldo avunculo eorum, et promiserunt eidem Aymoni garentiam et defensionem per omnia pro posse eorum et in omni Curia, et inde habuerunt tercentum marchas argenti, et eorum Consiliarii triginta marchas. Ad hoc fuerunt testes vocati et presentes: Giraldus et Henricus et Petrus fratres de Granciuno 3, Cono de Staviolo 4, Ulricus de Wippens, Cono de Pratis, Wilhelmus de Gressie. Ut autem quod actum est ratum et firmum in perpetuum habeatur predicti Comites presentem cartam sigillorum suorum munimine fecerunt roborari. Actum est hoc inter duas aquas 5 ante pontem de Oltudenges 6. Actum anno ab incarnacione domini MCCXXV. (1225.)
XXXIII.
(Page 145, Nº 375.)
Dirempta lis ob Advocatiam Lausannæ.
(18 et 2l juin 1226.)
Ce document vient d'être publié dans les Monumenta Historiæ Patriæ de Turin, T. I, p. 1291.
XXXIV.
(Pages 113, Nº 277.)
Transaction entre Odet, Abbé de St-Oyens-de-Joux, et Nicolas, Abbé de Bonmont, d'une, et le Seigneur d'Aubonne, d'autre part, concernant certaines montagnes, rappelant une inféodation de Berthold V, Duc de Zæringen, Recteur de Bourgogne.
(Du 4 Avril 1208.)
(Archives de Lausanne.)
Nous le frère Oddet de St-Oyens de joux, abbé, et Nicolas de Bonmont d’une, et Amédée de Villars, seigneur de Ste-Croix, Coppet et Aubonne, d’autre, savoir faisons que comme ainsi soit que différents fussent meus entre nous les dites parties sur ce que nous les prédicts Abbez comme étant indivis et ensemble associés dans les montagnes devant La Brissenche, spécialement: de la Seiche, Elenche, Amburnex, Brutena, la Forma et de Cossonay, et autres existantes dernier La Seiche, jusques à l’eau de l’Orbe et jusques au lac Quinsonnez, sommes possesseurs et paisibles Seigneurs utiles, tant au fied que jurisdiction et pasquerages des dites chaumes, et /210/ jouissons de tout accessoire de jour à aultre, ce que nous le prédit Amédée de Villars ne voulons en aulcune manière ainsi permettre, veu et attendu que nous, soit nos hommes et nos subjects pour nous, jouissons de la juridicque possession, et que nos Officiers usent et ont usé de Ia jurisdiction assérée indivise par les dicts Seigneurs Abbez sur icelles, et en outre de la haute-jurisdiction, en vertu de l’infeudation faicte à Seigneur Guerri, Jaques et Pierre, alors seigneurs d’Aubonne, l’an mille deux cents et huit, et le jeudi quatriesme Apvril, par seigneur Berthold quatriesme de Zeringue, 1 comme seigneur de Vaud, de toutes les montagnes existantes depuis le Mont-Marchia, dessus Montricher, du côté de bise, jusques au Mont-Salla inclus, et depuis ledit mont par certain chemin appelé du Vuargnie, et par le dit chemin jusques au milieu de l'eau de l'Orbe du costé de vent, et dès-là de l'eau de l'Orbe en-dessus, jusques au territoire des seigneurs des Monts, assérant que la possession des dits Seigneurs Abbez, de laquelle il n’appert d’aucun droit escript, n’empêche qu’il ne nous appartienne en vertu de nostre droit. Toutesfois par le traité de Seigneur François de Collombier et d’Amédée de Cossonay sommes convenus entre nous, assavoir: que nous le prédict Odet Abbé remettons et cédons au dict seigneur d’Aubonne tout le droict que nous avons dans les prédictes Chaulmes comprises et limitées dans la prédicte infeudation, moyennant soixante livres à nous remises et payées. Et nous Nicolas, Abbé de Bonmont, permettons au dit Seigneur d'Aubonne de se pouvoir et debvoir servir de la jurisdiction haute insolidement et de la moyenne et basse par indévis avec nous sans aucune contradiction. Et nous Amédée de Villars donnons et largissons au dit Seigneur Abbé de Bonmont la directe seigneurie sur les prédictes chaumes de la Seiche, Elenche, Amburnex, de Cossonay et Bruttinaz, avec les jurisdictions moyenne et basse par indivis avec nous et les nostres tant seulement, et non plus outre. Confessants moy le dit Nicolas, Abbé de Bonmont, que je n'ay aucung autre droict dans les aultres montagnes comprises en la dite infeudation, tant derrière la Seiche qu’autre part, hors ce que /211/ dessus par le dict seigneur de Villars donné et concédé. Et moyennant ce que dessus, nous confessons d'estre de part à part bien d’accord, et promettons pour nous et les nostres de jamais y contrevenir en manière que ce soit. C’est pourquoi nous avons scellé les présentes de nos sceaux accoutumés. Donné et faict à Aulbonne, au chasteau du dit Seigneur de Villars, le vingt-sixiesme apvril mille trois cents et un. (1301.)
Pour collat.-vidimée,
(Signé) LOUYS COUDURIER.
Pour copie,
(Signé) DUBOIS.
Notes relatives aux pièces justificatives
Pièce justificative nº 2, Note 1: Adalbert II de Grandson était fils de Lambert Ier, dernier Comte laïque du Pays-de-Vaud qui, étant tombé dans la disgrâce du Roi Rodolphe III, fut privé de cette dignité par ce monarque qui en revêtit les Evêques de Lausanne (aº 1011), et lui enleva en outre une partie de ses domaines le long du Jura, pour en enrichir le monastère de Romainmôtier. (Charte du 20 mars aº 1011. Voyez Monumenta hist. patriæ. T. 1, p. 384. ) Adalbert II eut de grands démêlés avec le monastère de Romainmôtier, à cause des biens dont il prétendait que sa famille avait été injustement dépouillée au profit de ce monastère. Le Pape Léon IX, passant à Romainmôtier au mois de septembre 1049, les religieux lui présentèrent la longue liste des griefs ci-dessus. On prétend qu'Adalbert ayant comparu devant le Pontife, celui-ci le réprimanda sévèrement et excommunia les usurpateurs des biens de l'Eglise. (Voyez Guillaume, hist. de Salins, T. 1, p. 39, nº 11). Néanmoins les querelles des Seigneurs de Grandson avec ce monastère se renouvelèrent plusieurs fois. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 2: Ce château existait encore à la fin du siècle (aº 1094 (Castellum Ferreris) sur un monticule situé non loin du village de Ferreires, audessus de la Tine de Conflens, qu'on appelle encore en Chatelar. Adalbert ayant dû abandonner ce château au couvent, ses descendans bâtirent, non loin de celui-ci, sur un sol qui leur appartenait en propre, le Donjou de La Sarraz qui subsiste aujourd'hui. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 3: Le village de Ferreires et le moulin du Crozet sur la Venoge. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 4: Agy. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 5: Champvent. Il semble évident que le château de ce nom, dont un attribue la fondation à la reine Berthe, n'existait pas encore et qu'il fut bâti plus tard par les Sires de Grandson. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 6: Odilon, Abbé de Cluny, gouverna ce monastère dès 994 à 1049 [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 7: Hugues, successeur d'Odilon, Abbé de Cluny, de 1049 à 1109. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 8: Bannens, village situé près de Pontarlier, en Franche-Comté, appartenait, ainsi que le village voisin de Ste-Colombe, au couvent de Romainmôtier. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 9: Le château de Montricher, dont on voit encore les ruines; le terrain sur lequel il fut construit dépendait du village de Mauraz, qui appartenait au couvent. [retour]
Pièce justificative nº 2, Note 10: On trouve au cartulaire de Romainmôtier, fº 10, le verbal du la visite du Pape St-Léon IX au monastère de ce nom, le Ve des Calendes d'octobre (27 septembre) 1049. [retour]
Pièce justificative nº 3, Note 1: Villars-les-Moines, au-dessus de Morat, où il y avait un Prieuré de l'ordre de Cluny. [retour]
Pièce justificative nº 3, Note 2: Le règne de Philippe Ier, Roi de France est indiqué ici parce que l'Abbaye de Cluny, où la Charte fut donnée, était en France. [retour]
Pièce justificative nº 3, Note 3: La retraite de Gérald de Villars, dans le monastère de Cluny, a peut-être quelque rapport avec celle de Hugues, Duc de Bourgogne, et de Guy, comte de Mâcon, qui se firent moines à Cluny, vers l'an 1078, avec 30 chevaliers. (Voyez Dunod, T. II, p. 145.) [retour]
Pièce justificative nº 4, Note 1: Rainaud II mourut aº 1105. Son père Guillaume II, dit le Grand, mourut aº 1087. [retour]
Pièce justificative nº 4, Note 2: Etienne, prieur de Romainmôtier, paraît dans d'autres Chartes, datées des années 1084, 1103 et 1108. [retour]
Pièce justificative nº 4, Note 3: Outre le bourg principal avec le château (castrum ), Orbe comprenait le faubourg inférieur (Vicus Orba) près du vieux pont de l'Orbe, où se trouvait l'hôpital, et le faubourg d'en-haut (Vicus Tavelis), appelé anciennement Taberna, Taverna ou Tavel, aujourd'hui En-Bosséâ. — Le Comte céda le bourg d'en-bas (Vicus Orba) au couvent de Romainmôtier, et retint le bourg principal (Castrum) et le faubourg supérieur (Vicus Tavelis) où résidait le Vidomne (Vice-Dominus) représentant du Comte. [retour]
Pièce justificative nº 4, Note 4: L'hôpital de Notre-Dame d'Orbe appartenait au Prieuré de Romainmôtier. Il avait été fondé et doté vers l'an 1000, par le Seigneur Rodolphe, Avoué de ce monastère. [retour]
Pièce justificative nº 5, Note 1: Le prieuré de Lutry, au Pays-de-Vaud, sur les bords du lac Léman. [retour]
Pièce justificative nº 5, Note 2: L'Abbaye de Savigny, en Lyonnais. [retour]
Pièce justificative nº 5, Note 3: St. Martin de Lutry. [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 1: Henri IV, qui abdiqua aº 1105. [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 2: Ulrich d'Eppenstein, qui fut élu Patriarche d'Aquilée aº 1086 et qui mourut aº 1121. [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 3: Wernher de Lentzbourg, marquis de Camerino et d'Ancône, aº 1093. (Voyez God. de Mulinen, Schweitzer. Geschichtforscher, Tome IV, p. 92.) [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 4: Hugues, élu Abbé de Cluny aº 1048, mort aº 1105 [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 5: Le monastère de Payerne. [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 6: Le Val-de-Travers, Canton de Neuchâtel. [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 7: Ces laïques (laïci) qui tenaient certaines terres en franc-alleu de la Couronne formèrent peut-être cette classe de francs-tenanciers qu'on appelait hommes-royaux ou hommes-royes, dans le Val-de-Travers. (Voyez de Montmollin, Mémoire sur le Comté de Neuchâtel, T. II, p. 173. ) [retour]
Pièce justificative nº 7, Note 8: Le Synchronisme de l'époque où les personnages nommés dans cette Charte ont régné la place entre les années 1093 et 1105. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 1: Il vivait aº 1111. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 2: Ils vivaient tous trois aº 1111. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 3: Arnay. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 4: Orbe. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 5: Payerne. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 6: Il vivait encore aº 1111. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 7: Bonvillars. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 8: Charvornai. [retour]
Pièce justificative nº 8, Note 9: B. de Bettens; il paraît comme témoin dans une Charte de l'an 1103. [retour]
Pièce justificative nº 9, Note 1: L’abbaye de Savigny, en Lyonnais. [retour]
Pièce justificative nº 9, Note 2: Le Prieuré de Lutry, au Pays-de-Vaud. [retour]
Pièce justificative nº 9, Note 3: Ste.-Mariae, Notre-Dame, église cathédrale de l'Evêché de Lausanne. [retour]
Pièce justificative nº 9, Note 4: Sancti-Martini. L’Eglise du Prieuré de Lutry était dédiée à St-Martin. [retour]
Pièce justificative nº 10, Note 1: Etrigny, Département de Saône et Loire. [retour]
Pièce justificative nº 10, Note 2: Terra Francorum. — Etrigny étant situé entre la Saône et la Grosne, la limite du Duché, fiefs de la Couronne de France, ne s'étendait donc pas de ce côté jusqu'à la Saône. [retour]
Pièce justificative nº 10, Note 3: Cette Charte doit être de la première moitié du XIIe siècle. Antérieurement, on trouve dans Dom Plancher, histoire de Bourgogne, (T. I, p. 272), Ponce de Glana, mentionné comme témoin à la suite du Duc Hugues et de Guillaume II, Comte de Bourgogne, dans une Charte en faveur de l'Eglise de Bèze de l'an 1076, et Raynald de Glana, dans une autre Charte de l'an 1101, comme vassal du Duc Eudes de Bourgogne, (L. C., p. 279, et preuves nº 46.) [retour]
Pièce justificative nº 12, Note 1: Romanimonasterii. [retour]
Pièce justificative nº 13, Note 1: Cospert ou Gausbert, nom du premier abbé du Lac de Joux. [retour]
Pièce justificative nº 13, Note 2: La vallée et le lac de Joux ont porté successivement divers noms, dont le plus ancien est Leona ou Liona, qui s'est conservé dans celui de la Lionnaz, ruisseau qui se jette dans le lac, près de l'Abbaye; puis Domus-Dei (en latin), puis Lac de Cuarnens, et enfin Lac de Joux. Le nom de Locus-Pontii, heremita, ou le Lieu-Poncet, aujourd'hui le village du Lieu, désignait la partie occidentale du lac du côté de Risoux, pour la possession de laquelle l'Abbaye eut un long procès avec le monastère de Saint-Claude, qui se termina en 1219, par une transaction qu'on trouvera plus loin. — Voyez la notice sur la vallée du Lac de Joux de M. le doyen Bridel dans le Conservateur Suisse, T. 6., page 79 et suivantes. [retour]
Pièce justificative nº 13, Note 3: Suivant l'acte ci-après de 1149 et un verbal de l'an 1408, cette piscine ou ce réservoir avait été construit de main d'homme, en retenant les eaux de l'Orbe, au-dessus des entonnoirs où elles se perdent, et forma plus tard le Lac-Brenet, lorsque ces entonnoirs eurent été bouchés. « Piscina existente in dicta aqua Orbe, in finitate dicti lacus a parte venti. » [retour]
Pièce justificative nº 14, Note 1: Bellevaux dans le Jorat, au-dessus de Lausanne, où l'abbé du Lac de Joux élablit une congrégation de religieuses Augustines, qui subsistat jusqu'au 15e siècle. [retour]
Pièce justificative nº 14, Note 2: Le Mont-de-Gourze et le mont au-dessus du Châlet-à-Gobet. [retour]
Pièce justificative nº 14, Note 3: Le Grenet est un ruisseau que l'on passe aux Cornes-de-Cerfs, l'affluent dont il est parlé ici vient du Châlet-à-Gobet, et bornait au nord-est le territoire concédé. [retour]
Pièce justificative nº 14, Note 4: Moyse, abbé de Bonmont. [retour]
Pièce justificative nº 14, Note 5: Puydoux. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 1: Cuarnens. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 2: Le Val-Molon est situé entre Mont-la-Ville et la Coudre. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 3: Montlaville. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 4: Colombier. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 5: Villars-Boson. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 6: Ferreyres. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 7: Bettens. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 8: Villars-Lussery. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 9: Suscevaz. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 10: Mathod. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 11: Rivas, entre Saint-Saphorin et Cully. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 12: Trévelin, près d'Aubonne. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 13: Domina Fina, c'est la femme d'Ebald II de La Sarra-Grandson, fondateur de l'Abbaye. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 14: Le Jorat. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 15: Le Mont-de-Gourze et le Mont au-dessus du Châlet-à-Gobet. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 16: Le ruisseau du Grenet coule près du Châlet-à-Gobet, et des Cornes-de-Cerf. [retour]
Pièce justificative nº 15, Note 17: Saint-Saphorin sur Morges. [retour]
Pièce justificative nº 16, Note 1: Chexbres. [retour]
Pièce justificative nº 16, Note 2: Rueyres, ferme et vignoble avec chapelle. [retour]
Pièce justificative nº 16, Note 3: Le Pape régnant aº 1141 était Innocent II et l'empereur Lothaire était mort depuis l'an 1137. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 1: Lacus quarnensis, le Lac de Joux. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 2: Le Lac-Brenet. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 3: De Corbières, (Canton de Fribourg. ) [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 4: De Villars-Lucery. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 5: Mont-la-Ville. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 6: Champagne. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 7: Bonvillars. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 8: Bettens. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 9: Montagny. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 10: Le moulin de Bornu près La Sarraz. [retour]
Pièce justificative nº 17, Note 11: Mont-le-Vieux. [retour]
Pièce justificative nº 18, Note 1: On lit dans un ancien verbal de l'an 1408: « Quemdam villagium appellatum Locus, vulgariter le Lieu-Poncet (aujourd’hui le Lieu), quod villagium ideo appellatum est le Lieu-Poncet ex quo de primis Pontius hermita, cujus reliqua et memoria nunc in vicinis honorantur quasi fuerit beatus, dictum villagium seu locum incoluit. » [retour]
Pièce justificative nº 18, Note 2: Les notes chronologiques ne s'accordent pas: l'an 1155 répond à l'indiction III, au concurrent V et à l'Epacte XV. — L'Indiction IV et l'Epacte XXVI, marquées dans la Charte, répondent à l'an 1156. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 1: Mont-Risoux. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 2: Vaulion. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 3: Mont-la-Ville. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 4: St-Saphorin sur Morges. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 5: Colombier. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 6: Lonay sur Morges. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 7: Echichens. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 8: Trivelin sur Aubonne. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 9: Allaman. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 10: Bougy. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 11: Bettens. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 12: Bretegny. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 13: Villars-Lussery. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 14: Rueyres, à Lavaux. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 15: Orny. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 16: Châtagneria, cercle de Coppet. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 17: Suscevaz. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 18: Montricher. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 19: Oulens. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 20: Bettens. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 21: Ste-Croix, au Jura. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 22: Bremblens. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 23: St-Germain. [retour]
Pièce justificative nº 20, Note 24: Vullierens. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 1: St-Claude. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 2: La Sarraz. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 3: Noires-Joux. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 4: Pierra-Fuly, ou Petra-Felix, grande forêt qui couronne l'entrée orientale de la vallée du Lac-de-Joux. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 5: Le Lac-des-Rousses. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 6: Le Mont-Risoux. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 7: Mouthe, en Franche-Comté. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 8: Le Mont-Tendre. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 9: L'Orbe. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 10: Le Lac-des-Rousses. [retour]
Pièce justificative nº 22, Note 11: Lac-de-Joux. [retour]
Pièce justificative nº 28, Note 1: On voit par une reconnaissance de Guillanme, Sire de Montagny, de l'an 1276 ou 1277, qu'on entendait par Terra Teutonica ou Vaudum Teutonicorum, le territoire limité d'un coté par le Chandon et le canal de la Broye, depuis le lac de Morat à la Sauge, et de l'autre par l'Aar et la Thièle, c'est-à-dire, ce que nous appelons aujourd'hui le Seeland. — Par cet acte, le Sire de Montagny reconnaît tenir en fief de l'Evêque de Lausanne les chemins publics, « strate publice a rivo qui vocatur Chandon usque super Longum-montem (le Längenberg, forêt sur Morat), et a lacu de Murato et cursum Broye usque ad Vaudum Teutonicorum ... advocatiam de Chiestres (Kezers) etc... » (Ruchat, manuscrit.) Les fiefs dont il est question dans la Charte de l'Evêque Roger consistaient en dixmes ecclésiastiques et dans le patronat de plusieurs Eglises du Séeland. [retour]
Pièce justificative nº 29, Note 1: Amé II de Montfaucon était fils puîné de Richard Ier, Comte de Montbéliard. [retour]
Pièce justificative nº 29, Note 2: Girard de Goumoëns vivait en 1228 et 1230. [retour]
Pièce justificative nº 29, Note 3: Nemus de Oriola; ce sont les bois de Bioley-Orjulaz, district d'Echallens, Canton de Vaud. [retour]
Pièce justificative nº 29, Note 4: Richard de Montfaucon et Gauthier son frère étaient fils d'Amé Ier de Montfaucon; Gauthier passa en Terre-Sainte aº 1199 et n'en est pas revenu. (Voyez de Chazot, généalogies de Bourgogne.) [retour]
Pièce justificative nº 29, Note 5: C'est Oulens, district d'Echallens. [retour]
Pièce justificative nº 29, Note 6: Oulens. [retour]
Pièce justificative nº 31, Note 1: Guillaume II, fils de Gérard Ier, Comte de Vienne et de Mâcon, et de Maurette, Dame de Salins. [retour]
Pièce justificative nº 31, Note 2: Rodolph de Monnet, Sire de Nay vivait aº 1184-1209. - Jean et Guy de Monnet, vivans aº 1203-1231, étaient ses fils. (Guillaume, histoire des Sires de Salins, Tome III, p. 33.) [retour]
Pièce justificative nº 31, Note 3: Henry de Vienne, fils de Guillaume II, Comte de Mâcon, et de S. de Champagne, mourut sans postérité. (Guillaume, l. c. T. Ier, p. 199.) [retour]
Pièce justificative nº 31, Note 4: Pierre, Seigneur de Ceys, vivait aº 1209-1235. (Guillaume, l. c. p. 213.) [retour]
Pièce justificative nº 32, Note 1: Kybourg. [retour]
Pièce justificative nº 32, Note 2: Hartmann, dit le vieux. [retour]
Pièce justificative nº 32, Note 3: Grandson. [retour]
Pièce justificative nº 32, Note 4: Estavayer. [retour]
Pièce justificative nº 32, Note 5: L'Aar et la Sarine. [retour]
Pièce justificative nº 32, Note 6: Oltingen, préfecture d'Arberg, Canton de Berne. [retour]
Pièce justificative nº 34, Note 1: Berthold Ve du nom et IVe recteur. [retour]
Table des matières
| Introduction | 11 |
| Rodolph de Rheinfelden, Ier Recteur | 26 |
| Berthold de Rheinfelden, 2e Recteur | 34 |
| Partage du Rectorat | 39 |
| Conrad de Zæringen, 3e Recteur | 54 |
| Berthold IV de Zæringen, 4e Recteur | 64 |
| Démêlés entre les Ducs de Zæringen et l’Evêque de Genève | 71 |
| Démêlés entre les Ducs de Zæringen et l’Evêque de Lausanne | 75 |
| Démêlés entre les Ducs de Zæringen et l’Evêque de Sion | 86 |
| Monastères de la Transjurane; leur position à l’égard du Recteur | 91 |
| Berthold V, 5e et dernier Recteur | 108 |
| Partage de sa succession | 133 |
| Pièces justificatives (voir la table des matières ci-dessous) | 150 |
Tables des matières des pièces justificatives
| 1 | Investiture du Comitat du Vallais, en faveur d’Hugues, évêque de Sion | 151 |
| 2 | Griefs du monastère de Romainmôtier contre Adalbert de Grandson et ses chevaliers | 153 |
| 3 | Donation en faveur de l’Eglise de Villars-les-Moines, près Morat | 156 |
| 4 | Donation d’une partie d’Orbe au monastère de Romainmôtier par le comte Rainaud II | 158 |
| 5 | Restitution du Prieuré de Lutry au monastère de Savigny, en Lyonnais, par l'empereur Henri IV | 159 |
| 6 | Donation de l’évêque de Lausanne, Lambert, à l’abbaie de Romainmôtier | 161 |
| 7 | Donation , par l’empereur Henri IV, de l’église du Val-de-Travers au monastère de Payerne | 162 |
| 8 | Plaid tenu à Orbe par Walcherius et Conon de Grandson | 164 |
| 9 | Accord entre Gérard de Faucigny et Ponce, abbé de Savigny, au sujet du prieuré de Lutry | 166 |
| 10 | Donation de Bernard de Glane au monastère de Cluny | 168 |
| 11 | Sentence de Gérard de Faucigny entre Ebal II de Grandson et les religieux de Romainmôtier | 169 |
| 12 | Désistement du dit Ebal | 171 |
| 13 | Charte de fondation de l’abbaie du Lac-de-Joux | 172 |
| 14 | Donation de l’évéque Guy à cette abbaie | 174 |
| 15 | Confirmation de cette fondation par le dit évêque | 176 |
| 16 | Donation faite à cette abbaie par Ardutius de Faucigny | 178 |
| 17 | Reconnaissance de l’abbé Etienne, au sujet des fondateurs de l’abbaie | 179 |
| 18 | Arrêt de l’archevéque de Tarentaise et de l’évêque de Lausanne au sujet du Lieu | 181 |
| 19 | Arrêt d’Etienne, archevêque de Vienne, de Pierre, archevêque de Tarentaise, et d’autres arbitres, entre les abbaies de St-Claude et du Lac-de-Joux | 183 |
| 20 | Bulle du Pape Alexandre III | 185 |
| 21 | Bulle de l’empereur Fréderic Ier | 189 |
| 22 | Diplôme du dit empereur eu faveur d’Ebal IV | 190 |
| 23 | Transaction entre Bénédict, abbé de St-Claude, et Humbert, abbé du Lac-de-Joux, pour 160 truites | 193 |
| 24 | Lettre reversale du dit Bénédict en faveur d’Ebal de la Sarra | 195 |
| 25 | Donation de l’évêque Landric de Lausanne au monastère de Haut-Crêt d’une cense à Chexbres | 196 |
| 26 | Charte de Pierre, évêque de Pavie, pour la restauration des églises du diocèse de Lausanne | 198 |
| 27 | Diplôme de l’empereur Frédéric en faveur du monastère de Romainmôtier | 200 |
| 28 | Traité entre l’évêque de Lausanne Roger et Ulrich, comte de Neuchâtel | 201 |
| 29 | Enquête de Girard, sire de Gumoëns | 203 |
| 30 | Déclaration du comte Hugues de Châlons | 204 |
| 31 | Donation du comte Guillaume II de Mâcon au couvent de Romainmôtier | 206 |
| 32 | Cession de l'avouerie de Lausanne à Aimon, sire de Faucigny | 207 |
| 33 | Transaction au sujet de cette avouerie | 208 |
| 34 | Transaction entre Odet, abbé de St-Claude , Nicolas, abbé de Bonmont, et Amédée de Villars, seigneur d’Aubonne | 209 |